Bien placés font mots Quelques Queneau - une poésie - Le Petit Journal des Profs

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Ecole Saint-Jean
59 place de l’Abbé Meffray
49410 Le Marillais
02–41–72–61–28

      Poèmes et création poétique
                    Bien placés
                              Bien choisis
                         Quelques
                                mots
                                font
                             une poésie.
                               Queneau

Un poète c’est le monde
dans un homme.
   Victor Hugo

                                             1
Sommaire

Introduction                                   3
Activité autour de la poésie                   4
Objectifs                                      6
Quelques définitions                           7
Comptines                                      8
A.B.C.D... 1.2.3.4...                          10
Humour                                         11
Famille                                        12
Calendrier                                     13
Saisons                                        14
Nature                                         15
Bestiaire                                      17
Nourriture                                     18
Ville                                          19
Objets                                         20
Verlaine                                       21
A propos des fiches séquentielles              22
La ronde des prénoms                           23
Des mots qui s’emboîtent                       24
Pourquoi…, parce que…                          25
Des milliers                                   26
J’ai geigné la pirafe                          27
La cimaise et la fraction                      28
Associations fantaisistes                      29
Ca n’existe pas                                30
Le hareng saur                                 32
J’aimerais être                                34
Si j’étais, si j’avais                         35
Imagination                                    36
Comparaisons                                   38
Se familiariser avec les rimes                 39

                                                    2
Introduction
     Le musicien se sert des sons, le sculpteur de la pierre, du bois
 et du fer, le peintre des couleurs et des traits et le poète du langage et
     des mots. La poésie est une production artistique qui permet,
            à travers un dimension esthétique, de s’exprimer :
                 exprimer des émotions, des sensations...

        Comme toute « œuvre d’art », elle communique un message à un destinataire.
Mais ce message est perçu différemment suivant le vécu et la sensibilité de la personne qui le
reçoit. Dans tous les cas, le poème ne laisse pas indifférent. Il va nous attirer, nous déplaire,
nous inciter à rêver, nous attrister, nous rendre mélancolique ou nous sourire.

        A travers la poésie le lecteur accède à un univers différent, celui du poète et partage sa
vie intérieure. Tout l’art du poète, sera donc de sélectionner, d’agencer les mots pour
créer l’effet voulu, pour traduire ses pensées, ses impressions, ses sentiments, ses
réflexions, ses préoccupations, ses rêveries, ses divagations...
        La poésie, grâce aux mots, est un concentré d’images de sonorités, de rythmes. Ils
servent de matériau pour évoquer des pensées graves (poètes engagés) universelles (l’amour,
l’isolement, la mort...) fantasques, humoristiques ou fantaisistes.

L’idée principale de ce livret n’est pas de proposer des « recettes » pour rendre les enfants
poètes mais de les aider à prendre possession, du langage et à développer leur pouvoir de
création.
       Ecrire des poésies c’est d’abord jouer, manipuler des mots, des sons, créer des
images exprimer sa personnalité et ses émotions pour découvrir et désacraliser le
pouvoir du langage (pouvoir qui devient accessible). L’enfant agit sur les mots, ils
deviennent outils et non plus contraintes.

                                                                                                3
Activités autour de la poésie
Ecouter des poèmes                              au milieu d’autres poèmes sur les même
Mettre en place un rituel de lecture de         thème.
poèmes par l’adulte ou l’enfant, à un
moment précis de la journée (par exemple        • Quand la poésie est la même pour tous,
pour terminer la demi-journée) : afin             il est possible d’organiser des moments
d’établir un moment de calme (se laisser          d’apprentissage collectif grâce à la
porter, bercer...), de s’imprégner de poésies     technique de la reconstitution de
de s’ouvrir à d’autres sensibilités,              texte : On écrit le texte au tableau, on le
d’illustrer le thème de vie de la classe.         lit deux ou trois fois, on efface quelques
                                                  mots, on le relit malgré les trous...
Enregistrer des poésies                           jusqu'à ce qu’il n’y ait plus rien.
Ce travail d’enregistrement (de poésies
d’auteur ou créées par les enfants) vise à :
• travailler la diction, l’articulation,        • le moment de récitation peut être
• jouer avec sa voix pour exprimer une            envisagé de différentes façons : un
   émotion (poème triste, gai, farfelu,           enfant vient réciter sa poésie à l’adulte
   sonore, comique...)                            qui évalue la mémorisation et la
• valoriser les créations enfantines,             restitution ; un enfant vient réciter la
• stocker les poésies pour les réutiliser         poésie devant le « public classe » pour
   (notamment lors d’un moment de                 travailler la prestance et l’aisance ; deux
   calme, d’écoute)                               enfants récitent la poésie en cascade
                                                  (exercice à caractère ludique mais
Réaliser l’anthologie de la classe                difficile).
Il s’agit de présenter sou forme d’un livre
les poésies (apprises et inventées). Les
poésies          seront        manuscrites,     Poésie et séquences de Français
dactylographiées à l’ordinateur ou à la         Certaines poésies ou créations poétiques
machine, calligraphiées, disposées en           peuvent servir de pont de départ pour des
calligrammes, décorées... Cette anthologie      « leçons »      de     grammaire,      de
peut faire l’objet d’une exposition ou d’un     conjugaison, de vocabulaire...
travail individuel à offrir pour la fête des
parents.
                                                • Reconstitution de texte (de poème)
                                                ➱ Replacer en ordre les différents vers
Mémoriser pour réciter                          d’un poème déjà lu.
                                                ➱ Redisposer en vers un poème présenté
• Proposer des poèmes les plus variés           en texte (grâce aux rimes et groupes de
  possibles (structure, époque, longueur,       souffle, à la ponctuation, aux mots-clés en
  thème, rythme, auteur...)                     débuts de vers). En composant les
                                                différentes dispositions trouvées par les
Le poème peut-être : apporté par                élèves, on s’aperçoit que celles-ci
l’enseignant ou par l’élève. Il peut être       conditionnent la façon de lire (aidant la
choisi dans un fichier ou élu par la classe     compréhension, modifiant les groupes de

                                                                                           4
souffle, permettant d’accentuer certains     • Sur les temps libres, illustration de la
mots, créant donc des émotions                 poésie copiées sur le cahier (petit
différentes).                                  format).
La disposition d’une poésie est              • En séquence d’arts plastiques, en grand
signifiante ( dimension spatiale du            format (éventuellement accompagné
poème).                                        d’une musique) créer un décor pour la
➱ Supprimer la plupart des fins de vers        poésie. A l’aide de peinture, pastels,
d’un poème et les cacher dans une liste        collages, encres... réaliser soit un fond
parmi d’autre fins de vers (de sens, de        soit une illustration.
rimes, de nombre de syllabes identiques ou   • Réécrire le poème à partir de lettres
différents).                                   différentes, découpées dans des
                                               journaux et magazines.
• Manipulation d’images poétiques            • Disposer le poème sous forme de
➱ Extraire des images poétiques d’un           calligramme. Outre le fait de renforcer
poème pour en chercher une définition          la signification du poème, le
ou pour y associer des définitions de sens     calligramme a un aspect esthétique,
équivalent (mais moins poétiques).             typographique, créatif. Il permet aux
➱ Créer des définitions imagées,               enfants, placés en situation de
insolites, pour faire deviner des mots qui     recherche, d’exprimer leur sensibilité
seront à placer dans une grille de mots        (un      poème       inspire     différents
croisés.                                       calligrammes).

