8 CONSEILS DE DIRIGEANTS POUR RÉUSSIR - Modèle d'organisation et performance d'entreprise - System'c
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Modèle d’organisation et performance d’entreprise 8 CONSEILS DE DIRIGEANTS POUR RÉUSSIR SERVICES AVANTAGES ET RÉCOMPENSES
CONSEIL N°1 : DÉTECTER LE « BON » MOMENT page 5 POUR QUESTIONNER SON ORGANISATION Avec les contributions de Sébastien Béquart, Alix de Sagazan et Rémi Rochon CONSEIL N°2 : ORGANISER LES ÉQUIPES AU page 8 PLUS PRÈS DE LA RÉALITÉ DU TRAVAIL Avec les contributions de Sébastien Béquart et Rémi Rochon CONSEIL N°3 : TRANSFORMER page 11 LE MODÈLE MANAGÉRIAL Avec les contributions de Yves Gaillot, Sébastien Béquart, Alix de Sagazan et Franck Vu Hong CONSEIL N°4 : QUESTIONNER SON PROPRE page 14 RÔLE DE DIRIGEANT Avec les contributions de Rémi Rochon, SOMMAIRE Franck Vu Hong et Sébastien Béquart CONSEIL N°5 : ENRACINER LES CHANGEMENTS page 16 DANS UNE CULTURE COMMUNE Avec les contributions de Rémi Rochon et Alix de Sagazan CONSEIL N°6 : FAIRE ÉVOLUER L’ORGANISATION page 19 PHYSIQUE DES LOCAUX DE L’ENTREPRISE Avec les contributions de Rémi Rochon, Sébastien Béquart, Franck Vu Hong et Yves Gaillot CONSEIL N°7 : RETOUR SUR INVESTISSEMENT : page 22 SAVOIR SE DONNER LE TEMPS Avec les contributions de Sébastien Béquart, Alix de Sagazan, Franck Vu Hong et Rémi Rochon CONSEIL N°8 : CLARIFIER SA VISION page 25 D’ENTREPRISE Avec les contributions de Yves Gaillot, Alix de Sagazan, Sébastien Béquart, Rémi Rochon et Franck Vu Hong
ÉDITO ORGANISER LE TRAVAIL POUR ENGAGER, MOTIVER, FIDÉLISER La QVT progresse, l’engagement des salariés baisse En matière de qualité de vie au travail, les entreprises françaises ont fait des progrès ces dernières années. Selon le dernier baromètre Malakoff Médéric 2018, 73 % des Français se disent satisfaits de leur qualité de vie au travail1. Des risques persistent néanmoins, notamment « La qualité de vie au travail, c’est pour les en matière de stress et d’engagement : depuis L grands groupes ! » dix ans, la part des salariés engagés continue de diminuer, passant de 41 % en 2009 à 29 % en Les clichés ont la vie dure... La réglementation 2018. Or, l’implication, la fidélité, la motivation aurait tendance à leur donner raison : les vont souvent de pair avec des formes partenaires sociaux ont donné à la qualité d’organisation du travail participative, où les de vie au travail une existence juridique en salariés ont une réelle capacité d’influence et juin 2013, lors de la négociation de l’accord de décision sur leur travail… national interprofessionnel (ANI). En 2015, la En 2013, le rapport d’Eurofound Work loi Rebsamen du 17 août relative au dialogue Organization and Employee Involvement in social et à l’emploi a intégré au Code du travail Europe2 plaçait la France en mauvaise place en la notion de Qualité de Vie au Travail, devenant matière d’organisation du travail participative, un sujet de négociation obligatoire pour les loin derrière les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la entreprises de plus de 50 salariés. Belgique, le Luxembourg et l’Irlande. D’après Quelle que soit leur taille, petite ou grande, cette étude, la proportion des salariés qui les entreprises n’ont évidemment pas attendu déclare pouvoir influencer les décisions qui ce cadre réglementaire pour se préoccuper du sont importantes dans leur travail est faible : bien-être de leurs salariés. Au début du 20è de 31 % contre 40 % pour la moyenne des siècle déjà, elles ont commencé à s’intéresser pays de l’Union européenne. Parmi les 28 pays aux conditions matérielles du travail, posant de l’Union, seule la Slovaquie présente un score le principe selon lequel leur amélioration plus faible que la France…. contribuait à la productivité des travailleurs. Pour accompagner les entreprises depuis Des conditions de travail à la qualité de vie au plus de cinquante ans, nous les savons travail, un glissement sémantique s’est produit attentives au bien-être de leurs salariés. Nous ces dix dernières années et il n’est pas si simple observons aussi leur capacité d’innovation, pas à appréhender. uniquement en matière de produits et services La qualité de vie au travail englobe en effet destinés à leurs clients mais aussi en matière à la fois les conditions, l’organisation, d’organisation du travail. l’environnement et les relations de travail, Sodexo Services Avantages et Récompenses la conciliation des temps professionnels et a donc décidé d’aller à leur rencontre pour personnels, la reconnaissance du travail effectué, découvrir de plus près le modèle d’entreprise le climat social, l’égalité professionnelle, la qu’elles proposent à leurs collaborateurs, rémunération, le partage de la valeur ajoutée se nourrir de leurs expériences, de leurs de l’entreprise... Autant de dispositions qui interrogations, de leur succès souvent. À Paris, permettent aux salariés de se réaliser et de Lyon ou Sofia-Antipolis, 5 chefs d’entreprise, s’épanouir dans leur vie professionnelle tout évoluant en TPE et PME, nous ont accueillis avec en instaurant un climat de confiance, un générosité. Avec humilité, ils nous ont aussi environnement et une atmosphère propice à partagé de bonnes pratiques et prodigué force l’échange et au partage. conseils que nous avons décidé de partager avec vous. Ce livre blanc en est la synthèse. Nous vous en souhaitons bonne lecture et espérons qu’il sera source d’inspiration. 1 10è édition du Baromètre santé et qualité de vie au travail, Malakoff Médéric, https://malakoffmederic-humanis.com/sites/mmh-corporate/ files/2019-01/doc-0015-CP-2018-09-20-Malakoff-Mederic-Barometre-sante-qvt-2018.pdf 2 Rapport Eurofound 2013, https://www.eurofound.europa.eu/fr/publications/executive-summary/2013/working-conditions/work-organisation- and-employee-involvement-in-europe-executive-summary 3
