Sécurité globale et résilience des territoires - Séminaire à Lyon le s ...

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Sécurité globale et résilience des territoires
Séminaire à Lyon les 17 et 18 janvier 2019

                                                                                                                                Sécurité globale et résilience des territoires - Séminaire à Lyon les 17 et 18 janvier 2019
Le séminaire aura lieu les 17 et 18 janvier 2019 à Lyon sur une durée de un jour et demi dans un format de travail
de 50 participants environ. L’objectif est de croiser les expertises détenues par les collectivités territoriales, les
services de l’État, les universitaires et les acteurs de la sphère privée pour définir la façon résiliente de relever des
grands défis auxquels les territoires et les villes sont aujourd’hui confrontés. Dans une préoccupation de sécurité
globale des territoires, Il s’agit tout à la fois de mobiliser l’ingénierie, d’activer des effets leviers et d’adopter des
approches stratégiques.
Ce séminaire est un construit collectif qui s’inscrit dans la continuité du séminaire « Résilience urbaine et gestion de
crise » de septembre 2016 et du séminaire « Résilience urbaine et sécurité des territoires » d’octobre 2017.
Un partenariat est assuré avec la revue Préventique.

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement - www.cerema.fr
Territoires et ville : 2 rue Antoine Charial - CS 33927 – F-69426 Lyon Cedex 03 – Tél. +33 (0)4 72 74 58 00
Siège social : Cité des mobilités - 25 avenue François Mitterrand - CS 92803 – F-69674 Bron Cedex – Tél. +33 (0)4 72 14 30 30
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Sécurité globale
et résilience des territoires
Ingénierie, effets de levier
et stratégies à promouvoir
Séminaire organisé à Lyon, les 17 et 18 janvier 2019

                         Cerema
                        Territoires et ville
                2, rue Antoine Charial 69003 Lyon
                         www.cerema.fr
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                                                                                   Sommaire

                               Présentation générale                                                    7

                               	Regard scientifique sur la notion de défi                              9

                               	Équipe-projet et collaborations                                        12

             première partie
                               	Les défis que nous devons relever                                      14

		DÉFI A : Sécuriser les territoires eu égard aux défaillances
		des systèmes techniques                                                                               16

  	DÉFI B : La nature comme composante majeure
		de l’aménagement urbain résilient                                                                     19

  DÉFI C : Faire des risques une composante active de la résilience
		des territoires et des infrastructures                                                                22

                               DÉFI D : Assurer une prise en charge coordonnée des grands défis         25

             deuxième partie
                               Les cas pratiques                                                       28

  Cas pratique 1 : La résilience des quartiers d’habitation exposés
		à des ruptures d’énergie, eau ou approvisionnement par exemple
		à la suite d’un événement naturel                                                                     30

                               Cas pratique 2 : La résilience des vallées isolées par un aléa naturel
                                                                                                        33
  Cas pratique 3 : La plantation des arbres en ville.
		Comment aller vers la foresterie urbaine ?                                                            37

                               Cas pratique 4 : Construire avec plus d’eau, jusqu’où et comment ?       41

 Cas pratique 5 : Les territoires à identité industrielle
		                                                                                                      44
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4   Sommaire

		Cas pratique 6 : Les territoires littoraux ;
		le cas de Semarang en Indonésie                                                                               49

                                          Cas pratique 7 : Infrastructures et changement climatique en Europe   52

  Cas pratique 8 : La résilience des métropoles sous l’angle
		de leur approvisionnement dans des conditions viables et sûres                                                55

 Cas pratique 9 : Les métropoles ou grandes agglomérations
		                                                                                                              59

             troisième partie
                                          	Vue de synthèse des défis et des cas pratiques                      62

             Q UATR i è m e p a r t i e
                                          Modalités pratiques                                                  66

 Séquences du séminaire
		                                                                                                              68
 Participants
		                                                                                                              69

                                          Éléments de bibliographie                                            75
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                                                     Présentation générale
Les changements que les territoires doivent            culture partagée et inclusive d’anticipation
affronter sont multiples, rapides et interactifs.      des crises et de résilience.
Ils peuvent être environnementaux comme
le changement climatique, liés à la réforme            Pour enclencher, entretenir et orienter la mise
des organisations politiques et administratives,       en mouvement recherchée, La résilience offre
induits par la modification des pratiques              des possibilités. Elle aide à prendre en compte
économiques et sociales. Pour éviter les               les incertitudes, à anticiper les crises, à traiter
situations de déprise, de tension ou de                les défis que les territoires doivent relever.
désordre, les territoires doivent repenser leur
fonctionnement et leur organisation, mobiliser         Pour appréhender les ressorts de la résilience,
différemment leurs ressources et lever les             afin de prévenir les crises et de limiter leurs
blocages de différentes natures qui peuvent            effets, le Cerema a réuni en octobre 2017 à
faire obstacles aux démarches d’adaptation             Lyon une quarantaine d’experts. Cette rencontre
appelées à se succéder. Pour assurer une               a abouti à la production d’un cadre de référence
dynamique d’ensemble, trouver les marges               des besoins à satisfaire pour activer la résilience.
nécessaires, ces démarches d’adaptation doivent        Des réponses sont à apporter dans les différents
être transversales et partagées par le plus            champs des politiques publiques, de l’appui
grand nombre.                                          aux territoires, de la recherche, de l’ingénierie
                                                       et de la formation.
Affirmée en mai 2018 par le ministère de
la transition écologique et solidaire 1, la            Une nouvelle étape est proposée à la suite de
notion de sécurité globale des territoires vise        ce séminaire : établir des éléments de méthode
à penser « global et collectif » pour traiter          pour relever les défis auxquels les territoires
des problématiques de transports, d’énergie,           sont confrontés. À partir d’une analyse des
d’eau, d’environnement et de logement,                 besoins, d’une identification des matériaux et
d’aménagement, de prévention des risques               des ressources disponibles, les enjeux sont            Les 1res Assises de 1
                                                                                                              la sécurité globale
naturels et technologiques habituellement              aujourd’hui de mobiliser l’ingénierie, d’activer            des territoires
                                                                                                                se sont tenues à
gérées de façon sectorielle. Face aux changements,     des effets leviers, d’adopter des approches                Lyon les 29, 30
les pouvoirs publics doivent développer une            stratégiques.                                            et 31 mai 2018.
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8   Présentation générale

