VADEMECUM HISTOIRE ET GEOGRAPHIE - au collège (Eduscol)
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VADEMECUM HISTOIRE ET GEOGRAPHIE au collège (Eduscol) I.Les programmes d'histoire-géographie-éducation civique et le socle commun 1. Introduction Les programmes d'histoire-géographie et d'éducation civique sont organisés autour de connaissances et de capacités. Le travail sur ces savoirs et capacités relève des apprentissages quotidiens de la classe et permet, avec les outils didactiques de nos disciplines, de construire progressivement les compétences du socle commun. Cela suppose une juste appréciation de ce que sont les capacités travaillées avec les élèves : le socle commun ne se réduit pas à une somme de savoirs ou de gestes techniques mais il se fonde sur des apprentissages d'ordre intellectuel, qui seuls permettent l'acquisition de savoirs dans la durée et la construction d'une pensée autonome. Le document que nous vous proposons recense les capacités attendues des élèves au terme des quatre années passées au collège. Elles donnent des indications afin de faire travailler les élèves par compétences. Ces dernières sont largement travaillées au cours du cycle 3 de l’école élémentaire comme le rappelle les BO de 2008 et 2012 : « L’enseignement de la géographie permet des approches interdisciplinaires (…) pour participer à la maîtrise des capacités transversales. » BO du 5 janvier 2012. Ce document est un résumé du vade-mecum destiné aux enseignements de la géographie au collège. 2. L'approche par compétences associe des savoirs et des capacités Pour chaque niveau, les programmes identifient les connaissances constitutives d'une culture commune. Les capacités, elles, sont communes et font l'objet d'un apprentissage régulier et progressif. On entend par « capacités » des modes opératoires d'ordre intellectuel et/ou pratique qui permettent à un élève, guidé par son professeur ou en autonomie, de construire, d'assimiler, de mobiliser des connaissances et d'exercer sa réflexion. Certaines de ces capacités sont constitutives de nos disciplines (localiser, situer dans le temps ou dans l'espace, lire et utiliser un langage cartographique, élaborer un récit historique, former et exercer son esprit critique) ; d'autres renvoient à des termes que nous partageons avec d'autres champs disciplinaires et qui sont nécessaires à tout processus d'apprentissage (maîtriser la langue à l'écrit et à l'oral pour communiquer efficacement, décrire, caractériser, identifier, reconnaître, expliquer). Toute situation d'enseignement associe obligatoirement plusieurs de ces capacités ; elles s'utilisent selon des objectifs d'apprentissage précis et supposent des attendus bien définis : on n'explique pas de la même façon en histoire, géographie, éducation civique qu'en mathématiques par exemple. Les capacités restent cependant souvent implicites. Enseigner par compétences suppose que l'on accompagne l'élève dans son apprentissage, donc que l'on soit capable d'énoncer explicitement les étapes qu'il doit franchir pour maîtriser les capacités travaillées ainsi que la manière dont il doit procéder. Dans nos disciplines, l'essentiel des tâches demandées à un élève relèvent à la fois d'un savoir-faire d'ordre pratique et d'un raisonnement, ce que l'on appelle parfois des «tâches complexes». Pour former correctement les élèves, l'explicitation, la régularité et la progressivité du travail sur les capacités sont les conditions nécessaires de l'efficacité du professeur. Le travail sur le socle oblige donc à sortir de l'implicite, à expliciter ce qui compose tout projet de cours : les objectifs d'apprentissage, les démarches mises en œuvre par le professeur, le mode de travail des élèves. Des capacités communes existent entre les disciplines, des ponts sont non seulement possibles et fructueux mais qu'il est aussi essentiel de tisser entre elles des liens qui enrichiront la perception qu'un élève peut avoir du savoir que l'on cherche à lui transmettre. La mise en oeuvre du socle commun suppose de donner un sens partagé aux mots qui désignent chacune des capacités : qu'entend-t-on par « expliquer » ? Comment définir et travailler « l'esprit critique » auquel nos disciplines doivent former les élèves ? Que met-on exactement derrière l'opération qui consiste à « caractériser » un fait ou une situation ?... Dans les capacités, plusieurs termes largement utilisés dans différentes disciplines recouvrent des opérations essentielles pour que le travail de l'élève prenne tout son sens. Quelques exemples :