FICHE D’IDENTITÉ DES ENTREPRISES RENCONTRÉES Dirigeants et co-fondateurs : Alix de Sagazan et Rémi Aubert Création : 2012 Activité : Solution d’optimisation des conversions des interfaces web Nombre de collaborateurs : 200 dans le monde Siège : P aris (bureaux à New-York, Londres, Sydney, Singapour, Nantes, Bordeaux) ALIX DE SAGAZAN Dirigeant et fondateur : Franck Vu Hong Création : 2009 Activité : Conseil et services en innovation digitale et transformation numérique Nombre de collaborateurs : 40 Siège : Sophia Antipolis FRANCK VU HONG Dirigeants et co-fondateurs : Sébastien Béquart et Mohamed Tazi Création : 2013 Activité : Conseil et services en qualité de vie au travail Nombre de collaborateurs : 60 Siège : Paris SÉBASTIEN BÉQUART Dirigeants et co-fondateurs : Rémi Rochon, Martin Rochon et Sylvain Denoncin Création : Entreprise familiale créée en 1993, reprise en 2008 par ses 3 co-fondateurs dirigeants Activité : Créateur de solutions d’accessibilité destinées aux personnes en situation de handicap Nombre de collaborateurs : 50 collaborateurs Siège : Champagne-au-Mont-d’Or (Lyon) RÉMI ROCHON Directeur général : Dominique Godet Directeur des ressources humaines : Yves Gaillot Création : 1928 Activité : Groupe mutualiste européen de référence en assurance et management des risques auprès des acteurs de la santé et des territoires. Relyens propose des solutions globales sur mesure au travers de ses trois marques de référence : Sham, Sofaxis et Neeria Nombre de collaborateurs : 1 000 YVES GAILLOT Siège : Lyon (équipes en France, Espagne, Italie et Allemagne) 4
Dans les petites entreprises, surtout en phase de directions prises pour le faire en matière d’organisation. Alix de Sagazan, co- création ou de développement rapide, la question de fondatrice et co-dirigeante chez AB Tasty l’organisation est rarement une priorité. Le sujet semble ne dit pas autre chose : « Notre croissance souvent prématuré et la structure s’organise au fur et a été assez rapide à compter de 2012, d’autant plus forte avec les différentes levées à mesure, faisant preuve au passage de ses capacités de fond réalisées à partir de 2014. d’ajustement. Jusqu’à ce que le besoin de structurer L’entreprise est passée rapidement de 30 à l’entreprise et de définir un modèle d’organisation du 60 puis 80 collaborateurs. Notre structuration s’est faite de manière travail apparaisse comme essentiel. Une opportunité opérationnelle par bureau et par fonction, à ne pas manquer pour aligner le projet de l’entreprise au fur et à mesure de l’arrivée des avec les moyens pour y parvenir. collaborateurs et de l’ouverture des antennes dans le monde. Nous n’avions pas de modèle C préconçu d’organisation : elle devait de toute façon bouger en permanence pour s’adapter Création d’entreprise rime-t-elle avec de nouveaux clients, les chiffres décollaient. à la croissance. » Impossible de se structurer organisation ? Rien n’est moins sûr. Les Quand il nous est arrivé de nous poser la quand l’entreprise bouge vite ? « En quelque premières années sont vécues par le ou les question des ressources, ce n’était pas du sorte, oui ! Nous avions l’impression que dirigeants, et à juste titre, comme une point de vue de leur organisation mais de l’organisation ne pouvait pas être figée parce course de fond, où il faut tout faire et tout leur existence : avait-on assez de stagiaires que tout allait trop vite » confirme la co- faire bien. La priorité reste évidemment celle dirigeante. pour nous épauler ? Avait-on de la marge du business : faire rentrer de nouveaux financière pour embaucher un nouveau clients, tout en gardant un œil attentif sur Passage de cap : quand collaborateur ? Nous avancions un pas après les clients acquis que l’on cherche à fidéliser. l’organisation s’impose Le dirigeant s’investit corps et âme dans l’autre, sans forcément bien regarder la manière dont nous progressions. » Et pourtant, chaque entreprise est amenée la dynamique commerciale mais ne doit un jour à s’interroger. Dans des contextes pas oublier de suivre de près la fonction L’entreprise bouge trop vite qui diffèrent toujours. Chez AB Tasty, ce « production », souvent assortie d’une fut la taille de l’entreprise, le fameux cap fonction technique dans les start-up… pour pouvoir la structurer des 100 collaborateurs, à partir duquel il Sébastien Béquart, co-fondateur et co- Pour bon nombre de structures, n’est plus possible pour les dirigeants de dirigeant de Gymlib se souvient : « au l’organisation se réalise effectivement garder le contact avec l’ensemble des départ, nous avions peu de recul sur la chemin faisant, sans conscience claire des problématiques. Chez Gymlib, ce fut un manière dont on le faisait. Nous rentrions changement de business model. L’un de ses dirigeants explique : « En 2015, nous avons décidé de pivoter : nous avons quitté notre positionnement de spécialiste du sport en BtoC pour aller vers un positionnement plus large de prestataire de service en Qualité de Vie au Travail, pour le seul segment du BtoB. En tant que spécialiste de la QVT, nous nous devions aussi d’être exemplaires en interne. Nous en avons profité pour enclencher une nouvelle dynamique en 2017 et interroger en profondeur notre modèle d’organisation et de management, en nous centrant sur les collaborateurs et la manière de les faire travailler ensemble. » Il n’y aurait donc pas de bons moments ou mauvais moment pour interroger l’organisation de l’entreprise ? « On a toujours mieux à faire, c’est vrai ! En fait, la question arrive naturellement ou pas. Chez nous, la question s’est aussi imposée quand on a commencé à voir que les personnes qui travaillaient chez nous étaient 6