Poésie et arts plastiques

                                                                                        5
OBJECTIFS extrait des instructions officielles (1991)

             CYCLE 1                              CYCLE 2                                CYCLE 3
                                                  Attitudes
                                      Construction de la personnalité
                                        Acquisition de l’autonomie
• imaginer des histoires             • manifeste son besoin de créer         • développe sa créativité
• se situe délibérément dans le réel • développe son sens esthétique         • se montre inventif, curieux de
  ou l’imaginaire                                                              toute forme d’Art
• est sensible à des valeurs                                                 • affirme ses choix et ses goûts
  esthétiques et exprime ses                                                   esthétiques, les explique et les
  préférences y compris dans ses                                               fait partager
  productions.
                                                Langue orale
• prend la parole et s’exprime de      • prend sa place dans un dialogue • utilise à bon escient les
  manière            compréhensible      (ex : lecture à deux d’une          variations de la langue que les
  (prononciation, articulation)          poésie)                             situations rencontrées suggèrent
• fait varier les temps des mots de    • ose s’exprimer (ex : lire à voix    en maîtrisant la syntaxe
  liaison entre deux propositions        haute ou réciter une ou sa poésie • mémorise et dit de mémoire un
• accède à la conscience des             devant la classe)                   texte en prose ou en vers
  éléments phoniques                   • utilise une syntaxe plus complète
• identifie les éléments de la           (recours au conditionnel)
  langue parlée, isole et reproduit    • résume et invente la suite d’une
  les sons (jeux de mots)                histoire       (oralement      et
• dit et mémorise des textes courts      collectivement)
  (comptines, poèmes)                  • continue une poésie
                                       • dit un poème de mémoire
                                                Langue écrite
•    produit des textes variés dictés à •  écrit un texte bref répondant à • écrit un texte en tenant compte
    l’adulte                               une consigne claire (en tenant       des contraintes orthographiques
                                           compte du vocabulaire, de la         et     syntaxiques    (compléter,
                                           syntaxe et de la présentation)       construire un récit de fiction,
                                                                                structurer un texte par sa
                                                                                présentation.
             Constituer l’anthologie poétique de la classe (recueil témoignant du vécu poétique de la
                                      classe : poèmes d’auteurs et d’enfants)
                                                    Lecture
• Identifie à l’oreille et à l’écrit • utilise une bibliothèque : repère, • lit      en   situation    de
  des éléments simples composant       identifie, choisit et consulte des   communication un texte (une
  un mot (syllabe, phonème)            ouvrages en fonction du but          poésie) de façon expressive
• participe à l’élaboration d’une      recherché (recherche de poésies      témoignant qu’il a compris ce
  bibliothèque (sonore) de la          sur un thème précis)                 qu’il a lu
  classe en enregistrant au • lit oralement un texte en
  magnétophone ou en dictant au        articulant correctement et ne
  maître un court texte                comprenant le sens de ce qui est
                                       lu
                                                      Arts
         •   considère des objet, des images (des mots comme des matériaux d’expression
         •   découvre puis utilise un procédé d’expression en fonction du but recherché
         •   réalise une production en fonction d’une intention, d’un désir
         •   trouve des règles d’organisation des formes, des couleurs, des images (des mots)
                                                                              • s’initie à l’édition de textes
                                                                              (activités de calligraphie, écriture
                                                                              soignée pour un destinataire, mise
                                                                              en page)

                                                                                                                6
Quelques définitions poétiques

                                                   règles. Selon le nombre de sons
La mesure du vers                                  répétés à la fin des vers, la rime peut
 La longueur d’un vers se mesure par le           être :
   nombre de syllabes (ou pieds) qui le        •   pauvre : une voyelle finale
   composent.                                  •   riche : une syllabe finale
Toutes les syllabes se prononcent et sont      •   très riche : deux syllabe moins la
comptabilisées sauf pour le cas de la              consonne
syllabe terminée par « e » :                   •   léonine : deux syllabes homophones

• quand elle est placée à la fin d’un vers,     Tout au long d’une poésie ces rimes
  elle n’est pas comptée, c’est donc une         alternent et s’appellent suivant leur
  syllabe « muette ».                            disposition :
• quand elle se trouve à l’intérieur d’un      • rimes croisées : ABAB
  vers, elle n’est comptabilisée que si elle   • embrassées : ABBA
  est suivie d’une consonne ou d’un « h »
  aspiré.                                      Allitération : répétition voulue d’un même
                                               phonème dans un vers.
 Selon le nombre de leurs syllabes, les       Calligramme : poème dont la disposition
   vers peuvent s’appeler :                    typographique est en rapport avec le thème
• octosyllabe : 8 syllabes                     du texte. Les calligrammes sont nés avec
• décasyllabe : 10 syllabes                    Apollinaire.
• alexandrin : 12 syllabes                     Cadavres exquis : « jeu de papier plié qui
Mais les formes de compositions poétiques      consiste à faire composer une phrase ou un
dont la mesure et les rimes sont régulières    dessin par plusieurs personnes, sans
appartiennent au répertoire de la poésie       qu’aucune d’elle puisse tenir compte de la
« Classique ».                                 collaboration ou des collaborations
La poésie contemporaine avec l’apparition      précédentes.
du mouvement Symboliste a opéré un             Métaphore, image : rapprochement de
éclatement de ces règles pour donner           deux réalités très distinctes entre lesquelles
naissance aux vers blancs (libres) sans        on a tissé des liens de comparaison,
régularité de longueur ni de rime.             d’équivalence.

La rime
 Ce retour du même son à la fin de deux
  ou plusieurs vers, obéit également à des

                                                                                           7
Comptines

        La tradition orale populaire constituait une véritable littérature pour enfant à une
époque où elle n’existait pas dans le domaine de l’Art savant et de l’imprimé et en un temps
où la pédagogie n’avait pas encore reconnu l’enfant comme un public distinct.
                                                          Un, deux, trois, quatre, cinq, six,
A l’origine, des formulettes (petites             sept, huit,
phrases) ponctuaient le début, la                         Mademoiselle, retirez-vous.
progression, les péripéties et la fin des
contes.                                            Les comptines au texte altéré par des
Ainsi répond la galette dans l’histoire              jeux phonétiques, des allitérations, des
« Roule galette » aux différents animaux             mots ou des idiomes empruntés à des
qui veulent la croquer :                             langues étrangères, pouvant devenir
                                                     incompréhensibles. Elles servent à
        Je suis la galette,                          s’approprier le langage, à développer et
        je suis faite avec du blé                    à améliorer l’articulation.
        ramassé dans le grenier.
        On m’a mise à refroidir
        mais j’ai mieux aimé courir.                      Am stram gram
        Attrape-moi si tu peux.                           Pic et pic et colégram
                                                          Bour et bour et ratatam
Ces formulettes servaient de schéma                       Am stram gram
conducteur pour le scénario ainsi que de                  Pic dam !
mise en condition de bonne réceptivité de
l’auditoire.                                      Ces comptines sont riches en jeux de mots,
L’ensemble des formulettes enfantines             en rimes, en assonances, véritables
accompagne l’enfant tout au long de son           fantasmagories de vocables et de sonorités
développement        (bercement,     premiers     étranges.
gestes, jeux de doigts...) et a des rôles
sécurisant, affectif et pédagogique.                      Ca un, ça deux, ça trois,
Les comptines, simple sous-ensemble des                   ça quatre, ça six (cassis)
formulettes, étaient à l’origine des petites
chansons enfantines qui servaient à                Les          comptines          narratives
désigner un joueur au hasard en comptant,            d’événements historiques ou religieux
prélude rituel pour le jeu.                          au fil d’une histoire cocasse.
On distingue plusieurs sortes de
comptines :                                               Alexandre le grand,
 les comptines numériques (servant à                     Roi de Macédoine,
   concevoir les mots-nombres comme                       avait un cheval
   désignants de quantités) avec souvent                  Nommé Bucéphale.
   une injonction de sortie à la fin, pour
   éliminer un joueur.                             Les comptines anthropomorphistes
                                                     mettant en scène des animaux qui
        Pique pique la bourrique                     deviennent fantastiques et qui parlent.
        Compte bien s’il y en a huit.
                                                          Au clair de la lune

