Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable - MASTER Développement Durable et Territoires Montagnards - Id-ees
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MASTER Développement Durable et Territoires Montagnards Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable Auteur : Nicolas Diet Directeur du mémoire : Véronique Peyrache-Gadeau Année 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 1 SOMMAIRE Préambule 4 Introduction 5 le tourisme, de sa naissance à sa remise en question Naissance du tourisme 6 Le tourisme peut-il être remis en cause ? 8 Le tourisme peut-il devenir durable ? 9 I – Le tourisme d’aventure et le développement durable 11 A/ Généralités 11 1)- genèse et historique du tourisme d’aventure en France 11 2)- recadrage historique du développement durable dans le tourisme en France 12 B/ Des prémices d'un mouvement à une structuration par branches 13 1)- Aux origines, le tourisme dit « alternatif » 13 2)- Définitions, orientations, labels et certifications 14 C/ L'association ATR (Agir pour un Tourisme Responsable) 18 1)- les origines 18 2)- les valeurs et principes de travail communs 18 3)- les objectifs 19 4)- les membres actuels 19 5)- la sécurité des voyageurs 20 6)- certification, mode d'emploi 20 II/ L’opportunité du développement durable pour Chamina Voyages 22 A/ Chamina Voyages, d'une association à une entreprise 22 1)- présentation de Chamina Voyages 22 a/- Historique 22 b/- Les fondateurs 22 c/- Une philosophie proche de celle du développement durable 23 d/- Les spécialités de Chamina Voyages 24 e/- Organigramme 24 f/- Quelques chiffres-clés 25 2)- le contexte de l'agence en 2006 25 B/ Objectifs 26 1)- Convaincre 27 2)- S'engager sur les trois piliers (économique, social, environnemental) 27 C/ Enjeux 28 1)- La relocalisation du tourisme face au secteur aérien et au réchauffement climatique 28 2)- La certification ATR 30 III/ La mise en place des principes du développement durable 33 chez Chamina Voyages A/ Présentation de la phase de concertation et de consultation 33 1)- Les thématiques 33 2)- Les participants 33 3)- Le processus 33 4)- L'animation 34 Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 2 B/ Déroulement de la phase de concertation et de consultation 35 1)- Le déroulement de la concertation avec les salariés 35 2)- Le déroulement de la consultation des accompagnateurs et des clients 36 3)- Les groupes de discussion et leurs thématiques 36 a/- Présentation des groupes 36 b/- Participation des salariés aux groupes de discussion 40 c/- Animation des groupes 40 d/- Règles des groupes de discussion 40 4)- Apport du diagnostic développement durable de la Chambre de Commerce 41 C/ Définition des objectifs de développement durable et mise en œuvre 42 1/- Définition des objectifs : le compte-rendu des groupes de discussion 42 a/- Stratégie et valeurs de Chamina Voyages 43 b/- Management, organisation et communication interne 44 c/- Formation 45 d/- Relationnel interne et externe 45 e/- Politique salariale 46 f/- Transports 47 g/- Consommations, déchets, fournitures 47 h/- Actions et valorisation de notre sensibilisation environnementale et sociale 48 i/- Santé, hygiène, sécurité, confort 48 j/- Planning de tâches commun 48 2/- La mise en œuvre des objectifs 48 a/ Présentation du planning de réalisation 49 b/ le rôle de chacun dans la phase de réalisation des objectifs 49 c/ Une organisation par fiche d'objectifs personnalisée et par entretiens individuels 49 d/ Le suivi et l'évaluation des objectifs 50 D/ La préparation à la certification de tourisme responsable 54 1/ L'analyse des critères demandés pour l'obtention de la certification 54 2/ Le travail de préparation 56 a/- L'information des salariés 56 b/- Le calendrier prévisionnel de la certification 56 c/- Le suivi de la certification 56 3)- le montage du dossier de candidature 56 4)- L'audit de l'AFAQ AFNOR 60 5)- Regards critiques sur la certification ATR 60 E/ Regards critiques sur la mise en œuvre de la politique de développement durable 62 1)- Difficultés et solutions 62 2)- Apports et bilans 65 F/ Présentation de quelques objectifs majeurs 68 1) la stratégie et la politique d'entreprise 68 a/- Au préalable 68 b/- Le consensus sur les points stratégiques 69 c/ La déclinaison des objectifs définis par secteur en actions concrètes 70 d/- intégration de la politique stratégique à la politique de développement durable 71 2) la politique environnementale de Chamina Voyages 72 a/- Une politique environnementale dans l'entreprise 72 b/- La gestion économe de l'eau 73 c/- La compensation de CO2 73 3)- la stratégie de communication 74 a/- Les engagements de Chamina Voyages 75 b/- La campagne de communication 76 Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 3 4) le plan de déplacement entreprise (PDE) 77 a/- Présentation des objectifs et du contexte 77 b/- Présentation de l'étude et de son contexte 78 c/- Présentation de l'état des lieux 79 d/- Propositions 79 e/- Mise en pratique du PDE 80 Conclusion 82 Bibliographie 85 Glossaire 86 Annexes 87 Annexe 1 : questionnaire destiné aux salariés et ses résultats Annexe 2 : les questionnaires clients et accompagnateurs et leurs résultats Annexe 3 : fiches de présentation des groupes de discussion Annexe 4 : diagnostic Développement Durable de la Chambre de Commerce Annexe 5 : référentiel ATR de l'AFAQ AFNOR Annexe 6 : planning de réalisation des objectifs Annexe 7 : modèle de fiche de poste Annexe 8 : certification ATR, écarts constatés et corrections Annexe 9 : tableau d'actions environnementales entreprises par Chamina Voyages Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 4 Préambule Ce mémoire a pour but de retracer l'évolution du tour opérateur Chamina Voyages, au début des années 2000, au sein d'un secteur économique – le tourisme - en mutation permanente. Ce mémoire a notamment pour objet de mettre en avant le fait que cette évolution s'est réalisée dans un contexte particulier : Chamina Voyages évolue dans une période de croissance permanente du nombre de touristes, et donc avec une augmentation des offres touristiques. L'entreprise doit également évoluer dans un contexte international particulièrement évolutif avec notamment l'arrivée de la Chine ou de l'Inde sur le marché des « loisirs », la montée de l'intégrisme et du terrorisme, et enfin la confirmation du réchauffement climatique et de sa cause : l'activité humaine (dont l'activité touristique). Nous pouvons parler de contexte particulier, car il s'agit du secteur du tourisme, le premier secteur économique mondial (les recettes du tourisme international ont atteint 733 milliards de dollars en 2006). Le tourisme est aujourd'hui devenu une véritable industrie, qui génère chaque année de plus en plus de touristes, avec les conséquences que l'on connait : détérioration des cultures locales, destruction des écosystèmes naturels, dénaturation des sites et du patrimoine culturel, ... Le tourisme est de plus en plus décrié pour les conséquences qu'il engendre du point de vue du réchauffement climatique car il représente une partie non négligeable des flux aériens et maritimes mondiaux. Il est sans doute plus critiqué qu'un autre secteur car il représente le phénomène du loisir, dernier échelon de développement et d'épanouissement humain. A ce titre, il peut ne pas être considéré comme primordial par des populations n'ayant pas atteint ce niveau de développement, tout comme par des populations déjà concernées par ce phénomène. Ce secteur doit en tous les cas prendre en considération cet état de fait, même si le tourisme, fort heureusement, développe également nombre de points positifs qui seront énumérés dans ce mémoire. Ensuite, contexte particulier car l'entreprise en question, Chamina Voyages, évolue au sein d'une branche spécifique du secteur touristique : le tourisme dit d'aventures (ou de nature, de randonnée). Cette branche, au départ alternative au tourisme de masse, s'est développée dans les années 70, et a connu des années de croissance exceptionnelle dans les années 80-90. Aujourd'hui elle connait une évolution plus difficile, avec une tendance au ralentissement voire à la stagnation du nombre de clients. Cela engendre une forme de crise, avec une tendance au regroupement, à la fusion, à la guerre des prix ... Enfin, contexte particulier dû au phénomène impulsé mondialement, et dans tous les secteurs, autour du développement durable. Après quatre rapports des experts du GIEC, et près de 30 ans de travaux très sérieux menés par la communauté scientifique, le monde s'accorde à reconnaître que l'humanité est responsable, entre autres, du réchauffement climatique, mais aussi des atteintes à la biodiversité, aux réserves d'eau douce, de la pollution et de l'appauvrissement des sols ... C'est à partir de ses éléments qu'en octobre 2006, d'un commun accord avec François Glémain, directeur de l'agence Chamina Voyages, nous décidons de donner à mon stage des objectifs très clairs : − analyser le contexte dans lequel se trouve l'entreprise (économique, social, et environnemental) et définir une stratégie d'évolution à moyen et long terme ; − initier les principes du développement durable dans le fonctionnement de l'agence ; − étudier l'intérêt et la cohérence d'une certification de tourisme responsable, et préparer l'entreprise à cet objectif. Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 5 Introduction le tourisme, de sa naissance à sa remise en question Aujourd'hui la remise en cause des activités humaines doit être générale, et pas seulement cantonnée au secteur touristique. La durabilité doit être un des fondements de notre société, à tous les niveaux. L'objectif de mon stage, présenté dans ce mémoire, a été d'analyser et de comprendre les évolutions possibles du tourisme dans ce monde qui change ; de trouver et d'adopter les bonnes solutions pour qu'une entreprise de ce secteur puisse continuer à exister au début du 21ème siècle. Au cours du stage, j'ai travaillé principalement sur deux objectifs majeurs. Le premier objectif était de mettre en place les principes du développement durable dans le fonctionnement de Chamina Voyages, et à travers cela viser à assurer sa pérennité économique grâce à une politique plus en adéquation avec l'Homme et l'environnement. Bien sûr cet objectif avait également pour finalité de mobiliser l'ensemble des parties prenantes autour d'une politique mobilisatrice, et pouvant avoir des retombées importantes au niveau social, autant qu'en image. Le deuxième objectif était complémentaire au premier. Il s'agissait de préparer l'entreprise à demander une certification de tourisme responsable. Pour la réalisation de ce deuxième objectif, il semblait primordial, au préalable, de travailler sur l'objectif développement durable. Ces deux objectifs liés devaient permettre à Chamina Voyages de renforcer son organisation, son professionnalisme, son image et sa crédibilité. A travers ce mémoire, je me suis efforcé de retracer la mise en place de ces objectifs. Dans une première partie, de donner un regard objectif sur l'évolution du secteur du tourisme d'aventures en France. J'ai tenté également de définir et classifier les différents courants nés dans ce secteur autour du phénomène développement durable. Dans un deuxième chapitre, j'ai replacé Chamina Voyages au centre de ce contexte, en présentant la structure, son historique, son évolution, l'opportunité développement durable, c'est à dire l'intérêt et les conséquences engendrées par une telle démarche. C'est dans cette partie que les questions majeures de la certification, et de la problématique du secteur