AVIS DE FNE PROVENCE-ALPES-COTE D'AZUR - ETUDE D'IMPACT ACTUALISEE RELATIVE AU PROJET DE RECONVERSION DE LA PLATEFORME DE LA MEDE - FNE PACA

 
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AVIS ENQUÊTE PUBLIQUE – RAFFINERIE DE LA MEDE
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         AVIS DE FNE PROVENCE-ALPES-COTE D’AZUR – ETUDE D’IMPACT
         ACTUALISEE RELATIVE AU PROJET DE RECONVERSION DE LA
         PLATEFORME DE LA MEDE

CONTEXTE

TOTALEnergies Raffinage France (TERF) est une société pétrolière et gazière. C’est un acteur majeur de
l’énergie, présent dans plus de 130 pays1, qui réalise pour l’année 2019 un chiffre d’affaires de 200,3
milliards de dollars et 11,8 milliards de dollars de résultat net ajusté2.
Le groupe possède en France cinq raffineries, dont celle de La Mède à Châteauneuf-les-Martigues (13).
Sa reconversion, décidée en 2015 a pour objectif de produire annuellement 500 000 tonnes de
« biodiesel3 » à partir d’huiles végétales brutes, de distillat d’acide gras de palme, d’huiles alimentaires
usagées et de graisses animales.
Par arrêté préfectoral en date du 16 mai 2018, la société TOTAL a été initialement autorisée à poursuivre
son exploitation et plus précisément à importer au maximum, 650 000 tonnes d’huiles végétales (dont
de l’huile de palme) par an4.
Suite à une procédure contentieuse menée par nos associations, le Tribunal administratif de Marseille a
enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de prendre un arrêté préfectoral modificatif visant à :
     -     Fixer une limitation quantitative annuelle plus stricte à la transformation d’huile de palme et de
           ses dérivés ;
     -     Actualiser l’étude d’impact, insuffisante notamment sur les effets du projet sur le climat ;
     -     Soumettre le dossier à une autorité environnementale présentant des garanties d’impartialité,
           ce qui n’était pas le cas à l’époque.
L’étude d’impact de Total a donc été actualisée en juillet 2021 et soumise à l’enquête publique actuelle.
Il nous paraît important de rappeler les évolutions législatives récentes concernant l’huile de palme.
Le législateur a modifié l'article 266 quindecies du Code des douanes, par la loi du 28 décembre 2018 de
finances pour 2019, qui dispose : « (…) Ne sont pas considérés comme des biocarburants les produits à
base d'huile de palme ». Cette nouvelle disposition législative, entrée en vigueur le 1er janvier 2020, a
été contestée par Total Raffinage France devant le Conseil d’Etat, qui l’a renvoyée au Conseil

1 Voir présentation de TOTAL sur son site : https://www.total.com/fr/notre-groupe/total-acteur-majeur-de-l-energie
2 Voir « TOTAL en bref » sur son site : https://www.total.com/fr/infographies/total-en-bref
3 Les termes de « biocarburants » ou « biodiesel » sont impropres car ils suggèrent que leur production et leur utilisation seraient respectueuses

