Data, personnalisation, hyper ciblage. De la publicité à la communication fragmentée ?
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Data, personnalisation, hyper ciblage. De la publicité à la communication fragmentée ? Avec le digital, la publicité devient de plus en plus ciblée et personnalisée. Ce mouvement peut-il à terme bousculer les équilibres et sonner la fin de la publicité de masse traditionnelle ? Quels sont d’ores et déjà les effets sur les budgets, notamment de production ? A l’horizon 2022, verra-t-on un monde tourné vers le tout ROIste ? Intervenants : Alexis Marcombe : Directeur Général délégué du Figaro Média Thierry Martinez : Directeur de la communication de la Caisse d’Épargne Marianne Siproudhis : Directrice Générale de France Télévisions Publicité Olivier Vigneaux : CEO BETC Digital. Masse, ROI, conversation : les 3 piliers de la communication de marque Thierry Martinez rappelle que le digital est le 1er support publicitaire, mais que les médias de masse, dont la télévision, résistent bien car « l’émotion et la préférence de marque restent l’apanage de la TV ». En revanche, dans le cadre d’une communication ROIste, le digital est le meilleur canal pour affiner et intensifier la relation avec le consommateur. Il remarque cependant que si le débat n’est posé qu’entre ces deux objectifs de communication (ROI vs branding), on ne couvre pas l’ensemble de la une vision globale des enjeux des marques. En effet, un troisième mode de communication devient de plus en plus important : la conversation. Le problème à résoudre devient dès lors de trouver la cohérence entre communication de marque, toujours plus bienveillante et utile socialement, et une communication interpersonnelle qui passera par la conversation. La grande distribution spécialisée, par exemple, travaille depuis longtemps sur des communautés de marque propres. « Aujourd’hui les internautes français font confiance à 75% à leurs pairs sur le digital et seulement à 25% aux marques. Nous devons donc lâcher prise et nous dire que demain, ce ne seront plus les publicitaires qui parleront de marques mais des tiers ». La Caisse d’Épargne pour sa part a lancé sa communauté [1] en soft launch et déjà plus de 5 000 personnes sont venues sur le site et échangent dans des conversations profondes sur l’argent. La Caisse d’Épargne travaille cette posture plus en CRM qu’en conquête. En 2022, il imagine que la Caisse d’Épargne, qui aura 200 ans l’an prochain, continuera à développer, y compris via les nouveaux outils, une communication émotionnelle, bienveillante et portée sur l’humain. Data, « adressabilité » et contexte : les pierres angulaires de FTP Marianne Siproudhis insiste quant à elle sur la complémentarité entre médias digitaux et médias de masse. La data permet aujourd’hui de mieux connaître les utilisateurs et les publics afin de leur offrir une proposition plus pertinente, ce qui entraîne une reprise de valeur de la publicité. « Lorsqu’on regarde la publicité TV « addressée », les initiatives qui ont réussi à l’étranger – Etats-Unis, Royaume-Uni et Australie – croisent la géolocalisation et le ciblage ». France Télévisions, via les antennes de France 3 est déjà capable d’offrir un
ciblage géolocalisé sur ses 24 régions sans attendre une possible évolution de l’article 13 du décret de 1992 [2]. La régie vient d’annoncer le lancement d’Adressable.TV [3], son offre de publicité différenciée associée au digital et enrichie par la Data recueillie au sein de sa DMP. Les annonceurs peuvent ainsi proposer des créations différentes selon la zone géographique (jusqu’à 116 niveaux) et la cible. Et cette personnalisation prend en compte le temps réel – Real-Time Advertising – en fonction des données externes, par exemple météo. La data étant un élément primordial, la toute nouvelle plateforme vidéo de France Télévisions, France.tv, intègre le logging pour visionner les vidéos. France Télévisions a pour ambition de disposer sous un an de 15 millions de profils pour venir enrichir la granularité du ciblage publicitaire. Pour Marianne Siproudhis, « la data est partout et pas seulement chez les opérateurs ». D’ailleurs, la régie du groupe audiovisuel public compte à l’heure actuelle 100 millions de cookies gérés par sa DMP lancée il y a 18 mois. Marianne Siproudhis indique que la richesse du média c’est tout d’abord son contenu, source de data et qui garantit le contexte. Pour qu’une communication soit concernante, il faut replacer le contexte, le contenu et sa valeur. Même si elle reconnait qu’il est difficile de se projeter à 5 ans, elle souhaite que ces prochaines années permette à France Télévisions Publicité de comprendre plus profondément la bonne utilisation des contenus dans un objectif de Brand Safety tout en restant agile et prêt à évoluer avec les usages. La data doit nourrir la créativité pour susciter et nourrir l’intérêt Concernant la création et les effets du ciblage sur celle-ci, Olivier Vigneaux indique que les agences sont face à un vrai dilemme entre le message universel qu’est censée développer la publicité de masse et la vertu de la data qui n’est plus à démontrer. En effet, dans l’automobile par exemple, on observe sur les phases finales de process d’achat, un taux de conversion 4 fois plus important lorsque la communication est personnalisée. Le métier de la publicité reste la création de désir. Même dans le CRM, on voit que la sensibilité aux messages baisse dès lors que la marque arrête de surprendre. Tout le sujet est donc d’utiliser la data pour sa pertinence mais en gardant la création pour maintenir l’intérêt. De plus, « avec la communication conversationnelle, les marques disposent à présent d’un formidable terrain de jeu », mais qui ne peut fonctionner que si elles agissent avec leur personnalité propre. Et cette personnalité de marque est un sujet de créativité. Oliver Vigneaux précise que pour lui la question est