Qui copier ? Les stratégies d'apprentissage social chez les animaux - OpenEdition Journals
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Revue de primatologie 10 | 2019 Varia Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux Who to copy? Social learning strategies in animals Charlotte Canteloup Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/primatologie/4326 DOI : 10.4000/primatologie.4326 ISSN : 2077-3757 Éditeur Société francophone de primatologie Référence électronique Charlotte Canteloup, « Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux », Revue de primatologie [En ligne], 10 | 2019, mis en ligne le 08 avril 2020, consulté le 14 avril 2020. URL : http:// journals.openedition.org/primatologie/4326 ; DOI : https://doi.org/10.4000/primatologie.4326 Ce document a été généré automatiquement le 14 avril 2020. Les contenus de la Revue de primatologie sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 1 Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux Who to copy? Social learning strategies in animals Charlotte Canteloup NOTE DE L’ÉDITEUR Soumis le 20 janvier 2020, accepté après révisions mineures le 30 mars 2020, publié en ligne le 08 avril 2020. 1 Introduction 1 Septembre 1953, île de Koshima, Japon. Satsuo Mito, l’assistante de recherche du primatologue Kinji Imanishi de l’Université de Kyoto, est témoin d’une innovation comportementale qui deviendra bientôt une grande découverte. Une jeune femelle macaque japonais, nommée Imo, prend une patate douce sablonneuse et la nettoie de ses grains de sable dans le cours d’eau d’un ruisseau (Fig. 1). Ces macaques japonais de l’île de Koshima étaient, à cette époque, approvisionnés en nourriture sur la plage par les chercheurs afin d’en faciliter leur observation. Plus excitant encore, ce nouveau comportement se répandit graduellement à d’autres individus, d’abord à deux partenaires de jeu d’Imo puis à sa mère dans les trois mois suivant cette première observation ; plus tard à d’autres juvéniles et leurs mères, à l’origine aujourd’hui d’une tradition comportementale profondément ancrée sur l’île de Koshima. Imanishi et ses étudiants, Kawamura et Kawai, décrirent et étudièrent en détail la propagation de ce « comportement pré-culturel nouvellement acquis » (Kawai, 1965), apportant les premières pierres à l’édifice des études portant sur les cultures animales, à une époque où les scientifiques occidentaux débattaient pour savoir si les comportements Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 2 dépendaient d'apprentissages (cf. béhavioristes : Watson, 1913) ou d'instincts (cf. éthologues : Lorenz, 1981 ; voir aussi de Waal, 2003 ; Matsuzawa & McGrew, 2008 qui retracent l'histoire de la primatologie japonaise). En Europe, au même moment, Jane Goodall publie les premières preuves d’utilisation d’outils – des brindilles pour pêcher des termites - chez les chimpanzés sauvages de Gombe en Tanzanie (Goodall, 1964). Figure 1 Macaque japonais lavant une patate douce sur l’île de Koshima au Japon. Copyright: Alexandre Bonnefoy Japanese macaque washing a sweet potato on Koshima island in Japan. Copyright: Alexandre Bonnefoy 2 Le débat portant sur l’évolution culturelle a toujours soulevé les passions dans les sciences humaines et les sciences biologiques. L’étude des cultures animales reçoit une attention considérable depuis quelques dizaines d’années, car elle contribue notamment à mieux comprendre ce qui rend nos cultures humaines si uniques. Les débats portent principalement sur la définition de la culture ainsi que les mécanismes d’apprentissage social sous-jacents impliqués dans les comportements dits culturels (van Schaik, 2016 ; Whiten et al., 2016). Tandis que de nombreux anthropologues et psychologues considèrent que la culture repose sur des processus cognitifs complexes, comme l’imitation et l’utilisation de symboles, et que son aspect cumulatif en fait une spécificité humaine (Galef, 1992 ; Tomasello et al., 1993 ; Tomasello, 1996), certains biologistes et primatologues perçoivent la culture avant tout comme un savoir transmis socialement, non basé sur un héritage génétique (McGrew, 1998 ; Boesch, 2012 ; Claidière & Guillo, 2015). L’apprentissage social, défini comme « l’apprentissage facilité par observation de, ou interaction avec, un autre individu (ou ses produits) » (Hoppitt & Laland, 2013 d’après Heyes, 1994) suscite un intérêt particulier car il est considéré comme la base des traditions et de la culture (Fragaszy & Perry, 2003). Une tradition est définie comme un comportement distinctif partagé par deux ou plusieurs individus au sein d’une unité sociale qui persiste au cours du temps et que les nouveaux praticiens acquièrent en partie grâce à l’apprentissage socialement facilité (Hoppitt & Laland, 2013). Les cultures, quant à elles, consistent en des comportements typiques d’un Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 3 groupe, partagés par les membres d’une communauté, reposant sur des informations socialement apprises et transmises (Hoppitt & Laland, 2013). Ainsi, une culture est constituée de multiples traditions. 3 Des études en laboratoire et en milieu naturel ont décrit des comportements transmis socialement chez des espèces très variées. La découverte de source de nourriture à travers la danse et le vol de nectar chez les abeilles (Leadbeater & Chittka, 2008 ; Hasenjager et al., 2020) et d’autres comportements dits ‘culturels’ tels que les dialectes parmi les chants d’oiseaux (Marler & Tamura, 1964), l’utilisation d’outils chez les corvidés (Holzhaider et al., 2010) et les techniques de chasse chez les baleines (Rendell & Whitehead, 2001) en font partie. Ces traditions atteignent toutefois leur apogée avec les primates chez qui de nombreuses conventions sociales, ainsi que des techniques d’extraction de nourriture et de manipulation ont été décrites (singes araignées : Santorelli et al., 2011 ; macaques japonais : Leca et al., 2007 ; capucins : Perry et al., 2003 ; orang-outans : van Schaik et al., 2003 ; chimpanzés : Whiten et al., 1999 ; gorilles : Robbins et al., 2016). Tandis que les premières études menées en captivité s’étaient focalisées sur la différentiation des mécanismes d’apprentissage social, tels que la facilitation locale, la facilitation du stimulus, l’apprentissage par observation, l’émulation ou l’imitation (Hoppitt & Laland, 2013 pour une revue de la littérature), seules les études de terrain s’étaient intéressées aux stratégies sous-tendant la propagation des traditions comportementales (Kendal, 2015 pour une revue de la littérature). 