Dossier - 15 années de partenariat public-privé pour la recherche en colza Rédaction et cooRdination

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Dossier - 15 années de partenariat public-privé pour la recherche en colza Rédaction et cooRdination
dossier

15   années de partenariat
public - privé pour la
recherche en colza
Rédaction et coordination :
Mylène Durand-Tardif
Nathalie Nesi
Maxime Szambien

                                       1
                              © INRA
Dossier - 15 années de partenariat public-privé pour la recherche en colza Rédaction et cooRdination
Sommaire
    P.3     Introduction
    P.4     Un continuum de programmes fédérateurs en génomique végétale depuis 1999
    P.6     Axes de recherche et partenariat soutenus par les programmes de génomique
    végétale français pour promouvoir les avancées en génétique et en génomique chez le
    colza(1999-2014)
    P.10 A. thaliana, premier de cordée de la génomique végétale ! (Par Georges Pelletier,
    directeur de recherche à l’INRA, président du Comité Exécutif de Génoplante de 2002 à 2011)
    P.12 La recherche partenariale en génomique végétale (Par Bruno Grèzes-Besset, respon-
    sable de projets chez Biogemma)
    P.14    Focus 1 : le séquençage du génome du colza
    P.15    Focus 2 : une ouverture à l’international
    P.16    Focus 3 : le colza en tant qu’élément du Programme Investissements d’Avenir
    P.18    Etats des lieux et perspectatives (Par Nathalie Nesi, directrice de recherche à l’INRA,
    coordinatrice de Rapsodyn)
    P.19 Structuration de la recherche sur le colza en France : 40 ans de partenariat
    public-privé
    P.21 Le point de vue de Michel Boucly, Directeur Général Délégué du groupe Avril
    P.22 Remerciements
    P.22 Partenaires Génoplante
    P.23 Lexique
    P.24 Annexe 1 : liste des projets
    P27 Annexe 2 : liste des publications

2
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Introduction
                   Avec une production mondiale annuelle de l’ordre
                  de 64 millions de tonnes (Mt), le colza occupe au-
                  jourd’hui une position stratégique dans la produc-
                  tion de graines oléagineuses. En France, 1,5 Mha
                  sont dédiés annuellement à la culture de colza,
                  pour une production avoisinant 5 Mt, positionnant
                  ainsi l’Hexagone au 5ème rang des pays produc-
                  teurs de colza après le Canada, la Chine, l’Inde et
                  l’Allemagne (Fig. 1). Les graines de colza, riches
                  en lipides de réserve, fournissent une huile dont la
                  composition en acides gras est équilibrée et adap-
                  tée à de multiples usages (alimentaires, biodiesel et
                  produits biosourcés). Par ailleurs, le tourteau issu de
                  la trituration contribue significativement à l’offre en
                  protéines végétales pour la filière animale (Fig. 1).
                  Cela résulte d’efforts importants menés en matière
                  d’amélioration et de sélection variétale depuis les
                  années 60, avec un focus sur la qualité de l’huile et
                  du tourteau, la résistance aux maladies et aux her-
                  bicides, et plus récemment le développement des
                  hybrides F1.

                   Elément clé de la diversification des rotations et des
                  paysages ainsi que de la durabilité des agroécosys-
                  tèmes, le colza est cependant menacé par certains
                  enjeux agronomiques et socio-économiques. En ef-
                  fet, l’instabilité des rendements, la faible efficacité
                  d’utilisation des nutriments, l’indice de fréquence
                  des traitements (IFT) élevé et le coût énergétique
                  significatif de la culture limitent sa compétitivité.
                  Par ailleurs, de nouvelles directives européennes
                  en préparation pourraient préconiser une baisse
                  du taux d’incorporation du Diester® (http://www.
                  diester.fr/) dans les biocarburants, fragilisant ainsi
                  les circuits de valorisation de l’huile de colza. Les
                  objectifs actuels d’amélioration concernent donc
                  l’optimisation et la maîtrise de la stabilité du ren-
                  dement et de la qualité en huile et protéines, ainsi
                  que l’amélioration du bilan énergétique de la pro-
                  duction de colza en lien avec des préoccupations
                  agro-écologiques de limitation des intrants, de pré-
                  servation des ressources et d’anticipation des effets
                  des perturbations climatiques.

J. Weber © INRA                                                         3
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Le colza (Brassica napus L.) appartient à la famille des                      des connaissances sur l’organisation du génome et
Brassicaceae, tout comme la plante modèle Arabi-                               la fonction de gènes impliqués dans le contrôle de
dopsis thaliana. C’est une espèce allotétraploïde qui                          caractères agronomiques majeurs chez le colza (ren-
résulte d’un petit nombre d’hybridations interspé-                             dement en grains, qualité de la graine, résistance
cifiques récentes (
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Un     continuum de programmes fédérateurs
   en génomique végétale depuis                           1999

 Génoplante est un groupement d’intérêt scien-
tifique (GIS) créé en 1999 dans le but d’associer à
parité la recherche publique (INRA, CNRS, CIRAD,        Répartition des montants du programme
IRD) et privée (Arvalis Institut-du-Végétal, Bayer      Génoplante Colza (1999 - 2010) en millions
CropScience, Biogemma, GIE Bioplante Florimond                         d’euros (M€)
Desprez-Serasem, Sofiprotéol) en France. L’objectif
commun des membres était de mieux comprendre
la structure et le fonctionnement des génomes           ORIGINE            MONTANT (EN M€)
des végétaux et de contribuer ainsi à l’améliora-
tion génétique des principales plantes cultivées.
                                                        PUBLICS            13 292 M€
 Les phases Génoplante 1 et 2 (1999-2004) ont été
soutenues par les Ministères de la Recherche et de      PRIVÉS             6 625 M€
l’Agriculture. En 2005, le programme « Génoplante
2010 » démarre pour une durée de six ans, grâce         SUBVENTIONS        6 676 M€
aux financements de l’ANR sur la base d’appels à
projets annuels. Dix projets « Colza » furent finan-
cés au cours de ce programme. Ces dix années de         TOTAL              26 593 M€
recherche représentent un montant total d’envi-
ron 26,6 millions d’euros (voir tableau ci-contre).