de l’environnement. On préfèrera utiliser le terme de « carburants d’origine agricole » ou « agrocarburants ».
4 Article 1.8.1 de l’arrêté initial
constitutionnel5. Le Conseil constitutionnel l’a déclarée conforme à la Constitution par une décision
rendue le 11 octobre 2019 aux motifs que :
          « 7. En premier lieu, il ressort des travaux préparatoires que, en instituant la taxe incitative
          relative à l'incorporation de biocarburants, le législateur a entendu lutter contre les émissions
          de gaz à effet de serre dans le monde. À ce titre, il a cherché à réduire tant les émissions directes,
          notamment issues des carburants d'origine fossile, que les émissions indirectes, causées par la
          substitution de cultures agricoles destinées à produire des biocarburants à celles destinées à
          l'alimentation, conduisant à la mise en culture, à des fins alimentaires, de terres non agricoles
          présentant un important stock de carbone, telles que les forêts ou les tourbières.
          8. En second lieu, en adoptant les dispositions contestées, le législateur s'est fondé sur le constat
          que l'huile de palme se singularise par la forte croissance et l'importante extension de la surface
          mondiale consacrée à sa production, en particulier sur des terres riches en carbone, ce qui
          entraîne la déforestation et l'assèchement des tourbières. Il a ainsi tenu compte du fait que la
          culture de l'huile de palme présente un risque élevé, supérieur à celui présenté par la culture
          d'autres plantes oléagineuses, d'induire indirectement une hausse des émissions de gaz à effet
          de serre. (…)
          9. Dès lors, en excluant pour le calcul de la taxe la possibilité de démontrer que l'huile de palme
          pourrait être produite dans des conditions particulières permettant d'éviter le risque de hausse
          indirecte des émissions de gaz à effet de serre, le législateur a, en l'état des connaissances et
          des conditions mondiales d'exploitation de l'huile de palme, retenu des critères objectifs et
          rationnels en fonction du but poursuivi. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité
          devant les charges publiques doit donc être écarté. »
Le rapport d’information N° 2609 rendu par la mission d’information sur les agrocarburants enregistré à
la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 janvier 2020 souligne également les impacts
environnementaux de la culture d’huile de palme6 :
          « […] Le « revers de la médaille » de cette production agricole aux caractéristiques remarquables
          se situe sur le terrain environnemental, avec deux accusations principales : une responsabilité
          dans le réchauffement climatique du fait d’une contribution importante aux émissions de GES
          par déforestation et par exploitation après drainage de tourbières, et une contribution
          préoccupante à la perte de biodiversité, par destruction de milieux naturels remarquables. […] ».
Enfin, au vu du Règlement délégué du 13 mars 2019 de la Commission européenne n°2019/8077, l’huile
de palme ne peut plus être considérée comme un agrocarburant présentant un faible risque d’induire
des changements indirects dans l’affectation des sols (« effet CASI ») et donc n’est plus considérée
comme une ressource « durable ».
Au vu des éléments fournis par TERF dans son étude d’impact actualisée, nous identifions les
questionnements suivants quant aux effets du projet sur l’environnement et en particulier sur le climat.

5 Conseil constitutionnel, n° 431589, 24 juillet 2019
6 Accessible sur : http://www.assemblee-nationale.fr/15/rap-info/i2609.asp#P1098_260477
7 Accessible ici : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32019R0807&from=EN

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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PROPOS INTRODUCTIFS SUR LES AGROCARBURANTS

FNE Provence-Alpes-Côte d’Azur est favorable à une politique énergétique ambitieuse reposant sur
l'utilisation des diverses technologies d'énergie renouvelable, garantissant la maîtrise des impacts
négatifs sur l’environnement et construite sur des stratégies territoriales cohérentes. Les projets
développés doivent prendre en compte l’intégralité des enjeux environnementaux, y compris à
l’étranger, et s’engager dans des démarches d’information et de concertation sérieuses.
Il nous apparaît important que la reconversion du site de la Mède s’inscrive dans un contexte de sobriété
en matière énergétique et en matière de transports carbonés. Miser sur des agrocarburants de première
génération dont l’impact environnemental négatif est largement documenté8, nous paraît à rebours de
ces objectifs.
La production d’agrocarburants monopolise des terres agricoles au détriment de la production
alimentaire. Elle contribue également à l’appauvrissement des sols, les cultures destinées à la production
d’agrocarburants sont le plus souvent des monocultures, utilisant des intrants. A l’échelle mondiale, des
milieux naturels et boisés sont défrichés pour être reconvertis en terres cultivables et répondre aux
besoins alimentaires. Le fait de mettre en concurrence les agrocarburants et la production de denrées
alimentaires accroît donc les pressions sur les milieux naturels et boisés, ainsi que sur la biodiversité.
Cela engendre également une hausse des prix des denrées alimentaires9 dont la production entre en
compétition avec la production d’agrocarburants. Nous appelons à repenser nos modes de
consommation, et en particulier nos modes de transport pour être moins dépendants des carburants :
véhicules partagés, transports collectifs, etc.