4 Les stratégies d’apprentissage social réfèrent aux biais d’apprentissage pouvant être basés sur le contenu, le contexte tel que la fréquence d’un trait dans une population (par exemple, copier le comportement exhibé par la majorité des individus), le bénéfice associé (par exemple, copier les individus ayant le plus de succès) ou certaines propriétés du modèle, comme de qui apprendre (par exemple, copier les individus familiers, apparentés, prestigieux, âgés, etc. Rendell et al., 2011a). Il a été proposé que la complexité de la culture humaine serait en partie due à une propagation précise et efficace de nouveaux savoirs (Boyd & Richerson, 1985 ; Henrich & McElreath, 2003 ; Laland, 2004 ; Tomasello et al., 1993). Les travaux théoriques anthropologiques prédisent que les individus devraient utiliser stratégiquement l’information sociale quand l’apprentissage individuel est coûteux ou risqué (Rogers, 1988) ou lorsque les bénéfices des comportements appris individuellement sont incertains (Laland, 2004). La théorie des jeux et des modèles mathématiques suggèrent que les individus devraient être sélectifs au regard des individus à copier (Boyd & Richerson, 1985 ; Rogers, 1988). Il a été rapporté que les humains copient préférentiellement le comportement exhibé par la majorité des individus ou bien celui émis par des individus prestigieux, à succès, ou détenteurs d’un savoir (Henrich & Boyd, 1998; Henrich & Broesch, 2011; Rendell et al., 2011b; Richerson & Boyd, 2005; Rogers, 1995). Des enfants de trois ans se fient davantage à des informations exactes ou inexactes administrées par un professeur familier qu’un professeur non familier (Corriveau & Harris, 2009). Toutefois, des enfants de cinq ans réduisent leur confiance quand le professeur délivre une information inexacte (Harris & Corriveau, 2011), suggérant que les stratégies d’apprentissage social varient au cours de l’ontogénie. Afin de retracer les origines évolutives des stratégies d’apprentissage social, des études expérimentales ont exploré de qui apprennent les autres animaux, dont les primates, et ont révélé de surprenants parallèles avec l’apprentissage social des humains. Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 4 2 De qui apprendre ? 5 Revenons à Imo, la jeune innovatrice de lavage de patates douces. Imanishi et son équipe ont montré que le comportement de lavage de patates douces ne s’est pas diffusé au hasard à tous les membres du groupe mais selon un chemin de transmission spécifique. Parmi les singes nés avant 1956, la propagation du comportement s’est faite entre les partenaires de jeu et les relations de parenté. Plus précisément, la transmission a eu lieu des enfants vers les mères et, au sein des individus apparentés, des frères et sœurs les plus jeunes vers les plus âgés. Toutefois, aucun des mâles adultes plus âgés n’a acquis le comportement. Les enfants nés après 1958 ont adopté le comportement de lavage de patates douces comme un comportement de nourrissage normal, se transmettant des mères aux enfants (Kawai, 1965). Comme cela a été proposé par Coussi-Korbel et Fragaszy (1995) et « l’hypothèse de l’apprentissage social dirigé », des individus particuliers représentent des modèles plus influentiels que d’autres. 2.1 Biais basé sur la parenté 6 La sélection pourrait favoriser un apprentissage préférentiel entre apparentés, particulièrement dans un environnement variable quand le démonstrateur et l’observateur subissent les mêmes pressions et récoltent les mêmes bénéfices (Boyd & Richerson, 1985). La transmission verticale – des parents aux enfants – est considérée comme cruciale dans le maintien des améliorations techniques individuelles qui ne sont pas influencées par la transmission horizontale (Sterelny, 2006). Dans la littérature, de nombreux exemples de biais basés sur la parenté ont été décrits chez des espèces variées. Les rats noirs apprennent comment extraire des pignons de pommes de pin en observant leur mère (Terkel, 1995). Holzhaider et ses collaborateurs (2010) ont suggéré que les corbeaux de Nouvelle-Calédonie, qui vivent organisés en petits groupes familiaux, apprennent de leurs parents à utiliser des outils. Chez le grand dauphin, les techniques de chasse se répandent par le biais des lignées maternelles, mais aussi par l'apprentissage individuel, horizontal ou oblique (Sargeant et al., 2005). Les jeunes portent souvent une attention particulière à leurs mères lorsqu’elles extraient de la nourriture (Jaeggi et al., 2010). Quelques décennies après Imanishi, van de Waal et ses collègues (2012) ont mené une expérience similaire en proposant des raisins recouverts de sable à des singes vervets sauvages afin d’observer leurs techniques de nettoyage. Les auteurs ont montré que des techniques similaires étaient utilisées au sein des lignées maternelles (van de Waal et al., 2012). Les enfants, naïfs, manipulaient les raisins exactement de la même manière que leurs mères (van de Waal et al., 2014) et, dans une autre étude, ils préféraient manger la même nourriture qu’elles (van de Waal et al., 2013). Les individus apparentés étant habituellement ceux qui passent le plus de temps ensemble, une transmission basée sur la parenté peut toutefois être confondue avec une transmission basée sur une association spatiale. Néanmoins, des chercheurs ont récemment rapporté que l’utilisation d’éponges végétales par les chimpanzés afin de se désaltérer se transmettait à travers les lignées maternelles et non selon le réseau d’association (Lamon et al. 2017). Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 5 2.2 Biais basé sur l’âge 7 Apprendre d’individus plus âgés que soi peut aussi être adaptatif car ces derniers sont souvent détenteurs de savoir et de technicité. Un tel biais est observé chez l’espèce humaine : les enfants copient ainsi préférentiellement un modèle plus âgé que plus jeune (voir Wood et al., 2013 pour une revue de la littérature). Parmi les animaux, les jeunes femelles guppies choisissent leurs partenaires sexuels selon la préférence démontrée par les femelles plus âgées, qui, elles, ne sont pas influencées par le choix de partenaire des femelles plus jeunes qu’elles (Dugatkin & Godin, 1993). Une autre espèce de poissons, les épinoches à neuf épines, copient préférenciellement le choix de nourriture adopté par des démonstrateurs de gros gabarits que celui de plus petits modèles (Duffy et al., 2009). Les auteurs ont interprété ce résultat comme une stratégie consistant à "copier les individus à succès" ou à "copier les individus potentiellement plus âgés". Les souris sont aussi plus influencées par le choix de nourriture de souris adultes que de souris plus jeunes (Choleris et al., 1997). Au Brésil, les capucins bruns observent davantage les individus plus âgés que les plus jeunes car ils sont plus compétents lors du cassage de noix (Coelho et al., 2015). Au Costa Rica, les jeunes capucins à tête blanche sont plus dépendants de l’apprentissage social pour extraire des fruits de panamá de leur coque rigide que les plus âgés qui observent moins leurs congénères (Barrett et al., 2017). Ces auteurs ont aussi rapporté que les capucins plus âgés sont plus conservateurs dans l’utilisation de leurs techniques, peut-être car ils détiennent une information personnelle de plus haute qualité et qu’ils sont capables de discerner l’efficacité de différentes techniques d’extraction des fruits (Barrett et al., 2017). En Guinée, les chimpanzés préfèrent également observer les individus plus âgés casser des noix (Biro et al., 2003) et en Ouganda, les chimpanzés âgés sont plus observés que les autres lors de la consommation d’items alimentaires inhabituels (Masi et al., 2012). En captivité, les chimpanzés copient préférentiellement la méthode de fourragement utilisée par les individus plus âgés (Horner et al., 2010). 2.3 Biais basé sur le sexe 8 L’apprentissage social biaisé en faveur d’un sexe est souvent testé dans des expériences de fourragement dans lesquelles deux démonstrateurs – un mâle et une femelle – sont observés par les sujets testés. Dans ce genre d'expérience, les poules domestiques n'apprennent pas les préférences alimentaires des coqs mais celles des femelles (Nicol & Pope, 1999). Les femelles diamant mandarins choisissent les préférences alimentaires des mâles alors que les mâles, eux, ne montrent pas de préférence claire (Benskin et al., 2002 ; Katz & Lachlan, 2003). En adoptant les choix alimentaires des mâles, les femelles pourraient acquérir les connaissances alimentaires de leurs partenaires potentiels, information particulièrement pertinente chez ces espèces à soins biparentaux (Katz & Lachlan, 2003). Dans ces expériences de fourragement, des boîtes, aussi appelées ‘fruits artificiels’ et pouvant s’ouvrir de deux manières différentes afin d’accéder à une récompense alimentaire, sont utilisées. Dans l’étude de terrain de van de Waal et ses collègues (2010), des femelles singes vervets dominantes ont été entraînées dans certains groupes à utiliser une technique - soulever un couvercle - tandis que dans d’autres, des mâles dominants ont été entraînés à utiliser l’autre technique - ouvrir une porte coulissante. Ces auteurs ont ensuite testé si les singes apprenaient davantage la technique d’ouverture des boîtes lorsque le modèle était une femelle plutôt qu’un mâle. Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 6 Les auteurs ont montré que les singes vervets copient préférentiellement la technique utilisée par le modèle lorsqu’il s’agit d’une femelle en comparison à un mâle (van de Waal et al., 2010). De plus, les singes font visuellement plus attention aux femelles qu’aux mâles (van de Waal et al., 2010). Récemment, cette équipe a mené une autre expérience utilisant des boîtes pouvant s’ouvrir de leurs deux extrémités. Lorsqu’un démonstrateur mâle touchait une des deux extrémités, la boîte s’ouvrait lui donnant accès à plusieurs morceaux de fruits. En revanche, lorsqu’un modèle femelle touchait l’autre côté de la boîte, elle ne reçevait qu’un seul morceau de fruit (Bono et al., 2018). Les auteurs ont ensuite testé les singes qui avaient observé les différentes démonstrations effectuées par des modèles mâles et femelles. Seuls les mâles copiaient alors le côté de la boîte choisi par les mâles donnant accès à davantage de nourriture, que le côté de la boîte sélectionné par les femelles ne donnant accès qu’à un seul morceau de fruit. Les femelles, quant à elles, faisaient préférentiellement le même choix que les autres femelles, en dépit d’un moindre bénéfice (Bono et al., 2018). Chez les singes vervets, les femelles forment le sexe philopatrique, c’est-à-dire qu’elles restent dans leur groupe natal toute leur vie tandis que les mâles migrent dans un nouveau groupe lorsqu’ils atteignent la maturité sexuelle. Il a été proposé que chez cette espèce, les femelles auraient une meilleure connaissance concernant la distribution des ressources en nourriture sur leur territoire, représentant ainsi une source valable d’information sociale (van de Waal et al., 2010). Il semblerait aussi que les femelles soient plus conservatrices dans leur apprentissage social que les mâles, faisant quant à eux, preuve d’une meilleure flexibilité comportementale (Bono et al., 2018). 