 Créé en 2011 pour une durée de 10 ans avec 30
membres, le GIS Biotechnologies Vertes (GIS BV)
poursuit l’effort de coopération public/privé déve-
loppé par Génoplante tout en ouvrant à de nou-
veaux partenaires afin de renforcer la compétitivité
du secteur agricole français.

 Le GIS BV labellise et suit les projets issus de ses
membres dont la thématique s’inscrit dans l’un
des 4 objectifs stratégiques que sont l’adaptation
de l’agriculture aux changements globaux, une
meilleure utilisation de l’eau et des ressources mi-
nérales, l’amélioration des rendements et de la
qualité des récoltes dans des conditions de hautes
performances économique et environnemen-
tale, et l’adaptation des plantes à de nouveaux
usages. Ces projets sont financés par l’ANR ou le
Programme Investissements d’Avenir à l’échelle
nationale et des connections sont établies avec les
programmes de génomique végétale européens.             Labellisé par :
                                                                                                     5
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Axes de recherche et partenariat soutenus par les programmes
de génomique végétale français pour promouvoir les avancées
en génétique et en génomique chez le colza                                   (1999-2014)
 Au cours des phases 1 et 2 de Génoplante (1999-2004), une attention particulière a été portée à ex-
ploiter et transférer les connaissances et les ressources génomiques disponibles chez l’espèce mo-
dèle Arabidopsis thaliana au colza. Dans le cadre de Génoplante 2010, l’effort a été mis sur la
création de ressources et d’outils propres au colza, ce qui a été grandement facilité avec l’avène-
ment des nouvelles technologies de génotypage et de séquençage haut débit. Parallèlement au
développement de ressources, des travaux majeurs ont permis l’identification et la caractérisa-
tion de nombreuses régions génomiques impliquées dans le déterminisme de caractères d’intérêt.

