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LE JOURNAL
# 129
FÉVRIER 2022
1,50 € - ISSN 1145-9131
DE L’INSTITUT CURIE
COM PR E N D R E P O U R AG IR CO NTR E LE C A N CE R
ACTUALITÉS
Combattre
Cancers du sein
triple négatifs :
le cancer sur
un traitement
innovant
disponible
tous les fronts grâce
aux associations
ENTRE NOUS
En mars, portez
la jonquille,
de traitements
portez l’espoir !
ÉDITO
L’INSTITUT CURIE, PREMIER CENTRE FRANÇAIS
Pedro Lombardi / Institut Curie
DE LUTTE CONTRE LE CANCER,
associe un Centre de recherche de renommée
internationale et un Ensemble hospitalier
de pointe qui prend en charge tous les cancers,
y compris les plus rares. Fondé en 1909
par Marie Curie, l’Institut Curie rassemble
sur trois sites (Paris, Saint-Cloud et Orsay)
3 700 chercheurs, médecins et soignants
autour de ses trois missions : soins, recherche
et enseignement. Fondation reconnue d’utilité
publique habilitée à recevoir des dons et
des legs, l’Institut Curie peut, grâce La qualité ne doit pas être oubliée !
au soutien de ses donateurs, accélérer
les découvertes et ainsi améliorer les
traitements et la qualité de vie des malades.
Au-delà de l’excellence de notre expertise et de nos
équipements, la démarche qualité est, depuis de
P. 3 nombreuses années, au cœur des procédures que nous
ACTUALITÉS mettons en place à l’Institut Curie. La qualité de l’accueil et
INNOVATION de l’accompagnement, la qualité de la recherche, la qualité
Cancers du sein triple négatifs : de vie au travail, la qualité des réseaux de soins, la qualité
un nouveau traitement disponible des relations que nous entretenons avec nos donateurs…
la qualité fait partie intégrante de nos pratiques, de
P. 6 notre ADN. Elle essaime dans l’ensemble des missions
ACTUALITÉS
de l’Institut Curie, qu’il s’agisse des soins, de la recherche
CANCER DU PANCRÉAS
ou de l’enseignement. Pour répondre aux exigences
Les signaux
qui doivent alerter de nos certifications bien sûr, mais également pour relever
les défis toujours renouvelés de l’excellence. Car, en effet,
P. 7 s’engager dans une démarche qualité, c’est se questionner,
INFO PRATIQUE c’est se donner des objectifs, c’est produire des indicateurs,
Comment parler de son cancer c’est répondre à des évaluations, c’est prendre du recul,
avec son enfant ? c’est analyser, c’est déléguer, c’est renforcer l’accessibilité
de tous aux soins et à la recherche.
P. 8 À l’heure où nous avons les yeux rivés sur les chiffres
DOSSIER (obsession accentuée encore par la pression que fait peser
Combattre le cancer sur tous les fronts la pandémie sur notre système de santé mais plus
grâce aux associations de traitements
largement sur l’ensemble de la société), l’Institut Curie
P. 17 veille, au quotidien, à ne pas oublier que c’est en réalité la
ENTRE NOUS qualité (et non la quantité) qui nous a permis, depuis plus
Octobre Rose 2021 : de 100 ans maintenant, d’améliorer jour après jour notre
tous mobilisés accompagnement auprès de patients devenus partenaires,
contre le cancer du sein ! mais également de promouvoir un environnement
favorable à l’innovation et à la créativité.
P. 19 Malgré le contexte, il reste essentiel, pour nous,
ILS FONT CURIE que la qualité demeure notre objectif majeur !
Irène Buvat, lauréate du prix
Pr Thierry Philip,
Ruban Rose Avenir 2021
président du Directoire de l’Institut Curie
Le Journal de l’Institut Curie Comprendre Pour Agir Contre Le Cancer est édité par l’Institut Curie, 26 rue d’Ulm, 75248 Paris Cedex 05 - journal.curie@curie.fr - www.
curie.fr - Directeur de la publication : Pr Thierry Philip - Rédactrice en chef : Sabine D’Andrea – Ont participé à ce numéro : Sabine D’Andrea, Catherine
Brun, Rémy Fauvel, Émilie Gillet, Catherine Goupillon, Claire Peltier, la direction de la Communication et la direction des Relations donateurs – le sommaire,
les titres, chapôs, intertitres, illustrations et légendes sont de la responsabilité de la rédaction en chef et n’engagent qu’elle – Photos de couverture : Uriel Chantraine -
Abonnement pour 4 numéros/an : 6 € – Création et réalisation : Citizen Press, www.citizen-press.fr – Fabrication : Tc Graphite (Montreuil) – Impression : SIB, ZI de la
Liane, 62205 Boulogne-sur-Mer – Numéro de commission paritaire : 0922H82469 – Dépôt légal du # 129 : février 2022 – Ce numéro a été imprimé à 315 000 exemplaires.
Service Relations Donateurs : 01 56 24 55 66
ACTUALITÉS
CURIE
INNOVATION
Cancers du sein triple négatifs :
un nouveau traitement disponible
Après l’essai clinique concluant coordonné par l’Institut Curie, les femmes atteintes d’un cancer du sein triple
négatif métastatique peuvent bénéficier d’une thérapie innovante, le Trodelvy®. Disponible en France depuis le
1er novembre 2021, elle représente enfin un espoir dans ces cancers particulièrement agressifs.