2.4 Biais basé sur le statut social 9 Chez l’humain, une stratégie consistant à ‘copier les individus prestigieux’ a été décrite et pourrait augmenter la qualité de l’information acquise par transmission culturelle (Henrich & Gil-White, 2001). Le prestige, correspondant à une déférence librement conférée, contrairement à la dominance qui, elle, est basée sur la menace de la force, est considéré par certains auteurs comme spécifiquement humain. Les enfants humains considérés comme ‘populaires’ (et donc prestigieux) et ceux considérés comme ‘dominants’ sont plus regardés par les autres lors de la résolution d’une tâche (Flynn & Whiten, 2012). Chez les animaux, le rang social peut être considéré comme équivalent au prestige, ou du moins comme un statut social élevé, par certains auteurs (Barkow, 1975 ; Laland, 2004). Lorsqu’ils avaient le choix d’apprendre d’un congénère de haut rang social et d’un congénère de bas rang social, les chimpanzés copiaient préférentiellement le choix de l’individu de haut rang social (qui était aussi le plus âgé) qui avait auparavant fait preuve de nombreux succès et donc possiblement considéré comme prestigieux (Horner et al., 2010). Kendal et ses collaborateurs (2015) ont exposé des chimpanzés captifs à une nouvelle tâche d’extraction de nourriture et ont rapporté que les chimpanzés copiaient aussi les techniques des individus de haut statut social, les dominants. Ces résultats sont renforcés par le fait que les individus de haut rang social sont en général plus fréquemment observés que les individus de bas-rang social (Coelho et al., 2015; Grampp et al., 2019) mais cela n’est pas toujours le cas (Canteloup et al., 2020). Dans l’expérience que nous avons menée chez des singes vervets sauvages, nous avons montré que le facteur important pour qu’un individu soit copié était son rang hiérarchique et que la transmission des techniques d’ouverture de boîtes se faisait Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 7 des individus de plus haut rang social vers les individus de plus bas rang social. Bien que les singes dominants étaient ceux qui manipulaient et réussissaient le plus à ouvrir les boîtes puzzles, ils n’étaient pas plus observés que les singes dominés. Cela veut dire que l’observation d’un individu de plus haut rang social avait plus de poids que l’observation d’un singe de plus bas rang social (Canteloup et al., 2020). Toutefois, dans une étude récente (Watson et al., 2017), des chimpanzés captifs étaient testés dans une tâche dans laquelle ils devaient apprendre à ouvrir une boîte puzzle en présence soit d’un démonstrateur de haut rang social soit d’un modèle de bas rang social. Les auteurs ont montré que les techniques d’ouverture des boîtes se transmettaient dans les groupes contenant un modèle de bas rang social et non dans ceux ayant un modèle de haut rang social (Watson et al., 2017). Cela suggère qu’un subordonné peut être à l’origine de la diffusion d’un comportement au niveau du groupe en absence de modèle compétiteur. 2.5 Biais dépendant de la fréquence : conformité et majorité 10 La conformité a été définie comme une disposition à copier le choix exhibé par la majorité des individus dans un groupe social. De nombreux exemples de conformité ont été décrits dans divers taxons. On a constaté que les mésanges charbonnières adoptent de manière disproportionnée la technique de recherche locale la plus fréquente lorsqu'ils apprennent pour la première fois et mettent ensuite continuellement à jour leurs informations personnelles (Aplin et al., 2015). Dans une autre expérience, les épinoches à neuf épines avaient le choix entre deux mangeoires dont l'une était plus riche en nourriture que l'autre. Ces poissons ont choisi de préférence la mangeoire préférée par la majorité des individus, même lorsque cette mangeoire était moins prolifique que l'autre (Pike & Laland, 2010). Récemment, il a été montré que les drosophiles choisissent de s’accoupler avec les mâles préférés par la majorité des femelles (Danchin et al., 2018). La conformité repose également sur l’abandon de savoirs personnels antérieurs en faveur de l’adoption des habitudes observées chez la majorité au sein d’une nouvelle communauté (Asch, 1951). Comme cela a été décrit chez les humains (Boyd & Richerson, 2005), certaines espèces de primates comme les capucins et les chimpanzés se conforment au comportement le plus fréquemment observé chez les autres (Dindo et al., 2009 ; Haun et al., 2012 ; Hopper et al., 2011 ; Whiten et al., 2005 mais voir Vale et al., 2017). Van de Waal et ses collègues (2013) ont entraîné des groupes entiers de singes vervets sauvages à préférer une option alimentaire parmi deux – du maïs bleu ou rose (Fig. 2) – l’une des deux ayant mauvais goût car contenant un extrait amer d’aloe. Quelques mois après, les chercheurs ont proposé à nouveau les deux types de maïs coloré aux singes mais cette fois les deux options étaient bonnes car il n’y avait pas eu d’ajout d’aloe. Profitant de la migration spontanée de plusieurs mâles au cours de l’expérience, les scientifiques se sont alors posé la question : un mâle ayant appris à aimer le maïs bleu dans son groupe d’origine va-t-il changer sa préférence alimentaire lorsqu’il s’installe dans un nouveau groupe préférant le maïs rose (ou inversement) ? C’est effectivement le résultat qu’ils ont obtenu : les mâles ayant migré dans un nouveau groupe se sont conformés à la norme locale en abandonnant leur préférence initiale. Ainsi un mâle ayant appris à manger du maïs bleu, s’est mis à manger uniquement du maïs rose dans un groupe qui ne consommait que du maïs rose, et inversement pour ceux qui avaient appris à manger initialement du maïs rose. Luncz et Boesch (2014) ont décrit le cas d’une femelle Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 