Développement d’outils          et de ressources          Marqueurs moléculaires
pour les analyses génétiques et génomiques
                                                          La forte conservation des séquences codantes entre
Construction et exploitation de banques de               les Brassicacea a permis d’exploiter la séquence gé-
grands fragments d’ADN et de collections de              nomique d’Arabidopsis dès sa publication en 2000
transcrits                                               pour cloner, chez le colza, les séquences homologues
                                                         de gènes d’intérêt, ouvrant ainsi la possibilité de re-
 Afin de cloner des gènes d’intérêt agronomique,         chercher et d’identifier du polymorphisme au sein de
la construction de deux banques BAC (bacte-              ces séquences géniques dans les collections de col-
rial artificial chromosome), l’une chez le colza (12     za. Ainsi, le projet GOP-T4, porté par D. Brunel (INRA),
équivalents génome) et l’autre chez le radis (23         a été novateur en initiant le développement d’un
équivalents génome), a été soutenue dès 2000             nouveau type de marqueurs : les ACGM (Amplified
par Génoplante (projet GOP-T1 coordonné par              Consensus Genetic Markers). Des amorces oligonu-
B. Chaloub, INRA). Les clones BAC ont été organi-        cléotidiques dessinées directement à partir de gènes
sés en pools de 2 à 3 dimensions afin de faciliter       d’Arabidopsis ont permis d’amplifier et de séquencer
les criblages par PCR pour la recherche de clones.       près de 90 gènes impliqués dans le déterminisme de
                                                         la floraison ou de la qualité de la graine chez le colza
En particulier, la banque BAC de radis a permis          (composition en acides gras ou en glucosinolates).
le clonage du gène de restauration de la fertilité       Des marqueurs polymorphes de type SNP (Single
(Rfo). Des banques d’ADNc construites à différentes      Nucleotide Polymorphism) ont été identifiés dans ces
phases critiques du développement de la graine           gènes en utilisant une collection de 80 accessions de
(embryogenèse, accumulation des réserves, matu-          colza et utilisés par la suite pour génotyper par spec-
ration, dessiccation) ont été produites par le consor-   trométrie de masse (projet GOP-T7, D. Brunel) des
tium GOP-T6 piloté par J. Wilmer (Biogemma), et sé-      descendances en ségrégation disponibles à l’INRA ou
quencées, générant ainsi plus de 40 000 étiquettes       chez les partenaires privés. Ces résultats ont permis
de séquences transcrites (EST) qui ont permis d’ali-     d’élaborer la première carte consensus chez le colza.
menter les bases de données publiques dès 2006.           Dans le projet GOP-T9, coordonné par B. Chalhoub
L’analyse bioinformatique des EST a permis de dé-        (INRA), cette stratégie basée sur la synténie entre Ara-
gager un set de 13 083 transcrits uniques exprimés       bidopsis et le colza a été mise en œuvre à l’échelle du
au cours du développement de la graine qui a été         génome. Ainsi, des marqueurs dérivés de séquences
utilisé pour construire une puce d’ADNc pour les         codantes d’Arabidopsis (PFM, Physical Functional
analyses transcriptomiques. Les outils produits par      Marker) ou d’EST du projet GOP-T6 ont été déve-
GOP-T6 ont permis un premier pas décisif vers l’ana-     loppés et séquencés sur 17 génotypes de colza. Ces
lyse fonctionnelle de gènes majeurs impliqués dans       marqueurs ont permis d’ancrer les BAC sur la carte
le développement et la composition de la graine.         génétique du colza en s’aidant du génome d’Arabi-
                                                         dopsis, initiant ainsi les prémices de la première carte
6                                                        physique de colza.
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Création de matériel génétique original                   divers caractères ont été produites dans les différents
                                                          projets. La technique de transformation génétique
 La population RAPTILL est une population de colza        stable du colza est maîtrisée en France à l’Igepp. Cette
(variété Tanto) comprenant 8500 lignées mutagéni-         méthode met en œuvre la régénération de plantules à
sées par l’action d’un agent chimique, l’éthyl méthyl     partir d’explants inoculés par une souche d’Agrobac-
sulfonate, dont l’action sur le génome offre la possi-    terium tumefaciens porteuse du transgène puis culti-
bilité d’obtenir des variants alléliques dans des gènes   vés sur milieu sélectif. S’agissant du ciblage génique,
d’intérêt. RAPTILL a été produite par l’Igepp (Insti-     des essais sont en cours sur le colza dans le cadre du
tut de Génétique, Environnement et Protection des         projet GENIUS piloté par P. Rogowsky (INRA).
Plantes – Rennes) entre 2003 et 2006 et constitue une
ressource publique disponible pour la communauté          Identification de locus ou de gènes d’intérêt
scientifique. Le projet GENOTILL, coordonné par A.
Bendahmane (INRA), a permis l’extraction des ADN          agronomique et caractérisation des fonctions
pour 2000 lignées pour la recherche de mutants par        associées
génétique inverse (méthode de TILLING). La densité
de mutations est estimée à ~1 mutation/20-50 kb et        Contrôle de la reproduction
la ressource a été utilisée pour identifier des mutants
dans plusieurs gènes impliqués dans des caractères         Le système de stérilité mâle cytoplasmique Ogu-
d’intérêt chez le colza (déhiscence des siliques, pig-    ra décrit chez le radis a été introduit chez le colza
mentation de la graine, contrôle de la recombinaison      (brevet Ogu-INRA) et est largement utilisé par les
méiotique …). Récemment, les méthodes de séquen-          semenciers pour développer des variétés hybrides
çage nouvelle génération ont permis de développer         restaurées. C’est un système à deux composantes
une méthode haut débit pour la recherche de mu-           comprenant d’une part un facteur mitochondrial in-
tants par séquençage ciblé.                               ducteur de stérilité mâle et d’autre part un facteur
                                                          nucléaire dont la forme allélique permet le maintien
 Dans le cadre du projet BrassiNAM, coordonné par         de la stérilité ou la restauration de la fertilité. Après
B. Grezes-Besset (Biogemma), une population de            plusieurs années d’effort pour réduire la liaison gé-
cartographie emboîtée ou NAM (Nested Associa-             nétique entre le gène de restauration de la fertilité
tion Mapping) a été construite conjointement par          (Rfo) et des traits limitant les performances agrono-
l’Igepp et Biogemma, permettant de combiner les           miques des lignées mâles de colza sélectionnées,
méthodes relatives à l’analyse de liaison (approche       le projet GOP-A1, coordonné par F. Budar (INRA), a
QTL) et à l’analyse du déséquilibre de liaison (ana-      permis le clonage du gène Rfo, en utilisant les res-
lyse d’association). Pour construire la population        sources produites par ailleurs (population de ra-
BrassiNAM, 15 accessions maximisant la diversité          dis en ségrégation, banque BAC de radis, relations
génétique du colza oléagineux (12 types hiver et 3        synténiques entre génomes). RFO appartient à la
printemps) ont été choisies, puis génotypées densé-       famille des protéines à motif de type pentatricopep-
ment (300k SNP) et croisées avec la lignée Aviso uti-     tide repeat (PPR) connues pour être adressées aux
lisée comme pivot pour générer des descendances           organelles. Ces résultats ont ouvert des possibilités
connectées. In fine, chacun des 15 croisements est        pour i) mieux comprendre les mécanismes de res-
constitué de 200-250 lignées recombinantes en gé-         tauration de la fertilité, ii) fournir des marqueurs mo-
nération F6 obtenues par filiation mono-graine et         léculaires pour le développement d’hybrides restau-
génotypées avec un marquage moins dense (10k              rés et iii) créer des lignées restauratrices par génie
SNP). BrassiNAM constitue une ressource majeure           génétique.
pour la cartographie génétique à haute résolution
qui servira aux scientifiques et aux sélectionneurs
impliqués dans l’amélioration du colza.
 Enfin, de nombreuses lignées transgéniques de col-
za sur- ou sous-exprimant des gènes candidats pour
                                                                                                                  7
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Le colza est une espèce partiellement allogame,           lourme, INRA) ou par analyses d’association (GWAS) à
autorisant ainsi des flux de pollen entre plantes de       partir de populations à base génétique large (projet
sites distants. Afin de maîtriser la dissémination du      GENERGY piloté par N. Nesi, INRA). Au total ce sont
pollen, en particulier dans le cas de productions          plus de 120 locus détectés qui ont été projetés sur
spécialisées, des recherches se sont orientées vers        le génome de référence du colza et comparés aux
le développement de variétés cléistogames. Pour            locus publiés par d’autres études afin d’identifier
cela, un mutant cléistogame a été obtenu à l’Igepp         les régions génomiques clés pour l’accumulation
par mutagenèse chimique et a servi de support              d’huile dans la graine (Fig. 2). En particulier, des ré-
pour réaliser le clonage positionnel du gène corres-       gions riches en QTL sont détectées dont certaines
pondant (Clg1) grâce au déploiement d’une popu-            co-localisent avec des QTL de développement (ex.
lation en ségrégation de 2000 haploïdes doublés.           floraison, nanisme) ou de composition de l’huile (ex.
Le caractère de cléistogamie a été observé et les          gène d’élongase).
régions génomiques portant les allèles de Clg1 ont          Le projet OSRCROP piloté par J. Wilmer (Biogem-
été séquencées, au sein du projet GOP-T2 coordo-           ma), a permis par la suite de réduire les intervalles
né par R. Delourme (INRA).                                 de confiance de QTL ciblés pour la teneur en huile
                                                           en utilisant d’une part la synténie entre les génomes
Quelques années supplémentaires ont encore été             des Brassicacées et d’autre part des approches de
nécessaires pour valider in planta la fonction du          GWAS locale. Les gènes sous-jacents aux QTL consti-
gène Clg1 qui code une ubiquitine ligase E3 de type        tuent des cibles prioritaires pour l’augmentation de
RING. Sur le plan mécanistique, la mutation clg1 inhi-     la teneur en huile dans la graine et des approches
berait la synthèse ou le relargage de cutine dans les      complémentaires sont déployées pour rechercher
organes floraux.                                           du polymorphisme exploitable dans les collections
                                                           de colza et progresser sur la connaissance des méca-
Elaboration de la qualité de la graine                     nismes fonctionnels auxquels ils participent.

