Sur la route du Danube - Emmanuel Ruben - Rivages - Éditions Payot & Rivages
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Retrouvez l’ensemble des parutions des Éditions Payot & Rivages sur payot-rivages.fr Collection dirigée par Émilie Colombani © Éditions Payot & Rivages, Paris, 2019 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 6 11/01/2019 08:10:07
À Benjamin « L’acqua che tocchi de’ fiumi è l’ultima di quella que andò e la prima di quella che viene. Cosí il tempo presente. » Léonard de Vinci « Si le destin me permettait de passer ma vie à ma guise, je choisirais à la passer le cul sur la selle. » Michel de Montaigne « Open your eyes, Look up to the skies and see, I’m just a poor boy, I need no sympathy, Because I’m easy come, easy go Little high, little low Any way the wind blows doesn’t really matter to me. » Freddie Mercury SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 7 11/01/2019 08:10:07
RÉP. POLOG ALLEMAGNE TCHÈQUE STRASBOURG Ulm Neubourg Bad NCE Gögging Günzburg Passau Krems SLOVAQUIE Donaueschingen FRA Sigmaringen Inn Fribourg Geisingen Linz BRATISLAVA Ybbs VIENNE VADUZ AUTRICHE Györ Esztergom BUDAPEST T SUISSE HON NGRIE LJUBLJANA Baja SLOVÉNIE ZAGREB Zmajevac ITALIE Novi CROATIE Sad Vukovar BOSNIE- HERZÉGOVINE BELGRA ADE Smederevo MER SARAJEVO LIGURIENNE SERB MER ADRIATIQUE MONTÉNÉGRO 100 km PODGORICA SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 8 11/01/2019 08:10:08
POLOGNE AQUIE UKRAINE MOLDAVIE BUDAPEST T CHISINAU ODESSA HON NGRIE Kurortne aja ROUMANIE S Vilkovo ir Galaţi Izmaïl MER et Sulina Novi NOIRE Sad Daeni Tekija BUCAREST Frontières étatiques BELGRA ADE Smederevo Vinci Olteniţa Ion Corvin CAPITALES Negotin Vidin Roussé Itinéraire SERBIE Kozlodouy Villes-étapes Baykal Svichtov Cours principal du Danube rava BULGARIE Réseau hydrographique secondaire Mo TÉNÉGRO Limites du bassin versant SOFIA RICA SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 9 11/01/2019 08:10:09
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Prologue Quitter Paris Le plus dur, c’est de trouver le bon rythme, disait Vlad, si tu ne trouves pas d’emblée ton propre rythme, c’est fichu, tu chopes un point de côté, tu te mets dans le rouge, il faut savoir doser, ne pas se griller d’avance, mou- liner sans forcer, en garder sous la pédale comme on dit – j’écris sous sa dictée, j’essaie de retrouver le tempo de son phrasé, le grain de sa voix, le tranchant de son accent, sa façon si particulière de rouler les R, il m’avait dit ça, une nuit, à Paris, alors que nous avions les flics aux trousses, je le revois pédalant à mes côtés, haletant à mes côtés, je revois sa manière unique de tenir son guidon, d’empoi- gner le taureau par les cornes, mains fermement agrippées aux cocottes de frein, dos cambré, buste jeté en avant, cou rentré dans les épaules, j’aurais pu le reconnaître de loin, il nous arrivait de nous croiser par hasard du temps où il vivait dans un squat à Pantin et moi dans un ancien bordel au métro Danube – un jour, je m’en souviens, 11 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 11 11/01/2019 08:10:09
c’était en avril, un des premiers soirs qui voient s’égayer la ville, je sors d’un bar un peu éméché, je vais décrocher mon vélo, j’aperçois un type avec un catogan qui dode- line des épaules en grimpant la rue de Ménilmontant, je me dis ça doit être lui, c’est bien son style à lui, chaque cycliste a un style qui n’appartient qu’à lui, j’enfourche ma monture, je me dresse sur mes étriers, j’attaque la pente en danseuse, lui est déjà loin, loin, loin – je le vois filer comme si les feux, les néons, les enseignes, les réver- bères, toutes les lumières de la capitale le halaient vers le ciel aimanté ; sous son barda de coursier, sa veste noire flotte dans son dos, une vraie cape de corsaire, et lors- qu’il dévale les rues de Belleville on entend claquer les pans de sa veste, flap flap flap, petites ailes de corbeau ivre de traverser la ville ainsi, sur le fil de fer de son seul désir – tout est une question de rythme, disait Vlad, pas seulement de souffle mais de tempo, pas tant de vitesse mais de pulsation, les cuisses et les poumons ne suffisent pas : ce qui compte, c’est le cœur ; les jambes on s’en fout, elles suivront bien, les jambes, et si la cadence va trop vite ou si le développement est trop grand, il y a un dérail- leur pour ça, un coup de pouce et tu changes de braquet – en revanche, le cœur, lui, s’il s’emballe, c’est terminé, tu vois rouge, le sang te monte à la gorge, tu as l’impres- sion qu’on t’enfonce une dague en travers de la gueule, tu as ce goût de fer sur la langue et tu peux t’arrêter net, y rester, j’ai vu un type foudroyé comme ça, c’était dans les Vosges, en VTT, le type a attaqué un raidard un peu fort, sur la plaque, et il a claqué – quarante ans, trois enfants –, depuis ce jour-là, j’ai raccroché mon VTT, l’effort est trop bref et trop violent ; moi, c’est l’endurance que j’aime, 12 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 12 11/01/2019 08:10:09