Les essais cliniques avec les anticorps dro-
gues-conjugués sont nombreux, notamment
à l’Institut Curie. Ainsi, le Trodelvy® est à l’étude
pour des stades plus précoces des cancers du
sein triple négatifs et positifs pour les récep-
teurs hormonaux. D’autres anticorps conju-
gués sont également en cours d’évaluation
dans cette maladie ou dans d’autres types de
cancers (cancers du sein hormonodépen-
dants, de la vessie ou du poumon). Delphine
Loirat de conclure : « Je suis convaincue que
cette nouvelle classe thérapeutique changera
la donne dans les années à venir. »
iStock
LE TRODELVY®
Nom générique : sacituzumab
P
armi les cancers du sein, le triple négatif « Il n’y avait pas eu govitecan.
de résultat aussi
est le moins fréquent mais le plus agres- Description : thérapie ciblée destinée
encourageant depuis
sif, avec une forte propension à métas- de nombreuses années à inhiber la croissance tumorale, la
Uriel Chantraine/Institut Curie
taser. Il représente entre 10 et 15 % des cas de pour ces patientes ! » multiplication des cellules cancéreuses
cancer du sein, soit 9 000 patientes chaque et leur dissémination.
année. Parmi ces patientes, seules quelques- Delphine Loirat, Principe : molécule résultant d’un
oncologue médicale
unes présentant des mutations impliquées à l’Institut Curie et couplage entre un anticorps et une
dans les cancers du sein héréditaires (gènes investigatrice principale chimiothérapie. L’anticorps reconnaît un
BRCA1 et BRCA2) disposaient d’une thérapie de l’étude ASCENT antigène présent dans de nombreuses
ciblée ; mais pour toutes les autres, aucune tumeurs, dont les cancers du sein. Il
option thérapeutique autre que la chimiothé- sein triple négatif au stade avancé et ayant permet d’amener la chimiothérapie au
rapie n’était offerte jusque-là. Le recours au déjà reçu plusieurs lignes de traitement. Elle cœur des cellules tumorales pour les
Trodelvy® (sacituzumab govitecan) constitue a comparé l’effet du Trodelvy® à une chimio- détruire spécifiquement.
donc une avancée majeure. « Avec le double- thérapie standard. Le Trodelvy® appartient à Innovation : premier-né d’une
ment de la survie globale obtenu, il n’y avait pas une nouvelle classe thérapeutique, les anti- nouvelle classe de médicaments pour
eu de résultat aussi positif et encourageant corps conjugués, couplant un anticorps à les cancers du sein triple négatifs, les
depuis de nombreuses années pour ces plusieurs molécules de chimiothérapie, l’anti- anticorps drogues-conjugués.
patientes ! » confirme Delphine Loirat, onco- corps utilisé cible la protéine Trop-2 exprimée Patientes concernées : avec
logue médicale à l’Institut Curie et investigatrice par les cellules tumorales. Ses résultats, une tumeur non résécable ou
principale de l’étude ASCENT. publiés en avril 2021, ont révélé une survie métastatique, ayant déjà reçu
Cette étude clinique internationale de globale qui atteint 12,1 mois avec la nouvelle 2 lignes de traitement ou plus, dont
phase 3, commencée en 2017, a été menée molécule, contre 6,7 mois avec une chimio- l’une au moins au stade avancé.
chez 468 patientes atteintes de cancer du thérapie classique.
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
3
ACTUALITÉS
CURIE
INTERNATIONAL RÉTINOBLASTOME
L’expertise Curie s’exporte Un projet ambitieux
à travers le monde pour préserver la vision
des enfants
L’
Institut
Curie lance
bientôt un
projet de recherche
pluridisciplinaire
sur le rétino
blastome, le cancer
DR
pédiatrique de l’œil
Masterclass de cancérologie au Liban sur le campus de l’ESA Business
le plus fréquent.
School de Beyrouth.
Avec environ
L
« a mission de l’Institut de l’Institut Curie ont également 60 nouveaux
iStock
Curie ne se limite pas rencontré un grand succès auprès cas en France
à la France ou à l’Europe. des professionnels de santé à tous les ans,
Marie Curie s’est engagée Beyrouth. Le Kazakhstan bénéficie le rétinoblastome est un cancer très agressif.
à servir le monde sans aucun but lui aussi depuis peu de l’expertise Il représente 3 à 4 % des cancers pédiatriques.
lucratif », aime à rappeler Curie. Avec le concours de La totalité des cas de rétinoblastomes diagnostiqués
le Pr Thierry Philip, président l’ambassade de France et du Fonds en France est prise en charge à l’Institut Curie, qui est
du Directoire de l’Institut Curie. de solidarité pour l’innovation, centre de référence national, labellisé dans le cadre
Aussi l’Institut poursuit-il cette des contrats de coopération du réseau de référence européen ERN PaedCan
vocation auprès des pays fragilisés. ont été signés avec ce pays et l’un des centres les plus importants au niveau
Depuis les événements et une bibliothèque de cours mondial. Financé par la Ligue contre le cancer pour
dramatiques de 2020 au Liban, internationaux accessibles en ligne quatre ans, ce projet vise à disposer dans les années
il a mis en place un partenariat a été créée. « Des partenariats à venir de méthodes diagnostiques non invasives
permettant à six médecins libanais qui renforcent la cancérologie dans et de traitements du rétinoblastome entraînant
de bénéficier d’une formation d’un ces pays », conclut le Dr Anhoury, moins de séquelles. Il impliquera plusieurs des équipes
an dans les murs de l’Institut Curie. directeur des relations de recherche et des services hospitaliers de
Des masterclass assurées par une internationales de l’Institut Curie, l’Institut Curie.
dizaine de médecins et experts à la tête de ces missions. Pour en savoir + : curie.fr
TROUBLE GRAVE DU MÉTABOLISME
Une piste pour élucider le mécanisme de la cachexie
P
erte de poids incontrôlée, fatigue, atrophie musculaire, des hormones stéroïdes circulantes. Lorsque l’on supprime
troubles du métabolisme… la cachexie est un état ces protéines transporteuses dans les tumeurs, on supprime
souvent induit par les tumeurs et dont on ne comprend la cachexie chez la mouche. Ces résultats ouvrent des
pas les mécanismes. Cet état a un impact considérable perspectives importantes en termes de recherche clinique.
sur la qualité de vie des patients, il réduit l’efficacité de la En effet, certains membres de la famille de transporteurs
chimiothérapie et augmente la sensibilité aux infections. identifiés chez la drosophile sont très fortement induits
Les chercheurs de l’unité Génétique et biologie du dans des tumeurs cachexiantes chez l’humain. Les chercheurs
développement de l’Institut Curie viennent d’identifier vont désormais participer à une étude clinique et analyser,
chez la mouche drosophile des mécanismes hormonaux chez des patients atteints de cancer du pancréas, l’expression
impliqués dans la cachexie. Plus précisément, ils ont identifié des transporteurs et les taux circulants d’hormones
une protéine dite « transporteuse » fortement exprimée stéroïdiennes.
par les tumeurs qui permet d’absorber une grande partie Pour en savoir + : curie.fr
4 LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
ACTUALITÉS
CANCERS
CANCER DU COL DE L’UTÉRUS
Diminution spectaculaire
de sa fréquence chez les
jeunes femmes vaccinées
U
ne vaste étude menée au
Gettyimages
Royaume-Uni confirme l’effet
protecteur du vaccin anti-
papillomavirus (HPV) contre
le cancer du col de l’utérus.
