Quels scores pronostiques dans le sepsis ?
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Réanimation 2002 ; 11 : 178-85 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S1624069302002293/SSU MISE AU POINT Quels scores pronostiques dans le sepsis ? J.R. Le Gall1*, P. Metnitz2 1 Service de réanimation médicale, hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude Vellefaux, université Lariboisière Saint-Louis, 75010 Paris, France; 2 Department of Anesthesiology and general intensive care, University of Vienna, 1090 Vienna, Austria (Reçu le 21 janvier 2002 ; accepté le 22 janvier 2002) Résumé Les scores de sévérité dans le sepsis ont pour but de classer les patients ou de juger de la comparabilité des groupes dans les essais thérapeutiques. On a pu les proposer pour déterminer les groupes de patients « de sévérité moyenne » susceptibles de bénéficier d’un traitement coûteux. Les scores généraux sont les plus employés, qu’il s’agisse de scores de gravité classiques donnant le risque de décès ou de systèmes de défaillance viscérale. De nombreux scores spécifiques ont été décrits dont le plus populaire est le score de FINE utilisé pour les pneumopathies communautaires. La classification nord-américaine en SIRS, sepsis, sepsis sévère, choc septique, défaillance multiviscérale, reste très utilisée bien qu’aboutissant à des groupes non homogènes. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS défaillance multiviscérale / score de sévérité / scores spécifiques / sepsis Summary – What severity scores in sepsis? The severity scores are used in septic patients to get a classification, or compare the severity of treated and placebo groups undergoing therapeutic trials. They have been sometimes used to determine the severity of patients before starting an expensive drug. The general scores are the most used : either general scores calculated on the last day or organ dysfunction systems calculated every day. Specific scores have been published. Among them the Fine score for community acquired pneumonia is commonly used. The ACCP-SCCM classification in SIRS, sepsis, severe sepsis, septic shock, multi organ failure remains very popular in spite of the heterogeneity of the groups. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS multi organ failure / sepsis / sepsis score / severity scores L’INFECTION ET LE SEPSIS ou sepsis des anglo-saxons, terme qui tend de plus en plus à être utilisé en France. L’infection est définie par l’envahissement de tout ou partie de l’organisme par des micro-organismes (bacté- COMMENT APPRÉCIER LA SÉVÉRITÉ DU SEPSIS ? ries, virus, champignons ou parasites). La gravité de l’infection se manifeste par des signes inflammatoires, La sévérité d’une maladie dépend de nombreux facteurs réaction de l’hôte contre l’envahissement, qui peuvent qui peuvent être classés en facteurs chroniques ou aigus. aller jusqu’au choc septique et jusqu’aux défaillances Les facteurs chroniques représentent la réserve physio- viscérales. Tous ces signes constituent l’état septique, logique : l’âge en fait partie, de même que l’état de santé *Correspondance et tirés à part. Adresse e-mail : jr.legall@sls.ap-hop-paris.fr (J.R. Le Gall).