l’endurance et la vitesse dans le soleil et le vent, les longues distances à toute allure le long des fleuves, des rivières et des canaux de France et d ’Europe, les VTT sont trop lour- dauds, suspensions, freins à disque, pneus de tracteur à labourer le bitume et tout le tralala ; moi, j’ai besoin de mon vélo pour voyager, pour m’évader, pour m’échapper – surtout, tu dois te concentrer dans ta course, apprendre à surveiller ton pouls, écouter les battements de ton cœur, reconnaître les systoles et les diastoles, tu dois savoir quand tu dépasses les bornes, quand tu risques la crampe mais aussi quand tu n’es pas dans le coup, quand tu ne peux rien de bon, quand tu es vidé – enfin, tu dois tou- jours être sur le qui-vive, attentif au moindre bruit, sans cesse aux aguets, tout ne tient qu’à un fil, le moindre moment d’inattention, le moindre geste de travers et tu es foutu, une bagnole déboule sur la droite, un piéton se jette sous tes roues, le danger te guette à tous les coins de rue, tu dois savoir anticiper, rétropédaler, accélérer, décélérer, doser les freinages et les à-coups, il faut viser la fluidité ; sur ta selle, tu dois couler de source, ta trajectoire doit être aussi déterminée que le tracé d’un torrent, aussi souple que celui d’une rivière, pas plus que l’eau qui s’écoule dans la plaine, tu ne dois sentir l’effort qui s’imprime dans tes veines, tu dois avoir l’impression de nager, glisser, dériver comme dans un rêve – sous la gomme de tes pneus ou de tes boyaux, l’asphalte doit se liquéfier, les pavés doivent te soulever, milliers de vaguelettes givrées, et sur l’étrave de ces pavés tu dois te sentir voguer – tant que tu pédales, tu dois te sentir léger comme une plume, au bord de la lévi- tation, tu dois être toujours prêt à saisir la balle au bond, à relancer la machine, dès que tu te cales un peu trop bien 13 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 13 11/01/2019 08:10:09
sur ta selle, dès que tu te poses tranquille pépère sur ton derrière, tu prends le risque de te faire choper – si les flics déboulent et te prennent en chasse, ne leur laisse aucun répit, saute de trottoir en trottoir, engouffre-toi dans les ruelles les plus étroites, traverse les passages les plus péril- leux, prends les virages à la corde, assure tes dérapages, évite les avenues trop larges et les grands boulevards, il n’y a jamais de ligne droite à vélo, le cyclisme comme l’écriture n’est qu’une série de méandres, pense à varier les vitesses, improvise ton itinéraire, serpente sur la chaussée – les flics à vélo sont de vieux crocos, si tu te mets à zigzaguer, ils zigzaguent aussi dans ton sillage, pur réflexe de leur part, et n’oublie pas qu’ils ont la trouille au ventre, la trouille de faire une connerie, la trouille de se viander, la trouille des chicanes et des pavés, la trouille d’échouer, de ne pas aller jusqu’au bout de leur mission, de rentrer bredouille au bercail : la peur, tu ne dois pas la fuir ni la dompter, tu dois l’apprivoiser pas à pas ; l’adrénaline est ta drogue, sans elle tu n’es rien, tu ne vaux rien – si tu trouves le bon rythme, disait Vlad, tu deviens invisible, insaisissable, rien ne peut t’arrêter, une sorte de transe intérieure te gagne, tu peux continuer sur cette lancée des heures et des heures, parcourir des dizaines de bornes sans t’en rendre compte, la route se déroulera d’elle-même sous tes pneus ou tes boyaux, torrent d’images ou film en avance rapide – Paris très vite ne sera plus qu’un lointain souvenir, tu sentiras la ville s’effacer derrière toi – adieu bagnoles, adieu scoo- ters, trottoirs sales, odeur de pisse, platanes lépreux, adieu sirène des ambulances et des pompiers – si les flics sont à tes trousses, à la vue du périph’ tu pourras souffler, tu les auras semés, les flics à vélo s’aventurent rarement au-delà 14 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 14 11/01/2019 08:10:09