de réussir à travailler sur une grande granularité sans se noyer. En réalité, les messages s’articulent autour de 4/5 scenarii créatifs sur lesquels des modifications de détails viennent apporter la personnalisation. C’est ainsi que les agences parviennent à contenir les coûts de production. Concernant les systèmes de création automatisés, BETC étudie ces solutions et pense à leur utilisation, très certainement en « bas de parcours » qui est la phase nécessitant le message le plus spécifique. Olivier vigneaux indique que l’intérêt pour les marques à cultiver elles-aussi leurs propres data n’est plus à démontrer. L’enjeu est à présent la manière de l’exploiter, dans un cadre rassurant pour les consommateurs soient conscients, informés de l’utilisation de leurs données. « Sans cela, on ne peut pas créer de valeur ». Les data du Figaro permettent de mener des campagnes individualisées at scale Alexis Marcombe considère le digital comme un média de masse. En effet, la capacité
d’individualisation des messages, mais aussi « le bon usage de la data ne peut se faire que sur de la puissance et du volume », mais également intégrer de la récurrence de contacts. Avec ses 13 sites et ses 500 journalistes, le Figaro garantit une production de contenus forte et diversifiée, mais également une base d’utilisateurs de 24 millions de profils CRM, identifiés via logs, mails et cookies, digne selon Alexis Marcombe des bases des opérateurs telco. Concernant les messages, il différencie la personnalisation de l’individualisation. La première va permettre de toucher « at scale » une cible prédéfinie avec des messages et des formats différents (native advertising, mails, bannières…). La seconde va intégrer des éléments en temps réel ainsi qu’une granularité de ciblage encore plus forte. L’enjeu reste de consolider les masses de data en provenance, comme c’est le cas au Figaro, de sources très différentes (Le Figaro, Viadeo, Copains d’avant, CCM Benchmark…). Ainsi dans le cas du groupe, ce sont 60 personnes qui travaillent à réconcilier la donnée. Alexis Marcombe précise que la donnée provenant des médias a aussi une forte valeur d’insight, donnant de l’information globale sur les populations, et pouvant ainsi servir aux marques pour conquérir de nouveaux clients. Il souhaite « plus de transparence des marchés publicitaires, notamment vis-à-vis des GAFA, pour que chacun des acteurs soit sur un pied d’égalité ». [1] La Communauté by la Caisse d’Epargne : https://www.communaute.caisse-epargne.fr/ [2] Relatif à l’interdiction du décrochage publicitaire qui ne s’applique pas aux « éditeurs de services qui comptent au nombre de leurs obligations la programmation d’émissions à caractère régional, pour cette programmation », c’est-à-dire France 3. [3] https://www.francetvpub.fr/actualite/francetv-publicite-lance-premiere-offre-adressee-tv-ge olocalisee-digital/ Banques traditionnelles, banques en ligne, neo banques… Quelles performances digitales à l’heure du lancement d’Orange Bank ? Dominique Mary, Co-fondateur de D-Rating, agence de notation digitale, présente les résultats de son étude sur les performances digitales des banques de détail en France. D-Rating L’impact de l’intégration du digital comme facteur de performance clé des entreprises n’est plus à démontrer. En effet, les sociétés qui ont su opérer une transformation digitale profonde ces dernières années ont vu leur valeur en bourse s’apprécier fortement. C’est le
cas par exemple de Domino’s Pizza, dont l’action a été multipliée par 20 sur les sept dernières années, années où la société a opéré une transformation digitale profonde. Dans ce contexte, D-Rating, est une agence de notation qui évalue la performance digitale des entreprises afin de fournir au marché un référentiel partagé par l’ensemble des acteurs mais aussi un outil opérationnel pour juger de la transformation digitale des entreprises et permettre une meilleure allocation des ressources. L’agence, créée en janvier 2017, développe un système de notation qui prend en compte 4 grands domaines de la transformation digitale, tant internes à l’entreprise, « Leadership et culture digitale » et « Pratiques et outils », qu’externes, « Empreinte digitale » et « Expérience client ». L’ensemble du système se construira par modules avec pour objectif une finalisation complète avant la fin 2017. Le premier module, « Empreintes digitale », est à présent opérationnel, le second, « Expérience client », sera finalisé avant l’été. Les deux autres devraient voir le jour au cours du second semestre. Aujourd’hui D-Rating publie les résultats d’une étude où la société a appliqué sa première « brique » (Empreinte digitale) aux banques de détails en France. La méthodologie Afin de pouvoir évaluer l’empreinte digitale des marques, D-Rating a mis au point un système basé sur les trois principaux secteurs de la présence digitale des entreprises (Web, Apps et Social Media) et prenant en compte des notions business, le nombre de clients par exemple, afin de relativiser les notes par rapport au business des entreprises observées. Ainsi, pour chaque marque étudiée D-Rating va mesurer plus de 160 critères pour obtenir un indice par secteur de présence. L’étude a porté sur 22 banques réparties en 3 catégories : 12 banques traditionnelles : Crédite Agricole, Caisse d’Epargne, Banque Populaire, La Banque Postale, Société Générale, BNP Paribas, Crédit Mutuel, LCL, CIC, HSBC, Crédit Mutuel Arkéa, Crédit du Nord. 7 banques en lignes et neo-banques : Boursorama, ING Direct, Hello Bank !, B For Bank, Monabanq, Fortuneo, Compte Nickel 3 acteurs digitaux européens : N26, Fidor, mBank Au total, l’étude comptabilise plus de 35 000 points de données collectés. Des banques en ligne qui n’ont pas réussi la « rupture » Résultats globaux. La mise en perspective des notes obtenues par les acteurs selon deux axes, web et nouveaux territoires digitaux (apps et social media) montre clairement une plus grande performance des banques traditionnelles sur les nouveaux territoires. Ainsi, les
