Bruxelles en mouvements - La Rue 30 ans sur la route de l'éducation permanente - La Rue asbl
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Bruxelles Périodique édité par Inter-Environnement Bruxelles Rue du Midi, 165, 1000 Bruxelles N°201 – 14 février 2008 en mouvements La Rue 30 ans sur la route de l’éducation permanente BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
sommaire 2 Bruxelles en mouvements Inter-Environnement Bruxelles publie toutes les 3 semaines Bruxel- les en mouvements, un journal pour tous les Bruxellois concernés par leur cadre de vie. Il vous informe sur les actions des associations et des comités de quartier, analyse l’actualité et explique les projets qui transforment la ville. (Abonnement annuel — 16 numéros : 24 €) DÉCOUVREZ AUSSI : La Lettre électronique d’IEB Notre média électronique, diffusé gra- En couverture tuitement, La Lettre d’IEB cerne de façon directe et pratique les enjeux de La Ranfiesta en 2007 la semaine à venir. Elle vous propose les pour fêter le renouveau enquêtes publiques, les actions et les du quartier et de la rue événements où vous pouvez agir pour Ransfort, berceau de défendre votre ville. (Inscription gra- l’association La Rue. Photo tuite) de Han Soete dans la brochure « La Rue, 30 ans d’actions ». L’Inventaire hebdomadaire Infos : La Rue, rue Ransfort, des enquêtes publiques 61, à 1080 Bruxelles. IEB offre aussi aux abonnés à Bruxelles Tél. : 02/410 33 03. en mouvements : L’Inventaire hebdoma- Courriel : la-rue@skynet.be daire des enquêtes publiques. Grâce à cet outil, vous serez au courant chaque semaine des avis d’enquêtes publiques sur les projets en urbanisme et en en- vironnement dans les 19 communes de Dans ce numéro la région. (Inscription gratuite pour les lecteurs de BeM) LIVRES P.9 Ville libérale, ville durable ? Saisir le temps de la mobilité Le site Internet ENVIRONNEMENT www.ieb.be P.10 Un nouvel outil pour une maison Eco... logique ! Le site Internet des principales asso- P.11 La sensibilisation au compostage ciations de défense de l’environnement via les maîtres-composteurs urbain. Une fenêtre sur les activités d’IEB et de ses membres face aux enjeux MOBILITÉ qui touchent Bruxelles. Le site vous offre P.12 Faire sauter le point noir du un aperçu des actions, publications et « boulet Louise » liens utiles pour suivre les grands dossiers P.13 Fête du pain, pas des carburants ! d’actualité et participer à l’amélioration URBANISME de la ville avec les habitants. P.14 Galeries Louise : ProWinko devra plancher sur un nouveau projet P.15 Châssis : des cadres légaux à Pour tous renseignements respecter Inter-Environnement Bruxelles, rue Neerpede : des projets de du Midi, 165, 1000 Bruxelles. Tél. : lotissements prématurés 02/223 01 01. Courriel : info@ieb.be ÉDITORIAL P.16 Le retour des grands secrets... BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
dossier 3 La Rue : 30 ans sur la route en bref... de l’éducation permanente A l’occasion de ses 30 ans d’existence, l’association La Rue a fait le point sur ses expériences d’éducation à la citoyenneté. Toujours infatigable, cette organisation envisage désormais l’avenir. En octobre dernier, des fêtes et des débats ont marqué cet anniversaire. Ce fut aussi l’occasion d’inviter le monde associatif à réfléchir JEAN-CLAUDE GELTEMEYER sur la pertinence de l’éducation permanente. Festival de fanfares organisé par La Rue en 1987. 1. LUTTES URBAINES ET ÉDUCATION PERMANENTE Une action volontariste A ce titre, de nombreux comités d’ha- Q ue des habitants se rencontrent bitants reconnaîtront des méthodes, des et décident de créer un comité principes et des objectifs qu’ils partagent. de quartier, c’est courant. C’est Mais dans le cadre urbain qui nous occupe, même une spécialité bruxelloise. Ne disait- les leçons des 30 ans de La Rue trouve- on pas de Bruxelles qu’elle est la ville aux ront certainement beaucoup de résonance 100 comités de quartier ? parmi ces comités qui défendent leur quar- La fondation Plus rares sont les comités qui se sont tier et leur ville, soucieux de démocratie, Notre association était inscrits dans la durée. L’association La Rue de solidarité et de justice. composée au départ d’une est de celles qui ont dépassé la trentaine. Travailler dans les quartiers populai- dizaine d’habitants, de Une longévité pleine d’intérêt et