du périph’ – en passant dessous, tu pourras te dire que tu l’as échappé belle, l’Est commencera là-bas, tu seras déjà sur le boulevard de l’Europe, sur la route du Danube, sur la route du vrai Danube, pas la station de métro mais le fleuve… SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 15 11/01/2019 08:10:09
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I Balkaniques Été SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 17 11/01/2019 08:10:09
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1 Une odyssée qui commence à Odessa Odessa (Ukraine), 25 juin À l’aéroport d’Odessa, seul un militaire armé d’une dague et d’un revolver nous rappelle que nous avons atterri dans un pays en guerre. Je le toise de la tête aux pieds. C’est la deuxième fois que je reviens en Ukraine depuis l’Euromaïdan et chaque fois je me demande com- ment cette armée de soldats mal fagotés, équipés à la va-comme-je-te-pousse, pourra se défendre contre la Russie de Poutine, la troisième puissance militaire du monde. Tous les hommes croisés dans le hall de l’aéroport me demandent si j’ai besoin d’un taxi, alors je désigne la grande boîte en carton que je traîne derrière moi et je dis : – Velosiped ! – Quoi, un Français venu jusqu’ici avec une bicyclette en pièces détachées ? 19 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 19 11/01/2019 08:10:09
– Mais pour aller où ? Jusqu’à Vladivostok ou jusqu’à Sakhaline ? – Jusqu’à Strasbourg, messieurs. – Vous avez à peine foutu les pieds ici que vous rebroussez chemin ? Tous ces efforts pour rentrer au bercail ? – Non, tous ces efforts pour remonter le Danube, mes- sieurs. – Vous allez rouler à contresens de Napoléon, d’Hitler et de l’expansion européenne, mon pauvre ami ! Et vous avez bien raison quand on pense comment toutes ces aventures ont terminé : la bérézina vous pend au nez ! Oui, c’est pour traverser l’Europe à rebrousse-poil que nous avons débarqué dans cet ancien port russe puis sovié- tique, aux avenues tracées au cordeau par un Français, et qui n’a d’ukrainien que la langue écrite, celle qui se lit partout mais ne s’entend nulle part, tout le monde parlant, bien sûr, le russe. Oui, nous sommes venus remonter les flots danubiens, tels des Argonautes des temps modernes, des bouches de la mer Noire aux sources de la Forêt- Noire. Pour pédaler à contre-courant des vents dominants et de la plupart de nos congénères. Avec pour horizon un rêve d’enfance enfoui parmi les neiges et les épicéas du Wurtemberg. Mais pour l’instant : chut ! pas question de dévoiler ce qui nous attire là-bas car dans un roman d’arpentage, où l’on devine déjà le début et la fin de l’his- toire, il faut bien ménager un peu de suspens. Vlad m’attend sur le parvis de l’aéroport. Il a oublié sa pompe en descendant le Dniepr et n’a pas pu regonfler ses pneus. En une demi-heure et quelques tours de clé Allen, nous assemblons nos bécanes comme de grands legos en aluminium alors que la nuit tombe, implacable, sur 20 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 20 11/01/2019 08:10:09
la banlieue d’Odessa. Puis nous testons les phares – nos seules balises Argos pour ne pas finir dans la rubrique chiens écrasés d’un canard local. Nous avons à peine quitté le boulevard principal, nous avons à peine enfoncé la poussière de Bessarabie que les premiers chiens errants surgissent de l’obscurité et nous prennent en chasse ; yeux brillants dans la nuit noire de la mer Noire, babines écu- mantes de rage, ils jaillissent de toutes les impasses, de tous les côtés, de tous les fossés, et pas une âme pour les maîtriser, personne pour les rappeler à l’ordre ; la banlieue d’Odessa dort, tranquille, sans soupir, à poings fermés ; alors, oubliant tout l’arsenal anticanin que j’ai embarqué à bord, je n’obéis qu’à ce seul réflexe : changer de braquet, mettre la plaque, comme on dit, décamper le plus vite pos- sible, prendre mes pédales à mon guidon. Et si c’était pour dompter ma peur des chiens errants que j’ai entrepris cette odyssée à travers l’Europe ? Parlez à tous les cyclistes du monde, demandez-leur quelle est leur plus grande crainte : les lacets de l’Alpe d’Huez ou les épingles du Galibier ? Les pavés de l’enfer du Nord ou les pierres qui volent au sommet du mont