NUMÉRO SPÉCIAL - DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS - Centre Antoine Lacassagne
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NUMÉRO SPÉCIAL 33 avenue de Valombrose 06189 NICE cedex 2 Tél. 04 92 03 10 00 Fax 04 92 03 10 10 Email : communication@nice.unicancer.fr C‘est à Lire Journal du Centre de Lutte Contre le Cancer de Nice N° 1 Site : www.centreantoinelacassagne.org DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS
DOSSIER ACTU - PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS EDITO Certains se diront : « On parle encore de la protonthérapie ? » Car effectivement, il n’y a pas que cette technologie, certes particulièrement innovante, qui caractérise le Centre Antoine Lacassagne. Il y a bien d’autres modalités de prise en charge, d’autres innovations, et d’autres spécificités que nous savons présenter et afficher institutionnellement. Mais aujourd’hui nous fêtons un anniversaire : cela fait un an que le premier malade a été pris en charge sur le site Ouest grâce au Proteus® One, et ce projet a été si complexe à faire aboutir qu’il méritait bien, pour ce qu’il représente pour notre établissement, qu’on puisse aujourd’hui évaluer où nous en sommes. C’est à la fois se féliciter du chemin parcouru bien entendu, mais également se préoccuper des enjeux à venir, car ils sont nombreux. Le coût d’acquisition du Proteus® One représente à lui seul ce que nous investissons en plus de 10 ans pour l’ensemble de notre établissement. Nous nous devons collectivement que l’opération technologique et technique soit un succès, ce qui signifie : • Que le nombre suffisant de patients doit être présent, grâce à une politique de partenariats nationaux et étrangers dynamique. Nous ne pouvons pas nous limiter aux seuls patients du Département des Alpes Maritimes, il faut aller en chercher d’autres ; • Que des travaux de recherche d’envergure soient conduits, afin de maintenir à Nice une lisibilité nationale et internationale permettant de conserver notre avance dans le domaine de l’innovation. Des possibilités d’investissements nombreux sont alors envisageables ; • Que les meilleurs professionnels présents soient dotés de parcours professionnels individuels leur permettant d’être aussi à la mesure des équipements innovants auprès desquels ils sont amenés à exercer au quotidien. La qualité professionnelle et la compétence sont un gage d’attractivité certain. Mais, et nous ne l’avons pas assez fait, la réussite du projet aujourd’hui est aussi l’aboutissement d’une aventure collective et humaine qu’il faut savoir reconnaître et saluer. Pour une fois il ne s’agira pas de s’adresser aux médecins, qui sont ceux qui représentent concrètement la réussite médicale hospitalo-universitaire du projet, mais à tous les autres… ceux qui les accompagnent au quotidien. C’est à l’ensemble de ces personnels qu’un remerciement particulier doit être adressé : • Les personnels techniques et logistiques, qui œuvrent au quotidien pour que les patients soient pris en charge dans les meilleures conditions possibles en appui des soignants, • Les personnels de soins et médicotechniques, qui ne parlent jamais d’eux sur le site Ouest mais qui font tout pour que l’activité se déroule avec un niveau de qualité des soins optimal, • Les physiciens médicaux, qui depuis l’origine sont présents, et ont eu la délicate responsabilité initiale de prononcer la validation permettant de démarrer de manière effective l’activité de protonthérapie. Ils évaluent, pour chaque patient, les doses de radiation à délivrer et effectuent un travail de contourage essentiel. La préparation des plans de traitement leur revient, et ils le font avec un niveau qualitatif qui est reconnu. Et le site Est ne doit surtout pas être oublié dans ces remerciements, car de nombreux acteurs participent aussi aux activités du site Ouest, que ce soit directement (au sein du Pôle de radiothérapie), ou indirectement (l’ensemble des services supports de l’établissement). Chaque acteur qui participe de près ou de loin au projet devra donc continuer de faire le nécessaire Loïc MONDOLONI Directeur Général Adjoint Directeur de la publication : Pr Joël GUIGAY I Comité de rédaction : Isabelle AUGIER, Laurence CHAMPION, Emmanuel DEMADE PELLORCE, Elisa FONTAINE, José GODFROY, Estelle JEGOT, Christine LOVERA, Loïc MONDOLONI, Olivier VILLACEQUE, Richard TRIMAUD I Ont participé à ce numéro : Isabelle AUGIER, , Pierre-Yves BONDIAU, Audrey CLAREN, Camille DAO, Jérôme DOYEN, Claudie DRELICH, Elisa FONTAINE, Anaïs GERARD, Loïc MONDOLONI, Lucas OPITZ, Gisèle PALAMINI, Marie VIDAL, Isabelle TARTAMELLA I Crédits photos : Centre Antoine Lacassagne Elisa FONTAINE - Jérémie PITOT - Patrick GAUTHEY I Maquette : www.medialpes.fr I Imprimé par : Fac Copies sur papier recyclé 2
DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS DOSSIER ACTU 2016 – 2017 : UNE ANNÉE D’ÉVOLUTIONS MAJEURES AU SEIN DE L’INSTITUT MÉDITERRANÉEN DE PROTONTHÉRAPIE (IMPT) Le système de protonthérapie de haute énergie besoins de l’activité en évolution constante ; cette offre a Proteus® One constitue une avancée technologique même été complétée en août 2017 par une maison d’hôtes innovante majeure par rapport aux systèmes déjà située avenue Sainte Marguerite avec laquelle le Centre a en place dans le reste du monde. signé une convention. Conçu par les sociétés IBA et AIMA, ce nouvel accélérateur est quatre fois moins lourd, il est aussi plus respectueux de l’environnement : il consomme huit fois moins d’énergie que Au niveau de l’organisation les machines actuelles, pour des performances identiques. Il Le process de radiothérapie s’est affiné grâce à représente une alternative attractive pour un coût nettement l’« apprivoisement » progressif de notre prototype par inférieur, et il préfigure un essor majeur de la protonthérapie l’ensemble des équipes, l’apprentissage et l’expérimentation dans les années à venir. Son énergie maximale de 230 MeV de ses performances. permet de traiter l’ensemble des tumeurs profondes du corps Il s’est personnalisé en fonction des populations ciblées : humain (jusqu’à 32 cm de profondeur). adaptation aux besoins des enfants et des familles, adaptation aux besoins des patients étrangers avec des Le premier prototype, installé à l’Institut problématiques de prise en charge financière, et parfois de Méditerranéen de ProtonThérapie (IMPT) du Centre langue à gérer. Antoine Lacassagne, a débuté son activité le 12 septembre 2016. En une année, de nombreuses Quatre circuits spécifiques « Protonthérapie Haute Energie » évolutions ont eu lieu tant au niveau des locaux, ont été identifiés (circuits adultes français et étrangers, qu’au niveau de l’organisation grâce à des circuits enfants français / étrangers avec ou sans anesthésie équipes expertes et pour des résultats efficients. générale) et une attention particulière a été apportée sur l’amont de la prise en charge du fait qu’elle conditionne l’orientation entre les différents circuits et le respect des Au niveau des locaux critères respectifs engagés. Les locaux de l’IMPT, bien que très bien structurés et décorés initialement, se sont embellis au cours du temps ; de De nouveaux partenaires nous ont rejoints en complément nouveaux stickers, dessins d’enfants, photos de voyage mises de notre recrutement niçois : Marseille (APHM), Montpellier en cadre... apportent toujours plus de gaieté dans le service. (ICM), venant s’ajouter à nos premiers partenaires : le La Consolata propose aujourd’hui plus de 20 chambres Centre Léon Bérard de Lyon, le Service Pédiatrie du CHU (dont 4 chambres pour les familles) afin de répondre aux de Nice associé à Lenval. 3
DOSSIER ACTU DOSSIER ACTU - PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS Les coordinations se sont structurées en interne et en Cet énorme travail prospectif de structuration s’est donc fait externe (notamment avec IBA) afin de garantir un process progressivement avec ardeur et parfois douleur ; mais les de traitement conforme, techniquement optimal, dans les obstacles ont su être dépassés grâce à l’énergie et la forte délais requis, et dans un environnement où l’offre se décline motivation de chacun à réussir et avancer. à partir d’origines multiples. Durant cette adaptation, des pratiques de qualité ont L’urgence a été repensée et encadrée sur un site dont émergé avec la confiance incontestable que suscite la l’isolement par rapport au Centre est une particularité, capacité à décrypter le fonctionnement d’une machine, et où l’hébergement des patients est non-médicalisé. Des comprendre et maîtriser ses contraintes techniques, voir simulations d’urgences pédiatriques en conditions réelles ses efforts et investissements aboutir via la satisfaction et le et pluridisciplinaires ont été mises en place grâce au Dr sourire de nos patients. En cela – les équipes ont toutes été Lucas OPITZ, anesthésiste réanimateur. Des process en cas formidables, impliquées, et grâce à elles aujourd’hui « on y d’urgence sur site et à la Consolata ont été formalisés et est arrivé » ; ce qui n’était pas un acquis aussi simple face des supports d’information sont remis aux patients et aux à tant d’innovations et de complexités à gérer. familles pour un suivi « 24h sur 24 » en coordination avec Le plaisir de travailler sur des équipements de pointe est les astreintes administratives du Centre. palpable; à noter que dans l’intervalle nous nous sommes dotés d’un Scanner 4D offert et inauguré en février 2017 Enfin et non des moindres, un up-grade informatique a été par la Fondation Stavros Niarchos, et d’un CyberKnife® de réalisé de l’ensemble du site et du Pôle de Radiothérapie dernière génération en octobre 2016. afin de permettre des échanges sécurisés inter-sites, inter- établissements : domaine encore à développer aujourd’hui. Par la présence de l’activité « Anesthésie Générale » sur le site, des coopérations se sont développées et une dynamique inter-équipes s’est instaurée avec le plus grand naturel et Avec des équipes expertes entre tous les corps de métiers; chacun investiguant son En Septembre 2016, nous débutions à deux patients traités domaine et se nourrissant du travail de l’autre. La confiance par jour ; la priorité étant axée sur les nombreux contrôles apportée par le grand professionnalisme des équipes de dose inhérents au démarrage d’un prototype et donc à la d’anesthésie en place est à souligner; il n’était évident pour sécurisation des traitements. Une augmentation progressive personne de se lancer pour le premier enfant, nouvelle a suivi en fonction ; 4 patients en traitement la deuxième machine, sur un site où l’isolement peut être un facteur de semaine, et ainsi de suite. stress supplémentaire. A ce jour, 84 patients ont été traités ou sont On ne peut terminer ce retour sans citer les nombreuses en cours dont 18 enfants et 9 sous Anesthésie associations qui nous ont aidés et continuent à le faire en Générale. organisant de nombreuses manifestations. Elles contribuent La pédiatrie est une des indications majeures car