Paul Lowry Phantasma Sylvain Campeau - CV Photo - Érudit
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Document généré le 8 déc. 2021 15:23 CV Photo Paul Lowry Phantasma Sylvain Campeau Numéro 33, hiver 1995–1996 URI : https://id.erudit.org/iderudit/21690ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Les Productions Ciel variable ISSN 1196-9261 (imprimé) 1923-8223 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Campeau, S. (1995). Paul Lowry : Phantasma. CV Photo, (33), 22–29. Tous droits réservés © Les Productions Ciel variable, 1995 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/
p u lowry Phantasma L es travaux de Paul Lowry, depuis Photographs est corrompu; la lecture est impossible parce que l'on from the Grand Academy ofLagado (1989-1990) a trop étroitement et trop littéralement obéi à cette lo- jusqu'à Man Figures (1995) en passant par gique. Du coup, on est frappé de ce que Lowry fait de Copulation Studies (1993), s'inspirent de diverses la connaissance une violence, une lacération profonde sources. Une des premières est le système pho- et démembrante. tographique de J. H. Lamprey, un anthropologue bri- Serait-ce que le vrai savoir nous ouvre, qu'il ne tannique qui cherchait à établir un catalogage compa- nous ramène pas à l'identification — rappelons que ratif d'hommes issus de différentes races. Pour réussir l'anthropométrie et la physiognomonie sont affaires Stabat Mater à offrir une image qui puisse donner prise à l'observa- After the Cantata Délie Cinque Stanze d'identité humaine — mais aux surfaces changeantes ? tion scientifique, celui-ci avait résolu de placer leur by Giovanna Marini Serait-ce qu'il ne peut y avoir de savoir métonymique, corps nu devant un quadrillé fait de carrés de deux 1992 que le dedans n'apparaît pas nécessairement sur le pouces. 36 x 42 cm dehors et que la photographie est peut-être une science Une seconde piste nous conduit à regarder du de ce qui bouge à la surface, sans rien offrir sur le de- côté de la phrénologie et de la physiognomonie, deux dans des choses, une science du moiré, des infinis cha- sciences vaguement ésotériques popularisées dans la toiements du lustre des lieux et des temps ? foulée d'un XIXe siècle aux engouements extrêmes et Bachelier en arts plastiques de C'est cet enchevêtrement que l'on voit se mani- aux symbioses parfois confondantes entre science et l'Université du Québec à Chicoutimi fester dans Copulation Studies. Dans cette série de li- croyance mystique. et en photographie du Ryerson quides et de semences filandreuses, des corps s'inter- Il apparaîtrait donc que le progrès scientifique Polytechnical Institute de Toronto, pénétrent et semblent se conjuguer dans la furie qu'est dépend de l'observation d'objets figés, catalogués, sou- P a u l L o w r y possède de plus une tout acte sexuel. Des corps morcelés — vestiges anthro- pesés et jaugés par des moyens divers, dont la photo- maîtrise de l'université Concordia. Il pologiques, objets d'étude soumis à l'observation scru- graphie. Les chiffres et les mesures peuvent résulter en enseigne à l'École des beaux-arts du puleuse, à l'investigation organique et éventrante pour des découvertes troublantes, et les typologies font la Centre des arts Saidye Bronfman, à en arriver à un meilleur savoir de ce que nous sommes course aux recoupements et aux distinctions. De celles- Montréal. Paul Lowry expose régu- et du destin qui nous a amenés à ce que nous sommes ci, croit-on, nous viendra une connaissance du monde. lièrement ses travaux dans les galeries —, nous passons à cette promesse qu'est toute pro- Un autre fantasme travaillé et exploité par Lowry, par de Montréal et ailleurs au pays. création, à un pari sur le futur. La matière organique la référence à la phrénologie et à la physiognomonie, n'est plus scrutée et analysée, dans ces restants évidés, est que sur la surface se profilent des signes de ce que S y l v a i n C a m p e a u est critique mais elle est prise dans ce que nous nous échangeons l'intérieur peut receler. Ce fantasme apparaît tout de d'art, essayiste, conservateur indé- en elle pour faire une gageure d'existence. Mixtion de go dans ces têtes éclatées, ces corps éventrés et ces inté- pendant et poète. Il a été, au cours du nos échanges, pulsion de nos présences et essence de rieurs qui s'étalent sur la planche vaguement anthro- dernier Mois de la Photo à Montréal, ce que nous sommes par ce qui nous pousse à nous dé- pométrique (car c'est bien de cela qu'il s'agit : une an- commissaire de l'exposition À suivre..., passer en un autre, la photographie troque des essences thropométrie, une mesure de l'homme, ramené de sa présentée à la maison de la culture en des couplages et en des collages qui empruntent sa complexité à des rouages et à des mécanismes mesu- Plateau Mont-Royal. Son dernier matière première à mille et mille tissus de réel. La pho- rables et quantifiables!). Dans ces images, l'intérieur ouvrage, Chambres obscures — pho- tographie est la libido du réel. Pervers-polymorphes, macule l'extérieur, brouille les pistes de lecture, rend tographie et installation —, a paru à les Man Figures en sont le versant refoulé. les chiffres, souillés par le sang, illisibles. Le système la fin de novembre aux éditions Trois. Sylvain Campeau 22 CVphoto
