Pastoralia - 50 ans de diaconat permanent Focus sur la basilique de Koekelberg Au service des plus pauvres - Catho Bruxelles
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Pastoralia Archidiocèse de Malines-Bruxelles § septembre / octobre 2020 § 5 Bimestriel - Wollemarkt 15, 2800 Mechelen - n°P2 A9708 - Bureau de dépôt : Bruxelles X - Photo : © Céline Anaya Gautier 50 ans de diaconat permanent Focus sur la basilique de Koekelberg Au service des plus pauvres
| Édito Sommaire N°5 septembre - octobre 2020 Vivre sans Propos de Mgr Vanhoutte impatience 3. Vulnérable Le 1er septembre clôt les Vie du diocèse vacances et annonce la ren- 5. 50e anniversaire trée des classes. Il en est ainsi du diaconat permanent depuis des générations. Cette 8. Les postulants franciscains habitude devenue certitude et le confinement rassure adultes et enfants, DR en quête de repères. Cette 9. La Porte Verte - Snijboontje année, la pandémie du Co- 10. Focus sur la basilique de Koekelberg Parole aux jeunes vid-19 a bousculé le rythme 12. Campagne missionnaire 2020 18. Une rentrée particulière et les évidences d’un monde protégé, à l’abri des guerres L'Église dans le monde À découvrir ou des conflits sanguinolents. 13. Journée des migrants 20. Recensions Par obligation sanitaire, les bulles d’interaction sociale 14. Pierre Ruquoy, missionnaire se sont réduites. Une forme au service des plus pauvres Formation continue d’insouciance est prohibée, 16. Thérèse d’Avila et Catherine de 22. Et si on MOOCait un peu ? les gestes se font distants, Sienne, docteurs de l'Église tandis que les masques bou- Communications leversent les visages et des- © Charles De Clercq sinent de nouveaux contours. © Anne Périer Une certaine gravité prévaut dans les échanges, pesant sur leur spontanéité. Les rapports à l’autre en sont d’autant plus précieux. La rareté leur confère la valeur de l’excep- tion. Il s’agit de réapprendre à se réjouir de l’instant, aussi fugace soit-il. Pourtant, l’in- certitude plane dans les têtes et porte atteinte au moral de Comment s’abonner ? Cotisations et dons la population. Dans un univers IBAN : BE53 2300 7228 7753 Gestion des abonnements aussi programmé, il est inenvi- Comm. : “abt Pastoralia francophone” Véronique Thibault : 02 533 29 36 sageable, voire inacceptable, 6 numéros / an : 30 € ou 50 € deux pastoralia.archeveche@catho.kerknet.be de ne pas connaître l’ensemble éditions (fr et nl) pour la Belgique. des événements à venir. Cha- 65 € pour l’Europe ; 75 € pour le monde. cun se trouve contraint à l’hu- milité des ignorants, obligé de vivre le temps présent. Seule l’espérance est admise dans le cœur des gens. Discrète, elle Tenez-vous au courant de Inscrivez-vous sur : ne vacille pas. Sa persévérance l'actualité de l'Église sur www.kerknet.be/archidiocèse/ tisse un lien solide entre les www.cathobel.be newsletter membres d’une même com- munauté. Tous âges confon- Pastoralia Rédactrice en chef Équipe de rédaction dus, les habitants se trouvent Rue de la Linière 14 Angélique Tasiaux - 0478 46 41 01 Samuel Bruyninckx ; dépassés par un semblable 1060 Bruxelles a.tasiaux@diomb.be Geert De Kerpel ; Mgr Hudsyn ; pastoralia.archeveche@catho.kerknet.be Anne-Élisabeth Nève ; Anne Périer ; sentiment d’urgence. Il faut 02 533 29 36 Secrétariat de rédaction Tommy Scholtes ; Angélique Tasiaux ; Véronique Thibault Véronique Thibault ; Jacques Zeegers vivre, tout simplement. lundi, mardi et vendredi 02 533 29 36 de 9h à 13h pastoralia.archeveche@catho.kerknet.be Imprimeur Halewijn NV - Halewijnlaan 92 - nnAngélique Tasiaux, Éditeur responsable Mise en page 2050 Anvers rédactrice en chef Geert De Kerpel, Wollemarkt 15, Mathieu Dulière 2800 Mechelen Nous respectons votre vie privée et la législation relative à ce sujet (RGPD). Si vous avez une question, adressez-la à privacy@diomb.be Malgré notre vigilance, il est possible que certains ayants droit nous soient restés inconnus. Nous restons à leur disposition. Les articles de ce numéro ont été clôturés le 29 juillet 2020.