d’ensei- res n’est un gage ni de facilité, ni de quelques travailleurs gnements sur les organisations militantes réussite. C’est pourquoi la genèse de sociaux, d’enseignants, parties d’une utopie et pourtant bel et bien l’association est intéressante. Le Vieux d’employés, avec l’objectif ancrées dans la réalité. Molenbeek était marqué par le déclin in- de mettre au service d’une L’expérience de ce comité installé au dustriel, la pauvreté, la crise du logement, cause qu’on estimait cœur de l’ancienne zone industrielle de la spéculation immobilière, la saignée du prioritaire et qui était Molenbeek rappelle que, face aux muta- métro... Chez quelques citoyens, germe un projet de solidarité et tions que traverse notre société, l’action en 1976, l’idée de créer dans ces quartiers d’émancipation, avec une volontaire porte encore ses fruits. un lieu de rassemblement, de prise de volonté que les gens se Partie de l’action locale, l’association parole et d’expression des besoins de la prennent en charge, créent La Rue a poursuivi des objectifs basés sur population. eux-mêmes des initiatives la solidarité et l’émancipation. Les idées Pour réaliser ces objectifs, La Rue veut et puissent avancer comme qui ont animé ce mouvement peuvent être se mettre à la disposition des habitants ça. Aujourd’hui nous n’avons appliquées dans bien d’autres endroits que tout en prenant l’initiative de démarches pas changé d’objectif. le champ d’action de La Rue. associatives. (Guido Vanderhulst) BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
dossier 4 De l’éducation populaire à la participation critique et la transforma- Le nom de La Rue l’éducation permanente tion sociale. « Dès ses premiers pas sur les C’est Edmond qui a Le mot associatif est lâché et avec lui pavés molenbeekois, La Rue a inscrit son inventé le nom. LA RUE une orientation précise est choisie : celle action dans une démarche qui se voulait est à la fois le lieu de la de l’éducation populaire. Quoi de plus d’éveil à la citoyenneté par l’éducation revendication et de la évident vu le milieu concerné ? C’est pro- permanente. Les objectifs sont clairement colère populaire, mais pre à l’époque, comme le constate Guido de soutenir l’autonomie et la solidarité des aussi le lieu de la fête Vanderhulst, « Des citoyens se sont réunis personnes par tous les moyens utiles... ou et de la joie, toujours pour initier une démarche que l’on voulait demandés. » un lieu d’expression inspirée par l’éducation populaire et d’un collective. courant appelé, fin des années 60, l’auto- De la résistance innovante (La Rue, 30 ans gestion. Certains intellectuels se sont mis La Rue se trouvait à l’aise dans cette dé- d’actions, p. 3) à être solidaires de la classe ouvrière et marche. Ses initiatives commencèrent dans des milieux populaires défavorisés. Ils en le champ socio-culturel par des actions ont fait l’essentiel de leur engagement. de résistance innovante et d’invention C’est cette philosophie qui a présidé à la démocratique pour attirer l’attention de mise sur pied de l’association ». l’opinion publique et faire entendre les Leurs initiatives s’inscrivent, en cohésion revendications par le pouvoir. Ce fut le cas avec des fêtes sous chapi- Action contre teaux, l’ouverture de lieux les déchets de rencontre et de convi- en 1979. vialité comme par exemple le Café de La Rue. Durant les premières années, ce fut un lieu de débats et de mobilisation, pour devenir l’un des 12 cafés-théâtres que compte Bruxelles, où les repas-spectacles per- mettent la rencontre de personnes de différents quartiers et de cultures différentes. LA RUE Au fil des ans, les in- terventions de La Rue ont But de l’éducation avec le contexte socio-culturel du quartier, transformé le Vieux Molenbeek. Par son permanente dans les mouvements sociaux qui dans les rôle de coordination, elle est devenue la Dans une logique années 70 visent à donner aux publics popu- plaque tournante de multiples actions et d’inventivité démocratique, laires des moyens de sensibilisation et d’es- projets. Les rencontres du Vieux Molen- l’éducation permanente se prit critique. L’éducation populaire a ses beek ont rassemblé les acteurs sociaux et doit de s’interroger sur le origines dans l’éducation ouvrière. Cette culturels sur les enjeux du logement, de droit des gens à se construire initiative était