banques en lignede première génération, n’ont non seulement pas réussi à conserver leur longueur d’avance sur le Web, mais sont également dépassées sur les applications mobiles et sur les réseaux sociaux.. Positionnement des banques selon leurs performances web et Nouveaux medias (Source D-Rating) Mobile et Apps. Alors que 1/3 du trafic web des banques provient des appareil mobiles, encore 16% des sites de banques ne sont pas adaptés au mobile (« responsive »). Concernant les notes sur les stores d’applications, la moyenne française est en dessous de 3 sur 5. Dans ce domaine, les banques traditionnelles sont significativement plus performantes que les banques en ligne de première génération. Réseaux Sociaux. L’analyse des performances sur les réseaux sociaux permet de dégager deux stratégies différenciées selon les acteurs. D’une part une utilisation « communautaire » qui va générer de hauts niveaux d’engagements. D’autre part, une utilisation Drive To Web ou les réseaux vont être avant tout utilisés pour ramener le trafic vers les environnements propriétaires des banques. Stratégies réseaux sociaux des banques (Source D-Rating) SnapChat lance ad manager pour capter la « longue traîne » Alors que Facebook a annoncé 5 millions d’annonceurs sur sa plateforme dont la grande majorité sont des TPE/PME, pour un résultat en hausse de 49%, Snapchat s’ouvre enfin à ce marché en lançant son ad Manager en Juin. Une interface largement inspirée de Facebook Même si dans un premier temps, les geofilters et autres lenses ne seront pas disponibles sur la plateforme, celle-ci propose déjà 5 formats publicitaires afin de couvrir un maximum d’objectifs de marque : de la campagne de notoriété au téléchargement d’application. Deux autres interfaces, l’une spécifique au mobile et l’autre « business » devrait accompagner la sortie de l’Ad Manager Web. L’interface semble complète et permet de configurer ses campagnes, suivre les dépenses et monitorer les résultats. Les annonceurs pourront accéder à toutes les options de ciblages
offertes par le réseau[1], notamment le re-targeting et les enchères sur objectifs (goal- based bidding) grâce auxquelles ils peuvent toucher les segments de leur cible les plus réceptives aux messages publicitaires, déterminés en fonction de leurs usage sur le réseau, par exemple ceux dont le taux de « swipe » est élevé. La publicité est bien perçue sur le réseau Une étude réalisée par l’IFOP pour le compte de MakeMeReach, partenaire publicitaire de SnapChat en France, met en évidence que 55% des utilisateurs de SnapChat se souviennent avoir vu une publicité sur le réseau, que 61% d’entre eux ne zappent pas les publicités en « swipant », mais surtout qu’ils sont 56% à aimer découvrir de nouvelles marques sur SnapChat et plus de 71% à affirmer que le réseau peut influencer leur désir d’acquérir un produit.[2] Préparer l’accueil de la première publication des résultats depuis l’introduction en bourse L’annonce de la prochaine sortie de l’ad manager s’accompagne de plusieurs évolutions fonctionnelles du réseau : Snaps sans limite de temps, pinceau emoji ou encore vidéos en boucle… Dans un contexte où SnapChat a été fortement concurrencé par Facebook durant les derniers mois, ces annonces en cascade précèdent de quelques jours la publication des premiers résultats de Snap.inc depuis son introduction en bourse qui aura lieu le 10 mai prochain. Rappelons que l’introduction des Stories, fonctionnalités similaires à SnapChat, par Facebook avait fait perdre plus d’un milliard de dollars à sa capitalisation[3]. [1] http://marketingland.com/snapchat-rolls-self-serve-platform-vertical-video-ads-213501 [2] http://www.blogdumoderateur.com/etude-perception-publicite-snapchat/ [3] http://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2017/03/28/32001-20170328ARTFIG00309-snapch at-perd-1-milliard-de-dollars-en-bourse-apres-une-nouvelle-copie-de-facebook.php Xbox Game Pass : la tentation du jeu vidéo par abonnement Microsoft s’apprête à lancer sa première offre de jeux vidéo par abonnement doté d’un catalogue de plusieurs centaines de titres. Néanmoins, les ambitions de Microsoft ne s’arrêtent pas là et le groupe espère étoffer son offre pour devenir le « Netflix du jeu vidéo ». Xbox Game Pass : le jeu vidéo par abonnement Microsoft vient de cloturer une troisième phase de bêta-test de son futur service Xbox
Game Pass auprès d’utilisateurs triés sur le volet et a annoncé que le service devrait sortir très prochainement, soit probablement avant la fin du printemps, sur 27 marchés dont la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou encore l’Australie. Annoncée depuis à peine deux mois, cette offre de jeu vidéo par abonnement destinée aux possesseurs de console Xbox One s’est progressivement dévoilée. Le Xbox Game Pass sera une application exclusive à la Xbox One qui permettra d’accéder de façon illimitée à plus d’une centaine de jeux pour 9,99€ par mois. Le service ne sera pas un service de streaming mais permettra de télécharger les jeux et de les installer en local pour une utilisation directe sur la console. Un temps envisagé comme un service de cloud-gaming[1], Microsoft a préféré opter pour le téléchargement afin de garantir une qualité de jeu optimale à tous les utilisateurs y compris ceux ne bénéficiant pas d’une bonne qualité de connexion. Toujours dans cette optique, le service garantira une possibilité de jeu hors connexion pendant 30 jours. Concrètement, une fois un ou plusieurs jeux du catalogue installés sur la console, ils resteront accessibles même sans connexion à Internet pendant 30 jours. Ensuite, une connexion sera nécessaire pour vérifier que l’abonnement est toujours valide. Le catalogue sera composé de titres Microsoft Studios mais également d’éditeurs tiers. Si Microsoft