les qualités chaque jour à améliorer le cadre de nos traitements grâce à intrinsèques du proton permettent de réduire la dose leur participation à de nombreux achats ou réalisations, et d’irradiation, diminuant les effets secondaires immédiats nous les en remercions vivement : les Amis de Lacassagne, et à plus long terme comme l’apparition de cancers radio- les Harleys du Cœur, et maintenant Rhythm’s of 50 Club. induits. Que dire de plus… sinon que nous continuons tous les jours Ainsi de 2016 à 2017 : à construire ensemble ; conscients du chemin parcouru • 1 586 séances réalisées. mais aussi de celui qui reste encore à faire ; tous portés • 27 indications réfutées sur 102 planifiées par l’énergie d’un projet scientifique inspirant mais surtout • 6 demandes de patients étrangers retenues dont d’une très belle aventure humaine. 3 réorientées suite au passage en Comité Proton. Un recrutement pour l’instant évolutif qui s’amorce sur le plan international, et qui nous a amenés progressivement à étendre nos plages horaires suivant la montée en charge comme prévu…et à gagner en confiance. Un pic d’activité a été atteint cet été avec 21 patients traités par jour ; ce qui laisse présager une augmentation exponentielle de la demande dans les mois à venir. Ainsi, nous allons continuer à faire évoluer notre recrutement, soit le nombre de séances quotidiennes, d’une part en Dr Pierre-Yves BONDIAU, Isabelle TARTAMELLA, élargissant les indications, et d’autre part en augmentant le Claudie DRELICH, Gisèle PALAMINI périmètre de notre recrutement. 4
DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS DOSSIER ACTU TRAITEMENT PAR PROTONTHÉRAPIE LES INDICATIONS EN COURS Les indications de radiothérapie par protons sont historiquement des tumeurs rares représentées par les chordomes, chondrosarcomes, quelle que soit leur localisation (base du crâne, rachis, pelvis), les tumeurs primitives de l’œil (les métastases sont facilement traitées avec les techniques conventionnelles), et les tumeurs pédiatriques à priori non métastatiques, mais l’acte de remboursement autorise, selon les situations, à traiter certains enfants métastatiques. Deux situations cliniques : forte dose Catégorie 1 à proximité de tissu sain ou patient de (forte dose nécessaire à côté d’organes à risque): sarcomes, carcinome adénoïde kystique, carcinome longue espérance de vie épidermoïde de la base du crâne, On peut globalement regrouper les indications historiques en Catégorie 2 2 catégories : (longue espérance de vie): tumeurs bénignes comme les méningiomes, neurinomes, paragangliomes, adénomes de Catégorie 1 : tumeurs où une forte dose est nécessaire, l’hypophyse, maladie de Hodgkin et cancer du sein avec à proximité de structures très sensibles comme les irradiation cardiaque à risque, toute irradiation d’adulte structures nerveuses, d’où l’indication de chordome et de jeune avec longue espérance de vie. chondrosarcome où des doses proches de 74 Gy sont nécessaires. Dans cette situation l’arrêt brutal de l’irradiation Dans certaines situations cliniques, il est nécessaire de permise par les protons au-delà de la cible (Figure 1), permet comparer avec la radiothérapie conventionnelle pour de diminuer les doses aux tissus sains, en comparaison avec déterminer la meilleure technique. Il n’est pas toutefois sûr que les techniques conventionnelles, et même si les nouvelles la protonthérapie soit meilleure dans toutes les situations. En techniques (VMAT : Rapidarc®, Tomotherapy®) peuvent donner cas de doute nous sommes capables de le prédire grâce à la d’excellents résultats. réalisation de « dosimétries ». La dosimétrie est une évaluation de la dose qui sera délivrée par la technique d’irradiation. Elle est réalisée par les physiciens et dosimétristes sur un scanner et après la mise en place virtuelle de faisceaux d’irradiation sur l’ordinateur. Dans le cas suivant par exemple (Figure 2), une fillette de 5 ans a été traitée par radiothérapie pour un épendymome à une dose de 59,4 Gy en 33 séances : le plan d’irradiation de Tomotherapy (radiothérapie conventionnelle) prédit une dose moyenne à l’hypophyse de 25 Gy alors que la plan de protonthérapie prédit une dose moyenne de 1,5 Gy : il est Figure 1. Distribution de dose par radiothérapie conventionnelle (gauche) certain que le risque de troubles endocriniens est drastiquement versus une protonthérapie (droite) pour une tumeur cérébrale (masse orange) : l’arrêt de la distribution de dose au-delà de la cible en protons, permet de réduit dans ce cas avec la protonthérapie sans nécessité de diminuer l’irradiation du reste du cerveau (Gondi V. et al, Nature Reviews faire d’études cliniques supplémentaires (phase I, II ou III). Neurology 2016) Catégorie 2 : les enfants : ce sont des patients présentant une espérance de vie longue (cut-off non strict, estimé à 10-15 ans), donc susceptibles d’avoir des complications à long terme liées à la radiothérapie comme des tumeurs radio-induites (0,5% des patients à 15 ans), des complications endocriniennes par atteinte de l’hypophyse, des complications cognitives, auditives ou cataracte si irradiation cérébrale. Dans cette situation la protonthérapie permet de faire chuter la dose d’irradiation à l’ensemble du corps (appellée « dose intégrale »), ainsi qu’aux organes à risque (cerveau, hypophyse, aires cognitives, cristallin) permettant de prédire une chute de la survenue de ces complications. Figure 2. Jeune patiente de 5 ans traitée pour un épendymome à 59,4 Gy en 33 séances. Les dosimétries comparatives sont représentées sur une Dans ces 2 catégories, certaines tumeurs autres que celles coupe sagittale (Tomotherapy, gauche, Protonthérapie, droite). La flèche listées ci-dessus, sont aussi traitées par protons depuis une désigne l’hypophyse, les couleurs chaudes une dose élevées et les couleurs quinzaine d’années : froides une dose faible. 5