Quels scores pronostiques dans le sepsis ? 179 antérieur. Ce dernier peut être évalué par la mobilité médiaire –défini par un score précis– que le traitement (les quatre classes A, B, C, D de Knaus) ou par l’exis- peut être efficace. tence de maladies chroniques. Le score de Mac Cabe, publié il y a 20 ans à propos des septicémies à bacilles à Objectifs des scores de gravité Gram négatif, est toujours utilisé ; il définit trois grou- pes de patients : sans maladie chronique, avec maladie Les scores ou indices de gravité stratifient les patients en chronique dont la survie est de cinq ans au moins, avec fonction de leur pronostic. Les scores statiques sont maladie chronique dont l’espérance de vie ne dépasse établis à l’admission, dans les premières 24 h pour pas un an. De plus en plus, actuellement, sont mis en établir la probabilité de décès hospitalier. Les scores évidence des facteurs génétiques qui pourraient impli- dynamiques sont répétés à intervalles variables. quer les différences de comportement des individus Les scores de sévérité estiment la probabilité de mor- devant des infections similaires. talité pour des groupes de patients. La probabilité indi- Les facteurs aigus sont représentés par les désordres viduelle vise à obtenir une prédiction aussi précise que cliniques et biologiques (parfois appelé « score physio- possible, mais les problèmes méthodologiques ne sont logique ») ; le diagnostic de la maladie aiguë, le « biais pas encore résolus. C’est dans ce deuxième objectif que du temps écoulé » (leads time bias) qui traduit le retard les scores répétitifs –ou dynamiques– sont conçus. au traitement, ou qui tient compte des modifications Le taux de mortalité standardisé (standard mortality qu’un traitement préalable a pu produire dans le score ratio) est défini comme le rapport entre la mortalité physiologique. En matière de diagnostic, les caractéris- observée et la mortalité prédite. Ce chiffre peut être tiques de l’infection interviennent : localisation de utilisé pour guider l’utilisation des ressources ou amé- l’infection, nature du germe, existence d’hémocultures liorer la qualité. Les scores de sévérité peuvent aussi être positives utilisés dans la recherche clinique pour stratifier les Nous ne considérerons pas ici les systèmes prenant en patients, comparer les groupes traités et non traités. compte les dosages de TNF et d’IL1-, car ils ne Les scores de gravité doivent répondre à des qualités constituent pas à proprement parler des modèles de mathématiques précises. Différentes méthodes permet- probabilité ; d’autre part, ils nécessitent des prélève- tent d’apprécier la précision d’un score. ments et des dosages spécifiques qui ne sont possibles que dans certains laboratoires. Ils ne peuvent être utili- Recherche d’exactitude sés en pratique courante. Les scores récemment publiés sont utilisés dans une BASES THÉORIQUES DES SCORES DE GRAVITÉ équation donnant la probabilité de décès hospitalier. La qualité de cette probabilité est évaluée par la mesure de Quels sont les buts des scores de gravité ? Autrement la calibration, de la discrimination et de la fiabilité. dit, pourquoi utiliser des scores de gravité (spécifiques La calibration estime l’étroitesse de la corrélation ou non) dans le sepsis ? entre les mortalités prédite et observée dans les différen- Les scores sont utilisés essentiellement dans les essais tes classes de sévérité. Elle est mesuré par le test de thérapeutiques, afin de vérifier que les groupes « traité » goodness of fit (qualité de l’adéquation) où un p > 0,05 et « témoin », sont comparables. On a pu également indique une bonne calibration. utiliser des modèles de probabilité fondés sur des scores, La discrimination examine comment le modèle sépare comme le SAPS II « customisé » c’est-à-dire adapté au les individus qui survivront de ceux qui décèderont. Ce sepsis [21]. Dans ce cas, une probabilité de mortalité est paramètre est mesuré par l’aire sous la courbe ROC établie dans une base de données en fonction de la (receiver operating characteristics) où