dispose d’un catalogue de titres propriétaires attractifs, il ne justifie pas seul un abonnement. Un des principaux enjeux pour le géant de Redmond a donc été de convaincre d’autres créateurs de s’associer à son projet. Si la liste exhaustive des partenaires n’a toujours pas été dévoilée, Microsoft a déjà présenté quelques partenaires importants comme 2K, Warner Bros. Interactive ou Namco. Néanmoins pour l’instant, aucun titre des plus grands éditeurs mondiaux (Activision, Electronic Arts, Ubisoft) n’a été annoncé. En outre, le catalogue sera en grande partie composée de portage de titres sortis sur Xbox 360 et donc de jeux datant de plusieurs années. Pour les titres Xbox One, il ne devrait pas y avoir de nouveautés mais seulement des jeux sortis depuis au moins quelques mois. Le catalogue de Xbox Game Pass devrait donc être un catalogue de stock. Mais il est appellé à évoluer et de nouveaux titres seront ajoutés chaque mois. Enfin, malgré une territorialisation des droits moins marquée pour les jeux vidéo que pour les films et les séries, Microsoft a pourtant annoncé qu’il pourrait y avoir des variations du catalogue entre les différents pays. Ce service bien que novateur ne sera pas la première expérience de jeu par abonnement. En effet, Sony propose déjà le Playstation Now qui offre pour 99,99$ par an un service de cloud-gaming avec un catalogue de 350 jeux anciens. Mais Xbox Game Pass a des atouts supplémentaires avec la possibilité de téléchargement et des titres a priori plus récents. Surtout, Microsoft a de plus grands ambitions pour son service à long-terme et espère proposer une gamme de contenus et services très innovants inspirés des nouveaux modèles de distribution du marché. « Video Game as a service » Le marché du jeu vidéo a profondément changé au cours des cinq dernières années. La généralisation du très-haut débit a bouleversé profondément son modèle économique avec l’émergence du concept de « game as a service ». Ce modèle désigne en fait une nouvelle façon de créer et de distribuer un jeu sur un temps plus long après la sortie initiale du
produit. Historiquement, du fait de l’absence de connexion à Internet des terminaux, un jeu vidéo n’avait qu’une seule et unique version, dite « Vanilla », distribué sous forme de support physique en magasin. Cette version n’évoluait jamais et un joueur achetant le jeu le jour de sa sortie ou des années plus tard obtenait toujours la même version[2]. Aujourd’hui, grâce à la connexion systématique des terminaux, un jeu peut proposer en téléchargement de très nombreux contenus additionnels parfois jusqu’à plusieurs années après sa sortie initiale[3]. La grande majorité de ces contenus sont payants et sont progressivement devenus des éléments fondamentaux du modèle économique de l’industrie du jeu vidéo. Pour les grands éditeurs, c’est un moyen d’engager le joueur a plus long-terme et d’amortir sur plusieurs mois ou années des coûts de développement de plus en plus élevés[4]. Le processus s’est même systématisé au point qu’aujourd’hui un nombre croissant de jeux sortent sur un modèle de distribution en « pass d’accès» c’est-à-dire une forme d’abonnement dissimulé qui permet d’accéder à un nombre croissant de contenus additionnels. En général, dès le lancement initial d’un important jeu, en particulier quand il a une dimension multijoueur, l’éditeur annonce un calendrier de sortie pour des contenus additionnels et la possibilité de souscrire une option payante pour les recevoir automatiquement. Un jeu comme Battlefield 1 (Electronic Arts) par exemple proposait lors de son lancement en octobre 2016 un « season pass » qui contenait le jeu original et l’accès à quatre extensions supplémentaires au cours de l’année 2017. Les revenus générés par cette distribution en « pass d’accès annuel »sont loin d’être anondins puisque toujours dans le cas de Battlefield 1 le jeu original est vendu sur console au tarif de 70 euros et le « season pass » au prix de 50 euros pour l’ensemble des extensions soit 15 euros par extension. Il ne s’agit pas d’un cas particuliers mais d’un schéma de distribution[5] qui se généralise pour tous les grands jeux à vocation multijoueurs. Un jeu s’achète donc désormais également pour sa capacité à offrir une expérience enrichie sur la durée, il s’apparente ainsi de plus en plus à un service. Ce modèle peut se révéler très efficace. Il permet également d’atténuer le risque pour l’éditeur puisqu’un mauvais lancement de la version originale peut être en quelque sorte effacé sur le long-terme grâce aux extensions. Le jeu Rainbow 6 Siege par exemple attirait seulement 10 000 joueurs par jour sur Steam lors de son lancement en mai 2015, puis plus de 25 000 en mai 2016 et enfin près de 45 000 en mai 2017[6]. Cette croissance inhabituelle dans le domaine du jeu vidéo peut s’expliquer par le soin apporté par son éditeur Ubisoft à l’enrichissement des versions avec près de 40 contenus additionnels en deux ans diponibles via des pass annuels[7]. Néanmoins, l’augmentation de la durée de vie d’un jeu entraîne des coûts importants[8] qui ne peuvent être supportés par des éditeurs de plus petite taille. Pour Phil Specter, directeur au sein de Microsoft de la marque XBox et de Microsoft Studios, il s’agit justement d’un des axes de développement majeur pour son groupe : permetre à l’ensemble des créateurs de penser leurs jeux comme un service. En s’appuyant sur le cloud Microsoft Azure, la branche jeu vidéo de Microsoft pense pouvoir proposer aux petits studios des capacités serveurs très modulables pour acceuillir leurs joueurs. Avec ces nouveaux outils, un nombre croissant de développeurs devraient en théorie proposer des jeux plus riches et dotés d’un plus grand nombre de fonctionnalités. Ces jeux pourraient ensuite être intégrés au Xbox Game Pass qui grâce au modèle par abonnement est capable
