RÉPONSES À LA COVID-19 ET AUX OBLIGATIONS DES ÉTATS EN MATIÈRE DE DROITS HUMAINS : OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES
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amnistie.ca AMNISTIE INTERNATIONALE – DÉCLARATION PUBLIQUE 12 mars 2020 Numéro d’index : POL 30/1967/2020 RÉPONSES À LA COVID-19 ET AUX OBLIGATIONS DES ÉTATS EN MATIÈRE DE DROITS HUMAINS : OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES TABLE DES MATIÈRES Introduction Prévenir l’exposition des personnes à la COVID-19 Quarantaines Interdictions et restrictions de voyages Accès à l’information, transparence et censure Mesures préventives, produits et services États d’urgence Accès aux soins pour les personnes affectées Accessibilité et coût abordable des soins Impact spécifique et disproportionné sur certains groupes Sécurité sociale et droits des travailleuses et travailleurs Prévention de la stigmatisation et la discrimination Protection des travailleuses et travailleurs de la santé Assistance et coopération internationales Rétablissement à long terme et suivi Tous les gouvernements et autres acteurs impliqués et affectés par l’épidémie de COVID-19 doivent s’assurer que le droit et les normes internationales en matière de droits humains sont au cœur de toutes leurs réponses afin de mieux protéger la santé publique et soutenir les gens les plus à risque d’impacts négatifs. Ce document (1) analyse les enjeux et défis en matière de droits humains qui peuvent résulter des réponses des États aux épidémies, et aux différentes phases de ces réponses – en traitant plus spécifiquement des réponses à la COVID-19, et (2) présente une synthèse des obligations des États en matière de droits humains et des principales lois, normes et principes qui doivent se refléter dans leurs réponses. Il s’intéresse aux questions de droits humains qui émergent lorsque les États imposent des mesures préventives pour protéger la santé publique, comme les quarantaines et les interdictions de voyage; aux obligations des États en termes d’accès aux mesures préventives et aux produits et services; au caractère accessible et abordable des soins; aux enjeux de sécurité sociale et des droits des travailleuses et travailleurs; à la prévention de la stigmatisation et de la discrimination; et à la protection de la santé des travailleuses et travailleurs de la santé. Il aborde enfin les obligations des États en matière de coopération et d’assistance internationales et de soutien au rétablissement et au suivi à long terme. Amnistie internationale – Déclaration publique 1
INTRODUCTION Au moment de la publication de ce document, il y avait 113 702 cas confirmés de Covid-19, et plus de 4 000 décès, dans plus d’une centaine de pays sur tous les continents habités1. L’OMS a qualifié cette maladie de pandémie2. C’est un moment très difficile pour les pays qui tentent de répondre à la propagation du virus, pour les organisations inter-gouvernementales et non gouvernementales qui soutiennent leurs efforts, et plus que tout pour les populations et pour les travailleuses et travailleurs de la santé dans les pays affectés, qui ont fait face ou qui risquent l’exposition à la COVID-19. Dès le début de la réponse, les droits humains doivent être au cœur de toute action de prévention, de préparation, de confinement et de traitement, afin de mieux protéger la santé publique et de soutenir les groupes et personnes les plus à risques. Toutefois, plusieurs mesures prises pour contenir la propagation de la COVID-19 semblent avoir été proposées et mises en place sans avoir pris en compte toutes les conséquences potentielles sur l’exercice de tous les droits humains pour toutes et tous, les personnes infectées, à risque, ou la population en général. Les obligations des États sont de garantir l’exercice des droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux, en accord avec le principe d’interdépendance et d’indivisibilité des droits humains. Le plein respect des droits humains est essentiel à toutes les étapes de la crise, il ne s’agit pas d’un luxe qu’on pourra s’offrir lorsque les menaces à la santé publique auront été réduites au minimum. Les personnes affectées par une urgence de santé publique, y compris celles qui sont déplacées à cause des événements, ont droit à la protection pleine et entière des lois relatives aux droits humains. Les personnes infectées ou potentiellement exposées ne doivent pas perdre les droits accordés à l’ensemble de la population. Certains groupes de personnes, comme les personnes âgées et les gens avec des problèmes médicaux préexistants, semblent plus à risque de maladie sévère et de décès s’ils sont exposés à la COVID-19. D’autres personnes, comme celles vivant dans la pauvreté et n’ayant pas accès à l’eau potable et à l’assainissement, peuvent faire face à d’autres contraintes pour pouvoir se protéger adéquatement contre le virus. En planifiant leurs réponses à la COVID-19, les États devraient être conscients de l’impact particulier du virus sur des groupes spécifiques de personnes et s’assurer que leurs besoins et leurs expériences sont pleinement pris en compte dans les plans et stratégies. Le droit à la santé est contenu dans de nombreux traités internationaux relatifs aux droits humains, et la plupart des pays du monde ont ratifié au moins un traité qui leur exige de respecter, protéger et honorer le droit à la santé. Le plus important d’entre eux est le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), dont l’article 12 garantit « le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre » y compris les mesures à prendre pour « la prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, ainsi que la lutte contre ces maladies ». Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) – l’organe des Nations Unies mandaté pour la mise en place du PIDESC – a précisé les responsabilités des États découlant de ce droit, principalement dans son Observation générale no. 143. Selon ce Comité, « Les mesures pour prévenir, traiter et contrôler les maladies épidémiques et endémiques » sont des « obligations tout aussi prioritaires » que les obligations fondamentales du droit à la santé (« obligation fondamentale minimum »). Le Comité a déclaré qu’un État ne peut, sous aucune circonstance, justifier le non-respect de ses obligations fondamentales « auxquelles il est impossible de déroger »4. 1 Au 10 mars 2020. Voir KFF. Global Health Policy Tracker. Repéré à www.kff.org/global-health-policy/fact-sheet/coronavirus-tracker/. Voir aussi les rapports de l’OMS sur le coronavirus (COVID-2019) au www.who.int/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019/situation-reports 2 OMS. 11 mars 2020. https://www.who.int/fr/dg/speeches/detail/who-director-general-s-opening-remarks-at-the-media-briefing-on-covid-19---11- march-2020 . L’OMS qualifie la COVID-19 de pandémie. 3 Comité des droits économiques, sociaux et culturels. Observation générale No 14. Le droit de toute personne à jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre (article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). Document des Nations Unies. E/C.12/2000/4 (2000) (ci-après CDESC Observation générale No 14). 4 CDESC. Observation générale No 14, paras 43, 44 et 47. Le paragraphe 47 déclare qu’un État ne peut déroger aux « obligations fondamentales » énoncées au paragraphe 43. Dans le paragraphe 44, le Comité énonce que les responsabilités des États envers les obligations énumérées aux paragraphes 43 et 44 sont « tout aussi prioritaires » et doivent donc être traitées de manière équivalente. Amnistie internationale - Déclaration publique 9 amnistie.ca
PRÉVENIR L’EXPOSITION DES PERSONNES À LA COVID-19 QUARANTAINES La quarantaine (l’isolement des personnes qui peuvent avoir été exposées à la maladie infectieuse ou qui en montrent des symptômes) est un mécanisme souvent utilisé pour contrôler la propagation de maladies infectieuses, ce que font certains pays en réponse à la COVID-19. Des rapports indiquent que des quarantaines à différente échelle sont en place aujourd’hui, certaines pour des villes ou des régions entières5. Les quarantaines ont un impact sur la liberté de mouvement, et, selon la manière dont elles sont mises en place, elles peuvent aussi constituer une privation arbitraire de liberté. On rapporte d’autres freins à l’exercice des droits humains pour certaines personnes mises en quarantaine : le manque d’accès aux nécessités de base comme la nourriture, les produits d’hygiène, les soins de santé, et les impacts négatifs sur leurs emplois et leurs salaires parce qu’ils ne peuvent se rendre au travail6. La mise en quarantaine a encore d’autres impacts sur les droits humains, elle peut affecter les personnes vivant dans la pauvreté de façon disproportionnée, parce qu’elles manquent de ressources pour payer des soins de santé ou acheter de la nourriture ou autres produits. Leur épargne peut aussi être insuffisante pour passer au travers d’une période sans salaire. La quarantaine n’est autorisée que dans des circonstances limitées, prévues par le droit international relatif aux droits humains. Selon le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), des restrictions peuvent être imposées à la liberté de mouvement si elles sont prévues à la loi et nécessaires pour atteindre des buts spécifiques et légitimes, comme la santé publique, et si elles « sont compatibles avec d’autres droits reconnus dans le [PIDCP] »7. Les Principes de Syracuse sur les dispositions du PIDCP qui autorisent des restrictions ou des dérogations (ci-après appelés « Principes de Syracuse »), une interprétation du PIDCP par un panel d’experts, font des recommandations sur quand et comment ces restrictions aux droits humains peuvent être mises en place8. Ce sont les suivantes: (i) Aucune restriction d’un droit reconnu par le PIDCP ne doit être appliquée de manière discriminatoire; (ii) toute restriction doit répondre à une nécessité pressante d'ordre public ou social, poursuivre un but légitime et être proportionnée à ce but9; (iii) les États ne doivent pas prendre de moyens plus restrictifs que nécessaire pour atteindre le but de cette restriction; (iv) il incombe à l'État de justifier la restriction d'un droit garanti par le PIDCP; et (v) pour chaque restriction imposée il doit y avoir une possibilité de contestation et de réparation en cas d'application abusive10. Dans le contexte de restrictions de droits pour la protection de la santé publique, les Principes de Syracuse rappellent que « ces mesures doivent servir spécifiquement à prévenir des maladies ou des accidents et permettre d’apporter des soins aux malades et aux blessés »11. L’Observation générale No 14 du Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels apporte d’autres recommandations sur ces questions, déclarant que toutes restrictions ou limitations aux fins de santé publique « doivent être conformes à la loi, y compris aux normes internationales relatives aux droits de l'homme, compatibles avec la nature des droits protégés par le Pacte et imposées dans l'intérêt de buts légitimes, exclusivement en vue 5 Business Insider. 