une aire à 0.5 indi- gravité des patients. Dans un autre groupe de patients, que l’absence de discrimination, 0.9 une discrimination soumis à un traitement spécifique, on observe la diffé- excellente, 1.0 une discrimination parfaite. rence entre mortalités prédite et observée. Cependant, La fiabilité intra- et interobservateurs est mesurée par cette technique n’a pas été poursuivie car elle était à la concordance dans le recueil des données pour le l’origine de biais importants. même patient. En général, plus la subjectivité d’une Les scores peuvent aussi être utilisés –au moins théo- donnée augmente (par exemple, le choix d’un diagnos- riquement– pour identifier un groupe de patients pour tic principal), plus la fiabilité décroît. lesquels un traitement coûteux est peut être efficace : un tel traitement ne saurait être employé pour les patients Validité du contenu trop peu sévères –qui ont de toute façon un bon pro- nostic– ou, au contraire, très sévères– qui sont de toute Un score doit comprendre plusieurs types de variables. façon condamnés. C’est dans le groupe de gravité inter- La mortalité hospitalière dépend des anomalies physio
180 J.R. Le Gall, P. Metnitz logiques, du diagnostic d’admission (médical, chirurgi- thérapeutiques, surtout si le score est utilisé pour juger cal programmé) de la localisation du patient et du les résultats d’un traitement. temps écoulé avant l’admission. Chacun de ces domai- La calibration, la discrimination et la fiabilité doivent nes doit être pris en compte dans un modèle de proba- être mesurées dans un groupe de « développement » et bilité de décès. Cependant, lorsque le nombre de dans un groupe de « validation ». Une validation pros- variables augmente, la fiabilité et la facilité de recueil pective dans un groupe séparé mais similaire est l’appro- diminuent. Un compromis raisonnable doit être trouvé che la plus rigoureuse. Les techniques de séparation de entre ces exigences opposées. la population de référence en groupe de « développe- ment » et groupe de « validation » sont moins robustes Rigueur méthodologique mais restent les plus utilisées. Nous allons successivement décrire les scores géné- La population de référence sert à développer le modèle. raux utilisés, les scores généraux modifiés pour le sepsis, Tous les patients consécutivement admis doivent être les scores spécifiques du sepsis (en particulier sa classi- inclus. Des populations suffisamment larges, provenant fication ACCP/SCCM-classification « américaine ») ou de différentes unités et, mieux encore, de différents pays de certaines infections (pneumonies). (comme c’est le cas de l’IGS II) sont nécessaires pour diminuer le biais possible résultant des critères d’admis- SCORES GÉNÉRAUX ET SCORES SPÉCIFIQUES sion ou de stratégies thérapeutiques différentes. Le case- mix, c’est à dire le type de patients inclus, doit être Les scores de sévérité généraux ou spécifiques utilisés détaillé dans l’article princeps. pour établir une probabilité de mortalité ont évolué Les variables incluses peuvent être sélectionnées et depuis les années 1980. Au début simple identification pondérées par un groupe d’experts (APACHE II), ou des facteurs de risque, ils ont abouti dans une quantifi- par une technique de régression logistique multiple. cation et une synthèse des différents facteurs. Ces diffé- Cette dernière technique, plus rigoureuse, a été utilisée rents systèmes ont commencé à mesurer le risque en pour l’IGS II, l’APACHE III et le MPM II. L’utilisa- fonction du nombre d’organes défaillants. Ultérieure- tion des variables recueillies en routine diminue l’erreur ment des techniques sophistiquées ont permis de sélec- systématique faite en considérant comme normales les tionner des variables, de leur donner un poids spécifique valeurs non mesurées. en fonction de leur degré d’anormalité. Un score chiffré Le moment de la mesure est également important : a pu être transformé en risque de décès par l’utilisation les variables les plus anormales des premières 24 h de la régression logistique. peuvent