aérien ont été abordées. Enfin, un troisième chapitre permet de retracer le déroulement de ma mission, en même temps qu'il évoque les difficultés de mise en place, ou au contraire les évolutions positives induites. Ainsi, j'ai guidé ma réflexion à travers mes diverses expériences et pratiques du tourisme, et de l'approche de la nature. En tant qu'accompagnateur en montagne, je me suis plus particulièrement intéressé au milieu montagnard, au rapport à la nature, à la découverte des milieux physiques. Aujourd'hui plus que jamais, le tourisme est remis en cause dans son rapport à la durabilité. Ce secteur, étant donné sa position dans la pyramide de Maslow*, représente le dernier échelon de l'épanouissement humain. Par conséquent, il se doit d'évoluer plus vite que les autres vers la durabilité. En effet, l'Homme répond à ses besoins suivant un ordre bien établi, comme précisé dans le schéma ci-dessous. Le tourisme est une des interprétations de l'accomplissement personnel. A ce titre, il peut-être rapidement remis en cause dans un futur proche, dans un contexte de réchauffement climatique et de mondialisation de l'économie entrainant difficultés économiques, sociales, appauvrissement de la population, famines, mouvements de populations ... Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 6 Le secteur du tourisme a donc tout intérêt dès aujourd'hui à trouver et adopter des solutions permettant de lutter contre le réchauffement climatique, permettant une meilleure répartition des richesses entre visiteurs et visités, et permettant une meilleure prise en compte de l'environnement et des populations locales. (*Le besoin d’épanouissement personnel, notamment par le loisir, le voyage ... est le dernier échelon de la pyramide des besoins de Maslow) : Accomplissement personnel estime de soi estime des autres amour, appartenance sécurité physiologique La littérature existante démontre que dès sa naissance, le tourisme s'est construit autour de notions très fortes comme la découverte de la montagne ou la découverte physique de la nature. Ces notions, que l'on peut déjà qualifier de notions d'aventure, étaient déjà la motivation du voyage au 19ème siècle. Aujourd'hui, l'aventure se développe sous d'autres formes, mais reste une condition première de l'intérêt du tourisme. J'ai souhaité présenter en introduction ce texte extrait de la Bibliothèque numérique de la Bibliothèque Nationale de France, qui retrace très bien la naissance du tourisme, le développement de la montagne comme terrain d'aventures, et l'avènement du tourisme sportif. « Naissance du tourisme Dès l’époque moderne, on conçoit le voyage comme pouvant relever du seul "agrément", définition même du tourisme. Pourtant la notion de "tourisme gastronomique" voit le jour sous Louis XIV (Voyage de Chapelle et de Bachaumont, 1663). Bien que la cour soit sédentarisée à Versailles, certains continuent à se déplacer par nécessité (Saint Simon, Madame de Sévigné) ou par goût de l’aventure (Saint Amant). Mais c’est au XVIIIe siècle que naît véritablement le tourisme, grâce au "grand tour", à l’origine du mot anglais "tourist", soit "voyage circulaire". En français, le terme "touriste" (1803) s’emploie pour désigner des "voyageurs qui ne parcourent des pays étrangers que par curiosité et désœuvrement, qui font une espèce de tournée dans des pays habituellement visités par leurs compatriotes" et "se dit surtout des voyageurs anglais en France, en Suisse et en Italie" (Littré). En 1838, la publication des Mémoires d’un touriste de Stendhal popularise ce mot (Adenis : Etapes d’un touriste en France). Après 1815, le voyage connaît un véritable essor, notamment dans la population favorisée (Etienne Durand, De Flandre en Navarre ). Enfin, en 1841, apparaît le mot "tourisme", année même où Thomas Cook ouvre en Angleterre une agence de voyages. Par la suite, de nombreuses organisations touristiques françaises apparaissent. L’édition rend compte de l’étonnement face à ce nouveau fait de société : portraits du touriste et guides de voyage prolifèrent. De nouveaux moyens de transports facilitent l’essor de différentes formes de voyages dont le caractère à l’origine "utilitaire" s’amenuise au cours du siècle pour laisser place à l’agrément : le tourisme Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 7 thérapeuthique, la découverte de la montagne, les bains de mer, le tourisme sportif. Le XXe siècle confirme cette tendance et voit se développer le tourisme de masse, dont la genèse remonte à la loi sur les congés payés de 1936 mais qui connaîtra son apogée pendant les Trente Glorieuses. La montagne comme terrain d'aventures A travers les récits de Johann-Jacob Scheuchzer (1723), d’Albrecht von Haller (1732), ou de Windham et Pococke aux glacières de Chamonix se forge une tradition de découverte des montagnes. Une génération de savants alpinistes allient l’exploration scientifique des Alpes à une fascination pour les glaciers (La Rochefoucauld, La Relation du voyage aux glacières de Savoye, 1762 ; Saussure, Voyage dans les Alpes). Sous l’influence de Rousseau, la montagne devient un lieu de promenade méditative. La Suisse (qui englobe le versant français dans les récits) prend alors une dimension mythique : terre de liberté, paysages pastoraux bucoliques ou glaciers sublimes, lacs chers romantiques, tout concourt au succès durable des Alpes et notamment de Chamonix (Ovide de Valgorge, Promenade dans une partie de la Savoie et sur les bords du Léman ; Denys Luce, Un mois à Aix en Savoie, impressions et souvenirs, 1875). Les premiers guides Murray, Joanne et Baedeker sont consacrés à la Suisse et c’est vers les Alpes que se dirigent les premières "caravanes scolaires" en 1863-1865. S’inspirant explicitement des Voyages en zigzags de Töpffer, et persuadé des valeurs thérapeutiques