15 février 2020. China's unprecedented quarantine of 11 million people in Wuhan is 3 weeks old. Here's what it's like in the isolated city. Repéré à www.businessinsider.com/wuhan-coronavirus-what-life-like-inside-quarantined-city-china-2020-2?r=US&IR=T. BBC News. Coronavirus: Quarantined inside Italy's red zone. Repéré à www.bbc.co.uk/news/world-europe-51651099. Al Jazeera. Coronavirus: Japan gov't defends handling of ship quarantine. Repéré à www.aljazeera.com/news/2020/02/coronavirus-japan-govt-defends-handling-ship-quarantine-200220111441912.html 6 CNN. 24 février 2020. Healthy Wuhan residents say they were forced into mass coronavirus quarantine, risking infection. Repéré à edition.cnn.com/2020/02/22/asia/china-coronavirus-roundup-intl-hnk/index.html 7 PIDCP. Article 12(3), 8 CDH. 1984. Les principes de Syracuse sur les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui autorisent des restrictions ou des dérogations (ci-après appelés Principes de Syracuse). Document des Nations unies E/CN.4/1984/4. Le Comité des droits humains (CDH ou Comité) a émis d’autres lignes directrices concernant la validité des restrictions aux droits dans les Observations générales du PIDCP qui mettent l’accent sur le devoir des États de justifier toute limitation, et l’exigence que de telles mesures soient prévues par la loi, nécessaires, proportionnées, et sujettes à révision. Par exemple, en relation avec le droit à la liberté et à la sécurité des personnes, l’article 9 du PIDCP, le Comité souligne que cela s’applique à l’hospitalisation involontaire, et les États parties ont la responsabilité de démontrer que « toute détention ne doit pas durer plus longtemps que ce qui est absolument nécessaire, que la durée totale possible d’une détention est limitée et qu’ils respectent les garanties prévues à l’article 9 dans tous les cas ». Les raisons de la détention doivent être données à la personne détenue, qui devrait avoir accès à un conseil juridique indépendant, et la détention doit être soumise à un contrôle judiciaire impartial. Observation générale No 35 du Comité des droits humains, article 9 (Liberté et sécurité des personnes) 2014, Document des Nations Unies CCPR/C/GC/35 (2014), par. 15. En relation avec le droit à la liberté d’opinion et d’expression, à l’article 19 du PIDCP, le CDH souligne que toute limitation en lien avec la santé publique doit être nécessaire, proportionnée, et « ne doit pas être excessive ». Comité des droits humains. Observation générale No 34, article 19: Libertés d’opinion et d’expression (2011). Document des Nations Unies CCPR/C/GC/34, par. 34. Toute restriction à la liberté de mouvement basée sur des critères de santé publique doit aussi être « prévue par la loi, doit être nécessaire dans une société démocratique pour la protection de ces objectifs, et doit être respectueuse de tous autres droits reconnus dans le Pacte », elle doit aussi être non discriminatoire, proportionnée et encadrée de façon précise. Observation générale No 27: article 12 (Liberté de mouvement) (1999). Document des Nations Unies CCPR/C/21/Rev.1/Add.9, par.11- 18. 9 L’Observation générale No 14 du CDESC, para. 29, énonce que toute limitation « … doit être proportionnée, c’est-à-dire que l’alternative la moins restrictive doit être adoptée … » et « …devrait être de durée limitée et sujette à révision ». 10 Principes de Syracuse, par. 8-12. Le CDH insiste sur le fait que « les États parties devraient prendre dûment en compte les développements du droit international sur les normes de droits humains applicables aux situations d’urgence ». Citant les Principes de Syracuse, Observation générale No 29 du PIDCP, États d’urgence (Article 4), document des Nations Unies CCPR/C/21/Rev.1/Add.11 (2001), par. 10. 11 Principes de Syracuse, par. 25. Amnistie internationale - Déclaration publique 10 amnistie.ca
de favoriser le bien-être général dans une société démocratique »12. Elles doivent être à durée limitée, sujettes à un examen, et lorsque plusieurs types de limitations peuvent être imposées, l'option la moins restrictive doit être retenue13. Lorsque des mesures de quarantaine et d’isolement sont mises en œuvre, elles devraient l’être de manière sécuritaire et respectueuse, et porter attention aux risques qu’elles posent pour la pleine jouissance des droits humains. Afin de renforcer la confiance et la coopération du public, de respecter le droit à la dignité des personnes affectées, et de leur donner autant que possible le contrôle sur leurs vies, les mesures limitant la liberté de mouvement devraient être volontaires lorsque cela est possible. S’il est nécessaire d’imposer une quarantaine, le gouvernement a toutefois l’obligation de le faire en conformité avec les normes internationales pertinentes, relatives aux droits humains, de s’assurer tout particulièrement que ceux qui sont soumis à ces mesures le sont dans des conditions humaines, et de mettre en place un système de suivi et d’évaluation efficace. Les droits de ceux et celles qui sont en quarantaine devraient être respectés et protégés, et les besoins de base des personnes devraient être satisfaits, comme un logement adéquat, de la nourriture, de l’eau et des infrastructures sanitaires. INTERDICTIONS ET RESTRICTIONS DE VOYAGES D’autres réponses des États – comme les restrictions et les interdictions de voyages – peuvent avoir un impact sur le droit à la liberté de mouvement, dont la liberté de quitter n’importe lequel pays et le droit de ne pas être arbitrairement privé du droit de revenir dans son propre pays14. Plusieurs pays ont fermé certaines frontières 15 ou imposé des interdictions de voyages, vers ou en provenance de pays avec de nombreux cas de COVID-19 16, touchant ainsi les personnes qui cherchaient à revenir chez elles auprès de leurs familles17, à mener leurs affaires, ou à poursuivre leur éducation dans les écoles et les universités. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) déconseille généralement l’application de restrictions de voyage ou de commerce vers les pays de propagation de la COVID-19, sauf dans des circonstances limitées, à cause des risques de cette approche. Selon leur plus récent avis, « les restrictions peuvent interrompre la fourniture de l’aide et de l’assistance technique nécessaires, perturber les affaires, avoir des impacts sociaux et économiques négatifs sur les pays affectés »; elle ajoute que : « restreindre les mouvements de personnes et de biens pendant des urgences de santé publique n’est pas efficace dans la plupart des situations et peut détourner les ressources prévues pour d’autres interventions »18. Selon le PIDCP, des restrictions à la liberté de mouvement peuvent être imposées dans des circonstances limitées et avec des justifications spécifiques (voir plus haut), si elles sont prévues à la loi et nécessaires à la protection de la santé publique19. Lorsqu’on les impose, les restrictions et interdictions de voyages doivent être cohérentes avec les obligations prévues au PIDCP, telles qu’interprétées par les Principes de Syracuse décrits plus haut, soit non discriminatoires, légitimes, nécessaires et proportionnées, et constituer l’alternative la moins restrictive possible. ACCÈS À L’INFORMATION, TRANSPARENCE ET CENSURE L’article 19 du PIDCP protège la liberté « de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce », et ce droit ne peut être restreint que dans des circonstances limitées, comme dans l’intérêt de la santé publique. Lorsque cela est invoqué par les États, les garanties contenues dans le PIDCP et le PIDESC, telles que décrites plus haut, doivent s’appliquer. L’accès à l’information relative à la santé est une composante essentielle du droit à la santé. Assurer « une éducation et un accès à l'information sur les principaux problèmes de santé de la communauté, y compris des méthodes visant à les prévenir et à les maîtriser » est considéré comme une « obligation aussi prioritaire » que les obligations fondamentales du droit à la santé20. L’accessibilité de l’information est une dimension clé de l’accessibilité des soins de santé, et elle inclut le droit « de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées sur les questions de santé »21. Les personnes et les communautés affectées ont droit à de l’information simple, accessible, pertinente et en temps utile, sur la nature et le niveau des menaces à la santé, sur les mesures à prendre pour réduire les risques; elles ont aussi droit à des systèmes d’alertes rapides sur les conséquences potentielles et sur les réponses en cours. L’information devrait être disponible dans toutes les langues nécessaires pour répondre aux besoins des personnes affectées, et par des médias ou des formats accessibles et faciles à comprendre, afin que celles-ci puissent participer pleinement et prendre des décisions éclairées quant à leurs propres efforts de réponse. 12 CDESC. Observation générale No 14, par. 28. 13 CDESC. Observation générale No 14, par. 29. 14 PIDCP. Article 12. 15 BBC. 2 mars 2020. Coronavirus: How is Iran responding to the outbreak? Repéré à www.bbc.co.uk/news/world-middle-east-51642926 16 Pour information sur les restrictions et interdictions de voyages par pays, consulter www.iatatravelcentre.com/international-travel-document- news/1580226297.htm 17 Channel News Asia. 25 février 2020. COVID-19 travel bans trap South Koreans abroad. Repéré à www.channelnewsasia.com/news/asia/covid-19- coronavirus-travel-bans-trap-south-koreans-abroad-12469894 18 OMS-WHO. 29 février 2020. Updated WHO recommendations for international traffic in relation to COVID-19 outbreak. Repéré à www.who.int/ith/2019- nCoV_advice_for_international_traffic-rev/en/ 19 PIDCP. Article 12(3), 20 CEDESC. Observation générale no 14 par. 44. 21CEDESC. Observation générale no 14, par. 12(b). Amnistie internationale - Déclaration publique 11 amnistie.ca
Pour pouvoir contenir efficacement la propagation du virus, fournir des soins médicaux aux personnes qui en ont besoin et éviter une mauvaise utilisation des ressources, la confiance est essentielle. Mais pour que le public ait confiance, les communautés affectées doivent être contactées à temps et avoir accès à toute information pertinente et disponible afin de comprendre la nature de la crise de santé. Dans la mesure du possible, cela devrait être fait avec la participation de la communauté et par des partenariats avec les autorités locales, dès le début de la crise. Faillir à cela ne fera que renforcer le sentiment d’impuissance, de colère et de frustration, affaiblir la réponse de santé publique, mettre les travailleuses et travailleurs de la santé à risque, et pourrait même constituer une violation des droits humains22. Lorsque, dans leurs réponses à la COVID- 19, les États limitent l’accès à l’information, manquent de transparence et exercent de la censure, ils risquent de miner l’exercice des droits mentionnés plus haut. Cela pourrait empêcher les gens de poser les gestes adéquats pour se protéger eux-mêmes de l’infection, et empêcher aussi l’ensemble des parties prenantes d’avoir un portrait réaliste et de prendre des actions coordonnées et efficaces pour combattre la propagation du virus. MESURES PRÉVENTIVES, PRODUITS ET SERVICES Le droit à la santé comprend « la prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, ainsi que la lutte contre ces maladies »23. Dans le contexte de la propagation d’une épidémie, cela oblige les États à s’assurer que les mesures préventives, les produits, les services, de même que l’information, soient disponibles et accessibles à toutes et tous. Cela suppose la diffusion