Propos de Mgr Vanhoutte Vulnérable La crise du coronavirus nous confronte clairement à notre vulnérabilité humaine. Un virus à peine connu produit un bouleversement profond de toute notre vie en commun. Personne ne peut s’armer efficacement contre l’ennemi invisible. Chacun se sait menacé. © Pxhere De précieuses libertés ont été restreintes tout un la réalité. La vulnérabilité n’est pas un symptôme temps. Les autorités et le personnel soignant ont exceptionnel et passager de notre nature humaine. essayé de tout gérer le mieux possible. Mais cela Nous sommes et restons fragiles, tous les jours de n’a pas pu empêcher que beaucoup de personnes notre vie. Au milieu de tous les acquis de ce qui soient contaminées et qu’avant l’été, près de dix s’appelle le progrès, nous restons faits de pous- mille compatriotes en soient décédés. Le nombre sières et nous retournerons à la poussière. Les de faillites et de mises au chômage a fortement psaumes nous le rappellent. Nous sommes comme augmenté. Et le rêve d’avoir tout le contrôle de l’herbe qui se dessèche, comme une fleur qui se notre vie personnelle et sociale s’est écroulé. Notre fane. Même si nous préférons le taire, la mort n’est vie en commun n’est plus une solide forteresse ga- jamais loin. Rien ne subsiste. « Vanité des vanités, rante de prospérité et de bien-être. La science et la et tout est vanité », dit l’Ecclésiaste (1,2), en un lan- technique ne peuvent produire un bonheur à l’abri gage qui brise les illusions et ne sonne pas joyeu- de toute menace. L’insécurité dans les domaines sement. Il décrit bien toute réalité terrestre. Cela de la santé et de l’emploi a fortement augmenté. n’a pas de sens de camoufler que nous sommes fragiles. C’est libérateur de ne pas nous surévaluer. Nous sommes mortels, de passage sur la terre. | Se reconnaître vulnérable | L’attention Pour beaucoup, c’est un réveil douloureux. Nous à la ne sommes que des humains. L’avenir est incertain vulnérabilité et ne repose pas simplement sur le prolongement de ce que nous avons construit. Être seul avec ses La vulnérabilité à laquelle nous sommes confrontés questions et ses soucis est souvent très lourd à a provoqué une grande vague de solidarité. C’est porter. Sûrs de nous et avec beaucoup d’assurance, ce qui se produit aussi lors de catastrophes natu- nous avons longtemps pu détourner le regard de relles, d’accidents, de famines et de toutes sortes notre fragilité. Le coronavirus nous met le nez sur de maladies. La vie humaine menacée appelle la Pastoralia - N°5 | 2020 3
Propos de Mgr Vanhoutte compassion. Les victimes éveillent ce qu’il y a de dépouillé et est devenu semblable aux hommes meilleur en l’homme : oser sortir de soi-même, (cf. Phil 2,6-11). Le Fils de Dieu a vécu notre exis- s’impliquer dans la détresse des autres et faire tence vulnérable. Il a montré que Dieu ne s’écarte tout son possible pour aller à la rencontre de ces pas de notre vulnérabilité, mais la recherche et la besoins. Le personnel soignant a reçu des applau- partage. Aux hommes vulnérables, Il apporte le dissements mérités, accompagnés de sonneries de message qu’ils sont précieux aux yeux de Dieu. Ils cloches. Les soignants comptent sur de plus grands ont une place dans son cœur. Ils comptent vrai- investissements dans leur secteur. Beaucoup de vo- ment. La proximité de Jésus devient une source lontaires se consacrent à de petits gestes de bonté de vie nouvelle. Les hommes brisés se redressent. qui font des miracles. Par d’anciennes ou de nou- Les gens exclus rentrent dans le cercle. Jésus ne velles voies, ils cherchent le contact avec celui qui voit pas d’autre mission pour ses disciples. À leur risque de devenir de plus en plus seul. Ici émerge tour, ils essayent de montrer le grand souci que ce qui compte vraiment dans notre vivre ensemble : Dieu a pour ceux qui, aux yeux de beaucoup, sont être présents les uns pour les autres, avec attention vus comme déchet ou rebut. Cette mission nous et soin. pousse encore aujourd’hui à collaborer de manière créative aux structures et aux initiatives qui renfor- Celui qui est vulnérable n’est pas perdu, mais il cent une vie en commun dans l’attention mutuelle. vient à la vie s’il reçoit le droit à l’existence, de la chance et de la confiance. Comme êtres humains | Vulnérable et précieux vulnérables, nous sommes confiés à la merci les uns des autres. Aucun homme ne peut se sauver Mais que dire quand la vie humaine vulnérable lui-même. Tous, nous avons besoin des autres, s’arrête dans la mort, parfois inopinée et soli- qui nous soutiennent dans notre fragilité. Le souci taire ? Jésus ne rédige aucun traité à ce sujet. Il ne des orphelins, des veuves et des étrangers forme tient aucun long discours plein de spéculations comme un refrain biblique, sur tous les tons. Jésus savantes. Il prend lui-même le chemin de toute résume sa mission dans la parabole du bon Samari- semence. Sans pitié, il est précipité dans la mort. tain (cf. Lc 19,30-37). Les œuvres de miséricorde (cf. Il choisit pour nous de ne pas éviter ce chemin. Mt 25,31-46) nous font rencontrer Jésus, le Christ, Victime d’injustice, il perd toute valeur humaine. Celui qui est marqué de l’onction divine, dans des Dépouillé de ses vêtements, il est exposé en croix hommes vulnérables. Sa crèche et sa croix mon- tel un damné de Dieu. Un sommet de vulnérabilité. trent la petitesse et l’impuissance de l’être humain. Il se retrouve sans entourage solidaire, seuls sa mère et un disciple restent près de Lui à l’heure de | La la mort. Au milieu de questions et d’angoisses sans vulnérabilité issue, il ne Lui reste que la confiance en son Père. à la lumière de la foi Il garde le cœur ouvert à la nouvelle inouïe que la Les références à l’Écriture ci-dessus nous amènent Vie est plus forte que la mort. Il a confiance dans à poser un regard de croyant sur notre vulnérabi- le fait que Celui qui Lui était toujours présent, le lité humaine. De la foi en la création découle que sera aussi dans la mort et au-delà. Dans la lumière nous ne sommes pas simplement poussière de la rayonnante de Pâques, Il