prise par la classe ouvrière l’immigration, sur le métro, les plaines de une vision du monde, à elle-même « pour les travailleurs par les jeux,... Le Collectif Fonderie a rassemblé l’exprimer, à avoir un projet travailleurs ». Après le décret pris par la habitants, travailleurs et de multiples or- social et à le mettre en Communauté française en 1976, on parle ganisations concernées par la réparation du oeuvre, à l’expérimenter et d’éducation permanente. La Communauté quartier autour de l’ancienne Compagnie finalement avoir un projet française donne aux organisations recon- des Bronzes. Il en sortira : la réaffecta- de changement de la vie et nues, des moyens de poursuivre un travail tion de la manufacture, la construction du monde qui sont toujours de sensibilisation et de formation auprès du de l’auberge de jeunesse, le création du à inventer. C’est le droit à public du milieu populaire. Cette action de parc de la Fonderie, le Musée de l’Histoire l’utopie fondatrice. promotion socio-culturelle est collective. sociale et industrielle de la Région de (J-P. Nossent, Education Elle commence par l’analyse de leurs con- Bruxelles, l’Espace Pierron, etc. permanente et inventivité ditions de vie et des facteurs déterminant A l’occasion de son anniversaire, La Rue démocratique, in Des particulièrement leur situation. a publié une brochure où l’on trouvera un tambours sur l’oreille d’un La Rue sera reconnue comme organisme inventaire impressionnant des prises de sourd, Plate-forme Bigoudis, d’éducation permanente et pour cause, elle participation de l’association dans la vie 2006, p. 190.) compte dans ses objectifs : la citoyenneté, du quartier. BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
dossier 5 Ont participé au débat • Jacques Hanon : ancien administrateur de La Rue. • Irma Bozzo : animatrice en travail social de quartiers à Schaerbeek. • Camille Schmitz : fondateur d’une plateforme d’associations altermondialistes à Liège. • Marc Trullemans : coordinateur de l’OOTB (fédération d’insertion socio-professionnelle de CLAIRE VERHAEREN la Région de Bruxelles- Capitale), ancien secrétaire général du BRAL. Intervenants au débat du 19 octobre 2007. De gauche à droite : René Schoonbrodt, Jacques Hanon et • René Schoonbrodt : Irma Bozzo. docteur en sociologie, ancien président de l’ARAU et d’Inter- Environnement Bruxelles. 2. UN DÉBAT POUR ENVISAGER • Georges Liénard : docteur en sociologie, L’AVENIR professeur à l’UCL-FOPES. • Moritz Lennert : L administrateur de La Rue. a Rue ne s’est pas contentée d’un de l’association se base sur un engagement • Guido Vanderhulst : bilan pour célébrer ses 30 ans. Le pour une cause prioritaire : un projet de ancien président de l’asbl public était invité à participer à la solidarité et d’émancipation. » Cela repose La Rue. Il a transmis, ce 16 janvier 2008, le fête avec le théâtre-action des habitants, sur des convictions fortes de la part de flambeau à la nouvelle l’exposition, des concerts (Mousta Largo). militants et de bénévoles qui veulent ré- présidente Madame Et pour réfléchir au futur, La Rue a invité pondre à des besoins et des demandes de la Anne Six. quelques figures amies du monde associatif population et souhaitent des changements • Tom Goldschmidt : journaliste à la RTBF. pour évaluer la pertinence de son action. pour une société plus égalitaire. Ce qui Les problèmes soulevés ont amené des ré- n’est possible qu’à condition que les per- ponses qui seront utiles au monde associatif sonnes deviennent des citoyens conscients, en général. responsables et acteurs de leur vie. • Une volonté de démocratie. Autre point LES MOTEURS DE LA RUE fort, une organisation interne démocrati- que décrite par Guido Vanderhulst en ces Pour durer termes : « Aujourd’hui les militants de La Au débat du 19 octobre, véritable mo- Rue ce sont 15 salariés mais aussi 40 per- ment de retrouvailles, Tom Goldschmidt sonnes de l’Assemblée générale dont la rappelait que ce « boulevard du temps, majorité sont des habitants du quartier. Les statuts qui de la fondation de La Rue nous relie à Aujourd’hui, on propose et organise des « L’objet de l’association aujourd’hui, est jonché des cadavres des emplois en fonction des objectifs définis est d’encourager et de associations qui n’ont pas tenu toutes les par l’association. Nous avons été chercher