Réunissant une cinquantaine d’experts pour               Le séminaire sera structuré autour de ces défis
débattre d’une dizaine de cas pratiques, le              illustrés par une petite dizaine de cas pratiques
séminaire des 17 et 18 janvier 2019 se propose           prenant des formes multiples et traitant de
de traiter les défis suivants relatifs aux transitions   questions différentes en relation avec les
des territoires :                                        transitions en cours.
– sécuriser les territoires eu égard aux défaillances
des systèmes techniques ;                                Un regard scientifique est porté aux travaux
– faire de la nature une composante majeure de           menés pour s’assurer que la notion de résilience
l’aménagement urbain résilient ;                         est bien intégrée et qu’elle n’est pas mobilisée
– faire des risques une composante active de la          de façon factice. Des éléments de synthèse
résilience des territoires et des infrastructures ;      seront produits de même que des éclairages
– assurer une prise en charge coordonnée des             seront apportés par les experts sur des points
grands défis.                                            spécifiques en relation avec l’ingénierie, les
                                                         effets de levier et les stratégies.
La finalité de la rencontre est de produire des
éléments de méthode utiles à la mise en œuvre
de la résilience des villes et des territoires face
à ces quatre grands défis.
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          Regard scientifique sur la notion de défi
                                                             Par Patrick Pigeon, Professeur d’université

Le terme de défi est peu utilisé dans la littérature   resilience alliance, par exemple à partir des
académique sur les risques et l’environnement. Il      systèmes socio-écologiques et de la panarchie
a été mobilisé en partie par Metzger (2017), qui       (Gunderson & Holling, 2001).
a cherché à plus lier les recherches sur les risques
avec celles qui sont liées à l’environnement. Ce       On peut justifier cette lecture en centrant sur le
serait un moyen de compléter l’approche de             thème de la prévention des désastres (événements
la question des risques par les enjeux. Ils sont       de fréquence rare sur un pas de temps donné
définis comme composantes d’un système de              mais d’intensité de dommages élevée) :
peuplement dont la perte ou l’altération seraient
jugées inacceptables par un ensemble d’acteurs         1. La prévention des désastres est plus que
engagés dans la prévention des risques (D’Ercole       jamais un impératif pour plus de la moitié de
& Metzger, 2009). Le défi serait alors d’éviter le     la population mondiale dans des aires urbaines
plus possible l’endommagement et même la               occupant une superficie limitée de la planète, et
perte de ces enjeux, en attirant particulièrement      dépendant des échanges à échelle mondiale.
l’attention des décideurs sur ces composantes
particulièrement importantes d’un système de           2. Les politiques de prévention existent, et
peuplement.                                            elles sont très nombreuses, dans de multiples
                                                       domaines. Mais elles sont généralement
L’approche peut sembler très abstraite. Elle a         abordées à partir de leurs limites (ce que l’on
pourtant été testée concrètement en lien avec la       voit en premier, ce sont les dommages, ici les
municipalité de Quito, notamment à propos de la        désastres). Les bases de données comme celle
gestion de l’approvisionnement en eau potable,         du CRED ou DESINVENTAR permettent de vérifier
et reprise à El Alto/La Paz (Hardy, 2009).             ceci, encore plus avec une lecture critique
                                                       (Pigeon et Rebotier, 2016).
En fait, sur le fond, cela revient à se poser la
question : comment penser et agir en repoussant        3. On peut alors poser qu’un défi est de repousser
le plus possible les limites de la pensée et de        le plus possible les limites des politiques de
l’action, confrontées aux formes de complexité         prévention des désastres. Les politiques sont
liées aux coévolutions entre systèmes, afin de         nécessaires, mais nécessairement limitées (il
réduire le plus possible les risques ? C’est une       est impossible d’éliminer tout désastre, mais
manière plus simple d’aborder cette question           il est nécessaire et possible de réduire les
que celle développée par les chercheurs de             dommages, donc de prévenir les désastres....).
10   Regard scientifique sur la notion de défi

Identifier particulièrement les enjeux serait un    de système de peuplement (catastrophe) est
moyen d’obtenir un tel résultat, en concentrant     forcément peu souhaité par une très grande
l’action sur ces derniers. Le caractère à la        majorité d’acteurs engagés dans les politiques
fois nécessaire et limité de l’action politique     de prévention. Ils sont attachés à des solutions
est également défendu par Revault d’Allonnes        antérieures impliquant des arbitrages entre
(1999) à partir d’une approche philosophique de     plusieurs autres types de risques, et que reflètent
la question. Toute politique nous lance un défi     les structures fondamentales des systèmes de
qui est celui de sa nécessité et de sa précarité.   peuplements actuels.

