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Sécurité globale et résilience des territoires Séminaire à Lyon les 17 et 18 janvier 2019 Sécurité globale et résilience des territoires - Séminaire à Lyon les 17 et 18 janvier 2019 Le séminaire aura lieu les 17 et 18 janvier 2019 à Lyon sur une durée de un jour et demi dans un format de travail de 50 participants environ. L’objectif est de croiser les expertises détenues par les collectivités territoriales, les services de l’État, les universitaires et les acteurs de la sphère privée pour définir la façon résiliente de relever des grands défis auxquels les territoires et les villes sont aujourd’hui confrontés. Dans une préoccupation de sécurité globale des territoires, Il s’agit tout à la fois de mobiliser l’ingénierie, d’activer des effets leviers et d’adopter des approches stratégiques. Ce séminaire est un construit collectif qui s’inscrit dans la continuité du séminaire « Résilience urbaine et gestion de crise » de septembre 2016 et du séminaire « Résilience urbaine et sécurité des territoires » d’octobre 2017. Un partenariat est assuré avec la revue Préventique. Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement - www.cerema.fr Territoires et ville : 2 rue Antoine Charial - CS 33927 – F-69426 Lyon Cedex 03 – Tél. +33 (0)4 72 74 58 00 Siège social : Cité des mobilités - 25 avenue François Mitterrand - CS 92803 – F-69674 Bron Cedex – Tél. +33 (0)4 72 14 30 30
Sécurité globale et résilience des territoires Ingénierie, effets de levier et stratégies à promouvoir Séminaire organisé à Lyon, les 17 et 18 janvier 2019 Cerema Territoires et ville 2, rue Antoine Charial 69003 Lyon www.cerema.fr
3 Sommaire Présentation générale 7 Regard scientifique sur la notion de défi 9 Équipe-projet et collaborations 12 première partie Les défis que nous devons relever 14 DÉFI A : Sécuriser les territoires eu égard aux défaillances des systèmes techniques 16 DÉFI B : La nature comme composante majeure de l’aménagement urbain résilient 19 DÉFI C : Faire des risques une composante active de la résilience des territoires et des infrastructures 22 DÉFI D : Assurer une prise en charge coordonnée des grands défis 25 deuxième partie Les cas pratiques 28 Cas pratique 1 : La résilience des quartiers d’habitation exposés à des ruptures d’énergie, eau ou approvisionnement par exemple à la suite d’un événement naturel 30 Cas pratique 2 : La résilience des vallées isolées par un aléa naturel 33 Cas pratique 3 : La plantation des arbres en ville. Comment aller vers la foresterie urbaine ? 37 Cas pratique 4 : Construire avec plus d’eau, jusqu’où et comment ? 41 Cas pratique 5 : Les territoires à identité industrielle 44
4 Sommaire Cas pratique 6 : Les territoires littoraux ; le cas de Semarang en Indonésie 49 Cas pratique 7 : Infrastructures et changement climatique en Europe 52 Cas pratique 8 : La résilience des métropoles sous l’angle de leur approvisionnement dans des conditions viables et sûres 55 Cas pratique 9 : Les métropoles ou grandes agglomérations 59 troisième partie Vue de synthèse des défis et des cas pratiques 62 Q UATR i è m e p a r t i e Modalités pratiques 66 Séquences du séminaire 68 Participants 69 Éléments de bibliographie 75
7 Présentation générale Les changements que les territoires doivent culture partagée et inclusive d’anticipation affronter sont multiples, rapides et interactifs. des crises et de résilience. Ils peuvent être environnementaux comme le changement climatique, liés à la réforme Pour enclencher, entretenir et orienter la mise des organisations politiques et administratives, en mouvement recherchée, La résilience offre induits par la modification des pratiques des possibilités. Elle aide à prendre en compte économiques et sociales. Pour éviter les les incertitudes, à anticiper les crises, à traiter situations de déprise, de tension ou de les défis que les territoires doivent relever. désordre, les territoires doivent repenser leur fonctionnement et leur organisation, mobiliser Pour appréhender les ressorts de la résilience, différemment leurs ressources et lever les afin de prévenir les crises et de limiter leurs blocages de différentes natures qui peuvent effets, le Cerema a réuni en octobre 2017 à faire obstacles aux démarches d’adaptation Lyon une quarantaine d’experts. Cette rencontre appelées à se succéder. Pour assurer une a abouti à la production d’un cadre de référence dynamique d’ensemble, trouver les marges des besoins à satisfaire pour activer la résilience. nécessaires, ces démarches d’adaptation doivent Des réponses sont à apporter dans les différents être transversales et partagées par le plus champs des politiques publiques, de l’appui grand nombre. aux territoires, de la recherche, de l’ingénierie et de la formation. Affirmée en mai 2018 par le ministère de la transition écologique et solidaire 1, la Une nouvelle étape est proposée à la suite de notion de sécurité globale des territoires vise ce séminaire : établir des éléments de méthode à penser « global et collectif » pour traiter pour relever les défis auxquels les territoires des problématiques de transports, d’énergie, sont confrontés. À partir d’une analyse des d’eau, d’environnement et de logement, besoins, d’une identification des matériaux et d’aménagement, de prévention des risques des ressources disponibles, les enjeux sont Les 1res Assises de 1 la sécurité globale naturels et technologiques habituellement aujourd’hui de mobiliser l’ingénierie, d’activer des territoires se sont tenues à gérées de façon sectorielle. Face aux changements, des effets leviers, d’adopter des approches Lyon les 29, 30 les pouvoirs publics doivent développer une stratégiques. et 31 mai 2018.