Ventoux les jours de grand vent ? Le brouillard, le froid, la neige, la canicule ou les furoncles qui coûtèrent à Laurent Fignon, en juillet 1989, sa victoire sur les Champs-Élysées ? Interrogez-les sur leurs plus grandes frayeurs, les cyclistes. Tous vous répondront : Non, ce que nous craignons le plus ce sont les chiens errants, les chiens errants du Pérou, que je revois lancés à nos trousses dans la descente du volcan Misti vers la ville d’Arequipa, les chiens errants de Palestine et de Russie, les chiens errants de Novi Sad qui me prirent en sandwich, entre une base militaire et un 21 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 21 11/01/2019 08:10:09
campement tzigane, une nuit d’été où je revenais d’une fête au bord du Danube ! J’ignore d’où me vient la frousse des chiens errants. Du plus profond de l’enfance, sans doute. Et pourtant, je n’ai jamais été mordu. J’ai donc embarqué tout l’armement indispensable contre ces satanées bestioles : un sifflet ordinaire pour prévenir les bergers, un sifflet de rappel émettant des ultrasons, une bombe à air comprimé censée produire un chuintement dissuasif. J’aurais bien tri- mballé une grenade lacrymogène ou une bombe au poivre vendue généralement contre les violeurs potentiels mais ce sont des articles interdits en soute comme en cabine. Et je me suis dit qu’au pire j’achèterais sur la plage d’Odessa un pistolet à eau qu’il suffira de dégainer au moment idoine pour asperger l’assaillant quadrupède. Nous voilà en piste. Nous entrons dans l’échiquier odes- site, un tramway trottine cahin-caha sur ses rails rouillés malgré l’heure tardive, le double fuseau jaune sale de ses feux braqués vers nous, il hoquette tel un ivrogne avec ses deux ou trois passagers à bord et nous frôle de près ; quand on examine un peu l’état des rails et des éclisses, on se demande comment il ne verse pas toute sa cargaison sur le pavé au premier virage venu ; Vlad et moi, nous regar- dons les enseignes délabrées, les maisons abandonnées, les balcons de guingois, les volets écaillés pendouillant dans le vide : ça nous manquait, le déglingué. Puis vient l’autre élé- ment qui nous manquait tout autant : les coupoles dorées des églises qui scintillent sous la pluie d’or du ciel urbain. Et les odeurs de moisissure qui se révèlent avec la nuit : toute cette Europe que j’aime, c’est comme si je ne voulais plus quitter la cave des ancêtres. Enfin, se mêlant à cette odeur d’antan, il y a le parfum des platanes, des tilleuls et 22 SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 22 11/01/2019 08:10:09
des marronniers – tous ces arbres aux troncs massifs, aux frondaisons touffues, que l’on ne taille pas comme chez nous tous les mercredis car il faut bien cacher la misère. Sans oublier l’herbe qui pousse partout, l’herbe et la mousse qui reconquièrent la ville, lentement, tranquille- ment, certaines de venir un jour à bout de nos conneries. Après avoir vécu deux ans en Serbie, après avoir traîné vos guêtres dans tous les anciens pays de l’Est, la France, et plus particulièrement Paris – à l’exception de Belleville et de quelques quartiers dont j’ai oublié le nom –, vous fait l’effet d’une immense maison de retraite dépourvue de clim : tout y est trop clean, on a juste oublié le ventilo, alors les vieux crèvent dès qu’il fait trop chaud. C’est pour ça que j’aime tant revenir ici, dans le bardak de l’Europe du Levant – les vieux aussi crèvent, et bien plus tôt que chez nous, pourtant on n’a pas oublié la clim, la clim est partout, sans quoi personne ne survivrait l’été, non, si les vieux crèvent, c’est juste qu’ils sont trop pauvres, que leur retraite ne vaut pas un clou, alors comme ils savent perti- nemment que le monde entier les a oubliés, ils boivent. Les vieux boivent et les jeunes s’en vont, nous dit Anastasia que nous rencontrons dans le hall de l’hôtel Calypso – cheveux bruns et soyeux, pantalon de lin blanc, grandes lunettes noires et sourire de banquise, Anastasia, qui vient d’une famille bulgare, a des airs de Nana Mouskouri, paraît trente ans mais n’en a pas vingt, et je sens déjà qu’elle nous fait tourner la tête : toute la soirée, Vlad ne lâche pas des yeux ses fesses de déesse aurigna- cienne et lui propose de nous retrouver demain en haut des plus beaux escaliers du monde. SUR-ROUTE-DANUBE_cs6_pc.indd 23 11/01/2019 08:10:09
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