OSTEPOROSES DE CAUSE ENDOCRINIENNE

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                OSTEPOROSES DE CAUSE
                           ENDOCRINIENNE

            CLAUDE RIBOT ET FLORENCE TREMOLLIERES

Claude Ribot
Florence Trémollieres
Centre de Ménopause et Maladies Osseuses Métaboliques
Hôpital Paule de Viguier
330, Avenue de Grande-Bretagne
TSA 70034-31059 Toulouse cedex 9
Tel: 05 67 77 11 85
Fax: 05 67 77 11 84
Email : ribot.c@chu-toulouse .fr
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   I-Définition.
   L’ostéoporose est définie comme une fragilité excessive du squelette liée à une diminution
   du contenu minéral osseux et des altérations de la micro architecture osseuse qui
   augmentent le risque de fracture.
   La relation établie entre la baisse de la densité (DMO) et l’augmentation du risque de
   fracture, a conduit en 1994 à une définition « densitométrique » de l’ostéoporose, sur la
   base d’un T-score inférieur à –2,5 écarts-type de la valeur moyenne de l’adulte jeune. Il
   faut remarquer que cette définition n’est valable que pour les femmes et pour une mesure
   de densité osseuse réalisée par absorptiométrie biphotonique à rayons X ou DXA (Dual
   Energy X-ray Absorptiometry).
   II-Classification.
   L’ostéoporose est une pathologie à prépondérance féminine, mais n’épargne pas les
   hommes ches lesquels elle représente un problème relativement commun. Les
   ostéoporoses sont classiquement divisées en 2 catégories :
   -   L’ostéoporose primitive ou commune : subdivisée chez la femme en ostéoporose
       postménopausique (type I) et ostéoporose sénile (type II). Chez l’homme, par
       convention, on parle d’ostéoporose « idiopathique » avant 70 ans et d’ostéoporose
       « liée à l’âge » au-delà de 70 ans.
   -   Les ostéoporoses secondaires, qui peuvent relever d’étiologies multiples (cf. tableau
       1).Les principales endocrinopathies entraînant un risque accru d’ostéoporose sont
       d’abord celles qui exposent à une diminution de la production des stéroïdes sexuels.
       Tout état d’hypogonadisme, quel que soit son mécanisme, représente donc un facteur
       de risque d’ostéoporose. Cependant de nombreuses autres hormones sont impliquées
       dans la régulation du remodelage osseux ou de façon plus globale dans l’homéostasie
       du calcium .Des anomalies de leur production peuvent favoriser le développement
       d’une ostéoporose. C’est le cas des hyperthyroïdies, de l’hypercortisolime, de
       l’hyperparathyroïdie qui constituent les causes endocriniennes les plus fréquentes des
       ostéoporoses secondaires.
Les nouveaux moyens d’évaluation de l’atteinte osseuse (DXA, marqueurs biologiques du
remodelage osseux) et le développement des nouveaux traitements anti-ostéoporotiques ont
contribué à améliorer le diagnostic précoce et la prise en charge des conséquences osseuses
des maladies endocriniennes.
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III-Etiologies

1 - LES ETATS D’HYPOGONADISME (EN DEHORS DE LA MENOPAUSE)
La carence estrogénique provoque une augmentation de l'ostéoclastogénèse et de l'activation
des ostéoclastes, qui augmentent la résorption osseuse et donc la perte osseuse. La gravité de
l'atteinte osseuse dépend de l’intensité et de la durée de l'hypogonadisme. Elle est d'autant
plus marquée que l'hypogonadisme survient précocement, au cours de la période pubertaire,
période d'acquisition du capital osseux. De plus, la présence d'autres facteurs de
déminéralisation comme les carences nutritionnelles, contribue à aggraver l'atteinte osseuse
de certains hypogonadismes.
A – L’ANOREXIE MENTALE
Physiopathologie de l’atteinte osseuse :
Il s’agit d’une ostéoporose à bas niveau de remodelage. Les marqueurs biochimiques de la
formation osseuse (iso-enzyme des phosphatases alcalines, ostéocalcine)sont le plus souvent
diminués Les marqueurs de la résorption (CTx, NTx) sont normaux, parfois élevés.