8 Présentation générale Réunissant une cinquantaine d’experts pour Le séminaire sera structuré autour de ces défis débattre d’une dizaine de cas pratiques, le illustrés par une petite dizaine de cas pratiques séminaire des 17 et 18 janvier 2019 se propose prenant des formes multiples et traitant de de traiter les défis suivants relatifs aux transitions questions différentes en relation avec les des territoires : transitions en cours. – sécuriser les territoires eu égard aux défaillances des systèmes techniques ; Un regard scientifique est porté aux travaux – faire de la nature une composante majeure de menés pour s’assurer que la notion de résilience l’aménagement urbain résilient ; est bien intégrée et qu’elle n’est pas mobilisée – faire des risques une composante active de la de façon factice. Des éléments de synthèse résilience des territoires et des infrastructures ; seront produits de même que des éclairages – assurer une prise en charge coordonnée des seront apportés par les experts sur des points grands défis. spécifiques en relation avec l’ingénierie, les effets de levier et les stratégies. La finalité de la rencontre est de produire des éléments de méthode utiles à la mise en œuvre de la résilience des villes et des territoires face à ces quatre grands défis.
9 Regard scientifique sur la notion de défi Par Patrick Pigeon, Professeur d’université Le terme de défi est peu utilisé dans la littérature resilience alliance, par exemple à partir des académique sur les risques et l’environnement. Il systèmes socio-écologiques et de la panarchie a été mobilisé en partie par Metzger (2017), qui (Gunderson & Holling, 2001). a cherché à plus lier les recherches sur les risques avec celles qui sont liées à l’environnement. Ce On peut justifier cette lecture en centrant sur le serait un moyen de compléter l’approche de thème de la prévention des désastres (événements la question des risques par les enjeux. Ils sont de fréquence rare sur un pas de temps donné définis comme composantes d’un système de mais d’intensité de dommages élevée) : peuplement dont la perte ou l’altération seraient jugées inacceptables par un ensemble d’acteurs 1. La prévention des désastres est plus que engagés dans la prévention des risques (D’Ercole jamais un impératif pour plus de la moitié de & Metzger, 2009). Le défi serait alors d’éviter le la population mondiale dans des aires urbaines plus possible l’endommagement et même la occupant une superficie limitée de la planète, et perte de ces enjeux, en attirant particulièrement dépendant des échanges à échelle mondiale. l’attention des décideurs sur ces composantes particulièrement importantes d’un système de 2. Les politiques de prévention existent, et peuplement. elles sont très nombreuses, dans de multiples domaines. Mais elles sont généralement L’approche peut sembler très abstraite. Elle a abordées à partir de leurs limites (ce que l’on pourtant été testée concrètement en lien avec la voit en premier, ce sont les dommages, ici les municipalité de Quito, notamment à propos de la désastres). Les bases de données comme celle gestion de l’approvisionnement en eau potable, du CRED ou DESINVENTAR permettent de vérifier et reprise à El Alto/La Paz (Hardy, 2009). ceci, encore plus avec une lecture critique (Pigeon et Rebotier, 2016). En fait, sur le fond, cela revient à se poser la question : comment penser et agir en repoussant 3. On peut alors poser qu’un défi est de repousser le plus possible les limites de la pensée et de le plus possible les limites des politiques de l’action, confrontées aux formes de complexité prévention des désastres. Les politiques sont liées aux coévolutions entre systèmes, afin de nécessaires, mais nécessairement limitées (il réduire le plus possible les risques ? C’est une est impossible d’éliminer tout désastre, mais manière plus simple d’aborder cette question il est nécessaire et possible de réduire les que celle développée par les chercheurs de dommages, donc de prévenir les désastres....).