de garantir une stabilité des revenus aux développeur. Si ce projet devait voir le jour, il s’agirait d’un enrichissement non négligeable pour Microsoft qui pourrait proposer dans le cadre de son abonnement une gamme de jeux mis a jour constament[9]. La sérialisation du jeu : vers un Netflix du jeu vidéo Au-delà des jeux multijoueurs, le modèle de la distribution par épisode touche désormais également les jeux plus narratifs, ou jeux solos[10], qui sont désormais fréquemment « sérialisés » et distribués sour la forme d’épisodes feuilletonants. Certains jeux, comme Hitman ou l’ensemble des titres du développeur Telltale déclinent une même histoire en plusieurs parties dont la distribution est espacée de plusieurs mois. Ce développement en épisode répond à un besoin de l’industrie. En effet, le coût de développement d’un jeu narratif ambitieux peut s’approcher voir dépasser celui d’un jeu multijoueur[11]. Pourtant l’essor du jeu en ligne a conduit les jeux à vocation multijoueurs à capter une part de plus en plus importante des revenus du marché au détriment des jeux narratifs solos[12]. De ce fait, il est de plus en plus hasardeux pour un grand éditeur de créer des jeux narratifs coûteux dont un lancement raté ne pourra que difficilement être rattrapé par les contenus additionnels[13]. Par conséquent, la distribution en épisode visent autant à fidéliser le joueur qu’à rationnaliser le développement en permettant de financer le développement d’épisodes supplémentaires grâce aux revenus générés par un premier opus. C’est un changement de modèle économique, déjà esquissé par le système de l’ « early access »[14], qui permet d’atténuer le risque tout en permettant des histoires plus complexes. Phil Spencer a justement évoqué cette « sérialisation » comme un modèle possible de développement du Xbox Game Pass. Il a ainsi précisé que le modèle par abonnement consistuait un moyen de diminuer le risque. Avec un flux de revenus réguliers assuré par les abonnements, Microsoft serait capable de prendre plus de risques pour développer des jeux narratifs ambitieux. Outre un catalogue de jeux anciens le service de Microsoft pourait donc bénéficier de nouveautés sous forme de « créations originales » distribuées par épisodes. L’analogie avec Netflix n’est pas anodine : le service de SVoD a directement été mentionné comme une source d’inspiration par Phil Specter. C’est donc bien le modèle par abonnement qui, comme dans le cas de Netflix ou HBO permet de créer les contenus les plus attractifs. L’ambition de Microsoft de créer le « Netflix » du jeu vidéo passe néanmoins par le renforcement des équipes de Microsoft Studios et une augementation déjà observable des investissements dans la création. [1] Système où le jeu n’est pas installé localement mais fonctionne sur des serveurs distants, le flux vidéo du jeu étant diffusé en streaming vers la console de l’utilisateur. [2] Les jeux vidéo PC ont cependant bénéficié précocement de mises à jour grâce à la plus grande souplesse permise par ce support. Avant même la démocratisation des connexions Internet, ces mises à jour étaient souvent distribuées par les magazines spécialisés mais elles visaient essentiellement à corriger des bugs de la version vanilla et non pas à proposer du contenu additionnel. Les jeux PC ont également bénéficié avant les consoles des « add-ons » payants, ancêtres des contenus additionnels et DLC, mais de façon beaucoup moins systématique qu’aujourd’hui.
[3] Le jeu GTA V par exemple continue à proposer des mises à jour très régulières près de 4 ans après la sortie du jeu initial [4] Pour les grands éditeurs comme Ubisoft ou Activision par exemple, le coût de développement d’un jeu peut atteindre plusieurs dizaines ou même centaines de millions d’euros, auquel il faut ajouter d’important frais de marketing. [5] Des titres comme The Division, Rainbow 6 Siege ou encore Destiny proposent même un nombre de contenus additionnels beaucoup plus important que dans le cas de Battlefield 1. [6] Données Steam Spy [7] Nommé dans ce cas précis « Year pass » est proposé à 30 euros [8] Du fait des équipes mobilisées pour le développement mais aussi du maintien de serveurs capables d’accueillir un grand nombre de joueurs bien après le lancement. En outre, le coût fixe de l’équipement en serveurs de jeu est très élevé et nécessite une communauté de joueurs nombreux pour être rentabilisé ce qui constitue donc souvent un risque trop important pour la majorité des acteurs. [9] Attention, Microsoft propose déjà un service de jeux multi-joueurs payant, le Xbox Live Gold, qui permet l’accès au jeu en ligne depuis une Xbox mais ne propose pas de catalogue. Il faut acheter les jeux séparément. [10] Jeux qui par opposition aux jeux multi-joueurs sont destinés à être joué seul contre l’intelligence artificiel, ils proposent en général une véritable histoire contrairement au multijoueur qui repose essentiellement sur la compétition. [11] On peut citer l’exemple de GTA V, jeu originellement solo, dont le coût de développement est estimé à 250 millions €. Le jeu s’est ouvert progressivement au mode multijoueur et est devenu un des titres les plus vendus de tous les temps, rentabilisant largement son développement. [12] Un jeu narratif étant basé sur une histoire linéaire, le joueur a peu d’intérêt à y rejouer une fois celle-ci terminée. Leur durée de vie est donc inférieure à celle des jeux multi- joueurs dont le système repose sur la compétition et la répétition. [13] En 2016 par exemple les échecs des jeux à vocation solo Watch Dogs2, Dishonored 2 et Titanfall 2 ont lourdement impacté les résultats de leurs éditeurs et relancé le débat sur la soutenabilité des jeux narratifs ambitieux. [14] Système mis en place sur Steam puis implémenté par Microsoft qui permet d’acheter un jeu avant que son développement ne soit achevé. Le joueur peut accéder à une version incomplète du jeu mais il est assuré de recevoir des mises à jour au cours du développement.