« Identifier », c'est donner une identité, c'est-à-dire nommer correctement, mais aussi reconnaître une identité déjà connue ou observée (par exemple un personnage, une oeuvre, un monument, un type de paysage) ; « Reconnaître » est donc une des formes du travail d'identification. « Caractériser », c'est donner les caractéristiques, définir, expliquer les principaux traits (par exemple un courant politique ou artistique, un phénomène géographique, une situation historique), en utilisant ses mots mais en mobilisant aussi le vocabulaire adéquat. Caractériser est donc une opération intellectuelle de premier ordre, qui suppose, chez l'élève, la compréhension, la hiérarchisation des caractères, pour aller à l'essentiel, et le recours à une expression adaptée. Avec « Distinguer », on entre dans le champ de la confrontation, de la comparaison ; cette capacité suppose reconnaissance (à partir de caractéristiques) et différenciation (par exemple des espaces, des courants artistiques, des régimes politiques, des activités économiques…). Mieux cerner le sens de chaque capacité permet d'identifier ce que l'on doit attendre des élèves, donc ce à quoi il est nécessaire de les former. La clarification de ces attendus est au coeur du projet du vade-mecum des capacités réalisé en histoire-géographie-éducation civique. 3. L'approche par compétences est un projet pédagogique qui articule un travail sur les apprentissages (connaissances et capacités) et une méthode d'évaluation L'approche par compétences : • s'applique dans le quotidien de la classe et non pas à des moments exceptionnels qui seraient autant d'« îlots » didactiques ; • s’inscrit dans un projet de formation sur la durée, de l’école primaire au lycée ; ce qui signifie que l’apprentissage ne débute pas en 6ème . • oblige le professeur à prêter attention tout autant à la formation intellectuelle des élèves (par le travail sur les capacités) qu'à l'acquisition de connaissances. • nécessite que chacun s'interroge sur les processus intellectuels en jeu ainsi que sur les situations pédagogiques les plus favorables à leur acquisition durable ; • ne se conçoit pas comme une suite d'exercices « méthodologiques » portant sur des savoir- faire pratiques mais vise à faire saisir à l'élève le sens des situations qu'il étudie en le formant aux démarches intellectuelles inhérentes à l'histoire, la géographie et l'éducation civique ; • dote les élèves des « savoir-faire » et des « savoir-penser » indispensables à la construction progressive de leur jugement, de leur autonomie et nécessaires à la poursuite de leurs études • invite chaque professeur à inscrire son travail de l'année dans une progressivité des apprentissages qui permette à l'élève de construire des capacités de la 6ème à la 3ème, par l'entraînement régulier et par l'accroissement mesuré et adapté des exigences ; • suppose que le professeur accorde aux élèves un temps suffisant, avant de valider un état de maîtrise. Il importe de rappeler qu'« évaluation » et « validation » ne se confondent pas : Toute évaluation est un moment dans la formation alors qu'une validation clôt cette formation en attestant d'un degré de maîtrise. On distingue donc l'évaluation (qui participe du processus d'apprentissage) de la validation (qui atteste que le niveau de maîtrise attendu est atteint), qui n'intervient qu'au terme du cycle d'étude. II. Porter un regard critique / Exercer un jugement en histoire géographie-éducation civique Que l'on parle de « formation de l'élève à l'esprit critique » ou de « construction d'un jugement », l'exercice d'un regard critique est au coeur de l’enseignement de l’histoire, de la géographie et de l’éducation civique ; il s’agit même de l’une des finalités majeures de ces enseignements1. Cette capacité relève d'habitudes de questionnement des faits que le professeur exerce sur l'ensemble des sujets qu'il aborde en classe et auxquelles il forme progressivement les élèves. 1. Porter un regard critique : une exigence fondée sur des valeurs démocratiques Notre régime politique et ses principes constituent non seulement le cadre de l’école mais ils définissent ses missions mêmes. Les valeurs républicaines, fondatrices de notre démocratie, telles que la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité, le refus de toutes les discriminations, la mixité, l’égalité entre hommes et femmes, ne sont pas négociables. Les enseignants sont porteurs de ces valeurs qui fondent leur éthique professionnelle et qu’ils doivent faire comprendre et partager. 2. Porter un regard critique : une capacité transversale, une démarche spécifique La formation de l'élève à l’esprit critique relève tout à la fois :
d’une approche circonspecte et rigoureuse du document, qui doit être identifié, replacé dans son contexte de production et d'usage, passé au crible de l'analyse sur le sens qu'il a et sur sa portée (les apports qu'il permet au sujet étudié mais aussi ses limites). Si tout support d'information à vocation pédagogique peut être considéré comme un « document », les documents-sources doivent être distingués des autres documents ; d’une mise à distance des faits ou des situations étudiés, en les inscrivant dans un processus de justification, de vérification ou de comparaison. Elle s’opère par la mise en relation avec des connaissances acquises ; d'une approche raisonnée des témoignages, des points de vue, des opinions ; d’une exigence de justification, d’argumentation de ses propres affirmations ; une attitude de questionnement du réel : interroger les documents, proposer des hypothèses d'analyse et d'interprétation des situations étudiées. Ces démarches doivent devenir des habitudes intellectuelles. Porter