10 Regard scientifique sur la notion de défi Identifier particulièrement les enjeux serait un de système de peuplement (catastrophe) est moyen d’obtenir un tel résultat, en concentrant forcément peu souhaité par une très grande l’action sur ces derniers. Le caractère à la majorité d’acteurs engagés dans les politiques fois nécessaire et limité de l’action politique de prévention. Ils sont attachés à des solutions est également défendu par Revault d’Allonnes antérieures impliquant des arbitrages entre (1999) à partir d’une approche philosophique de plusieurs autres types de risques, et que reflètent la question. Toute politique nous lance un défi les structures fondamentales des systèmes de qui est celui de sa nécessité et de sa précarité. peuplements actuels. 4. L’approche serait alors très voisine de Là encore, ce qui semble très abstrait contribue celles qui mobilisent la résilience : au sens à expliquer, par exemple, les refus des politiques de capacité à absorber les évolutions et les de retrait stratégique des peuplements littoraux dommages tout en ne remettant pas en cause (comme le montrent plusieurs thèses récentes la structure fondamentale et/ou les tendances sur ce thème, telle celle de Verlynde, 2018). Les de fond des peuplements humains. Comment acteurs impliqués préfèrent le renforcement des intégrer l’évolution, l’impossibilité d’éliminer mesures de structures (digues, notamment) alors tout dommage, et même tout désastre, tout qu’il est démontré que ces dernières contribuent en évitant une catastrophe, au sens d’une parfois à préparer un désastre (Pigeon et remise en cause fondamentale de structure, Rebotier, 2016). Le défi est alors d’identifier des ou d’un système ? Le défi est d’identifier et politiques centrées sur des enjeux et qui soient de gérer les enjeux afin d’espérer conserver acceptables par le plus grand nombre d’acteurs les structures fondamentales d’un peuplement impliqués dans la gestion de ce type de risque, envisagé comme système, sans pour autant sans remettre en cause les arbitrages antérieurs, prétendre éliminer tout dommage ni même multirisques. tout désastre. Cette lecture a pu être proposée, sur le fond, à propos de l’interprétation des L’approche par le défi peut donc attirer l’attention politiques publiques concernant la commune de sur la nécessité de penser et d’agir en intégrant un Pont-de-Claix (Le Noan, 2015). monde de plus en plus urbanisé, nécessairement complexe et dynamique, multipliant des acteurs 5. Avec ce type d’approche, on tombe sur agissant volontairement et involontairement un problème logique majeur, relevé par les sur l’environnement. Pourtant ces pensées chercheurs du groupe resilience alliance et actions sont nécessairement limitées face (Gunderson & Holling, 2002). En effet, si on à la reconnaissance croissante de formes de admet que pour prévenir un désastre, il faut complexité. Ces évolutions problématiques reconsidérer la structure fondamentale du aujourd’hui reconnues par la multiplication des système de peuplement qui existait avant ce approches (développement durable, résilience, désastre, cela exige alors une catastrophe. nexus, parnarchie, anthropocène.) nous mettent Or, un changement fondamental de structure au défi.
Regard scientifique sur la notion de défi 11 Une manière pragmatique de répondre au Répondre au défi pourrait être d’identifier défi est présentée par Renaud et alii (2013). des enjeux sur lesquels pouvoir agir plus Ils promeuvent l’outil système de gestion de particulièrement, en explicitant qui, pourquoi et la connaissance, qui permet de piloter les comment, de manière effectivement inclusive politiques de prévention des risques et de et participative, en espérant réduire le plus gestion de l’environnement. possible les limites de la pensée et de l’action. Bibliographie : se référer à la fin du document.
12 Équipe-projet et collaborations L’équipe-projet est constituée de : Une collaboration sera mise en place avec la revue Nicolas Beaurez (Cerema, Territoires et ville), Préventique représentée par Didier Raciné. Christian Després (SDSIE), Bernard Guézo (Cerema Territoires et Ville), Yves Lespinat (DREAL PACA, Philippe Blancher, consultant en socio-économie Adjoint Sécurité Défense Zone Sud), Yves Majchrzak de l’environnement et des risques, assure un (Cerema, Territoires et ville), Mathieu Maupetit appui à la qualité technique du projet. (Cerema Normandie-Centre), Patrick Pigeon (Université de Savoie), Éliane Propeck-Zimmerman Elba Lekaj assure un appui à l’organisation. (Université de Strasbourg), Danielle Sauge-Gadoud (AMARIS), Karim Selouane (RESALLIENCE (filiale de SIXENSE Groupe – VINCI Construction)), Ghislaine Verrhiest-Blanc (DREAL PACA).
Équipe-projet et collaborations 13 Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) Service de défense, de sécurité et d’intelligence économique (SDSIE) MINISTÈRE DE LA COHÉSION Ministère de la Transition écologique et solidaire DES TERRITOIRES ET DES RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DREAL PACA Association nationale des collectivités pour la maîtrise des risques technologiques majeurs (AMARIS) Université de Savoie Mont-Blanc Université de Strasbourg RESALLIENCE (filiale de SIXENSE Groupe – VINCI Construction) Revue Préventique
14 pr e m i è r e p a r t i e
15 LES DÉFIS QUE NOUS DEVONS RELEVER
16 Les défis que nous devons relever DÉFI A : Sécuriser les territoires eu égard aux défaillances des systèmes techniques Si « la technique (…) traduit la capacité des En outre, l’événement a été médiatisé sociétés à se transformer2 », l’omniprésence et principalement du fait de ses impacts sur un la centralisation des systèmes techniques : eau, autre système technique : le réseau ferroviaire, assainissement, énergie, fibres, approvisionnement saturé ce jour-là par les grands départs en dans la vie quotidienne des populations figurent vacances. Les effets pourtant réels sur les parmi les changements que les sociétés se populations locales ont été à l’inverse peu doivent d’analyser sous l’angle des risques. Si le analysés. déploiement des systèmes techniques permet au plus grand nombre de participer à la « société Au titre de la gestion des territoires, la prise en réseaux » (Castells), les gestionnaires ne en compte de ce type d’événement ne peut peuvent éluder les questions que soulève la consister à invoquer leur caractère exceptionnel défaillance possible de ces systèmes toujours ou inédit. Certes, les retours d’expérience plus informatisés. effectués par les opérateurs après un désastre de ce type permettent en principe L’actualité révèle régulièrement la survenue de l’adoption de mesures destinées à éviter une désordres majeurs liés au dysfonctionnement répétition de l’événement à l’identique, mais voire à la rupture accidentelle de systèmes la généralisation des systèmes techniques techniques. Sans méconnaître le retentissement expose inévitablement les territoires à produit par l’effondrement meurtrier du d’autres situations de ruptures de services par viaduc Morandi à Gênes le 13 août 2018, indisponibilité des réseaux se produisant sous en France l’incendie du poste électrique RTE de multiples formes et à différents endroits. Dans d’Harcourt survenu à Paris le 27 juillet 2018 de nombreux cas, des travaux de sécurisation est remarquable à plus d’un titre. Plusieurs des réseaux sont entrepris. Ce peut être lorsque jours durant, la rupture de ce transformateur les conditions techniques et économiques et a interrompu l’alimentation électrique de la également de maîtrise d’ouvrage le permettent, gare Montparnasse et privé d’électricité des la construction de galeries souterraines multi- quartiers d’habitation sur plusieurs communes. réseaux (cf. illustration). Les réflexions menées Cette rupture a pu résulter de la conjonction sur les infrastructures vitales ou critiques se de facteurs internes, liés à la structure ou aux heurtent cependant aujourd’hui à la question 2 Manuel Castells, modalités d’utilisation du transformateur, et de la multiplicité des réseaux jouant un rôle La société externes puisqu’il est survenu en période de essentiel dans la vie et l’activité économique en réseaux, Fayard p.28 chaleur intense et de fortes sollicitations. des territoires et de leurs interconnexions.