Sky : un début d’année sur tous les fronts L’opérateur britannique vient d’annoncer un résultat opérationnel en baisse de 11% sur les neuf premiers mois de son exercice 2016/17, plombé par l’inflation des droits de diffusion de la Premier League et ce, malgré une progression de son nombre d’abonnés et de ses revenus. Un léger accroc qui n’empêche pas le groupe Sky de multiplier les investissements et les partenariats d’envergure pour poursuivre sa stratégie de diversification : production audiovisuelle, publicité ciblée, téléphonie mobile… Résultats Q3 16/17 : un bénéfice opérationnel impacté par la flambée des droits sportifs Sur les neuf premiers mois de son exercice achevés au 31 mars, Sky affiche un bénéfice opérationnel en recul de 11% à taux de change constants à 1,013 milliard de livres (1,191 Md€). Ce repli est principalement lié à l’augmentation des coûts d’acquisition des droits de diffusion de la Premier League. Après s’être disputés les droits du championnat de football anglais en 2012 en déboursant plus de 3 milliards de livres, BT et Sky ont en effet fait s’envoler les droits de la PL pour la période 2016-19 avec un montant record de 5,1 milliards de livres (6 Mds€ ; +70% vs. 2013-16). Une explosion des droits qui se traduit pour l’opérateur historique par le versement de 600 millions de livres (705 M€) supplémentaires chaque saison. Dans l’ensemble, les coûts du groupe britannique sont en hausse de 8% sur les neufs premiers de l’exercice à 8,6 milliards de livres (10,2 Mds€). Hors Premier League ils progressent de 2% seulement. L’impact de la hausse des coûts sur le bénéfice opérationnel est toutefois partiellement compensé par la croissance de 5% des revenus entre le 1er juillet 2016 et le 31 mars 2017, à 9,6 milliards de livres (11,3 M€). Une progression du chiffre d’affaires due à une nouvelle hausse du parc d’abonnés avec le recrutement de 106 000 nouveaux clients sur le seul troisième trimestre et de 769 000 clients sur un an. Tous territoires confondus, le parc d’abonnés du groupe britannique s’établit désormais à 22,4 millions de clients. Dans le détail, le chiffre d’affaires progresse de 4% au Royaume-Uni et en Irlande, de 10% en Allemagne et en Autriche (Sky Deutschland), et de 7% en Italie (Sky Italia). A l’exception de la zone Royaume-Uni/Irlande – impactée donc par l’explosion des coûts des droits sportifs et confrontée à un nouveau repli du marché publicitaire – l’ensemble des marchés où est implanté le groupe affichent un bénéfice opérationnel en hausse au 31 mars. Résultats financiers du groupe Sky sur les 9 premiers mois de son exercice 2016-17 Source : Sky Un accord HBO-Sky pour contrer Netflix et Amazon dans la production de séries internationales Parallèlement à la publication de ses derniers résultats financiers, le groupe Sky a annoncé
la signature d’un accord de coproduction de fiction d’un montant de 250 millions de dollars (230 M€) avec l’américain HBO (Time Warner). Portant sur plusieurs années, le partenariat prévoit le développement de deux projets en commun par an, dont l’arrivée d’une première série attendue pour 2018. Les projets seront sélectionnés par des dirigeants des deux diffuseurs. Des premiers développements sont déjà en cours. L’objectif de ce partenariat est de faire émerger des productions de « classe mondiale » en laissant libre cours à l’imagination des créateurs américains et européens, et en offrant à ces derniers l’opportunité de voir leurs projets diffusés par deux des leaders mondiaux du secteur. Les deux groupes y gagneront quant à eux l’exclusivité de distribution sur ces nouvelles séries. Ce rapprochement intervient dans un contexte international de plus en plus concurrentiel, marqué par la montée en puissance des acteurs du web (notamment aux États-Unis et au Royaume-Uni, marchés plus matures, où Netflix et Amazon font désormais partie intégrante du paysage audiovisuel). Les deux acteurs consentent chaque année à des investissements toujours plus massifs en matière de contenus, notamment dans la production originale, véritable produit d’appel de leurs services de vidéo à la demande. Le leader mondial de la SVoD envisagerait ainsi de dépenser 6 milliards de dollars dans ses programmes en 2017, le géant du e-commerce 4,5 Mds$. Des montants qui placent les deux acteurs au-dessus de tous les grands networks américains. Estimation des budgets annuels dédiés aux programmes vidéo / en milliards de dollars Source : IHS Markit et JP Morgan A noter que HBO et Sky ont déjà collaboré sur la série The Young Pope, aux côtés de Canal Plus. Les deux groupes sont également liés dans un contrat offrant l’exclusivité des programmes de la chaîne payante américaine à l’opérateur britannique en Allemagne, Autriche, Irlande, Italie et au Royaume-Uni jusqu’en 2020. Sky AdSmart : un accord majeur en vue avec Virgin Media Sky AdSmart, la plate-forme de publicité TV personnalisée de l’opérateur britannique, est la référence outre-Manche avec un potentiel de plus de 7 millions de foyers adressables grâce à la box Sky Plus HD. Commercialisé depuis début 2014 par Sky Media, la régie du groupe Sky, Sky AdSmart est un outil de programmation et d’optimisation publicitaire qui permet d’adapter un spot aux différents profils d’abonnés visionnant un même programme. Depuis ses débuts, AdSmart a permis la réalisation de plus de 6 000 campagnes pour le compte de près de 1 000 annonceurs. Les cibles peuvent être définies en choisissant parmi plus de 1 200 critères. En dépit de marchés publicitaires moroses en Italie et au Royaume- Uni, Sky indique dans la publication officielle de ses derniers résultats que la technologie AdSmart a participé à la croissance de 4% de ses revenus publicitaires au global à 613 millions de livres (720 M€) sur les neuf premiers mois de son exercice 2016/17. La semaine dernière, The Telegraph rapportait que Sky et l’un de ses principaux rivaux outre-Manche, le câbloopérateur Virgin Media, étaient en discussions avancées pour intégrer AdSmart. S’il venait à se concrétiser, l’accord permettrait à Sky de toucher 3,7 millions de foyers britanniques supplémentaires, portant son total de foyers adressables à