 L’objectif du projet GOP-Q7 piloté par J. Wilmer (Bio-
gemma), était d’identifier des facteurs qui régulent
l’expression des gènes impliqués dans la biosynthèse
des lipides chez le colza. Pour cela, un focus a été ré-
alisé sur les gènes codant pour des 3-ketoacyl-CoA
synthases (FAE1, FATTY ACID ELONGATION1) impli-
quées dans la régulation de la biosynthèse des acides
gras à très longue chaîne carbonée dans l’embryon
de colza. Une analyse fonctionnelle des régions pro-
motrices des gènes FAE1 chez le colza a permis de
déterminer les motifs nucléotidiques nécessaires et
suffisants pour piloter la spécificité spatio-tempo-
relle de l’expression des transcrits correspondants.
Par ailleurs, ces séquences promotrices ont égale-
ment été utilisées pour rechercher des facteurs de
régulation en trans par un criblage simple hybride
(ADN-protéine). Plusieurs facteurs de transcription
impliqués dans la biosynthèse des lipides ont ainsi
été mis en évidence.
                                                           Fig. 2. Diagramme de Circos soulignant les relations homéo-
Les locus déterminants la teneur en huile ont été          logues entre les gènes sous les QTL pour la teneur en huile.
explorés par analyses QTL à partir de populations          Les 19 chromosomes de B. napus (2n = 4x = 38; AACC) apparte-
biparentales (projet GOP-Q5 coordonné par R. De-           nant aux sous-génomes A et C sont respectivement représentés
                                                           en bleu et en rouge.

8
Dossier - 15 années de partenariat public-privé pour la recherche en colza Rédaction et cooRdination
Dans la graine, les lipides de réserve sont stockés         Pour cela, deux panels de diversité (69 et 92 ac-
dans les corps lipidiques (CL) qui sont constitués          cessions) et deux populations d’haploïde doublé
d’une monocouche de phopholipides enchâssée                 (HD) (‘Aviso × Montego’ et ‘Tenor × Express’) ont été
par des protéines. Lorsque le projet GENOBODIES             phénotypés pour le rendement et ses composantes
(coordination T. Chardot, INRA) a été initié en 2006,       (rendement en grains, date de floraison, nombre
peu d’information était disponible concernant               de grains, poids de mille grains, teneurs en huile et
la biogenèse, la structure et le rôle des CL chez le        protéines). Les expérimentations ont été menées
colza. GENOBODIES a permis, entre autres, d’accé-           à l’échelle du peuplement, sur plusieurs années et
der à une description exhaustive du contenu pro-            plusieurs lieux, et sous deux conditions de fertilisa-
téique du CL par analyse protéomique sur graines            tion N contrastées (optimale vs. limitante). Les ré-
matures, résultant dans l’identification de 19 oléo-        sultats ont permis 1) d’identifier les régions géno-
sines, 5 stéroléosines et 9 caléosines. Des analyses        miques et les gènes critiques pour l’élaboration du
d’expression de gènes et de détection immuno-               rendement en huile, 2) d’appréhender les effets de
chimique ont révélé que l’accumulation des oléo-            l’interaction G × N et G × E sur le rendement, et 3)
sines et des caléosines est précoce tandis que les          d’élaborer un schéma d’allocation des réserves C/N
stéroléosines s’accumulent plus tardivement. Enfin,         dans la graine.
en utilisant un panel de 92 accessions de colza, il
a été possible d’identifier une relation significative      Hétérosis
entre la stabilité des CL et l’aptitude à la pressabilité
évaluée par micro-pressage. Des travaux complé-              Le projet COLIBRI, coordonné par J. Wilmer (Bio-
mentaires ont également montré que la structure             gemma) était dédié à identifier des gènes candi-
du CL impacte l’extractibilité de l’huile et que cer-       dats pour le rendement chez des hybrides, grâce
tains facteurs (ex. température, pH, addition de sels)      à des analyses transcriptomique et protéomique.
altèrent la microstructure et la stabilité des CL dans      Ces candidats ont été colocalisés avec des QTL pour
des suspensions. Ces travaux ont permis de fédérer          le rendement et avec des QTL d’expression (eQTL)
un partenariat sur la base de compétences en gé-            pour ces candidats. Cela a permis à la communauté
nétique, physiologie, biochimie et technologie, et          de générer un grand nombre de données concer-
les résultats acquis ouvrent de nouvelles perspec-          nant l’hétérosis.
tives pour l’amélioration des procédés d’extraction
d’huile à partir de graines oléagineuses.                    Le projet GEN102-HETEROSIS, coordonné conjoin-
                                                            tement par C. Arar (Biogemma) et E. Téoulé (INRA)
Réponse de la plante et du peuplement à la                  visait à optimiser l’hétérosis chez le colza afin d’ob-
contrainte azotée                                           tenir des gains de productivité significatifs chez les
                                                            hybrides, relativement aux lignées. Les gènes can-
 Dans le cadre des projets ARCOLE (X. Pinochet,             didats responsables de l’hétérosis ont été identifiés
Terres Inovia) puis GENERGY (N. Nesi, INRA), l’ob-          par i/comparaison d’expression entre les hybrides
jectif était d’améliorer le bilan économique de la          et leurs lignées parentales, ii/identification de QTL
filière colza en augmentant le rendement en huile           exprimant une dominance ou une superdominance
par hectare, tout en réduisant les coûts énergé-            dans des populations F2 immortalisées et iii/mise à
tiques de la culture dus à la fertilisation azotée et de    jour de facteurs de transcription impliqués dans la
l’extraction d’huile, tout en assurant un débouché          vigueur hybride chez Arabidopsis.
aux co-produits. Ces projets ont mis en œuvre une
approche intégrative combinant des outils et des            Réponse aux pathogènes
méthodes de modélisation, de physiologie, de gé-
nétique quantitative, de génomique fonctionnelle             Deux sources de résistance majeure au Scleroti-
et de technologie afin d’étudier le rendement, l’ef-        nia sclerotiorum ont été identifiées dans du maté-
ficacité d’utilisation de l’azote et le potentiel d’ex-     riel asiatique. Ces ressources ont été utilisées pour
traction d’huile dans les graines de colza.                 construire des populations en ségrégation pour la