Les chercheurs ont en effet observé une INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
diminution substantielle du nombre de cas
déclarés de ce cancer chez les jeunes filles
Un partenariat
Gettyimages
ayant bénéficié des premières campagnes
de vaccination. La diminution du risque
public-privé
par rapport aux générations précédentes pour stimuler
non vaccinées est la plus importante (- 87 %) chez les jeunes filles vaccinées entre 12
et 13 ans. Si la protection contre l’infection à HPV conférée par la vaccination avait déjà l’innovation
été montrée, cette étude pointe pour la première fois le bénéfice direct contre le
cancer du col de l’utérus du vaccin Cervarix®, utilisé dans ces premières campagnes
dans le traitement
– aujourd’hui remplacé par le Gardasil® (protecteur contre davantage de types de du cancer
HPV). L’équipe britannique va poursuivre l’étude dans la durée de manière à consolider
U
ces résultats chez ces jeunes femmes, qui ont moins de 25 ans aujourd’hui. Les ne nouvelle structure, baptisée
papillomavirus, responsables de la plupart des cas de cancer du col de l’utérus, sont « Filière intelligence artificielle
également responsables d’autres cancers génitaux et de l’anus notamment. En France, et cancer », a vu le jour en
6 300 nouveaux cas de cancers sont attribuables à ces infections, dont un tiers touche septembre 2021. Elle est le fruit de
les hommes. Aussi la vaccination anti-HPV a-t-elle été étendue depuis janvier 2021 l’association entre des organismes
aux garçons à partir de 11 ans également. publics (l’Institut national du cancer, le
Source : The Lancet
Health Data Hub) et privés (sept
laboratoires pharmaceutiques français
et étrangers, l’Alliance pour la
CANCERS DU POUMON recherche et l’innovation des industries
Des spécificités chez les non-fumeurs de santé et France Biotech). Son
ambition ? Accélérer l’innovation en
E
ntre 10 et 20 % des cancers du poumon cancérologie par l’utilisation de
surviennent chez des personnes n’ayant jamais l’intelligence artificielle. Un budget de
fumé. Ces cancers ont jusqu’alors été peu étudiés 16 millions d’euros doit financer des
du fait de leur moindre fréquence. Pour mieux les projets portés par les industriels et
connaître, une grande étude internationale, coordonnée menés par des start-up. Celles-ci
par des chercheurs américains, a analysé le matériel exploiteront les énormes quantités de
génétique de 232 tumeurs du poumon issues de non- données issues des pratiques cliniques,
Gettyimages
fumeurs. Conclusion : les anomalies de ces tumeurs, des structures de surveillance et
regroupées en trois grands types, sont différentes de d’observation, des centres régionaux
celles retrouvées dans les tumeurs de fumeurs, y de coordination des dépistages, des
compris celles provenant de personnes exposées au tabagisme passif. Les anomalies études et des essais cliniques. L’enjeu :
mises en lumière résultent plutôt de processus naturels liés au fonctionnement cellulaire. favoriser des approches innovantes
Ces travaux permettront, à terme, de mettre en place un dépistage plus précoce et pour améliorer la connaissance des
des traitements personnalisés. Ces avancées sont nécessaires dans la prise en charge cancers et développer une médecine
du cancer du poumon, qui reste le plus grave en France, quelle que soit son origine. de plus grande précision.
Source : Nature Genetics
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
5
ACTUALITÉS
CANCERS
LEUCÉMIES AIGUËS MYÉLOÏDES (LAM) CANCER DU PANCRÉAS
Un biomarqueur pour Les signaux
un traitement plus adapté qui doivent alerter
U
ne étude
internationale,
animée par des
chercheurs du centre de
recherches en cancérologie
de Toulouse, a permis
d’identifier un nouveau
biomarqueur prédictif de la
iStock
réponse à une thérapie
utilisée dans le traitement des
leucémies aiguës myéloïdes (LAM). Les scientifiques ont ainsi découvert
un mécanisme de résistance permettant d’expliquer les rechutes. Les
LAM sont en effet des cancers du sang souvent associés à un mauvais
pronostic ; car malgré les progrès thérapeutiques des dernières années,
notamment avec les thérapies ciblées, la rechute demeure une
problématique centrale qui grève le succès du traitement. Elle est liée à
l’apparition de cellules cancéreuses résistantes aux traitements, qui
persistent dans l’organisme. Les résultats de cette nouvelle étude
pointent une signature particulière chez les patients qui répondent le
mieux à l’une des thérapies récentes utilisées dans la LAM. Ils espèrent
confirmer à plus grande échelle la validité de ce biomarqueur,
qui pourrait permettre de mieux adapter le traitement au patient.