p u lowry Phantasma P aul Lowry's work, from Photographs from the from this system of logic, which we have too closely Grand Academy of Lagado (1989-90) through and literally obeyed. Suddenly, we are hit with the fact Copulation Studies (1993) to Man Figure (1995), that Lowry has turned knowledge into violence - a has been inspired by various sources. One of deep and dismembering laceration. the most important is the photographic system Could it be that true knowledge leads us not to of J.H. Lamprey, a British anthropologist who tried identification - recall that anthropometrics and phys- to create a comparative visual catalogue of different iognomy are ways of identifying humans - but to human races. In order to provide images that could Hirtia changing surfaces ? Although we might gain métonymie be used in scientific observation, he placed his nude 1993 knowledge, what is inside does not necessarily appear subjects in front of a two-inch-square grid. 36 x 42 cm on the outside. Thus, photography is, perhaps, a sci- A second influence leads to phrenology and ence of that which moves on the surface, without physiognomy, two vaguely esoteric "sciences" popu- offering any information about what exists beneath - larized in the nineteenth century, a time of extreme fads a mottled science of immeasurable shimmerings on and sometimes dumbfounding symbioses between the lustre of places and times. It is this entanglement science and mysticism. P a u l L o w r y has bachelor's degrees that we see manifested in Copulation Studies. In this It would seem, then, that scientific progress has in visual arts from the Université du series of liquids and streaks of semen, bodies interpen- relied on observation of objects that are fixed, cata- Québec à Chicoutimi and in photog- etrate, seeming to couple with the fury that is part of logued, weighed, and measured by various means, raphy from Ryerson Polytechnical all sexual acts. From carved-up bodies, anthropological including photography. The resulting numbers and Institute in Toronto, and a master's remains, objects of study submitted to scrupulous measurements can result in disturbing discoveries, as degree from Concordia University. observation, via an organic, eviscerating investigation typologies take recourse to cross-references and dis- He teaches at the Saidye Bronfman for a better knowledge of what we are and of the fate tinctions. From such classifications, it is believed, we Centre's School of Fine A r t s in that has made us what we are, we proceed to this will come to know the world. The illusion explored Montreal. His works are exhibited promise that all procreation holds out - a wager on and exploited by Lowry, through references to phrenol- regularly in galleries in Montreal and the future. The organic matter is no longer scrutinized ogy and physiognomy, is that the surface bears signs throughout Canada. and analyzed in these hollowed remains, but it is held of what may be hidden inside. This illusion seems per- within that which we exchange between ourselves in fectly plausible in the exploded heads, gutted bodies, Sylvain C a m p e a u is an essayist, art order to forge a chancy existence. The micturation of and their insides displayed on the vaguely anthropo- critic, independent curator, and poet For our exchanges, the pulse of our presences, the essence metric grid (for this is exactly what it is: an anthropo- the last Mois de la Photo à Montréal, he of what in us compels us to go beyond ourselves into metrics, a measurement of the human being, reduced directed the exhibition À suivre..., ot the another - photography trucks in these essences of cou- from its complexity to measurable and quantifiable Maison de la Culture Mont-Royal. His plings and collages that form the raw material for the gears and mechanisms !). In these images, the interior latest work, Chambres obscures - thousands and thousands of threads in the warp and maculates the exterior, blurs the possible readings, soils photographies et installation, will be weft of the real. Photography is the libido of the real. the numbers with blood to make them illegible. The published at the end of November by Perverse polymorphs, Man Figures roll back up the system is corrupted; it is impossible to read anything Éditions Trois. slope. Sylvain Campeau CVphoto 29
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