soutenir, dans une démarche promesses que leurs fondateurs voulaient les moyens pour suivre nos objectifs et pas fondamentalement voir dans leurs yeux ». Sous ces termes ly- ceux qu’on nous imposait. » associative, tout ce qui riques se pose la question de la durée. La La Rue insiste fortement sur la place peut favoriser la prise de Rue est mue par des moteurs puissants pour des bénévoles qui sont présents dans les parole et de conscience, résister ainsi aux injures du temps. différentes activités et dans le Conseil l’expression, l’organisation d’Administration et l’Assemblée générale. solidaire et l’exercice • Des convictions fortes. Comme le dit Cette présence est le garant de la trans- des droits et devoirs des Jacques Hanon, administrateur et militant parence et des possibilités d’une véritable personnes, habitants, de la première heure : « La mise sur pied évaluation. usagers et travailleurs. » BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
dossier 6 Transversalité • Considérer l’humain dans sa globalité. et c’est aussi un acquis d’une action de Pour atteindre ses objectifs En évoluant, La Rue a traité un nombre type transversal : c’est le fait d’avoir des d’éducation « populaire », croissant de domaines qui touchent à la points d’appui pour faire face à des creux l’association agit dans une vie des gens. La personne forme un tout. de vagues dans un domaine en continuant démarche transversale, La Rue prend donc en compte la globalité à s’appuyer sur d’autres domaines. Et au travers de différents sociale des problèmes rencontrés. Pour à partir de là, pouvoir relancer le type axes : l’urbanisme, la fête, Jacques Hanon, « L’action doit être an- d’action que l’on mène ». la formation (programme crée dans la réalité des gens. Si on essaie d’alphabétisation, le groupe d’être attentif à l’expression des gens Pour défendre ses enjeux ados), les animations et (les concernés, les habitants, le public La recherche de valeurs démocratiques ateliers créatifs, les ateliers cible) qui s’expriment dans la totalité ou est l’un des objectifs principaux de La scientifiques, les jardins la globalité de leur situation, on entre Rue. Elle se traduit dans les rapports entre urbains, l’école des devoirs dans ce qui est transversal. Cela privilégie l’association et le public concerné. 15 ans et le rattrapage scolaire, le l’action intégrée qui répond à la globalité d’expérience à l’École des devoirs font dire logement, la cohésion sociale des problèmes ». à Naïma Otman que « Toutes les initiatives dans les logements sociaux, André Lumpukiva, travailleur à La Rue, de La Rue ont été prises à partir de de- le conseil en rénovation. relève que « Les demandes expriment sou- mandes et d’attentes des habitants. Par vent une addition de besoins et de diffi- manque de moyens, nous sommes obligés cultés. Le saucissonnage des problèmes de refuser des inscriptions pour les dif- et des réponses mène à la multiplication férents cours. Il nous manque également des services sans toujours les résoudre car du personnel et des locaux pour pouvoir souvent un problème en cache un autre ». encadrer ces personnes. Mais les gens ne comprennent pas les rai- sons de ce refus. On essaie de répondre au maximum aux attentes et aux priori- tés mais on est limité ». Pour Irma Bozzo, le tra- vail est assez simple quand les habitants demandent eux-mêmes à l’association d’aider à atteindre leur objectif. « C’est plus com- pliqué et il y a des tensions quand l’objectif de l’asso- ciation n’est pas le même que celui des personnes qui s’adressent à l’association. CLAIRE VERHAEREN Dans ce cas-là, l’association doit respecter ses valeurs. Je constate qu’il y a des Au débat du 19 octobre. De gauche à droite : Tom Goldschmidt, Mark Trullemans, Camille Schmitz, travailleurs sociaux, des Georges Liénard et Guido Vanderhulst. associations, qui font des choses qui ne correspondent pas à ce qu’ils ont vraiment Par exemple, derrière un problème de envie de faire pour être en phase avec les santé se trouve un problème de logement gens, parce qu’il faut répondre aux besoins auquel peuvent être liés des problèmes de des gens. L’association n’est pas neutre, scolarité. C’est pourquoi La Rue a veillé elle se crée toujours pour défendre les à tourner le dos au cloisonnement des intérêts des uns ou des autres, elle a donc actions et des services. Cette polyvalence un objet social à remplir. Il y a un moment explique aussi la capacité de toujours res- où il faut dire que ce n’est pas possible en ter dans l’action. Comme l’a noté Geor- fonction des options fondamentales dé- ges Liénard, « Il faut savoir gérer parfois fendues et qu’on ne peut pas défendre les l’incertitude et les creux dans l’action. A intérêts de personnes qui sont socialement ces moments-là, il faut pouvoir continuer dans des situations différentes même si à durer et retrouver des points de levier elles habitent la même rue. » BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