un regard critique constitue donc à la fois une capacité et une attitude : capacité à aborder un document ou une source avec rigueur, attitude de mise à distance de l’information, des points de vue et de questionnement. Cette capacité intervient aussi de manière transversale dans l’enseignement de l’histoire des arts (cf. le domaine « Faire preuve de sensibilité, d’esprit critique, de curiosité » de la compétence 5 Culture humaniste au palier 3) qui implique plusieurs disciplines : français, arts plastiques, éducation musicale en particulier. L’esprit critique comporte donc une dimension artistique (approche sensible et intellectuelle de l’œuvre, jugement de valeur). Porter un regard critique comporte aussi des spécificités disciplinaires. En histoire, la critique du document est centrale : elle permet d'identifier la source, de prendre en compte l'intention des acteurs, de travailler sur ce qui est explicite mais aussi sur l'implicite. Elle oblige également à développer un raisonnement au service de la complexité et de la nuance (causalité avec plusieurs facteurs) dans l’idée d’établir un récit des faits du passé. En géographie, l’esprit critique amène à croiser des enjeux, des acteurs, des tensions, à montrer que les arbitrages changent selon les époques et les sociétés, que les choix de développement et les aménagements ne sont ni définitifs ni uniques. Il est mobilisé dans la dimension prospective assignée à la géographie : tel ou tel aménagement est-il durable ? Permettra-t-il de répondre aux besoins de la société en 2030 ? Comme en histoire, ce sens critique amène à porter attention aux acteurs, aux points de vue mais aussi à porter un regard distancié sur les documents et sur leur construction (pour la représentation de l’espace, par exemple par des cartes). En éducation civique, il s’agit fondamentalement d’aller au-delà de son opinion de confronter situation, loi et principes ou valeurs pour construire une argumentation. Cet enseignement repose sur des textes de lois, de la constitution, de déclarations de principes. Ils servent de point d’appui pour mettre à distance un fait, un cas et nourrissent l’argumentation. 3. Porter un regard critique : un apprentissage progressif C’est une capacité essentielle, car constitutive du sens même de l'enseignement de l'histoire et de la géographie, que l'on commence à travailler avec un niveau d'attente adapté à l'âge des élèves. La pratique quotidienne de la classe permet de construire cette capacité selon trois modalités essentielles : le travail d'analyse de documents, la construction d'une faculté de jugement dans le cadre de l'approche de la vie civique, la maîtrise de l’expression écrite et orale, indispensable à l'argumentation et constitutive de l'aptitude à communiquer une pensée. L’usage des outils et des ressources numériques contribue également à l’apprentissage de ce regard critique. Un item de la compétence 4 (la maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication) vise précisément son acquisition : « faire preuve d’esprit critique face à l’information et à son traitement ». III. Décrire en histoire-géographie Décrire : « Représenter dans son ensemble, par écrit ou oralement » (Petit Robert, 2007). Il s’agit d’une capacité transversale, utilisée aussi bien en lettres qu’en sciences mais dont l’usage en histoire et en géographie mobilise des démarches spécifiques. 1. Décrire, une capacité qui met l'observation au service d'une analyse
Décrire, c’est s’appuyer sur des grilles de lecture qui renvoient aux objets et aux finalités de nos disciplines. La description, un préalable au récit La fiche ressource « Comment faire maîtriser l’expression écrite et orale par chaque élève ?1 » explicite ce qu’est la description en histoire-géographie : « Décrire, c’est dire ce qui est. Cela suppose au préalable l’observation et l’analyse de ce que l’on se propose de décrire. Cela débouche ensuite sur l’expression à l’oral comme à l’écrit, en utilisant les mots pertinents et le déroulement des phrases qui traduisent les raisonnements pour bien dégager la signification de l’objet décrit. Devant la richesse des situations que l’histoire comme la géographie examinent, la production de ces raisonnements n’est pas fermée et plusieurs d’entre eux peuvent être pertinents. Ils sont aussi progressifs, du plus simple au plus exigeant. La description d’un paysage peut ainsi d’abord présenter les différentes unités paysagères. Elle peut ensuite les classer. Elle peut enfin les mettre en relation avec d’autres échelles, avec des contraintes, avec une histoire, avec des aménagements, ou avec une organisation sociale particulière. Ainsi, la description peut relever d’une démarche d’observation rationnelle et déboucher sur une dimension argumentative qui donne sa signification à l’objet décrit. Cette capacité qui part de l’élémentaire pour arriver au complexe se construira donc dans le temps et par de fréquents allers et retours entre l’oral et l’écrit. La description orale élémentaire encadrée par des questions, des notes inscrites au tableau par le professeur ou par l’élève, peut permettre