Source : Nature Cancer
Getty Images
D
QUALITÉ DE L’INFORMATION u fait d’un début silencieux, puis de
L’info derrière l’infox symptômes divers et peu spécifiques,
le cancer du pancréas est
L’
Institut national du cancer (InCA) propose, sur son site, majoritairement diagnostiqué à
une nouvelle rubrique pour éclairer les patients et les usa- un stade très avancé, ce qui en fait un
gers en santé face à la multiplication des fausses infor- des cancers dont la survie est la plus faible (11 %
mations. Celles-ci peuvent avoir des conséquences graves à 5 ans). Une étude britannique pourrait contribuer
sur la santé, et le domaine du cancer n’y échappe pas. Parmi à établir un diagnostic plus précoce. En effet, elle
les « fausses » informations confirme une liste d’une vingtaine de symptômes
décryptées : « Le jeûne est-il présents chez les malades (comme la jaunisse, du sang
bénéfique en cas de cancer ? », dans les selles, des vomissements…), mais, surtout,
« La vaccination contre les pointe deux nouveaux signes cliniques jusque-là jamais
virus HPV provoque-t-elle la mis en avant : la sensation de soif et des urines foncées.
sclérose en plaques ? » ou Une bonne information et la prise en compte de tous
« Porter un soutien-gorge les symptômes, souvent présents un an avant le
favorise-t-il le cancer du diagnostic, devraient rendre plus vigilants le patient
sein ? ». et son médecin et permettre d’améliorer la détection
Pour découvrir cette de ce cancer.
rubrique : Source : British Journal of General Practice
iStock
leseclairages.e-cancer.fr
6 LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
INFO PRATIQUE
CANCERS
Comment parler de son cancer
avec son enfant ?
L’irruption du cancer d’un parent au sein de la cellule familiale bouleverse l’équilibre établi. Comment
préserver les relations avec l’enfant ? Comment lui donner une information adaptée sur la maladie
et l’aider à exprimer son ressenti ? Quelques repères pour guider les parents dans ces moments difficiles.
Pourquoi faut-il parler
de la maladie ?
À tout âge, l’enfant capte les inquiétudes de ses parents
et ressent le moindre changement dans la vie familiale.
Ne rien dire n’est pas le protéger. Cela peut au contraire
l’amener à mal interpréter la réalité ou lui laisser penser
que la maladie est de sa faute. Il a aussi besoin de mettre
des mots sur la situation pour la comprendre. Il est
Getty Images
souhaitable qu’il apprenne la maladie par le parent malade
ou, en accord avec celui-ci, par l’autre parent ou un autre
proche. L’apprendre par hasard pourrait être trop brutal et
rompre sa confiance envers vous.
Réorganiser la vie quotidienne
Quand en parler ? Il s’agit de maintenir au mieux une continuité
Le mieux est dès que l’on s’en sent capable, de la vie familiale, des règles et des activités habituelles.
après s’être laissé à soi-même, ainsi qu’à l’autre parent, En particulier, les contacts entre l’enfant et son parent
le temps de « digérer » l’annonce du diagnostic. malade hospitalisé doivent être favorisés : visites, courrier,
En discuter le plus tôt possible permettra à l’enfant de téléphone, appels visio, etc. Les rôles vont évoluer dans la
comprendre et d’anticiper les changements à venir : famille, mais il faut éviter de donner trop de responsabilités
absences, effets des traitements, etc. « parentales » à l’enfant. Il est conseillé d’identifier des
proches pour passer ponctuellement le relais pour les
Comment en parler ? activités, pour des gardes. Du côté de la scolarité, il est
• Avoir un langage adapté à l’âge de l’enfant et à son important que l’école reste un repère stable et rassurant,
niveau de compréhension. à l’écart du bouleversement familial. On peut choisir
• Nommer la maladie : dire que c’est un cancer et utiliser d’informer de la situation un référent de l’établissement
au besoin des métaphores et des images pour l’expliquer. scolaire. Enfin, consacrer du temps à l’enfant pour
• Rassurer l’enfant en lui disant qu’il n’est pas dialoguer avec lui sur ce qu’il vit permet de ne pas le laisser
responsable de ce qui arrive. seul face à ses interrogations et à ses peurs.
• Expliquer que ce n’est pas une maladie contagieuse, que
les autres membres de la famille sont en bonne santé et Se faire aider d’un/une
lui aussi. psychologue
• Dire que l’équipe médicale va tout mettre en œuvre En cas de difficulté à entamer le dialogue avec votre
pour vous soigner. enfant au sujet de la maladie ou si vous constatez
• Écouter ses questionnements pour respecter son qu’il souffre, n’hésitez pas à vous faire aider d’un/une
cheminement et délivrer une information progressive. professionnel/le, que l’équipe soignante vous indiquera.
• Rester réaliste, sans minimiser la gravité de la situation Il/elle vous accompagnera sans se substituer à vous dans
ni la dramatiser. l’échange avec votre enfant. Différentes modalités de
• Préciser que vous êtes là pour en parler avec lui soutien psychologique sont possibles, adaptées à chaque
Illustrations : iStock
et répondre à ses questions ou qu’un autre adulte situation : en présence du médecin, en entretien individuel
de son entourage ou de l’équipe soignante pourra d’abord avec vous, puis avec votre enfant, en groupe
aussi le faire. thérapeutique (groupe famille, groupe d’enfants), etc.
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
7
DOSSIER
RECHERCHE & SOINS
Combattre
le cancer sur
tous les fronts
grâce aux
associations
de traitements
En associant simultanément différentes
approches thérapeutiques anticancers,
des résultats importants ont été obtenus
ces cinquante dernières années.
Avec l’apparition récente des thérapies ciblées
puis de l’immunothérapie, de nouvelles
associations sont envisagées, et bouleversent
notamment la prise en charge des cancers
les plus avancés.