différer de celles recueillies au moment de Quel est le but de tels systèmes ? Non d’identifier le l’admission. Ces systèmes (IGS II et APACHE) qui risque individuel mais de classer des patients, comparer prennent en compte les variables des premières 24 h ne les groupes dans les essais thérapeutiques, exceptionnel- peuvent évidemment servir de critères d’admission. Sa lement définir les patients qui peuvent bénéficier d’un durée du traitement préalable à l’admission en réanima- produit coûteux. tion peut aussi influencer le pronostic. Enfin, les varia- Nous avons détaillé sur le tableau I les principaux bles mesurées ne doivent pas inclure de modalités scores utilisés double sepsis. Tableau I. Les principaux scores proposés pour les patients septiques. Référence Année Nom Composants Population Validation externe Commentaire [1] 1980 Multisystem Échelle de 0 à 4 en fonc- Réanimation Oui- Appliqué à des patients en L’un des systèmes les plus sim- Organ Failure tion du nombre d’organes chirurgicale choc septique, le score n’était pas ples, mais il prend pas en compte (MSOF) défaillants valide car il s’agissait de malades la sévérité de chaque défaillance médicaux [2] 1981 APS Échelle de 0 à 124 , 34 Réanimation Oui- l’APS a été testé chez des Première tentative d’utiliser des paramètres physiologiques générale malades chirurgicaux paramètres physiologiques pour mesuré le 1er jour mesurer la sévérité [3] 1983 Sepsis Seve- Échelle de 0 à 75 analysant Malades chirur- Oui- Comparé à l’APS chez les En utilisant un score >40 comme rity Score SSS 7 systèmes d’organe, cha- gicaux septi- patients ayant une infection cut off pour réduire le décès cun coté de 0 à 5. Le score ques intra-abdominale. Un SSS l’exactitude de prédiction est de final est obtenu en multi- modifié corrélait bien avec l’APS 77% pliant au carré les trois et les deux avec la mortalité scores les + élevés
Quels scores pronostiques dans le sepsis ? 181 Référence Année Nom Composants Population Validation externe Commentaire [4] 1983 Simplified Échelle de 0 à 56 compre- Réanimation Oui- les capacités prédictives ont Le SAPS II donne une probabi- Acute Physio- nant 14 données biologi- générale encore été augmentées, avec le lité de mortalité. Les scores vont logic Score ques et cliniques cotées de SAPS II étudié sur 13000 de 0 à 182 pts, dérivés de 12 SAPS I et 0à4 patients européens et nord amé- variables aiguës et quatre varia- SAPS II (ou ricains [5] bles chroniques IGS) [6] 1983 TISS (Thera- Échelle de 0 à 56 compre- Réanimation Oui- comparé à l’APS et pour D’abord publié en 1974 puis peutic Inter- nant 14 données biologi- générale estimer le risque de mortalité, il modifié en 1983, d’abord utilisé vention ques et techniques cotées a les mêmes qualités prédictives pour déterminer l’allocation de Scoring Sys- de 0 à 4 ressources, puis pour la sévérité tem) des patients. N’a pas été testé dans le sepsis [7] 1983 Grading of Échelle de 0 à 45 évaluant Malades chirur- Oui- validé sur 135 patients avec Le scoring des dysfonctions sepsis (Sepsis quatre types de variables : gicaux septi- une variété d’infections. Score de d’organe et les effets locaux de Score SS) lésions locales, tempéra- ques 20 comme cut off donne une l’infection reposent sur des bases ture orale, dysfonctions exactitude globale de 84%. Une subjectives. d’organes et données de tentative de validation sur le laboratoire choc septique a échoué. SS asso- cié au dosage du complément est trouvé adéquat sur 100 % des cas [8] 1983 Péritonites Score tenant en compte Infections Non Publication originale en alle- Index l’âge, l’étendue de l’infec- intra- abdomi- mand tion, le cancer, les risques nales cardiovasculaires et leuco- pénie [9] 1984 Surgical APS combiné avec un Infections Oui- un essai multicentrique sur L’APS seul est mieux corrélé, Infection score pour la classification intra- abdomi- 187 patients, trouve une bonne même sans classification anato- Stratification anatomique de l’origine de nales corrélation entre l’augmentation mique SIS l’infection intra- du score et