de construire progressivement l’ébauche, le « brouillon » d’un écrit avant de passer, à sa rédaction, c'est- à-dire à sa mise en forme. Il faut savoir ce que l’on veut écrire pour écrire bien, et par là même mieux construire la pensée. On rappellera enfin qu’en géographie, le croquis et sa légende organisée constituent un point d’appui incontournable pour la construction de cette capacité. En soi le croquis est déjà un « écrit » que l’élève peut ensuite être invité à traduire en phrases organisées. Décrire est donc une capacité rarement mobilisée seule : on décrit en général pour analyser, interpréter, expliquer. Décrire, une tâche complexe La description relève du quotidien de la classe : elle peut intervenir au début de la leçon, sur un document afin de dégager une problématique d'étude, en cours de séance comme préalable à une explication du professeur, en évaluation pour vérifier la compréhension d’un phénomène. Ses objets sont multiples : les programmes font porter la description en histoire sur un monument, une cité, une œuvre, les caractéristiques d’une société, et, en géographie sur des paysages, des phénomènes, des situations ... Décrire nécessite l'utilisation d’un vocabulaire adéquat et d’une méthode pour organiser la description, dans une recherche de sens. La description est mise en œuvre par le professeur comme par les élèves. Elle contribue à développer l'expression orale ou écrite, et invite l'élève à prendre en compte un interlocuteur, puisqu’on décrit en général un lieu, une image, un objet à quelqu’un. Son apprentissage, pour être efficace et donner l'habitude de démarches rigoureuses, doit être progressif et reposer sur une pratique fréquente et régulière. Il s’agit, dans un premier temps, de donner aux élèves les outils de lecture de l’objet décrit, qu’il s’agisse d’un paysage, d’une oeuvre d’art, d'une image fixe ou animée, l’interprétation relevant davantage de la parole du professeur, pour ensuite, progressivement, les amener à mobiliser leurs connaissances au service d’une analyse autonome. Décrire est donc une capacité qui permet de travailler plusieurs compétences. Elle s’inscrit pleinement dans la culture humaniste (compétence 5) puisqu’elle nécessite de pouvoir situer l’objet décrit (quelle qu'en soit la nature) dans le temps, l’espace, les civilisations, mais aussi de faire preuve de sensibilité, d’esprit critique et de curiosité. Elle contribue à la maitrise de la langue française (compétence 1) : l’introduction des programmes précise ainsi que « les capacités «raconter » et «écrire» sont de nature à valoriser la qualité de l’expression écrite et orale des élèves ». La compétence 4 peut aussi être travaillée par ce biais si les nouvelles technologies sont utilisées, notamment les images satellites, les reconstitutions en trois dimensions… La description doit accorder alors du temps à l’étude de la nature du document et amener les élèves à s’interroger sur la qualité et la pertinence de l’information ainsi proposée. 3. Quelles démarches adopter dans nos disciplines ? Passer du visible à l’invisible Dans un premier temps, qu’il s’agisse d’un paysage en géographie, d’un objet ou d'une œuvre d'art en histoire, il est intéressant de laisser aux élèves un moment suffisamment long d’observation. Ce peut être l’occasion d’exprimer librement leur ressenti.
Dans un deuxième temps, il convient de passer de l’observation à la description, c’est-à-dire à la verbalisation organisée de ce qui a été vu. Cela consiste à identifier les objets, à distinguer des ensembles voire une forme d'organisation, à émettre des hypothèses sur leurs fonctions à travers les formes, les couleurs, les positions, les vues sous des angles différents. La troisième étape vise à donner du sens à l’observation. C’est le moment où le professeur, ou l'élève, éclaire le sens de l'objet observé par des explications, par la confrontation éventuelle avec des documents complémentaires. L’enjeu est ici de passer du visible (ce que l'on perçoit) à l’invisible (le sens) par l'interprétation de ce que l'on observe. Cela nécessite un aller-retour constant entre l’observation et la verbalisation. Décrire un paysage Pour décrire un paysage, la lecture par plans (premier, deuxième et arrière-plan) ne suffit pas. En effet, elle tend à figer le regard des élèves. Si elle permet à chacun de savoir ce dont les autres parlent, elle n’éclaire pas forcément l’organisation du paysage puisqu’il suffit de changer de point de vue pour avoir autre chose à décoder. En géographie, la description gagne, lorsque c'est possible, à être associée à un travail sur le terrain. C’est l’occasion pour les élèves de prendre conscience que chaque regard est différent. Sur un support photographique, l’étude du point de vue est l’occasion de s’interroger sur les intentions du photographe et sur tout ce qui échappe à son regard. Il convient ensuite de rechercher les processus et les acteurs qui ont organisé et différencié ce fragment d’espace sur la durée. La parole du professeur, des documents complémentaires permettent ainsi de mettre en lumière le rôle de l’histoire, tout paysage