DOSSIER ACTU DOSSIER ACTU - PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS Historique du développement des indications sur le Proteus® One Contrairement à la radiothérapie Pour ces raisons le développement des indications traitées s’est fait de manière conventionnelle, du fait de la progressive : grande précision des protons, tout • Septembre 2016 : tumeurs non mobiles représentées par les tumeurs déplacement du patient au cours intracrâniennes, de la séance, toute modification • Novembre 2016 : tumeurs intra-crâniennes sous anesthésie générale, de tissu (sinusite, atélectasie), ou toute présence d’implant métallique • Janvier 2017 : tumeurs crâniennes proches des sinus, irradiation ORL peuvent entrainer une différence de unilatérale, distribution de dose très importante, • Mars 2017 : tumeurs crâniennes avec implants métalliques, pouvant ainsi surdoser certaines • Mai 2017 : tumeurs osseuses pelviennes. régions et sous-doser d’autres régions si on n’y fait pas attention. Dr Jérôme DOYEN, Dr Audrey CLAREN RÉFÉRENCE : Gondi V, Yock TI, Mehta MP. Proton therapy for paediatric CNS tumours - improving treatment-related outcomes. Nat Rev Neurol. 2016 Jun;12(6):334-45. doi: 10.1038/nrneurol.2016.70. Epub 2016 May 20. Review. LES AVANCÉES EN PHYSIQUE MÉDICALE SUR LE PROTEUS® ONE De la validation du Proteus® One pour le traitement des patients à la diversification des cancers traités en protonthérapie : une première année riche en défis humains et technologiques ! Le Proteus® One est composé d’un synchrocyclotron supraconducteur (S2C2) - conçu par les sociétés AIMA et IBA - qui produit des protons, associé à une ligne de transport embarquée sur une structure métallique (conçue par IBA) qui transporte les protons jusqu’au patient. Cette structure métallique, le bras isocentrique, tourne autour du patient, lui-même placé sur un robot, afin de pouvoir choisir le meilleur angle d’attaque pour atteindre la tumeur. Une histoire d’amour entre les charges positives et négatives au sein des détecteurs perturbent la mesure de la dose ! Le synchrocyclotron produit un faisceau pulsé à haute fréquence et chaque « paquet » de protons produit contient environ 700 fois plus de protons que dans un faisceau classique. En comptant les protons, on peut remonter à la dose délivrée. Lorsque les protons traversent le détecteur (chambre d’ionisation), ils créent des charges positives et négatives sur leur passage. Ces charges n’aspirent qu’à s’assembler mais aux bords de la chambre une anode et une cathode collectent respectivement les charges positives et négatives en un temps record et les en empêchent ! Du nombre de charges collectées, on déduit le nombre de protons incidents. 6
DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS DOSSIER ACTU La structure temporelle inédite du faisceau délivré par le S2C2 pose des problèmes… Le nombre important de protons par CATHODE « paquet » et le temps très court entre 2 paquets ne laisse pas le temps aux électrodes de collecter toutes les charges créées lors du passage des protons et une partie d’entre elles parviennent à s’unir. C’est ce que l’on appelle la recombinaison et à cause de ce phénomène, on sous-estime le nombre de protons qui ont traversé le détecteur, et donc la dose. ANODE Ces chambres d’ionisation étant utilisées dans la machine, pour compter le nombre de protons qui sortent ou pour mesurer la dose reçue par le patient, les physiciens ont estimé les effets de la recombinaison dans les chambres et ont trouvé la tension correcte à appliquer pour limiter cet effet de recombinaison. Figure1. Principe de fonctionnement d’une chambre d’ionisation Une autre technique de mesure de la dose : • Dès le deuxième mois d’ouverture de la machine, en les protons créent de la chaleur ! novembre 2016, les premiers enfants sous anesthésie Pour valider ces calculs, on a mesuré la dose avec une générale ont été pris en charge. Les techniques de technique de référence qui s’appuie sur un autre principe calcul de la dose ont dû être adaptées afin de prendre physique : ce n’est plus la différence de courant provoquée en considération le fait que le développement chez par le passage des protons que l’on mesure, mais la chaleur l’enfant est en cours, ainsi que le risque de second créée par les interactions des protons dans la cellule d’un cancer plus élevé chez les enfants que chez les adultes. calorimètre ! Les valeurs trouvées avec les 2 techniques sont presque • En mars 2017, avec l’acquisition d’un nouveau identiques, ce qui permet de valider les calculs de recombinaison scanner sur le site Ouest à la fin de l’année 2016, dans les chambres d’ionisation utilisées pour mesurer la dose on a pu commencer à prendre en charge des patients au patient, mais également de tous les Proteus® One. présentant des lésions intra-crâniennes avec implants métalliques installés par exemple lors de la chirurgie : les barres métalliques dans la nuque des patients ou une mâchoire reconstruite avec du matériel en titane. Le prototype du Proteus® One validé pour Ces implants métalliques provoquent des artefacts le traitement des patients sur les images qui perturbent