moins motivées, qu’on risquait de perdre en efficacité, en performance » note Reprise d’entreprise : quand reprenions pour pouvoir la faire grandir Sébastien Bequart, co-dirigeant de Gymlib. et l’emmener ailleurs… Nous étions la réorganisation n’est pas L’organisation de l’entreprise serait donc convaincus en parallèle que le digital allait source de performance ? Reste à savoir une option révolutionner beaucoup de choses et ouvrir comment… Dans le cas d’une reprise d’entreprise, les de nouveaux horizons. Quelle serait notre dirigeants héritent d’un passif qui, par contribution ? Pour nous, une partie de définition, n’est pas le leur. Rémi Rochon, la réponse était dans le modèle « Organiser co-dirigeant de l’entreprise OKEENEA, se d’organisation que nous allions proposer l’entreprise : souvient : « avec mon frère et un ami, à nos collaborateurs. » L’heure du modèle nous avons repris l’entreprise familiale il un impératif y a 10 ans. C’était une entreprise très de construction verticale de l’entreprise, quand l’entreprise classique qui tournait bien mais n’était avec son lot de chefs et de sous-chefs, avait sonné… passe un cap » pas appelée à se développer très fortement. D’emblée, nous avons su que nous la 7
Quelle que soit leur taille et leur secteur d’activité, les personnes sont forcément des opérationnels qui participent aux décisions stratégiques. entreprises que nous avons rencontrées innovent à partir Sébastien Béquart : De notre côté, nous d’une volonté commune : tester des transformations avons un fonctionnement différent mais organisationnelles qui permettent d’agir sur la qualité d’inspiration proche, notamment en termes du travail avec les collaborateurs. Dans tous les cas, d’approche agile. Nous avons conservé une organisation par service assez classique, cette réflexion passe par la nécessité d’évoluer vers avec un responsable-manager à la tête de une organisation souple, la création d’équipes dédiées chacun. Chez nous, la direction fixe les objectifs financiers globaux. Ensuite, les liées à des projets bien identifiés, au plus près des équipes travaillent en groupes et en sous- besoins du terrain et des clients. Une manière de faire groupes pour décider du chemin à suivre comprendre que l’organisation de l’entreprise doit pour atteindre les objectifs. Pour l’animer, on s’inspire de la méthode des Objectives servir prioritairement le client externe plus qu’interne... and Key Results3 qui a par exemple été mise Mais que les deux peuvent se rejoindre. Pour autant, en place chez Google. Au-delà des sujets stratégiques, nous mettons également en ces entreprises gardent certains codes classiques des place chez Gymlib, comme chez OKEENEA, organisations traditionnelles. Ainsi Aepsilon comporte une organisation en mode projet : chaque collaborateur peut en prendre le lead et 4 grands pôles métiers : projets clients, ressources accompagner la formulation de plans humaines, finances, technique. Gymlib a aussi adopté ce d’action au sein de son groupe. type d’approche, à l’instar de Relyens ou d’AB Tasty. Elles Quel est l’intérêt de ce mode ont toutes pour souhait de vouloir ouvrir au maximum d’organisation ? les portes entre les équipes, de casser les silos, sources RR : Chacun a sa place et contribue à tous de trop fréquentes frustrations pour libérer les énergies les échelons de l’organisation. Cela induit de chacun. Écoutons les explications croisées de Rémi aussi une grande responsabilisation des individus. Le projet n’est pas leadé par un Rochon d’OKEENEA et Sébastien Béquart chez Gymlib. manager mais par le responsable du projet qui pilote la dynamique de groupe. Les décisions se prennent au plus près de l’action. Ce qui signifie que les opérationnels Comment avez-vous ont un rôle aussi important que les fait évoluer l’organisation managers. Cela libère beaucoup les énergies. Le rapport hiérarchique de vos entreprises ? traditionnel s’efface au profit d’une Rémi Rochon : Notre organisation est très organisation par expertise, ce qui est opérationnelle et limite au maximum les beaucoup plus épanouissant. Une fois le fonctions d’encadrement. Elle est centrée sur projet bouclé, l’organisation en mode projet les besoins du client et les projets, en mode est dissoute et peut laisser la place à la agile. Nous partons de ce qu’il nous exprime construction d’autres équipes. et nous essayons d’apporter un maximum SB : Cette manière d’organiser le travail a de valeur ajoutée dans la réponse que nous lui formulons. Concrètement, pour tout « OKEENEA repose plusieurs intérêts. En interne, elle contribue à une meilleure appropriation des décisions nouveau besoin, nous réunissons sur le sur une culture dans les équipes, une meilleure cohésion. principe du volontariat les profils de du faire » Tout le monde travaille dans le même sens, l’entreprise qui ont des choses à apporter et Rémi Rochon la direction donnant seulement une à construire ensemble. Pour garantir orientation mais n’arbitrant pas sur le l’efficacité de la méthode et faire qu’elle déploiement. Vis-à-vis du client, nous débouche sur le meilleur résultat et dans des capitalisons sur ce qui existe en l’adaptant sommes également convaincus qu’en temps réalistes, nous utilisons des outils bien à notre projet. OKEENEA repose sur une travaillant en collectif, la qualité de la connus et qui nous ressemblent pour culture du faire, portée par les « vrais gens ». réponse est meilleure. Il n’est plus question travailler en cycle court et par itération : la C’est aussi le cas de notre comité de direction chez nous de laisser croire à quiconque méthode Kanban, le fonctionnement Scrum, qui se réunit une fois par mois et comporte qu’une personne puisse résoudre seule une le lego, les outils de partage comme Trello 8 personnes, dont 4 permanents et 4 problématique client. ou Slack. Nous n’inventons rien mais « intermittents ». Dans notre modèle, ces 4 3 Méthode selon laquelle les objectifs et les résultats clés constituent un cadre pour la définition et le suivi des objectifs et de leurs résultats. Plus d’informations sur https://en.wikipedia.org/wiki/OKR 9