étant le produit du travail humain. Le changement d’échelles permet de relier le paysage à un ensemble plus vaste et de s’interroger sur les relations des différents éléments et le jeu des acteurs. La réalisation d’un croquis simplifié contribue à faire avancer les hypothèses sur leur fonction et leur articulation. Complété au fur et à mesure de l’analyse, il permet au final de rendre compte de l’organisation du territoire. Décrire une œuvre d’art En histoire des arts, un premier temps d’expression libre sur le ressenti esthétique contribue à faire émerger les représentations de chacun, pour pouvoir ensuite dépasser la subjectivité du regard. Repérer la composition de l’œuvre et la transcrire sous la forme d’un schéma simple, puis la confronter avec des vues obliques, d’autres tableaux, des textes littéraires constituent une première étape dans l’apprentissage de l’esprit critique par rapport aux sources. Cette observation doit s’accompagner d’une verbalisation, qui peut s’effectuer à l’oral ou par écrit. On notera qu'à l'inverse du paysage en géographie, la lecture d'une gravure ou d'un tableau commence par l'arrière-plan. IV. Expliquer en histoire-géographie 1. Quels sont les modes de raisonnement mobilisés dans nos disciplines ? Toute explication en histoire ou en géographie s'inscrit dans une visée démonstrative. Le processus d'explication est totalement constitutif de la réflexion historique ou géographique. L'histoire ou la géographie ne sont pas des disciplines de simple restitution de connaissances, comme l'esprit public le croit parfois, mais constituent des champs d'analyse et de réflexion auxquels il faut peu à peu former les élèves. Il s'agit de comprendre les actions de personnages, de groupes sociaux, d'organisations, qui agissent en fonction de leur «champ d’expérience» (leur héritage, social, culturel, politique, économique) et du but politique, idéologique, économique, etc. qu'ils poursuivent. Il faut donc analyser la manière dont les « acteurs » sociaux, politiques, économiques interprètent leur propre contexte, décrypter leurs motivations, décrire leur action mais aussi mesurer les effets de ces actes, les changements qu’ils induisent, qui ne correspondent pas forcément aux motivations initiales. Cela nécessite de rechercher des explications qui dépassent la seule logique des acteurs ; elles reposent sur des opérations de mise en relation de cause(s) à effet(s), associées dans nos disciplines à des situations d’antériorité, de simultanéité et de postériorité, ou à des espaces différents. C’est le plus souvent à partir d’un faisceau de causes différentes que l’on peut expliquer telle ou telle situation. Mais la recherche de causes dans nos disciplines n’obéit pas à l’existence de lois scientifiques. Dans la plupart des cas, expliquer consiste à mettre en relation des faits ou des situations de nature différente, à les corréler pour en déduire une interprétation plausible. Par exemple, la corrélation entre
la courbe du chômage en Allemagne au début des années 1930 et la croissance des effectifs du parti nazi est un des éléments d'explication de l’ascension du nazisme. Tributaire de l'éloignement dans le temps des réalités qu'il étudie comme de l'état des sources qu'il peut rassembler, l'historien tisse un tamis aussi fin que possible pour « attraper » les faits qui l'intéressent mais il ne peut jamais prétendredresser un tableau exhaustif du passé. La recherche d’explications impose aussi de raisonner en changeant d’échelle. En histoire, un fait historique est analysé en faisant référence à des temporalités différentes. Ainsi l’accès au pouvoir d’ Hitler le 30 janvier 1933 s’explique-t-il par des facteurs conjoncturels, les forces conservatrices choisissant de lui laisser le champ libre, mais aussi par un contexte particulier fait de crise économique (entre 1929 et 1932), d'exacerbation du nationalisme (qui remonte à la défaite allemande de 1918), mais aussi de développement du pangermanisme (dans le dernier tiers du XIXe siècle). Quant à l’idéologie raciste nazie, elle ne peut se comprendre sans la mutation du terreau anti judaïque, qui existe depuis le Moyen Age, transformé en antisémitisme, là encore dans la deuxième moitié du XIXe, par le biais des théories raciales en vogue. En géographie, le choix d’implantation d’un site s’explique par une analyse à des échelles territoriales différentes. Le groupe Disney a pu s’implanter à Marne la Vallée parce qu’il existait une superficie vaste et peu densément peuplée mais aussi parce que les collectivités territoriales et l’Etat ont eu une politique d’incitation et d’accessibilité au site (connexions route / rail / aéroport) ; politique alors en concordance avec la stratégie de ce groupe qui cherchait un site d’implantation européen, accessible aux échelles nationales et internationales, à proximité de grands foyers de peuplement bénéficiant d’une image mondiale positive (Paris, métropole européenne et mondiale). Ces mises en relation s’opèrent aussi par des interactions entre des phénomènes de nature différente, interactions qui ont des effets sur l’ensemble d’un