ANTIBIOPROPHYLAXIE CHIRURGICALE EN PEDIATRIE - Reanesth
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ANTIBIOPROPHYLAXIE CHIRURGICALE EN PEDIATRIE Dr LEFEBVRE Romain Anesthésie-réanimation-médecine périopératoire Service d’Anesthésie. CHU de Nice – Hôpital LENVAL Mail : lefebvre.r@pediatrie-chulenval-nice.fr DIU Perfectionnement en anesthésie pédiatrique 2019- 2020
HISTORIQUE • Concept d’antibioprophylaxie chirurgicale (ABP) apparaît au milieu du XXème siècle • Après Guerre de Corée (1950 – 1953) • Mise en évidence du risque d’infection post-opératoire et de ses conséquences sur la morbi-mortalité des populations civiles • Problème d’un sentiment de couverture totale par les antibiotiques au début de leur découverte
HISTORIQUE John F. BURKE : l’administration d’un antibiotique AVANT incision chirurgicale diminue le risque d’infection post-opératoire(1) William D. ALTEMEIER(2) Propose une classification qui évalue le risque d’infection post-opératoire selon le site opératoire et le type d’intervention (1966) = Classification d’Altemeier (encore utilisée de nos jours) • (1) Burke JF. The effective period of preventive antibiotic action in experimental incisions and dermal lesions. Surgery. 1961 Jul;50:161–8. • (2) Altemeier WA. Control of wound infection. J R Coll Surg Edinb. 1966 Jul;11(4):271–82.
GENERALITES La consommation d’antibiotiques reste préoccupante en France, En regard de la menace croissante de l’AntibioRésistance France = 4ème plus gros consommateur européen (ville + hôpital) (ANSM. L’évolution des consommations d’antibiotiques en France entre 2000 et 2015. Janvier 2017) Antibioprophylaxie représente environ 30% de la consommation d’antibiotiques à l’hôpital
PRINCIPES D’ANTIBIOPROPHYLAXIE (ABP) 1. Objectif principal de l’ABP : Lutter contre la survenue d’une infection du site opératoire (ISO) secondaire à l’effraction de la barrière cutanéo-muqueuse En s’opposant à la prolifération bactérienne 2. Ecologie ciblée: Germes les plus fréquemment en cause selon le site opératoire 3. Dont l’efficacité a été scientifiquement prouvée 4. Coût maitrisé
PRINCIPES - Concerne uniquement les chirurgies classées comme « PROPRE » (Altemeier 1) -- > ISO rares mais à forte morbidité « PROPRE-CONTAMINEE » (Altemeier 2) -- > Taux spontané d’ISO > 5% - Permet de diminuer de 50% le risque d’infection du site opératoire SI ELLE EST CORRECTEMENT REALISEE
L’Infection du Site Opératoire (ISO) • définies selon les critères standardisés et validés du Center for Disease Control (CDC) • 3 niveaux d’ISO : Superficiel / Profonde / d’Organe ou d’Espace • Survenue en post-opératoire Dans les 30 jours suivant la chirurgie sans prothèse Dans l’année suivant la chirurgie si prothèse • Coût important : morbi-mortalité / Surcoût financier
ISO : PRINCIPAUX GERMES Cutanés Tube digestif Cocci Gram + : Anaérobies : Cocci Gram + : Streptocoques / Enterocoques / Staphylocoques Bacteroides, Clostridium S. aureus / epidermidis Bacilles Gram - : Bacille Gram + : Enterobactéries (E.coli, Klebsiella) Propionebacterium Non fermentants Corynebacterium (Pseudomonas, Acinetobacter)
Classification d’Altemeier : Quelle efficacité de l’ABP ?