-
Par Émilie Gillet
8
Uriel Chantraine
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
DOSSIER
COMBATTRE LE CANCER SUR TOUS LES FRONTS GRÂCE AUX ASSOCIATIONS DE TRAITEMENTS
Fanny Noret/Institut Curie
En associant simultanément
différentes thérapies
L’
anticancéreuses, la prise en
charge de certains cancers arsenal thérapeutique contre l’objectif est de rétablir ou stimuler le fonction-
s’est considérablement le cancer est très développé. nement du système immunitaire du patient
améliorée ces dernières Il y a les désormais clas- pour qu’il s’attaque plus efficacement aux cel-
années.
siques chirurgie, radiothéra- lules cancéreuses. Si l’on a souvent en tête
pie et chimiothérapie. Et plus qu’une thérapie succède à une autre pour
récemment sont apparues traiter le plus efficacement possible la maladie,
l’hormonothérapie, qui réduit ou stoppe l’acti- il est certain que ces thérapies sont aussi envi-
vité ou la production d’une hormone suscep- sagées de façon simultanée : on parle alors
tible de stimuler la croissance des tumeurs d’associations de traitements, qui combinent
hormonodépendantes ; les thérapies ciblées, des approches différentes ou des médica-
qui bloquent la croissance ou la propagation ments de la même classe thérapeutique.
des cellules tumorales en interférant préci
sément avec des particularités moléculaires SUR PLUSIEURS FRONTS À LA FOIS
à l’origine de leur développement ou de « Face à certaines tumeurs, on est plus effi-
leur dissémination ;et l’immunothérapie, dont cace si on les attaque en ciblant différents
10 LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIEDOSSIER
COMBATTRE LE CANCER SUR TOUS LES FRONTS GRÂCE AUX ASSOCIATIONS DE TRAITEMENTS
mécanismes en même temps plutôt que en 1995, une thérapie ciblée a été ajoutée à GRÂCE
l’un après l’autre », résume le Pr Charles cette association : le rituximab qui vise cer- À VOUS
Dumontet, directeur adjoint du Centre de taines cellules immunitaires impliquées dans
recherche en cancérologie de Lyon (CRCL). la cancérisation. « Ce nouveau protocole dit La générosité des donateurs
Un peu comme lorsqu’une armée mène R-CHOP a permis d’augmenter le taux de donne l’élan d’une nouvelle
une bataille sur le front aérien et terrestre guérison parmi les patients non curables stratégie thérapeutique
en même temps. « Cette approche est per- jusqu’alors, raconte le Pr Dumontet. Et La radiothérapie par minifaisceaux
tinente car une tumeur cancéreuse n’est pas aujourd’hui on réfléchit à associer d’autres de protons (Minibeam Radiation
une masse homogène. Elle est constituée thérapies ciblées à ce cocktail pour qu’il soit Therapy, MBRT) est une technologie
de cellules aux caractéristiques différentes, encore plus efficace ! » récente, plus efficace et moins toxique
et qui ne réagissent pas toutes de la même Autre exemple, le cancer du poumon non à que la radiothérapie conventionnelle.
façon à un médicament par exemple. petites cellules, qui représente plus de 80 % Les cellules CAR-T sont quant à elles
Certaines y seront sensibles, d’autres pas. des cancers bronchiques. Pour les formes une innovation révolutionnaire
Or, en traitant de façon séquentielle, on précoces nécessitant une chimiothérapie, il pour aider les défenses du patient
prend parfois le risque que se développent s’agit le plus souvent d’une association de à lutter contre le cancer. Les travaux
des mécanismes de résistance aux traite- deux molécules. Pour les tumeurs avancées de Yolanda Prezado, chercheuse à
ments », poursuit le chercheur lyonnais. non opérables, chimiothérapie et radiothé- l’Institut Curie, ont déjà montré que
Dans les années 1970, on a commencé par rapie sont entreprises conjointement, on le système immunitaire jouait
utiliser des chimiothérapies en association. parle alors de chimioradiothérapie. Enfin un rôle majeur dans la réponse
Ainsi pour les cancers des testicules métas- pour les formes où des métastases sont antitumorale de la MBRT (études
tatiques par exemple, le protocole standard présentes, la majorité des patients bénéfi- précliniques). Ils laissent penser
aujourd’hui associe trois chimiothérapies cient désormais d’un traitement associant qu’une combinaison de cette
trois à quatre molécules de chimiothéra- radiothérapie et de cellules CAR-T
simultanément.
pourrait potentialiser les effets
pie et d’immunothérapie. Depuis quelques
des deux traitements et apporter
AUGMENTER LES TAUX DE années, cette association a révolutionné
GUÉRISON ET/OU LA SURVIE une nouvelle solution thérapeutique
la prise en charge de certains malades à
aux patients. Le projet RadImmunACT
L’un des exemples emblématiques de l’inté- un stade avancé, permettant à 20 à 30 %
va permettre de le confirmer,
rêt de ces associations est le lymphome non d’entre eux d’accéder à une plus longue sur- avec l’aide précieuse du centre
hodgkinien, un cancer du sang qui s’attaque vie. D’ailleurs, elle est aussi le traitement de d’immunothérapie des cancers
au système immunitaire. En 1975 a été mis référence des cancers du poumon à petites de l’Institut Curie, dirigé
au point le protocole CHOP, qui associait cellules métastatiques. Et nombreux sont les par le Pr Sebastian Amigorena.
trois chimiothérapies conventionnelles avec essais cliniques qui envisagent de nouvelles La générosité des donateurs finance
de la cortisone. Il a permis de rendre curable combinaisons, ajoutant par exemple près d’un tiers de ces travaux
ce cancer chez une partie des patients. Puis, une seconde immunothérapie ou prometteurs.
RECHERCHE
Associer les immunothérapies pour gagner en efficacité
Pr Nicolas de transformer une maladie mortelle à très sur les tumeurs neuroendocrines
Girard, court terme en une maladie chronique. à grandes cellules, un sous-type
oncologue de cancer du poumon qui ne bénéficie
Contre les cancers bronchiques
pneumologue à
la tête de l’Institut non à petites cellules métastatiques, pas d’innovations thérapeutiques,
du Thorax Curie- qui représentent 85 % des cancers du et compare immunothérapie seule
Montsouris poumon, l’un des traitements de référence versus la combinaison de deux stratégies
consiste désormais en une association de d’immunothérapie complémentaires.
deux immunothérapies. C’est cette même L’autre teste les mêmes protocoles chez
Depuis 2015, l’immunothérapie a combinaison qui est aujourd’hui testée des patients atteints de tumeurs du
bouleversé la prise en charge des cancers par l’équipe du Pr Nicolas Girard, thymus. Des résultats très encourageants
du poumon. En aidant le système oncologue pneumologue à la tête de ont été présentés en septembre dernier
immunitaire du patient à éliminer les l’Institut du Thorax Curie-Montsouris, à l’occasion de l’ESMO 2021, rendez-vous
cellules cancéreuses, cette approche contre des formes rares de tumeurs incontournable de l’oncologie médicale
thérapeutique a permis en quelque sorte thoraciques. Une première étude porte européenne.