d’informations accessibles, précises et basées sur la science, qui permettent aux gens de se protéger eux-mêmes, ainsi que la garantie que tous les produits nécessaires à assurer la prévention sont disponibles et abordables pour tous. On a rapporté dans certaines régions plusieurs cas de pénuries de produits de protection comme des désinfectants ou des masques24 . Un rapport d’une ONG locale, la Société pour l’organisation communautaire (SoCO), a constaté que près de 70% des familles à faibles revenus de Hong Kong ne pouvaient pas acheter l’équipement de protection, comme les masques et les désinfectants25. Les États doivent s’assurer que ces équipements sont accessibles et abordables si leur usage est recommandé. Par ailleurs, le risque est réel que la COVID-19 se propage dans d’autres pays et régions dans le monde; au moment d’écrire ces lignes, les populations de plus d’une centaine de pays y ont été exposées. Plusieurs États n’ont peut-être pas les ressources ou un système de santé apte à répondre efficacement à la propagation. Le droit à la santé comporte l’obligation de fournir assistance et coopération internationales (voir plus bas). Les gouvernements qui disposent de la capacité technique et financière pour ce faire doivent aider les États ayant moins de ressources à se préparer et à réagir à l’épidémie. ÉTATS D’URGENCE Dans des circonstances exceptionnelles d’urgence de santé publique, les États peuvent avoir recours à leur pouvoir d’urgence. Si la situation présente une menace pour la vie de la nation (si la maladie se propage très rapidement, semble très sérieuse, que le taux de morbidité est élevé, ou qu’il y a risque d’expansion rapide), l’État peut être emmené à déclarer l’état d’urgence, en conformité avec les normes et lois du droit international26. Ces états d’urgence doivent se limiter à ce qui est strictement nécessaire pour maîtriser la situation, au niveau « de la durée, de l’étendue géographique et de la portée matérielle de l’état d’urgence et de toute dérogation appliquée par l’État du fait de l’état d’urgence »27. Toutes les garanties pertinentes du droit international doivent être respectées, incluant la proclamation officielle de l’état d’urgence et sa notification au niveau international, expliquant clairement toutes les mesures prises et les raisons qui les ont motivées; cette situation doit être temporaire et faire l’objet d’un réexamen périodique avant toute prolongation; toute dérogation aux droits humains doit être limitée à ce qui est prévu en droit international, et s’avérer strictement nécessaire dans la situation qui prévaut. 22 WSJ. 28 février 2020. As Iran’s Leaders Contract Coronavirus, Doubts Emerge Over National Tally. Repéré à www.wsj.com/articles/as-irans-leaders- contract- coronavirus-doubts-emerge-over-national-tally-11582903223. CNN. 2 mars 2020. Coronavirus disinformation creates challenges for China's government. Repéré à edition.cnn.com/2020/03/01/asia/china-coronavirus-truth-rumors-intl-hnk/index.html 23 PIDESC. Article 12(2). 24 BBC. 2 mars 2020. Coronavirus: How is Iran responding to the outbreak? Repéré à www.bbc.co.uk/news/world-middle-east-51642926 25 SCMP. 23 février 2020. Coronavirus: Hong Kong’s low-income families struggling to afford masks and disinfectant, new study claims. Repéré à www.scmp.com/news/hong-kong/health-environment/article/3051968/coronavirus-hong-kongs-low-income-families 26 PIDCP. Article 4. American Convention on Human Rights. Article 27. Convention européenne des droits de l’homme. Article 15. Voir aussi le Comité des droits humains. Observation générale No. 29, Article 4 (État d’urgence). Document des Nations Unies CCPR/C/21/Rev.1/Add.11 (2001). 27 Comité des droits humains. Observation générale No 29, Article 4 (État d’urgence).Document des Nations Unies CCPR/C/21/Rev.1/Add.11 (2001), par. 4. Amnistie internationale - Déclaration publique 12 amnistie.ca
ACCÈS AUX SOINS POUR LES PERSONNES AFFECTÉES DES SOINS ACCESSIBLES ET ABORDABLES Pendant qu’on développe des vaccins et des traitements pour la COVID-19, qui ont par ailleurs peu de chances d’être disponibles à court terme, les personnes infectées, ou susceptibles de l’être, ou qui ont été exposées au virus, ont quand même besoin de recourir aux systèmes de santé pour avoir accès aux tests, et au besoin, à des soins de soutien pour gérer les symptômes et les conséquences du virus. Une étude récente a relevé une possible association entre la mortalité rapportée de la COVID-19 et la disponibilité des ressources en santé28. En d’autres termes, les effets de la COVID-19 semblent plus sévères lorsque les ressources en santé ne sont pas facilement accessibles ou disponibles29. Dans ce contexte, il est probable que les personnes à revenus plus faibles, vivant dans des zones éloignées, et provenant de groupes marginalisés, feront face à des difficultés plus grandes pour accéder aux soins de santé dont elles ont besoin. Selon le droit à la santé, les produits, les installations et les services de santé – y compris l’accès aux soins et autres vaccins et traitements élaborés pour la COVID-19 à l’avenir – devraient être disponibles en quantité suffisante dans le pays, accessibles à toutes et tous sans discrimination, respectueux de l’éthique médicale et culturellement appropriés, pertinents sur le plan scientifique et médical, et de bonne qualité30. Pour être considérés « accessibles », ces produits et services doivent être accessibles à tous sans discrimination, particulièrement aux couches les plus vulnérables et marginalisées de la population, être disponibles à une distance accessible en toute sécurité pour toutes les couches de de la population, et abordables