se donne à voir, mais pas terre. Nous portons aussi en nous le souffle de vie sans les signes de ses blessures. Les signes de sa donné par Dieu. La Bible ne connaît pas de fossé vulnérabilité n’ont pas disparu, mais sont assumés infranchissable entre l’homme vulnérable et un dans sa vie glorifiée. Désormais, il est pleinement Dieu inatteignable. En tant que Créateur, Dieu est solidaire de tous ceux qui sont blessés. Cette pers- présent à l’homme. Dans l’histoire de son peuple, pective enrichissante appartient au regard chrétien Il se fait connaître comme un Dieu concerné qui sur l’homme vulnérable. Vulnérabilité et finitude voit la souffrance des hommes et descend pour les font partie de notre vie. Mais Dieu qui donne la Vie libérer (cf. Ex 3,7-10). En un mélange de foi et de et fait vivre a bien le dernier mot. Aussi vulnérables manque de foi, les hommes vulnérables cherchent que nous puissions être, nous sommes et restons quelqu’un qui sera toujours à leurs côtés. Fidèle- précieux aux yeux de Dieu. Que cette confiance ment, Dieu recherche un peuple petit et vulnérable nous aide à nous porter mutuellement de l’aide qui veuille se tourner vers Lui. dans notre fragilité. Cette recherche réciproque atteint un point culmi- nn+ Koen Vanhoutte, nant dans l’incarnation de la Parole de Dieu. Il s’est évêque auxiliaire pour le Brabant flamand et Malines 4 Pastoralia - N°5 | 2020
Vie du diocèse Cinquantième anniversaire du diaconat permanent En 1970, le cardinal Suenens or- donnait les premiers diacres per- manents dans l’archidiocèse de Malines-Bruxelles, qui en compte actuellement 90. Une occasion de faire le point sur ce ministère important avec deux d’entre eux, Claude Gillard et Luc Aerens. DR Comment est née votre vocation et quelles sont vienne nous le proposer au nom de l’évêque. J’étais vos fonctions en tant que diacres ? professeur à Lumen Vitae et très actif dans ma pa- Claude Gillard : J’étais enseignant dans le secondaire. roisse. Nous avons d’abord refusé. Deux ans plus tard, Ma vocation s’est développée petit à petit et, au gré il est revenu à la charge et nous avons fini par accepter. de rencontres avec des diacres, elle s’est finalement Comme diacre, je travaille toujours dans le milieu confirmée. scolaire. Le fait d’être ordonné nous donne une Lors de ma rencontre avec le cardinal Danneels, autre visibilité, à la fois pour les pratiquants et pour celui-ci m’a demandé quelles étaient mes options. Il y les gens de l’extérieur. Vis-à-vis de personnes qui ne avait l’enseignement, bien sûr, mais j’ai aussi évoqué fréquentent guère l’Église, nous sommes souvent l’accompagnement des mourants. Il m’a répondu que la seule personne qui La représente. Nous sommes c’était peut-être un peu tôt, mais qu’il y avait quelque donc régulièrement sollicités pour des célébrations, chose à faire au niveau des jeunes couples. Cette sacramentelles ou non, à l’occasion de faits de vie, idée a fait beaucoup de chemin. Dans notre paroisse, notamment par des couples qui n’ont pas accès au à Woluwe-Saint-Lambert, nous animons une liturgie mariage sacramentel. Nous sommes un autre visage pour les tout-petits. Là-dessus s’est naturellement de l’Église, qui apporte une autre manière de voir. greffée la pastorale du baptême et du mariage. Le Nous pouvons partager les joies et les souffrances milieu de l’enseignement représente aussi une part de personnes qui, à travers des accompagnements, importante de la diaconie, avec beaucoup d'écoute découvrent ou redécouvrent quelque chose du Christ et d'accompagnement. L’expression liturgique prend et de l’Église ou de l’Évangile. Engagé dans le milieu aussi sa juste place, en paroisse ou dans le milieu sco- du théâtre, je suis aussi au service des artistes. laire. Cela fait maintenant 28 ans que j’ai été ordonné. Il n’y a pas eu un seul moment où j’ai regretté cette Comment devient-on diacre ? Quelle est la for- aventure passionnante. mation ? Claude : Le cardinal De Kesel et l’évêque référendaire, Luc Aerens : Mon épouse et moi ne pensions pas du Mgr Jean-Luc Hudsyn, ont mis en place une nouvelle tout au diaconat avant que le chanoine Raymond Van équipe pour repenser fondamentalement la forma- Schoubroek, responsable du diaconat à Bruxelles, tion. Nous en faisons partie. Pastoralia - N°5 | 2020 5
Vie du diocèse Un premier temps de découverte sera suivi par une brer l’Eucharistie, autant les diacres sont là pour année de discernement avec une formation ecclé- partager l’activité pastorale de l’évêque dans tous siologique. L’épouse y est étroitement associée. les champs qui peuvent survenir. Il doit d'abord Les trois années suivantes seront consacrées à la prendre le temps de vivre avec le « public » auquel formation biblique et théologique. Elles compren- il est envoyé, que ce soit dans l’enseignement, dront aussi un stage pastoral, avec l’accent sur les dans les prisons, avec les jeunes couples ou les trois ministères principaux des diacres : la charité, malades, etc. Progressivement, sa diaconie prendra l’annonce de la Parole et la liturgie. tout le déploiement qu’elle doit prendre. La dernière année sera une année de formation À l’avenir, le diaconat devra encore se dévelop- spécifiquement liturgique et pastorale, avec, en fin per. Cinquante ans, c’est l’âge de la maturité. À de parcours, une évaluation globale. Elle sera sui- l’époque de ma formation, il y a trente ans, on s’in- vie, le cas échéant, d’une rencontre avec le cardinal terrogeait beaucoup sur la place du diaconat et la et de l’ordination. différence avec la prêtrise. Nous n’en sommes plus Pour être accepté, il faut au moins dix ans de ma- là. Le sacerdoce et le diaconat sont complémen- riage, si on est marié, et avoir entre 35 et 60 ans au taires, un peu comme les deux mains. Il est impor- moment de l’entrée en formation. tant que nous restions dans la posture du serviteur, comme le Christ l’a montré en lavant les pieds de Quelle différence avec ce qui précédait ? ses disciples. Claude : Notamment la manière dont a été conçue l’année de discernement. Il faut que le candidat, Luc : Un