Existe-t-il une limite à ce type de fonctionnement ? Organisation agile n’est pas L’agilité s’appuie sur de nombreux outils et méthodes. Trois d’entre eux ont été organisation sans fil ! RR : S’il en existe une à priori, selon moi, cités par les entreprises que nous avons c’est la culture financière propre à chacun. Plus qu’une méthode, l’agilité est une rencontrées : On ne peut pas leader un projet et créer de approche, une posture de travail qui a -- la méthode des OKRs (Objectives and la valeur pour le client et pour l’entreprise pour base la volonté d’assouplir la gestion Key Results) : elle fixe des objectifs sans avoir un minimum de compétences de projet afin d’en optimiser les avancées ambitieux définis à tous les niveaux de partagées sur le sujet. Raison pour laquelle durant toute la vie de celui-ci. L’état l’entreprise, de façon trimestrielle. Ils nous insufflons cette culture pour faire d’esprit agile lutte contre la planification sont facilement mesurables et doivent monter les équipes en compétences et pour rigide et l’enfermement contractuel dont être visibles par l’ensemble de que l’on ait tous les mêmes clés de lecture. sont victimes de nombreux projets. Il l’entreprise. Nous sommes convaincus que tout est laisse place à la créativité et à l’adaptation -- la méthode Kanban : système visuel possible en matière d’organisation, du des équipes et du client. Les objectifs sont de gestion de projet, qui se base sur moment que cela produit de la valeur. Mais plus nombreux et permettent de valider l’amélioration continue (Lean), inspiré il faut s’entendre sur ce terme de valeur… chaque étape avant de fixer les suivants. du secteur automobile japonais. L’approche Agile se veut ainsi être au plus -- la méthode Scrum : dédiée à des « Nul ne peut proche de la réalité opérationnelle et projets complexes, son objectif phare résoudre seul répondre au mieux aux aléas quotidiens. est d’améliorer la productivité des une problématique équipes, tout en permettant une optimisation du produit grâce à client » des feedbacks réguliers du marché. Sébastien Béquart D’autres outils se réclament de l’agilité. SB : Je ne vois pas de limite, mais je fais Aucun ne convient d’emblée à toutes les le constat que travailler en collectif entreprises. Essayez-les avant de les demande beaucoup de temps. Avec mon déployer ! associé Mohamed, nous en dégageons beaucoup pour écouter les collaborateurs, montrer qu’on a confiance en eux. Pour les faire monter en compétences également comme l’indique Rémi. 10
CONSEIL N°3 TRANSFORMER LE MODÈLE MANAGÉRIAL 11
Dans le dernier sondage Anact-Kantar TNS-Grandes les fonctions de chef d’orchestre. Il a pour mission de leader les équipes, de les amener écoles4, 92 % des tops-managers et 97 % des futurs à donner le meilleur d’elles-mêmes, de managers et ingénieurs estiment que les pratiques réunir les bonnes compétences autour des projets, tout en restant centré sur les managériales doivent évoluer pour s’adapter aux objectifs de l’entreprise. évolutions de la société et répondre aux enjeux des organisations. Rien d’étonnant à ce que les entreprises Un glissement important s’opère donc dans la fonction managériale qui dénote que nous avons visitées et qui innovent en matière fondamentalement un changement profond d’organisation du travail réinterrogent en profondeur la de culture que met bien en perspective Yves Gaillot chez Relyens : « en revisitant le rôle fonction du manager dans leur structure. du manager, nous montrons que nous sortons de la seule logique de production, d’exécution et d’encadrement pour passer à une nouvelle logique d’attachement à l’entreprise, qui est source d’engagement hiérarchique et de satisfaction pour les collaborateurs. » Chez Relyens, le manager se voit confier trois missions clés : accompagner ses salariés dans leur développement, favoriser la collaboration entre les équipes, développer l’autonomie individuelle. Consciente des enjeux, l’entreprise a souhaité accompagner ses managers sur ce chemin de transformation : « nous avons associé nos managers très en amont de ce chantier. Il ne s’agissait pas de leur imposer un nouveau modèle mais de les amener eux-mêmes à en dessiner les contours sur plusieurs mois. E Cette dynamique participative est très importante pour nous : elle conditionne En réorganisant le travail au plus près de la dont la mission consiste à diriger les l’implication et la satisfaction finale de réalité du terrain et des besoins de leurs collaborateurs, les contrôler et les évaluer en chacun. Nous avons mis en place du clients, dans une étroite proximité avec les fonction des objectifs fixés par la direction » coaching individuel ponctuel ou sur la durée opérationnels, les structures que nous avons précise Sébastien Béquart chez Gymlib, dont pour les aider à faire évoluer leur manière rencontrées font évoluer un maillon clé de les propos pourraient être repris à l’identique d’appréhender leur rôle par exemple. Nous l’organisation de l’entreprise en France : le chez Relyens, AB Tasty, Aepsilon et avons aussi mis à leur disposition de manager. À quoi sert ce dernier si les OKEENEA. nouveaux outils comme des techniques de collaborateurs sont eux-mêmes à la source management visuel pour aider à l’animation de l’organisation du travail ? Si l’équipe projet Le manager devient de la vie d’équipe. » asssocie par elle-même les compétences qui un coach, un facilitateur, seront nécessaires à sa conduite ? C’est la Aujourd’hui, la mutation est déjà bien fonction du manager et du management un chef d’orchestre engagée chez Relyens. L’organisation de que ces entreprises interrogent en Dans ces entreprises, le manager a mué l’entretien annuel est à cet égard exemplaire profondeur : « le modèle pyramidal n’est vers des fonctions plus proches de celles du renversement des rôles entre le manager plus le nôtre » explique Yves Gaillot, Directeur du coach : chez AB Tasty, Alix de Sagazan et le collaborateur : c’est le salarié qui fait des Ressources Humaines chez Relyens. explique que les managers sont « plutôt des son auto-évaluation et décide de ses « Nous avons définitivement tourné la page facilitateurs au service de l’équipe objectifs pour l’année à venir. Une manière de managers placés en râteau sous un même opérationnelle. Ce sont des référents dont de redonner du pouvoir de décision au directeur ». Est-ce la fin du management les missions consistent à faire grandir les collaborateur, sous le regard à la fois pour autant ? D’une certaine forme de collaborateurs et faire remonter les points clairvoyant et bienveillant de son manager. management certainement : « nous avons de blocage, les questionnements ». Chez La proximité avec les collaborateurs abandonné le modèle du manager contrôlant, Gymlib, le manager se voit aussi ajouter constitue d’ailleurs pour les entreprises 4 Sondage Anact-Kantar TNS-Grandes Ecoles 2017, https://fr.calameo.com/read/0000881551531c5f375e7?authid 12