Concernant les enjeux de risques industriels, il est indiqué en page 65 de l’étude d’impact, que « suite à
la mise en œuvre du projet de bioraffinerie, une révision du Plan de Prévention des Risques
Technologiques (PPRT) a été prescrite par l’arrêté du 21 octobre 2019 dans la mesure où le zonage
règlementaire identifié par le PPRT approuvé le 2 mai 2014 ne correspondait plus aux aléas
technologiques de la plateforme dans sa configuration « bioraffinerie ». Le délai de révision du PPRT a
été prorogé, par l’arrêté du 16 avril 2021, jusqu’au 21 octobre 2022. ».
Dans l’attente de cette révision, nous souhaitons insister sur le risque élevé d’incendies et d’explosions
des installations type « bioraffineries », en lien avec le process de production impliquant des matières
hautement inflammables10, ou encore plus largement, sur le risque d’accidents et d’incidents industriels
que peut représenter la présence d’huiles sur site (294 évènements recensés dans la base ARIA en France
entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2020 par le Bureau d'analyse des risques et pollutions
industriels11).
Concernant les populations exposées aux risques industriels associés au projet, il est à noter que le
dossier recense un grand nombre d’habitations à proximité immédiate de la plateforme de la Mède (dès
40 mètres), ainsi qu’un établissement sensible (école primaire René Perrin à 50 m de l’enceinte).

8 https://reseauactionclimat.org/publications/agrocarburants-climat-pas-une-solution/
9 Thought for Food – A review of the interaction between biofuel consumption and food markets, Cerulogy, 2017
10 Marmo et al. (2017) Fire and explosion risk in biodiesel production plants: a case study, Hazards 27, Symposium series n°162.
11 ARIA – BARPI, Implication des huiles dans les incidents et accidents industriels 2016 – 2020, Synthèse, novembre 2021, 28 p.

https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/wp-content/uploads/2022/01/Implication-des-huiles-VD2.pdf

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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SUR L’APPROVISIONNEMENT DE LA PLATEFORME

Dans la demande d’autorisation de 2018, TOTAL était autorisée à utiliser : au maximum 450 000 tonnes
par an d’huiles végétales brutes de toute nature, 100 000 tonnes de distillats d’acides gras de palme (ou
PFAD : palm fatty acid distillates) i.e. de dérivés d’huile de palme, et 100 000 tonnes d’huiles alimentaires
usagées ou graisses animales.
Dans la version actualisée du plan d’approvisionnement, TOTAL prévoit d’utiliser :
        -
        au maximum 450 000 tonnes/an d’huiles végétales, dont un maximum de 100 000 tonnes/an
        d’huile de palme certifiée;
    - au minimum, chaque année, de 25 % de distillats d’acides gras, d’huiles alimentaires usagées, de
        graisses animales, d’huiles issues de l’inter-culture ou d’autre(s) ressources de type acides gras
        et triglycéride […] énumérées à l’annexe IX de la directive RED II.
La société annonce qu’elle va « réduire quantitativement et temporellement l’approvisionnement en
huile de palme de la bioraffinerie :
    - en le limitant à 100 000 tonnes/an maximum à compter de l’année 2021 ;
    - en cessant ce type d’approvisionnement à compter de janvier 2023 ».

Le porteur de projet reste vague sur les huiles végétales brutes qui seront utilisées en remplacement
de l’huile de palme. Il indique « TERF va privilégier principalement l’huile de colza, l’huile de tournesol
et/ou de graisses animales de catégorie 3 ». « L’huile de colza proviendra majoritairement d’Amérique
du Nord, d’Océanie et d’Eurasie. Quant à l’huile de tournesol, elle proviendra en priorité d’Eurasie »12. En
réalité, TOTAL fera évoluer son approvisionnement en fonction des coûts du marché et de la
réglementation.
Il n’y a donc aucune assurance que d’autres huiles végétales brutes ne seront pas également utilisées,
notamment le soja, dont la culture contribue à la déforestation autant que celle de palme. La possibilité
est d’ailleurs ouverte par TOTAL qui indique page 49 de l’étude d’impact actualisée, 4.4.3 Alimentation
en huiles de l’HVO « l’unité de production d’HVO a été conçue pour traiter des charges de différentes
nature comme par exemple des huiles alimentaires usagées (HAU), des graisses animales, des produits
issus de fabrications industrielles [ …] ainsi que des huiles végétales brutes ou dégommées de toutes
natures (palme, soja, colza, tournesol…) ».
Il n’y a pas non plus de garantie quant aux volumes qui seront utilisés.
On constate que les gisements de matières premières nécessaires au fonctionnement de l’installation
proviennent du monde entier, nécessitant un acheminement par bateau et camion. La pertinence d’un
tel approvisionnement pose question quant aux exigences de baisse des émissions de gaz à effet de serre
dans un contexte d’accélération du changement climatique.