4. L’approche serait alors très voisine de          Là encore, ce qui semble très abstrait contribue
celles qui mobilisent la résilience : au sens       à expliquer, par exemple, les refus des politiques
de capacité à absorber les évolutions et les        de retrait stratégique des peuplements littoraux
dommages tout en ne remettant pas en cause          (comme le montrent plusieurs thèses récentes
la structure fondamentale et/ou les tendances       sur ce thème, telle celle de Verlynde, 2018). Les
de fond des peuplements humains. Comment            acteurs impliqués préfèrent le renforcement des
intégrer l’évolution, l’impossibilité d’éliminer    mesures de structures (digues, notamment) alors
tout dommage, et même tout désastre, tout           qu’il est démontré que ces dernières contribuent
en évitant une catastrophe, au sens d’une           parfois à préparer un désastre (Pigeon et
remise en cause fondamentale de structure,          Rebotier, 2016). Le défi est alors d’identifier des
ou d’un système ? Le défi est d’identifier et       politiques centrées sur des enjeux et qui soient
de gérer les enjeux afin d’espérer conserver        acceptables par le plus grand nombre d’acteurs
les structures fondamentales d’un peuplement        impliqués dans la gestion de ce type de risque,
envisagé comme système, sans pour autant            sans remettre en cause les arbitrages antérieurs,
prétendre éliminer tout dommage ni même             multirisques.
tout désastre. Cette lecture a pu être proposée,
sur le fond, à propos de l’interprétation des       L’approche par le défi peut donc attirer l’attention
politiques publiques concernant la commune de       sur la nécessité de penser et d’agir en intégrant un
Pont-de-Claix (Le Noan, 2015).                      monde de plus en plus urbanisé, nécessairement
                                                    complexe et dynamique, multipliant des acteurs
5. Avec ce type d’approche, on tombe sur            agissant volontairement et involontairement
un problème logique majeur, relevé par les          sur l’environnement. Pourtant ces pensées
chercheurs du groupe resilience alliance            et actions sont nécessairement limitées face
(Gunderson & Holling, 2002). En effet, si on        à la reconnaissance croissante de formes de
admet que pour prévenir un désastre, il faut        complexité. Ces évolutions problématiques
reconsidérer la structure fondamentale du           aujourd’hui reconnues par la multiplication des
système de peuplement qui existait avant ce         approches (développement durable, résilience,
désastre, cela exige alors une catastrophe.         nexus, parnarchie, anthropocène.) nous mettent
Or, un changement fondamental de structure          au défi.
Regard scientifique sur la notion de défi     11

Une manière pragmatique de répondre au          Répondre au défi pourrait être d’identifier
défi est présentée par Renaud et alii (2013).   des enjeux sur lesquels pouvoir agir plus
Ils promeuvent l’outil système de gestion de    particulièrement, en explicitant qui, pourquoi et
la connaissance, qui permet de piloter les      comment, de manière effectivement inclusive
politiques de prévention des risques et de      et participative, en espérant réduire le plus
gestion de l’environnement.                     possible les limites de la pensée et de l’action.

                                                Bibliographie : se référer à la fin du document.
12

Équipe-projet et collaborations
L’équipe-projet est constituée de :                  Une collaboration sera mise en place avec la revue
Nicolas Beaurez (Cerema, Territoires et ville),      Préventique représentée par Didier Raciné.
Christian Després (SDSIE), Bernard Guézo (Cerema
Territoires et Ville), Yves Lespinat (DREAL PACA,    Philippe Blancher, consultant en socio-économie
Adjoint Sécurité Défense Zone Sud), Yves Majchrzak   de l’environnement et des risques, assure un
(Cerema, Territoires et ville), Mathieu Maupetit     appui à la qualité technique du projet.
(Cerema Normandie-Centre), Patrick Pigeon
(Université de Savoie), Éliane Propeck-Zimmerman     Elba Lekaj assure un appui à l’organisation.
(Université de Strasbourg), Danielle Sauge-Gadoud
(AMARIS), Karim Selouane (RESALLIENCE (filiale de
SIXENSE Groupe – VINCI Construction)), Ghislaine
Verrhiest-Blanc (DREAL PACA).
Équipe-projet et collaborations         13

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement,
la mobilité et l’aménagement (Cerema)

Service de défense, de sécurité et d’intelligence économique (SDSIE)                                 MINISTÈRE
                                                                                                  DE LA COHÉSION
Ministère de la Transition écologique et solidaire                                               DES TERRITOIRES
                                                                                                 ET DES RELATIONS
                                                                                                     AVEC LES
                                                                                                  COLLECTIVITÉS
                                                                                                  TERRITORIALES

DREAL PACA

Association nationale des collectivités
pour la maîtrise des risques technologiques majeurs (AMARIS)

Université de Savoie Mont-Blanc

Université de Strasbourg

RESALLIENCE (filiale de SIXENSE Groupe – VINCI Construction)