et morales d’un séjour alpestre, le Club alpin français, fondé en 1874, organise des excursions en montagne pour les enfants. Les Pyrénées sont "découvertes" plus tardivement et souvent les voyageurs y recherchent les paysages qu’ils admiraient dans les Alpes (Ramond de Carbonnières, "Observations faites dans les Pyrénées pour servir de suite à des observations sur les Alpes"). De 1760 à 1815, la plupart des relations de voyages sont écrites par des botanistes ou des géologues et portent sur la partie montagneuse des Hautes Pyrénées. A côté de publications savantes (Chausenque), guides et récits de voyage se multiplient par la suite. Les voyageurs s’intéressent désormais à l’ensemble des Pyrénées, y compris au versant espagnol. Lourdes et Gavarnie deviennent des destinations incontournables (Une messe à Gavarnie, 1864). Les excursions sont favorisées par un bon réseau de communications amplifié par Napoléon III avec la "Route thermale". Le voyage dans les Pyrénées est l’occasion de découvrir, accompagné de guides locaux, les joies de l’aventure, une nature inquiétante et sauvage, des habitants considérés comme frustres et donc pittoresques. Le pays basque fascine aussi par son côté mystérieux et ses chasses à l’ours. (Prosper de Lagarde, Voyage dans le pays basque et aux bains de Biarritz). L'avènement du tourisme sportif De même qu’il contribue à transformer l’aspect des villes, le train modifie le rapport au voyage, à la vitesse et au temps : "On ne voyage pas par le chemin de fer ; on arrive" (Alhoy). Certaines voix s’élèvent pour protester contre ces nouvelles conditions de voyage : "Assez de guides-diamants incrustés de strass, assez de trains à prix réduits, comme leurs plaisirs" (Xavier Marmier). A l’exemple de Robert Louis Stevenson (En canoë d’Anvers à Paris ou Voyage avec un âne dans les Cévennes), les voyageurs s’efforcent de redécouvrir d’autres manières de parcourir la France, notamment la marche à pied (Biélawski, Récits d’un touriste auvergnat). Le "tourisme sportif" fait ainsi son apparition. Né avec l’ascension du Mont Blanc en 1787 par l’Anglais Beaufroy, l’alpinisme se développe après 1857 et la fondation du British Alpine Club (Martin Barry, Ascent to the summit of Mont Blanc in 1834, 1836 ; Edward Whymper, Escalades dans les Alpes de 1860 à 1869, 1912). Les "sports d’hiver" apparaissent à la fin du siècle. Arnold Lunn crée le Davos English Ski Club en 1902 et les anciennes stations d’été s’ouvrent désormais aux touristes l’hiver. D’autres sports s’imposent également dans la dernière moitié du siècle. Depuis l’invention du "célérifère" à la fin du XVIIIe siècle et son perfectionnement par le baron allemand Karl von Drais, la "draisienne" a connu de multiples améliorations (vélocipède des frères Michaux en 1861) et a rencontré un grand succès en Europe. De nombreuses courses cyclistes voient le jour : Saint- Cloud (1868), le championnat de France sur 100 km (1890), Bordeaux-Paris et Paris-Brest-Paris (1891). En 1903, Henri Desgranges, fondateur en 1900 du journal "l’Auto", organise le premier Tour de France. La voiture connaît la même destinée : après l’invention de la voiture à essence Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 8 par Carl Benz (1886) et Daimler (1887) puis du pneumatique par Dunlop (1888), la première course automobile est organisée à Rouen en 1894. Pour les touristes fortunés, bicyclette et automobile représentent une nouvelle façon de parcourir la France (Briault, Les Pyrénées et l’Auvergne à bicyclette ; Dubuisson, En zigzags à travers la Bourgogne). Les guides s’engouffrent dans ce créneau : le Guide Marti : cyclistes et photographes (1897) ou le Guide Michelin (1900), tentent d’attirer un public fasciné par ces nouveaux modes de transport. Se dessinent ainsi un goût de l’effort et la volonté de découvrir la route "à petit pas". Randonnées pédestres, cyclistes ou équestres, sports d’hiver, photographie…, sont autant de formes de loisir qui prendront une importance capitale pour le touriste du XXe siècle. » texte consultable à l'adresse suivante : "www.cc-baschablais.com/images/sivom-tourisme/1004-1.doc Ce texte permet d'apporter un éclairage rapide mais intéressant sur la façon dont le tourisme s'est développé depuis le 18ème siècle, parrallèlement aux moyens de transport et à l'élévation du niveau de vie. Mais bien plus encore, ce texte révèle que dès sa naissance, le tourisme va se construire sur des notions comme l'aventure, le risque, la découverte, le dépassement physique. Aujourd'hui encore, ces reçettes font le succès du tourisme dit d'aventures, qui est pourtant considéré à la marge au sein d'un secteur d'activités qui génère chaque année une « masse » toujours plus importante de touristes, à la recherche de dépaysement et d'exotisme certes, mais pas trop d'aventure ni de dépassement de soi. On peut ici avancer l'idée que le tourisme dit d'aventures est le seul secteur du tourisme à avoir su préserver ou recréer les finalités mêmes du tourisme, sans tomber complètement dans les dérives de l'industrialisation et de la vulgarisation. Le tourisme peut-il être remis en cause ? C'est une question fondamentale qui est posée régulièrement aujourd'hui, par différents courants de pensée alternatifs (altermondialistes et décroissants notamment). Il est nécessaire d'apporter des éléments de réponse en introduction de ce mémoire. En effet, on pourrait penser de prime abord que la notion de tourisme et celle de durabilité sont fondamentalement opposées. Ce n'est pourtant pas si simple ... Aujourd'hui le tourisme peut être décrié. C'est le premier secteur économique mondial, et par conséquent il s'expose aux risques de dérapage. Comme l'indique la Revue Durable dans son numéro 11 spécial tourisme, « mal maîtrisé, laissé aux seules mains des promoteurs et