pour tous. « L’accessibilité » inclut aussi l’accessibilité à l’information sur la santé. Le droit à la santé inclut la santé physique et la santé mentale. Les États doivent s’assurer qu’un soutien psychosocial est disponible pour parer aux conséquences possibles sur la santé mentale de l’épidémie de COVID- 19 et des mesures subséquentes de confinement, comme l’anxiété et la dépression. Les personnes ayant le virus, celles qui sont infectées, soupçonnées de l’être, ou qui y ont été exposées, ont le droit, ainsi que leurs familles, d’être consultées de manière adéquate et d’avoir la possibilité de prendre les décisions qui les concernent. Les États devraient aussi s’assurer que tous les vaccins et traitements développés pour la COVID-19 soient abordables et accessibles à toute la population. Ils devraient travailler avec les principaux intervenants (dont les compagnies pharmaceutiques) pour y parvenir, et garder l’œil sur les responsabilités de tous les acteurs en matière de droits humains31. Ils devraient enfin prioriser et accélérer leurs efforts pour que les populations puissent jouir de leurs droits à l’eau et à l’assainissement, qui sont primordiaux, particulièrement pour prévenir efficacement l’exposition à la COVID-1932. IMPACT SPÉCIFIQUE ET DISPROPORTIONNÉ SUR CERTAINS GROUPES Toutes les personnes peuvent avoir la COVID-19, toutefois, certains groupes semblent à plus haut risque de maladie sévère ou de mort. Selon l’OMS, les personnes âgées et les personnes avec des problèmes médicaux préexistants (comme l’asthme, le diabète ou les maladies de cœur) semblent plus vulnérables à devenir très malades de ce virus33. S’il n’y a eu que peu d’informations jusqu’à maintenant sur l’impact de genre de l’épidémie de COVID-19, on a constaté que lors d’urgences de santé publique antérieures, les femmes et les filles ont subi des impacts spécifiques disproportionnés34. On associe souvent cela au fait que ce sont les femmes qui ont la responsabilité de soigner les autres, tant dans le secteur informel que dans le secteur de la santé et des services sociaux35, et qu’elles sont ainsi Yunpeng Ji, Zhongren Ma et al. 25 février 2020. Potential association between COVID-19 mortality and health-care resource availability.The Lancet. Repéré à 28 www.thelancet.com/journals/langlo/article/PIIS2214-109X(20)30068-1/fulltext 29 En général, l’OMS constate aussi que les populations les plus pauvres de la terre sont affectées de façon disproportionnée par « les trois maladies contagieuses les plus fatales – malaria, VIH/SIDA et tuberculose », et note que « dans de nombreux cas, [les maladies] sont aggravée et exacerbées par d’autres inégalités et inéquités comme le genre, l’âge, l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, et la situation migratoire». OMS. 29 décembre 2017. Santé et droits de l’homme – Principaux faits. Repéré à www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/human-rights-and-health 30 CDESC. Observation générale No 14. Par. 12. 31 Report of the Special Rapporteur on the right of everyone to the enjoyment of the highest attainable standard of physical and mental health. Human Rights Guidelines for Pharmaceutical Companies in relation to Access to Medicines. UN Doc. A/63/263 (2008). Repéré à www.who.int/medicines/areas/human_rights/A63_263.pdf 32 Les droits à l’eau et à l’assainissement ont été reconnus comme découlant du droit à un niveau de vie suffisant (article 11 du PIDESC), et sont donc contenus dans le PIDESC et autres instruments. Amnesty International. Des droits humains pour la dignité humaine (Index: POL 34/001/2014), pp. 50-53. 33 OMS. 2020. Maladie du Coronavirus (COVID-19) - conseils au grand public: En finir avec les idées reçues. Repéré à https://www.who.int/fr/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019/advice-for-public/myth-busters 34 UNFPA. 10 septembre 2018. La nouvelle épidémie d’Ebola frappe plus durement les femmes et les filles en République démocratique du Congo. Repéré à https://www.unfpa.org/fr/news/la-nouvelle-épidémie-debola-frappe-plus-durement-les-femmes-et-les-filles-en-république 35 Selon une recherche de l’OMS, les femmes constituent 70% de la force de travail dans les secteurs de la santé et des services sociaux. OMS, Amnistie internationale - Déclaration publique 13 amnistie.ca
plus à risque de contracter des maladies, mais aussi à l’inégalité de genre face à la santé et aux prises de décision36. Toutes les mesures d’intervention devraient inclure une analyse de genre pour s’assurer que les droits des femmes, des filles et des personnes transgenres et transsexuelles sont protégés et qu’elles reçoivent le soutien approprié. Cette analyse devrait identifier les menaces potentielles à leur santé, leur sécurité et leurs autres droits, et chercher à les atténuer. Leurs besoins particuliers doivent être pris en compte, en s’assurant entre autres qu’elles aient accès à l’information sur la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’aux produits et services afférents, comme les produits d’hygiène menstruelle ou autres produits pour les femmes enceintes et allaitantes. Certaines personnes font face à d’autres contraintes pour pouvoir se protéger adéquatement contre le virus – les personnes vivant dans la pauvreté par exemple auront plus de difficultés à accéder aux mesures préventives comme les masques et les désinfectants; les personnes sans-abri auront aussi du mal à pouvoir s’isoler. Celles qui n’ont pas accès à l’eau potable et à l’assainissement seront plus vulnérables à la propagation de la COVID-19 et auront du mal à respecter les consignes sanitaires pour se protéger (comme de se laver les mains fréquemment). D’autres