Revue Préventique
14

     pr   e   m   i   è   r   e   p   a   r   t   i   e
15

LES DÉFIS QUE NOUS DEVONS RELEVER
16   Les défis que nous devons relever

                      DÉFI A : Sécuriser les territoires eu égard
                      aux défaillances des systèmes techniques
                      Si « la technique (…) traduit la capacité des        En outre, l’événement a été médiatisé
                      sociétés à se transformer2 », l’omniprésence et      principalement du fait de ses impacts sur un
                      la centralisation des systèmes techniques : eau,     autre système technique : le réseau ferroviaire,
                      assainissement, énergie, fibres, approvisionnement   saturé ce jour-là par les grands départs en
                      dans la vie quotidienne des populations figurent     vacances. Les effets pourtant réels sur les
                      parmi les changements que les sociétés se            populations locales ont été à l’inverse peu
                      doivent d’analyser sous l’angle des risques. Si le   analysés.
                      déploiement des systèmes techniques permet
                      au plus grand nombre de participer à la « société    Au titre de la gestion des territoires, la prise
                      en réseaux » (Castells), les gestionnaires ne        en compte de ce type d’événement ne peut
                      peuvent éluder les questions que soulève la          consister à invoquer leur caractère exceptionnel
                      défaillance possible de ces systèmes toujours        ou inédit. Certes, les retours d’expérience
                      plus informatisés.                                   effectués par les opérateurs après un
                                                                           désastre de ce type permettent en principe
                      L’actualité révèle régulièrement la survenue de      l’adoption de mesures destinées à éviter une
                      désordres majeurs liés au dysfonctionnement          répétition de l’événement à l’identique, mais
                      voire à la rupture accidentelle de systèmes          la généralisation des systèmes techniques
                      techniques. Sans méconnaître le retentissement       expose inévitablement les territoires à
                      produit par l’effondrement meurtrier du              d’autres situations de ruptures de services par
                      viaduc Morandi à Gênes le 13 août 2018,              indisponibilité des réseaux se produisant sous
                      en France l’incendie du poste électrique RTE         de multiples formes et à différents endroits. Dans
                      d’Harcourt survenu à Paris le 27 juillet 2018        de nombreux cas, des travaux de sécurisation
                      est remarquable à plus d’un titre. Plusieurs         des réseaux sont entrepris. Ce peut être lorsque
                      jours durant, la rupture de ce transformateur        les conditions techniques et économiques et
                      a interrompu l’alimentation électrique de la         également de maîtrise d’ouvrage le permettent,
                      gare Montparnasse et privé d’électricité des         la construction de galeries souterraines multi-
                      quartiers d’habitation sur plusieurs communes.       réseaux (cf. illustration). Les réflexions menées
                      Cette rupture a pu résulter de la conjonction        sur les infrastructures vitales ou critiques se
                      de facteurs internes, liés à la structure ou aux     heurtent cependant aujourd’hui à la question
2	Manuel Castells,   modalités d’utilisation du transformateur, et        de la multiplicité des réseaux jouant un rôle
   La société
                      externes puisqu’il est survenu en période de         essentiel dans la vie et l’activité économique
   en réseaux,
   Fayard p.28        chaleur intense et de fortes sollicitations.         des territoires et de leurs interconnexions.
Les défis que nous devons relever            17

Illustration 1 : Galerie souterraine multifonctions à Amsterdam.

L’incendie du transformateur d’Harcourt rappelle                   citadins, la vie des habitants des quartiers
le fait, établi de longue date maintenant3, que le                 affectés, etc.). Il rappelle aussi les liens privilégiés
risque lié aux systèmes techniques recouvre tout                   entre densité, flux et place tenue par les réseaux4.
à la fois l’éventualité de défaillance au sein d’une                                                                                 Ces éléments 3
sphère technique (dans l’événement précité le                      À différentes échelles de territoire, la place des            ont été énoncés
                                                                                                                                   dans l’ouvrage
réseau de transport d’électricité) mais également                  systèmes techniques relatifs au cycle de l’eau,                     de synthèse
les effets en cascade sur d’autres réseaux (pour le                à l’énergie, aux transports et aux modes de                          Risques et
                                                                                                                              réseaux technique,
poste TRE d’Harcourt, le réseau ferroviaire) et aussi              communication est rarement interrogée dans                   Certu, 1998, sous
l’ensemble des relations entre le réseau et leurs                  une analyse globale des risques. Cette analyse                   la direction de
                                                                                                                                Philippe Blancher.
environnements physiques et sociaux (dans le cas                   est cependant nécessaire sous l’angle de la viabilité
                                                                                                                                 Pigeon, Ville et 4
d’Harcourt, peuvent être invoqués les conditions                   des territoires et de leur sécurité globale, les             environnement,
météorologiques, les migrations estivales des                      différents sujets étant étroitement liés.                      Pigeon, 1994.
18   Les défis que nous devons relever

                      La non-durabilité d’un territoire, par exemple        À l’inverse, d’autres territoires souffrent encore
                      en matière de ressource en eau, met en jeu des        d’enclavement économique du fait d’une
                      seuils au-delà desquels des dysfonctionnements        desserte insuffisante en fibres numériques. Pour
                      apparaissent ou s’accentuent avec des possibles       autant, si des initiatives de régulation sont
                      effets en cascade difficiles à maîtriser.             prises, leur diffusion voire leur généralisation
                                                                            prend du temps pour des raisons culturelles et
                      Pour réduire des fragilités environnementales,        sociétales. Ce déficit de prise de conscience et
                      économiques ou sociales, recourir à des systèmes      ensuite d’adaptation se traduit par des situations
                      techniques est souvent nécessaire. C’est le cas       de vulnérabilité excessives des territoires qui
                      de la défense extérieure contre l’incendie (DECI)     peuvent conduire à des dégradations progressives
                      qui mobilise les réseaux d’eau, les voiries pour      des conditions environnementales, sociales et
                      assurer la protection de zones habitées exposées      économiques comme à des expositions à des
                      aux incendies de forêt. Le recours à des réseaux      chocs profondément dommageables.
                      d’échelle supra-territoriale est souvent nécessaire
                      pour fiabiliser un service, mais il implique tant     Si les systèmes techniques sont un atout pour les
                      d’envisager la défaillance de systèmes fortement      territoires, ils sont aussi facteurs de vulnérabilité,
                      centralisés dont la connaissance fine échappe         contrepartie inévitable de leur performance
                      aux territoires que de préserver les ressources       et de leur usage grandissants. Lorsqu’ils sont
                      patrimoniales en secours, en appoint ou en            fortement sollicités, ces systèmes peuvent être
                      possibilités de réutilisations futures. Dans le       exploités à la limite de leur fonctionnement
                      département de l’Isère, lors de la coupure du         nominal. Leur gestion technologique et
                      tunnel du Chambon plusieurs mois durant en            centralisée les fragilise face à la survenue de
                      2015, une route forestière a été aménagée en          perturbations locales qui peuvent se propager
                      voie de secours pour assurer le désenclavement        au sein du système. Le changement climatique
                      de la population.                                     produit un environnement plus agressif vis-à-vis
                                                                            duquel ces systèmes n’ont pas été conçus.
                      Pour sécuriser le fonctionnement des territoires,
                      améliorer leur viabilité, il peut être nécessaire     Lé défi de résilience est le suivant : comment
                      d’ajuster la place des réseaux et systèmes            ajuster la place des réseaux dans le sens de
                      techniques. Des initiatives sont prises en ce sens,   renforcer la sécurité globale des territoires ?
                      parfois de façon radicale. Ainsi, des territoires
                      en déprise économique ont pu engager des
                      démarches volontaristes visant à atteindre
                      l’autonomie énergétique5. Des métropoles
5	C’est le cas de
   la commune         s’impliquent dans la valorisation agricole des
   nouvelle
                      espaces péri-urbains pour réintroduire des circuits
   du Méné
   (Côtes-d’Armor).   courts entre production et consommation.
Les défis que nous devons relever        19