Evaluation du risque infectieux post-op • Score NNISS (de 0 à 3) (Culver DH et al. Surgical wound infection rates by wound class, operative procedure, and patient risk index. National Nosocomial Infections Surveillance System. Am J Med. 1991 Sep 16;91(3B):152S–157S.) 3 facteurs de risque indépendants : Classe ASA 3 ou 4 (1 point) Classe Altemeier 3 ou 4 (1 point) Durée d’intervention > 75°percentile (1 point)
ANTIBIOPROPHYLAXIE : Bonnes pratiques
Quel antibiotique ? • Actif sur bactéries potentiellement pathogènes - En fonction de la chirurgie - En fonction de l'écologie locale et du patient • Faible risque d'émergence de résistance - Spectre le plus étroit possible - Faible risque de mutations (quinolones, rifampicine) • Non toxique • Réservé à la prophylaxie - Eviter les AB dont on veut préserver l'activité • Coût modéré (à efficacité égale)
C1G C2G DONNES DE INCISO 2009, CCLIN Paris-Nord
A quel moment ? 30 min avant l’incision dans l’idéal • Au plus tôt 1h avant • Au plus tard, à l’incision Classen, David C., et al. "The timing of prophylactic administration of antibiotics and the risk of surgical-wound infection." New England Journal of Medicine 326.5 (1992): 281-286.
Hawn MT, Richman JS, Vick CC, et al. Timing of Surgical Antibiotic Prophylaxis and the Risk of Surgical Site Infection. JAMA Surg. 2013;148(7):649–657
Quelles posologies ? • Il faut doubler la posologie standard -- > obtenir Pic de concentration optimal • Voie Intra-veineuse dans la plupart des cas • Réinjecter une demi-dose toutes les 2 demi-vies • Objectif : maintenir une concentration tissulaire efficace tout au long de l’intervention
ZELENITSKY et al. Antibiotic Pharmacodynamics in Surgical Prophylaxis: an Association between Intraoperative Antibiotic Concentrations and Efficacy. Antimicrob. Agents Chemother.September 2002 Démonstration qu’il y a un lien entre la Concentration tissulaire à la fermeture et risque de développer une ISO
PHARMACOCINETIQUE DES ATB
Koopman et al End-of-procedure cefazolin concentrations after administration for prevention of surgical-site infection. Am J Health-Syst Pharm—Vol 64 Sep 15, 2007
PHARMACOLOGIE DES ATB Chez le nourrisson/jeune enfant • C° Albumine et a1-glycoproteine = Risque hyperbilirubinémie libre & risque d’Ictère Nucléaire Par utilisation de : Clindamycine / C1G / C2G / Ceftriaxone • Filtration glomérulaire pour Blactamines et C2G = Espacer prises • Augmentation du Vd et Demi-vie d’élimination >> Aminosides ADAPTATION POSOLOGIQUE +++ (mg/Kg)
Nouveautés concernant l’administration de la VANCOMYCINE Recommandations pour prévenir le risque de « Red-man » ou « Red-neck » Syndrome
Pour quelle durée ? • DOSE UNIQUE autant que possible Plusieurs études ont montré l’absence de supériorité des réinjections VS injection unique en per-opératoire (chirurgie colorectale notamment) Song et al. Antimicrobial prophylaxis in colorectal surgery: a systematic review of randomized controlled trials. British Journal of Surgery, Volume 85, Number 9, 1 August 1998, pp. 1232-1241(10) DiPiro, Joseph T. et al. Single dose systemic antibiotic prophylaxis of surgical wound infections.The American Journal of Surgery , Volume 152 , Issue 5 , 552 – 559 • Durée limitée à 24h, 48h exeptionnellement Prolonged Antibiotic Prophylaxis After Cardiovascular Surgery and Its Effect on Surgical Site Infections and Antimicrobial Resistance. Harbarth S. et al. Circulation. 2000;101:2916-2921 • La présence de drains ou prothèses ne doit pas faire exception
Song et al. Antimicrobial prophylaxis in colorectal surgery: a systematic review of randomized controlled trials. British Journal of Surgery, Volume 85, Number 9, 1 August 1998, pp. 1232-1241(10)
Prolonged Antibiotic Prophylaxis After Cardiovascular Surgery and Its Effect on Surgical Site Infections and Antimicrobial Resistance. Harbarth S. et al. Circulation. 2000;101:2916-2921
Quid de la population obèse • IMC > 35 Kg/m2 selon courbes de corpulence PNNS 2010 • Poids > 100 Kg dans le nouveau référentiel • Recommandation de doubler la posologie • En chirurgie bariatrique, mais pas que … • Modalités de réinjection identiques
PROPHYLAXIE NON SYSTEMIQUE • Pas de preuve scientifique de l’efficacité d’une préparation colique +/- associée à une décontamination digestive en Chirurgie colorectale • Qu’en est-il du portage nasal de SARM ? - Faut-il le dépister systématiquement ? - Faut-il l’éradiquer ? Pour quelle chirurgie ?