aspect important est la priorité qu’il faut ou le couple, prenne vraiment la mesure de ce que donner à la charité en face de toutes les pauvre- cela va représenter. Il était également nécessaire tés, qu’elles soient matérielles, sociales, affectives, d’adapter les outils pédagogiques aux motivations spirituelles ou morales. et aux profils très variés des candidats. Qu’en est-il de la question du diaconat féminin ? Quelles sont les perspectives d’avenir ? Luc : Il faut aborder cette question avec beaucoup Claude : À l’occasion du jubilé, le cardinal De de nuances. Kesel a rappelé que « le diacre n’est pas ordonné Une première commission romaine s’est penchée en vue du sacerdoce, mais en vue du service de sur cette question et, même du point de vue histo- l'évêque ». Autant, le prêtre est là - mais pas exclu- rique, aucune conclusion définitive n’est apparue : il sivement - pour présider la communauté et célé- y a bien eu des « diaconesses » dans le passé, mais on n’a pas pu établir incontestablement qu’elles aient été ordonnées sacramentellement. Une deu- © Charles De Clercq xième commission a été réunie et va approfondir cette recherche. Les opinions sont très diverses. Certains y sont radicalement opposés, notamment parce qu’ils craignent, sans doute à tort, que ce soit ouvrir la porte au sacerdoce féminin. On trouve aussi des théologiens ou des théologiennes « féministes » qui ne veulent pas d’une « cléricalisation » du rôle de la femme. Parmi les arguments de ceux qui y sont favorables, il y a l’ouverture œcuménique, dans la mesure où l’on retrouve des femmes diacres dans certaines communautés orthodoxes et aussi, bien sûr, chez les anglicans et certains courants du protestan- tisme. D’autres encore n’y sont pas opposés par principe, mais estiment que c’est prématuré, car cela créerait trop de divisions au sein de l’Église. nnPropos recueillis par Jacques Zeegers 6 Pastoralia - N°5 | 2020
Vie du diocèse Un soutien discret et efficace © A. Tasiaux Les deux Marie en ont des points ne nous enlevez pas les épreuves notre couple. Nous sommes diffé- communs… Toutes deux épouses de la vie, mais aidez-nous à les dé- rents et nous apportons ensemble de diacre, elles sont engagées dans passer ! cette différence. Les gens touchent l’Unité pastorale de Ramillies. In- quelque chose de Dieu quand nous terview croisée de ces femmes Soutenez-vous la mission de votre essayons de grandir dans la cohé- chargées ensemble de l’accueil do- mari ? rence où l’Amour est à la première minical. Marie T. : Si un diacre apparaît en place. Sinon, ce n’est pas ajusté. Si public, il a besoin que nous soyons nous cultivons un esprit de commu- Femme de diacre, est-ce un enga- derrière lui pour porter cette mis- nion, quelque chose de Dieu peut gement ? sion. Marie était importante à côté passer au-delà de qui nous sommes. Marie Tielemans : Mon appel est de Jésus. Cette dimension est in- La dynamique est trinitaire, avec celui d’une femme qui peut ap- contournable dans l’Église et ty- l’Esprit au milieu de nous. porter une dimension particulière piquement féminine. Si quelqu’un à la communauté : créer un esprit vient en lumière, le conjoint l’ac- Marie K. : Nous prions ensemble, de famille et être mère de ceux qui compagne. nous préparons les couples… Vin- nous sont confiés, bien au-delà de cent aborde davantage les textes la maternité physique. Il s’agit que Marie K. : Vincent est fort engagé de l’Église et moi la partie humaine chacun se sente soutenu, encoura- dans la paroisse, moi dans l’asso- en lien avec Dieu. Il est dans le spi- gé, pas seulement par nos prières, ciatif. Il est, dès lors, devenu moins rituel ou le divin, tandis que je re- mais par notre manière d’être à ses disponible pour la vie de famille et mets les pieds sur terre ! côtés. la gestion de la maison. Je fais plus de tâches pour le libérer ; j’ai envie Toutes les deux l’admettent : être Marie Kervyn : C’est un enga- de lui permettre de s’engager. épouses de diacre dans la même gement à deux, pour lequel j’ai paroisse, c’est « une chance et un donné mon accord, une fois que S’agit-il d’un travail d’équipe ? cadeau », gage de « connivence ». les enfants étaient plus âgés. Quel Marie T. : Nous formons un duo. « Ce sont deux Marie qui sont un beau chemin de foi, accompli en- Dans les préparations au mariage et peu des Marthe », avoue Marie semble ! C’est une aventure et une au baptême, Luc et moi nous com- Kervyn dans un éclat de rire. belle folie ! Je remets nos vies dans plétons. C’est lié à l’unité que nous les mains du Seigneur. Non, Dieu, tentons de construire au sein de nnAngélique Tasiaux Pastoralia - N°5 | 2020 7
Vie du diocèse Les postulants franciscains et le confinement Pour la première fois, en 2019-2020, les postulants franciscains de la 2e année ont été accueillis à Bruxelles. C’est ainsi que Raphaël 21 ans, Gabriel 25 ans, Clément 21 ans, Emmanuel 21 ans et Charles-Eric 25 ans ont élu domicile rue d’Artois dans le centre de Bruxelles, après l’année St-François au couvent de Cholet en France. © PJBw | La seconde année, consacrée en vue du noviciat en Italie. La Une expérience au discernement, comporte une prière est restée centrale, mais il a essentielle catéchèse de base et se concentre été possible de lire et de bricoler sur l’essentiel de la foi, tout en per- La vie conventuelle, c’est aussi pour le couvent. La présence des mettant de faire l’expérience de la l’expérience de la diversité. D’abord postulants a rendu aussi possible la vie fraternelle. Ainsi, les postulants celle des cinq postulants qui, malgré diffusion de messes et de soirées participent-ils aux activités du cou- des points communs évidents d’adoration via YouTube, ce qui vent comme les enseignements comme cette envie de s’engager a participé au rayonnement du ou les prédications. À Cholet pour Dieu à la suite de saint Fran- couvent au-delà de Bruxelles. comme à Bruxelles, la pastorale çois, ont autant de sensibilités, de des jeunes étant riche, ils se sont parcours et d’espérances différentes. Mais le confinement a aussi signifié impliqués dans les