Les défis que nous devons relever 17 Illustration 1 : Galerie souterraine multifonctions à Amsterdam. L’incendie du transformateur d’Harcourt rappelle citadins, la vie des habitants des quartiers le fait, établi de longue date maintenant3, que le affectés, etc.). Il rappelle aussi les liens privilégiés risque lié aux systèmes techniques recouvre tout entre densité, flux et place tenue par les réseaux4. à la fois l’éventualité de défaillance au sein d’une Ces éléments 3 sphère technique (dans l’événement précité le À différentes échelles de territoire, la place des ont été énoncés dans l’ouvrage réseau de transport d’électricité) mais également systèmes techniques relatifs au cycle de l’eau, de synthèse les effets en cascade sur d’autres réseaux (pour le à l’énergie, aux transports et aux modes de Risques et réseaux technique, poste TRE d’Harcourt, le réseau ferroviaire) et aussi communication est rarement interrogée dans Certu, 1998, sous l’ensemble des relations entre le réseau et leurs une analyse globale des risques. Cette analyse la direction de Philippe Blancher. environnements physiques et sociaux (dans le cas est cependant nécessaire sous l’angle de la viabilité Pigeon, Ville et 4 d’Harcourt, peuvent être invoqués les conditions des territoires et de leur sécurité globale, les environnement, météorologiques, les migrations estivales des différents sujets étant étroitement liés. Pigeon, 1994.
18 Les défis que nous devons relever La non-durabilité d’un territoire, par exemple À l’inverse, d’autres territoires souffrent encore en matière de ressource en eau, met en jeu des d’enclavement économique du fait d’une seuils au-delà desquels des dysfonctionnements desserte insuffisante en fibres numériques. Pour apparaissent ou s’accentuent avec des possibles autant, si des initiatives de régulation sont effets en cascade difficiles à maîtriser. prises, leur diffusion voire leur généralisation prend du temps pour des raisons culturelles et Pour réduire des fragilités environnementales, sociétales. Ce déficit de prise de conscience et économiques ou sociales, recourir à des systèmes ensuite d’adaptation se traduit par des situations techniques est souvent nécessaire. C’est le cas de vulnérabilité excessives des territoires qui de la défense extérieure contre l’incendie (DECI) peuvent conduire à des dégradations progressives qui mobilise les réseaux d’eau, les voiries pour des conditions environnementales, sociales et assurer la protection de zones habitées exposées économiques comme à des expositions à des aux incendies de forêt. Le recours à des réseaux chocs profondément dommageables. d’échelle supra-territoriale est souvent nécessaire pour fiabiliser un service, mais il implique tant Si les systèmes techniques sont un atout pour les d’envisager la défaillance de systèmes fortement territoires, ils sont aussi facteurs de vulnérabilité, centralisés dont la connaissance fine échappe contrepartie inévitable de leur performance aux territoires que de préserver les ressources et de leur usage grandissants. Lorsqu’ils sont patrimoniales en secours, en appoint ou en fortement sollicités, ces systèmes peuvent être possibilités de réutilisations futures. Dans le exploités à la limite de leur fonctionnement département de l’Isère, lors de la coupure du nominal. Leur gestion technologique et tunnel du Chambon plusieurs mois durant en centralisée les fragilise face à la survenue de 2015, une route forestière a été aménagée en perturbations locales qui peuvent se propager voie de secours pour assurer le désenclavement au sein du système. Le changement climatique de la population. produit un environnement plus agressif vis-à-vis duquel ces systèmes n’ont pas été conçus. Pour sécuriser le fonctionnement des territoires, améliorer leur viabilité, il peut être nécessaire Lé défi de résilience est le suivant : comment d’ajuster la place des réseaux et systèmes ajuster la place des réseaux dans le sens de techniques. Des initiatives sont prises en ce sens, renforcer la sécurité globale des territoires ? parfois de façon radicale. Ainsi, des territoires en déprise économique ont pu engager des démarches volontaristes visant à atteindre l’autonomie énergétique5. Des métropoles 5 C’est le cas de la commune s’impliquent dans la valorisation agricole des nouvelle espaces péri-urbains pour réintroduire des circuits du Méné (Côtes-d’Armor). courts entre production et consommation.