L’origine de l’ostéoporose est multifactorielle : la carence œstrogénique reste le principal
facteur de perte osseuse mais les troubles nutritionnels entraînant une carence calcique, une
hypo-protidémie, une diminution de l’IGF-1 et de la sécrétion de leptine (diminution de la
masse grasse) jouent un rôle aggravant. Un hypercortisolisme est également souvent retrouvé
malgré l’absence de signes cliniques.
. Masse osseuse et risque fracturaire :
L’ostéoporose est fréquente dans l'anorexie mentale. Une ostéopénie (
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que l’apport calcique n’ont que de peu d’impact sur le niveau de la DMO. Des essais
thérapeutiques récents avec des bisphophonates (risédronate, l’alendronate) ont permis de
montrer des gains significatifs de l’ordre de 4-5% au terme de 9-12 mois de traitement

B - ACTIVITE PHYSIQUE INTENSIVE
Physiopathologie de l’atteinte osseuse :
Les femmes sportives soumises à une activité physique trop intense peuvent développer une
hypo-œstrogénie d’origine hypothalamique. Les facteurs retrouvés dans l’anorexie mentale
(hyperactivité, conduites alimentaires restrictives) sont souvent présents.
Les facteurs conditionnant l’atteinte osseuse sont :
   - le type et l’importance de l’activité sportive : marathon, danse classique (jusqu’à 60 %
d’aménorrhée), demi-fond, triathlon, gymnastique, cyclisme. (alors que natation et les sports
collectifs sont moins en cause).
   -   L’importance et la fréquence des troubles du cycle menstruel
   -   Des apports alimentaires réduits ou insuffisants.
Masse osseuse et risque fracturaire :
L’atteinte osseuse est de répartition inégale du fait de l’intrication des facteurs endocriniens et
mécaniques sur le remodelage osseux. Les contraintes mécaniques stimulent l’ostéoformation
sur des sites porteurs; à l’inverse, l’hypo-œstrogénie est responsable d’une résorption osseuse
généralisée, bien qu’à prédominance rachidienne. Il existe également une plus grande
fréquence des fractures de fatigue qui sont favorisées par la diminution de la DMO.
L’ostéoporose est parfois sévère et multifracturaire, conduisant à l’arrêt des activités
sportives. Elle apparaît réversible avec le retour à la reprise spontanée des cycles menstruels,
souvent lors de la réduction de l’activité physique
Prévention et traitement :
Il est nécessaire d'informer l'athlète de l'impact potentiel des troubles du cycle sur le squelette.
Si une aménorrhée s'installe et si la diminution de l'activité physique n'est pas possible, la
mise en route d'un traitement par les œstro-progestatifs représente une solution de choix.
L'athlète doit également être sensibilisé vis-à-vis des déséquilibres nutritionnels et de
l'importance de lutter contre les carences d'apport.
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C - PATHOLOGIES HYPOPHYSAIRES
Toute lésion hypophysaire (tumorale, infiltrante, iatrogène, traumatique…) provoquant une
atteinte (réversible ou irréversible) de la fonction gonadotrope peut avoir des conséquences
osseuses. Les hyperprolactinémies d’origine tumorale (micro- et macro-prolactinomes) ou
fonctionnelles représentent les causes les plus fréquentes d’aménorrhée hypophysaire.
Physiopathologie de l’atteinte osseuse :
La perte osseuse est liée à l’hyperactivité ostéoclastique secondaire à la carence estrogénique,
et sera variable en fonction de l’intensité et de la durée de l’hypoestrogénie. En dehors de leur
impact sur l’axe gonadotrope, les atteintes hypophysaires et en particulier les tumeurs
hypophysaires autres que les prolactinomes (adénomes gonadotropes, à hormone de
croissance, adénomes non sécrétants…) n’ont pas d’impact propre sur le remodelage osseux
(à l’exception des tumeurs à ACTH dont l’impact osseux est secondaire à l’hypercortisolisme
surrénalien [maladie de Cushing]).