système. Par exemple l’introduction en Bretagne de méthodes d’élevage industriel entraîne une forte croissance de la production puis une surproduction ayant pour effet la chute des cours, mais aussi des effets environnementaux (pollution des eaux, algues vertes), phénomènes qui engendrent une mise en question du « modèle agricole breton ». Comprendre et expliquer des situations historiques et géographiques nécessitent de confronter notre univers propre à un « ailleurs » en géographie, à un « avant » en histoire. Le chercheur ou le professeur savent opérer la comparaison entre ces deux univers parce qu’ils ont les connaissances et l’outillage intellectuel nécessaires, l’élève, non ! L’élève va chercher à comparer ou expliquer en fonction de ce qu’il connaît et donc commettre des erreurs d’interprétations ou des anachronismes. C’est au professeur de lui permettre d’accéder à des mondes qui n’existent plus ou qui paraissent incompréhensibles pour lui. La réalité est toujours plus complexe que l'image qu'elle donne ; la recherche d'explications dans nos disciplines doit s'inscrire, pour de jeunes élèves, dans cette complexité sans pour autant être compliquée. 2. « Expliquer » dans les cours d’histoire-géographie au collège Expliquer dans nos disciplines exige une familiarité avec les raisonnements décrits ci-dessus ; c’est un apprentissage au long cours auquel les élèves doivent être progressivement initiés. La capacité « expliquer » est toujours associée aux capacités « décrire » et « raconter » car ces dernières ne peuvent être conçues sans visée démonstrative donc explicative. Afin d’aider les élèves à comprendre la nécessité d’expliquer mais aussi le sens des explications attendues, la première démarche du professeur est de montrer ce qui, dans un récit, une description, un exposé de situation, relève de l'énoncé d'un fait ou procède de son explication. Les différents éléments auxquels on a recours pour « expliquer » sont systématiquement mis en évidence ou repérés par les élèves ; c'est ce travail, régulier, qui leur permettra ensuite de construire leur propre faisceau d'explications donc d'appréhender progressivement la nature du raisonnement en histoire ou en géographie. V. Des situations d'apprentissage et d'évaluation pour apprendre à décrire ou expliquer : • L'évaluation est un moment de l'apprentissage et non pas uniquement le point final de l'étude d'un sujet en histoire ou en géographie ; • Elle doit être adaptée à ce que l'on souhaite évaluer, et doit prendre des formes variées. On peut vérifier la maîtrise de connaissances comme celle de capacités avec des activités qui dépassent l'habitude des questions sur document(s) : par exemple rédiger un article pour une petite revue historique réalisée par les élèves ou une exposition de classe, participer à un jeu de rôles, réaliser une affiche sur une ville, commenter une sortie dans l'espace proche, sélectionner des documents pour réaliser une brochure sur un thème donné… sont autant
d'exercices qui permettent de vérifier de manière intéressante la maîtrise de savoirs et de capacités chez les élèves et qu'il est possible d'adapter facilement au niveau souhaité ; • Elle doit porter sur l'écrit mais aussi sur l'oral ; • Elle ne se suffit pas à elle-même et doit être articulée à des renforcements ou des approfondissements afin de fonder des acquis qui, tout en étant adaptés à l'âge des élèves, soient solides, donc mobilisables dans la durée. VI. Lire et pratiquer différents langages en histoire-géographie L’histoire, la géographie et l’éducation civique ont comme principaux supports d’étude des documents, de nature et de sources diverses (textes, cartes, plans, images, reconstitutions, œuvres d’art, récits, lois, frises, tableaux, graphiques…). Au delà de la lecture et de la juste compréhension de différents supports documentaires, dont certains ont leur langage propre (cartographique notamment), la maîtrise des langages en usage dans nos disciplines recouvre des enjeux majeurs en termes de formation des élèves : le recours à une palette large d'expression - à l'écrit comme à l'oral - la possibilité d''argumenter, la mobilisation des moyens utiles à la communication d'une information, d'un savoir ou d'un point de vue. 1. Le document, un support privilégié d’analyse en histoire, géographie et éducation civique On entend par document tout support propice à l’analyse historique, géographique ou civique. Ce n’est pas sa nature qui définit le document mais son usage en tant que support pédagogique, ce qui ne dispense pas d’en préciser la nature avec rigueur. Le document peut être utilisé selon des modalités variées : simple illustration, entrée dans un thème ou fondement d’un travail critique. Les techniques de l’information et de la communication doivent, chaque fois que possible, être mises à contribution pour conduire la recherche, l’exploitation et le travail critique sur les documents.» Il s’agit donc de favoriser une confrontation progressive avec des sources et des supports variés, et d’initier les élèves à leur lecture et à leur analyse. L’image ne devient source d’informations