dossier 7 Les priorités définies (démocratie, solida- Pour s’engager dans le futur L’engagement collectif rité, justice), le chemin de la participation Comme le note Tom Goldschmidt : « Il y a Comment favoriser passe par la prise de parole. L’association 30 ans, les actions comme celle de La Rue l’implication des gens ? ne veut pas prendre la parole à la place des étaient fondées sur la conviction que l’ac- D’abord écouter et entendre gens ni même les représenter tous et ne tion collective était porteuse de beaucoup l’expression des besoins. Le peut répondre à toutes les demandes. Mais de fruits. Aujourd’hui, l’œil n’est plus fixé rôle des travailleurs sociaux son rôle est de veiller à ce que la légitimité sur l’horizon d’un avenir meilleur mais est de soutenir les habitants de leur parole, de leur action soit reconnue plutôt sur son écran de PC, de playstation, pour expliciter la demande. et que leurs questions soient entendues par etc. Le rassemblement de personnes est Essayer de comprendre. les interlocuteurs et qu’elles soient suivies plus difficile que par le passé. Comment et construire la confiance de réponses concrètes. Ainsi, La Rue a un faire monter la relève pour demain ? » petit à petit. Rassembler et rôle d’instigateur à la démocratie, d’ap- débroussailler avec le groupe prentissage au débat. Une œuvre qui est NOUVELLES UTOPIES les traits d’union, les enjeux plus compliquée aujourd’hui qu’il y a 30 ans La Rue a commencé avec des utopistes communs ou... les différents car on travaille avec des populations qui dont les idées ont fini par s’intégrer dans chemins à prendre. n’ont pas la même facilité de s’exprimer, la réalité. Pour Guido Vanderhulst, qui a Laisser de la place à chacun, de s’organiser, ni les mêmes traditions. vu les projets de militants partir de rien et avec ses ressources et son rassembler de plus en plus de gens, « Il n’y rôle, et à la dynamique. a pas de différence entre les militants du Que les professionnels ne début et les professionnels de l’associa- prennent pas trop de place tion ». L’explication repose sans doute dans sous prétexte de savoir les propos de Camille Schmitz qui dans sa comment faire et vouloir vie a déjà participé à de nombreux projets aller trop vite, au contraire utopistes dont le réseau altermondialiste de laisser l’occasion de D’Autres Mondes à Liège. « Les gens qui créer, apprivoiser l’objet font ça comme des fonctionnaires, leur commun. aventure ne les enchante pas, tandis qu’il (Claire Verhaeren, La Rue) LIEVEN SOETE — WWW.BRUXEL.ORG CHRISTIAN LEDOCQ Animation au jardin urbain. Le spectacle « Le Chameau », création d’ateliers-théâtre de La Rue avec des habitants de Molenbeek, sur le thème de la réalisation des rêves. René Schoonbrodt souligne que prendre faut pouvoir dire que nous allons créer la parole c’est se politiser. « On n’en sortira des lieux de réenchantement du monde. » qu’en politisant, en apprenant à parler, à Comme pour construire un réseau, « le intervenir dans le débat, en faisant con- projet d’une association c’est une aven- naître les institutions, la justice. C’est ture basée sur des rencontres qui forment l’essentiel du rôle associatif à condition les premières mailles. Il y a souvent des qu’il soit libre. C’est-à-dire de développer détours. On ne va pas directement au but par rapport à la société une parole criti- en disant qu’on sait où on va. On part à que, une parole qui se veut conquérante l’aventure comme un exportateur décou- de justice, qui réclame le droit de vivre vre un écosystème. Ça met du tonus dans décemment, de parler d’être entendu dans la démarche de celui qui doit trouver les de bonnes conditions. » chemins d’implication ». BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