rencontrées l’une des conditions partagées de réussite à cette transformation. Chez AB Tasty par exemple, le manager travaille avec des équipes resserrées de 6 ou 7 personnes pour ne pas perdre en agilité. « Le manager est remplacé Tout en changeant de fonction et de par un influenceur. périmètre d’intervention, le manager reste dans ces entreprises un acteur clé de la Chaque salarié se choisit structure et du projet qu’elle porte. Des exceptions existent, comme chez Aepsilon deux influenceurs. qui a fait disparaître en tant que telle la Le trinôme fonctionne en totale fonction managériale (voir encadré). Ce qui serait proprement inconcevable chez autonomie. » Gymlib ou chez Relyens. Franck Vu Hong. UNE ORGANISATION CENTRÉE Entreprise libérée SUR UNE CONSTELLATION DE RELATIONS ou holacratie, 3 questions à Franck Vu Hong, co-gérant d’Aepsilon quezako ? Votre entreprise a supprimé de son organisation l’échelon managérial. Les chefs d’entreprise que nous avons Comment êtes-vous arrivé à cette approche ? interviewés visent tous à transformer le Pour moi, l’organisation tayloriste du travail, qui façonne encore notre culture, carcan organisationnel qui enferme et a totalement vidé le travail de sa substance. Même si on cherche à lui redonner étiole trop souvent leurs collaborateurs. du sens pour qu’il soit source d’accomplissement, on retourne invariablement Pour autant, aucun d’entre eux ne se à un rapport au travail frustrant, avec des managers qui finissent par revenir à réclame des modes d’organisation une posture d’autorité. Ce qui veut dire qu’il faut changer le rapport au travail poussés sous les feux des projecteurs et pour cela intervenir sur la manière dont le travail se réalise. par la presse spécialisée et la planète RH dans son ensemble : l’holacratie ou Quel modèle préconisez-vous ? Celui de l’entreprise libérée ? l’entreprise libérée pour l’essentiel. Ces Aucun ! Nous avons mis en place chez Aepsilon un système, au sens de concepts leur sont connus, comme ceux mécanique de fonctionnement, qui n’est valable que pour notre entreprise et du management responsable ou du flat vise l’accomplissement des salariés. Au lieu de mettre en place des managers, management, et ont nourri leur désignés par des responsables qui lui affectent des équipes, on a inversé le inspiration. propos : chaque collaborateur est évalué et encadré par deux pairs de l’entreprise qu’il s’est lui-même choisis, que nous appelons des influenceurs, partant du Pour comprendre et différencier les deux constat que la confiance ne se décrète pas. Le trinôme décide ensemble de approches, nous dirons que l’holacratie l’évolution de la personne, des projets sur lesquels il travaille, de son organisation (lieu, temps de travail, salaire, plan de formation)… Le trinôme jouit d’une est un modèle préétabli, une technologie liberté pleine et entière d’animation et de décision dans le respect de 3 règles de libération des organisations qui ne sont pas négociables : l’unanimité de décision, la qualité de service modélisées qui prend la forme d’une rendue aux clients et le respect de la pérennité financière de l’entreprise. Ce boîte à outils alors que l’entreprise libérée qui implique une grande transparence de la part de la direction, notamment est un état d’esprit qui invite chaque dans les composantes financières. organisation, selon ses besoins, à librement adapter une philosophie qui C’est finalement une approche très individualisée de l’organisation se fonde sur la conviction que l’homme de l’entreprise ? est digne de confiance. Une fois ces Complètement ! C’est une approche centrée sur l’individu et sa satisfaction. concepts explicités et compris, le plus Avec comme levier le principe de responsabilité pleine et entière. Un collaborateur difficile reste comme toujours à faire : qui formule une demande le fait parce qu’il juge qu’elle va dans le bon sens. convaincre, mettre en œuvre ! Ou tracer L’influenceur la valide uniquement s’il estime que la demande est légitime son propre chemin comme Franck Vu pour l’entreprise et respecte nos règles. N’oubliez pas que le trinôme n’est pas Hong : « toute étiquette est contraire à fermé sur lui-même. Chaque influenceur est aussi un collaborateur qui a ses notre démarche qui est par essence propres influenceurs. Ce système aboutit à une constellation de relations qui n’impose rien, s’autocontrôle et fonctionne en intelligence collective pour créer singulière et sur-mesure. » de la valeur. 13
CONSEIL N°4 QUESTIONNER SON PROPRE RÔLE DE DIRIGEANT 14
Si le manager est un facilitateur, doté de missions exemple . Autrement dit, c’est parce qu’une direction, pour ne pas dire LA direction, est différentes mais qui restent clé dans bon nombre de présente que la liberté d’organisation est structures, si l’entreprise s’organise par elle-même, avec possible et peut ensuite s’exprimer. ses salariés, autour de la réalité du travail à accomplir, Diriger : exercer un quel est le rôle du dirigeant ? Contrairement aux management non contrôlant ? apparences, sa légitimité n’est pas remise en cause dans Le dirigeant du 21è siècle serait donc à ce type d’organisation, bien au contraire, puisqu’elle l’opposé de la définition qu’on on a est l’occasion pour le dirigeant de se concentrer sur sa longtemps donnée dans les écoles de commerce notamment : « le chef propre expertise… de dirigeant ! Un lâcher-prise pas d’entreprise assure des tâches très toujours facile à opérer… différentes les unes des autres, allant du management à la gestion, en passant par le marketing, la logistique ou l’organisation ». Sébastien Béquart apporte une autre obsolète » met en exergue Rémi Rochon chez définition : « chez Gymlib, avec Mohamed OKEENEA. « D’ailleurs, au terme de dirigeant, mon associé, nous avions l’habitude je préfère celui de leader. Son rôle n’est pas d’intervenir partout et tout le temps, de de tout savoir pour tout diriger justement. donner notre avis sans qu’on nous le Mais de montrer la voie, d’orienter vers les demande. Notre changement de modèle priorités qu’il sait être stratégiques. C’est nous a obligés à évoluer. Il nous a fallu laisser parce qu’il est capable de donner ces les équipes et les managers prendre leur directions que les pratiques de co- décision, les faire monter en compétences, développement ou d’intelligence collective les laisser se tromper aussi parfois. Nous sont efficientes. Sans direction claire, il n’y avons dû apprendre à exercer un a pas de décision, c’est le consensus mou et management non contrôlant. Et finalement, très vite, c’est l’immobilisme, voire la ce sont nous, les dirigeants, qui ont peut- paralysie » s’exclame Rémi Rochon. Franck être eu le plus de mal à nous adapter à cette Vu Hong, gérant d’Aepsilon ne le démentirait nouvelle approche. » Ce qui suppose, pas, lui qui estime qu’ « il n’est pas possible autrement dit, d’arriver à déléguer d’être expert en tout, au risque sinon d’être pleinement et de mettre son besoin d’affirmation - et ses angoisses - de côté. Q expert en rien ! » De se transformer soi-même pour pouvoir Qu’est-ce qu’un dirigeant « nouvelle transformer sa structure. Qu’est-ce que diriger une entreprise qui formule » dans ces structures innovantes ? évolue vers une organisation plus L’unanimité se dégage assez vite autour participative ? La question est d’autant plus d’une définition finalement simple : le ou légitime quand on observe dans certaines les dirigeants sont ceux qui ont la plus forte structures les salariés retrouver réellement expertise stratégique naturellement. « Piloter du pouvoir de décision et d’action, tout en une boîte est technique : cela demande un étant accompagnés par leur manager à niveau d’études poussé, une capacité engager cette mutation. Les chefs d’entreprise que nous avons rencontrés se d’engagement et d’intensité forte, de solides questionnent : quelle est leur mission et compétences financières. Tous les leur périmètre d’intervention dès lors que collaborateurs n’en sont pas capables. Chez l’ensemble de leur structure évolue, tout OKEENEA, on assume complètement la en responsabilisant davantage les prévalence des dirigeants sur ces sujets. » collaborateurs ? Au sein d’Aepsilon, Franck Vu Hong partage ce point de vue, considérant qu’il est force Le leader omniscient a vécu de propositions sur les objectifs financiers de l’entreprise, sans en décider complètement Les dirigeants questionnés remettent tous seul, mais en lien avec les autres expertises en cause le principe du leader omniscient : métiers complémentaires que sont les « cette approche est complètement ventes, la technique ou le marketing par 15
CONSEIL N°5 ENRACINER LES CHANGEMENTS DANS UNE CULTURE COMMUNE 16
Plus les organisations innovent en matière d’organisation Principe n°3 : la transparence. À tout niveau, chacun joue carte sur table et plus elles semblent disposées à développer et faire pour permettre les bonnes prises de vivre une culture d’entreprise singulière et forte. décision. Cela implique une forte transparence en matière de communication Et c’est tout sauf un hasard : cette dernière repose financière et une culture du résultat souvent sur des valeurs humaines - confiance, partagée à tous les niveaux. responsabilité, transparence, autonomie - qui scellent Principe n°4 : l’exemplarité. en quelque sorte le contrat moral passé avec l’ensemble Chacun se remonte les manches et apporte sa valeur ajoutée dans la construction et des parties prenantes internes. Cette culture est plus ou le vivre ensemble d’entreprise. moins théorisée dans les différentes structures que nous avons visitées, mais s’incarne presque partout dans des « Tout cela peut sembler théorique » explique Rémi Rochon. « Pourtant, ça ne rites du quotidien. l’est pas du tout. Ces principes sont ceux Gros plan sur OKEENEA et AB Tasty. qui rendent possible et efficace une nouvelle organisation du travail, ils servent de fondation à la construction de l’édifice. Ils conditionnent l’existence d’un nouveau rapport au travail, où l’épanouissement de l’individu est possible. » Au quotidien, les dirigeants d’OKEENEA rendent également ces principes concrets et tangibles par une mécanique d’événements tout au long de l’année. « Les temps festifs sont encore ceux qui marchent le mieux pour ancrer durablement une culture d’entreprise et rendre tangibles les valeurs auxquelles nous croyons. Nous avons ouvert le bal en 2012 avec un séminaire rassemblant tous les collaborateurs sur l’importance du plaisir dans le travail, puis un challenge sur l’identité de l’entreprise. On a aussi actionné des actions de formation pour amener les salariés à mieux se connaître eux-mêmes et mieux travailler avec les autres. Cette thématique a été reprise sous d’autres formes ensuite, par exemple avec du théâtre d’improvisation. La culture d’entreprise OKEENEA, est très orientée autour du bien vivre ensemble. On en profite tous, donc on participe tous ! ». OKEENEA : une culture Principe n°1 : la confiance. Chaque collaborateur a confiance en ses commune pour cimenter un capacités et en celles des autres. nouveau rapport au travail Principe n°2 : la responsabilité. Chez OKEENEA, la culture commune repose Chaque salarié s’investit dans l’entreprise sur des principes qui ont été clairement avec les compétences dont il dispose et identifiés au préalable et autour desquels assume la contribution qui est la sienne toute l’équipe se retrouve pour travailler au dans le développement de la structure. quotidien. 17