que si l’on sait décrire et synthétiser son contenu,ce qui nécessite de savoir distinguer des ensembles, voire les reporter sur un croquis, puis lire le résultat obtenu et l’exprimer, par écrit ou oralement. Pour lire une carte il faut savoir distinguer les ensembles, les lignes, les dynamiques et pouvoir les exprimer (voir la fiche ressource sur les apprentissages cartographiques au collège). Lire un document, une démarche à acquérir La lecture d’un document constitue une tâche complexe puisqu’elle mobilise des connaissances, des capacités et des attitudes (esprit critique, souci de vérification…) et qu’elle s’effectue au service d’une problématique. Elle met donc en oeuvre des compétences qui relèvent tout à la fois de la maîtrise de la langue française, de la culture humaniste, que de l’autonomie et de l’initiative. Elle vise la recherche de sens, l’analyse, et mobilise des méthodes différentes selon la nature du document. Elle nécessite un apport d’explications pour permettre la compréhension. VII. Localiser, situer en histoire-géographie Parmi les capacités identifiées dans les programmes, «localiser» et «situer» relèvent de la maîtrise de l’espace et du temps et se placent ainsi à la croisée de la géographie et de l’histoire. 1. Des capacités qui participent à la construction d'une pensée sur le temps et l'espace Avec «localiser» et «situer», les programmes ont accordé une place essentielle aux capacités d’ordre spatial et temporel. L’élève doit être capable, à travers la connaissance et la pratique d’un espace, proche ou lointain (dans la géographie ou dans la chronologie), de localiser et de situer des lieux ou des phases temporelles (date, période) en utilisant les langages cartographique et chronologique. En géographie, les changements d’échelles spatiales sont explicites et au coeur des apprentissages, notamment avec la démarche de l’étude de cas. Localiser (du latin localis, venant lui-même de locus, qui signifie un point, une position) : placer par la pensée, dans un endroit déterminé, ou rapporter à une date.
Il s’agit de la première étape dans le repérage dans l’espace («où ?»). Situer (emprunté au latin médiéval situare, «placer en un lieu», de situs situation) : placer, poser en certain endroit par rapport à un référent, à des repères. C'est la seconde étape dans le repérage dans l’espace («où ?»), en ajoutant «par rapport à qui ou à quoi ?». Situer est alors une capacité relative et évolutive des lieux ou des moments les uns par rapport aux autres. Elle fait donc appel aux notions de distance, d'éloignement (dans l'espace ou dans le temps) et d’échelles. Pour le repérage dans l’espace, la réponse peut être cartographique : placer une ville (un point), une ligne (une route), une surface (un État, une région) sur une carte ; ou inversement reconnaître que ce point correspond à cette ville... On utilise alors les outils de l’orientation (points cardinaux, grands repères géographiques). ex : Le collège est au nord du centre-ville. ex : L’océan Atlantique est à l’ouest de la France. En géographie, localiser et situer sont au coeur des démarches d’enseignement. Contrairement à une idée couramment répandue, l’acquisition de cette maîtrise ne relève pas d’un seul travail de mémorisation.Il fait appel aussi à une aptitude à l’abstraction que beaucoup d’élèves ne possèdent pas à l’entrée au collège. Un entraînement régulier est donc indispensable pour que cette acquisition soit réussie. Le travail de « localiser » et celui de « situer » ne sont pas similaires mais sont complémentaires. Si localiser implique un recours aux coordonnées géographiques, ce qui est immuable, situer fait référence à un contexte et un environnement qui peuvent évoluer dans le temps. Ainsi, il ne s’agit plus simplement de localiser le collège sur le plan de la ville, mais d’évaluer la distance qui le sépare du centre, de constater qu’il est proche d’une ZAC, en bordure de l’espace urbanisé, à proximité de voies de communication, donc d’approcher l’explication du « pourquoi là ». Il est alors nécessaire d’utiliser un jeu de zoom et d’échelles. Situer, c’est donc identifier une portion d’espace en relation avec d’autres espaces à des échelles différentes. 3. Des capacités qui nécessitent une diversité et une progressivité des apprentissages « Localiser » et « situer » supposent la capacité à lire des documents cartographiques de tout type. Ainsi, en géographie, il est possible de coupler les cartes classiques avec les cartes non euro- centrées, ou d’utiliser des SIG (cartorisque....), ainsi que des outils degéolocalisation (Géoportail, Google earth. VIII. Réaliser un croquis en géographie 1. La maîtrise de la cartographie, un apprentissage majeur en géographie Les programmes prévoient que les élèves soient régulièrement et progressivement initiés à la lecture de cartes (de tous types et de toutes échelles) et à la réalisation de croquis. Cette recommandation comprend l’initiation aux méthodes de lecture d’images de paysages et la réalisation de leurs croquis d’interprétation (…). Au-delà des objectifs à caractère graphique, l’initiation à ces