                                                                                            8
Trois petits lapins                      Certaines sont assorties de gestes et
       Qui mangeaient des prunes                comme les jeux de doigts, elles permettent
       Comme trois coquins                      un affinement des gestes (vers la pince
       La pipe à la bouche                      pouce-index) pour une plus grande
       Le verre à la main                       précision.
       Ils disaient : Mesdames                  Les comptines permettent :
       Versez-nous du vin                        l’acquisition       de        structures
       Jusqu'à demain matin                        syntaxiques, de vocabulaire (par
                                                   imprégnation),
Les mélodies élémentaires (mélopées qui          une approche de l’étude des sons
soutiennent les comptines sont facilement          grâce aux rimes et aux assonances,
reproductibles par les enfants car elles sont    un support « idéal » pour inciter les
adaptées à leur tessiture.                         enfants à la création puisqu’ils
Les comptines sont souvent rythmées                s’approprient       facilement       le
par une cadence régulière qui conduit              mécanisme.
naturellement à les accompagner en tapant
des mains.

                                                                                        9
A.B.C.D...1.2.3.4....

Cinq mésanges vertes                               1 nez,                        Mais qui est-ce
Font des pirouettes                                2 nez                    cette drôle de princesse,
L’une se casse la patte                            3 nez,                  cette forme enchanteresse,
Y’ en a plus que quatre.                           4 nez,                          qui se dresse
Quatre mésanges vertes                             5 nez,                       et qui s’empresse
Sur une brouette                                   6 nez,                      entre le R et le T ?
L’une s’envola                                     7 nez,                         Cette drôlesse
Y’ en a plus que trois                             8 nez,                          qui paresse,
Trois mésanges vertes                              9 nez,                          qui caresse ?
S’en vont à la fête                                Dîner !                 C’est le S, votre Altesse !
L’une se pince la queue                                                             J. Cayeux
Y’ en a plus que deux
Deux mésanges vertes
Chantent à tue-tête
Vient le clair de lune                             1 et 1, 2                     10 boules sur mon boulier
Il n’en reste plus qu’une                    un lapin sans queue,                    9 ruisseaux à traverser
Une mésange verte                                  2 et 2, 4                           8 chansons à chanter
Triste et bien seulette                      un lapin sans pattes.                        7 baisers à donner
Mais voilà le loup                                                       Quel programme, quel programme
Y’ en a plus du tout !                                                           vite, vite il faut me lever !
                                                                                          6 serviettes à plier
                                                                                          5 tulipes à arroser
                                                J’ai une main                             4 pêches à manger
Le petit Benoît compte jusqu'à trois            J’ai dix doigts                        3 histoires à raconter
La petit Alice compte jusqu'à six               En voici deux            Quel programme, quel programme
Mon frère Vincent compte jusqu'à cent           En voici trois                   Vite, vite il faut me lever !
Mon cousin Emile compte jusqu'à mille                                               2 chaussettes à repriser
Pour compte jusqu’au million,                                                    une seule lettre à en voyer
Il faut s’appeler Marion !                                              Quel programme, quel programme !
                                                                                            Mais je le ferai !
                                                Dans mon jardin
                                                deux jolis nains
La cravate à petits pois pour le roi           jouent au jongleur
La chaussette à trous trous pour le fou          avec des fleurs.                   Un - je vais faire du pain
La machine à laver pour les pieds               Quand il les voit                  Deux - je vais faire du feu
Et la boîte à bisous pour vous.                   sauter de joie                Trois - je vais cuire mes pois
           A. Serres                               le jardinier         Quatre - je vais éplucher mes patates
                                                 ouvre un d’eau                Cinq - je vais cuire ma dinde
                                          et arrose les deux jumeaux.       Six - je vais cuire mes saucisses
                                                    P. Coran                   Sept - je vais faire ma galette
Le bébé baobab obéit au boa                                                                  Huit - c’est cuit !
Deux dindes aident un dodu dindon                                                Neuf - je vais cuire un bœuf
Le jars est jaloux des jolis jarrets                                                          Dix - c’est fini !
A l’île au lilas le loup lit la loi
La pie pond sans piper                                  1,
Le paon pompeux papote                       je connais quelqu’un,
           A. Rosenthiel                                2,                   Le premier a mis ses chaussette,
                                               qui a de jolis yeux,         Le second a chaussé ses souliers,
                                                     1, 2, 3,                        Le troisième les a lacés,
                                              qui aime le nougat,                    Le quatrième les a cirés,
Kokoriko                                            1, 2, 3, 4,                Le cinquième les a fait briller,
il est huit heures à la radio                qui habite à Chartres,               Et zoup !... Il s’est sauvé...
Kirikiki                                          1, 2, 3, 4, 5,                              On n’a retrouvé
il est midi à Tahiti                       qui cuit des coloquintes,                  Que ses souliers usés !
Kouroukoukou                                     1, 2, 3, 4, 5, 6,
il est minuit à Katmandou.                  qui s’appelle Clarisse !

                                                                                                            10
Humour
Les hiboux                                                Tigres                     Conseils donnés par une sorcière
Ce sont les mères de hiboux                        Tigre et sa tigresse                          Retenez-vous de rire
Qui désiraient chercher des poux                   vont à la kermesse                             Dans le petit matin !
De leurs enfants, leurs petits choux,               danser la jabadao
En les tenant sur leurs genoux            avec des gens comme il faut font des                   N’écoutez pas les arbres
                                                        politesses                               Qui gardent le chemin !
Leurs yeux d’or valent des bijoux                  Tigre et sa tigresse
Leur bec est dur comme des cailloux,         Puis en deux coups de museaux                           Ne dites votre nom
Ils sont doux comme des joujoux,            croquent les gens comme il faut !                        A la terre endormie
Mais aux hiboux points de genoux !                   J.J. Kérourédan                             Qu’après minuit sonné !