« LA CULTURE D’ENTREPRISE EST UN LEVIER DE PERFORMANCE INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE » 3 questions à Alix de Sagazan, co-fondatrice et co-dirigeante d’AB Tasty En quoi consiste la culture d’entreprise chez AB Tasty ? des événements fédérateurs pour favoriser la cohésion. On « Avec un management très responsabilisant et la volonté investit beaucoup sur le sujet à travers notre séminaire annuel, d’autonomiser les collaborateurs dans l’organisation du travail autre exemple, qui réunit l’ensemble des collaborateurs, ou de de nos différentes agences dans le monde, il nous a semblé manière plus simple dans le « Big up » du lundi où chaque important de clarifier les valeurs que nous devions tous porter équipe partage ses succès et ses échecs pour apprendre les uns pour faire grandir le projet AB Tasty dans la bonne direction, des autres. On soigne aussi beaucoup l’accueil de nouveaux quelle que soit la culture locale et le fuseau horaire. Elles sont collaborateurs : chacun est accueilli en immersion durant une au nombre de 4, nous ne devons pas les perdre de vue dans semaine à Paris. » notre quotidien : la satisfaction des clients comme des équipes, l’innovation, la bienveillance, l’esprit d’équipe. » Qu’attendez-vous de cette dynamique événementielle ? « La culture commune permet bien sûr de s’assurer qu’on travaille Comment vous assurez-vous de la bonne transmission tous dans la même direction. Chez nous, c’est un levier de de ces principes ? performance individuelle et collective : pour être efficace dans « Nous avons créé un poste de Culture Officer non pour en être son travail, il ne suffit de l’aimer, de savoir où l’on nous demande le garant, chacun devant intégrer cette culture dans son d’aller. Il faut aussi un environnement porteur. La culture quotidien, mais pour faire vivre la dynamique à travers des d’entreprise joue à cet égard un rôle décisif. » événements toute l’année et souvent dans un format convivial. C’est dans ce cadre par exemple que l’on a impulsé des challenges de bienveillance sur notre outil collaboratif Slack, qu’on organise 18
CONSEIL N°6 FAIRE ÉVOLUER L’ORGANISATION PHYSIQUE DES LOCAUX DE L’ENTREPRISE 19
Cloisons, nombre et disposition des bureaux… Rémi Rochon, co-dirigeant d’OKEENEA. Les équipes ont renoncé au « dynamic office », L’organisation physique des locaux peut paraître ayant trouvé une organisation du travail accessoire. Elle ne l’est pas quand l’entreprise s’engage qui installe de manière durable les collaborateurs dans l’agilité et le mouvement. dans un nouveau modèle d’organisation du travail et des équipes, a fortiori quand il s’agit de redonner de Des bureaux qui s’adaptent l’autonomie aux collaborateurs et de faire évoluer le rôle aux équipes et pas le des managers. Quel écrin sera en effet le plus approprié contraire ! pour accueillir cette nouvelle manière de délivrer Même son de cloche pour Gymlib, chez qui les locaux doivent pouvoir s’ajuster à la le travail ? Sur ce sujet là aussi, la réponse n’est pas réalité du travail et aux différents moments univoque, même si les entreprises interrogées s’accordent de la journée. Son dirigeant, Sébastien à dire que le bureau fermé individuel a vécu au profit de Béquart, explique que dans son entreprise, « les équipes travaillent en open-space vitré, l’open-space. Mais de quel open-space s’agit-il ? complété par des salles de travail, des box Éléments de réponse avec Rémi Rochon, Sébastien individuels, des salles de convivialité et même Béquart, Franck Vu Hong et Yves Gaillot. une salle de sieste ! Nous n’avons pas mis en place de « clean desk », les collaborateurs nous ont indiqué qu’ils préféraient pouvoir personnaliser leur environnement. Pour autant, les équipes sont amenées à bouger de temps en temps sur le plateau, pour apporter du renouveau, sans en abuser. » Un autre critère préside à l’organisation physique des bureaux : il part du constat selon lequel le confort des uns n’est pas celui des autres. Certains apprécient de travailler debout, d’autres pas du tout. Dans les petites équipes, l’organisation spatiale la plus efficace est celle qui part du besoin des salariés, tel qu’ils l’expriment. Chez Aepsilon par exemple, les équipes ont eu le choix de s’approprier l’espace de travail comme elles le souhaitaient. Son gérant n’a pas de bureau attitré, il travaille au milieu des équipes, alors que certains collaborateurs disposent de postes individuels… Le bureau est un outil de travail ; comme tout équipement, il doit pouvoir s’adapter à son usager. Et pas le contraire ! Ce qui suppose des espaces une grande modularité, pour pouvoir les faire évoluer et les recomposer au gré des besoins des équipes et des projets dans le temps. L L’open-space est devenu la norme, ou presque. Le concept est même un peu daté : aujourd’hui, on parle de « dynamic office » qui désigne des espaces de travail organisés sur des plateaux plus ou moins vastes et sans poste attitré (aussi appelés « flex- et d’interagir entre les salariés. Est-elle pour autant la modalité la plus appropriée aux objectifs des entreprises ? Allons plus loin : y-a-t-il une organisation idéale des locaux ? « La priorité chez nous est de créer un cadre riche en espaces fonctionnels, adaptés à « L’organisation des bureaux contribue à notre volonté de libérer les énergies et de redonner du office » ou « clean desk »). Ce type d’approche permet de rationnaliser la consommation chaque cycle de travail, qu’il soit individuel pouvoir de décision d’espace et donc la facture immobilière. Mais ou collectif. Nous avons ainsi créé des box aux collaborateurs. » pour pouvoir s’isoler, une salle créative, des elle impacte aussi la manière de travailler salles de réunion, un open desk » explique Yves Gaillot 20