le calcul de la dose. Un Grâce aux efforts combinés d’IBA et de l’équipe de Physique algorithme de correction de ces artefacts est aujourd’hui du Centre, le prototype du Proteus® One installé à Nice a disponible sur le nouveau scanner et permet de prendre pu être caractérisé et les défis technologiques associés ont en charge ces patients en protonthérapie haute énergie. été relevés pour assurer la prise en charge des patients en protonthérapie en toute sécurité. • On a également amélioré le processus de protonthérapie De fait, un an après le premier traitement à l’Institut adaptative. C’est-à-dire que l’on adapte le traitement en Méditerranéen de ProtonThérapie, IBA a aujourd’hui vendu 30 fonction des changements anatomiques qui surviennent Proteus® One et cette technologie a permis à plusieurs pays, pendant le traitement. Par exemple, pour les patients comme l’Espagne ou l’Inde, d’acquérir leur premier système présentant une tumeur près des sinus, une sinusite peut de protonthérapie et de pouvoir proposer à leurs patients cette être provoquée par les rayons et ce qui avant était de technologie autrefois confidentielle. l’air devient du liquide et donc doit être pris en compte La diversification des types de cancer traités pendant la pour le calcul de la dose. Ces changements peuvent première année d’activité En outre, des progrès ont été faits aussi être au niveau de la tumeur elle-même : en effet, sur la diversification des pathologies prises en charge en la tumeur peut diminuer pendant le traitement et il protonthérapie haute énergie : faut prendre en compte sa nouvelle forme. Toutes ces démarches permettent d’optimiser le traitement pour les • Les premiers patients traités présentaient des tumeurs patients, même en cours de traitement. de la base du crâne sans matériel métallique 7
DOSSIER ACTU DOSSIER ACTU - PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS Figure 2. Images obtenues avec l’algorithme de réduction des artefacts sur le nouveau scanner (gauche) et sans l’algorithme (droite) pour un patient présentant des barres en titane dans la nuque et des implants dentaires. Et les tumeurs extra-crâniennes alors ? En mai 2017, nous avons également mis en place les premiers traitements extracrâniens pour des tumeurs situées au niveau du sacrum. L’équipe s’est formée auprès de l’équipe du Centre de Protonthérapie de Trento afin de traiter les patients sur le dos (dans la majorité des centres de protonthérapie, les patients sont traités sur le ventre). En effet, cette position est d’abord plus confortable pour le patient, ce qui lui permet de se repositionner chaque jour avec plus de précision. En outre, il n’y a pas de mouvement induit par la respiration qui pourrait faire bouger la zone à traiter si on traitait sur le ventre. Par rapport à la radiothérapie conventionnelle, on irradie très peu l’appareil digestif, ainsi que la vessie ou le rectum (Figure 3), ce qui diminue considérablement les effets secondaires de la radiothérapie. Figure 3. Comparaison d’un traitement d’un sacrum en protonthérapie (à gauche) et en Tomotherapy (à droite). M. Bobin et al. Radiat Oncol. 2017 Jan 31;12(1):32. Et pour la suite ? Au cours de cette première année d’activité, le faisceau de protons a été caractérisé et validé pour les traitements en garantissant la dose au patient. Nous avons ensuite diversifié les localisations traitées et les progrès techniques ont permis de faire bénéficier de la protonthérapie haute énergie à plus de patients, autant des adultes que des enfants. Des projets de recherche et développement sont actuellement en cours pour prendre en charge des nouvelles localisations (cf. article « Perspectives d’avenir ») et continuer à investiguer le potentiel de cette nouvelle machine qu’est le Proteus® One. Marie VIDAL, Anaïs GÉRARD 8
DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS DOSSIER ACTU LE CIRCUIT PÉDIATRIQUE EN PROTONTHÉRAPIE Le fil rouge qui nous a guidé et que nous continuons de dérouler reste l’exigence MISSION PRINCIPALE DU POSTE DE de satisfaction et de qualité autour de notre nouvelle population : les enfants et MESAF familles, et notre forte motivation à tous de vouloir les accompagner du mieux Gérer le process de prise en charge du possible tant dans la dimension technique que soignante. patient et de sa famille dès la demande de traitement : constituer le premier contact Sur le versant soignant, la familiarisation avec l’univers de l’enfant et sa psychologie, celle des familles, dans un contexte de maladie, a été mobilisée ou relai avec le Centre et jusqu’à la fin du par l’apport d’experts du Centre comme Alexia TOSI, ou de formations traitement. dédiées (hypnose – sophrologie). Organiser et contrôler les préalables au traitement avant l’arrivée du patient et Naturellement la nécessité d’accompagnement des enfants et familles coordonner pour la gestion des rendez-vous depuis l’initiation du process et jusqu’à la fin du traitement de radiothérapie avec l’ensemble des partenaires associés. s’est imposée : le poste de « Manipulateur coordonnateur des Soins et Accompagnement des Familles » (MESAF) a été créé. Le MESAF est Accueillir l’enfant et sa famille sur les sites l’interlocuteur privilégié des familles - leur repère ; c’est l’axe autour duquel du Centre et la Consolata. toutes les coordinations préparatoires au traitement se structurent. Accompagner et informer le patient et sa famille tout au long de sa thérapie ; Ce poste est opérationnel sur site depuis juin 2016 et nous en sommes