langages fondamentaux ne doit pas perdre de vue les finalités suivantes : géographiques : la maîtrise des langages est au service d’une démonstration géographique, elle-même destinée à mettre en situation le vocabulaire spécifique de la discipline et à construire les notions centrales de chaque programme (…) ; civiques : la lecture de cartes, de paysages, la réalisation de croquis sont autant d’occasions d’ouvrir la réflexion des élèves sur le poids des cartes, des images dans les représentations collectives (…) ; en cela, la géographie participe pleinement à l’éducation aux images et confère à cette discipline une place éminente dans la formation civique ; patrimoniales : cartes et images de paysages sont des lectures du monde ; elles éduquent aussi le regard sur la diversité de la nature et des aménagements des sociétés humaines (…). Carte, croquis, schéma : un vocabulaire à maîtriser La cartographie est un langage avec lequel on représente le réel et dont le produit, la carte, ne reflète qu’une partie de la réalité, à travers les localisations et les informations qu’elle fournit, qui dépendent des choix effectués par son auteur (projection, centration sur tel ou tel continent, figurés…). Comme tout document, elle nécessite de s’interroger sur le contexte dans lequel elle a été produite, les destinataires, l’idéologie ou le parti pris à l’origine de sa conception, la fonction qu’on a souhaité lui assigner. La carte permet d’observer (repérer, nommer, localiser), de décrire, puis d’expliquer un (des) fait(s) dans un (des) espace(s).
Le croquis est une représentation cartographique simplifiée, qui rend compte de l’organisation et des dynamiques d’un espace. Le réaliser consiste à raisonner en utilisant un langage spécifique. La démarche reprend les principales étapes de toute argumentation : sélectionner les informations qui répondent à la problématique ; classer et hiérarchiser ces informations ; choisir le langage approprié. Une représentation spatiale nécessite de fixer un cadre (figurés de surface), sur lequel interviennent des limites ou des échanges (figurés linéaires), mettant en relation des lieux (figurés ponctuels). Le schéma est également une représentation graphique, dans lequel on abandonne l’échelle graphique ou numérique tout en respectant les règles du langage cartographique. Faciles à réaliser (recours à des formes géométriques), faciles à mémoriser, les schémas sont utiles dans une démonstration ou un devoir dont ils peuvent jalonner les étapes ou les moments clés. Ils peuvent constituer également un élément de la trace écrite. Réaliser un croquis, une tâche complexe Au-delà de l’acquisition d’un langage spécifique, le croquis, en géographie est, pour l’élève, le moyen de comprendre (lecture) ou de produire (réalisation) un discours argumenté sur l’espace. Sa réalisation mobilise donc plusieurs compétences du socle : en tant que discours argumenté, il participe de la maitrise de la langue française à travers notamment les différentes phases d’oralisation qu’il met en oeuvre (description, sélection d’informations, justification des choix…). 2. Réaliser un croquis, une capacité à construire progressivement Tout croquis doit comporter : un titre : placé en tête de carte, souligné, bref et significatif, correspondant au sujet traité ; une légende : rendant compte de la démonstration donc ordonnée, hiérarchisée (rubriques), précise (unités), placée sous la carte ; des figurés : conformes au langage cartographique, en nombre limité ; une échelle : graphique ou numérique ; l’orientation : nord ou rose des vents ; des éléments de nomenclature : noms complets, en lien avec le sujet, hiérarchisés en fonction de l’importance, écrits horizontalement. Comment mettre en place une progressivité des apprentissages ? Cartes, croquis, schémas, doivent devenir des outils familiers pour tout collégien, en géographie d'abord, en histoire ensuite, car il est essentiel de localiser correctement les faits et les sociétés étudiés dans cette discipline. La première approche des cartes se fait par leur observation (d'où l'intérêt de travailler avec les élèves sur des projections différentes) et l'apprentissage d'une méthode de lecture. Mais nul besoin d'attendre plusieurs mois avant d'amorcer la réalisation de croquis, bien au contraire. La formation à la réalisation d’un croquis est plus efficace si elle est conduite de manière simultanée avec la lecture des supports cartographiques. Là encore tout est affaire de progressivité et de mesure dans les attentes. Plus que des séances de méthodologie, souvent fastidieuses, il est préférable de mettre les élèves, fréquemment et régulièrement, en situation de réalisation d’un croquis, pour qu’il y ait familiarisation avec la démarche, instauration d'habitudes de travail dans ce domaine, acquisition de connaissances, élaboration de savoirs. Le croquis ayant pour objectif de simplifier la réalité sans la trahir, il est souvent utile de construire successivement des croquis indépendants pour chaque élément, que l’on cherchera ensuite à combiner.
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