Les défis que nous devons relever 19 DÉFI B : La nature comme composante majeure de l’aménagement urbain résilient Si les systèmes techniques nécessitent une excessive des sols. Ainsi, la catastrophe de attention particulière en matière de sécurité Nîmes en 1988 a amené à la renaturation des globale des territoires, la nature est un autre cadereaux, ces cours d’eau intermittents qui facteur d’attention dans le contexte d’une avaient été urbanisés sans précaution. perturbation des écosystèmes à l’échelle planétaire. La multiplication par trois de la De façon récente, une prise de conscience s’est population mondiale s’est faite sur un laps de opérée des possibilités offertes par les éléments temps très court. Cette explosion démographique naturels eux-mêmes : eau, flore, faune, air et et ses conséquences en matière d’urbanisation sols pour préserver l’habitabilité menacée des des territoires constituent un défi majeur vis-à- espaces de vie. C’est ainsi que les métropoles vis des éléments naturels en matière de ponction et les villes ont investi dans la revalorisation des des ressources non renouvelables, d’altérations berges des fleuves et rivières. Parallèlement, des sols, des eaux et de l’atmosphère. La une ingénierie écologique s’est développée pour réalité d’une crise écologique est corroborée par gérer, préserver ou restaurer les écosystèmes, des atteintes structurelles à l’environnement : en s’appuyant sur l’utilisation de moyens et effondrement de la biodiversité, dérèglement processus naturels, et en croisant les points de climatique, épuisement de fleuves traversant vue écologiques, économiques et sociaux. de grands territoires, pollution de l’air à grande échelle, etc. L’ingénierie écologique intervient sur différents types d’espaces : agricole, urbain, forestier, Comment éviter alors localement au moins aquatique pour corriger des dysfonctionnements. une dégradation irréversible des conditions Elle se veut une alternative aux solutions basées d’habitabilité des espaces de vie ? Contrairement sur le génie civil. C’est une ingénierie de à l’idée que l’on se fait habituellement des la résilience des écosystèmes, définie comme catastrophes, celles-ci ne correspondent pas la capacité des écosystèmes à anticiper des toujours à des événements brutaux. Une perturbations majeures, qu’elles soient naturelles sécheresse prolongée succédant à plusieurs ou anthropiques. Elle peut même dans certains années de déficit hydrique peut provoquer un cas, à l’image de la « phytoremédiation », désastre agricole. Anticiper ce type d’événement contribuer à corriger les dommages causés par pour en limiter les effets représente un enjeu de des activités anthropiques. Plus récemment, résilience pour les territoires. En même temps, des travaux ont été développés sur les services des événements brutaux ont régulièrement rendus par les écosystèmes. Ces travaux visent révélé la nécessité de remédier à l’artificialisation à démontrer la place que ceux-ci contribuent
20 Les défis que nous devons relever à la résilience d’autres systèmes, comme les Ces évolutions amorcent une résilience des systèmes urbains confrontés par exemple à des systèmes urbains par la nature elle-même. Le pics de chaleur, sans qu’il soit envisageable Conseil économique, social et environnemental qu’ils résolvent la totalité du problème. (CESE) a publié un avis en juillet 2018 intitulé : « La nature en ville : comment accélérer la Si l’ingénierie écologique peut contribuer à dynamique ? ». Cet avis propose de considérer régénérer des écosystèmes naturels, les la biodiversité avec le même niveau d’attention écosystèmes naturels peuvent eux-mêmes que le changement climatique compte-tenu contribuer à requalifier des systèmes urbains en particulier des enjeux majeurs en matière éprouvés par le changement climatique ou de santé des populations. Il incite ainsi à faire la perte de biodiversité. Les milieux humides des milieux naturels un élément structurant de sont réhabilités dans leur rôle bénéfique en l’aménagement urbain comme à lutter contre agglomération par leur valeur patrimoniale, l’artificialisation des terres. Il invite à organiser leur richesse écologique, leur rôle de régulation, des solidarités ville-campagne. leurs fonctions sociale et culturelle. La nouvelle compétence GEMAPI introduite par la loi MAPAM L’avis du CESE se lit comme une invitation à met en regard les ouvrages hydrauliques et regagner pas-à-pas des positions en faveur des l’hydraulique environnementale comme moyen milieux naturels pour obtenir des améliorations de restaurer la place de l’eau comme élément au niveau local qui peuvent ensuite peser sur des naturel dans la gestion des inondations. évolutions globales si les efforts sont déployés Illustration 2 : Saint-Jacques-de-le-Lande (35) a établi une relation forte entre habitat dense et nature.
Les défis que nous devons relever 21 collectivement et à grande échelle. Il s’agit tout Un défi posé à l’urbaniste et à l’ingénieur à la fois de s’adapter à des changements pour est par conséquent celui du déploiement partie irréversibles : élévation des températures, effectif de processus de résilience visant à faire intensification des crises hydrologiques et de effectivement de la nature une composante (re)donner à la nature une place centrale comme essentielle de l’aménagement urbain. La course facteur d’habitabilité des territoires. de vitesse engagée pour faire face aux effets des perturbations des éléments naturels agit Les évolutions planétaires des dernières aujourd’hui en défaveur des agglomérations années donnent raison à Manuel Castells : si dont le rythme de transformation est insuffisant. pendant des millénaires, la nature a dominé la civilisation, puis plus récemment, la civilisation a tenté d’effacer la nature, il est devenu vital de réintroduire la nature comme composante culturelle essentielle pour l’humanité.