la mortalité abdominale [10] 1985 APACHE II Le nombre de variables Réanimation Oui- nombreuses études, résul- Les corrélations de ce score sont physiologiques est de 12, générale tats variables moins bonnes dans le choc septi- l’âge et l’évaluation de que l’état de santé préalable sont pris en compte [11] 1985 Multiorgan Score allant de 0 à 14 avec Réanimation Oui- validé sur 71 patients en Grande fréquence de fausses pré- failure scoring le scoring de 7 organes générale :choc septique, mais il existe une dictions de mortalité system MOF (0-1-2) patients avec superposition importante entre défaillance (s) les survivants et les non survi- viscérale(s) vants. Ce n’est pas un bon score discriminant [12] 1985 Acute Organ Échelle de 0 à 3 en fonc- Réanimation : Oui- validé sur 71 patients en Simple à utiliser mais les catégo- System tion du nombre d’organes patients avec choc septique. Le score de 3 est ries ne permettent pas une pré- Failure Sco- défaillants défaillance (s) associé à une mortalité de 91% diction très précise ring System viscérale(s) versus 43-45% pour 0-2 OSF [13] 1985 Mortality Score créé à partir de para- Réanimation Oui- mais ne fut pas capable de Redéfini avec des scores modifiés, prediction mètres cliniques et physio- générale discerner entre les survivants et en fonction du temps, mais la model MPM logiques, plus l’histoire non survivants dans un choc précision n’augmente que clinique, transformé en septique jusqu’à 77 à 80% probabilité de mortalité avec l’aide d’un pro- gramme informatique [14] 1986 Mannheim Échelle de 0 à 46 compre- Péritonites Non- mais la précision rapportée Utilité limitée aux infections peritonitis nant l’âge, le sexe, les est de 92% avec un score discri- intra-abdominales. Méthodolo- Score (MPS) défaillances viscérales, minant de 29 gie peu détaillée l’existence d’un cancer, la durée de la maladie, la source de l’infection, le caractère du liquide périto- néal [15] 1988 Outcome Comprend un « injury Trauma, sepsis Non, mais bonne discrimination Superposition importante entre predicitve severity score » modifié, le entre décès, infections majeures les catégories, un score de 150 Score OPS degré de contamination et guérisons produit une exactitude de 90% bactérienne lors de la lésion initiale, et l’expres- sion de l’antigène mono- cyte DR
182 J.R. Le Gall, P. Metnitz Référence Année Nom Composants Population Validation externe Commentaire [16] 1991 APACHE III Échelle de 0 à 299 com- Réanimation Oui, validé dans plus de 17000 Exact pour 90% des patients prenant l’APS (Acute Phy- générale admissions en réanimation. Une pour la prédiction de mortalité siologic Score) de 0 à 252, modification utilisant l’APS, non spécifique pour le sepsis. l’évaluation de l’état de plus la localisation avant la réa- Nécessite un computer et un santé chronique (0-23), nimation, plus l’étiologie du accès payant pour produire le l’âge (0-24) sepsis a été publiée. Cette risque de mortalité méthode ne discrimine pas les patients avec choc et sans choc [17] 1991 Baltimore Échelle comprenant 13 Brûlés Non, mais chez 41 patients, Pas de validation externe, appli- sepsis Scale paramètres, comprenant ceux qui décédés ont un score à cable seulement aux brûlés infec- des paramètres physiologi- 24 en moyenne contre 7 pour les tés. ques, le Score de Glasgow survivants modifié, l’utilisation d’antibiotiques [18] 1992 Septic Shock Échelle de 0 à 23 (simpli- Choc septique Non, mais la base de données Validé seulement pour le choc Scores (sim- fié) ou de 0 à 37 (com- rétrospective a été utilisée pour septique. Meilleur pouvoir pré- plifié et com- plet), avec des paramètres créer un modèle prospective- dictif en interne que les scores plet) cliniques, biologiques, et ment validé sur 88 patients généraux. hémodynamiques. Le score complet ajoute des variables obtenues de 12 à 24H après le début de la maladie, la maladie sous- jacente et le type d’infec- tion [19] 1993 Organ Dys- Sept dysfonctions d’orga- Malades de Non, validation interne sur Sensibilité et spécificité compara- function nes