CHOZA LA MAISON MAYA DU YUCATÁN - Yokdzonot I Yucatán I MEXIQUE Décembre 2016
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L e Mexique est un pays d’Amérique latine LA HUTTE MAYA DE NEIMA à l’ombre salvatrice, sont posées des maisons occupant une position d’entre-deux, une Une courte promenade dans les ruelles ovales de pierre, terre ou bois, recouvertes charnière entre l’Amérique du sud et celle poussiéreuses de Yokdzonot suffit à faire le tour d’un toit de chaume. Par les portes entrouvertes, du nord. Héritier d’importantes civilisations de ce village particulièrement calme en cette nous apercevons parfois le sombre intérieur. pré-hispaniques mais aussi de la conquête chaude matinée. Du linge sèche au soleil, les Dans la choza couleur ocre, vivent Neima et espagnole, le pays dévoile une richesse poules traversent les chemins, mais personne sa famille. Elle réalise des potions naturelles culturelle incroyable et des peuples aussi à l’extérieur ! Nous comprendrons bien assez pour soigner les moindres maux, et habite une disparates qu’attachants. L’architecture est tout tôt qu’avec le soleil rasant, chacun préfère la maison traditionnelle maya depuis toujours. aussi fascinante, véritable reflet de la diversité fraîcheur de son intérieur. Au milieu de grands « J’ai vécu avec mes parents dans une choza du peuple mexicain que l’on retrouve dans la terrains où poussent toutes sortes de plantes à quelques kilomètres d’ici, j’ai vu mon père forme, la technique ou les matériaux employés. Des vieilles haciendas mexicaines en passant par de grandes maisons coloniales, ou de petites chozas, les maisons traditionnelles du pays sont généralement hautes en couleur. Sur les terres arides de la péninsule du Yucatán, au cœur d’une région ponctuée de célèbres temples en ruine et de trous d’eau secrets et sacrés, les Mayas ont su préserver une forte identité. Les routes à travers ces longues plaines désertiques font traverser de nombreux petits villages traditionnels mayas, à la fois rudimentaires mais intrigants. Quelques sentiers de terre cahoteux, une poignée d’habitations, une église décrépie et un magasin de bières constituent chacun des hameaux où vivent une cinquantaine d’Indiens tout au plus. Nous en choisissons un, un peu au hasard, afin d’aller étudier le mode de vie des mayas. Neima et sa famille vivent dans une maison traditionnelle maya : la choza.
CHOZA I LA MAISON MAYA DU YUCATáN la construire et aujourd’hui je suis fière d’avoir ma propre maison pour élever mes quatre enfants », expliquera-t-elle en nous invitant à visiter son terrain. Trois petites huttes de terre se succèdent, en file indienne, les portes se faisant face. Ces maisons traditionnelles mayas sont toutes réalisées sur le même modèle : un cadre de bois soutient des murs en torchis, composés d’argile et de paille, qui assurent une bonne isolation contre la chaleur ou le froid. Le toit, en feuilles de palme, assure l’étanchéité parfaite en cas de pluies. De dimensions variables, les huttes sont généralement linéaires, symétriques, et fermées, possédant uniquement deux portes centrales en vis-à-vis qui permettent la circulation de l’air. Si à l’origine, la maison rurale traditionnelle est de forme ovale, les maisons se construisent De nos jours, les chozas traditionnelles peuvent être réinventées : base rectangulaire, ouvertures supplémentaires, terrasse couverte, etc. aujourd’hui de plus en plus rectangulaires, car bâtiment à part, à l’air libre où la fumée peut elles sont « bien plus faciles à meubler », nous s’échapper ». À l’intérieur de la première avoue Neima en rigolant. Comme la famille s’est choza, le sol est en terre battue, le mobilier est agrandie, d’autres petites chozas secondaires spartiate : un banc, une table. Mais dans celle- se rattachent maintenant au bâtiment principal : ci, la famille n’y habite plus, elle est seulement « Nous avons d’abord construit cette première utilisée pour vendre les « médicaments mayas ». maison avec mon mari il y a plus de dix ans, La choza principale est, tout comme la mais lorsque nos enfants sont nés, nous avons tradition des ancêtres, circulaire et composée décidé de nous agrandir pour leur créer un de matériaux organiques ; de larges poteaux espace propre. La cuisine se trouve dans un de bois sont enfoncés dans une plate forme La fierté des racines selon Neima.
surélevée de quelques centimètres du sol central de la pièce, face aux portes ouvertes extérieur. Le petit poste de télévision côtoie des pour « voir ce qui se passe dehors depuis le armoires anciennes, un tabouret, et le hamac hamac », précise Luis, le mari de Neima, qui est tendu entre deux poutres : juste l’essentiel ! nous a rejoints. Car ici, pas de lit : chez les La hutte secondaire, bien que construite indiens mayas, on naît, on vit et on meurt dans avec les mêmes matériaux, est, quant à elle, son hamac ! rectangulaire, le sol est en béton et une fenêtre Une terrasse couverte, le « corridor » prolonge a même été ajoutée pour obtenir plus de lumière même cette petite choza, où un autre hamac naturelle. Pas beaucoup plus de mobilier, mais attend le travailleur qui veut se prélasser au encore un grand hamac qui trône dans l’espace grand air après son activité journalière. Cet Si certaines chozas sont en terre, d’autres peuvent être en pierre. espace intermédiaire entre la voie publique et l’intérieur privé est devenu au fil des années, indispensable dans toute construction de choza qui se respecte. Les lieux de repos sont sacrés chez les mayas ! Dehors se réalisent toutes les tâches qui nécessitent de l’espace : ainsi la cuisine au foyer constamment allumé occupe une grande place au milieu du jardin, et est couverte, tout comme les chozas, de quelques feuilles de palme pour les jours où les pluies tropicales s’abattent sur le Yucatán. Les fruits sont prélevés directement dans les arbres du jardin, et Neima nous concoctera même quelques recettes yucatanesques simples et délicieuses. De la source à l’assiette, il n’y a ici littéralement qu’un pas ! « Voilà comment l’on vit chez les mayas du Yucatán », conclura la maîtresse de maison sur cette formidable rencontre. Une maison circulaire n’est pas évidente à meubler !