8 chimpanzé ayant récemment migré dans un nouveau groupe (chez les chimpanzés, ce sont les mâles qui restent dans leur groupe natal) qui sélectionna les mêmes outils que ceux utilisés par les membres de son nouveau groupe pour casser des noix. Plusieurs explications ont été proposées pour expliquer ces comportements de conformité. Une telle disposition est adaptative dans un contexte d’incertitude quant aux comportements de fourragement locaux à adopter. Suivre le choix alimentaire d’individus résidents semble être une option optimale. Une autre explication pouvant être donnée est que, en adoptant le comportement des résidents, un nouvel arrivé peut ainsi être socialement mieux accepté dans son nouveau groupe (Whiten & van de Waal, 2018). Cela reste à élucider. Figure 2 Dispositif expérimental illustrant l’option alimentaire préférée (maïs rose ; gauche) et évitée (maïs bleu ; droite) dans l’étude de van de Waal et al. (2013). Le maïs coloré en rose ou bleu était proposé par intermittence dans deux contenants adjacents. La photographie illustre les individus d’un même groupe mangeant uniquement le maïs rose. Copyright: Erica van de Waal Experimental setup illustrating preferential feeding option (pink corn; left) and avoiding the other option (blue corn; right) in the van de Waal et al. (2013) study. Maize corn dyed either pink or blue was provided intermittently in two adjacent containers. Photograph shows individuals of the same group eating only pink coloured corn. Copyright: Erica van de Waal 3 Des expériences de diffusion une-à-une aux expériences de diffusion ouverte 11 Les comportements dits culturels chez les animaux requièrent des études à très long terme sur le terrain afin d’être mis en lumière comme ce fut le cas de la transmission des techniques de chasse chez les baleines (Allen et al., 2013) ou encore celle de l’utilisation d’un nouvel outil chez les chimpanzés (Hobaiter et al., 2014). Pour cette raison, des expériences utilisant des « dispositifs à deux actions » ont été menées, principalement chez les primates, afin d’identifier expérimentalement l’apprentissage social et l’émergence de traditions. Dans ce paradigme expérimental, deux options Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 9 comportementales d’extraction d’une récompense alimentaire d’une boîte, aussi appelée « fruit artificiel » ou « boîte puzzle », sont introduites dans deux ou plusieurs groupes grâce à un individu agissant comme modèle car préalablement entraîné à utiliser une technique d’ouverture plutôt que l’autre. Ces groupes tests sont souvent comparés à un groupe contrôle sans modèle entraîné. La grande majorité de ces études montre que singes et grands singes adoptent préférentiellement la technique utilisée par le modèle tandis qu’ils ne réussissent pas la tâche dans un groupe dépourvu d’expert (Hopper et al., 2007 ; Schnoell & Fitchel, 2012 ; Gunhold et al., 2014; Botting et al., 2018). Initialement, ces études ont été menées en laboratoire et ont consisté en des expériences de diffusion une-à-une correspondant à une situation dyadique dans laquelle un modèle entraîné (souvent un expérimentateur humain) effectuait un comportement spécifique qu’un seul observateur naïf pouvait observer et apprendre des démonstrations (Bugnyar & Huber, 1997). Les études de chaînes de transmission constituent une alternative dans laquelle un modèle préalablement entraîné est observé par un observateur qui devient le modèle pour l’observateur suivant et ainsi de suite (Bartlett, 1932 ; Dindo et al., 2008). L’inconvénient de ces approches est qu’elles ne permettent pas de retracer comment un comportement se transmet au sein d’un groupe. Certains chercheurs ont alors entraîné des individus spécifiques à utiliser des techniques particulières sans les isoler de leur groupe social et ont testé quelle option était ensuite préférentiellement copiée par les autres membres du groupe (Dindo et al., 2009; Gunhold et al., 2014; van de Waal & Bshary, 2011; van de Waal et al., 2015; Bono et al., 2018; Botting et al., 2018). Bien qu’étant écologiquement plus pertinent, ce type d’expériences ne permet toutefois pas d’investiguer qui innove dans un groupe et comment un nouveau comportement se répand naturellement au sein d’un groupe social. 12 Les expériences de diffusion ouverte, sans modèle préalablement entraîné, permettent d’observer qui innove dans un groupe, si les innovateurs spontanés sont préférentiellement copiés ainsi que la diffusion d’un nouveau comportement au sein d’un groupe. Pour ces raisons, j’ai mené une expérience de diffusion ouverte dans deux groupes de singes vervets sauvages en Afrique du Sud. Pour cela, j’ai utilisé des boîtes puzzles pouvant s’ouvrir de deux manières différentes : soit en ouvrant un tiroir soit en soulevant le couvercle afin d’y récupérer une rondelle de pomme (Fig. 3). Dans mon expérience, huit boîtes puzzles identiques étaient proposées simultanément aux singes, le matin à leur site de repos, afin d’éviter qu’un seul individu dominant ne monopolise la tâche. Les singes étaient ainsi libres de participer à l’expérience, de manipuler les boîtes et de découvrir par eux-mêmes comment les ouvrir. Malgré le fait que les deux individus ayant réussi en premier à ouvrir les boîtes puzzles étaient la femelle dominante dans un groupe et le mâle dominant dans l’autre, ils furent suivis par un grand nombre d’individus dont des individus de moyen à bas rang social (Canteloup et al., 2020). Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 10 Figure 3 Dispositif experimental utilisé dans mon expérience de diffusion ouverte (Canteloup et al., 2020). A : chaque caméra était focalisée sur quatre boîtes puzzles proposées aux singes à leur site de repos ; B : un individu utilisant la technique du couvercle ; C : un individu utilisant la technique du tiroir. Copyright: Charlotte Canteloup Experimental apparatus used for my open diffusion experiment (Canteloup et al., 2020). A: Each camera focused on four puzzle boxes displayed to the monkeys at their sleeping site; B: an individual using the ‘lift’ technique to open the box; C: an individual used the ‘pull’ technique to open the box. Copyright: Charlotte Canteloup 13 Ce type d’expérience de diffusion ouverte peut être couplé avec des méthodes de modélisations statistiques prometteuses permettant de détecter et de quantifier la transmission sociale ainsi que d’identifier les chemins de transmission impliqués. C’est le cas de l’ « Analyse de Diffusion Basée sur le Réseau » (ci-après NBDA pour "Network Based Diffusion Analysis" ; Franz & Nunn, 2009; Hoppitt et al., 2010) dont l’hypothèse de base est que plus les individus sont connectés dans un réseau, plus ils ont d’opportunité d’apprendre les uns des autres. Le NBDA prend en compte l’ordre avec lequel les individus d’un groupe acquièrent un nouveau comportement et permet de tester si la diffusion suit des réseaux sociaux spécifiques correspondant à différents chemins de transmission. L’avantage de cette méthode est qu’elle permet de simuler la diffusion des savoirs en testant l’effet simultané de plusieurs biais de transmission possibles (Hoppitt, 2017) lorsque la plupart des études testent l’effet de différents biais d’apprentissage social séparément (Horner et al., 2010; van de Waal et al., 2010; Botting et al., 2018). L’utilisation d’un réseau dynamique d’observation au sein du NBDA, c’est- à-dire reflétant le nombre de fois où chaque individu a observé les autres réussir la tâche avant un instant t, permet de révéler de manière plus puissante l’existence de transmission sociale ou non (e.g. Hobaiter et al., 2014). En couplant une expérience de diffusion ouverte avec le NBDA, nous avons pu mettre en évidence que le réseau d’observation – qui observe qui faisant quoi – prédisait l’ordre d’acquisition des Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 11 techniques d’ouverture des boîtes puzzles, c’est-à-dire que les singes vervets apprennaient à ouvrir les boîtes en observant leurs congénères (Canteloup et al., 2020). Le NBDA permet également de tester au sein d’une même analyse si les individus copient préférentiellement la technique utilisée par des classes d’individus spécifiques. Dans notre cas, nous avons pu tester si les singes vervets copiaient préférentiellement les femelles adultes, comme rapporté par de précédentes études (van de Waal et al., 2010 ; Bono et al., 2018), ou bien s’ils copiaient plutôt les individus de la même famille, plus âgés ou de plus haut rang social. C’est ainsi que nous avons mis en évidence une transmission des techniques d’ouverture de boîtes des individus de haut rang social vers des individus de plus bas rang social, démontrant ainsi un biais de dominance chez cette espèce (Canteloup et al., 2020). 4 Conclusion 14 Ces dernières décennies ont vu la recherche portant sur l’apprentissage social chez les animaux se développer considérablement et contribuer à une meilleure compréhension de l’évolution de la culture. De surprenants parallèles entre apprentissage social humain et simien ont été notamment décrits, suggérant que ces règles puisent leurs racines dans l’évolution que nous partageons avec nos cousins primates (Whiten & van Schaik, 2007). Les capacités d’apprentissage social pourraient toutefois être plus fortement associées à l’écologie qu’à la taxonomie (Kendal et al., 2005) ; des études rapportent l’existence de stratégies d’apprentissage social chez des espèces variées nous étant phylogénétiquement éloignées comme les oiseaux (Aplin et al., 2015), les poissons (Pike & Laland, 2010) ou les drosophiles (Danchin et al., 2018). La sélection naturelle pourrait ainsi favoriser des règles d’apprentissage social adaptatives dont les conditions restent à élucider, à moins qu’elles ne soient le résultat de contraintes sociales biaisant les opportunités d’apprendre des autres vers certains individus. Selon les modèles théoriques et les preuves empiriques, les individus utilisent l’information sociale lorsque l’information personnelle est coûteuse, non fiable ou facilement périmée (Kendal et al., 2018). Différentes stratégies d’apprentissage social ont été proposées et décrites chez plusieurs espèces, pouvant être à l’origine de traditions comportementales spécifiques à certaines populations. Un biais de conformité peut ainsi promouvoir l’adoption d’une nouvelle information et la diffusion de comportements culturels dans de grands groupes. Au contraire, une stratégie « copier les individus de haut statut social » peut inhiber la diffusion de nouveauté lorsque l’innovateur est de bas statut social. Toutefois, les stratégies déployées par les animaux peuvent être plus complexes que précédemment envisagé, plusieurs stratégies pouvant être simultanément en jeu. De nombreuses questions concernant les mécanismes, leur développement au cours de la vie, la distribution phylogénétique et la valeur adaptative de l’utilisation de stratégies d’apprentissage social spécifiques sont à ce jour ouvertes. Pour cela, des études se doivent d’être menées chez des espèces animales très variées, différant selon leur type d’organisation sociale, leur écologie et leur distance phylogénétique à l’espèce humaine. L’utilisation d’expériences de diffusion ouvertes, à la fois sur le terrain et en captivité, couplées à des analyses de modélisations puissantes, permettront d’apporter un nouvel éclairage sur l’évolution de la transmission culturelle. Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 12 Remerciements 15 Je remercie vivement Erica van de Waal pour m’avoir accueillie dans son équipe et au sein du ‘Inkawu Vervet Project’ lors de mon post-doctorat à l’Université de Zürich puis à l’Université de Lausanne en Suisse. Je la remercie également pour m’avoir fourni une illustration de son expérience chez les singes vervets (Fig. 2). Je remercie généreusement toute l’équipe du « Inkawu Vervet Project » pour son aide précieuse sur le terrain en Afrique du Sud. Je remercie grandement Will Hoppitt de l’Université de Leeds et Cédric Sueur de l’Université de Strasbourg pour m’avoir acceuilli quelques mois dans leurs équipes respectives lors de mon postdoctorat. Je remercie chaleureusement le photographe Alexandre Bonnefoy pour m’avoir transmis une des ses très belles photos afin d’illustrer le lavage de patates douces chez les macaques Japonais de l’île de Koshima (Fig. 1). Je remercie fortement la Fondation Fyssen ainsi que la Fondation des Treilles pour avoir financé ma recherche postdoctorale. Enfin, je remercie également l’éditrice Marie Cibot ainsi que les deux relecteurs anonymes pour leurs commentaires pertinents qui ont permis d’améliorer mon manuscrit. 16 L’auteur déclare ne pas avoir de conflit d’intérêt. BIBLIOGRAPHIE Allen J, Weinrich M, Hoppitt W, Rendell L. 2013. Network based diffusion analysis reveals cultural transmission of lobtail feeding in Humpback whales. Science, 340: 485-488. Aplin LM, Farine DR, Morand-Ferron J, Cockburn A, Thornton A, Sheldon BC. 2015. Experimentally induced innovations lead to persistent culture via conformity in wild birds. Nature, 518(7540), 538–541. Asch SE. 1951. Effects of group pressure upon the modification and distortion of judgments. In: Guetzkow H (ed) Groups, leadership, and men. Carnegie, Pittsburgh, pp 222–236. Barkow JH. 1975. Prestige and culture: a biosocial interpretation. Current Anthropology, 16(4), 553-563. Barrett BJ, McElreath RL, Perry SE (2017). Pay-off-biased social learning underlies the diffusion of novel extractive foraging traditions in a wild primate. Proceedings of the Royal Society B, 284, 20170358. Bartlett FC. 1932. Remembering. Cambridge, Cambridge University Press. Benskin, C.M.H., Mann, N.I., Lachlan, R.F., & Slater, P.J.B. 2002. Social learning directs feeding preferences in the zebra finch, Taeniopygia guttata. Animal Behaviour, 64(5), 823-828. Biro D, Inokue-Nakamura N, Tonooka R, Yamakoshi G, Sousa C, Matsuzawa T. 2003. Cultural innovation and transmission of tool use in wild chimpanzees: Evidence from field experiments. Animal Cognition, 6, 213–223. Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 13 Boesch C. 2012. From material to symbolic cultures: Culture in primates. In J Valsiner (Ed.), The Oxford Handbook of Culture and Psychology (pp. 677-692). Oxford, Oxford University Press. Bono AE, Whiten A, van Schaik C, Krützen M, Eichenberger F, Schnider A, van de Waal E. 2018. Payoff-and sex- biased social learning interact in a wild primate population. Current Biology, 28(17), 2800-2805. Botting J, Whiten A, Grampp M, van de Waal E. 2018. Field experiments with wild primates reveal no consistent dominance-based bias in social learning. Animal Behaviour, 136, 1-12. Boyd R, Richerson PJ. 1985. Culture and the Evolutionary Process. Chicago, University Chicago Press. Boyd R, Richerson PJ. 2005. The origin and evolution of cultures. Oxford, Oxford University Press. Bugnyar T, Huber L. 1997. Push or pull: an experimental study on imitation in marmosets. Animal Behaviour, 54(4): 817-831. Canteloup C, Hoppitt W, van de Waal E. 2020. Wild primates copy higher-ranked individuals in a social diffusion experiment. Nature Communications, 11: 459. Choleris E, Guo C, Liu H, Mainardi M, Valsecchi P. 1997. The effect of demonstrator age and number on duration of socially-induced food preferences in house mouse (Mus domesticus). Behavioural Processes, 41(1), 69-77. Claidière N, Guillo D. 2015. Comment articuler les sciences de la vie et les sciences sociales à propos des relations humains/animaux ? Un modèle interactionniste et évolutionniste. L’année sociologique, 66(2), 385-419. Coelho CG, Falotico T, Izar P, Mannu M, Resende BD, Siqueira JO, Ottoni EB. 2015. Social learning strategies for nut-cracking by tufted capuchin monkeys (Sapajus spp.). Animal Cognition, 18, 911-919. Corriveau K, Harris PL. 2009. Choosing your informant: weighing familiarity and recent accuracy. Developmental Science, 12, 426–437. Coussi-Korbel S, Fragaszy DM. 1995. On the relation of social dynamics and social learning. Animal Behaviour, 50: 1441-1453. Danchin E, Nöbel S, Pocheville A, Dagaeff A-C, Demay L, Alphand M, Ranty-Roby S, van Renssen L, Monier M, Gazagne L, Allain M, Isabel G. 2018. Cultural flies: Conformist social learning in fruitflies predicts long-lasting mate-choice traditions. Science, 362, 1025-1030. de Waal FBM. 2003. Silent invasion: Imanishi’s primatology and cultural bias in science. Animal Cognition, 6, 293-299. Dindo M, Thierry B, Whiten A. 2008. Social diffusion of novel foraging methods in brown capuchin monkeys (Cebus apella). Proceedings of the Royal Society: B, 275: 187–193. Dindo M, Whiten A, de Waal F. 2009. In-group conformity sustains different foraging traditions in capuchin monkeys (Cebus apella). PLoS ONE, 4(11), e7858. Duffy GA, Pike TW, Laland KN. 2009. Size-dependent directed social learning in nine-spined sticklebacks. Animal Behaviour, 78(2), 371–375. Dugatkin, LE, Godin JGJ. 1993. Female mate copying in the guppy (Poecilia reticulata): age- dependent effects. Behavioral Ecology, 4(4), 289-292. Flynn E, Whiten A. 2012. Experimental “microcultures” in young children: Identifying biographic, cognitive, and social predictors of information transmission. Child Development, 83(3), 911-925. Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 14 Fragaszy DM, Perry S. 2003. The biology of traditions: models and evidence. Cambridge, UK; New York, Cambridge University Press. Franz M, Nunn CL. 2009. Network-based diffusion analysis: a new method for detecting social learning. Proceedings of the Royal Society: B, 276: 1829-1836. Galef BJR. 1992. The question of animal culture. Human Nature, 3, 157–178. Goodall J. 1964. Tool-using and aimed throwing in a community of free-living chimpanzees. Nature, 201(4926), 1264-1266. Grampp M, Sueur C, van de Waal E, Botting J. 2019. Social attention biases in juvenile wild vervet monkeys: implications for socialisation and social learning processes. Primates, 60(3), 261-275. Gunhold T, Whiten A, Bugnyar T. 2014. Video demonstrations seed alternative problem-solving techniques in wild common marmosets. Biology Letters, 10: 20140439. Harris PL, Corriveau K. 2011. Young children’s selective trust in informants. Philosophical Transactions of the Royal Society of London Series B Biological Sciences, 366, 1179-1187. Hasenjager MJ, Hoppitt W, Leadbeater E. 2020. Network based diffusion analysis reveals context- specific dominance of dance communication in foraging honeybees. Nature Communications, 11: 625. Haun DBM, Rekers Y, Tomasello M. 2012. Majority biased transmission in chimpanzees and human children, but not orangutans. Current Biology, 22, 727-731. Henrich J, Boyd R. 1998. The evolution of conformist transmission and the emergence of between-group differences. Evolution & Human Behavior, 19, 215-241. Henrich J, Broesch J. 2011. On the nature of cultural transmission networks: evidence from Fijian villages for adaptive learning biases. Philosophical Transactions of the Royal Society of London Series B Biological Sciences, 366, 1139–1148. Henrich J, Gil-White FJ. 2001. The evolution of prestige: freely conferred deference as a mechanism for enhancing the benefits of cultural transmission. Evolution and Human Behavior, 22(3), 165–196. Henrich J, McElreath R. 2003. The evolution of cultural evolution. Evolutionary Anthropology, 12, 123–135. Heyes C. 1994. Social learning in animals: categories and mechanisms. Biological Reviews of the Cambridge Philosophical Society, 69, 207-231. Hobaiter C, Poisot T, Zuberbühler K, Gruber T. 2014. Social network analysis shows direct evidence for social transmission of tool use in wild chimpanzees. PLoS Biology, 12(9): e1001960. Holzhaider JC, Hunt GR, Gray RD. 2010. Social learning in new Caledonian crows. Learning & Behavior, 38(3), 206-219. Hopper LM, Schapiro SJ, Lambeth SP, Brosnan S.F. 2011. Chimpanzees’ socially maintained food preferences indicate both conservatism and conformity. Animal Behaviour, 81, 1195-1202. Hopper LM, Spiteri A, Lambeth SP, Schapiro SJ, Horner V, Whiten A. 2007. Experimental studies of traditions and underlying transmission processes in chimpanzees. Animal Behaviour, 73, 1021-1032. Hoppitt W, Boogert NJ, Laland KN. 2010. Detecting social transmission in networks. Journal of Theoretical Biology, 263(4): 544-555. Revue de primatologie, 10 | 2019
Qui copier ? Les stratégies d’apprentissage social chez les animaux 15 Hoppitt W, Laland KN. 2013. Social learning: an introduction to mechanisms, methods, and models. Princeton University Press. Hoppitt W. 2017. The conceptual foundations of network-based diffusion analysis: choosing networks and interpreting results. Philosophical Transactions of the Royal Society of Biology, 372, 20160418. Horner V, Proctor D, Bonnie KE, Whiten A, de Waal FB. 2010. Prestige affects cultural learning in chimpanzees. PLoS One, 5(5), e10625. Jaeggi AV, Dunkel LP, van Noordwijk MA, Wich SA, van Schaik CP. 2010. Social learning of diet and foraging skills by wild immature Bornean orangutans: implications for culture. American Journal of Primatology, 72, 62-71. Katz M, Lachlan, RF. 2003. Social learning of food types in zebra finches (Taenopygia guttata) is directed by demonstrator sex and feeding activity. Animal Cognition, 6(1), 11-16. Kawai M. 1965. Newly-acquired pre-cultural behaviour of the natural troop of Japanese monkeys on Koshima islet. Primates, 6(1), 1-30. Kendal RL. 2015. Social learning and culture in nonhuman organisms. International Encyclopedia of the Social & Behavioral Sciences, 2(22), 401-408. Kendal RL, Coolen I, van Bergen Y, Laland KN. 2005. Trade-offs in the adaptive use of social and asocial learning. Advances in the study of behaviour, 35, 333-379. Kendal R, Hopper LM, Whiten A, Brosnan SF, Lambeth SP, Schapiro SJ, Hoppitt W. 2015. Chimpanzees copy dominant and knowledgeable individuals: implications for cultural diversity. Evolution and Human Behavior, 36(1), 65–72. Kendal RL, Boogert NJ, Rendell L, Laland KN, Webster M, Jones PL. 2018. Social Learning Strategies: Bridge-Building between Fields. Trends in Cognitive Sciences, 22(7), 651-665. Laland KN. 2004. Social learning strategies. Learning and Behavior, 32, 4-14. Lamon N, Neumann C, Gruber T, Zuberbühler K. 2017. Kin-based cultural transmission of tool use in wild chimpanzees. Science Advances, 3: e1602750. Leadbeater E, Chittka L. 2008. Social transmission of nectar-robbing behavior in bumble bees. Proceedings of the Royal Society B, 275, 1669-1674. Leca J, Gunst N, Huffman M. 2007. Japanese macaque cultures: Inter- and intra- troop behavioural variability of stone handling patterns across 10 troops. Behaviour, 144, 251-281. Lorenz K. 1981. The foundations of Ethology. Springer-Verlag Wien. Luncz LV, Boesch C. 2014. Tradition over trend: neighboring chimpanzee communities maintain differences in cultural behavior despite frequent immigration of adult females. American Journal of Primatology, 76(7), 649–657. Marler P, Tamura M. 1964. Song ‘dialects’ in three populations of white-crowned sparrows. Science, 146, 1483-1486. Masi S, Narat V, Todd A, Krief S. 2012. How do great apes acquire information on unusual feeding behaviors? A window to understand origins of self-medication in humans. Journal of Biological Research-Bollettino della Società Italiana di Biologia Sperimentale, 85(1), 293-296. Matsuzawa T, McGrew WC. 2008. Kinji Imanishi and 60 years of Japanese primatology. Current Biology, 18(14), R587-591. McGrew WC. 1998. Culture in nonhuman primates? Annual review of anthropology, 27, 301-328. Revue de primatologie, 10 | 2019
Vous pouvez aussi lire