affirmées sur la théra- réanimation 1070 patients avec une exacti- ble au SAPS. Ne prédit pas le and/or Infec- peutique et l’infection. Le avec au moins tude de 84% risque individuel tion (ODIN) risque de décès est calculé une défaillance par régression logistique viscérale [20] 1993 Multiple Sys- Comprend sept dysfonc- Syndrome Non, dérivé d’une base de don- Exactitude globale de 75% pour tem Organ tions d’organes. Un septique nées de 154 patients avec un la prédiction individuelle Failure modèle de régression logis- syndrome septique. (MSOF) tique donne le risque du décès pour chaque type de défaillance, en fonction de l’âge [21] 1995 SAPS II et Plus de 1000 patients sepsis sévère en Non, mais sur les 1130 patients Il s’agit ici du seul exemple de MPM II ayant les critères de sepsis réanimation ayant un sepsis sévère précoce, la scores généraux adaptés, sans adaptés au sévère sont étudiés : les performance des modèles adap- modification des données sepsis sévère modèles adaptés (customi- tés est excellente, aussi bien dans recueillies, à des patients atteints précoce sés) sont appliqués le groupe de développement que de sepsis sévère dans le groupe de validation [22] 1995 Multiple Un score de défaillance Réanimation Oui, ce score a été comparé à Système objectif, comme le organ dys- viscérale calculé à partir de chirurgicale l’APACHE II et l’OSF et trouvé LOD, mais établi à partir de la function six défaillances cotées cha- plus performant littérature Score cune de 0 à 4 et développé (MODS) sur 692 malades [23] 1996 Logistic Sur la base de donnée Réanimation Oui, le système a été » appliqué La validation externe du système Organ Dys- européano-nord- générale soit seul [24, 26] soit associé au original ou légèrement modifié a function américaine de 13152 SAPS II [25, 27] dans d’autres été prouvée dans plusieurs études (LOD) Sys- patients les variables phy- bases de données chez des mala- tem siologiques définissent la des septiques [24, 27] ou non dysfonction de six organes [25] principaux . le système a été établi par la régression logistique [28] 1998 SOFA Score subjectif évalué sur Réanimation Non, réévaluation dans la même Les défaillances hépatiques réna- Sequential 1449 malades. six générale population par le même groupe : les et hématologiques semblent Organ Failure défaillances cotées chacune c’est la défaillance cardiovascu- moins importantes Assessment de 0 à 4 laire qui a le plus grand rôle dans le pronostic LE SYSTÈME SIRS-SEPSIS-CHOC SEPTIQUE classer les états inflammatoires et septiques en groupes de gravité croissante [29], allant du « SIRS » au syn- En 1992, deux sociétés américaines (l’American Col- drome de défaillance viscérale multiple. lege of Chest physicians et la Society of Critical Care Le SIRS (Sytemic inflammatory Response Syndrome) Medecine) publient des définitions qui ont pour but de est le premier stade de l’inflammation. Il peut exister en
Quels scores pronostiques dans le sepsis ? 183 Tableau II. Éléments témoins de la gravité d’une pneumonie communautaire (d’après [32]). Terrain sous jacent Données cliniques Données paracliniques Age > 65 ans Suspicion d’inhalation Données biologiques Comorbidités Fréquence respiratoire > 30 cycles/min Neutropénie < 1 000 éléments/mm Insuffisance respiratoire chronique Détresse respiratoire Leucopénie < 4 000 éléments/mm3 Diabète Pression artérielle systolique < 90 mmHg Hyperleucocytose > 30 000 éléments/mm3 Insuffisance rénale chronique Pression artérielle diastolique < 60 mmHg PaO2 < 60 mmHg en air ambiant Insuffisance cardiaque congestive Température > 40 °C ou < 35 °C PaCO2 > 50 mmHg en air ambiant Insuffisance circulatoire cérébrale Confusion ou altération de la conscience Créatininémie>12 mg/L Pathologie hépatique chronique Diffusion évidente de l’infection : Urée > 0.2 g/L Pathologie neuromusculaire Arthrite septique Hématocrite < 30% ou hémoglobine < 9g/dl Splénectomie ou asplénisme fonctionnel Méningite, etc. Acidose métabolique Immunodépression (corticothérapie ou traite- Troubles de l’hémostase ment immunodépresseur