    DÉFI B : La nature comme composante
majeure de l’aménagement urbain résilient
Si les systèmes techniques nécessitent une              excessive des sols. Ainsi, la catastrophe de
attention particulière en matière de sécurité           Nîmes en 1988 a amené à la renaturation des
globale des territoires, la nature est un autre         cadereaux, ces cours d’eau intermittents qui
facteur d’attention dans le contexte d’une              avaient été urbanisés sans précaution.
perturbation des écosystèmes à l’échelle
planétaire. La multiplication par trois de la           De façon récente, une prise de conscience s’est
population mondiale s’est faite sur un laps de          opérée des possibilités offertes par les éléments
temps très court. Cette explosion démographique         naturels eux-mêmes : eau, flore, faune, air et
et ses conséquences en matière d’urbanisation           sols pour préserver l’habitabilité menacée des
des territoires constituent un défi majeur vis-à-       espaces de vie. C’est ainsi que les métropoles
vis des éléments naturels en matière de ponction        et les villes ont investi dans la revalorisation des
des ressources non renouvelables, d’altérations         berges des fleuves et rivières. Parallèlement,
des sols, des eaux et de l’atmosphère. La               une ingénierie écologique s’est développée pour
réalité d’une crise écologique est corroborée par       gérer, préserver ou restaurer les écosystèmes,
des atteintes structurelles à l’environnement :         en s’appuyant sur l’utilisation de moyens et
effondrement de la biodiversité, dérèglement            processus naturels, et en croisant les points de
climatique, épuisement de fleuves traversant            vue écologiques, économiques et sociaux.
de grands territoires, pollution de l’air à grande
échelle, etc.                                           L’ingénierie écologique intervient sur différents
                                                        types d’espaces : agricole, urbain, forestier,
Comment éviter alors localement au moins                aquatique pour corriger des dysfonctionnements.
une dégradation irréversible des conditions             Elle se veut une alternative aux solutions basées
d’habitabilité des espaces de vie ? Contrairement       sur le génie civil. C’est une ingénierie de
à l’idée que l’on se fait habituellement des            la résilience des écosystèmes, définie comme
catastrophes, celles-ci ne correspondent pas            la capacité des écosystèmes à anticiper des
toujours à des événements brutaux. Une                  perturbations majeures, qu’elles soient naturelles
sécheresse prolongée succédant à plusieurs              ou anthropiques. Elle peut même dans certains
années de déficit hydrique peut provoquer un            cas, à l’image de la « phytoremédiation »,
désastre agricole. Anticiper ce type d’événement        contribuer à corriger les dommages causés par
pour en limiter les effets représente un enjeu de       des activités anthropiques. Plus récemment,
résilience pour les territoires. En même temps,         des travaux ont été développés sur les services
des événements brutaux ont régulièrement                rendus par les écosystèmes. Ces travaux visent
révélé la nécessité de remédier à l’artificialisation   à démontrer la place que ceux-ci contribuent
20   Les défis que nous devons relever

à la résilience d’autres systèmes, comme les                          Ces évolutions amorcent une résilience des
systèmes urbains confrontés par exemple à des                         systèmes urbains par la nature elle-même. Le
pics de chaleur, sans qu’il soit envisageable                         Conseil économique, social et environnemental
qu’ils résolvent la totalité du problème.                             (CESE) a publié un avis en juillet 2018 intitulé :
                                                                      « La nature en ville : comment accélérer la
Si l’ingénierie écologique peut contribuer à                          dynamique ? ». Cet avis propose de considérer
régénérer des écosystèmes naturels, les                               la biodiversité avec le même niveau d’attention
écosystèmes naturels peuvent eux-mêmes                                que le changement climatique compte-tenu
contribuer à requalifier des systèmes urbains                         en particulier des enjeux majeurs en matière
éprouvés par le changement climatique ou                              de santé des populations. Il incite ainsi à faire
la perte de biodiversité. Les milieux humides                         des milieux naturels un élément structurant de
sont réhabilités dans leur rôle bénéfique en                          l’aménagement urbain comme à lutter contre
agglomération par leur valeur patrimoniale,                           l’artificialisation des terres. Il invite à organiser
leur richesse écologique, leur rôle de régulation,                    des solidarités ville-campagne.
leurs fonctions sociale et culturelle. La nouvelle
compétence GEMAPI introduite par la loi MAPAM                         L’avis du CESE se lit comme une invitation à
met en regard les ouvrages hydrauliques et                            regagner pas-à-pas des positions en faveur des
l’hydraulique environnementale comme moyen                            milieux naturels pour obtenir des améliorations
de restaurer la place de l’eau comme élément                          au niveau local qui peuvent ensuite peser sur des
naturel dans la gestion des inondations.                              évolutions globales si les efforts sont déployés