12   p.5 du mémoire en réponse de l’exploitant à l’avis de la MRAE, octobre 2021

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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Concernant les huiles usagées, la quantité totale disponible en France est d’environ 45 000 tonnes. Il y
aura donc une majorité de l’approvisionnement en huiles usagées qui viendra d’Afrique du Nord et
d’Asie, ou encore des Etats-Unis.
Le porteur de projet le reconnaît lui-même « les quantités d’HAU collectées en France et plus largement
en Europe étant limitées, elles ne sont pas suffisantes pour couvrir les besoins de l’unité »13.
De manière contradictoire, en réponse à l’avis de la MRAE, l’exploitant indique dans son mémoire (page
17) que « concernant la part d’huiles usagées régionales valorisée par la plateforme en 2025, elle dépend
du plan d’approvisionnement qui n’est pas encore connu dans la mesure où il dépend des conditions de
marché mais qui, en tout état de cause, privilégie par ordre de propriété la France, l’Europe puis le
monde ». En regardant la part de gisement et le détail des pays où TOTAL compte s’approvisionner, on
constate que l’ordre est plutôt inversé. L’exploitant indique « ces huiles sont approvisionnées en majorité
depuis des zones où l’utilisation de friture est très répandue comme l’Afrique du Nord et l’Asie (Inde,
Thaïlande, Vietnam, Chine, Indonésie…) », « les USA constituent également une source
d’approvisionnement potentielle importante ». On est bien éloignés du gisement local français ou même
européen, promu par TOTAL.
Cela interroge sur le dimensionnement de la plateforme prévue par la Mède et donc de sa pertinence
même. L’exploitant indique que « L’approvisionnement de l’unité HVO respecte le principe de proximité
dans la limite des charges disponibles à un coût économiquement acceptable » mais, à la lecture du
dossier, on se rend compte que ce n’est qu’un affichage, qui n’est pas corroboré par les données
fournies.

SUR LES EMISSIONS DE GAZ A EFFET DE SERRE

Contrairement à ce qui est sous-entendu par TOTAL, lorsqu’on prend en compte l’ensemble de la chaîne
de production et d’approvisionnement, les agrocarburants de première génération ont un bilan carbone
aussi néfaste voire plus, que les carburants fossiles.
En particulier, les agrocarburants à base d’huiles végétales telles que l’huile de palme ou de soja,
entraînent une augmentation – et non une diminution – des émissions de CO2, en raison des
changements dans l’affectation des sols et de la déforestation induite.
Ainsi, par exemple, selon une étude de l’ONG Transport & Environnement, un litre de biodiesel peut
émettre 80% d’émissions de gaz à effet de serre de plus qu’un litre de diesel issu d’un carburant
conventionnel14.
Cette même étude montre que les biodiesels à base d’huile de palme, de soja ou de colza ont un bilan
carbone plus lourd que les carburants fossiles comme on le constate sur le schéma ci-après :

13 p.375 de l’étude d’impact mise à jour en juillet 2021
14 Globiom: the basis for biofuel policy post-2020, Transport & Environnement, 2016 accessible sur :
https://www.transportenvironment.org/sites/te/files/publications/2016_04_TE_Globiom_paper_FINAL_0.pdf

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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Gaz à effet de serre émis par les carburants à base de cultures alimentaires - émissions directes et émissions liées
                                      aux changements d’affectation des sols15.