au cours des six mois écoulés) Sida ou infection par le VIH avec taux de Données radiologiques CD4 < 200/mm3 Alcoolisme et/ou dénutrition Infiltrat > un lobe Altération mentale Épanchement pleural Lésion cavitaire Extension rapide des lésions infiltratives dehors d’un contexte infectieux. Il se caractérise par Dans les études pronostiques, la mortalité augmente deux ou plus des anomalies suivantes : en fonction du groupe (sepsis, sepsis sévère, choc), mais – température supérieure à 38 °C ou inférieure à 36° ; on remarque une inhomogènéité, sauf en ce qui – rythme cardiaque supérieur à 90/min ; concerne le choc septique où la mortalité hospitalière – rythme respiratoire supérieur à 20/min ou est supérieure à 50 % dans toutes les séries. PaCO2 < 3 2 tor ; Dans les essais thérapeutiques, cette classification ne – globules blancs supérieurs à 12 000/mm3 ou infé- suffit pas car il faut pour assurer la comparabilité des rieurs à 4 000/mm3 ; patients, y associer un score de gravité. Le sepsis est la réponse systémique à l’infection. Il est Au total, bien qu’imparfaite et subjective, cette clas- caractérisé par un SIRS (selon la définition ci-dessus) sification nord-américaine est largement utilisée. Il est associé à une infection. certain aussi que le désormais célèbre « SIRS » peut Le sepsis sévère est un sepsis associé à une dysfonction recouvrir de nombreuses situations qui peuvent se ren- d’organe, une hypoperfusion ou une hypotension. contrer en dehors de la réanimation et même chez des L’hypoperfusion peut se traduire par une hyperlactaté- patients ambulatoires. mie, une oligurie ou une altération de la conscience. Le choc septique est un sepsis avec hypotension qui Exemple d’un score spécifique : le score de FINE persiste en dépit d’un apport suffisant de fluides. Les utilisé pour les pneumonies communautaires patients qui sont sous vasopresseurs peuvent avoir une pression artérielle normale. Cependant l’hyperlactaté- Fine et al. [32] ont défini en 1997 les critères de gravité mie, l’oligurie ou les troubles de conscience persistent. des pneumonies communautaires. Ils sont représentés L’hypotension est définie par une pression systolique dans le tableau II. Ce n’est pas à proprement parler un inférieure à 90 mmHg ou une réduction de plus de score, mais un système permettant de rechercher des 40 mmHg par rapport à la pression habituelle. critères d’hospitalisation d’une part, des critères Le syndrome de défaillance viscérale multiple est d’admissions en réanimation, d’autre part. défini par une altération des fonctions telles que Les critères sont classés, comme cela est classique, en l’homéostasie ne peut être maintenue sans intervention critères de terrain (ou maladies chroniques ou état de (exemple : hémodialyse, ventilation artificielle). santé antérieur), critères de gravité soit cliniques (fré- quence respiratoire) soit paracliniques (PaO2), critères Application de cette classification de diagnostic ou plus exactement « d’étendue des lésions », c’est-à-dire les données radiologiques. Depuis dix ans de nombreuses études ont étudié cette On retrouve à la lecture de ce système, la plupart des classification pour définir le pronostic des patients [30] éléments qui font partie des scores généraux. Utilisant ou comme critères d’entrée dans des essais thérapeuti- la méthode de Fine, Ewig et al. [33] ont proposé des ques [31]. critères d’admission en réanimation, ce qui peut avoir
184 J.R. Le Gall, P. Metnitz des applications pratiques intéressantes. Ainsi, ils consi- 12 Knaus WA, Wagner D. Multiple system organ failure : epide- miology and prognosis. Crit Care Clin 1989 ; 5 : 221-32. dèrent comme critères mineurs la pression artérielle 13 Lemeshow S, Teres D, Pastides H, Avrunin JS, Steingrub JS. A systolique à moins de 90 mmHg, l’atteinte pulmonaire method for predicting survival and mortality of ICU patients multilobaire, la PaO2/FiO2 < 250 mmHg, comme cri- using objectively derived weights. Crit Care Med 1985 ; 13 : 519-24. tères majeurs la nécessité d’une ventilation mécanique 14 Teichmann W, Wittman DH, Andreone PA. Scheduled reope- ou l’existence d’un état de choc. Une admission en rations for diffuse peritonitis. Arch Surg 1986 ; 121 : 147-52. réanimation paraît justifiée lorsqu’existent deux critères 15 Hershman MJ, Cheadle WG, Kuttinec D, et al. An outcome predictive score for sepsis and death following injury. Injury mineurs ou un critère majeur. Avec une telle règle, la 1988 ; 19 : 263-6. prédiction positive d’admission en réanimation est de 16 Knaus WA, Wagner DP, Draper EA, Zimmerman JE, Ber- gner M, Bastos PG, et al. The Apache III prognostic system. 