Masse osseuse et risque fracturaire :
Au plan clinique, l’installation d’une aménorrhée doit conduire à évaluer l’impact osseux qui
concerne surtout l’os trabéculaire(rachis dorso-lombaire). La perte osseuse est souvent rapide
de l'ordre de 5 à 8 % par an, d'autant que l'hypogonadisme survient chez une femme jeune.
Les possibilités de récupération osseuse sont très variables en fonction des capacités de
récupération de l’axe gonadotrope (reprise spontanée des cycles menstruels), de l’étiologie de
l’atteinte hypophysaire, de la durée de l’aménorrhée, de l’âge et du statut osseux antérieur.
Prévention et traitement :
La prévention de la perte osseuse est fonction de la réversibilité prévisible de la pathologie
hypophysaire (correction de l’hyperprolactinémie notamment), de la durée antérieure de
l’aménorrhée, de l’âge et du statut osseux sous-jacent. Chez les femmes non ménopausées,
l’estrogénothérapie sera privilégiée en première intention et sous réserve des contre-
indications classiques (essentiellement des macroprolactinomes). En cas de contre-indication
au traitement hormonal, un autre traitement (bisphophonates, SERMs, ranelate de strontium)
sera discuté en fonction de l’importance du risque fracturaire.

D-    HYPOGONADISMES              IATROGENES :          AGONISTES          DU     GNRH          ET
INHIBITEURS DE L’AROMATASE.
Tous les traitements diminuant la production des estrogénes (ou des androgènes chez
l’homme) constituent des facteurs potentiels d’augmentation du risque fracturaire. C’est le cas
des agonistes du GnRH, utilisés dans le cadre de pathologies utérines (endométriose,
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fibromes) et des inhibiteurs de l’aromatase, nouveaux agents thérapeutiques du cancer du
sein. Une mesure de la DMO peut être préconisée avant ces traitements, car la perte osseuse
peut être rapide, pour permettre une prévention adaptée en fonction du niveau de risque.

E - DYSGENESIES GONADIQUES
Le syndrome de Turner est la dysgénésie gonadique féminine la plus fréquente, sa prévalence
étant de l’ordre de 1/2500 filles à la naissance
Masse osseuse et risque fracturaire :
Une diminution de la DMO est fréquente dans le syndrome de Turner ; mais peut être liée en
partie à la petite taille des pièces osseuses. Chez l’enfant en période pré-pubertaire, la densité
minérale osseuse mesurée par DXA apparaît normale lorsque la valeur est corrigée par la
taille staturale Il existerait néanmoins une diminution de plus de 1.5 ET de la densité osseuse
mesurée par scanner dans 15 à 20 % des cas, sans qu’il soit possible de déterminer s’il s’agit
d’un trait phénotypique du syndrome de Turner ou du retentissement de l’hypoestrogénie pré-
pubertaire. Au cours de l’adolescence, le déficit osseux apparaît s’accentuer du fait de
l’hypogonadisme avec une augmentation du remodelage osseux secondaire à la carence
estrogénique. Chez l’adulte non traitée, l’insuffisance ovarienne accentue la perte osseuse et il
existe une augmentation du risque de fracture.
Prévention et traitement :
Le traitement est avant tout basé sur la correction de l’hypogonadisme et l’estrogénisation est
proposée dès que le diagnostic est posé, actuellement le plus souvent en association avec un
traitement à l’hormone de croissance de manière à améliorer le pronostic statural. A l’âge
adulte, la poursuite d’un traitement hormonal permet la prévention de la perte osseuse.

II-     HYPERTHYROIDIES                ET      TRAITEMENTS             PAR        HORMONES
THYROIDIENNES
L’hyperthyroïdie constitue une cause classique d’ostéoporose secondaire. De nos jours, la
précocité du diagnostic et l'efficacité des traitements font que la phase d'hyperthyroïdie est
souvent transitoire et les signes osseux exceptionnellement révélateurs ou au premier plan.