Illustration 2 : Saint-Jacques-de-le-Lande (35) a établi une relation forte entre habitat dense et nature.
Les défis que nous devons relever       21

collectivement et à grande échelle. Il s’agit tout   Un défi posé à l’urbaniste et à l’ingénieur
à la fois de s’adapter à des changements pour        est par conséquent celui du déploiement
partie irréversibles : élévation des températures,   effectif de processus de résilience visant à faire
intensification des crises hydrologiques et de       effectivement de la nature une composante
(re)donner à la nature une place centrale comme      essentielle de l’aménagement urbain. La course
facteur d’habitabilité des territoires.              de vitesse engagée pour faire face aux effets
                                                     des perturbations des éléments naturels agit
Les évolutions planétaires des dernières             aujourd’hui en défaveur des agglomérations
années donnent raison à Manuel Castells : si         dont le rythme de transformation est insuffisant.
pendant des millénaires, la nature a dominé la
civilisation, puis plus récemment, la civilisation
a tenté d’effacer la nature, il est devenu vital
de réintroduire la nature comme composante
culturelle essentielle pour l’humanité.
22   Les défis que nous devons relever

DÉFI C : Faire des risques une composante
active de la résilience des territoires
et des infrastructures
Concilier aménagement et risques est ce qui a              nouveaux risques. Au fil des dernières décennies,
permis de longue date le développement des                 la prise en compte des risques dans les territoires
territoires.                                               est devenue complexe. Surtout, nous constatons
                                                           à la fois la possibilité de prévenir les dommages,
Aux 14e et 15e siècles, la valorisation des grandes        mais sans parvenir à éliminer tout dommage, et
plaines exposées aux aléas naturels, sanitaires et         sans éliminer les événements inattendus.
anthropiques est rendue possible par la mise en
œuvre de techniques constructives élémentaires.            Changeant éventuellement de forme et de nature,
Ces techniques de défrichage, de création de               des catastrophes se produisent toujours, ce qui
fossés, de drainage des sols, de construction de           révèle à la fois l’intérêt et les limites des dispositifs
levées, d’édification de remparts, permettaient            préexistants. Dans un contexte sociétal demandant
tout à la fois de bonifier les terrains, de les affecter   toujours plus de sécurité, différentes composantes
à l’agriculture et à l’élevage, et de sécuriser les        ont ainsi été successivement ajoutées pour éviter
lieux habités. À partir du 19e siècle, l’idée s’impose     le plus possible les victimes, réduire les dommages
que le développement conjugué des connaissances            ou faciliter la reprise d’activité. Considérée dans
scientifiques et des techniques peut résoudre les          son ensemble, la gestion des risques recouvre de
questions nouvelles de santé et de sécurité des            ce fait des aspects composites de protection contre
populations que soulèvent l’essor industriel et le         les aléas naturels ou anthropiques (protections
développement des agglomérations.                          hydrauliques, barrières techniques dans les
                                                           établissements industriels dangereux, etc.),
À la fin du 20e siècle, pour répondre à                    d’interdiction ou de réglementation de l’usage
l’exposition aux risques des extensions urbaines,          des sols, d’indemnisation des sinistres d’ampleur
des restrictions interviennent sur l’usage des             exceptionnelle, d’aménagement spatial et de
sols les plus exposés tandis qu’un dispositif              gestion de crise.
d’indemnisation des victimes de catastrophes
naturelles est instauré. De façon sous-jacente             Par construction, ces dispositions s’apparentent
à ces multiples réponses apportées pour éviter             à un dispositif hybride mobilisant de nombreux
ou limiter les catastrophes, l’urbanisation en             acteurs dans une recherche permanente
se développant s’est efforcée de réduire sa                d’équilibre entre exigence en matière de
vulnérabilité aux risques pré-existants sans               sécurité et tempérance de la contrainte à faire
avoir toujours réussi à anticiper l’émergence de           peser sur les populations et activités, pour éviter
Les défis que nous devons relever       23

la paralysie des territoires. Outre les incertitudes   au travers des dispositifs existants. Ajouter de
inhérentes à cette hybridité, la gestion des           nouveaux dispositifs peut régler des problèmes
risques est confrontée aux changements                 particuliers mais accroît également la complexité
multiples, rapides et interactifs des contextes        de l’ensemble.
dans lesquels les territoires évoluent. Ainsi,
le changement climatique modifie les aléas             Dans une recherche de sécurité globale, il convient
naturels en intensité ou fréquence mais aussi          par conséquent d’intégrer les risques au sens
plus généralement dans leur localisation.              large comme une composante à part entière de la
                                                       gestion et de l’aménagement des territoires. Il ne
Du fait de cette complexité, et bien que jouant        s’agit plus ici de considérer le risque comme une
un rôle essentiel, particulièrement affirmé en         contrainte supplémentaire, mais de le concevoir
France, la gestion des risques ne fonctionne           comme une donnée constitutive de projets de
pas comme un bouclier garantissant la sécurité         territoire ou d’aménagement, participant parfois
globale des territoires. Les risques « percolent »     de leur dynamique.

Illustration 3 : Habitat palafitte à Chanaz (73).
24   Les défis que nous devons relever