Votre histoire se passait où,                                                                       A la neige, à la pluie
Chez les Zoulous, Les Andalous ?                  Ecureuil curieux                                Ne tendez pas la main !
Ou dans la cabane de bambou ?                  Un écureuil des écurieux
A Moscou ? Ou à Tombouctou ?                       On dit bien l’œil                              N’ouvrez votre fenêtre
En Anjou ou dans le Poitou ?                       et les deux yeux.                             qu’aux petites planètes
Au Pérou ou chez les Mandchous ?              Un écureuil qui ouvre l’œil,                    Que vous connaissez bien !
                                                   c’est très curieux,
Hou ! Hou !                                   ça suit des yeux, et ça épie                 Confidence pour confidence
Pas du tout, c’était chez les fous.                    toute la vie                       Vous qui venez me consulter,
         R. Desnos                                     de la forêt.                                Méfiance, méfiance !
                                                    Quel indiscret !                  On ne sait pas ce qui peut arriver !
                                                                                                               J. Tardieu
Attention travaux
C’est une honte s’exclama                           Pomme et Poire
l’inspecteur des travaux infinis                     dans l’armoire                                            Le pélican
devant le chantier silencieux :                      Fraise et noix                                Le capitaine Jonathan
le serrurier est assoupi ;                            dans le bois                            Etant âgé de dix-huit ans,
les menuisiers somnolent ;                            Sucre et pain                          Capture un jour un pélican
les peintres reposent ;                               dans la main                       Dans une île d’Extrême Orient.
les plombiers roupillent ;                           Plume et colle                              Le pélican de Jonathan,
les carreleurs rêvent ;                               dans l’école                     Au matin pond un œuf tout blanc
les sanitaires ronflent.                        Et le faiseur de bêtises                          Et il en sort un pélican
Il n’y a que vous mon cher,                 bien au chaud dans ma chemise                Lui ressemblant étonnamment.
que vous à rester debout ;                           L. Bérimont                                 Et ce deuxième pélican
Votre zèle est honorable !                                                          Pond, à son tour, un œuf tout blanc
Quelle est votre affectation ?                                                                D’où sort, inévitablement
- Je suis marchand de sable !                            La puce                             Un autre qui en fait autant.
           P. Ferran                                Je suis chez moi             Cela peut durer pendant très longtemps
                                                  Chez tout le monde.               Si l’on ne fait pas d’omelette avant.
                                                   Mais j’ai l’humeur                                          R. Desnos
Trois microbes                                        Vagabonde.
Trois microbes, sur mon lit,                      Je saute d’une hôte             Pour apprendre aux enfants l’usage
se consultent, bien assis.                              A l’autre.                                           des gros mots
L’un s’appelle Scarlatine                            Ma spécialité                        Prenez un gros mot : éléphant
Il parle d’une voix fine.                            Est la couture.                         et découpez-le en rondelles
L’autre s’appelle Rougeole                               Je pique                           regardez ce qu’il y a dedans
Et prend souvent la parole.                            Sur mesure                                Il y a l’aile, il y a le faon
Et le troisième, Oreillons, ressemble à              Et sans rature.                        et le total c’est l’aile et faon
un champignon.                            D’ailleurs dans les grands magasins            Mais direz-vous c’est étonnant
Ils discutent pour savoir                         Toujours je me tiens                 les éléphants ont-ils des faons ?
Lequel dormira ce soir                            Au rayon confection               Non les éléphants n’ont pas d’ailes
Dans mon beau lit blanc                        Section « Prêt-à-porter ».                  puisqu’ils voyagent en avion
Mais fuyons tant qu’il est temps !                     J. Sadeler                     et ils n’ont pas non plus de faons
Ces trois microbes ma foi,                                                          Mais ils ont des petits éléphanteaux
Dormiront très biens sans moi.                                                                Ils ne vont jamais à l’école
           J.L. Vanham                                                                     mais ils vont parfois au zoo...
                                                                                                                   C. Guillot

                                                                                                                          11
Famille
Un enfant                                       Naître                                                          Aux feuillantines
                                                                                 Mes deux frères et moi, nous étions tous enfants,
Un enfant                                 Naître, c’est oser,                           Notre mère disait : Jouez, mais je défends
Est assis sur un banc,                 c’est prendre le risque,          Qu’on marche dans les fleurs et qu’on monte aux échelles.
Des pigeons confiants               c’est quitter la terre ferme,
Roucoulent près du banc.           c’est ne pas savoir à l’avance                              Abel était l’aîné, j’étais le plus petit
                                                                                       Nous mangions notre pain de si bon appétit,
    L’enfant                             ce qu’il y a devant,              Que les femmes riaient quand nous passions près d’elles.
    Aux yeux clairs                   c’est accepter l’inconnu,
    Rêve au milieu d’eux                     l’inattendu,                           Nous montions pour jouer au grenier du couvent
    Et les pigeons merveilleux                l’imprévu,                               Et là, tout en jouant, nous regardions souvent
                                                                                     Sur le haut d’une armoire un livre inaccessible.
    Roucoulent, joyeux.                    et la rencontre.                            Nous grimpâmes un jour jusqu'à ce livre noir,
Jeune garçon,                    Naître, c’est quitter son abri, c’est              Je ne sais pas comment nous fîmes pour l’avoir,
Joue avec la vie,                      essuyer le vent de face                       Mais je me souviens bien que c’était une Bible.
Jeune garçon,                     et porter le soleil sur son dos.                    Ce vieux livre sentait une odeur d’encensoir.
Tu en as envie.                    Naître, c’est avoir trop froid                    Nous allâmes ravis dans un coin nous asseoir.
    Jeune garçon                            et trop chaud.                      Des estampes partout ! Quel bonheur ! Quel délire !
    Joue avec le vent,               Naître, c’est n’avoir plus
                                                                                   Nous l’ouvrîmes alors tout grand sur nos genoux,
    Jeune garçon                           d’autre maison                                Et dès le premier mot il nous parut si doux
    Il est encore temps.                   que le paysage.                           Qu’oubliant de jouer, nous nous mîmes à lire.
S. Ramant                                   J. Debruyne                                                                  V. Hugo

                                             Grand-mère                                                               Noces
La réunion de famille                Grand-mère a perdu la tête                     Pas avant des jours et des jours mais
Ma tante Agathe                       Elle raconte à ses enfants                                           je te le promets
Vient des Carpates                  Des histoire pleines de vent                                         je t’épouserai toi
A quatre pattes                    de garde barrière, de sornettes                                                   ta sœur
                                    Et papa n’était pas content.                                        tes trois cousines
Mon oncle André                        Quand papa était enfant                                                 la cuisinière
Vient de Niamey                    Ensemble, ils faisaient la fête,                               et la fille du chauffeur
A cloche-pied                    Ils riaient, cassaient des assiettes                                      de la limousine
                                    Grand-mère a perdu la tête,                          Pas avant des jours et des jours
Mon frère Tchou                    Salue la poêle, caresse la banc                                  mais c’est un secret.
Vient de Moscou                  Chante quand souffle la tempête,                                          J. Zacharezuk
Sur les genoux                    Dit qu’il faut inventer le temps.
                                   Les enfants sont très contents.
Ma sœur Loulou                               D. Thivolet                                                                 Familiale
Vient de Padoue                                                                                             La mère fait du tricot
A pas de loup                                                                                                 Le fils fait la guerre
                                              Mon enfant                                     Elle trouve ça tout naturel la mère
Grand-mère Ursule                J’aime tes yeux bleus qui s’étonnent,                   Et le père qu’est-ce qu’il fait le père ?
Vient d’Ashtabule                Tes joues rouges comme des pommes                                              Il fait des affaires
                                    Et tes cheveux qui volent, volent                                     Sa femme fait di tricot
Sur les rotules
                                           Au vent d’automne.                                                Son fils fait la guerre
                                        J’aime ton délicieux babil                                            Lui fait des affaires
Grand-père Armand                            Le chant d’avril                                    Il trouve ça tout naturel le père
Vient de Ceylan                                De ton rire.                                                      Et le fils et le fils
En sautillant                                 O mon enfant                                        Qu’est-ce qu’il trouve le fils ?
                                              J’aime redire                            Il ne trouve rien absolument rien le fils
Ma nièce Ada                          Lorsque s’écoule l’or du soir                                 Le fils, sa mère fait du tricot
Vient de Java                                Le belle histoire                           Son père fait des affaires lui la guerre
A petits pas                                  qui t’endort.                                           Quand il aura fini la guerre
                                   J’aime à te prendre dans mes bras                           Il fera des affaires avec son père
                                     Et te bercer d’une voix tendre          La guerre continue la mère continue elle tricote
Mon neveu Jean                             Tout bas, très bas...                            Le père continue il fait des affaires
Vient d’Abidjan                     Et quand tes yeux se sont fermés                           Le fils est tué il ne continue plus
Clopin-clopant                     Lorsque ton front sur mon épaule                        Le père et la mère vont au cimetière
                                     A roulé comme une fleur d’or,              Ils trouvent ça tout naturel le père et la mère
Oncle Firmin Vient de Pékin      J’écoute des voix étranges Et je sens                                La vie continue la vie avec
Sur les deux mains                        des ailes d’archanges                              le tricot la guerre avec les affaires
Mais tante Henriette                         Qui me frôlent                            Les affaires la guerre le tricot la guerre
Vient à la fête                              Lentes, lentes...                            Les affaires les affaires et les affaires
                                                 Tu dors.                                               La vie avec le cimetière.
En bicyclette
                                               R. Richard                                                                 J. Prévert
J. Charpentreau