                                                                                                                  9
Dossier - 15 années de partenariat public-privé pour la recherche en colza Rédaction et cooRdination
résistance au Sclerotinia et des QTL ont été détec-        virulentes a été développée. Une population de L.
tés (projet GOP-R3 coordonné par B. Grèzes-Besset,         maculans en ségrégation pour son agressivité sur le
Biogemma et B. Chaloub, INRA) : certains sont spé-         colza a été créée et des QTL détectés, qui expliquent
cifiques à des lieux d’expérimentation, d’autres sont      dix à soixante pourcents des variations mesurées.
stables dans les différents lieux, renforçant leur im-     Par ailleurs, il a été établi que le minichromosome du
portance. Ainsi grâce à l’obtention de deux popula-        champignon est porteur d’un gène d’avirulence. Le
tions de HD issues de deux croisements, six QTL ont        minichromosome est fréquemment perdu au cours
été détectés qui expliquent de huit à quinze pour-         de la reproduction sexuée du champignon. Il a été
cents de la variation observée.                            postulé que ce gène d’avirulence ou un autre gène
                                                           porté par le minichromosome serait impliqué dans
 Ces QTL ont été ancrés sur la carte physique d’Ara-       la fitness du pathogène, condition de son maintien
bidopsis, à l’aide de marqueurs appropriés (projet         dans les populations naturelles. Le gène de résis-
B07 coordonné par B. Grèzes-Besset, Biogemma et            tance correspondant a été identifié chez la navette
D. Roby, INRA et projet SCLEROTINIA coordonné              et introduit chez le colza.
par B. Grèzes-Besset). Plusieurs méthodes ont en-
suite été mises en œuvre afin d’identifier des gènes       Contrôle de la recombinaison
majeurs dans cette résistance. Des génotypes sen-
sible et résistant ont été infectés ou non, leurs trans-    La recombinaison méiotique est nécessaire pour
criptomes ont été déterminés avec une puce d’AD-           produire des gamètes équilibrés et assure le bras-
Nc d’Arabidopsis, des banques de clones issus d’un         sage de l’information génétique ; elle est donc un
criblage différentiel par hybridation soustractive et      processus central pour l’amélioration des plantes.
suppressive ont été construites et séquencées. Les         Dans ce cadre, le projet ANR CROC (coordonné par
résultats de ces expérimentations, comparés aux            E. Jenczewski, INRA) cherche à comprendre com-
gènes présents sur les régions d’Arabidopsis synté-        ment est régulée génétiquement la recombinaison
niques aux QTL et à une base de données regrou-            entre chromosomes homéologues chez le colza (et
pant l’ensemble des séquences publiées exprimées           le blé) et pourquoi la fréquence de recombinaison
par les dicotylédones en réponse à des infections          augmente très significativement chez des hybrides
par des pathogènes, ont permis de mettre en évi-           allotriploides de structure AAC. Ces travaux permet-
dence des candidats prometteurs pour la résistance         tront d’approfondir notre compréhension des mé-
au Sclerotinia. Des plantes transgéniques de colza         canismes fondamentaux de la recombinaison et de-
inactivées pour ces candidats ont été produites et         vraient avoir un écho rapide en innovation variétale,
des mutants d’Arabidopsis isolés pour une analyse          un regain de variabilité génétique étant requis pour
fonctionnelle de ces gènes.                                relever les défis à venir.

 Concernant la nécrose du collet conférée par le
Phoma, des promoteurs inductibles par le patho-
gène ont été recherchés (projet GOP-R1 piloté par
H. Keller, INRA), afin d’envisager l’amélioration de
la réponse à l’infection pour la production de com-
posés anti-fongiques in planta, en s’appuyant sur la
variabilité des promoteurs. Une analyse des gènes
induits par le Phoma au cours d’une interaction
compatible a permis d’identifier sept gènes can-
didats et d’isoler leur région promotrice. L’agent
pathogène a aussi été étudié (projet AvirLep coor-
donné par M.-H. Balesdent, INRA). Trois nouveaux
gènes d’avirulence ont été identifiés, clonés et une
méthode de diagnostic moléculaire des souches

10
A. thaliana : premier de cordée de la génomique végétale !
  Par Georges Pelletier, directeur de recherche à l’INRA, président du Comité
  Exécutif de Génoplante de 2002 à 2011

 Au début des années 1990, par un élan mondial, la     seront reprises immédiatement sur d’autres espèces
recherche publique comme privée choisit un mo-         comme le riz ou le maïs. Plus tard les technologies
dèle unique, Arabidopsis thaliana, pour dévelop-       s’améliorant, en particulier pour ce qui concerne le
per la connaissance des plantes à travers la science   séquençage des génomes, des programmes de gé-
de la génomique qui était en train d’émerger. Très     nomique sont entrepris sur toutes les espèces culti-
vite de très nombreuses équipes adoptent ce mo-        vées : début 2017 on connaît la séquence de plus de
dèle pour traiter leurs questions de recherche.        80 espèces de plantes terrestres.

 Les collections d’EST, de mutants d’insertion, les     Outre ces aspects méthodologiques, A. thaliana se
puces à ADN, la séquence génomique, consti-            révèle un excellent modèle pour la compréhension
tuent de premières bases méthodologiques qui           de grandes fonctions partagées par les plantes. C’est
                                                       par exemple la façon dont les facteurs de l’environ-
                                                       nement, température, durée du jour, disponibilité en
                                                       eau et en intrants agissent sur l’expression de gènes
                                                       clé pour leur développement (vernalisation, induc-
                                                       tion florale…). Ce sont aussi les réactions d’une
                                                       plante à des stress induits par des conditions ex-
                                                       trêmes, froid, chaleur, sècheresse. Ce sont enfin, en
                                                       particulier pour les espèces proches du genre Brassi-
                                                       ca les caractéristiques de production agronomique :
                                                       interactions avec les pathogènes, utilisation des in-
                                                       trants, composition des produits récoltés. Plusieurs
                                                       programmes des GIS Génoplante et Biotechnolo-
                                                       gies Vertes évoqués dans ce document illustrent cet
                                                       aller et retour entre le modèle et le colza.