tous être leur interlocuteur privilégié sur le plan très fiers car il concourt à la maîtrise du process de fonctionnement à travers technique (hors médical) et relationnel. une démarche innovante et qualitative. Mme DRELICH l’occupe avec un grand professionnalisme, un investissement et une chaleur humaine de tous Etre l’interface entre les différents les instants, associée à Mme DURAND-CHAMAGNE qui, dans le même esprit intervenants dans le but d’optimiser la prise a commencé à se former pour la continuité de cette fonction en son absence. en charge du patient tout au long de son A travers cette organisation, se profile la gestion du circuit des enfants en traitement ; communication ascendante et amont de la prise en charge et durant tout le traitement. descendante. Etre à l’écoute des besoins et des demandes et les transmettre. Effectuer les consultations d’annonce L’enfant est ainsi attendu, reconnu, manipulateur PHE pédiatriques et les et accompagné dans sa singularité entretiens patient et/ou famille avec le sophrologue. 9
DOSSIER ACTU DOSSIER ACTU - PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS Circuit pédiatrique–type pour un enfant français • Initiation du Process : Web-conférence nationale pédiatrique avec validation de l’indication de Radiothérapie : orientation Protonthérapie. • Réception de la demande : étude médicale de la potentialité effective d’une Protonthérapie suivant les critères scientifiques connus à ce jour et la performance du Proteus® One. • Si OUI ; le patient est tracé et engagé dans le process de radiothérapie en attente de la validation technique de l’indication. Les éléments du dossier nécessaires à la prise de décision sont réunis. Le passage en Comité de protonthérapie est prévu. • Comité de protonthérapie (tous les lundis à 8h30) : visio-conférence entre l’équipe pluridisciplinaire référente protonthérapie haute énergie (PHE) et les partenaires radiothérapeutes associés à la protonthérapie (CLB, AP-HM, ICM...) afin de valider techniquement l’indication de PHE et/ou dans la négative proposer d’autres orientations de radiothérapie. La MESAF y assiste afin d’être informée et suivre les décisions sur tous les dossiers concernés. • La validation de l’indication de PHE pédiatrique constitue dès lors le signal de l’initiation de la formalisation interne du parcours de traitement. • Toutes les données utiles et nécessaires sont récupérées par la MESAF - auprès de tous les partenaires extérieurs - en conformité avec les exigences préalables au traitement défini : check-list qui intègre toutes les dimensions médico-psycho-sociales du patient. • Un pré-programme de RDVs est établi dont une consultation médicale Claudie DRELICH première pluridisciplinaire sur site, avec parfois la réalisation du scanner de repérage de radiothérapie dans la foulée. Une L’enfant est ainsi attendu, reconnu, et hospitalisation peut être prévue au CHU si nécessaire - notamment accompagné dans sa singularité si une chimiothérapie est à associer à la radiothérapie ou si la pose d’un broviac est nécessaire avant le traitement. La nécessité d’une D’une manière générale concernant la gestion anesthésie générale est anticipée. Dès la date du premier rendez- technique des traitements, elle se formalise vous prévu, la MESAF se met en relation avec la famille ; un lien se autour de groupes de travail pluridisciplinaires structure. Les premières informations sont données sur le déroulement d’experts qui se réunissent régulièrement du traitement, une écoute active est mise en place et les attentes notées pour aider à la résolution de problèmes, à afin d’organiser au mieux avec eux leur venue, l’hébergement, les l’évolution des pratiques, des moyens matériels soins adjacents et continus nécessaires, la continuité de la scolarité à ou des ressources humaines, et à l’analyse des instaurer sur place. Un profil de l’enfant est établi : goûts, préférences, causes des dysfonctionnements (CREXs), ou à jeux… l’amélioration de l’accompagnement (CREXs • Une consultation médicale multidisciplinaire à l’IMPT a lieu en pédiatriques) (déjà 4 organisés depuis 2017 ). présence de l’anesthésiste, du radiothérapeute et de l’onco-pédiatre si possible. La décision définitive d’anesthésie générale ou d’alternative A la fin du traitement et pour le clôturer à mettre en place est prise. symboliquement, un petit goûter « festif » est préparé par et avec les membres de l’équipe, • A la suite et le même jour, la consultation de la MESAF a lieu. Après la famille, et l’enfant. Un petit cadeau est offert. les échanges téléphoniques, la véritable rencontre se produit ; c’est un moment privilégié à la suite duquel une visite des locaux IMPT est En retour, les familles nous envoient leurs prévue, présentation des équipes, éventuellement accompagnement photos de vacances ou vidéos juste après à la Consolata. leurs traitements : on partage en équipe ces • Le reste du process se calque sur celui de la radiothérapie classique moments de joies retrouvées ; la plus belle des hormis une surveillance plus étroite et en coordination avec l’ensemble récompenses... de nos partenaires durant le traitement, et une « mise en scène » essentielle et ritualisée avant et après chaque séance : jeux, jouets, musique, projection en salle de comptines animées ou vidéo-clips Isabelle TARTAMELLA, Claudie DRELICH, pour les plus grands. Gisèle PALAMINI 10
DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS DOSSIER ACTU BILAN DE LA PREMIÈRE ANNÉE DE PRISE EN CHARGE ANESTHÉSIOLOGIQUE PÉDIATRIQUE Depuis septembre 2016, 18 enfants atteints de tumeurs cérébrales ont pu bénéficier d’un traitement par protonthérapie de haute énergie dont 9 sous anesthésie générale. Cette dernière activité a commencé en novembre dernier. Un traitement complet comporte 25 à 33 séances administrées sur une période de 6 semaines de façon quotidienne (5 jours sur 7). Nous avons donc pu effectuer environs 270 anesthésies générales en 10 mois. fluide du complexe parcours patient nécessite anticipation et adaptation. L’anesthésiste, en étroite collaboration avec le radiothérapeute et la coordinatrice, a un rôle essentiel à jouer. Nos patients habituels sont âgés de 18 mois à 7 ans. Nous sommes confrontés à l’isolement du site ainsi qu’à la spécificité de la pédiatrie. Ces derniers temps, plusieurs scientifiques ont émis l’hypothèse d’effets délétères d’une grande partie des agents anesthésiants sur le développement cérébral des jeunes enfants, surtout si administrés de façon itérative (apoptose de certaines cellules avec possibles troubles cognitifs à long terme). Nous essayons de Bien des défis se sont présentés à nous pour la mise en œuvre minimiser ces risques en proposant des techniques et un de ces activités et sont toujours au rendez-vous dans notre choix pharmacologique garantissant un maximum de sécurité quotidien : pendant le traitement et un réveil, et un retour à la vie normale rapide, tout en évitant la iatrogénie : si possible, une seule • Un véritable bloc d’anesthésie pédiatrique en conformité drogue par anesthésie générale, abstention de manipuler, avec les recommandations nationales et internationales autant que peut se faire, les accès veineux centraux. et la législation actuelle a été créé. Des importants Nous pratiquons fréquemment l’anesthésie par inhalation avec moyens, structurels (appareils, matériel, médicaments etc) Sévoflurane et avec utilisation d’un masque laryngé mais nous et humains (MAR et IADEs avec expertise pédiatrique) adaptons nos techniques à chaque enfant et ses besoins psycho- ont été alloués. L’autorisation de l’ARS pour une activité cliniques (alternatives en intraveineux, sédation). L’induction se anesthésique pédiatrique a ainsi pu être obtenue sans fait toujours en présence des parents. En effet, la participation aucune réserve. des parents dans le processus de guérison est fondamentale. • L’écriture et la formalisation de conventions de C’est ainsi que, dans un contexte de stress et d’inquiétude qui collaboration avec les hôpitaux niçois impliqués dans perdure pendant 6 semaines, des relations étroites avec les la prise en charge des enfants, souvent multimodale, patients et leur famille se créent : le défi humain est de taille ont été finalisées (CHUN, Hôpital Lenval). Ainsi, les pour instaurer une communication ouverte et des rapports de petits patients sont suivis cliniquement ou peuvent être confiance, essentiels pour le bon déroulement des traitements. hospitalisés à l’Hôpital Archet pour une chimiothérapie concomitante. Parfois ils sont pris en charge à Lenval Pour conclure, la prise en charge anesthésiologique des pour des investigations complémentaires (IRM), des petits enfants à la protonthérapie haute énergie depuis un an éventuels gestes opératoires (par exemple : sur les accès se distingue par des aspects spécifiques d’ordre technique, veineux centraux - DVI, Broviac etc.) ou des besoins de organisationnel et humain très intéressants et stimulants pour réanimation. La coordination et la communication entre notre profession. ces différentes institutions et les acteurs de santé relèvent d’un défi organisationnel : permettre un enchainement Dr Lucas OPITZ 11
DOSSIER ACTU DOSSIER ACTU - PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS PROTONTHÉRAPIE, LES PERSPECTIVES D’AVENIR De par l’avantage balistique des protons par rapport aux photons utilisés en radiothérapie conventionnelle, il existerait un avantage théorique pour le traitement de la plupart des tumeurs bénignes et malignes. Les avancées technologiques en radiothérapie conventionnelle adénocarcinomes du pancréas, carcinome hépatocellulaire, ont toutefois été très importantes ces dernières années, cholangiocarcinome, carcinomes de l’œsophage, de avec pour pas mal de patients, au moins une équivalence l’estomac, glioblastomes, métastases …) et en dehors d’essais d’efficacité avec la protonthérapie (adénocarcinome de thérapeutiques ou de situations particulières, il n’apparaît pas prostate, carcinomes gynécologiques, …). licite de traiter ce type de tumeurs. Si par contre il est impossible En revanche, la protonthérapie pourrait permettre d’augmenter d’irradier la tumeur en radiothérapie conventionnelle avec les la dose à la tumeur afin peut-être d’augmenter le contrôle doses usuelles à cause de son volume ou de sa localisation car tumoral. risque de toxicité aux tissus sains, la protonthérapie pourrait être une bonne alternative. Pour beaucoup de tumeurs, l’intérêt de l’escalade de dose n’a toutefois jamais été démontré (carcinomes bronchiques, Des nouveaux traitements et plus de cancers pris en charge à la clé Parmi les indications actuelles (cf. l’article traitement par prontherapie les indications en cours p11) il n’est pas encore possible techniquement de traiter certaines localisations, pour lesquelles des développements seront prévues dans les mois/ années à venir : 1) Certaines tumeurs thoraciques qui sont mobiles comme Figure 1. Coupe sagittale de scanner, couleurs bleues : faible dose