L'hyperthyroïdie reste une des causes fréquentes d'ostéoporose secondaire, surtout chez le
sujet âgé ou la femme ménopausée. Elle est souvent pauci-symptomatique, ce qui justifie le
dosage systématique de la TSH dans la recherche étiologique d'une ostéoporose secondaire.
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Les traitements par les hormones thyroïdiennes (HTs) font partie des traitements hormonaux
les plus communément administrés chez la femme. Le risque osseux de ces traitements paraît
cependant faible.
. Physiopathologie de l’atteinte osseuse :
Les hormones thyroïdiennes augmentent le remodelage osseux (figure1). Cet effet résulte
d'une augmentation du recrutement des unités élémentaires de remodelage (Bone
Multicellular Unit ou BMU) et de leur fréquence d'activation. Il existe une balance négative
entre résorption et formation osseuse qui prédomine sur l'os cortical où l'on note une
augmentation du diamètre des canaux de résorption conduisant à une accentuation de la
porosité corticale et à une réduction de l'épaisseur corticale. Au niveau de l'os trabéculaire,
cette hyperrésorption osseuse entraîne une diminution de l'épaisseur trabéculaire et une
augmentation du risque de perforations trabéculaires.
Au plan cellulaire, l’effet osseux des HTs peut découler d’une action directe sur les
ostéoclastes ou d’une augmentation de la production ostéoblastique de différents facteurs de
croissance et/ou cytokines qui réguleront en retour la fonction ostéoclastique. Les
mécanismes de la prépondérance corticale de l'atteinte osseuse de l'hyperthyroïdie sont
encore mal expliqués. Elle pourrait être liée à l'augmentation plus importante dans l'os
cortical (fémur) que trabéculaire, de certains marqueurs géniques des ostéoclastes
(phosphatase acide tartrate-résistante) et des ostéoblastes (ostéocalcine, ostéopontine,
phosphatase alcaline). Des travaux récents suggèrent de plus, que la TSH pourrait agir
comme un élément de régulation négative du remodelage osseux
Masse osseuse et risque fracturaire :
- Une diminution de la densité minérale osseuse (DMO), de 10 à 20 % par rapport à des sujets
de même âge et de même sexe, a été rapportée dans beaucoup d'études chez les sujets
hyperthyroïdiens. Cependant, la prévalence des fractures attribuables à l'hyperthyroïdie reste
mal appréciée. Centaines études notent que les femmes ayant des antécédents
d’hyperthyroïdie auraient tendance à présenter des fractures ostéoporotiques à un âge plus
jeune, d’autres que le risque relatif de fracture de l’ESF serait pratiquement doublé. En fait
ces études ont intéressé des patientes à une époque où le diagnostic et le traitement étaient
plus tardifs qu’aujourd’hui et il est vraisemblable que très peu d’hyperthyroïdies actuellement
évoluent assez longtemps pour entraîner une atteinte osseuse significative.
Le traitement médical ou chirurgical de l'hyperthyroïdie s'associe à une correction rapide de
l'hyperremodelage osseux et à une récupération progressive du contenu minéral osseux
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- L’administration de doses élevées d’HTs telle qu’est est réalisée dans le traitement du
cancer thyroïdien différencié hormono-dépendant, est susceptible d’augmenter le risque
d’ostéoporose. Cependant, les dosages ultrasensibles de la TSH permettent de déterminer
avec plus de facilité qu’au préalable, la dose minimale d’HTs permettant de mettre au repos
l'axe thyréotrope tout en n'induisant pas d'hyperthyroïdie infra-clinique. Les études les plus
récentes utilisant des méthodes de mesure plus fiables, telle la DXA, n'ont pas authentifié de
diminution significative de la densité osseuse vertébrale chez les patients recevant un
traitement à visée suppressive, cependant une atteinte fémorale modérée avec une diminution
de 5 à 10 % de la densité osseuse a été parfois rapportée. La signification clinique d'une telle
diminution, en termes de risque fracturaire, apparaît cependant négligeable, tout au moins
chez les sujets ne présentant pas de facteurs de risque additionnels.
- Par ailleurs, aucune étude ne documente une augmentation de l'incidence fracturaire chez
les patients hypothyroïdiens traités par hormones thyroïdiennes.