                                                        Le modèle va plus loin et est exploité aussi bien
                                                       comme guide pour découvrir, que comme source
                                                       de gènes pour des applications biotechnologiques
                                                       : réponse à la photopériode chez les légumineuses
                                                       comme le pois, induction florale dès la première an-
                                                       née chez le pommier, tolérance au froid, au sel et à la
                                                       sècheresse chez les céréales comme le riz ou le blé.
                                                        Plusieurs modèles animaux convergent pour abou-
                                                       tir à l’Homme et traiter de sa santé. La situation est
                                                       inverse pour les plantes où un modèle (presque)
                                                       unique prétend servir à de multiples espèces. Dans
                                                       un cas comme dans l’autre la confrontation est fer-
                                                       tile car elle fait progresser la connaissance.
                             A.-H. Cain © INRA

                                                                                                           11
la recherche partenariale en génomique végétale
       Par Bruno Grèzes-Besset, responsable de projets oléagineux chez Biogemma

  Pour les partenaires du secteur privé, les initiatives
 Génoplante, suivies des différents projets soutenus
 par l’Agence Nationale de la Recherche puis main-
 tenant les Investissements d’Avenir sont un formi-
 dable moteur donnant accès à des outils et des ré-
 sultats majeurs qu’individuellement les acteurs du
 monde semencier ne pourraient générer.

  La construction de ces vastes programmes s’inscri-
 vant dans la durée, ces initiatives ont fortement dy-
 namisé les collaborations entre acteurs des secteurs
 privés et publics, et favorisé aussi la valorisation des
 résultats de la recherche. La création de cadres fa-
 vorables aux échanges tout d’abord par la mise en
 place des groupes de réflexion (white paper), puis
 au travers de nombreux appels d’offre et finalement
 par la mise en place des différents comités de suivi,
 ont été et sont encore un élément clé du succès de
 ces projets. La création de cadres administratifs et
 juridiques clairs pour la réalisation des projets et la
 valorisation des résultats via Génoplante-VALOR a
 grandement facilité la construction de ces projets
 parfois très ambitieux.

  Dès le début des projets Génoplante, le colza a bé-
 néficié d’un effort important à la fois sur des axes de
 recherche amont (lien avec les espèces modèles),
 des axes de développement d’outils de génomique
 quasi inexistants au début des projets et finale-
 ment des axes très ciblés sur des caractères agrono-
 miques majeurs limitant souvent la compétitivité
 de la culture.

  Ces différents travaux ont eu, et ont encore, des re-
 tombées importantes pour les industriels. Sans être
 limitant ni exhaustif, certains exemples concrets
 peuvent illustrer l’apport bénéfique de ces pro-
 jets. Le métier de la création variétale a fortement
 évolué au cours des dernières années notamment

                                                               J. Weber © INRA
12
par le développement des marqueurs moléculaires           2003-2004 que les premiers hybrides débarrassés
qui sont maintenant devenus un outil de routine           de leurs défauts arrivent sur le marché. Depuis, leur
indispensable. Au départ des projets Génoplante           déploiement n’a pas cessé, au point que doréna-
ces marqueurs moléculaires faisaient cruellement          vant, en France, seules des variétés hybrides sont
défaut et les cartes génétiques disponibles étaient       déposées à l’inscription, mises à part quelques li-
très lâches. De nombreux projets ont permis d’enri-       gnées spécifiques, sélectionnées pour leur profil
chir, au début de façon modérée puis très vite de fa-     d’acides gras ou une résistance aux herbicides. Au-
çon exponentielle (projet de séquençage) les mar-         jourd’hui, la part des hybrides dans les semences
queurs disponibles. Les sélectionneurs ont alors pu       certifiées est de l’ordre de 80 % et le taux d’utilisa-
bénéficier ou générer des puces de génotypage di-         tion de semences certifiées se situe autour de 80
rectement utilisables dans le processus de création       %. Le clonage du gène de restauration Rfo, mis en
variétale.                                                œuvre avec succès dans le programme Génoplante,
                                                          a permis de fournir aux sélectionneurs des mar-
 De nombreux projets ciblés sur des caractères d’in-      queurs spécifiques performants. Ainsi la taille des
térêt majeur tels que la teneur en huile, les résis-      fragments introgressés a pu être réduite de manière
tances aux maladies ou l’efficience d’utilisation de      à éliminer des caractères négatifs apportés par le
l’azote ont générés des savoir-faire importants pour      fragment du génome du radis.
gérer les différents stress notamment, mais aussi de
nombreux QTL d’intérêt dont certains sont en cours         Actuellement, pour exploiter pleinement la préci-
de valorisation par introgression dans le matériel        sion des outils de génotypage disponibles, le phé-
génétique élite.                                          notypage devient un enjeu majeur. Les retombées
                                                          des projets actuels dans ce domaine donneront aux
 Les programmes de sélection du colza et les va-          sélectionneurs de nouveaux outils qui rendront
riétés inscrites au catalogue officiel ont aussi forte-   plus performants encore leur programme de créa-
ment évolués ces dernières années. Ce n’est qu’en         tion variétale.