22 Les défis que nous devons relever DÉFI C : Faire des risques une composante active de la résilience des territoires et des infrastructures Concilier aménagement et risques est ce qui a nouveaux risques. Au fil des dernières décennies, permis de longue date le développement des la prise en compte des risques dans les territoires territoires. est devenue complexe. Surtout, nous constatons à la fois la possibilité de prévenir les dommages, Aux 14e et 15e siècles, la valorisation des grandes mais sans parvenir à éliminer tout dommage, et plaines exposées aux aléas naturels, sanitaires et sans éliminer les événements inattendus. anthropiques est rendue possible par la mise en œuvre de techniques constructives élémentaires. Changeant éventuellement de forme et de nature, Ces techniques de défrichage, de création de des catastrophes se produisent toujours, ce qui fossés, de drainage des sols, de construction de révèle à la fois l’intérêt et les limites des dispositifs levées, d’édification de remparts, permettaient préexistants. Dans un contexte sociétal demandant tout à la fois de bonifier les terrains, de les affecter toujours plus de sécurité, différentes composantes à l’agriculture et à l’élevage, et de sécuriser les ont ainsi été successivement ajoutées pour éviter lieux habités. À partir du 19e siècle, l’idée s’impose le plus possible les victimes, réduire les dommages que le développement conjugué des connaissances ou faciliter la reprise d’activité. Considérée dans scientifiques et des techniques peut résoudre les son ensemble, la gestion des risques recouvre de questions nouvelles de santé et de sécurité des ce fait des aspects composites de protection contre populations que soulèvent l’essor industriel et le les aléas naturels ou anthropiques (protections développement des agglomérations. hydrauliques, barrières techniques dans les établissements industriels dangereux, etc.), À la fin du 20e siècle, pour répondre à d’interdiction ou de réglementation de l’usage l’exposition aux risques des extensions urbaines, des sols, d’indemnisation des sinistres d’ampleur des restrictions interviennent sur l’usage des exceptionnelle, d’aménagement spatial et de sols les plus exposés tandis qu’un dispositif gestion de crise. d’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles est instauré. De façon sous-jacente Par construction, ces dispositions s’apparentent à ces multiples réponses apportées pour éviter à un dispositif hybride mobilisant de nombreux ou limiter les catastrophes, l’urbanisation en acteurs dans une recherche permanente se développant s’est efforcée de réduire sa d’équilibre entre exigence en matière de vulnérabilité aux risques pré-existants sans sécurité et tempérance de la contrainte à faire avoir toujours réussi à anticiper l’émergence de peser sur les populations et activités, pour éviter
Les défis que nous devons relever 23 la paralysie des territoires. Outre les incertitudes au travers des dispositifs existants. Ajouter de inhérentes à cette hybridité, la gestion des nouveaux dispositifs peut régler des problèmes risques est confrontée aux changements particuliers mais accroît également la complexité multiples, rapides et interactifs des contextes de l’ensemble. dans lesquels les territoires évoluent. Ainsi, le changement climatique modifie les aléas Dans une recherche de sécurité globale, il convient naturels en intensité ou fréquence mais aussi par conséquent d’intégrer les risques au sens plus généralement dans leur localisation. large comme une composante à part entière de la gestion et de l’aménagement des territoires. Il ne Du fait de cette complexité, et bien que jouant s’agit plus ici de considérer le risque comme une un rôle essentiel, particulièrement affirmé en contrainte supplémentaire, mais de le concevoir France, la gestion des risques ne fonctionne comme une donnée constitutive de projets de pas comme un bouclier garantissant la sécurité territoire ou d’aménagement, participant parfois globale des territoires. Les risques « percolent » de leur dynamique. Illustration 3 : Habitat palafitte à Chanaz (73).