Portage nasal de SARM • Fréquent : 20 à 30 % de la population est porteur de SA nasal • Corrélation directe entre portage nasal et portage cutané • Relation directe entre portage nasale de SARM et ISO à SARM (Merrer J, Girou E, Lortat-Jacob A, Montravers P, Lucet JC. Surgical site infection after surgery to repair femoral neck fracture: a French multicenter retrospective study. Infect Control Hosp Epidemiol 2007; 28:1169-74. )
INTERÊT DE LA MUPIROCINE • Utilisation par voie topique nasale • Anti-Cocci gram + • Application 2 fois par jour pendant 5 jours • Efficacité scientifiquement prouvée sur l’éradication nasale de S.aureus • Généralement associée à un antiseptique (Chlorexhidine)
INTERET DE LA MUPIROCINE (Perl et al. Intranasal Mupirocin to Prevent Postoperative Staphylococcus aureus Infections.N Engl J Med 2002; 346:1871-1877)
Bode et al. Preventing Surgical-Site Infections in Nasal Carriers of Staphylococcus aureus. N Engl J Med 2010; 362:9-17
Faut-il traiter les porteurs de SARM ? • Pas de recommandations claires actuellement sur : - Population cible - Méthodologie du dépistage - Modalités de l’éradication - Chirurgie concernée (sauf chirurgie cardiaque. ESC 2015) - Reste une voie à explorer
PROPHYLAXIE DE L’ENDOCARDITE INFECTIEUSE
PROPHYLAXIE DE l’EI • Efficacité de l’ABP pour prévenir l’EI a seulement été prouvée dans des modèles animaux • Entre 2000 et 2018, les recommandations ont de plus en plus restreint les indications de l’ABP (2009, puis 2015) • Plusieurs études ont regardé l’incidence de l’EI en fonction des recommandations, aucune n’a montré de différence significative entre avant et après les restrictions d’utilisation des ATB
RECOMMANDATIONS & SPECIFICITES PEDIATRIQUES Plusieurs actualisations : 1999 / 2010 / 2018
IMMUNITE DU NOUVEAU NE • Immaturité de l’immunité à la naissance • Stimulée principalement via colonisation bactérienne intestinale • Modifications de l’écologie : - Fœtus = milieu stérile (BHP) - Rupture des membranes = colonisation cut & intestinale / Flore vaginale - Puis colonisation rapide via ALIMENTATION / ENVIRONNEMENT / SOINS
IMMUNITE DU NOUVEAU NE • Déficit immunité CR = déficit LT • Déficit immunité humorale = déficit en IgG maternelles (chute entre la 3ème et 6ème semaine de vie) • Allaitement mat = apport d’IgA et IgM • Déficit qualitatif et quantitatif de C phagocytaires • Faible Tx de complément • Susceptibilité accrue aux infections
IMMUNITE DU NOUVEAU NE • PREMATURE : - Pression de sélection importante car soins +++ - Flore plus homogène - Env 80% SCN - Reste : S. aureus, BGN, Candida, Entérocoque
EVOLUTION DE L’ECOLOGIE • Très dépendante de l’alimentation (Allaitement maternel ou artificiel) • De 0 à 3 mois : Entérobactéries (E. coli +++), Lactobacilles et Bifidobacilles >>> E.coli / Listeria / Strepto B • De 1 à 3 mois : émergence H.influenzae et S. pneumoniae • Après 3 mois : majorité de Hi et pneumocoque