11DÉCRYPTAGE
Les associations
de traitements
En administrant simultanément différentes thérapies anticancéreuses, la prise en charge de certains
patients atteints de cancer a nettement été améliorée ces dernières années.
Pourquoi associer Quelles
différentes thérapies sont les
anticancer? limites ?
• Il existe différentes thérapies
anticancéreuses : chirurgie, radiothérapie, • Le principal
chimiothérapie, hormonothérapie, problème
thérapies ciblées, immunothérapie. lié aux
• Administrer deux ou trois thérapies en associations de
même temps permet de cibler plusieurs traitements
mécanismes simultanément et donc est le cumul
d’être plus efficace. des effets
• Ces associations ont permis de guérir secondaires.
des patients atteints d’hémopathies ou • Tous les
présentant certaines tumeurs solides. patients ne
répondent pas
à ces associations de traitements, et des recherches existent
pour comprendre pourquoi.
• Pour l’instant, aucune étude n’a permis de prouver l’effet
synergique de ces associations même s’il est recherché.
Les recherches en cours
• Associer plusieurs immunothérapies est l’une des pistes les plus
prometteuses car elles sont parfois les seules efficaces contre
certains cancers à un stade métastatique ou en récidive.
Quelles sont les • Des études évaluent l’intérêt d’associer immunothérapie
avec la radiothérapie ou la chimiothérapie car celles-ci ont a
associations les plus priori le pouvoir de stimuler le système immunitaire.
fréquentes? • Pour déterminer les associations les plus pertinentes, il faut
développer auparavant la recherche fondamentale qui permet
d’en comprendre les mécanismes thérapeutiques.
• Les plus anciennes sont les associations
de chimiothérapies entre elles.
• Pour certaines tumeurs localisées,
on associe parfois chimiothérapie et
radiothérapie.
• Plusieurs chimiothérapies sont
associées à une immunothérapie dans le
traitement du lymphome non hodgkinien
et des cancers du poumon, ORL, etc.
• Immunothérapies et thérapies ciblées
sont utilisées dans le traitement de
certains cancers du rein.DOSSIER
COMBATTRE LE CANCER SUR TOUS LES FRONTS GRÂCE AUX ASSOCIATIONS DE TRAITEMENTS
RECHERCHE
Une combinaison
inédite contre le cancer
du pancréas
D’ici à 2030,
les cancers
du pancréas
Uriel Chantraine/Institut Curie
pourraient
devenir
la deuxième
cause de décès
par cancer après
ceux du poumon.
Dr Cindy Neuzillet, En effet,
Manon Matias /Institut Curie
gastroentérologue leur fréquence
et oncologue est en constante
digestif à l’Institut
augmentation
Curie, responsable
du parcours (14 000 nouveaux
digestif sur le site cas par an en
de Saint-Cloud France) mais
surtout il s’agit
d’un cancer particulièrement agressif,
souvent diagnostiqué tardivement,
à un stade métastatique et alors non
opérable. À ce jour, dans cette situation,
une thérapie ciblée afin d’augmenter spectaculaires, mais avec des récidives qui seule la chimiothérapie est envisagée,
la proportion de patients chez qui l’on intervenaient rapidement. Pour améliorer avec une médiane de survie des patients
réussit à stabiliser la maladie. ça, on a ajouté à la combinaison différentes d’un an environ. Pour améliorer cela, un
immunothérapies. Certes cela a augmenté essai clinique en cours à l’Institut Curie
INNOVATION ET ASSOCIATION la durée de la rémission, mais seulement évalue l’intérêt d’une combinaison entre
Certaines combinaisons n’associent que chez une minorité de patients. Des essais chimiothérapie et immunothérapie :
des molécules les plus récentes. « Contre envisagent donc de nouvelles combinai- « Dans notre étude, nous comparons
certains cancers du rein, du foie ou du pan- sons avec d’autres thérapies ciblées et des deux groupes de patients après qu’ils
créas, l’association d’une immunothérapie immunothérapies plus récentes pour non ont reçu 4 mois de chimiothérapie pour
et d’une thérapie ciblée de type antiangio- seulement augmenter la durée de rémission contrôler la maladie. Le premier groupe
génique, c’est-à-dire qui bloque la formation mais aussi la proportion de patients répon- suit le traitement classique, qui consiste
de nouveaux vaisseaux autour de la tumeur, dants », résume le Pr Dumontet. en un allègement de la chimiothérapie,
permet d’observer des régressions rapides de et l’autre groupe se voit administrer le
la maladie, explique le Pr Stéphane Oudard, DES ESSAIS CLINIQUES PLUS vaccin thérapeutique en plus », explique
responsable de la structure de recherche COMPLEXES le Dr Cindy Neuzillet, gastroentérologue
clinique et translationnelle en oncologie à Toutes les associations ne sont pourtant pas et oncologue digestif à l’Institut Curie,
l’Hôpital européen Georges-Pompidou (AP- envisageables. « Plus on associe de théra- responsable du parcours digestif
sur le site de Saint-Cloud. Ce vaccin
HP, Paris). Pour les patients atteints d’un can- pies et plus on est efficace évidemment,
thérapeutique appelé Tedopi a pour
cer du rein métastatique par exemple, cette mais plus on augmente aussi la toxicité ! »
objectif d’« éduquer » le système
bithérapie a permis de gagner plus de 6 mois explique-t-il. Ainsi, le principal facteur limi-
immunitaire du patient en lui présentant
de survie sans progression de la maladie. » tant de ces combinaisons, ce sont les effets
des fragments de protéines tumorales
Des essais sont aujourd’hui conduits pour secondaires. Cela explique notamment de synthèse. En parallèle, des
envisager d’ajouter une seconde immuno- pourquoi les associations de thérapies recherches translationnelles seront
thérapie à cette association. ciblées sont assez rares, car leur toxicité menées afin de comprendre, grâce à
Il existe enfin les cancers de la peau, et plus peut être importante. À l’inverse, l’immu- des prélèvements sanguins et à des
particulièrement le mélanome métasta- nothérapie, qui est l’approche médicamen- biopsies pour l’étude du micro-
tique : « Il y a quelques années, l’association teuse la plus récente mais aussi celle environnement de la tumeur, pourquoi
de thérapies ciblées a permis des rémissions qui présente a priori une nocivité le traitement aura marché ou non.