24 Les défis que nous devons relever Cette approche intégrée est encore peu relative aux PPRT. Rendues obligatoires par répandue car l’idée persiste que la gestion des une circulaire ministérielle permettant des risques relève de la protection que l’État seul possibilités de développement des entreprises doit assurer en contrepartie des contraintes qu’il Seveso et de leur « écosystème » proche, en impose. Ces dernières années des initiatives contrepartie d’une gouvernance collective de ont cependant été prises pour promouvoir des la sécurité, ces structures se sont révélées démarches d’intégration des risques dans les être les embryons de démarches plus larges territoires. Au niveau national, l’appel à projet dépassant le cadre des risques pour proposer « Territoires exposés aux risques » a conduit une gouvernance traitant des aspects de en 2015 à faire travailler des équipes sur des développement économique, d’attractivité, de projets de territoire dont le risque était une mutualisation de services, sur un territoire composante motrice. industriel cohérent qui dépasse bien souvent les abords immédiats des sites Seveso. Quelques années après, force est de constater que la dimension nécessairement conventionnelle Parallèlement aux démarches de niveau national, de la démarche n’a pas abouti à la mise en d’autres initiatives sont prises au sein même des œuvre de ces projets dont l’éclosion n’était pas territoires eux-mêmes pour intégrer le risque, suffisamment mûrie et intégrée aux territoires mais elles sont peu connues au-delà des cercles malgré sa dimension collective. Les Grands d’initiés. Ces initiatives portent souvent sur des Prix d’Aménagement en terrains inondables territoires dont l’identité est étroitement associée constructibles (GPATIC) sont une autre démarche à un risque naturel ou technologique : espaces nationale ayant pour objet, non la conception littoraux, vallées industrielles, territoires forestiers de projets de territoires, mais l’identification de en climat méridional… Il est utile d’identifier ici projets d’aménagement en zones inondables aussi les initiatives prises et d’analyser à chaque ayant pris en compte le risque de façon fois les conditions d’une transmission aux autres convenable voire exemplaire. Le projet Resirisk territoires éventuellement par parangonnage des porté par l’association de collectivités AMARIS a principes mis en œuvre. expérimenté des travaux de résilience des zones d’activité économiques au risque industriel. Dans le contexte des changements rapides et multiples en cours, le défi posé en matière de Sur le même sujet, on peut également citer les résilience des territoires est bien celui d’une associations de gouvernance des plateformes diffusion des pratiques d’intégration des risques industrielles issues de la réglementation dans la gestion et l’aménagement des territoires.
Les défis que nous devons relever 25 DÉFI D : Assurer une prise en charge coordonnée des grands défis Les territoires doivent affronter fréquemment risques dans l’ensemble des champs d’actions des risques de différentes natures combinant des couvrant l’aménagement et la gestion des facteurs globaux et locaux : pics récurrents de territoires, selon une approche transversale pollution de l’air, risque endémique d’inondation, reliant les champs d’activité entre eux. Il est en effets grandissants du changement climatique, effet de plus en plus patent que la limitation des pression (ou déprise) démographique, etc. grands défis nécessite le décloisonnement des Ces défis s’analysent en termes de santé des activités devenues interdépendantes, tant dans populations, de sécurité comme de devenir des leurs effets que dans leurs ressources. territoires, tant individuellement que de façon plus critique encore au travers des interactions C’est à l’international que s’est formalisée pour qu’ils produisent inévitablement : par exemple la première fois une stratégie de résilience un épisode de canicule sévère va enclencher un territoriale, sous l’égide de la Fondation pic aigu de pollution et poser la question d’une Rockfeller. Ainsi, pour aider les villes à établir gestion simultanée des deux phénomènes. des stratégies permettant de faire face aux défis urbains du 21e siècle en prenant en compte Si les mesures réglementaires ou techniques les besoins et l’intérêt des populations, cette de niveau national, européen ou international fondation américaine a mis en place en 2013 sont indispensables pour agir sur les sociétés et un programme « 100 Resilient cities ». Les villes éviter ainsi le développement et la propagation participantes ont été sélectionnées sur la base des phénomènes dommageables de grande d’un dossier établissant leur motivation. Le ampleur, celles-ci ne suffisent pas à les enrayer. programme a apporté aux villes retenues, une Les territoires doivent également s’impliquer expertise en recherche de financements et une pour contenir les effets des perturbations mise en réseau. Il a également pris en charge qu’ils connaissent, dans une préoccupation de financièrement un poste de responsable en sécurité globale. La priorité est de limiter les charge de la résilience au sein de la collectivité. situations de crise qui révèlent une perte de La Fondation Rockfeller a également mis en contrôle momentanée par les gestionnaires des place un réseau dédié au développement des conditions de vie des populations. capacités de résilience des villes asiatiques face aux changements climatiques : Asian Cities Pour anticiper des crises qui traduisent l’acuité Climate Change Resilience Network. Ce réseau des problèmes à traiter, les politiques locales sont ACCCRN a réuni l’Inde, l’Indonésie, le Bangladesh, appelées à instaurer des stratégies de résilience la Thaïlande et le Vietnam formellement sur destinées à piloter une intégration effective des la période 2009-2016.
26 Les défis que nous devons relever En France, la ville de Paris a été pionnière pour Le plan d’actions qui matérialise la stratégie mettre en place une stratégie de résilience. Cette de résilience répond à une finalité d’anticipation stratégie a identifié les grands défis auxquels la des crises. Il traduit ce qu’il est apparu capitale était exposée. Elle a analysé sur le cas collectivement nécessaire pour faire face aux parisien les nouveaux enjeux du 21e siècle, qui grands défis qui ont été identifiés. Les actions appellent des visions et des fonctionnements visent à relier les projets entre eux, à mobiliser très différents de ceux du siècle dernier. Elle des leviers, à mettre en place des mesures a établi qu’une meilleure gouvernance à innovantes à l’interface de champs d’activités l’intérieur de chaque organisation et entre ou au sein même d’un champ d’activités, sans les organisations, constitue le premier levier que cette mesure ne se justifie par cette activité de la résilience. C’est par la mobilisation des elle-même. parties prenantes que des réponses aux grands défis peuvent être apportées, et pas l’inverse. Le défi soulevé ici consiste par conséquent à Par l’action collective, il est en effet possible démultiplier en France les stratégies de résilience à budget constant d’augmenter les bénéfices des territoires et des villes. Comment faire émerger apportés par chaque projet. un processus qui aille dans ce sens ?