Prévention et traitement :
Même si la correction rapide de l’hyperthyroïdie limite dans la plupart des cas, notamment
chez le sujet jeune, l’impact osseux des HTs, la réalisation d’un examen densitométrique
permettant de documenter cette atteinte osseuse doit être préconisée. La mise en route d’un
traitement de prévention de la perte osseuse n’apparaît pas nécessaire dans la majorité des cas
sauf chez les sujets âgés chez lesquels la mise en route d’un traitement de prévention,
notamment par un bisphosphonate (alendronate, risédronate) doit être alors plus
particulièrement recommandé.
La surveillance densitométrique des patients recevant un traitement suppressif de la fonction
thyroïdienne est également justifiée, d'autant qu'il s'agit de traitements définitifs et/ou
s'adressant à des femmes ménopausées ou à des patients âgés déjà déminéralisés. La mise en
route d'un traitement de prévention doit là également être envisagée chez les patients les plus
à risque de fracture de l’extrémité supérieure du fémur. La présence d’une élévation
iimportante des bio-marqueurs osseux, témoignant d’un haut niveau de remodelage peut aider
à la décision thérapeutique.

III - HYPERCORTISOLISME ET CORTICOTHERAPIE
L’ostéoporose vertébrale est une des complications classiques d’un excès de corticoïdes,
surtout chez la femme. Elle est souvent silencieuse, avant l’apparition de tassements
vertébraux « en salve» et doit faire l’objet d’un prévention systématique.
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Physiopathologie de l’atteinte osseuse :
Les effets osseux des glucocorticoïdes sont complexes, résultant d’effets directs sur le tissu
osseux et d’effets indirects sur l’homéostasie calcique et la production des stéroïdes sexuels
(cf. fig. 2). Au niveau du tissu osseux, les corticoïdes diminuent la fonction et le nombre des
ostéoblastes en diminuant l’ostéoblastogenèse et en favorisant leur apoptose et celle des
ostéocytes qui ont un rôle important dans la qualité de l’os. Ils favorisent par ailleurs
l’activité ostéoclastique et donc la résorption osseuse par différents mécanismes telle une
augmentation de la production du RANKL ligand (facteur de l’ostéoclastogenése) et une
diminution de l’ostéoprotégerine (OPGR), inhibiteur de l’ostéoclastogénése La réduction de
l’absorption intestinale du calcium et l’augmentation des pertes urinaires de calcium induites
par l’excès de glucocorticoïdes favorisent par ailleurs un hyper-parathyroïdisme secondaire
dont les conséquences osseuses sont encore amplifiées par l’augmentation de la sensibilité
des cellules osseuses à la PTH . Enfin, un taux excessif de glucocorticoïdes favorise un
hypogonadisme et diminue également la production des androgènes surrénaliens.
L’ostéoporose induite par l’hypercorticisme est essentiellement une ostéoporose à bas niveau
de remodelage (diminution de l’ostéocalcine et autres marqueurs de l’ostéoformation), mais
avec tendance à l’hyper-résorption. De plus au plan histomorphométrique, la diminution du
volume    osseux    s’accompagne     d’altérations   de   la   micro-architecture   trabéculaire,
(amincissement des travées) qui contribuent à augmenter la fragilité osseuse sur les sites
osseux riches en os trabéculaire.
Masse osseuse et risque fracturaire :
La diminution de la masse osseuse intéresse surtout les sites trabéculaires, métaboliquement
les plus actifs (corps vertébraux, côtes, radius) et apparaît de façon rapide, dans la première
année de l’exposition aux corticoïdes. L’intensité de la perte osseuse reste difficile à prévoir
au plan individuel Par ailleurs la phase pré-pubertaire (période cruciale pour l’acquisition
d’un capital minéral osseux optimum) et l’hypogonadisme sont autant de conditions qui vont
aggraver l’atteinte osseuse.