plus de 10 millions. En contrepartie, Virgin Media percevrait un pourcentage du chiffre d’affaires des publicités distribuées. La commercialisation des espaces publicitaires resterait gérée par Sky Media qui vise 1 milliard de livres de revenus d’ici 2020 (contre moins de 800 M£ en 2016). Cet accord pourrait marquer une nouvelle étape dans le développement de la solution AdSmart, Sky ayant déjà noué plusieurs partenariats importants ces derniers mois, notamment avec Viacom (Channel 5, Comedy Central, MTV…), qui est devenu le premier diffuseur de premier plan à s’appuyer sur la technologie de Sky Media. Si le partenariat entre Sky et Virgin Media ne devrait pas être exclusif – l’américain ayant ses propres ambitions dans le domaine de la publicité ciblée, sa box dernière génération permettant elle aussi d’adresser des spots personnalisés – il doit permettre au groupe britannique de franchir un nouveau palier pour mieux rivaliser avec Google et Facebook, dont les revenus publicitaires ont connu une croissance vertigineuse ces dernières années grâce à leur capacité à cibler précisément leurs utilisateurs en ligne. Le programmatique direct a le vent en poupe Selon eMarketer, les annonceurs privilégient les achats en programmatique direct, au détriment du RTB, en raison des garanties de transparence des transactions et des impressions au sein d’environnements contextuels sûrs. Une bonne nouvelle pour les médias historiques, qui ont lancé pour la plupart des adex privés. Sécurisation des investissements et de la brand safety Alors que les revenus publicitaires du digital ne cessent de progresser – plus de 50 milliards de dollars sur les 9 premiers mois de l’année dernière aux Etats-Unis et 3,45 milliards d’euros sur l’année 2016 en France où Internet est devenu le 1er support – de plus en plus d’annonceurs sont préoccupés par les questions de fraude et de brand safety. Celles-ci auraient coûté 7,4 milliards de dollars aux marques US en 2016 selon Forrester. Et la dernière polémique avec YouTube[1] illustre leurs réticences, vis-à-vis notamment du Real-Time Bidding, considéré comme la source des principales dérives liées à l’opacité et la perte de contrôle des transactions. Si le principe d’automatisation des process achats et de ciblage via la data n’est absolument pas remis en question, il apparaît que le programmatique direct, ou garanti, profite de cette remise en question du RTB. Ainsi, selon eMarketer, la part du programmatique direct devrait représenter 56% des achats online contre 44% pour le RTB. Il s’agit d’un gain de 3pts et de la 3ème année consécutive de hausse de ce mode de commercialisation. Dans ce cadre, tout ou partie des inventaires sont vendus au préalable via des deals privés entre la régie et les acheteurs (agences et annonceurs), au sein de
places de marché privées. Les régies ouvrent l’accès à l’API de leur adserveur permettant de réserver les espaces, accéder aux éléments de contexte éditorial et aux segments de cibles, de manière automatisée. « Les configurations privées portent une grande part de la dynamique des adexchanges, car elles donnent aux acheteurs et vendeurs un plus grand contrôle » explique Lauren Fisher, analyste chez eMarketer. Un rééquilibrage des forces entre offre et demande ? Ce mouvement au profit du programmatique direct pourrait être une bonne nouvelle pour les éditeurs de contenus. Car il opère un rééquilibrage entre l’offre et la demande. Cette dernière était largement favorisée sur le digital, à l’image du fonctionnement historique du marché publicitaire US. Les annonceurs et leurs conseils sont traditionnellement au cœur de la prise de décision, les médias s’adaptent à leurs attentes. Ce rapport de force est différent sur d’autres marchés, au premier titre desquels la France. En effet, dans l’écosystème pub. hexagonal habituellement plus centré sur l’offre, les éditeurs ont longtemps été plus proactifs, initiateurs des changements. Cependant, le programmatique, en particulier le RTB, avait rebattu les cartes au profit des acheteurs. Retour de balancier, « les marques investissent sur des places de marché privées dans l’objectif de savoir à qui elles achètent et ce qu’elles achètent, pour toucher leurs meilleurs clients dans des environnements contextuels de qualité et sûrs » indique Julia Welch, Vice-présidente de Mediamath. Ainsi, les médias historiques ont le plus souvent lancé des places de marché privées, afin de garder le contrôle de la monétisation de leurs inventaires, en particulier les plus premium, de leurs datas, et de limiter autant que possible la multiplication des intermédiaires. Ils bénéficieraient en premier lieu de cette réallocation des investissements programmatiques, et pourraient se créer une petite place face aux géants Google et Facebook. [1] Cf. Flash n°830 du 22/03/2017 : « Google dans la tourmente au Royaume-Uni« . Industrie culturelle : une dématérialisation très inégale selon les marchés Après plusieurs années de recul marquées par l’explosion d’internet et avec elle du piratage, les marchés culturels, dans leur ensemble, ont renoué avec la croissance en 2015. Une embellie confirmée en 2016 avec une deuxième année de hausse consécutive (7,755 Mds € ; +1%). Cette performance, l’industrie culturelle la doit essentiellement au boom de la consommation dématérialisée (2,015 Mds € ; +17% en 2016) qui s’impose progressivement sur les marchés du jeu vidéo, de la musique et de la vidéo, et permet enfin de compenser le recul des ventes de supports physiques (5,740 Mds € ; -4% en 2016).