spéculateurs, il peut avoir des effets négatifs : détérioration des sites trop fréquentés, banalisation du patrimoine, accentuation de la délinquance sur les lieux d'accueil, dépendance économique des pays récepteurs auprès des pays émetteurs et de leurs entreprises, exploitation du consommateur touristique ... ». la Revue Durable - numéro 11 « quel tourisme pour une planète fragile ? » C'est pourtant avant tout un facteur de développement personnel, social, culturel et économique. Un extrait de la déclaration de Manille adoptée en 1980 par l'OMT (organisation mondiale du tourisme) donne un éclairage intéressant sur la portée et le sens du tourisme : « le tourisme moderne est né de l'application de la politique sociale qui a conduit à l'obtention par les travailleurs des congés annuels payés, ce qui se traduit en même temps par la reconnaissance d'un droit fondamental de l'être humain au repos et au loisir. Il est devenu un facteur d'équilibre social, de connaissance mutuelle des hommes et des peuples et d'élévation de l'individu. Il a acquis outre ses dimensions quantitatives bien connues une dimension culturelle et morale qu'il importe de favoriser et de protéger contre les distorsions négatives dues à des facteurs économiques. ... ». Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 9 Le tourisme peut-il devenir durable ? Toujours d'après l'OMT, le tourisme peut jouer un rôle important dans le traitement du problème du changement climatique si la capacité d’innovation et les ressources de ce secteur économique mondial vital sont pleinement mobilisées et orientées vers cet objectif. Ces cinq dernières années, la communauté du tourisme est manifestement devenue de plus en plus préoccupée par les problèmes que pose le changement climatique. L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) et plusieurs organisations partenaires, dont le PNUE, ont convoqué la première Conférence internationale sur le changement climatique et le tourisme, en 2003, à Djerba, en Tunisie. Cette Conférence a constitué un véritable tournant dans l’action engagée pour accélérer la prise de conscience des implications du changement climatique par la communauté internationale du tourisme. La Déclaration de Djerba a reconnu les relations complexes qui existent entre le tourisme et le changement climatique, et a établi un cadre général pour les travaux de recherche futurs et la préparation des décisions sur l’adaptation et l’atténuation. Définition du développement durable du tourisme par l'OMT (août 2004) : « Les principes directeurs du développement durable et les pratiques de gestion durable du tourisme sont applicables à toutes les formes de tourisme, dans tous les types de destination. Les principes de durabilité concernent les aspects environnemental, économique et socioculturel du développement du tourisme. Pour garantir sur le long terme la durabilité de ce dernier, il faut parvenir au bon équilibre entre ces trois aspects.Par conséquent, le tourisme durable doit : - exploiter de façon optimum les ressources de l'environnement qui constituent un élément clé de la mise en valeur touristique, en préservant les processus écologiques essentiels et en aidant à sauvegarder les ressources naturelles et la biodiversité ; - respecter l'authenticité socioculturelle des communautés d'accueil, conserver leurs atouts culturels bâti, vivant, leurs valeurs traditionnelles et contribuer à l'entente et à la tolérance interculturelle ; - assurer une activité économique viable sur le long terme offrant à toutes les parties prenantes des avantages socio-économiques équitablement répartis, qui contribuent à la réduction de la pauvreté (emplois stables, possibilités de bénéfices et de services sociaux pour les communautés d'accueil…). Le développement durable du tourisme requiert la participation, en connaissance de cause, de tous les acteurs concernés, ainsi qu'une forte direction politique pour assurer une large participation et l'existence d'un consensus. Le tourisme durable est le fruit d'efforts permanents et il exige le contrôle constant des effets de cette activité, ce qui suppose l'adoption, chaque fois qu'il y a lieu, des mesures préventives et/ou correctrices nécessaires. » Source : http://www.veilleinfotourisme.fr/1186758213380/0/fiche___article/&RH=GTIDDT La voie semble donc prise par les hautes instances internationales. En tous cas dans les discours. Voyons à présent comment le tourisme, son évolution vers la durabilité, et ses différentes interprétations, sont traités au niveau de la France, et plus particulièrement dans le secteur du tourisme d'aventures. Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 10 Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 11 I – Le tourisme d’aventure et le développement durable A/ Généralités 1)- genèse et historique du tourisme d’aventure en France Le tourisme dit d'aventure a vu le jour en France à la fin des années 60. Cette forme de tourisme a été initiée principalement par des personnes de la mouvance « mai 68 », et qui souhaitaient donner naissance à ces idées (plus de liberté, d'épanouissement personnel, d'ouverture, d'échange, de paix ...) notamment à travers une façon de voyager différente. Cette tendance s'est traduite de différentes façons, selon qu'elle s'appliquait en France où à l'étranger. Dans tous les cas, il s'agissait bien d'une volonté de retour à la nature, à la simplicité, à l'authenticité, mêlée à une volonté d'approfondir l'échange et l'ouverture entre les peuples, les communautés, les sexes ... Le trekking, la marche ou la randonnée, quel que soit le terme retenu, fut une des formes de tourisme les plus développées dans ces années là. En France par exemple, les années post-68 ont vu naître des associations comme Chamina ou Sylva, dont le but était de redécouvrir