ABPx et NEONATALOGIE • Population très fragile • Nourrisson < 1 mois • Ecologie bactérienne propre : E.coli +++ à prendre en compte • Posologies adaptées • Demi-vie des ATB augmentée : immaturité rénale et hépatique = Espacer réinjections si besoin
EPIDEMIOLOGIE • Pic d’ISO en chirurgie générale pédiatrique entre 1 mois et 1 an • Puis Taux d’ISO rejoint l’incidence retrouvée chez l’adulte • Tx ISO chez NN= 13,7% • VS 2,5 à 5,4% chez l’enfant > 1an
PROTOCOLE UTILISE AU CHU Nice - LENVAL • Mis à jour suite aux RFE SFAR 2018 • Reprend en grande partie les modalités et molécules recommandées • Reste quelques spécificités pédiatriques : • Absence de recommandations basées sur des publications scientifiques solides - Quid de NEONATALOGIE ? - Recommandations spécifiques pour chirurgie de scoliose chez l’adolescent - Prévention de l’EI
Chirurgie pour scoliose de l’enfant
Prévention de l’Endocardite infectieuse
Quel adhérence aux recommandations ? • Compliance globale aux recommandations variable de 20 à 80 % (Lallemand et al. Non-observance of guidelines for surgical antimicrobial prophylaxis and surgical-site infections. Pharmacy World and Science. June 2002, Volume 24, Issue 3, pp 95–99) • CHU de Nice • Plusieurs audits ont précédé ou suivi l’évolution des recommandations • Mise en place de kits d’Antibioprophylaxie par indication chirurgicale en 2007 (Carlès M, Gindre S, Aknouch N, Goubaux B, Mousnier A, Raucoules-Aimé M. Improvement of surgical antibiotic prophylaxis: a prospective evaluation of personalized antibiotic kits. J Hosp Infect. 2006 Mar;62(3):372–5) • Abandon de ces kits lors du déménagement vers l’hôpital Pasteur 2, et le transfert de plusieurs blocs opératoires
61,1 %
Prévention des ISO : ABP seule contre tous ? • NON • Efficacité uniquement lorsqu’on l’accompagne de mesures d’hygiène péri-opératoire : - Lavage des mains / tenues de bloc : masque, casaque, gants - Matériel stérile ou à usage unique - Salles d’opération à flux laminaire ou à pression positive • Prévention liée au contrôle des facteurs de l’homéostasie : - Glycémie ( Ata A. Postoperative Hyperglycemia and Surgical Site Infection in General Surgery Patients. Arch Surg. 2010 Sep 20;145(9):858) • Température corporelle (Kurz A, Sessler DI, Lenhardt R. Perioperative Normothermia to Reduce the Incidence of Surgical-Wound Infection and Shorten Hospitalization. N Engl J Med. 1996 May 9;334(19):1209–16) - FiO2
CONCLUSION • Antibioprophylaxie = sujet de préoccupation quotidien des AR, y compris en pédiatrie et néonatalogie • Spécificités pédiatriques à prendre en compte : - Néonatalogie (terrain à risque ++) - Adaptations posologiques & demi-vies des aTB - Pas de raison de ne pas respecter les recommandations SFAR • Impact important sur consommation d’ATB et le développement des résistances • Importance d’évaluer régulièrement les pratiques afin d’ améliorer la compliance aux recommandations • La lutte contre les ISO repose sur l’ABP, mais aussi sur plusieurs mesures d’hygiène péri-opératoire complémentaires
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