                                                                                                                                   12
Calendrier
Au pays du lundi                                                     Le roi                                                Novembre
Au pays du lundi, on démarre plein d’énergie                 Le Roi de carreau a dit                      Quand les fleurs rougiront
Au pays du mardi, on continue comme lundi                      A la reine de cœur                             les capuches s’en iront
Au pays du mercredi, on dors jusqu'à midi                 - Venez danser dans le trèfle                       capuches et capuchons
Au pays du jeudi, on recommence c’est la vie                   Le valets de pique                           vers l’école des garçons.
Au pays du vendredi, on a beaucoup d’amis                   Feront la haie d’honneur                    Tombe la pluie de novembre
Au pays du samedi, la semaine est presque finie            Et vous ferez mon bonheur                les marrons sont sous le cendre.
Au pays du dimanche, on s’embrasse, on                                                                           C’en est fini de l’été
mange, on rit !                                             La Reine de cœur a dit                           L’oiseau est tout étonné
                                                               Au roi de carreau                              Capuchon capuchonné
La nouvelle année                                         Ne dansons pas dans le trèfle                    On te voit le bout du nez
Nouvelle année, année nouvelle,                               Les valets de pique                       Souffle le vent de Novembre
Dis-nous, qu’as-tu sous ton bonnet ?                        Feraient notre malheur                       Les averses vont descendre.
J’ai quatre demoiselles                                    Car ce sont des tricheurs                     Vers l’école des capuchons
La plus jeune est en dentelles,                                   G. Calmy                                      et capuche s’en iront
La seconde en épis,                                                                                       s’en iront tous les garçons
La cadette est en fruits                                                                                  quand les feuilles voleront
Et la dernière est en neige.                                                                       Les marrons sont sous la cendre.
Voyez le beau cortège !                                             La source                         Fouette la pluie de novembre.
Nous chantons, nous dansons                                 Tout au long de l’année                                        B. Clavel
La ronde des saisons.                                         Me parle cette source
L. Paulin                                                      En janvier enneigé,
                                                                En février gelée,                                          Souhaits
Le roi Carnaval                                             En mars encor’ boueuse,                  Dans l’ombre de l’hiver glacé,
Le roi Carnaval                                               En avril chuchotante,                   Un an tout neuf a commencé.
Qui a un faux nez de carton rose                            En mai garnie de fleurs,                     Petit Papa, Maman chérie,
Est à cheval                                                  En juin toute tiédeur,                     Je n’ai pas de gerbe fleurie
Sur un bœuf gras couronné de roses.                           En juillet endormie,                    A vous offrir en ce beau jour,
                                                             En août presque tarie,                 Mais permettez qu’avec amour,
Il a des grelots argentins                                  En septembre chantante,                  Au seuil de la nouvelle année,
A son chapeau crevé de papier trop mince                        En octobre dorée,                 Comme une offrande enrubannée,
Et porte habit brodé de satin                                En novembre frileuse,                    Je vous souhaite de tout cœur
Comme le plus mirobolant des princes.                         En décembre glacée.                  Beaucoup de joie et de bonheur !
                                                             C’est toi, petite source,                                  R. Richard
Les collets montés et les arlequins                           Le cœur de la forêt !
Lui font une royale cour                                         L. Guillaume
Et mènent du bout des doigts comme faquins                                                                                  Février
Des fées aux masques de velours.                                                                   « Moi, je suis le second, le mois
T. Klingsor                                                                                     Du mardi gras » chantonne Février.
                                                                        Noël                    « Confettis, mirlitons, masque rose
Le comte de la Mi-Carême                          Trois petits sapins                                De chat, nous voici déguisés !
Venant d’Espagne ou de Bohème,                    se donnaient la main                                       Allons nous amuser ! »
Au trot de son lent cheval blanc,                 car c’était Noël
Passe dans les villes de Brabant                  de la terre au ciel.
Le comte de la Mi-Carême.                                     Prirent le chemin                                                   Juin
                                                              menant au village                              Dans la meute de foin,
Ceux qui ne l’ont pas aperçu                                  jusqu'à l’étalage                            S’est caché, aujourd’hui,
Quand vers le soir sonnent les cloches,                       d’un grand magasin.                            Le gentil mois de Juin,
C’est qu’ils eurent les yeux en poche.            Là ils se couvrirent                                              Il dit à la souris :
Mais tous les enfants, eux, tous l’ont vu.        de tout ce qui brille :                                   « C’est l’été, il fait bon,
De sa main gauche, il tient des fouets            boules et bougies,                                     Viens rentrer la moisson ! »
Et de sa main droite, un lot de jouets            guirlandes pour luire,
En bois léger, en carton, en pierre.                          et s’en retournèrent
Il en a plein trente paniers.                                 la main dans la main                                            Octobre
Il en a plein vingt sacs de toile,                            par le beau chemin                      Je suis le mois des vendanges,
Et l’on prétend qu’en chaque étoile                           de l’étoile claire                             Dit Octobre en souriant.
Il en a plein trois cents greniers.               jusqu'à la forêt                        J’ai peut-être l’air étrange Mais avec tous
                                                  où minuit sonnait,                                                        mes pieds,
Ainsi lesté, ainsi chargé,                        car c’était Noël                                                  J’écrase les raisins
S’en va d’un pas toujours le même,                de la terre au ciel.                                         Pour faire du bon vin !
Par les chemins des soirs légers                  J.L. Vanham                                                Et, pendant ce temps-là,
Le comte de la Mi-Carême.                                                                                              La petite souris
E. Verhaeren                                                                                              Croque une pomme d’api !