et redynamiser la france rurale (qui venait de subir plus d'un siècle d'exode), par le développement de sentiers de randonnée, la création de réseaux de gîtes, le soutien à de la pluri-activité autour de l'agriculture et du tourisme. C'est à cette époque et dans le prolongement de cette mouvance que sont apparues en France les termes de « tourisme vert » ou « tourisme rural ». A l'étranger, ce concept de tourisme dit d’aventure, fut lancé par des pionniers de l’itinérance saharienne et du trekking au Maroc, au Népal et vers les grands massifs montagneux du monde (Terres d'Aventures en tête). Cette nouvelle offre de voyages, innovante et dans l'air du temps, répondait à une attente, à un besoin, à une apiration profonde d'une société en mutation. Ce nouveau credo, porté essentiellement par des accompagnateurs et des guides de montagne passionnés de « voyages à pied », prit peu à peu son essor, notamment grâce à la presse spécialisée consacrée à la randonnée et l’alpinisme relayant cette offre auprès du public. Dès le départ, cette forme de tourisme était une façon de prendre le contresens de la société de l'époque dans son évolution. Le tourisme de masse était déjà critiqué par ces « pionniers de l'aventure », qui par leurs initiatives ont à ce moment là lancé une alternative, aspirant déjà à l'époque à prendre bien plus en considération les populations et les zones visitées. Une forme innovante de voyager était née, alliée à une philosophie différente. A partir de là, d'autres innovations vont naître ... C'est notamment à cette époque que l'expression « produit à la carte » fait son apparition chez les voyagistes en Europe. Elle désigne la possibilité de combiner des extensions avec un produit de base, par exemple un mini séjour à la fin d’un circuit. La formule des voyages à la carte prend réellement son essor dans les années 70. L’optique est alors de remettre en cause le système traditionnel de construction de voyages et de séjours à forfait. L’objectif est de ne plus négocier les achats de prestations sur des quantités programmées de voyages à date fixe et de clients regroupés. La base de négociation évolue et porte désormais sur la quantité globale de clients individuels apportés au prestataire sur toute la saison ou sur l’année. En France, le tour opérateur Voyageurs du Monde est créé en 1979, sur ce modèle de « vacances à construire ». L’engouement pour ce type de séjours peut s’expliquer de diverses façons ; montée de l’individualisme, exigence de qualité, besoin d’épanouissement personnel ...et remise en cause émergente du tourisme de masse. Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 12 Du tourisme de niche à une forme de tourisme reconnue et attirante Les années 80 et 90 verront le tourisme dit d'aventures progresser, pour sortir peu à peu du tourisme “de niche”. De nombreux opérateurs verront le jour durant ces années. Parrallèlement, on assiste à l'apparition de nouvelles destinations (plus ou moins lointaines) et à une montée des thématiques (agritourisme, culture, art, bien-être ...) et de séjours ciblés (randonnée, équitation, peinture, remise en forme, cuisine …). Le voyage d'aventure et le voyage sur mesure sont deux thématiques qui ont pris leurs racines durant cette période marquante de l'évolution des sociétés occidentales (après 68, mondialisation et libéralisation de l'économie). Bien sûr, ces formes de tourisme ont su, et ont du évoluer : des circuits construits par et pour le client, la recherche de satisfaction maximale, la prise en compte des besoins du voyageur, de ses envies et de son budget ont assuré le succès, et ont permis également au touriste de retrouver l'authenticité, et le contact avec les locaux. Depuis le début des années 2000, une concurrence de plus en plus accrue, une implantation globale des opérateurs sur toutes les destinations, le développement exponentiel des transports (notamment aérien), l'augmentation du nombre de touristes ... ont pour effets induits de la part des TO du Nord des pressions sur les prestataires du Sud mais aussi sur les « petits opérateurs» du Nord. D'un côté, le “marché” se fait de plus en plus concurrentiel, et on évolue vers des fusions et des acquisitions de compagnies, vers des prix toujours plus serrés et surtout vers le développement important des offres et compagnies « low cost », vols dégriffés … D'un autre côté, on s'aperçoit que l'évolution du tourisme d'aventure a fait qu'aujourd'hui il se retrouve dans une situation délicate, et antinomique avec ses fondements. Il prend de plus en plus la forme d'un tourisme de masse (par son nombre de clients, par son utilisation des moyens de transport low cost ou charters, par son uniformisation de l'offre, par son impact de plus en plus important sur l'environnement ...). Cette situation permet de comprendre pourquoi, aujourd'hui plus que jamais, le secteur touristique est le secteur le plus évolutif pour tout ce qui concerne les propositions « alternatives ». En effet, ces dernières années, de nombreuses initiatives sont nées, afin de donner naissance à d'autres formes de tourisme, plus respectueuses de l'homme et de l'environnement. Des remises en cause aussi, de la part des opérateurs historiques, et des autorités, semblent s'opérer peu à peu, parrallèlement aux mesures prises mondialement en faveur d'un développement durable. 