CHOZA I LA MAISON MAYA DU YUCATáN TRANSMETTRE POUR PERDURER se transmettent de génération en génération, à Le peuple maya de cette péninsule mexicaine la fois historiques, puisqu’une tradition millénaire conserve les techniques utilisées par les cultures se perpétue ; scientifiques, par la technologie amérindiennes ancestrales pour préserver les traditionnelle d’une architecture bioclimatique ; particularités de cet habitat en étroite relation ou encore ethnologique et anthropologique, avec son environnement, à la différence car les usages dans les manières d’habiter d’autres lieux où l’architecture vernaculaire a se répètent. Des savoirs bien gardés qui quasiment disparu. Et de nombreux symboles rendent aujourd’hui encore, possible ce type d’habitation. Luis nous proposera alors de nous montrer Dans quinze jours, le futur projet de Luis sera sur pied. le chantier en cours de construction d’un de ses amis. C’est à une centaine de mètres que maison ; les feuilles de palmes sont à récolter nous nous rendons pour observer la tâche de aux branches des palmiers qui abondent sur le quatre hommes qui s’activent autour de longs terrain, et formeront un toit étanche ; les lianes troncs d’arbre, des sapotilliers. Ces arbres des vignes seront utilisées pour lier les éléments fraîchement coupés proviennent du terrain sur structurels en bois. « J’ai appris à me servir des lequel s’élèvera dans quelques jours seulement matériaux que la nature nous offre par mon la maison : « mon ami m’a confié le chantier père, aujourd’hui, je me sers de ces savoirs de sa choza. Habitant à la ciudad [Mexico, pour les transmettre aux jeunes qui travaillent ndlr], il arrivera pour ses vacances dans deux avec moi. Je n’ai pas de plans, tout est dans semaines. D’ici là tout doit être terminé, et cela ma tête, mais j’essaye d’intégrer au maximum le sera car je connais bien les techniques de les constructions dans leur environnement », construction, tout comme les voisins qui m’aident expliquera humblement Luis. dans ce labeur », certifiera Luis face à notre Mais l’importante splendeur et l’incontestable perplexité devant ce terrain encore vierge et ingéniosité qui se sont manifestées auparavant à peine débroussaillé. Tous les matériaux utilisés dans la culture maya, sont aujourd’hui minimisés sont naturels et issus directement du site : les par l’héritage culturel du colonialisme d’une troncs de sapotillier, nettoyés de leur écorce part, et par les critères de confort de la pour éviter la prolifération des insectes et modernité d’autre part. En effet, pour le peuple vernis, constitueront la structure principale de la mexicain comme pour ses dirigeants politiques, Des matériaux de construction organiques et écologiques.
Mais la culture des quelques peuples méso- américains, à l’instar de la communauté de Yokdzonot, leurs traditions, leurs croyances et leur vision de l’univers, maintiennent une résistance constante face à cette société de consommation pour tenter de préserver leur habitat traditionnel issu de la terre. Apprendre à lire et à respecter les formes, les typologies architecturales anciennes, valoriser la main-d’œuvre ou encore le savoir-faire, sont autant d’objectifs que doivent se donner les autorités mexicaines pour pérenniser ce pan de culture si précieux. Dans un monde où les villes sont de plus en plus développées, où les habitants semblent déconnectés d’une réalité immuable, l’architecture écologique peut ré- ouvrir la voix d’une sagesse naturelle qui permet de réaliser des constructions en harmonie avec La construction d’une choza est un véritable travail d’équipe. Première étape : la préparation de la structure de bois. leur espace et en accord avec leur temps. l’habitation maya est considérée comme la de symboles. Nous touchons ici de très près la maison du pauvre, entraînant peu à peu la réalité d’une civilisation disparue, balayée par perte des pratiques constructives traditionnelles. une autre, plus conquérante et dominatrice. L’esthétisme d’une modernisation de l’habitat Aussi, si les planches de bois ou la tôle en tend malheureusement à faire oublier zinc viennent parfois remplacer les murs ou le l’importance d’un vernaculaire symbolique pour toit de palme, surtout lors d’une construction une communauté maya en résistance. Nous d’urgence après une catastrophe naturelle, sommes touchés par les conditions de vie des ces matériaux détériorent le style traditionnel Mayas d’aujourd’hui, si précaires mais si riches et l’environnement dans lequel ils s’inscrivent. Les troncs de sapotilliers sont recouverts de torchis pour isoler la choza.
CHOZA I LA MAISON MAYA DU YUCATáN Bien que le peuple maya accède progressivement au confort moderne, il conserve néanmoins un mode de vie simple, en symbiose avec leur environnement.
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