SUR L’IMPACT DE L’UTILISATION D’HUILE DE PALME « CERTIFIEE »

Au point 5.2.3 de l’étude d’impact actualisée, détaillé à l’annexe I « Incidence de l’utilisation d’huile de
palme certifiée pour le fonctionnement de la bioraffinerie », TOTAL expose les effets directs et indirects
de l’utilisation de l’huile de palme sur le climat et les émissions de GES. L’exploitant indique à cet effet
que la bioraffinerie est « exclusivement » approvisionnée « en matières premières répondant aux
exigences de l’Union Européenne » selon les standards définis par l’ISCC International sustainability and
carbon certification. Néanmoins, TOTAL ne précise nulle part que la certification ISCC se décline en
plusieurs schémas correspondants à différents types de certification : « mass balance »,
« segregated » et « identity preserved »16. Et l’entreprise a choisi le système le moins contraignant.

15 Traduction dans l’ordre, de haut en bas : colza, palme, soja, tournesol, maïs, blé, betterave sucrière, canne à sucre, ensilage de maïs,
taillis à rotation rapide, plantes vivaces, résidus de bois, éthanol de pailles
16 Mise en œuvre et efficacité des initiatives pour la durabilité de la filière huile de palme - Une méta-analyse, IDDRI, 2017, p.37 accessible

sur : https://www.iddri.org/sites/default/files/import/publications/st1117_pma-et-al._oil-palm-southeast-asiafr.pdf

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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L’institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) explicite les certifications
comme suit17 :
« (…) Avec le mass balance, le producteur de fruits valorise ses fruits au prix de la production certifiée
(RSPO ou ISCC), mais ceux-ci sont ensuite mélangés avec des fruits puis des huiles qui peuvent être ou
non certifiés. Dans ce cas, l’opérateur du moulin doit tenir un registre lui permettant de vendre sur le
marché un volume d’huile certifiée rigoureusement équivalent au volume de fruits certifiés qu’il a acheté
; en revanche, il lui est impossible de garantir que cette huile provient de palmeraies gérées selon les
principes RSPO.
Les systèmes de ségrégation et d’identité préservée vont plus loin. Ils imposent une ségrégation totale
des filières certifiées et non certifiées et permettent de garantir que l’huile ainsi achetée provient
exclusivement de palmeraies RSPO. Le système « identité préservée » repose sur une traçabilité
complète permettant d’identifier de quelle palmeraie sont issues les huiles achetées.
Le coût logistique associé à chacun de ces modes de commercialisation va évidemment croissant à
mesure que l’on va vers un produit totalement tracé, de la plantation au produit fini. (…) »
TOTAL applique une certification ISCC selon le système « mass balance » (bilan massique). Cela n’est pas
précisé dans l’étude d’impact mais est consultable en ligne sur la page internet de l’entreprise18 :
« Un approvisionnement en matières premières durables

100 % des huiles achetées par TotalEnergies pour La Mède répondent aux critères de durabilité fixés
par l'Union Européenne.

La conformité aux critères de durabilité des huiles achetées pour la bioraffinerie de La Mède est établie
par un certificat de durabilité de type ISCC (International Sustainability & Carbon Certification) selon un
système de bilan massique exigé par l’Union Européenne*. Ce certificat assure qu’à chaque tonne
d’huile traitée par TotalEnergies à La Mède correspond une tonne d’huile produite dans le respect des
critères de durabilité de l’Union Européenne. »

Comme vu plus haut, la certification mass balance permet, aux différentes étapes de la chaîne
d’approvisionnement, de mélanger des huiles de palme issues d’une plantation certifiée ISCC à d’autres
huiles issues de plantations non certifiées.
L’organisme privé ISCC qui délivre les certifications précise par ailleurs19 :
« Dans l'approche du bilan massique, les matières premières durables certifiées entrent dans la chaîne
d'approvisionnement mais ne sont pas physiquement séparées des matières non certifiées. Alors que
les caractéristiques de durabilité restent affectées à des lots de matériaux sur une base comptable, le
mélange physique de matériaux avec différentes caractéristiques de durabilité et le mélange de
matériaux durables et non durables sont autorisés à tous les stades de la chaîne d'approvisionnement.