w-e et camps Diversité aussi chez les quatre frères l’arrêt des initiatives d’évangélisa- jeunes. Gabriel s’est lancé dans qui les accueillent: le père Daniel- tion et du service de distribution des vidéos d’évangélisation, tandis Marie, frère Jack, frère Bart et frère de nourriture. Face à cette urgence que Charles-Eric, ex-séminariste, Jean-Luc qui était leur responsable. à imaginer la diaconie autrement, a élaboré un enseignement sur le Dans cette vie bien réglée, Dieu tient une magnifique opportunité s’est chapelet. la première place, mais l’apprentis- dessinée : les postulants ont aidé sage de la communauté ne va pas les Petites Soeurs des Pauvres, du Après une année St-François à sans celui de la solitude. Jusqu’à home de la rue Haute. Aller à la l’âge de 18 ans, Gabriel a étudié l’arrivée brutale de l’épidémie de co- rencontre des personnes âgées, le sport pendant cinq ans. Ce natif ronavirus, les cours au séminaire de soir après soir, créer un lien essen- de Carcassonne a exercé deux Namur ou la participation à Emouna tiel via les paroles échangées, un ans le métier de professeur, avant ont rythmé la vie. sourire, s’est gravé dans leur quo- d’effectuer sa 2e année de postulat, tidien. Lors de l’adieu avant leur | S’investir mettant à profit son expérience au- départ du couvent, l’émotion était près des jeunes et dans la société palpable, tant chez les résidents différemment laïque. Gabriel parle de l’urgence que chez les postulants. Ou quand du renoncement. Guidé par la Dans ce contexte de crise, le confi- le don devient cadeau . Providence, il veut se consacrer à nement s’est révélé une chance. une vie de mission pour faire la dif- Avec la suspension des cours, les nnAnne Périer, férence et partager en vérité avec frères eux-mêmes se sont investis responsable de la communication les pauvres. et l’accent a été mis sur l’italien du vicariat de Bruxelles 8 Pastoralia - N°5 | 2020
Vie du diocèse La Porte Verte Snijboontje Parti d’un objectif d’accueil so- cial dans le cadre des paroisses de Molenbeek-Centre, La Porte Verte prend aujourd’hui bien d’autres be- © La Porte verte soins sociaux et culturels en charge. Retour sur 45 ans de solidarité. En septembre 1975, une animatrice «Snijboontje», une crèche et enfin ouverture expliquent la longévité paroissiale visionnaire, Marylène le centre d’aide alimentaire «Snij- de La Porte Verte. Des atouts qui Krischer, lance le projet de La Porte boontje Bis», devenu indispensable ont fait leurs preuves et en font un Verte en vue d’une action globale de dans cette zone de Bruxelles-Ouest. acteur important du développement lutte contre la pauvreté et l’exclusion. En tout, six entités différentes consti- communautaire local, en vue d'une Simple maison de quartier à l’origine tuent l’ASBL La Porte Verte – Snij- meilleure qualité de vie. De multiples au cœur du Molenbeek maritime, boontje, avec quelque 40 travailleurs solidarités, issues du monde chrétien l’initiative a débuté par un travail de et autant de volontaires en charge et liées à son ancrage paroissial, lui «maillage» sur place, en sollicitant du fonctionnement de différents ont permis de fonder, développer et la participation des habitants afin services. poursuivre son action. d’analyser leurs besoins individuels | et collectifs. À même le vécu de La pandémie de Covid-19 a été Une efficacité cette population locale - autochtone particulièrement intense pour les reconnue comme immigrée - se sont ainsi associations de terrain. Les besoins révélés des besoins croisés d’aide L’action communautaire de l’asso- des personnes en situation de pau- urgente et d’orientation, de préven- ciation et l’ouverture en 1984 de vreté ou d’isolement ne se sont pas tion et de guidance, de formation son restaurant social, au quartier arrêtés avec le confinement, bien au et d’intégration socio-éducative et des Étangs Noirs, lui ont valu d’être contraire. Plus que jamais, le service culturelle. reconnue à titre d’expérience–pilote social, le centre d’aide alimentaire, le dans le cadre du deuxième plan restaurant social «Snijboontje» et la | Des quinquennal européen de Lutte crèche ont adapté leur offre, tandis services contre la Pauvreté (1985 -1989). A que l’école de devoirs et le centre variés suivi, dans la foulée, son agrément d’alphabétisation maintenaient un À l’aide d’un réseau de volontaires en tant que Centre social polyva- lien avec les familles. très engagés sur le terrain et bientôt lent sous régime bicommunautaire de collaborateurs professionnels, la bruxellois. Ce fut enfin à la crèche Prévues en septembre, les festivités réponse à ces besoins divers s’est de bénéficier en 1995, avec cinq des 45 ans ont été reportées. Elles concrétisée par la mise sur pied autres milieux d’accueil, du prix de en auront d’autant plus de saveur. d’une série de services résolument la Fondation Houtman, grâce à sa pionniers: un service social, une contribution innovante à la politique nnSamuel Haquin, école de devoirs, un centre d’al- socio-familiale. Sans aucun doute, ce coordinateur, La Porte Verte phabétisation, le restaurant social dynamisme, cette inventivité et cette Pastoralia - N°5 | 2020 9
Vie du diocèse Basilique nationale du Sacré-Cœur de Koekelberg 50e anniversaire de la fin des travaux et nouveau recteur ‘Vous travaillez à la basilique de Koekelberg ? Moi, je n’y suis jamais en- tré !’ La basilique nationale du Sacré-Cœur de Koekelberg est un monu- ment bien connu, mais peu de Belges et même de Bruxellois l’ont visité. DR Cette église Art Déco, la plus hauteur), l’on peut admirer toute aimé de tous, difficile à rempla- grande de l’Europe de l’ouest, la région bruxelloise sur 360°. Ce cer, tellement il fut bon négocia- est bien plus qu’un monument. panorama est situé à la base de teur, réconciliateur et travailleur. C’est un lieu emblématique la coupole en cuivre. Il a créé des liens entre les diffé- dans le paysage ecclésial. De Il faudra près d’un siècle pour rentes entités présentes, que ce nombreuses célébrations y ont achever cette bâtisse. La pose soit en faveur du bâtiment, du trouvé place, comme lors de la de la première pierre a eu lieu personnel ou des fidèles, des pa- venue du pape Jean-Paul II dans en 1905, d’après un concept roissiens et des visiteurs. Outre sa 26e année de pontificat pour datant de la fin du XIXe siècle, et son rôle pastoral, il a également l’eucharistie en plein air en mai la basilique sera réellement ter- pris à cœur la section culturelle. 