28 D E U X IÈME p a r t i e
29 LES CAS PRATIQUES
30 Les cas pratiques DÉFI A : Sécuriser les territoires eu égard aux défaillances des systèmes techniques Cas pratique 1 : La résilience des quartiers d’habitation exposés à des ruptures d’énergie, eau ou approvisionnement par exemple à la suite d’un événement naturel Contexte La rupture de fonctionnement d’une infrastructure technique majeure, qu’elle intervienne pour Les réseaux techniques qu’il s’agisse des une raison ou pour une autre, pose un défi infrastructures de transport, de l’énergie, des à l’opérateur de réseau. Celui-ci doit rétablir dispositifs de communication ou encore de la la situation au plus vite pour les populations logistique d’approvisionnement des grandes et aussi pour les autres opérateurs dont les métropoles se sont multipliés ces dernières réseaux peuvent subir des dysfonctionnements décennies. Ils se sont imbriqués dans les en chaîne (la coupure d’électricité interrompt le territoires au point de créer des entités hybrides fonctionnement des systèmes d’épuration des faites de composantes territoriales et de eaux usées par exemple). composants techniques. Ce défi se pose régulièrement lors des Ces transformations ont d’abord assuré des mises catastrophes naturelles. Lorsque celle-ci sont de en relation des territoires souvent productrices grande ampleur, la défaillance des réseaux ne de richesse. Au fil du temps, elles ont aussi se limite pas aux territoires directement affectés créé des dépendances et interdépendances dès par l’événement naturel. L’étude de vulnérabilité lors que les populations ont organisé leur mode de la boucle nord de la Seine à Gennevilliers6 a de vie non plus en fonction de leur territoire ainsi mis en évidence en cas de crue centennale de résidence mais en fonction des dessertes du fleuve des zones de fragilité électrique non par les réseaux. Les opérateurs se sont eux- inondées et densément peuplées. 6 Institut mêmes employés à sécuriser le fonctionnement d’aménagement des infrastructures techniques en assurant par Ce type de situation susceptible de se produire et d’urbanisme de la région exemple des maillages. – la rupture de fonctionnement d’un réseau d’Île-de-France, essentiel pendant une durée de plusieurs jours, Ludovic Faytre, 2017, Référentiel Aujourd’hui, la densification des usages répondant plusieurs semaines, voire plusieurs mois – national de à des exigences de performance économique soulève la question de la résilience du territoire vulnérabilité aux inondations, et l’omniprésence du numérique permettant la concerné, les acteurs ne pouvant rester inactifs Expérimentation de la boucle nord des gestion centralisée de systèmes à distance du terrain dans l’attente du rétablissement d’une situation Hauts-de-Seine. génèrent de nouvelles formes de vulnérabilité. acceptable pour la population et les usagers.
Les cas pratiques 31 La résilience invite à « tisser » le système urbain aux problèmes rencontrés dans l’attente d’un réta- et territorial aux différentes échelles pour faire blissement de la situation. C’est enfin celle où les en sorte que la rupture d’un élément critique responsables politiques peuvent être interpellés. puisse être absorbée, sans que les fonctions vitales de l’ensemble ne soient affectées. Le Les diagnostics de vulnérabilité comme les maillage des réseaux techniques, de même analyses de résilience sont rarement établies en que leur durcissement, sont pratiqués depuis raisonnant à l’échelle des quartiers d’habitation ou longtemps comme méthode de réduction de des zones d’activités. Pourtant les problématiques la vulnérabilité, Mais le tissage va plus loin, comme les acteurs peuvent différer fortement d’un car il relie entre eux des réseaux distincts, des secteur à l’autre. Certains quartiers nécessiteraient organisations qui s’ignorent habituellement. des mesures d’anticipation des crises, tandis que d’autres pourraient être identifiés comme Cette transversalité rend possible la mobilisation ressources potentielles. de ressources insoupçonnées. Elle est essentielle, car l’on sait que les catastrophes se propagent Le quartier est habituellement abordé au travers dans les failles que crée le cloisonnement. La du prisme du maire. Celui-ci agit par légitimité limitation des risques de rupture en chaîne démocratique, au titre des missions qu’il exerce, nécessite une action collective puissante. en particulier en matière de sécurité civile. Il a la capacité de mobiliser les acteurs publics ou privés aux différentes échelles territoriales. Il L’échelle du quartier et ses acteurs dispose d’une connaissance fine du terrain. Le plan communal de sauvegarde est un outil pratique Pour aborder la question de la résilience du territoire qui permet de mobiliser autour du maire lors à la défaillance des réseaux, l’échelle du quartier d’une crise soudaine. présente un aspect encore novateur. La pratique en cas de crise consiste habituellement à travailler au niveau des systèmes techniques pilotés par les opérateurs et non à l’échelle territoriale. L’échelle du quartier est exigeante et peu documentée. C’est celle où s’exprime concrètement la vulnérabilité du territoire. C’est aussi celle où se mesure l’efficacité des réponses apportées, tant par les acteurs publics que par les opérateurs privés, aux dysfonctionnements qui peuvent affecter la population ou les activités. C’est encore celle où des réponses originales peuvent être identifiées, llustration 4 : Le quartier Hafen-City (Hambourg) a aménagé des itinéraires de en relation avec la société civile, pour pallier substitution à la voirie principale en période d’inondation.
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