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
13DOSSIER
COMBATTRE LE CANCER SUR TOUS LES FRONTS GRÂCE AUX ASSOCIATIONS DE TRAITEMENTS
PAROLE PR CHRISTOPHE LE TOURNEAU, entre elles, qui ont nettement amélioré
D’EXPERT ONCOLOGUE MÉDICAL, DIRECTEUR la prise en charge de certains cancers
DU DÉPARTEMENT D’ESSAIS CLINIQUES du poumon, ORL et mélanomes.
PRÉCOCES (D3I, POUR DEPARTMENT OF DRUG À l’inverse, aucune étude n’a permis
de démontrer l’intérêt d’associer
DEVELOPMENT AND INNOVATION) simultanément radiothérapie et
développement avancé, qu’il y a déjà immunothérapie, même si des études
des métastases et/ou qu’il s’agit d’une sont toujours en cours.
récidive. En utilisant plusieurs
approches thérapeutiques en même Que propose l’Institut Curie
temps, on augmente donc les chances en matière d’essais
de détruire un plus grand nombre de cliniques sur ce sujet ?
cellules cancéreuses. Nous travaillons beaucoup sur ce thème
Uriel Chantraine/Institut Curie
des associations de traitements.
Mais toutes les associations Nous coordonnons par exemple l’essai
sont-elles envisageables ? multicentrique PEVOsq, qui vise à tester
Non, certaines sont plus intéressantes l’association d’une immunothérapie et
que d’autres. Historiquement, on a d’un épimédicament, c’est-à-dire une
commencé il y a cinquante ans thérapie ciblée qui vise des mécanismes
par associer des chimiothérapies entre épigénétiques (la manière dont les
elles, c’est notamment très efficace gènes s’expriment, NDLR) chez une
Quel est l’intérêt de ces contre les cancers des testicules centaine de patients atteints d’un
associations simultanées ou certains lymphomes. Par la suite, cancer de la peau de type carcinome
de traitements pour des associations chimiothérapie épidermoïde en récidive. Nous
les patients ? et radiothérapie ont été testées avec coordonnons aussi l’essai TG4001.12,
Les tumeurs cancéreuses sont des succès. Puis, avec l’apparition des qui évalue l’association d’un vaccin
structures biologiques complexes qui thérapies ciblées il y a une trentaine thérapeutique développée
regroupent des cellules qui n’ont pas d’années et de l’immunothérapie il y a par l’entreprise française Transgene
toutes les mêmes caractéristiques dix ans, de nouvelles associations ont et d’une immunothérapie chez des
moléculaires. Les aborder par un seul pu être LE
tentées.
JOURNALAujourd’hui,
DE L’INSTITUTles plus
CURIE patients atteints de cancers agressifs
angle d’attaque n’est bien souvent pas prometteuses sont notamment celles de l’utérus, du canal anal ou du vagin
suffisant pour les détruire, surtout d’immunothérapie et de chimiothérapie qui sont positifs au papillomavirus
quand elles sont à un stade de et de différentes immunothérapies de type HPV 16.
moindre, est présente dans la grande si l’effet de A + B est plus important que l’effet cliniques. Les possibilités d’associations
majorité des associations en cours de A plus l’effet de B. En théorie, cela devrait sont quasi infinies alors que le nombre
d’évaluation aujourd’hui. C’est d’autant plus être le cas. Par exemple lorsqu’on associe de malades, lui, est limité. Or, pour avoir
intéressant qu’elle est l’une des rares straté- radiothérapie et immunothérapie, l’idée des résultats significatifs, il faut constituer
gies à permettre véritablement de soigner étant que la première fragmente les cellules des cohortes de patients suffisamment
certains cancers à un stade métastatique cancéreuses et provoque une inflammation importantes. Cela signifie des essais mul-
ou en récidive. « Lorsqu’on teste une nou- autour de la tumeur, ce qui a pour effet de ticentriques voire internationaux, pour les-
velle combinaison, il est toujours délicat stimuler le système immunitaire, réactivé par quels le financement et le recrutement des
d’ interpréter les effets secondaires, et de ailleurs grâce à l’immunothérapie. « Le pro- malades prennent plus de temps. Pour le
déterminer quel médicament en est à l’ori- blème lorsqu’on veut évaluer si cette syner- Pr Dumontet il est donc essentiel de « ne
gine. Surtout avec les immunothérapies, qui gie existe ou pas, c’est le choix du critère pas négliger la recherche préclinique, pour
peuvent avoir des effets soudains et impré- de comparaison. Est-ce qu’on va choisir la déterminer au laboratoire, sur différents
visibles chez quelques patients », tempère proportion de patients qui répondent au trai- modèles expérimentaux, les combinaisons
le Pr Stéphane Oudard. tement, ou bien l’augmentation de la durée de traitements les plus pertinentes avant de
Par ailleurs, des recherches tentent de décou- de survie des seuls répondants ? C’est une passer aux essais chez l’homme ».
vrir s’il existe un réel effet synergique dans ces question complexe », estime le Pr Dumontet.
associations, c’est-à-dire schématiquement Autre difficulté, l’organisation des essais
14 LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIEENTRE NOUS
GÉNÉROSITÉ
VOTRE FONDATION
-
La continuité de la recherche et des soins dans un même lieu – l’Institut Curie – stimule
l’innovation, favorise les échanges et les découvertes. Fondation reconnue d’utilité
publique, l’Institut Curie est habilité à recevoir les dons et legs. Notre volonté
de progresser est encouragée par le soutien et la générosité de nos donateurs, testateurs
et partenaires, que nous remercions très chaleureusement.