1985 ou celle de 1995, lors de la minée avec l’achèvement de la Sous sa direction, et en colla- béatification du père Damien. coupole en 1970, après les deux boration avec le président des C’est également là qu’eut lieu la guerres mondiales. Cinquante Amis de la basilique, Raoul De consécration épiscopale de trois ans plus tard, ce dimanche 8 Puydt, de belles expositions évêques auxiliaires pour l’archi- novembre 2020, nous fêterons la temporaires ont eu lieu dans la diocèse le 3 avril 2011. fin des travaux. Le cardinal Jozef basilique pendant plus d’une De Kesel célébrera une messe décennie. Son carnet d’adresses bilingue à 10h30. et ses liens avec l’archevêché ont | L’architecture été plus que bénéfiques pour Étant l’une des cinq plus l’édifice. | Le recteur grandes églises du monde, C’est avec regret que nous ver- elle est surtout visitée par des Ce même dimanche, le recteur rons partir Mgr Herman Cosijns, touristes, dont 80 % d’étrangers. de la basilique, Mgr Herman même si nous sommes persua- Du panorama de la basilique Cosijns, fera ses adieux après dés qu’il a droit à cette retraite (une galerie extérieure à 53m de 15 ans de présence. Un recteur ‘partielle’ plus que méritée. 10 Pastoralia - N°5 | 2020
Vie du diocèse Nous lui sommes très reconnais- | BiographieS sants pour ce qu’il a été et ce Martine Motteux-Abeloos qu’il a réalisé. Martine est née à Uccle en 1958, d’un père néerlandophone et d’une mère | Les activités francophone. En 1959, la famille quitte la capitale pour s’installer à Westende. En plus des nombreuses célé- Après des études à Gand, elle com- brations religieuses, d’autres ac- mence sa vie professionnelle dans le tivités ont lieu dans la basilique. secteur bancaire où elle rencontre Gus- Depuis une dizaine d’années, tave, veuf de 25 ans son aîné. Un fils et il y a l’adoration permanente, © M. Motteux-Abeloos une fille naîtront de cette union heu- pour laquelle un grand nombre reuse pendant 35 ans. Mère au foyer, de fidèles se relayent 24h sur 24 elle s’investit dans le bénévolat dans et 7 jours sur 7 pour prier. Il y a plusieurs écoles bruxelloises. La prési- également des évènements non dence du comité des parents de la Lutgardisschool Elsene la mène en po- religieux, mais qui respectent le litique jusqu’en 2019, où pendant 15 ans elle fut conseillère de la sénatrice caractère sacré du lieu. Ainsi des Brigitte Grouwels. Le bénévolat dans les écoles et la vie professionnelle au concerts se déroulent-ils, qu’ils cabinet ministériel l’ont mise en relation avec l’archevêché de Malines- soient classiques ou plus mo- Bruxelles. En octobre 2019, elle est nommée vice-recteur de la basilique dernes. La salle de théâtre Vita, nationale de Koekelberg. À partir du 9 novembre 2020, Martine sera di- entièrement rénovée en 2019, recteur général de la basilique. peut accueillir 178 personnes. Les salles Rome et Nobis sont Mgr Herman Cosijns ouvertes à la location pour Mgr Herman Cosijns est né à Enghien toutes festivités familiales ou en 1944, a grandi à Kokejane, dans la ré- professionnelles. En sous-sol, un gion de Herne, dans le ‘Pajottenland’, à espace immense, connu interna- la ferme de ses parents. Il a été ordonné tionalement, est dédié à la spé- prêtre le 29 octobre 1972. Il est connu léologie, un sport d’équipe dans pour être un travailleur infatigable. Au lequel les jeunes apprennent à © Archevêché Malines-Bruxelles vicariat de Bruxelles, il s’est occupé de la s’entraider. pastorale néerlandophone des couples et familles, a lancé un groupe pour les La basilique nationale de Koe- veuves et veufs et un groupe de travail kelberg mérite bien d’être pour les personnes qui vivent un di- (re)mise à l’honneur. Au nom vorce. À la demande du cardinal Dan- de la paroisse, de la fabrique neels, il a été la cheville ouvrière du processus d’évangélisation Bruxelles d’église, de l’ASBL les Amis, du Toussaint 2006. En 1995, il est devenu doyen de Laeken, Bruxelles et de la personnel, je vous invite à visiter, zone Bruxelles-Ouest et, en 2002, adjoint du vicaire général pour le vicariat avec vos amis et votre famille, ce de Bruxelles. Il est nommé aussi en 2006 recteur de la basilique de Koe- magnifique bâtiment Art Déco. kelberg. En juillet 2011, il est devenu secrétaire général de la Conférence Nous avons des guides à votre épiscopale de Belgique et directeur du Centre interdiocésain. disposition. Il y a également deux musées : celui des Sœurs Tony Frison Noires et le Musée d’Arts Reli- Tony Frison est né à Tirlemont en 1965. gieux Modernes, où la figure du Il est curé à Evere depuis 2008. En Christ est centrale, avec notam- 2011, il a été nommé adjoint de l’évêque ment un tableau de Servaes auxiliaire pour Bruxelles. Il est aussi et une sculpture en bronze de responsable de la pastorale néerlan- Permeke. À voir absolument. dophone pour l’unité pastorale St-Fran- Au plaisir de vous rencontrer le çois et Etterbeek-Woluwe, doyenné dimanche 8 novembre ! de Bruxelles Nord-Est. Le 9 novembre © Ch. De Clercq 2020, il deviendra le nouveau recteur de nnMartine Motteux-Abeloos, la basilique. vice-recteur Pastoralia - N°5 | 2020 11