dossier 8 QUESTIONS POUR DEMAIN Le travail de La Rue se place dans une approche transversale. Etant donné que les problèmes des gens ne sont pas issus du quartier, La Rue doit-elle changer d’échelle ? Soit elle devient un service public avec une certaine exhaustivité... soit elle doit garder un rôle plus militant mais qui ne peut répondre aux besoins de l’ensemble de la population (par exemple, l’École de devoirs) ? Dans la définition des priorités, comment éviter que les actions ne produisent des CHRISTIAN LEDOCQ effets pervers ? Par exemple à qui profite la rénovation du quartier, comment évi- ter d’exclure une partie de la population La défense du logement, puisqu’il n’y a aucun contrôle ni du foncier une activité majeure à La Rue. L’avenir de La Rue reste à écrire. Les ni des loyers ? Qui sont les gens qu’on in- acquis sont tangibles, les habitants se sont terroge et qui s’expriment ? Quelle est la mobilisés, les autorités publiques les en- responsabilité de l’association par rapport tendent, la demande de culture augmente. à l’ensemble des habitants et donc, sa Le travail de militance a arraché le droit responsabilité de protéger aussi la part de d’expression mais les problèmes changent la population qui est silencieuse ? et la vigilance reste de mise pour que les Comment une association qui s’insti- solutions d’hier bénéficient aux habitants tutionnalise doit-elle se positionner par d’aujourd’hui. Ainsi, dans ses conclusions rapport à la recherche de subsides car elle A lire: « La Rue, 30 ans Moritz Lennert, administrateur de l’asso- a la responsabilité de rémunérer des tra- d’actions » (40 pages). ciation, a osé poser les questions déran- vailleurs ? Comment garder le côté militant Infos : La Rue, 02/410 33 03. geantes qui suivent. et son indépendance ? Vers l’extérieur, La Rue témoigne-t-elle assez de son travail et de l’évolution gé- Faut-il être utopiste ? nérale du quartier ? Quelle part de moyens consacrer au travail de témoignage par L a Rue ne s’occupe pas de tout, même si elle le voudrait comme rapport au travail quotidien ? elle a tenté de le faire avec un atelier de formation par le travail. Faut-il être utopiste ou idéaliste, a demandé Émile INDÉPENDANCE CRÉATIVE Van Kerckhove de La Rue, à vouloir aussi porter une revendication Ces questions révèlent les balises entre qui touche directement les habitants : l’emploi et la formation ? lesquelles cheminera La Rue dans les pro- La réponse de Mark Trullemans rappelle les conditions pour traiter chaines années. L’un des principes en point ce problème. La réponse cite aussi les atouts que possède La Rue en de mire est l’indépendance de l’association. général grâce à sa connaissance du tissu du quartier. Comme l’a évoqué Carine Barthélemy : « La • Témoigner. Les associations peuvent organiser le témoignage et Rue a démarré de rien et il a fallu se battre faire entendre la voix des quartiers populaires pour qu’elle soit en- pour obtenir une certaine reconnaissance tendue dans les milieux qui s’occupent de l’emploi où on n’entend des pouvoirs publics au niveau local et plus comment se vit dans les quartiers la situation de sans-emploi. régional. Mais on ne peut pas se reposer • Éduquer et former. Tisser un lien entre les quartiers et l’école et sur ses acquis. Par exemple, par rapport les enseignants est aussi crucial. Former par le travail c’est aussi de au politique, l’asbl ne comporte pas de l’éducation permanente. mandataires politiques dans son conseil • Organiser. Les techniques de proximité pour organiser la demande d’administration. Cette indépendance est peuvent servir pour les projets d’économie sociale pour les popula- un gage de cohérence par rapport à nos tions locales. objectifs et aussi en termes de gestion et • Structurer. Le rôle de porte-parole et de trait d’union est impor- de fonctionnement.» tant par la structuration des employeurs locaux qui reflètent la vie Avec son désir d’autonomie, propre aux quotidienne et le développement économique du quartier associations, La Rue va poursuivre son • Tisser des liens aussi avec d’autres acteurs de proximité et des objectif de créer de la liberté pour les associations dans d’autres quartiers similaires. autres. Almos Mihaly BRUXELLES EN MOUVEMENTS N°201 • 14 FÉVRIER 2008
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