Entertainment : 10 ans de dématérialisation ! Fin 2016, le numérique représente plus d’un quart du chiffre d’affaires de l’industrie Source : NPA Conseil sur données GfK Jeu Vidéo et Musique sont les deux marchés les plus engagés dans la transformation digitale de leurs ventes. Marché atypique, le Livre conserve quant à lui une structure de chiffre d’affaires solidement axée autour de la vente de biens physiques Source : NPA Conseil sur données GfK Vidéo : une mutation trop lente du marché Le marché de la vidéo a été marqué par une accélération de la décroissance de ses ventes physiques (DVD et Blu-ray) au cours de la dernière décennie. Dans le même temps, les formats dématérialisés (VoD, EST et SVoD) n’ont pas apporté le nouvel élan attendu par l’industrie. Fin 2016, les revenus vidéo passaient pour la première fois sous la barre symbolique du milliard d’euros, en repli de près de 7% par rapport à 2015. Il devient impératif pour le marché de réussir sa transformation digitale et d’atteindre l’équilibre au cumul des deux univers. Le dynamisme retrouvé de la distribution numérique, portée par les modèles de l’achat définitif et de l’abonnement illimité, reste toutefois porteur d’espoir et offre de réelles perspectives de développement au marché. Accélération du déclin des ventes de DVD et Blu-ray En l’espace d’une décennie, le marché physique a été divisé par trois, perdant ainsi près d’un milliard d’euros de recettes. Un déclin qui devrait se poursuivre en 2017 avec la perte attendue de 60 millions d’euros. Dans un tel contexte, il paraît difficile pour le Blu-ray 4K Ultra HD, dernier-né des supports physiques, de tirer son épingle du jeu et de redynamiser un secteur en situation particulièrement délicate. Source : NPA Conseil sur données CNC-GfK Progression du numérique en attendant un véritable décollage En 2016, SVoD et EST ont confirmé leur essor en affichant pour la deuxième année consécutive une croissance à deux chiffres. La SVoD représente désormais un tiers des recettes digitales. Porté par un net accroissement de l’offre ces deux dernières années (Netflix, SFR Play, Amazon Prime…), le modèle de l’accès en illimité séduit de plus en plus de Français. Identifié par les ayants-droit comme l’un des principaux relais de croissance pour compenser le recul des ventes physiques, l’EST peut lui aussi s’appuyer sur un
élargissement de l’offre de services qui a permis de favoriser l’accès des œuvres à l’achat pour les consommateurs. Source : NPA Conseil sur données CNC-GfK Une mutation lente et difficile La progression des recettes issues des modes de distribution dématérialisés s’avère encore insuffisante pour compenser le déclin continu des ventes physiques. Malgré plus d’une décennie de reculs successifs, le marché vidéo français demeure en effet très dépendant des ventes de DVD et Blu-ray (65% du CA vidéo en 2016). Au cumul des deux univers, le marché vidéo s’établit désormais en dessous du milliard d’euros de recettes. Le prolongement des dynamiques actuelles reste toutefois porteur d’espoir. Le développement des revenus numériques devrait permettre de stabiliser l’ensemble du marché vidéo dans les années à venir. A l’horizon 2018, le marché français devrait ainsi basculer pleinement dans l’ère du numérique avec un poids des formats dématérialisés supérieur, pour la première fois, à celui des supports physiques. Source : NPA Conseil sur données CNC-GfK TV payante : une structure singulière du marché français Au moment de relever le défi des nouveaux modes de distribution OTT et des nouvelles formes de consommation délinéarisées, la structure très particulière du marché de la télévision payante en France traduit une forte ambivalence. Le poids sans équivalent ailleurs dans le monde des offres multiplay des distributeurs a permis le développement précoce et structurant de la télévision sur IP. Une particularité qui s’illustre à la fois par la richesse des offres de premier niveau des distributeurs, et par des offres 3P qui intègrent de façon systématique une composante abondante de télévision délinéarisée (à commencer par la télévision de rattrapage). Ces deux caractéristiques ont longtemps freiné la pénétration des offres OTT, mais elles ont nui également au développement du nombre d’abonnés aux offres de tv payante de second niveau et, a fortiori, des options premium. Aujourd’hui, la montée en puissance du très haut débit (près de 16 M de foyers éligibles à fin 2016 d’après l’ARCEP), combinée aux positions très fermes prises par le BEREC sur la neutralité du Net et à l’arrivée en OTT de marques puissantes (Netflix, SFR Sport, beIN Sport…) conduit à ouvrir de plus en plus largement le marché à de nouveaux services audiovisuels distribués sur l’internet ouvert. Alors que pendant dix ans les offres alternatives de télévision délinéarisée, et particulièrement par abonnement, ont pu être freinées par la structure du marché, celle-ci pourrait désormais constituer une opportunité forte pour leur développement.
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