Vie du diocèse Campagne Missionnaire 2020 Ouvre-leur ton cœur La campagne missionnaire 2020 s’articule autour du thème de la guérison, avec pour pays-phare le Liberia. Premier pays d’Afrique à proclamer son indépen- dance en 1847, le Liberia est aussi le pays qui a pro- pulsé, pour la première fois en Afrique, une femme à la tête d’un État (Ellen Johnson Sirleaf, 2005-2017). Mais l’histoire de cette république fondée par d’ex- esclaves revenus des États-Unis est loin d’être un long fleuve tranquille. | Porter la bonne nouvelle Deux guerres civiles (1989-1997 et 2000-2003) et le virus Ebola (2014-2015) ont laissé dans le désarroi des millions de victimes et d’orphelins en particulier. Douzième pays le plus pauvre du monde, le Liberia peine déses- pérément à panser ses plaies. La paix sociale demeure précaire et le besoin de guérison intérieure et extérieure vital. Comment porter, en paroles et en actes, cette Bonne Nouvelle qui guérit aussi bien les cœurs que les corps ? Tel est l’enjeu principal de la campagne mission- naire 2020 : contribuer à guérir les cœurs et les corps des Libérien(ne)s, pour qu’à leur tour, ils portent cette Bonne Nouvelle aux quatre coins du monde. Malgré la modestie de ses moyens, l´Église locale contribue significativement à cette tâche quotidienne. Son soutien est indispensable pour la survie et la gué- rison de milliers de Libérien(ne)s. Mais l’immensité des besoins appelle la solidarité de toute l’Église. Comme le rappelait si bien sainte Thérèse d’Avila à ce propos, la charité envers les autres est l’unique thermomètre permettant de mesurer la qualité de notre relation avec Dieu. C’est pourquoi Missio Belgique invite cette année chaque chrétien(ne) belge à ouvrir son cœur aux souf- frances du peuple libérien, et plus particulièrement aux orphelins du diocèse de Gbarnga que nous soutien- drons, afin qu’ils aient un toit et une nouvelle famille. Plus d’infos sur www.missio.be nnEmmanuel Babissagana, © Missio Missio Belgique 12 Pastoralia - N°5 | 2020
L'Église dans le monde Pas d’autre choix que de fuir, comme Jésus Christ Le dernier dimanche de septembre, les migrants et les réfugiés sont au centre des préoccupations de l’Église catholique. Ce 27 septembre, le pape François a choisi de braquer les projecteurs sur les personnes déplacées à l’intérieur de leurs propres frontières. © Pxhere Lors de son message pour la 106e Journée mondiale des notre planète gravement souffrante. Et si nous écoutons, migrants et des réfugiés, en mai dernier, le pape François nous avons la possibilité de nous réconcilier: avec nos écrivait: «Cette crise du coronavirus a aussi banni au der- voisins, avec les nombreux déshérités, avec nous-mêmes nier point de l’agenda de politique nationale les initiatives et avec Dieu qui n’arrête jamais d’offrir sa miséricorde. et l’aide internationales, essentielles et urgentes pour | Le sauver des vies humaines». Aussi étend-il le message de partage, condition cette Journée à ceux qui vivent ou ont vécu, à la suite du de la croissance coronavirus, des situations d’incertitude, d’embarras et d’exclusion. Ensuite, le pape souligne que celui qui veut grandir doit partager. La pandémie nous a rappelé que nous avons Comment répondre à cet immense défi pastoral, en tant tous les mêmes soucis et les mêmes angoisses, que que croyant et communauté d’Église? Pour François, personne n’est capable de s’en sortir tout seul. Avec les quatre mots-clés de son message précédent sont l’avant-dernière paire, François avance que l’intérêt porté toujours d’application: accueillir, protéger, soutenir et à l’autre est la condition pour pouvoir l’assister. Si nous intégrer. Il les complète par six autres verbes. voulons vraiment donner un coup de main aux gens, nous devons les impliquer. Ils jouent alors le rôle principal En premier lieu, connaître pour comprendre. Pour Fran- dans leur propre relance. En conclusion, les deux derniers çois, Jésus nous l’enseigne avec les disciples d’Emmaüs: verbes sont: coopérer est nécessaire pour construire. «Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.» Afin de porter les soucis de notre maison commune et la (Lc 24, 16). Concernant les migrants et les réfugiés, nous faire ressembler de plus en plus au plan originel établi par nous arrêtons trop souvent aux chiffres, alors qu’il s’agit Dieu, le pape François estime que nous devons aspirer à de personnes. Quand nous connaissons leur histoire, une collaboration internationale, à une solidarité mon- nous devenons capables de les comprendre. Le pape diale et à des initiatives locales, sans laisser personne à développe, ensuite, l’idée selon laquelle pour devenir l’écart. proches nous devons servir. Cela semble évident, mais souvent cela ne l’est pas. Les peurs et les préjugés nous nnGeert De Kerpel, tiennent à l’écart des autres, nous empêchent de devenir responsable de la communication de l’archidiocèse proches et de les servir avec amour. En troisième lieu, le Traduction A. Tasiaux pape a choisi les verbes écouter pour arriver à se réconci- lier. Le silence dramatique et alarmant pendant la crise du Retrouvez le texte intégral du pape François et le do- coronavirus nous a donné l’occasion d’entendre le cri des cument Orientations pastorales sur les déplacés internes : plus vulnérables, des personnes déplacées et celui de https://migrants-refugees.va/fr/idp Pastoralia - N°5 | 2020 13
L'Église dans le monde Pierre Ruquoy, missionnaire au service des plus pauvres © Samuel Bruyninckx Des travailleurs haïtiens aux orphelins de Zambie Pierre Ruquoy a entendu l’appel de Jésus dès l’âge de 12 ans. Entré chez les pères de Scheut, il fut d’abord envoyé en République dominicaine en 1975, où il se consacra corps et âme, dans les « Bateys », à la défense des travailleurs haïtiens honteusement exploités par les planteurs de canne à sucre. Obligé de quitter le pays après été fermées comme ici, mais les le couvre-feu ; tous les stades de 30 ans sur place, à la suite de évêques ont demandé aux prêtres football étaient occupés par les menaces, il fut ensuite envoyé en de célébrer la messe tous les jours malades. C’était impressionnant. Zambie, où il a poursuivi sa voca- pour les personnes qui souffrent En Afrique, les autorités sont habi- tion : vivre avec les plus pauvres, du coronavirus et d’être dispo- tuées à des épidémies. en l’occurrence avec les milliers nibles jour et nuit afin d’accueillir d’enfants devenus orphelins à les paroissiens et de les écouter. Quelle est la situation actuelle cause du sida qui ravage le pays. de l'Église dans ces deux pays ? Le père Ruquoy est rentré en Bel- En Zambie, il n’y a jusqu’à présent Faut-il y