                                                                                                                                    13
Saisons
Le bel automne est revenu                                 Quand s’annonce l’automne                                    Le printemps
A pas menus, menus,                                        La marmotte marmonne                      Le Temps a laissé son manteau
Le bel automne est revenu,                                  Rentre dans sa maison                    De vent, de froidure et de pluie,
Dans le brouillard, sans qu’on s’en doute.                 Et dit : « C’est la saison                       Et s’est vêtu de broderie
Il est venu par la grand-route,                              Où mon lit a du bon                       De soleil luisant, clair et beau
Habillé d’or et de carmin                                         Dormons ».                                   Il n’y a bête ni oiseau
Et, tout le long de son chemin,                             Et elle attend le temps              Qu’en son jargon ne chante ou crie :
Le vent bondi, les pommes roulent,                         Du soleil, le printemps,                 « Le temps a laissé son manteau
Il pleut des noix, les feuilles croulent...                      En dormant.                       De vent, de froidure et de pluie. »
Ne l’avez-vous pas reconnu ?                                        G. Jean                             Rivière, fontaine et ruisseau
Le bel automne est revenu.                                                                                     portent en livrée jolie
R. Richard                                                                                            Gouttes d’argent d’orfèvrerie ;
                                                                    Hiver                             Chacun s’habille de nouveau :
Chaleur                                                Hiver, vous n’êtes qu’un vilain !             Le Temps a laissé son manteau.
L’air est pesant comme du plomb.                        Eté est si plaisant et gentil...                               C. D’Orléans
            Tombant d’aplomb,                          Eté revêt champs, bois et fleurs
Le soleil grille les feuillages.                           De sa livrée de verdure
            Pas un frisson,                            Et de maintes autres couleurs...
            Pas un nuage.
Les maisons dorment volets clos.                       Mais vous, hiver, vous êtes plein                                Météorologie
Les bœufs se couchent dans l’enclos.                   De neige, vent, pluie et grésil...             L’oiseau vêtu de noir et de vert
            Signe d’orage :                            Hiver, vous n’êtes qu’un vilain.                    m’a apporté un papier vert
Les hirondelles rasent l’eau,                                  C. D’Orléans                        Qui prévoit le temps qu’il va faire
Les mouches vous piquent la peau...                                                                Le printemps a de belles manières.
            Ah ! qu’il fait chaud !                                                                 L’oiseau vêtu de noir et de blond
R. Richard                                              Oiseaux qui portez les saisons                   M’a apporté un papier blond
                                                                 L’oiseau de l’été                    Qui fait bourdonner les frelons.
Chaleur                                                 L’oiseau doré des courses folles,                   L’été sera brûlant et long.
Tout luit, tout bleuit, tout bruit.                            d’aventures qui rient                L’oiseau vêtu de noir et de jaune
Le jour est brûlant comme un fruit                            en grappes de raisin...                    M’a apporté un papier jaune
Que le soleil fendille et cuit.                               Personne n’aime voir                   Qui sent bon la forêt d’automne.
Chaque petite feuille est chaude                           l’oiseau gris de l’automne,              L’oiseau vêtu de noir et de blanc
Et miroite dans l’air où rode                                   la lumière cassée,                      M’a apporté un flocon blanc.
Comme un parfum de reine-claude.                             les soirées monotones...                      L’oiseau couleur de temps,
Du soleil comme de l’eau pleut                              Oiseaux blancs de l’hiver                           que m’apportera-t-il ?
Sur tout le pays jaune et bleu                               grands oiseaux éclatants                                          C. Roy
Qui grésille et oscille un peu.                                faites venir le temps
A. De Noailles                                             des fenêtres qui s’ouvrent,
                                                           du soleil qui joue du piano
L’arc en ciel                                          dans les cheveux, sur les rideaux.
De sa cage de nuages et de pluie                           Faites monter de l’horizon                                      Printemps
Un bel oiseau s’est évadé                             l’oiseau du printemps, l’oiseau fou               L’oiseau vert vient de passer
Pour se poser sur les doigts du soleil               pour les premiers bonheurs de l’herbe,                vole, vole bel oiseau vole,
Bleu indigo violet                                       pour la joie dorée des coucous,                L’oiseau vert vient de passer
Vert jaune orangé rouge                                pour le grand rire des poumons...                     Nous irons après l’école
Plus un enfant ne bouge                                             A. Mondo                              Nous irons en bande folle,
Le bel oiseau a déployé                                                                                Dans les chemins verts danser
Les plumes sur le ciel                                                                                    Vole, vole bel oiseau vole,
R. Besse                                                          Rêve d’hiver                          Le printemps va commencer.
                                                              Sur le prunier blanc                                         X. Privas
Automne                                                         le rossignol dort,
Dans le brouillard s’en vont un paysan cagneux                        transi,
Et son bœuf lentement dans le brouillard d’automne            rêvant au printemps
Qui cache le hameaux pauvres et vergogneux                     et d’un genêt d’or
Et s’en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d’amour et d’infidélité
                                                                      fleuri.                    Quand Automne en saison revient
Qui parle d’une bague et d’un cœur que l’on                          Tanaka                        Quand automne en saison revient,
brise                                                                                                      La forêt met sa robe rousse
Oh ! l’automne a fait mourir l’été                                                               Et les glands tombent sur la mousse
Dans le brouillard s’en vont deux silhouettes                                                          Où dansent en rond les lapins.
grises                                                                                               Les souris font de grands festins
G. Apollinaire                                                                                Pendant que les champignons poussent.
                                                                                                    Oh ! Que la vie est douce, douce,
                                                                                                   Quand automne en saison revient.
                                                                                                                              Samivel