2)- recadrage historique du développement durable dans le tourisme en France Au niveau institutionnel, les réflexions autour du tourisme durable sont nées à partir du sommet de Rio en 1992 sur le développement durable. En France, plusieurs organismes ont alors réfléchi à la manière de décliner l’agenda 21 de Rio. Initiée en 1998 par la Fédération des Parcs Naturels Régionaux de France, la Charte Européenne du Tourisme Durable dans les espaces protégés vise à encourager des relations plus étroites entre les professionnels du tourisme et les gestionnaires des espaces protégés, ainsi qu’à sensibiliser le grand public au développement durable. Le Gouvernement français a adopté une stratégie nationale de développement durable en 2003 afin d'organiser de nouvelles solidarités en France, comme au plan international (la stratégie prévoit de mettre en place, avec le Ministère des Affaires Etrangères, des méthodologies d’accompagnement de projets de tourisme responsable, dans les pays du Sud, mais aussi de valider et d’expérimenter ces démarches de tourisme responsable afin de pouvoir les proposer en termes d’axes de coopération aux pays qui le souhaiteraient). Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 13 ODIT France travaille depuis 1999 sur la notion de tourisme durable, grâce à des publications et des expérimentations au niveau français et européen (réseau européen des territoires pilotes de tourisme durable : « tourism site », Agenda 21 du tourisme européen, ...). En parallèle, l'Etat conduit, depuis une vingtaine d’années, une politique nationale en faveur des grands sites classés : Dune du Pilat, Gorges du Verdon, Marais salants de Guérande, Massif du Canigou, Pointe du Raz, Pont du Gard, Puy de Dôme… Il s’agit des « opérations grands sites » menées par le Ministère de l'Ecologie et du Développement et de l'Aménagement Durable. Enfin, on peut espérer aujourd'hui, suite aux élections présidentielles de 2007 et au Grenelle de l'Environnement, que les grands principes du développement durable adoptés à grands renforts médiatiques, vont être réellement suivis d'effets, et commencer à être intégrés par l'ensemble de la société, et par conséquent par le secteur du tourisme. Au niveau du secteur privé, les réflexions et les premières actions (ou tentatives d'actions) sont parties des tours-opérateurs, agences ou associations organisatrices de voyages, et principalement à partir d'initiatives prises dans les branches du tourisme d'aventure, du tourisme vert, du tourisme rural, et du tourisme de plein air. B/ Des prémices d'un mouvement à une structuration par branches Ma réflexion à ce sujet s'est construite à la lecture du livre « un autre tourisme est-il possible ? » aux Presses de l'Université du Québec, écrit par Marie-Andrée Deslile et Louis Jolin. Voyant les dommages que le tourisme de masse a pu causer au patrimoine naturel et culturel, et voyant l'évolution de leurs branches au départ « alternatives » vers une forme de « massification », certains professionnels de ce secteur ont su prendre dès les années 90 la mesure des impacts négatifs provoqués par l'activité humaine en général et le tourisme en particulier. Cette réflexion a rejoint directement celle des voyageurs qui deviennent de plus en plus conscients des impacts de leurs déplacements et de leurs comportements en voyage. C'est pour contrer ces effets négatifs, et pour faire valoir les effets positifs du tourisme, qu'on assiste ces dernières années à la promotion d'un autre tourisme qui s'identifie à l'aide d'expressions qui ne font pas toujours consensus. Les organismes qui font la promotion de cet autre tourisme s'affrontent sur le terrain de la sémantique. Les différentes expressions s'appuient cependant sur un socle de valeurs communes qui se déclinent différemment selon les continents et les pays, selon les cultures et les ressources. La plupart des termes utilisés aujourd'hui, tels que tourisme responsable, solidaire, social, équitable ... se ressemblent et se distinguent à la fois. Ils poursuivent tous un objectif commun : le tourisme durable. 1)- Aux origines, le tourisme dit « alternatif » Le tourisme dit alternatif a été utilisé dès les années 1950. Le qualificatif désigne surtout le choix du voyageur de s'éloigner du tourisme traditionnel de masse où se retrouvent les hordes concentrées de visiteurs, tant dans des sites d'hébergement qu'autour de sites d'attrait majeur. Le touriste cherche plutôt des formes alternatives de faire du tourisme en choisissant un produit ou un Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 14 service touristique qui n'entre pas dans une chaîne touristique traditionnelle. Ainsi, le fait de payer directement un fournisseur local donne plus de garanties sur le fait que la retombée sera injectée dans l'économie locale plutôt que de tomber dans les poches des multinationales. Le tourisme d'aventure s'est inscrit dans cette mouvance, il en était même aux origines. Dans les années 1990 et 2000, le contexte économique, social et environnemental global a provoqué l'apparition de nouvelles formes de tourisme « alternatif », le plus souvent au sein même de structures déjà à l'origine dans les années 60 et 70 de ce mouvement. 2)- Définitions, orientations, labels et certifications Plusieurs notions ne réfèrent pas à un produit, à un type ni une forme de voyage mais plutôt à des valeurs, à des niveaux de responsabilisation, de solidarité ou de conscientisation dans l'exercice du tourisme. C'est notamment le cas des expressions comme le tourisme responsable, le tourisme solidaire, le tourisme équitable ou le tourisme communautaire ... D'autres interprétations concernent certains types de voyages qui traduisent l'application de valeurs (écotourisme, tourisme culturel, agrotourisme, etc ...). Ces types de voyages supposent une consommation éthique et des comportements responsables de la part des voyageurs, dans le respect des lieux d'accueil et de leurs patrimoines naturels et culturels, ainsi que dans un cadre d'authenticité et d'échange avec les populations visitées. Bref, certaines expressions se rapportent plutôt à des pratiques tandis que les autres se réfèrent plus à des valeurs. Voici quelques définitions (pas toujours consensuelles) des principaux courants