Cette approche intégrée est encore peu                relative aux PPRT. Rendues obligatoires par
répandue car l’idée persiste que la gestion des       une circulaire ministérielle permettant des
risques relève de la protection que l’État seul       possibilités de développement des entreprises
doit assurer en contrepartie des contraintes qu’il    Seveso et de leur « écosystème » proche, en
impose. Ces dernières années des initiatives          contrepartie d’une gouvernance collective de
ont cependant été prises pour promouvoir des          la sécurité, ces structures se sont révélées
démarches d’intégration des risques dans les          être les embryons de démarches plus larges
territoires. Au niveau national, l’appel à projet     dépassant le cadre des risques pour proposer
« Territoires exposés aux risques » a conduit         une gouvernance traitant des aspects de
en 2015 à faire travailler des équipes sur des        développement économique, d’attractivité, de
projets de territoire dont le risque était une        mutualisation de services, sur un territoire
composante motrice.                                   industriel cohérent qui dépasse bien souvent
                                                      les abords immédiats des sites Seveso.
Quelques années après, force est de constater que
la dimension nécessairement conventionnelle           Parallèlement aux démarches de niveau national,
de la démarche n’a pas abouti à la mise en            d’autres initiatives sont prises au sein même des
œuvre de ces projets dont l’éclosion n’était pas      territoires eux-mêmes pour intégrer le risque,
suffisamment mûrie et intégrée aux territoires        mais elles sont peu connues au-delà des cercles
malgré sa dimension collective. Les Grands            d’initiés. Ces initiatives portent souvent sur des
Prix d’Aménagement en terrains inondables             territoires dont l’identité est étroitement associée
constructibles (GPATIC) sont une autre démarche       à un risque naturel ou technologique : espaces
nationale ayant pour objet, non la conception         littoraux, vallées industrielles, territoires forestiers
de projets de territoires, mais l’identification de   en climat méridional… Il est utile d’identifier ici
projets d’aménagement en zones inondables             aussi les initiatives prises et d’analyser à chaque
ayant pris en compte le risque de façon               fois les conditions d’une transmission aux autres
convenable voire exemplaire. Le projet Resirisk       territoires éventuellement par parangonnage des
porté par l’association de collectivités AMARIS a     principes mis en œuvre.
expérimenté des travaux de résilience des zones
d’activité économiques au risque industriel.          Dans le contexte des changements rapides et
                                                      multiples en cours, le défi posé en matière de
Sur le même sujet, on peut également citer les        résilience des territoires est bien celui d’une
associations de gouvernance des plateformes           diffusion des pratiques d’intégration des risques
industrielles issues de la réglementation             dans la gestion et l’aménagement des territoires.
Les défis que nous devons relever       25

                DÉFI D : Assurer une prise en charge
                         coordonnée des grands défis
Les territoires doivent affronter fréquemment          risques dans l’ensemble des champs d’actions
des risques de différentes natures combinant des       couvrant l’aménagement et la gestion des
facteurs globaux et locaux : pics récurrents de        territoires, selon une approche transversale
pollution de l’air, risque endémique d’inondation,     reliant les champs d’activité entre eux. Il est en
effets grandissants du changement climatique,          effet de plus en plus patent que la limitation des
pression (ou déprise) démographique, etc.              grands défis nécessite le décloisonnement des
Ces défis s’analysent en termes de santé des           activités devenues interdépendantes, tant dans
populations, de sécurité comme de devenir des          leurs effets que dans leurs ressources.
territoires, tant individuellement que de façon
plus critique encore au travers des interactions       C’est à l’international que s’est formalisée pour
qu’ils produisent inévitablement : par exemple         la première fois une stratégie de résilience
un épisode de canicule sévère va enclencher un         territoriale, sous l’égide de la Fondation
pic aigu de pollution et poser la question d’une       Rockfeller. Ainsi, pour aider les villes à établir
gestion simultanée des deux phénomènes.                des stratégies permettant de faire face aux défis
                                                       urbains du 21e siècle en prenant en compte
Si les mesures réglementaires ou techniques            les besoins et l’intérêt des populations, cette
de niveau national, européen ou international          fondation américaine a mis en place en 2013
sont indispensables pour agir sur les sociétés et      un programme « 100 Resilient cities ». Les villes
éviter ainsi le développement et la propagation        participantes ont été sélectionnées sur la base
des phénomènes dommageables de grande                  d’un dossier établissant leur motivation. Le
ampleur, celles-ci ne suffisent pas à les enrayer.     programme a apporté aux villes retenues, une
Les territoires doivent également s’impliquer          expertise en recherche de financements et une
pour contenir les effets des perturbations             mise en réseau. Il a également pris en charge
qu’ils connaissent, dans une préoccupation de          financièrement un poste de responsable en
sécurité globale. La priorité est de limiter les       charge de la résilience au sein de la collectivité.
situations de crise qui révèlent une perte de          La Fondation Rockfeller a également mis en
contrôle momentanée par les gestionnaires des          place un réseau dédié au développement des
conditions de vie des populations.                     capacités de résilience des villes asiatiques face
                                                       aux changements climatiques : Asian Cities
Pour anticiper des crises qui traduisent l’acuité      Climate Change Resilience Network. Ce réseau
des problèmes à traiter, les politiques locales sont   ACCCRN a réuni l’Inde, l’Indonésie, le Bangladesh,
appelées à instaurer des stratégies de résilience      la Thaïlande et le Vietnam formellement sur
destinées à piloter une intégration effective des      la période 2009-2016.
26   Les défis que nous devons relever

En France, la ville de Paris a été pionnière pour    Le plan d’actions qui matérialise la stratégie
mettre en place une stratégie de résilience. Cette   de résilience répond à une finalité d’anticipation
stratégie a identifié les grands défis auxquels la   des crises. Il traduit ce qu’il est apparu
capitale était exposée. Elle a analysé sur le cas    collectivement nécessaire pour faire face aux
parisien les nouveaux enjeux du 21e siècle, qui      grands défis qui ont été identifiés. Les actions
appellent des visions et des fonctionnements         visent à relier les projets entre eux, à mobiliser
très différents de ceux du siècle dernier. Elle      des leviers, à mettre en place des mesures
a établi qu’une meilleure gouvernance à              innovantes à l’interface de champs d’activités
l’intérieur de chaque organisation et entre          ou au sein même d’un champ d’activités, sans
les organisations, constitue le premier levier       que cette mesure ne se justifie par cette activité
de la résilience. C’est par la mobilisation des      elle-même.
parties prenantes que des réponses aux grands
défis peuvent être apportées, et pas l’inverse.      Le défi soulevé ici consiste par conséquent à
Par l’action collective, il est en effet possible    démultiplier en France les stratégies de résilience
à budget constant d’augmenter les bénéfices          des territoires et des villes. Comment faire émerger
apportés par chaque projet.                          un processus qui aille dans ce sens ?
28