                                                                                                                                   14
Nature
Dame la pluie                                     Rébus élémentaire                                             Ordre cosmique
Que faites-vous dame la pluie                        Ma première                              Le vent s’enroule autour des pins,
Sur mes carreaux frappant ainsi ?                    C’est la terre                            Souffle tout au long de la plaine,
                                                   Pour la labourer.                              Sème des fleurs dans le jardin,
Le ciel a donc tant de chagrin
                                                     Mon second                                   Joue avec l’eau de la fontaine.
Qu’il pleure depuis ce matin ?                      L’air profond                               La terre s’ouvre autour du grain,
Que faites-vous dame la pluie                      Pour le respirer.                                     Eternelle mère porteuse,
Sur mes carreaux frappant ainsi ?                   Ma troisième                                        Jamais sollicitée en vain,
Lavez-vous le joli jardin                           L’eau bohème                            Elles est nourrice, elle est vieillesse.
La maison, le toit, le chemin ?                    Pour la savourer.                                      Le soleil jette son reflet
Que faites-vous dame la pluie                        Mon dernier                                   Sur l’écume de l’onde amère,
Sur mes carreaux frappant ainsi ?                     Feu sorcier                                    Et va finir son tour complet
                                                  Pour nous éclairer.                        Aux portes de l’autres hémisphère.
                                                     B. Lorraine                                La nuit proche hésite un instant,
Le brouillard
                                                                                                 Heure bleue où la mer s’apaise,
Le brouillard a tout mis                                                                        Devient murmure en chuchotant
Dans son sac de coton ;                  Il prend une boule de neige
                                          Il prend une boule de neige                               Berçant le sable et la falaise.
Le brouillard a tout pris                                                                        Le monde, ici, peut s’endormir,
Autour de ma maison.                     La serre très fort sur son cœur
                                                                                                  Chacun fera ce qu’il doit faire,
Plus de fleurs au jardin,                 Et fond tout entier avec elle                                   L’aurore va redécouvrir
Plus d’arbres dans l’allée ;                   Ne laissant ici-bas                              le Soleil, l’Eau, l’Air et la Terre.
La serre du voisin                         Qu’une paire de bretelles                                          C. De La Soujeole
Semble s’être envolée.                       Dans une flaque d’eau.
Et je ne sais vraiment                           P. Vincensini
                                                                                                                         La pluie
Où peut s’être posé
                                                La rivière endormie                                     La pluie n’a jamais froid
Le moineau que j’entends                                                                                 Même en automne grise
                                    Dans son sommeil glissant l’eau suscite une songe
Si tristement crier.                un chuchotis de joncs de roseaux d’herbes lentes                Elle glisse sur le bord du toit
M. Carême                            et ne sais jamais bien dans son dormant mélange           Joue aux balançoires des feuilles
                                    où le bougeant de l’eau cède au calme des plantes                               Va sur l’étang
Pierres                                La rivière engourdie par l’odeur de la menthe                                   A petits pas
                                      dans les draps de son lit se retourne et se coule
Le ruisseau use                       Mêlant ses mortes eaux à sa chanson coulante
                                                                                                   La pluie n’a pas peur de nous
Les pierres dures ;                  elle est celle qu’elle est surprise d’être une autre    Elle attend nos yeux jusqu'à l’aube
Les pierres durent,                     L’eau qui dort se réveille absente de se flot             Prend nos vitre pour un miroir
Le ruisseaux ruse.                        écarte de ses bras les lianes qui la lient                                      Regarde
Et cela dure                             déjouant la verdure et l’incessant complot                        Et ne se reconnaît pas
Depuis longtemps.                    qu’ourdissent dans son flux les algues alanguies                               G. Bocheleir
Un jour pourtant,                                          C. Roy
Le ruisseau dur
                                              Elle est là dans le verre
Est triomphant :                                                                                                        Au vent
                                                 Pour se désaltérer.
Les pierres s’usent,                                                                                  Monsieur le vent sauvage
                                                   Pour bouillir...
Elles s’amusent,                                                                                 Demande passage. Hou ! Hou !
                                             Au robinet pour se laver...
Avec le temps.                                                                                         Monsieur le vent voyage
                                            Dans l’arrosoir, pour arroser
Les pierres musent,                                                                                       Sans bagages partout.
                                           Dans la rivière, pour rafraîchir
Elles s’amusent,                                                                                  Cher vent, as-tu une bouche ?
                                                    Dans le canal
Mais elles s’usent ;                                                                             Saurais-tu au cours de ta ronde
                                                  Dans les nuages
Le temps abuse                                                                                              Porter un message ?
                                              Elle est dans la fontaine
De ses patients.                                                                                              Alors je t’en prie,
                                                    pour décorer.
 Le ruisseau dur,                                                                                           Dis bonjour et salue
                                       Et dans la citerne pour éteindre le feu.
 Avec le temps,                                                                                          Les enfants du monde,
                                                   Dans le barrage
Le ruisseau use                                                                                                       Mes amis
                                         pour nous donner de la lumière...
Les pierres dures.                                                                                                  B. Tanaka
                                           Et dans la mer, pour naviguer
Le ruisseau dure,
                                               Et partout pour vivre !
Les pierres s’usent,
                                                     C’est l’eau !
Le temps attend.                                                                                      Des branches Des feuilles
                                                 C. Solé Vendrelle
J. Demeuzes                                                                                            Des pétioles Des folioles
                                                                                                             Un monde ramifié
                                                           Pluie
Soliloque                                                                                             qui bouge, bruit et bondit.
                                                        Les doigts
Quand la pluie pique                                                                                    Un royaume de verdure
                                                      innombrables
son plic est réciproque :                                                                                 de vertiges et de vent,
                                                        de la pluie
                                                                                                       un labyrinthe de souffles
le choc s’applique                                      pianotent
                                                                                                               et de murmures.
et réplique ploc !                                     aux fenêtres
                                                                                                            Un arbre en somme.
A. Serres                                                 du ciel
                                                         L. Spède                                                 J. Lacarière

                                                                                                                                15
Nature
Le petit nuage                                             La chanson du brouillard                                      Les étoiles filantes
Minuscule et blanc, un nuage                              J’ai une gomme dans la main                               A travers le ciel sonore,
dans le ciel traînait son ennui                               Et j’efface les canards                          Tandis que du haut des nuits,
quelle idée aussi à son âge                                Dans le ciel blanc du matin.                        Pleuvent, poussière d’aurore,
d’être amoureux fou de la nuit !                          Je suis le brou, le brouillard.                               Les astres épanouis,
                                                                                                             Tas de feux tombants qui perce
Elle ne se doutait de rien                                J’ai une gomme dans la main.                               Le zénith vaste et bruni
mais voyant toujours son air triste                           Les forêts au désespoir                            braise énorme qui disperse
et voulant calmer son chagrin,                             Ont perdu tous leurs sapins.                             L’encensoir de l’infini ;
lui dit un soir à l’improviste :                           Je suis le brou, le brouillard.                           En bas, parmi la rosée,
« Alors, qu’as-tu bébé nuage,                                                                                        Etalant l’arum, l’oeillet
Tu n’as jamais de compagnon,                           J’ai une gomme dans la main.                                La pervenche, la pensée,
Amuse-toi un peu, voyage ! »                             N’espérez plus vous revoir.                               Le lys la lueur de juillet,
Encore plus triste il lui dit « non »                 J’ai brouillé vos deux chemins.                              De brume à demi noyée,
                                                        Je suis le brou, le brouillard.                                Au centre de la forêt,
« Que voudrais tu que je te donne,                                                                                   La prairie est déployée,
Veux-tu un orage, un grand vent                           Mais quand le soleil revient                            Et frissonne, et l’on dirait
avec un ciel tout noir qui tonne                            Précédé par les fanfares.                            Que la terre sous les voiles
ou une brise de printemps ?                                Je lui rends c’que j’ai volé.                Des grands bois mouillées de pleurs,
Aimes-tu mieux un alizé ?                                 Je suis le brou, le brouillard.                           Pour recevoir les étoiles
un aquilon impétueux ?                                                                                            Tend son tablier de fleurs.
Je ne veux rien te refuser !                           Je lui rends tous les sapins                                                  V. Hugo
La lune avait fermé les yeux.                           Où se posent les canards.
                                                      A l’amour fou ses lendemains.
Le petit nuage, pas bête,                              Je suis le frou, le froussard.
aussi rouge qu’une cerise,                                     D. Scheinert
répondit en baissant la tête :
« Nuit, je voudrais bien ...une bise ! »
           M. Beau
Paysage des Alpes                                                                                                                       La mer
Sure un des verts plateaux de Savoie,                                                                                La mer roule indéfiniment
Oasis dont la roche a fermé toute voie,                                                                 sa vague verte sur le sable de la plage
La nature étendit quelques étroites pentes
                                                                                                                 La mer murmure indéfiniment
Où le granit retient la terre entre les fentes
Et ne permet qu’à peine à l’arbre d’y germer,
                                                                                                           le bruit des sternes et des mouettes
A l’homme de gratter la terre et d’y semer.                                                                   et des grands oiseaux de l’océan
D’immenses châtaigniers aux branches étendues                                                                      La mer chante indéfiniment
Y cramponnent leurs pieds dans les roches fendues,                                                      la chanson du vent et des coquillages
Et pendent en dehors sur des gouffres obscurs,                                                  et celles des pêcheurs ramants vers l’horizon
Comme la giroflée aux parois des vieux murs ;                                                                         la mer roule indéfiniment
On voit à mille pieds au dessous de leurs branches,                                                    sa vague verte sur le sable de la plage.
La grande plaine bleue avec ses routes blanches ;                                                                             M.F. Delarozière
Les moissons jaunes d’or, les bois comme un point noir,
Et les lacs renvoyant le ciel comme un miroir...
Un n’entend d’autres bruits dans cet isolement,                                                                             Le silence du soir
Que quelques voix d’enfants ou quelque bêlement                                                                             Ce silence du soir,
De génisses ou de chèvres au ravin descendues,                                                Ce n’est pas le silence. Ecoute ! Tout est noir,
A. de Lamartine                                                                                     La nuit obscure fait toute chose pareille,
                                                                                              Le ciel verse un repos immense ; pour l’oreille
Le sentier                                                                                   Tout bruit a cessé. L’âme entend en ce moment
Il est un sentier creux dans la vallée étroite,                                                         Une foule de voix sortir confusément
Qui ne sait trop s’il marche à gauche ou bien à droite.                                      De cette ombre en disant des choses inconnues.
C’est plaisir d’y passer lorsque Mai sur ses bords,                                            Il semble que les eaux, les plaines et les nues
Comme un jeune prodigue, égrène ses trésors ;
                                                                                                Sont pleines de secrets qu’elles vont révéler,
l’aubépine fleurit ; les frêles pâquerettes,
Pour fêter le printemps, ont mis leurs collerettes.                                          Et dès que tout se tait, tout commence à parler.
La pâle violette, en son réduit obscur,                                                                                              V. Hugo
Timide, essaie au jour son doux regard d’azur,
Le gai bouton d’or, lumineuse parcelle,                                                                                                Voilà
Pique le gazon vert de sa jaune étincelle.                                                                                             Voilà
Le muguet, tout joyeux, agite ses grelots,                                                                Les arbres avec du sucre sur le nez
Et les sureaux sont blancs de bouquets frais éclos ;                                                                  La route toute poudrée
Les fossés ont des fleurs à remplir vingt corbeilles,                                                                        Le ciel enfariné
A rendre riche en miel tout un peuple d’abeilles...
S. Gautier
                                                                                                                      La neige a tout changé
                                                                                                                           A.M. Chapouton