75 %. Risk prediction of hospital mortality for critically ill hospitalized adults. Chest 1991 ; 100 : 1619-36. 17 Meek M, Munster AM, Winchurch RA, Diskerson C. The CONCLUSION Baltimore sepsis scale. Measurement of sepsis in patients with burns using an new scoring system. J Burn Care Rehabil 1991 ; 12 : 564-8. Dans le sepsis de nombreux scores pronostiques ont été 18 Baumgartner JD, Büla C, Vaney C, Wu MM, Eggimann P, proposés. Il ressort de cette revue que les scores spécifi- Perret C. A novel score for predicting the mortality of septic shock patients. Crit Care Med 1992 ; 20 : 953-60. ques n’ont pas d’avantage évident sur les scores géné- 19 Fagon JY, Chastre J, Novara A, Medioni P, Gibert C. Charac- raux. D’autre part la classification nord-américaine des terization of intensive care unit patients using a model based on différents degrés de sepsis est toujours largement utili- the presence or absence of organ dysfunctions and/or infection . The ODIN method. Intensive Care Med 1993 ; 19 : 137-44. sée bien qu’elle ne soit pas parfaite. Enfin, certains 20 Hebert PC, Drummond AJ, Singer J, Bernard GR, Russell JA. A systèmes, comme le score de Fine, qui précise les élé- simple mutiple system organ failure scoring system predicts mortality of patients who have sepsis syndrome. Chest 1993 ; ments qui doivent conduire à l’hospitalisation en réa- 104 : 2305. nimation, nous paraissent particulièrement utiles, 21 Le Gall JR, Lemeshow S, Leleu G, Klar J, Huillard J, Rué M, et d’autant que les pneumonies communautaires consti- al. for the Intensive Care Unit Scoring Group. Customized probability models for early severe sepsis in adult intensive care tuent une grande partie des admissions en réanimation patients. JAMA 1995 ; 273 : 644-50. pour sepsis. 22 Marshall JC, Cook DJ, Christou NV, Bernard Gr, Sprung CL, Sibbald WJ. Multiple Organ Dysfunction Score a reliable des- criptor for a complex clinical outcome. Crit Care Med 1995 ; RÉFÉRENCES 28 : 1638-52. 23 Le Gall JR, Klar J, Lemeshow S, Saulnier F, Alberti C, Artigas A, et al. The logistic Organ Dysfunction system. A new way to 1 Fry DE, Pearlstein L, Fulton RL, Polck HC Jr. Multiple system assess organ dysfunction in the intensive care unit. ICU Scoring organ failure. The role of uncontrolled infection. Arch Surg Group. JAMA 1996 ; 276 : 802-10. 1980 ; 115 : 136-40. 24 Soufir L, Timsit JF, Mahé C, Carlet J, Régnier B, Chevret S. 2 Knaus WA, Zimmerman JE, Wagner DP, Draper EA, Attritbutable mortality and morbidity of cathether related bac- Lawrence DE. Apache acute physiology and chronic health teremia in critically ill patients – a matched risk adjusted cohort evaluation. A physiologically based classification system. Crit study. Infect Control Hosp Epidemiol 1999 ; 20 : 396-401. Care Med 1981 ; 9 : 591-7. 25 Timsit JF, Fosse JR, Troché G, De Lassence A, Alberti C, Garrouste-Orgeas M, et al. Accuracy of a composite score using 3 Stevens LE. Grading the severity of surgical sepsis. Arch Surg daily SAPS II and LOD scorrs for predicting hospital mortality 1983 ; 118 : 1190-2. in ICU patients hospitalized for more than 72 h. Intensive Care 4 Le Gall JR, Alperovitch A, Loirat P. A simplified acute physio- Med 2001 ; 27 : 1012-21. logy score for ICU patients. Crit Care Med 1984 ; 12 : 275-7. 26 Metnitz P, Lang T, Valentin A, Steltzer H, Krenn CG, Le 5 Le Gall JR, Lemeshow S, Saulnier F. A new simplified acute Gall JR. 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