-
« Sur les conseils de mon notaire,
j’ai désigné l’Institut Curie,
légataire universel de l’ensemble
de mon patrimoine »
MME MARIE-PAULE (RIS-ORANGIS – ESSONNE)
malheureusement que très peu de
contacts et, si je ne prévois rien, ils seront
mes héritiers et devront reverser 60 % de
droit de succession à l’État sur leur part.
Sur les conseils de mon notaire, j’ai donc
désigné l’Institut Curie, légataire universel
de l’ensemble de mon patrimoine.
En tant que fondation reconnue d’utilité
publique, l’Institut Curie est exonéré des
droits et frais de succession. De plus,
c’est ma façon d’apporter ma pierre à
l’édifice, de faire avancer la recherche
contre le cancer.
Je tiens à remercier, à travers mon legs,
les médecins, les chirurgiens, le personnel
hospitalier pour sa gentillesse et la douceur
iStock
de ses mots de réconfort, ainsi que les
Pour préserver l’anonymat du donateur, sa photo et son nom ont été modifiés. chercheurs qui œuvrent pour combattre
cette maladie, toujours trop présente. »
« J’ai été opérée en 2000 d’un cancer du m’ont donné la force de rebondir et j’ai
sein, puis d’un cancer à l’autre sein en 2010. énormément de chance d’être encore là NOUS CONTACTER
J’ai eu la chance d’être prise en charge à aujourd’hui pour apporter mon
Catherine Ricatte se tient à votre
l’Institut Curie. En plus de l’expertise témoignage. disposition pour toute question
médicale et scientifique en cancérologie, Je viens de fêter mes 70 ans et j’ai décidé sur les donations, legs et
l’accompagnement, l’écoute des équipes de m’occuper de ma succession. Je suis assurances-vie consentis
médicales et la Maison des patients et des veuve et je n’ai pas d’enfant. Issue d’une à l’Institut Curie.
proches m’ont beaucoup aidée et rassurée famille nombreuse, j’ai beaucoup de Tél. : 01 56 24 55 34
durant mes traitements. Tous ces soutiens neveux et nièces avec lesquels je n’ai catherine.ricatte@curie.fr
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE
15ENTRE NOUS
GÉNÉROSITÉ
800 000 euros L’Institut Curie célèbre
C’EST L’ENCHÈRE RECORD les 100 ans du voyage de
Marie Curie aux États-Unis
remportée par la « pièce du
président » lors de la dernière
édition de la vente de vin des
I
Hospices de Beaune. La moitié l y a tout juste un
sera reversée à l’Institut Curie pour siècle, Marie Curie
la lutte contre le cancer du sein. débarquait à New York
à l’invitation de la
journaliste américaine
Marie Meloney pour une
L’incroyable tournée triomphale de six
exploit de Loïc, semaines à travers le pays.
Outre la visite des plus
un champion célèbres universités
américaines, la tenue
au grand cœur de conférences et la
découverte de laboratoires
de recherche, elle est
DR
conviée à la Maison-Blanche
par le président américain Warren Harding. Elle y reçoit un précieux gramme
de radium collecté grâce à une levée de fonds de 100 000 dollars menée par Marie
Meloney auprès des Américaines et qui lui permettra de poursuivre ses travaux.
Cent ans après, l’Institut Curie a souhaité repartir « sur les traces de Marie Curie »
en novembre dernier. Au programme notamment de ce « voyage mémoriel » :
une rencontre inédite entre Marc Joliot et Yves Langevin, descendants de Marie Curie,
et Sean Meloney, descendante de Marie Meloney. Cent ans, c’est également l’âge de
la Fondation Curie, créée en 1921 grâce au soutien financier du Dr Henri de Rothschild.
« Célébrer ce centenaire, c’est pour nous l’occasion de rappeler notre fidélité sans faille
DR
aux valeurs de nos illustres fondateurs, mais également de faire vivre concrètement
I
nspecteur AXA dans le Lot-et- l’héritage de Marie Curie au quotidien et dans l’avenir », souligne le Pr Thierry Philip,
Garonne, Loïc Guillot s’est lancé cet président du Directoire de l’Institut Curie. À cette occasion, l’Institut Curie a d’ailleurs
été un défi titanesque : parcourir annoncé la création du premier centre de Chemical Biology en France. À la pointe
711 km à pied, d’Aiguillon, dans le Lot- de l’innovation, cette structure unique vise le développement de nouveaux outils
et-Garonne, à Amiens, dans la Somme, de diagnostic et d’approches thérapeutiques innovantes en cancérologie.
au profit de l’Institut Curie pour
rejoindre sa cousine Anne-Laure,
atteinte d’un cancer et d’une maladie Quinze ans de dons pour
rare. Avec l’aide de sa famille, de ses lutter contre les cancers
collègues d’AXA et des collaborateurs
de l’enfant
AXA des régions qu’il traversait dans
son périple solidaire, Loïc a réussi à Depuis 2007, l’association Courir pour
embarquer plus de 280 coureurs et Mathieu organise une course à Mareil-
Éric Delaneau
1 700 marcheurs. Cette belle aventure Marly (Yvelines) pour collecter des dons
humaine a également bénéficié d’un au profit de la recherche sur les cancers
soutien exceptionnel de l’association pédiatriques. Chaque année, plus de
AXA Atout cœur. Au total, plus de 500 participants prennent le départ de 18 décembre dernier, l’association a remis
30 711 euros ont été récoltés pour cette course et plus de 330 000 euros ont les 16 000 euros collectés en 2021, à
l’Institut Curie. Un immense bravo à déjà été versés au centre SIREDO de l’équipe Diversité et plasticité des tumeurs
Loïc ainsi qu’à tous les participants l’Institut Curie, spécialisé dans la lutte de l’enfant dirigée par le Dr Olivier
pour ce fabuleux défi ! contre les cancers de l’enfant. Le Delattre. Un grand merci à tous !
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