Les fractures vertébrales sont fréquentes chez les sujets exposés à un excès de
glucocorticoïdes et sont présentes chez près de 20 % des sujets atteints de syndrome de
Cushing. Plusieurs études cas-témoins ont permis d’objectiver une augmentation du risque de
fracture surtout vertébrale, mais aussi non vertébrales chez les sujets ayant reçu une
corticothérapie à partir de dose supérieure à 7,5 mg de prednisolone par jour. L’augmentation
du risque fracturaire est liée à la diminution du contenu minéral osseux et aux altérations de la
micro-architecture osseuse. La réversibilité de l’atteinte osseuse après correction de
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l’hypercortisolisme ou arrêt de la corticothérapie reste encore un sujet débattu en l’absence de
données longitudinales suffisantes. Cependant plusieurs données résultant soit d’observations
individuelles soit de l’étude de petits groupes de patients témoignent d’une certaine
récupération de la densité osseuse après traitement du syndrome de Cushing, aussi bien chez
l’enfant, que chez l’adulte
Prévention et traitement :
Chez les sujets devant débuter une corticothérapie, la prévention de l’ostéoporose justifie,
avant le traitement, une évaluation précise du statut osseux (mesure de la DMO vertébrale et
fémorale) et une recherche de tous les facteurs de risque (statut nutritionnel et vitamino-
calcique, activité physique, tabagisme, hypogonadisme...) pouvant être corrigés. La dose de
corticoïdes sera la plus faible possible, en donnant la préférence chaque fois que possible aux
voies non orales et aux molécules à durée de vie courte.
Le choix du traitement médicamenteux doit se baser sur les recommandations actuelles qui
placent au premier rang, les bisphophonates (alendronate, risedronate) associés à une
supplémentation vitamino-calcique (qui ne constitue pas en elle même un traitement efficace).
La PTH (1-84) ou son fragment actif (1-34) en administration intermittente (injection sous-
cutanée/j) apparaît, sur la base des résultats des premiers essais cliniques comme un agent
thérapeutique prometteur du fait de son action anabolique puissante, notamment au niveau de
l’os trabéculaire

IV - HYPERPARATHYROIDIE PRIMITIVE
L’hyperparathyroidie primitive (HPP) est une endocrinopathie fréquente notamment chez la
femme ménopausée où sa prévalence est 20 fois supérieure (21/1000) à celle qui est observée
dans la population générale (1/1000). L’incidence de l’ostéoporose est élevée, même en cas
d’HPP asymptomatique et serait présente, en fonction du site osseux mesuré, chez 12 % à 52
% des patients. Elle doit donc être recherchée systématiquement par une mesure de la DMO
par DEXA, car sa présence conditionne la conduite à tenir thérapeutique et notamment
l’indication chirurgicale, comme le soulignent les différentes recommandations des
Conférences de consensus tenues aux USA, et en France
Physiopathologie de l’atteinte osseuse :
La production continue d’HPT telle celle qui existe dans l’HPP, stimule l’ostéoclastogénese
et donc la résorption osseuse en augmentant la différentiation des ostéoclastes à partir de
leurs précurseurs hématopoïétiques et l’activité des ostéoclastes matures. Cet effet est indirect
et passe par l’ostéoblaste, qui joue un rôle pivot tant dans les actions cataboliques que les
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actions anaboliques de l’HPT sur l’os. Globalement une sécrétion élevée et continue d’HPT
augmente le remodelage osseux au bénéfice de la résorption osseuse, de façon prépondérante
au niveau de l’os cortical avec augmentation de la porosité et amincissement du cortex. L’os
trabéculaire est en principe conservé.
Masse osseuse et risque fracturaire :
L’HPP est donc caractérisée par une diminution de la DMO prédominant sur l’os cortical
(tiers proximal du radius, fémur), et peu ou pas marquée au niveau trabéculaire (vertèbres).