craindre la prolifération gique pour raison de santé, mais que 10 décès et 1.200 cas. Ces des sectes ? son œuvre continue, notamment faibles nombres peuvent s’expliquer, En République dominicaine, grâce à l’aide que lui apportent, entre autres, par l’âge de la popu- l’Église catholique représente la depuis plus de 15 ans, les pro- lation, car l’espérance de vie n'y est majorité : plus de 80 %. Elle y jouit fesseurs et les élèves du collège que de 36 ans. Une autre explication de nombreux privilèges. Mais le Saint-Pierre de Jette. est que la Zambie n’est pas un pays travail avec les communautés de touristique. En outre, c’est un pays base est assez répandu dans le Avez-vous des nouvelles de la très marqué par la malaria où les pays. Le grand défi pour la Répu- situation sanitaire, suite au corona- habitants doivent une fois par an blique dominicaine, c’est la relation virus, dans les deux pays où vous prendre des médicaments qui – c’est avec le pays voisin, Haïti. Un grand avez exercé votre mission? une hypothèse – permettraient de nombre d’habitants de la Répu- En République dominicaine, nous mieux résister au coronavirus. blique dominicaine est très raciste. avons eu 544 décès et 20.415 Ses habitants se considèrent cas, beaucoup plus qu’en Haïti Il y a deux ans a eu lieu une terrible comme des blancs, alors qu’ils sont où les touristes sont nettement épidémie de choléra, bien pire mulâtres, tandis que ceux d’Haïti moins nombreux. Les églises ont que celle de coronavirus. Il y avait sont considérés comme des noirs 14 Pastoralia - N°5 | 2020
L'Église dans le monde venant d'Afrique. Il y a une tension Économiste, elle a passé deux ans à permanente qui se transforme, par- la Banque mondiale. Elle a écrit un fois, en conflit entre les deux pays. livre intitulé Dead aid, Aide fatale. Elle prétend que l’aide au développe- Des sectes ? En République domini- ment telle qu’elle s’est développée © Samuel Bruyninckx caine, il y en a, mais je ne crois pas en Afrique, par le biais des institutions que cela soit un danger. Le vaudou y et des gouvernements étrangers, a est très présent, comme en Haïti. La été un désastre total, tant au point majorité des gens, catholiques, protes- de vue économique que politique et tants ou membres de sectes sont aussi humanitaire. L’argent n’a pas été utilisé Le père Pierre Ruquoy et le « vaudouisants ». Le vaudou pense pour un développement durable. Il a collège Saint-Pierre de Jette qu’il n’y a qu’un seul Dieu, mais il s’agit empêché la créativité, détruit l’esprit d’un dieu très lointain avec des inter- d’entreprise des Africains et aussi Une fructueuse collaboration médiaires que l’on appelle « Lwas » et corrompu les dirigeants d'Afrique. Il et une histoire d’amitié per- qui portent le nom de saints. C’était faut absolument que l’aide que nous dure entre eux depuis de nom- une manière de protéger la religion apportons à l’Afrique permette aux breuses années… C’est par une vaudou. Il y a eu effectivement des gens d'être plus indépendants. action solidaire remontant, moments de persécution très forte par pour les prémices, aux alentours l’Église catholique. Mais aujourd’hui, En ce qui concerne la Zambie, il serait de l’année 2000, que le collège pas mal de prêtres sont en dialogue par exemple très important d’apporter Saint-Pierre de Jette se mobi- avec les membres du vaudou. une aide pour éradiquer le sida. C'est lise tant et plus chaque année, un des pays du monde le plus touché au travers de diverses activités En Zambie, l’Église catholique est par cette maladie. 16% de la popula- (marche parrainée, petits films minoritaire. Il y a 50 % de chrétiens, tion en sont affectés et 25% des enfants thématiques avec les élèves, parmi lesquels les catholiques sont sont orphelins, leurs parents étant vente de bracelets portant la majoritaires. La relation entre l’Église décédés à cause du sida. C’est un défi devise de l’orphelinat, flash catholique et les autres Églises chré- pour l’Église. J’ai recueilli des orphe- mobs…) durant les mois d’avril tiennes est très frileuse. Il n’y a pas de lins du sida, mais il faut aussi éduquer et de mai. En 2011, une équipe tension, mais il n’y a pas de relation les gens et les former. Car l’une des de professeurs et d’élèves s’est non plus. Les religions traditionnelles principales causes de cette maladie en même rendue en Zambie, pour demeurent très présentes, mais beau- Zambie, c’est l’alcoolisme. Quand on évaluer les besoins réels de l’or- coup plus difficiles à approcher. Leurs boit et qu’on est ivre, on oublie tout phelinat. Venir en aide au père adeptes croient aux mauvais esprits ce que l’on a appris sur la maladie. La Pierre Ruquoy a toujours été un et aux sorciers. J’y pratiquais très première chose consiste donc à lutter objectif en soi. C’est pourquoi le régulièrement des exorcismes. contre l’alcoolisme. Les campagnes collège organise une collecte de du gouvernement se contentent de fonds indispensable à la péren- La pauvreté est-elle une fatalité? promouvoir le préservatif, mais le pro- nité des œuvres de ce « témoin J’ai pris comme référence pour cette blème n’est pas aussi simple. Il y a une infatigable du Christ ressuscité » question le livre d’une Zambienne, éducation qui doit se faire. qui n’a eu de cesse, toute sa vie Dambisa Moyo, qui, selon le Time durant, d’aider les laissés pour Magazine, compte parmi les 100 per- nnPropos recueillis par compte de la société. sonnes les plus influentes du monde. Jacques Zeegers, le 11 juin 2020 CONCOURS À Le livre Leur vie, un cri ! reprend 40 ans de vie de Pierre Ruquoy avec les GAGNER plus pauvres : de la République dominicaine à l’orphelinat en Zambie. Ce livre est accompagné d’un CD enregistré avec les enfants en Zambie et les élèves du collège Saint-Pierre à Jette. Leur vie, un cri !, Pierre Ruquoy, Mediel asbl, 2014. © Hubert van Ruymbeke Commander le coffret livre + CD à 15 € : samuelbruyninckx@gmail.com Découverte en vidéo de l’orphelinat « Sunflowers » : www.elorah.be Trois exemplaires à gagner ! (voir page 27) Pastoralia - N°5 | 2020 15
Vous pouvez aussi lire