                                                                                                                                            16
Bestiaire
                  La maison de l’escargot                            Les larmes de crocodile
                  Un matin l’escargot gris                             Un gros père crocodile
                   Las de traîner son logis                      pleure dans son grand mouchoir
                S’en vas chercher un maçon                           Dans larmes de crocodile
                Pour construire une maison.                        parce qu’il a mangé hier soir
                 Il s’en va trouver le pivert                         trois jolis petits canards.
                 L’atelier n’est pas ouvert.                       Mais il a toujours très faim,
                    Il frappe chez le lièvre                         il recommencera demain.
                Mais celui-ci a de la fièvre.                       Et tous les jours sur son île
                   Il sonne chez l’écureuil                            Le gros père crocodile
                Mais celui-ci à mal à l’œil.                     Pleure dans son grand mouchoir
                  Il s’en va chez le serpent                      En plaisant les petits canards.
                  Celui-là a mal aux dents.                                   R. Lichet

                        La grenouille
             Elle reste si longtemps tranquille,
                  la grenouille de la marre,                                  Le chat
                 avec son dos vert qui brille,                    Le chat qui marche l’air de rien
                  assise sur son nénuphar...                      Voudrait se mettre sous la dent
            que j’ai cru qu’elle n’était pas vraie               L’oiseau qui vit de l’air du temps
              et que j’ai lancé dans l’eau sale                    Oiseau voyou oiseau vaurien
              des cailloux pour la faire sauter.                   Faisant celui qui n’a pas l’air
            Elle saute bien mais elle chante mal.                  Le chat prend l’air indifférent
                                                                  L’oiseau s’estime bien content
                          La girafe                               Et se déguise en courant d’air.
                     J’ai lavé ma girafe                                      C. Roy
                  Avec de l’eau de naffe.
                Ah ! comme elle sent bon !
                   Avec ses belles taches                                   Coccinelle
                   Sur son pelage blond,                                 Une demoiselle
                   Elle s’admire en long                                Voulait s’envoler
                    Dans chaque flaque                                 La fleur était si belle
               Et son bonheur est si radieux                            Et le vent si léger
                      Que tout à coup,                           Que sa coccinelle changea d’idée
                   Elle fait un gros nœud                           Et rentra ses ailes dorées
                       Avec son cou.                                     A.M. Chapouton
                         M. Carême

La jungle                                                                Deux dindons
Tapi dans l’herbe humide et sur soi reployé,                             Deux dindons
Le tigre au ventre blanc, au souple dos rayé,                            jouent aux dés
Dormait ; et par endroits, le long des vertes îles,                         sur le dos
Comme des troncs pesants flottaient les crocodiles ;                    d’un dromadaire.
Parfois un éléphant songeur, roi de forêts,                          Celui des deux qui perd
Passait et se perdait dans les sentiers secrets,                       Est privé de désert
Vaste contemporains des races terminées,
Triste, et se souvenant des antiques années.
L’inquiète gazelle, attentive à tout bruit,                                     Le coq
Venait, disparaissait, comme le trait qui fuit ;                           Il sort du nid
Au-dessus des nopals bondissait l’antilope ;                              et plein de zèle
Et sous les noirs taillis dont l’ombre l’enveloppe,                       il bat des ailes.
L’œil dilaté, le corps nerveux et frémissant,                               Il se pavane,
La panthère à l’affût humait le jeune sang.                               tourne, s’arrête
Du somment des palmiers pendaient de grands reptiles ;                       lève la tête.
Des couleuvres glissaient en spirales subtiles ;                            Et peu à peu
Et sur les fleurs de pourpre et sur les lys d’argent,             Il monte au sommet de l’arbre
Emplissant l’air d’un vol sonore et diligent,                     Et de là haut fièrement perché,
Dans la forêt touffue aux longues échappées                         Cou en avant queue étalée,
Les abeilles vibraient, d’un rayon d’or frappées.                 Poitrail brillant, crête dressée,
Leconte de Lisle                                                   Le coq, lyrique, coquerique.
                                                                             B. Tanaka

                                                                                                      17
La panthère noire                                                                               Zoo
Par les entiers perdus aux creux des forêt vierges,                          A la tombée de la nuit
Où l’herbe épaisse fume au soleil du matin,                    Quand se sont refermées les grilles
Le long des cours d’eau vive encaissés dans leurs berges    L’éléphant rêve à son grand troupeau
          Sous de verts arceaux de rotin.                      Le rhinocéros à des troncs d’arbres
La reine de Java, la noire chasseresse,                            L’hippopotame à des lacs clairs
Avec l’aube revient au gîte où ses petits,                 La girafe à des frondaisons de fougères
Parmi les os luisants, miaulent de détresse,                    Le dromadaire à un oasis tintantes
          Les uns sous les autres blottis.                           Le bison à un océan d’herbes
Inquiète, les yeux aigus comme des flèches,                              Le lion à des craquements
Elle ondule, épiant l’ombre des rameaux lourds,                                     dans les feuilles
Quelques taches de sang, éparses et toutes fraîches,                Le tigre de Sibérie à des traces
          Mouillent sa robe de velours.                                                 sur la neige
Sous la haute fougère elle glisse en silence,                        L’ours polaire à des cascades
Parmi les troncs moussus s’enfonce et disparaît,                                     poissonneuses
Les bruits cessent, l’air brûle, et la lumière immense                   La panthère à des pelages
         Endort le ciel et la forêt.                              passant dans des rayons de lune
Leconte de Lisle                                                         Le gorille à des bananiers
                                                                 croulants de leurs fleurs violettes
                                                                        L’aigle à des coups de vent
                                                                       dans des canyons de nuages
                                                               Le phoque aux archipels mouvants
                                                                          de la banquise disloquée
                                                               Les enfants des gardiens à la plage
                                                                                          M. Butor

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