 D   E   U   X   IÈME   p   a   r   t   i   e
29

LES CAS PRATIQUES
30   Les cas pratiques

                        DÉFI A : Sécuriser les territoires eu égard
                        aux défaillances des systèmes techniques
                        Cas pratique 1 : La résilience des quartiers d’habitation exposés à des ruptures
                        d’énergie, eau ou approvisionnement par exemple à la suite d’un événement naturel

                        Contexte                                                La rupture de fonctionnement d’une infrastructure
                                                                                technique majeure, qu’elle intervienne pour
                        Les réseaux techniques qu’il s’agisse des               une raison ou pour une autre, pose un défi
                        infrastructures de transport, de l’énergie, des         à l’opérateur de réseau. Celui-ci doit rétablir
                        dispositifs de communication ou encore de la            la situation au plus vite pour les populations
                        logistique d’approvisionnement des grandes              et aussi pour les autres opérateurs dont les
                        métropoles se sont multipliés ces dernières             réseaux peuvent subir des dysfonctionnements
                        décennies. Ils se sont imbriqués dans les               en chaîne (la coupure d’électricité interrompt le
                        territoires au point de créer des entités hybrides      fonctionnement des systèmes d’épuration des
                        faites de composantes territoriales et de               eaux usées par exemple).
                        composants techniques.
                                                                                Ce défi se pose régulièrement lors des
                        Ces transformations ont d’abord assuré des mises        catastrophes naturelles. Lorsque celle-ci sont de
                        en relation des territoires souvent productrices        grande ampleur, la défaillance des réseaux ne
                        de richesse. Au fil du temps, elles ont aussi           se limite pas aux territoires directement affectés
                        créé des dépendances et interdépendances dès            par l’événement naturel. L’étude de vulnérabilité
                        lors que les populations ont organisé leur mode         de la boucle nord de la Seine à Gennevilliers6 a
                        de vie non plus en fonction de leur territoire          ainsi mis en évidence en cas de crue centennale
                        de résidence mais en fonction des dessertes             du fleuve des zones de fragilité électrique non
                        par les réseaux. Les opérateurs se sont eux-            inondées et densément peuplées.
6	Institut
                        mêmes employés à sécuriser le fonctionnement
   d’aménagement        des infrastructures techniques en assurant par          Ce type de situation susceptible de se produire
   et d’urbanisme
   de la région         exemple des maillages.                                  – la rupture de fonctionnement d’un réseau
   d’Île-de-France,                                                             essentiel pendant une durée de plusieurs jours,
   Ludovic Faytre,
   2017, Référentiel    Aujourd’hui, la densification des usages répondant      plusieurs semaines, voire plusieurs mois –
   national de          à des exigences de performance économique               soulève la question de la résilience du territoire
   vulnérabilité
   aux inondations,     et l’omniprésence du numérique permettant la            concerné, les acteurs ne pouvant rester inactifs
   Expérimentation de
   la boucle nord des
                        gestion centralisée de systèmes à distance du terrain   dans l’attente du rétablissement d’une situation
   Hauts-de-Seine.      génèrent de nouvelles formes de vulnérabilité.          acceptable pour la population et les usagers.
Les cas pratiques      31

La résilience invite à « tisser » le système urbain       aux problèmes rencontrés dans l’attente d’un réta-
et territorial aux différentes échelles pour faire        blissement de la situation. C’est enfin celle où les
en sorte que la rupture d’un élément critique             responsables politiques peuvent être interpellés.
puisse être absorbée, sans que les fonctions
vitales de l’ensemble ne soient affectées. Le             Les diagnostics de vulnérabilité comme les
maillage des réseaux techniques, de même                  analyses de résilience sont rarement établies en
que leur durcissement, sont pratiqués depuis              raisonnant à l’échelle des quartiers d’habitation ou
longtemps comme méthode de réduction de                   des zones d’activités. Pourtant les problématiques
la vulnérabilité, Mais le tissage va plus loin,           comme les acteurs peuvent différer fortement d’un
car il relie entre eux des réseaux distincts, des         secteur à l’autre. Certains quartiers nécessiteraient
organisations qui s’ignorent habituellement.              des mesures d’anticipation des crises, tandis
                                                          que d’autres pourraient être identifiés comme
Cette transversalité rend possible la mobilisation        ressources potentielles.
de ressources insoupçonnées. Elle est essentielle,
car l’on sait que les catastrophes se propagent           Le quartier est habituellement abordé au travers
dans les failles que crée le cloisonnement. La            du prisme du maire. Celui-ci agit par légitimité
limitation des risques de rupture en chaîne               démocratique, au titre des missions qu’il exerce,
nécessite une action collective puissante.                en particulier en matière de sécurité civile. Il
                                                          a la capacité de mobiliser les acteurs publics
                                                          ou privés aux différentes échelles territoriales. Il
L’échelle du quartier et ses acteurs                      dispose d’une connaissance fine du terrain. Le plan
                                                          communal de sauvegarde est un outil pratique
Pour aborder la question de la résilience du territoire   qui permet de mobiliser autour du maire lors
à la défaillance des réseaux, l’échelle du quartier       d’une crise soudaine.
présente un aspect encore novateur. La pratique
en cas de crise consiste habituellement à travailler
au niveau des systèmes techniques pilotés par les
opérateurs et non à l’échelle territoriale.

L’échelle du quartier est exigeante et peu
documentée. C’est celle où s’exprime concrètement
la vulnérabilité du territoire. C’est aussi celle où se
mesure l’efficacité des réponses apportées, tant par
les acteurs publics que par les opérateurs privés,
aux dysfonctionnements qui peuvent affecter la
population ou les activités. C’est encore celle où
des réponses originales peuvent être identifiées,         llustration 4 : Le quartier Hafen-City (Hambourg) a aménagé des itinéraires de
en relation avec la société civile, pour pallier          substitution à la voirie principale en période d’inondation.
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