personnes peuvent être particulièrement affectées, comme celles qui n’ont d’autre choix que de vivre et travailler en proximité avec d’autres sans accès aux mesures préventives, comme dans les prisons37 ou les environnements de travail qui posent des risques pour la santé. Les personnes à faibles revenus et aux emplois précaires ou informels peuvent voir leurs revenus diminuer ou se retrouver au chômage à cause des impacts grandissants de l’épidémie dans certains secteurs de l’économie38. En planifiant les réponses à la COVID-19, les États devraient être conscients de l’impact particulier du virus sur certains groupes et faire en sorte que leurs besoins et expériences soient pleinement pris en compte dans les plans et stratégies. Une augmentation des cas de COVID-19 peut accroître la pression sur les systèmes de santé publique, ce qui pourra affecter négativement les personnes ayant régulièrement besoin du système public – pour des raisons autres que la COVID-19 – comme les personnes avec des maladies chroniques, les personnes âgées ou les femmes enceintes39. Certains rapports ont décrit par exemple comment des femmes enceintes en Chine ont eu de la difficulté à obtenir des soins prénataux et des soins spécialisés pour leur accouchement à cause du détournement des ressources en réponse à la COVID-1940. Les personnes âgées ou celles ayant un handicap, même si elles ne sont pas affectées par le virus, sont souvent plus isolées, et les mesures de santé publique mises en place dans le contexte de la COVID-19 peuvent compliquer davantage leur accès aux services de base41. Les États devraient réaliser une enquête auprès des personnes ayant besoin d’assistance immédiate pour s’assurer qu’elles ont accès aux produits et services nécessaires. Dans le cadre de leur préparation et de leur réponse à la propagation potentielle de la COVID-19, les États devraient toujours prendre en compte l’impact de cette réponse sur le système de santé, et sur les personnes qui ont besoin de soins pour d’autres raisons, et tenter d’en atténuer les impacts négatifs. SÉCURITÉ SOCIALE ET DROITS DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS Les nombreuses mesures mises en place pour protéger la santé publique – comme les interdictions de voyager, les quarantaines, les restrictions aux regroupements publics, etc. – peuvent affecter négativement les droits des personnes, le droit du travail et au travail, particulièrement dans le cas des formes d’emplois précaires. C’est le cas des travailleuses et travailleurs migrants42, des personnes aux emplois précaires, y compris ceux de la « gig economy »43, des personnes à faibles revenus, des migrants irréguliers et des travailleurs du secteur informel. Les travailleuses et travailleurs de ces secteurs n’ont généralement pas d’avantages sociaux adéquats, quand ils en ont, ce qui Équité femmes-hommes parmi les personnels de santé: une analyse de 104 pays. Document de travail 1 sur les personnels de santé. Repéré à https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/311385/WHO-HIS-HWF-Gender-WP1-2019.1-fre.pdf?ua=1 36 Clare Wenham, Julia Smith et al. 6 mars 2020. COVID-19: The gendered impacts of the outbreak.The Lancet. Repéré à www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)30526-2/fulltextWenham 37 Voir par exemple AIUK. 3 mars 2020. Iran: amid coronavirus fears, Nazanin Zaghari-Ratcliffe should be released unconditionally. Communiqué de presse www.amnesty.org.uk/press-releases/iran-amid-coronavirus-fears-nazanin-zaghari-ratcliffe-should-be-released 38 SCMP. 26 février 2020. What about us? Needy in Hong Kong who fall short of mark for HK$10,000 government handout cry foul. Repéré à www.scmp.com/news/hong-kong/hong-kong-economy/article/3052526/what-about-us-needy-hong-kong-who-fall-short-mark 39 NPR. 25 février 2020. What Happens If You're Critically Ill In China — But Not With Coronavirus. Repéré à www.npr.org/sections/goatsandsoda/2020/02/25/805712259/what-happens-if-youre-critically-ill-in-china-but-not-with-coronavirus 40 New York Times. 25 février 2020. I Felt Like Crying’: Coronavirus Shakes China’s Expecting Mothers. Repéré à www.nytimes.com/2020/02/25/business/coronavirus-china-pregnant.html. Des ressources pour la santé sexuelle et reproductive ont été détournées vers la réponse à l’urgence, contribuant ainsi à une augmentation de la mortalité maternelle, dans une région où ce taux est l’un des plus élevés au monde. 41 SCMP. 29 février 2020. Amid coronavirus outbreak, bigger killers lurk for Hong Kong’s elderly living alone – isolation and panic. Repéré à www.scmp.com/news/hong-kong/health-environment/article/3052694/amid-coronavirus-outbreak-bigger-killers-lurk 42 Al Jazeera. 5 mars 2020. Coronavirus outbreak: What do migrant workers do? Repéré à www.aljazeera.com/news/2020/03/coronavirus-outbreak-migrant- workers-do-200305102831177.html 43 Voir par exemple: The Guardian. 7 mars 2020. If I catch the coronavirus I’m screwed. Gig economy workers can’t afford to be ill. Repéré à https://www.theguardian.com/world/2020/mar/07/gig-economy-workers-on-breadline-too-poor-to-stay-at-home-if-they-catch-coronavirus. BBC. 9 mars 2020. Coronavirus: 'If I become ill I'll have to work. Repéré à www.bbc.co.uk/news/business-51800050 Amnistie internationale - Déclaration publique 14 amnistie.ca