« DES LOCAUX REDESSINÉS AU PROFIT D’UNE APPROCHE COLLABORATIVE DU TRAVAIL » 3 questions à Yves Gaillot, Directeur des Ressources Humaines de Relyens Dans quel objectif avez-vous initié la transformation des bureaux de votre siège lyonnais ? Le groupe est installé dans ce bâtiment depuis le début des années 2000, bâtiment de 6 étages qu’il possède mais dont il louait environ 40 % de la surface à une autre société. La croissance du groupe et de ses effectifs nous a amené à nous questionner lorsque cette autre société a souhaité déménager. En effet, la dynamique de construction de Relyens passait par le développement de la collaboration et des coopérations. Il nous fallait donc des espaces de travail favorisant cette dynamique. Nous pressentions que cela serait un environnement de travail propice à aller plus loin dans notre transformation culturelle quelques années plus tard. Quels ont été vos partis-pris ? L’un des axes forts a consisté à retrouver de la capacité pour se réunir davantage, sans pour autant que cela créé de la complexité. Cela veut dire que nous nous sommes étendus en occupant l’espace libéré par le précédent locataire, à taille d’équipes à peu près constante. Il fallait ouvrir au maximum les espaces tout en conservant une capacité à se réunir, s’isoler Relyens est présent sur plusieurs sites en France mais de manière spontanée. Nous avons ainsi créé des salles de aussi en Europe. Votre réflexion sur l’organisation de toutes tailles : salles de réunions, salles de travail, box, espace l’espace de travail dépasse-t-elle nos frontières ? de co-working, espace de détente… Ils sont en nombre suffisant Évidemment, même si elle n’est pas achevée partout, la à l’heure actuelle pour que les collaborateurs en profitent sans dynamique est commune à toutes les équipes. Nous voulons avoir nécessairement besoin de réserver. installer durablement une nouvelle manière de travailler. Cela Ensuite, au sein des étages, nous avons positionné les métiers passe prioritairement par un changement de culture et de mode et les équipes selon leurs besoins, en fonction des flux réels de de management. L’organisation des locaux doit aussi porter travail et des interactions. La direction générale est placée par cette approche : les locaux ne sont qu’un outil, mais un outil exemple au milieu du bâtiment, au plus proche des équipes essentiel à la diffusion de l’approche collaborative du travail commerciales. La DRH et la communication ont été installées que nous souhaitons impulser. au plus près des espaces collectifs où se retrouvent les collaborateurs : la cafétéria a elle-même été agrandie et revisitée. C’est pour nous un lieu stratégique de partage des informations. Enfin, les bureaux individuels attitrés ont tous disparu, y compris pour notre directeur général. La possibilité est laissée aux équipes de se regrouper par métier si elles le souhaitent. Certaines l’ont fait, d’autres ont une approche complètement nomade et profitent des grandes tables de co-working partagées. 21
CONSEIL N°7 RETOUR SUR INVESTISSEMENT : SAVOIR SE DONNER LE TEMPS 22
Plus la structure est importante en nombre de management. Séminaires, rencontres informelles, lectures, participation à des collaborateurs, plus il faudra du temps pour faire évoluer conférences, aucun ne ménage son temps. son organisation, ses modes de faire et toucher les fruits du changement… La performance est nécessairement protéiforme en termes de croissance du chiffre d’affaires. Les gains Le déploiement de la transformation auprès sont souvent d’abord perceptibles ailleurs, dans la des collaborateurs nécessite également capacité à innover, à servir autrement le client, à réagir parfois des temps de formation ou temps plus vite. Et puis un jour cela s’incarne comme une d’accompagnement (voir page 12) qui s’imputent directement au bilan financier évidence dans les lignes d’un bilan ! de l’entreprise. Et en entreprise, tout investissement nécessite d’être rentabilisé. À en croire de nombreuses études dont celle célèbre de Harvard/MIT diffusée en 20155, les salariés heureux sont deux fois moins malades, six fois moins absents, neuf fois plus loyaux, 31 % plus productifs, 55 % plus créatifs. So what ? Dans le monde de compétitivité et de recherche de rentabilité qui est le nôtre, les chefs d’entreprise que nous avons rencontrés incitent à la patience et se veulent rassurants. À l’unanimité, ils estiment que le retour sur investissement existe et s’exprime de différente manière, selon le temps d’observation que l’on se donne et la définition que l’on veut bien donner de la performance : elle peut s’évaluer évidemment en termes de résultats économiques à court, moyen et long-terme, mais aussi en termes de qualité de service rendu aux usagers ou aux clients, en termes d’efficience, ou encore de capacité à innover… La notion de performance est par nature protéiforme. I L’entreprise dans son ensemble monte en gamme Interroger la manière dont le travail se a été pour nous une grande source et prend de la valeur réalise dans l’entreprise, vouloir le faire d’inspiration et de conseils. De la même Cette vision élargie de la performance évoluer, engager sa transformation a un façon, nous avons beaucoup réfléchi sur ces permet de voir de premiers indicateurs coût pour l’organisation. Et ce dernier se sujets avec les fonds d’investissements qui passer au vert : des indicateurs internes chiffre d’abord en temps passé avec les sont rentrés progressivement à notre d’abord. Franck Vu Hong, chez Aepsilon, a équipes en interne, parfois aussi en capital. » Certains chefs d’entreprise ressenti très vite les bénéfices à travers le consultation externe. Bref en énergie n’hésitent d’ailleurs pas à se faire plaisir que prenaient les collaborateurs à consacrée par les dirigeants à ces accompagner : AB Tasty a par exemple fait travailler ensemble, leur motivation à perspectives d’évolution. appel à un consultant extérieur pour contribuer au projet de l’entreprise. Alix de Sébastien Béquart explique en effet que pour structurer l’entreprise et clarifier son Sagazan a elle-aussi relevé des impacts en « faire évoluer l’organisation de son organigramme et les modes opératoires de matière d’engagement : « les collaborateurs entreprise, il a beaucoup échangé. Le réseau travail. Relyens a engagé sa transformation sont plus impliqués, ils nous sont plus fidèles Galion, composé de dirigeants d’entreprises, avec l’appui d’un cabinet de conseil en 5 Harvard Business Review, https://hbr.org/2015/03/positive-teams-are-more-productive 23
Vous pouvez aussi lire