caractérisant ce tourisme durable : tourisme responsable (définition tirée du livre « un autre tourisme est-il possible ») : Voyager de façon responsable, c'est voyager en respectant l'autre et en étant conscient de ce que l'on peut apporter de bon et de moins bon en visitant des lieux et des gens. Se soucier de ce que l'on est susceptible de modifier sur les lieux visités, sur les plans environnemental, social, culturel et économique, c'est être responsable de ses agissements et des ses comportements. Le tourisme responsable concerne aussi bien le voyageur que les entreprises touristiques et vise particulièrement les attittudes, les pratiques, les comportements. tourisme solidaire (définition tirée du livre « un autre tourisme est-il possible ») : Le tourisme solidaire s'inscrit dans les dynamiques du développement durable. Il doit combiner l'efficacité économique avec la justice sociale et le respect de l'environnement. Il implique que la rencontre des cultures se fasse dans le respect de leur identité et de leurs valeurs. Le tourisme solidaire regroupe les formes de tourisme dits « alternatifs » qui mettent au centre du voyage l'homme et la rencontre, et qui s'inscrivent dans une logique de développement des territoires. écotourisme (définition tirée de la Société Internationale d’Ecotourisme (TIES) ) : Le concept d’écotourisme est le plus souvent cité pour parler de ces modes de voyager « autrement ». L’écotourisme est une forme de voyage responsable dans les espaces naturels qui contribue à la protection de l’environnement et au bien être des populations locales. C'est l'art de voyager en ayant pour idée maîtresse la rencontre de l'autre, la compréhension et le respect de son mode de vie avec le souci constant de perturber le moins possible l'écosystème social et économique local. tourisme équitable (définition tirée du livre « un autre tourisme est-il possible ») : Selon la plate-forme du commerce équitable, la tourisme équitable est « un ensemble d'activités de services proposé par des opérateurs touristiques à des voyageurs responsables, et élaboré par Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
Chamina Voyages, du développement durable au tourisme responsable 15 les populations locales ». Les communautés participent de façon prépondérante à l'évolution de la définition des activités (possibilité de les modifier, de les réorienter, de les arrêter). Elles participent aussi à leur gestion continue de façon significative (en limitant au maximum les intermédiaires n'adhérant pas à ces principes). Les bénéfices sociaux, culturels et financiers de ces activités doivent être perçus en grande partie localement, et équitablement partagés entre les membres de la communauté. Les professionnels du tourisme d'aventures, c'est à dire les tours opérateurs, les agences ou encore les associations ou les accompagnateurs en leur nom propre, ont chacun, en fonction de leurs possibilités et de leurs affinités (plutôt environnementales, plutôt sociales, plutôt orientés sur des actions en Afrique, en Amérique du Sud ...), mis en place nombre d'initiatives et de projets pouvant s'inscrire dans chacune de ces définitions. Pour le client, il n'est pas toujours facile de discerner ce qui différencie chacune de ces formes de tourisme. C'est aussi la raison pour laquelle ont été élaborées, dans le même esprit, de nombreuses chartes (codes de bonnes conduites, labels, etc.). Ces documents visent d'une part à informer et sensibiliser le client, mais aussi à codifier les engagements mutuels en faveur du développement des activités touristiques les plus respectueuses. Ces chartes ou initiatives sont adoptées ou mises en place par des Etats, des associations ou par des opérateurs soucieux de diversifier leur offre et de présenter une image et des modèles plus respectables. J'en ferai ici un aperçu non exhaustif car les initiatives dans ce domaine sont aujourd'hui de plus en plus courantes : Charte européenne du tourisme durable En 1995, et à la suite du Sommet mondial de la terre de Rio de Janeiro de 1992, l’OMT organise une conférence mondiale sur le tourisme durable à Lanzarote (Canaries). A cette occasion et à l’initiative de diverses organisations (OMT, Unesco, PNUE), cette rencontre aboutit au lancement d’une Charte du tourisme durable. Le développement touristique durable est défini par la charte européenne du tourisme durable comme étant, « toute forme de développement, aménagement ou activité touristique qui respecte et préserve à long terme les ressources naturelles, culturelles et sociales et contribue de manière positive et équitable au développement économique et à l’épanouissement des individus qui vivent, travaillent ou séjournent sur ces espaces. » Aujourd'hui, cette charte et ses principes commence à être appliquée dans plusieurs espaces protégés d'Europe, comme dans les Cévennes en France, où le Parc national des Cévennes a créé en 2001 l'association Cévennes écotourisme, dont le but est d'harmoniser les pratiques des professionnels du tourisme de ce territoire, sur la base de cette charte. Code mondial d'éthique du tourisme Adopté en 1999 par l’OMT, le code définit les « règles du jeu » pour les destinations, les gouvernements, les promoteurs, les voyagistes, les agents de voyages, les travailleurs du secteur et les touristes eux-mêmes. Il s'inspire de nombreux codes professionnels et déclarations analogues qui l'ont précédé et il y ajoute de nouvelles idées. Réseaux T2D2 T2D2 rassemble consultants, structures et personnes ressources ayant pour vocation de renforcer les liens entre la branche du tourisme et les autres branches, secteurs et dimensions du développement territorial durable. Nicolas Diet – Master 2 DDTM, Université de Savoie – Juin 2008
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