signifie qu’ils perdent leurs revenus quand ils sont malades et n’ont pas de congés de maladie. Ils peuvent aussi avoir de la difficulté à se faire tester et à se faire soigner quand ils tombent malades. Les États devraient assurer l’accès à la sécurité sociale pour tous – incluant les congés de maladie, les soins de santé, les congés parentaux – lorsque les gens ne peuvent travailler à cause de l’épidémie de COVID-1944. Cela inclut les personnes malades, en quarantaine, ou qui prennent soin des enfants à cause de la fermeture des écoles. En plus de répondre au droit à la sécurité sociale, ces mesures sont essentielles pour que la population adhère efficacement aux mesures de santé publique mises en place par les États: la population respectera sans doute mieux la quarantaine si les conséquences négatives sont compensées par des programmes de sécurité sociale adéquats. PRÉVENIR LA STIGMATISATION ET LA DISCRIMINATION Conséquemment à la propagation de la COVID-19, plusieurs rapports constatent l’émergence de discrimination et de stigmatisation à l’encontre des personnes perçues comme provenant de certains pays ou ethnies. On rapporte par exemple que les restaurants chinois perdent leur clientèle dans certains pays45; dans d’autres, des restaurants et des hôtels refusent les clients chinois46. Des gens perçus comme provenant d’Asie de l’Est ont été victimes de racisme, harcelés, attaqués et blessés physiquement dans certains pays47. Les principes d’égalité et de non- discrimination contenus dans les différents instruments des droits humains48 doivent être au cœur des réponses de tous les gouvernements à la COVID-19. Le droit à la non-discrimination est une obligation immédiate et transversale et s’applique à l’exercice de chacun des droits humains garantis par le droit international. Selon l’Observation générale No 20 du CDESC, il est interdit de faire de la discrimination sur la base de l’état de santé : les États devraient s’assurer que l’état de santé réel ou perçu d’une personne n’est pas un frein à l’exercice de ses droits dans le cadre du PIDESC, et les États devraient adopter des mesures pour s’attaquer à la stigmatisation généralisée des personnes sur la base de leur état de santé (réel ou perçu) puisque cela peut miner leur capacité à jouir de leurs droits humains49. Les institutions de santé publique ont aussi constaté les impacts nocifs d’une telle stigmatisation. Des mises à jour de l’OMS expliquent comment cette stigmatisation a des effets négatifs sur la santé publique: elle peut porter certaines personnes à cacher leur maladie pour éviter la discrimination, les empêcher de se faire soigner et les décourager d’adopter des comportements sains50. Le Center for Disease Control and Prevention des États-Unis a constaté que : « La stigmatisation fait mal à tout le monde en créant plus de peur et de colère envers les gens ordinaires qu’envers la maladie qui crée le problème »51. Les États devraient prendre des mesures concrètes, délibérées et ciblées pour s’attaquer à la discrimination et à la stigmatisation, en mettant en place des stratégies, des politiques et des plans d’action, tant pour les acteurs publics que privés, afin de protéger toutes les communautés de mauvais traitements. PROTECTION DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS DE LA SANTÉ Les personnes travaillant dans le secteur de la santé sont la ligne de front de cette épidémie et elles continuent d’œuvrer, malgré les risques pour leur santé et celle de leurs proches. Les risques auxquels elles font face sont 44 Pour plus de détails, voir le Comité des droits économiques sociaux et culturels. Observation générale No 19. Article 9 (le droit à la sécurité sociale) Document des Nations Unies E/C.12/GC/19 (2008). 45 CNN. 18 février 2020. Chinese restaurants are losing business over coronavirus fears. Repéré à edition.cnn.com/2020/02/18/australia/australia-chinese- restaurants-coronavirus-intl-hnk-scli/index.html 46 Bloomberg. 30 janvier 2020. Fear in the Age of Coronavirus: Chinese No Longer Welcome. Repéré à swww.bloomberg.com/news/articles/2020-01-30/fear- in- the-age-of-coronavirus-chinese-no-longer-welcome 47 Dutchreview. 24 février 2020. Coronavirus: Dutch-Chinese woman attacked after asking a group of Dutch boys to stop singing a racist song. Repéré à dutchreview.com/news/coronavirus-dutch-chinese-woman-attacked-over-racist-song/. SCMP. 3 mars 2020. Singaporean student in London bashed after responding to racist coronavirus taunts. Repéré à www.scmp.com/news/asia/southeast-asia/article/3064742/singaporean-student-london-bashed-after- responding- racist. The Guardian. 27 février 2020. Doctors and nurses at Melbourne hospital racially abused over coronavirus panic. Repéré à www.theguardian.com/world/2020/feb/27/doctors-and-nurses-at-melbourne-hospital-racially-abused-over-coronavirus-panic 48 Déclaration universelle des droits de l’homme, articles 1 et 2. PIDESC, article 2. PIDCP, article 2. Convention relative aux droits de l’enfant, article 2. Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, article 2. Convention internationale sur toutes les formes de discrimination raciale, article 2. Convention européenne des droits de l’homme, article 1. American Convention on Human Rights, article 1. 49 Comité des droits économiques, sociaux, et culturels. Observation générale No 20. Article 2(2) (non-discrimination pour les droits économiques, sociaux et culturels du Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels). Document des Nations Unies E/C.12/GC/20 (2009), par. 33. 50 WHO. 24 février 2020. Coronavirus disease 2019 (COVID-19) Situation Report – 35. Repéré à www.who.int/docs/default- source/coronaviruse/situation- reports/20200224-sitrep-35-covid-19.pdf?sfvrsn=1ac4218d_2 51 Centers for Disease Control and Prevention. Stigma and Resilience. Repéré à https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/about/related- stigma.html Amnistie internationale - Déclaration publique 15 amnistie.ca
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