                                                                                       J. Weber © INRA

                                                                                                              13
Focus 1 : Le séquençage du génome du colza
 Les ressources et outils générés par les projets colza Génoplante ont très largement contribué à l’ob-
tention d’une séquence complète et de qualité du génome du colza qui a été publiée en 2014 dans la
revue Science par un consortium d’une trentaine de laboratoires internationaux mené par la France.
Cette première mondiale permet de mieux comprendre l’organisation et le fonctionnement des gé-
nomes polyploïdes d’espèces cultivées, et constitue une ressource pour l’amélioration variétale du colza.
 Le projet SEQ-POLYNAP, catalyseur d’une initia-           entre régions homéologues.
 tive internationale
                                                           Exploitation de la séquence du génome du colza
  Un fait majeur dans l’étude du colza a été l’effort      pour l’amélioration génétique
 international consenti afin d’assembler sa séquence
 génomique complète. A l’origine, le projet SEQ-PO-         Le colza est une espèce jeune qui, accompagné
 LYNAP (ANR 2011-2014), financé principalement             d’une gestion rationnelle des ressources génétiques,
 par l’ANR avec un soutien additionnel de Sofipro-         porte encore un large potentiel pour l’amélioration
 téol, piloté par l’INRA (B. Chalhoub) et associant le     et la sélection de nouvelles variétés. Disposer d’une
 CEA (Genoscope), le CNRS et l’université d’Evry, a        séquence de référence offre de nombreuses possi-
 permis de produire les données brutes de séquen-          bilités pour identifier des gènes d’intérêt et carac-
 çage et de réaliser un premier assemblage. Par la         tériser d’éventuels polymorphismes dans ces gènes
 suite, d’autres pays contributeurs, en particulier la     entre accessions. Les projets en cours au niveau na-
 Chine et le Canada, puis l’Allemagne, les USA, l’Aus-     tional et international utilisent cette séquence de
 tralie et la Corée du Sud, ont permis d’améliorer         référence.
 significativement l’assemblage, de comparer le gé-
 nome du colza à ceux de ses progéniteurs (le chou         Participation de la France au MBGP
 et la navette), d’analyser l’expression des gènes
 dupliqués et leur régulation, et enfin de mettre les       Le séquençage du génome du colza a été coordon-
 données en accès.                                         né par la France, asseyant ainsi le positionnement
                                                           national sur la scène internationale via une parti-
 Le séquençage du génome du colza : une pre-               cipation active au Multi-Brassica Genome Project
 mière mondiale                                            (MBGP) dont B. Chalhoub (INRA) fut l’animateur et
                                                           le porte-parole en 2015 et 2016 (Fig. 3).
  Le génome du colza est le premier génome issu
 d’un polyploïde récent à avoir été séquencé et com-                                    A

 paré à ceux de ses espèces parentales diploïdes.
                                                                                        B
                                                                                        C
                                                                                        D

 Cette publication a confirmé la nature extrêmement                                     E
                                                                                        F
                                                                                        G

 complexe du génome de B. napus. L’espèce est en
 effet issue d’une hybridation récente (
Focus 2 : Une ouverture à l’international
 Sur la scène internationale, les connexions établies entre Génoplante et le programme national allemand
de génomique végétale GABI dès 2004 ont permis de renforcer les collaborations avec les principaux acteurs
publics et privés de la sélection du colza outre-Rhin, base d’une coopération européenne élargie depuis 2010
(programmes Plant KBBE, ERA-Net). S’agissant du colza, ces initiatives transnationales ont concerné l’étude des
déterminants de la réponse du colza aux facteurs biotiques et abiotiques ainsi que de la qualité de la graine.

 CompGen (GABI-Genoplante 2004-2005, Compa-              gique de la graine qui influence directement la mise
rative genomics between Arabidopsis and Brassi-          en place du peuplement. En utilisant d’une part une
ca for genes directing seed-specific flavonoid bio-      plateforme de phénotypage haut débit pour éva-
synthesis), coordonné par L. Lepiniec (INRA) et B.       luer la capacité germinative (PHENOSEM Angers)
Weisshaar (MPIZ, Allemagne), a permis d’identifier       d’un panel de 246 accessions de colza et d’autre
des gènes clés du métabolisme des tannins dans les       part un large réseau pour évaluer la vigueur germi-
graines de colza et de développer des marqueurs          native au champ (3 années de semis sur 6 lieux en
moléculaires et biochimiques pour la sélection de        Allemagne et 3 en France), le projet CONVIGOUR a
génotypes de colza à graines jaunes caractérisés         permis d’identifier des régions génomiques et des
par une teneur en huile plus élevée et un tourteau       gènes associés à la capacité germinative et à la vi-
de meilleure qualité (digestibilité). Par ailleurs,      gueur précoce, de caractériser deux métabolites
en utilisant la population de mutants RAPTILL, de        comme des biomarqueurs de la vigueur, et enfin de
nouvelles sources de colza à graines jaunes ont été      calibrer un modèle de prédiction de la levée chez le
identifiées.                                             colza (SIMPLE).

 MONARCH (Plant KBBE 2011-2014, Résistance du             GEWIDIS (Plant KBBE 2014-2017, Exploiting ge-
colza à la pourriture blanche), coordonné par B.         nome wide diversity for disease resistance improve-
Grèzes-Besset (Biogemma). Deux approches ont été         ment in oilseed rape), coordonné par R. Delourme
conduites dans le projet MONARCH pour identifier         (INRA). Le projet GEWIDIS réalise une analyse com-
et exploiter les supports de la résistance génétique     parative de l’organisation structurale et de la diver-
à Sclerotinia sclerotiorum chez le colza. Tout d’abord   sité allélique de facteurs de résistance à différentes
en utilisant Arabidopsis thaliana comme plante mo-       maladies importantes du colza en utilisant divers
dèle, des travaux de génétique d’association ont         matériels Brassica afin d’optimiser l’obtention de
permis d’identifier des gènes candidats pour la ré-      variétés multi-résistantes par l’exploitation d’une
sistance et de réaliser leur analyse fonctionnelle en    diversité génétique large. Le projet GEWIDIS a per-
exploitant les banques de mutants. Parallèlement,        mis d’identifier des régions génomiques impliquées
des travaux ont été conduits sur le colza d’hiver        dans la résistance au Phoma, à la Hernie, au Sclero-
et de printemps pour identifier des régions géno-        tinia et au Verticillium longisporum avec des allèles
miques d’intérêt par génétique d’association ainsi       originaux issus des parents diploïdes du colza
que par des approches d’analyse méta QTL en ex-
ploitant des données bibliographiques disponibles.
Finalement l’exploration de ressources génétiques
a permis d’identifier de nouvelles sources poten-
tielles de résistance.