La diminution de la masse osseuse est en général limitée, de l’ordre de 10 % par rapport aux
valeurs normales pour l’âge. La perte osseuse passerait par une phase rapide, précoce suivie
d’une stabilisation secondaire, mais l’évolution au plan individuel reste difficile à prédire. La
survenue de la ménopause au cours de cette évolution est bien sûr, susceptible d’aggraver la
perte osseuse et doit conduire à re-évaluer la densité osseuse et le niveau du remodelage
osseux. L’évolution de la masse osseuse après parathyroïdectomie (PTX) commence à être
mieux connue grâce au suivi densitométrique des patients opérés. Dans l’ensemble une
récupération partielle de la masse osseuse est observée, dont l’importance est fonction du type
d’os (plus importante au niveau vertébral que périphérique), de la gravité de
l’hyperparathyroïdie (taux d’HPT et des phosphatases alcalines) et de l’importance de
l’atteinte initiale.
L’augmentation du risque fracturaire chez les patients ayant une HPP reste un sujet débattu
en l’absence de données concluantes. Les fractures intéressent le plus souvent les vertèbres et
l’extrémité inférieure du radius, les métacarpes mais rarement le col du fémur, ce qui pourrait
sembler paradoxal du fait de la prépondérance de l’atteinte corticale de l’HPT. En fait il est
possible que les effets de l’HPT sur la géométrie de l’os (augmentation du diamètre osseux et
donc de la résistance mécanique) explique une partie des résultats observés. Dans les études
retrouvant un risque fracturaire accru, on note que l’augmentation du risque apparaît surtout
dans les années précédant l’acte chirurgical, c’est-à-dire après plusieurs années d’évolution
de la pathologie De même, cette augmentation du risque s’estomperait rapidement après la
PTX (tableau 2), le risque redevenant comparable à celui lié à l’âge dans un délai de 2 à 10
ans.
Prévention et traitement :
L’atteinte osseuse constitue un des éléments essentiels de décision de la conduite à tenir,
lorsque l’HPP est asympatomatique. La densité osseuse doit être mesurée par DEXA sur
plusieurs sites osseux (col du fémur, vertèbres, radius distal) et la constatation d’un T-score ≤
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-2,5, est considérée comme une indication au traitement chirurgical. Il n’existe pas
actuellement de consensus sur l’utilisation des marqueurs biologiques du remodelage osseux
dans l’aide à la décision thérapeutique.
Lorsque le traitement chirurgical, pour différentes raisons n’est pas possible, l’utilisation
d’un agent anti-ostéoclastique (estrogènes, raloxifène, bisphophonates) pourra être discutée
en fonction de la situation clinique, si le risque de fracture est avéré ou s’il existe déjà des
fractures. En cas de non–indication du traitement chirurgical, une simple surveillance de
l’état osseux et une re-évaluation périodique (1 ou 2 ans) du risque fracturaire est conseillée.

OSTEOPOROSES CHEZ L’HOMME : certaines caractéristiques

   - Au niveau de la définition : il n’existe pas encore de valeur de T-score reconnue pour
   définir l’ostéoporose. Des données transversales suggèrent que des valeurs absolues de la
   DMO seraient associées au même niveau de risque fracturaire dans les 2 sexes. Il
   apparaîtrait donc que la définition de l’ostéoporose chez l’homme puisse être aussi basée
   sur un T-score de –2,5 .
   Au niveau épidémiologique : 25 % à 30 % des fractures de l’extrémité supérieure du
   fémur (ESF) surviennent chez l’homme et la prévalence des fractures vertébrales
   découvertes radiologiquement est similaire dans les 2 sexes, affectant 10-12 % des
   individus. Par contre la fracture du radius distal (Pouteau-Colles) est beaucoup plus rare
   chez l’homme que chez la femme
   Au niveau étiologique : Les ostéoporoses secondaires sont plus fréquentes que chez la
   femme (30-70 % des cas). Les étiologies principales sont :
   -   Hypercorticisme
   -   Hypogonadisme, avec en particulier le traitement du cancer de la prostate par
       castration chimique ou chirurgicale
   -   L’alcoolisme
   -   L’hypercalciurie idiopathique
   -   Parmi les causes génétiques : les anomalies du récepteur aux estrogènes et du gène de
       l’aromatase.
   Au niveau thérapeutique : seuls les bisphophonates disposent actuellement d’une AMM
   chez l’homme dans le cadre de l’ostéoporose cortisonique, en prévention et en traitement.
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