17 Ibid p.38
18 https://totalenergies.com/fr/expertise-energies/projets/bioenergies/la-mede-un-site-tourne-vers-avenir
19Logos and claims, point « 5.2.2 Mass Balance (I): 100 % bio-based material » (traduction libre): https://www.iscc-system.org/wp-

content/uploads/2017/02/ISCC_208_Logos-and-Claims_1.1.pdf

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Le bilan massique nécessite moins d'efforts logistiques qu'une chaîne d'approvisionnement séparée car
les matériaux durables et non durables peuvent être mélangés. Par conséquent, la configuration de la
chaîne d'approvisionnement sous bilan de masse est moins coûteuse et soutient la demande de matières
premières et de produits durables. Cependant, rien ne garantit qu'un produit final contienne
physiquement un matériau durable. ».
Le système de certification utilisé par TOTAL ne permet donc pas d’empêcher le mélange entre des huiles
issues de plantations soi-disant durables et des huiles issues de plantations conventionnelles. In fine, le
carburant produit par TOTAL peut être fait à partir d’huile de palme non certifiée, dont les impacts sur
l’environnement sont dramatiques.

SUR L’AUGMENTATION DE LA PRODUCTION DE DECHETS

En page 365 de l’étude d’impact, sont mentionnés les deux nouveaux types de déchets générés par la
nouvelle configuration « bioraffinerie » de la plateforme, produits notamment de la nouvelle unité de
prétraitement des huiles :
    -   les « argiles usées » (dénommées « terres usées » dans l’étude d’impact initiale),
    -   un flux nommé « gommes » présent dans les huiles type graisses animales ou huiles alimentaires
        usagées, dont certains des constituants (notamment composés métalliques et phosphore) sont
        des contaminants susceptibles de désactiver les catalyseurs de l’unité HVO qui sont de fait,
        retirés au niveau de l’unité de prétraitement.
Leur classification y est également précisée : déchet non dangereux.
Le Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET)
adopté en juin 2019 qui a absorbé le Plan Régional de Prévention et Gestion des Déchets et fixe ainsi les
moyens de réduction des déchets, de recyclage matière et organique et de traitement des déchets
résiduels aux horizons 2025 et 2031 en Région, prévoit de :
    -   réduire de 10 % la production de l’ensemble des déchets non dangereux (DND) des ménages et
        des activités économiques, dès 2025 par rapport à 2015 ;
    -   développer le réemploi et augmenter de 10 % la quantité des déchets non dangereux non
        inertes ;
    -   valoriser 65 % des déchets non dangereux non inertes en 2025.
En page 367 de l’étude d’impact, il est indiqué : « En tenant compte des programmes prévisionnels des
différentes qualités de charge prévue et des projections de débits de l’unité, l’estimation des tonnages de
argiles usées et gommes attendus pour 2021, 2022, 2023 est la suivante :
    -   Argiles usées : 12 500 tonnes par an,
    -   Gommes : 8 760 tonnes par an
Sur cette base la quantité de déchets non dangereux attendue à terme est donc estimée à près de 22 300
tonnes. », soit 15 fois plus qu’avant, 1389 tonnes en 2015 (moyenne de 2600 t de 2012 à 2015).

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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Concernant les gommes, page 187 de l’étude d’impact est précisé qu’ « il avait été initialement prévu
que les gommes issues de cette unité soient dirigées vers le traitement des eaux résiduaires (TER).
Toutefois, la règlementation relative aux sous-produits animaux interdit l’envoi de sous-produits animaux
vers le TER. Ces gommes sont donc, depuis le redémarrage, récupérées au niveau de l’unité de
prétraitement des huiles et sont traitées comme des déchets. ». Concernant les argiles, ce déchet est à
l’origine d’une augmentation de 120 % de la quantité totale de DND générés.
Considérant les objectifs du SRADDET, il apparaît ainsi nécessaire de réduire autant que possible la
production de DND lors du prétraitement des huiles.
Il est par ailleurs annoncé page 368 que « la grande majorité de ces déchets sera toutefois valorisée », à
ce jour sans précision sur les volumes réels et sur les proportions de valorisation en incinération ou
méthanisation. Toujours, au vu des objectifs du SRADDET, il apparait essentiel de préciser en quoi le
projet contribue à l’objectif régional de valorisation matière de 65 % de ces déchets non dangereux non
inertes.

 FNE Provence-Alpes-Côte d’Azur rend donc un avis défavorable à l’étude d’impact actualisée par
 TOTAL et soumise à consultation du public pour les raisons explicitées plus haut.

Avis associations enquête publique Total La Mède – 22 février 2022

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