d’irradiation, couleurs rouges : fortes doses : les protons à droite délivrent les adénocarcinomes mammaires, le mésothéliome et la beaucoup moins de dose qu’à gauche, pour les photons, notamment sur maladie de Hodgkin, avec risque d’irradiation cardiaque. l’oesophage et le larynx et les muscles du cou (Jakobi A et al, 2015) 2) Irradiation de tumeurs inférieurs à 3-4 cm : en effet, Figure 2. Distribution les méthodes de calcul de dose actuellement utilisées au de la dose dans le cas Centre Antoine Lacassagne ne permettent pas de calculer d’un medullobastome selon le type de particule précisément la dose délivrée à la tumeur. utilisée (protons à gauche, photons à droite) ; coupe sagittale de scanners (Suit 3) Irradiation de certains carcinomes épidermoïdes de la H et al, 2003). tête et du cou (ORL) et du cavum : de nombreuses études ont montré que la protonthérapie pouvait diminuer chez 40-60% des patients, la dose reçue par les tissus sains par rapport à la meilleure technique de radiothérapie conventionnelle (Figure 1). 4) Irradiation de très grands champs d’irradiation comme l’irradiation craniospinale de certaines tumeurs de l’enfant (médulloblastome). La protonthérapie permet de mieux épargner les tissus sains par rapport à la meilleure technique de radiothérapie conventionnelle, par exemple on voit sur la Figure 2 ci-contre que grâce à la protonthérapie, le système nerveux est traité sans irradier les organes antérieurs de Figure 3. Effet de la distance d’air sur la distribution de la dose : comme l’enfant (cœur, poumons, foie, glandes mammaires, intestin, un phare de voiture dont la lumière s’étale d’autant plus qu’on est loin thyroïde). du phare. 12
DOSSIER ACTU PROTONTHÉRAPIE HAUTE ÉNERGIE 1 AN APRÈS DOSSIER ACTU Les solutions techniques envisagées 2) Nécessité de contrôler la position du patient avec des Certains outils techniques seront nécessaires pour le techniques sophistiquées : du fait de leur grande précision développement de ces indications. les faisceaux de protons sont très sensibles à des petites variations de position du patient, et de densité (apparition sécrétion, disparition de la tumeur) ce qui peut provoquer une 1) Pour les irradiations ORL, les épaules du patient sont en modification importante de la distribution de dose (Figure 5). général gênantes pour s’approcher au plus près de la surface Comme en radiothérapie conventionnelle, il existe pour la du patient et la distance entre le nez du bras isocentrique par protonthérapie un système d’imagerie embarquée, qui permet lequel sort le faisceau et le cou à irradier est importante. Cette d’acquérir une image 3D du patient avant chaque traitement distance d’air qui sépare la peau du patient de la sortie du pour le comparer au scanner 3D de planification et de calcul faisceau provoque un étalement de la dose une fois arrivée de la dose. Ce système, le Cone Beam Computed Tomography sur la cible, ce qui augmente la dose délivrée aux tissus sains (CBCT), permet de déceler des erreurs de positionnement plus (Figure 3). fines et des changements anatomiques. Le nez du bras isocentrique par lequel sort le faisceau de Le scanner de surface corporelle permet de vérifier l’angle de protons est en général très encombrant et c’est pour cela qu’il position de la nuque, de la bouche et de l’ensemble des structures existe la possibilité de lui ajouter un bec plus petit (Figure 4) qui du corps qui peuvent modifier également, selon la position, la permet de s’approcher au plus près du patient et de délivrer un dose distribuée et cela en quelques minutes (Figure 6). traitement optimisé. En outre, ce système nous permet de contrôler que le patient ne bouge pas pendant la séance. A terme ce système peut donc servir pour contrôler la respiration des patients et éventuellement étendre le traitement des tumeurs mobiles en protonthérapie, comme les tumeurs thoraciques. Figure 4. Le bec, plus petit Références : Jakobi A, Bandurska-Luque A, Stützer K, Haase R, Löck S, que le nez, Wack LJ, Mönnich D, Thorwarth D, Perez D, Lühr A, Zips D, Krause M, permet Baumann M, Perrin R, Richter C. Identification of Patient Benefit From Proton d’approcher au Therapy for Advanced Head and Neck Cancer Patients Based on Individual plus près and Subgroup Normal Tissue Complication Probability Analysis. Int J du patient et de Radiat Oncol Biol Phys. 2015 Aug 1;92(5):1165-1174. doi: 10.1016/j. délivrer moins ijrobp.2015.04.031. Epub 2015 Apr 23. Suit H, Goldberg S, Niemierko de dose aux tissus A, Trofimov A, Adams J, Paganetti H, Chen GT, Bortfeld T, Rosenthal S, sains. Loeffler J, Delaney T. Proton beams to replace photon beams in radical dose treatments. Acta Oncol. 2003;42(8):800-8. Original CT Modified CT Originally planned Dose recalculation dose ditribution on modified CT Figure 5 : sur cette image de tumeur ORL irradiée, la tumeur encerclée a disparu, causant une modification de position du faisceau de proton de plusieurs cm, causant une modification de distribution de dose de plusieurs cms, avec une irradiation trop importante des tissus sains. Sur la Figure 6 ci-dessus, le système de scanner de surface corporelle projette sur la peau du patient en rouge les zones mal positionnées et en vert les zones bien positionnées; les zones rouges deviennent vertes en temps réel une fois que le Dr Jérôme DOYEN, repositionnement correct est acquis. Grâce à ce système on peut repositionner parfaitement le patient au début de la séance. Marie VIDAL 13
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