 CONVIGOUR (Plant KBBE 2011-2015, Controlling
variation in germination and seed vigour in oilseed
rape for optimal yield stability), coordonné par G.
Leckband (NPZi, Allemagne). La vigueur germina-
tive est une composante de la qualité physiolo-

                                                                                                            15
Focus 3 : Le colza en tant qu’élément
du Programme Investissements d’Avenir

 En 2011, dans le cadre du « Grand Emprunt » pour relancer la compétitivité et la croissance au ni-
veau national, la France amorçait le Programme Investissements d’Avenir (PIA), en soutenant l’en-
seignement supérieur et la formation, la recherche, les filières industrielles et les PME, le dévelop-
pement durable et le numérique. Piloté par le Commissariat Général à l’Investissement (CGI), le PIA
a permis d’investir massivement et de façon ciblée dans la recherche et l’innovation, conférant aux
secteurs soutenus un avantage stratégique. En 2012, le projet Rapsodyn, dont l’objectif est de créer
des variétés de colza utilisant mieux l’azote tout en optimisant le rendement et la qualité de la graine
pour assurer une compétitivité durable de la culture du colza, a été lauréat de l’action « Biotechnolo-
gies et Bioressources » du PIA1, recevant ainsi une aide publique de 6M€ pour une durée de 7,5 ans.
 Rapsodyn (PIA 2012-2019, Optimisation of the          la bonne variété de colza cultivée dans un environ-
rapeseed oil content and yield under low nitrogen      nement donné pour assurer un rendement optimi-
input), coordonné par N. Nesi (INRA), est un par-      sé sur les plans agronomique, environnemental et
tenariat public-privé constitué de 16 partenaires      économique.
dont : neuf laboratoires de recherche publics (INRA,
CNRS, Inria, Irstea, des écoles d’agronomie et des      De façon plus détaillée, Rapsodyn apporte des
universités), cinq sélectionneurs, une entreprise de   connaissances sur les plans génétique, physiolo-
biotechnologies et un institut technique. Le coût      gique et écophysiologique, à l’échelle de la plante
total de Rapsodyn est estimé à 20 M€ pour une          et du peuplement, sur le fonctionnement du colza
durée de 7,5 ans. De tels moyens dédiés au colza       cultivé en condition de bas intrants, sur les gènes
se traduisent par un effort de recherche et de sé-     qui contrôlent l’efficacité d’utilisation de l’azote, et
lection sans précédent dans le but d’augmenter le      sur la diversité génétique existante chez le colza
rendement en huile et en protéines, tout en prati-     (Fig. 4). Pour cela, les modalités de croissance et de
quant une agriculture plus durable en réduisant les    développement, d’allocation et de répartition des
intrants, notamment les intrants azotés.               ressources dans la plante, d’élaboration du rende-
                                                       ment et de remplissage de la graine sont analysées
 Dans ce contexte, Rapsodyn a pour objectifs 1)        afin d’identifier des leviers génétiques et les méca-
d’optimiser le rendement et la teneur en huile, 2)     nismes optimisant le rendement en graines tout en
d’améliorer l’efficacité d’utilisation de l’azote du   assurant un niveau de qualité du produit final pour
colza, et 3) de proposer des pratiques culturales      des usages variés. Rapsodyn vise également à op-
innovantes. En d’autres termes, l’objectif est d’ap-   timiser les schémas de sélection du colza et à les
porter la bonne dose d’azote au bon moment sur         évaluer d’un point de vue économique.

                                                                                        N. Nesi © INRA

16
Nouvelles sources de diversité génétique
        Populations recombinantes résolutives (>                          QTL et gènes
        3500 ind.)                                                        Allèles favorables
        Panel de diversité génétique (~ 250 ind.)                         Marqueurs diagnostiques
        Germplasmes exotiques                                             Nouvelles pratiques culturales
        Lignées semi-synthétiques

     Production de données génomiques massives
        Reséquençage de 30 génotypes de colza
        Marqueurs SNP haute densité (> 300k SNP)                          Variétés améliorées
        Données transcriptomiques, métabolomiques                         Optimisation des pratiques de fertilisation N
                                                                          Prise en compte des interactions G×E
     Phénotypage
        Réseau de phénotypage dense en conditions de
        plein champ (40k parcelles, 7 lieux, 6 années)
        Phénotypage en conditions contrôlées
        Nouveaux outils/méthodes pour le phénotypage
        HD de la l’efficacité d’utilisation de l’azote

     Méthodologies
        Modélisation écophysiologique
        Modèle de culture (AZODYN)                                       Co-construction et co-réalisation du
        Nouvelles méthodes de sélection
                                                                         projet par le partenariat public-privé
        Evaluation économique

    Fig. 4. Représentation schématique du projet Rapsodyn

 Pour atteindre ces objectifs, un ensemble de mé-               fin du projet, une première génération de variétés
thodes innovantes est mis en œuvre comme par                    améliorées pour l’efficacité d’utilisation de l’azote et
exemple les nouvelles technologies de séquençage                le rendement. D’autres retombées sont attendues
et de génotypage haut débit pour caractériser au                telles que le rayonnement national et international
mieux les ressources génétiques disponibles. De                 de ces recherches pour la communauté scientifique,
plus, le consortium a un construit un réseau de phé-            l’enseignement supérieur et le monde profession-
notypage (40.000 parcelles) dont un site est com-               nel, mais aussi le renforcement de la compétitivité
mun avec l’infrastructure de recherche PHENOME.                 des entreprises françaises de sélection du colza et
                                                                de la filière colza.
 La durée de Rapsodyn sur 8 ans est compatible avec
la durée d’un cycle de sélection et sera obtenu, à la

                                                         Financeurs

                                                         Partenaires

                                                                                                                      17
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