Abstracts de la Journée d'Amphis en Pédiatrie
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MEDEC 2004 Vendredi 19 mars 2004 Abstracts de la Journée d'Amphis en Pédiatrie Continuité des soins, de l’enfant malade à l’adulte : troubles du comportement, maladies chroniques, handicaps Anorexie, boulimie, les troubles du comportement alimentaire bouleversent la vie de nombreuses adolescentes et celle de leurs parents. Comment aborder ces problèmes, tel est l'un des thèmes de la journée organisée par la Fondation Wyeth, journée où les experts engageront le dialogue avec les généralistes pour parler de deux autres problèmes qui touchent la santé, mais aussi la société : le devenir des maladies chroniques de l'enfant et le dépistage précoce des handicaps. Modérateurs : Pr Philippe JEAMMET et Dr Paul JACQUIN Pr Claude GRISCELLI (Président de la Fondation Wyeth pour la santé de l'enfant et de l'adolescent) et Pr Serge GILBERG Pr Catherine WEIL-OLIVIER et Dr Elisabeth PLAT
SOMMAIRE ANOREXIE ET BOULIMIE A L'ADOLESCENCE :ACTUALITE ET DEVENIR P3 Données épidémiologiques Mme Marie CHOQUET (Directeur de Recherche à l'INSERM) p4 Anorexiques et boulimiques devenues adultes Dr Christine FOULON (Hôpital Sainte Anne) p5 Les formes prépubères Dr Catherine DOYEN (Hôpital Robert Debré) p6 Les approches thérapeutiques Dr Nathalie GODART (Institut Mutualiste Montsouris) p7 MALADIES CHRONIQUES : Pour une continuité médicale et psychologique de la prise en charge, de l'enfance à l'âge adulte P9 Les maladies rhumatismales et auto-immunes Dr Anne-Marie PRIEUR (Hôpital Necker) p 10 Le diabète. Pr Paul CZERNICHOW (Hôpital Robert Debré) p 12 Le cancer Pr Danièle SOMMELET (Hôpital d'Enfants, Nancy) p 13 Les maladies psychiatriques Pr Philippe JEAMMET (Institut Mutualiste Montsouris) p 15 LA PLACE DU MEDECIN GENERALISTE DANS LA DETECTION PRECOCE DU HANDICAP P 17 Découverte d'anomalies in utero comment progresser vers un diagnostic ; prise en charge familiale Pr Alain VERLOES (Resp.de l'unité de génétique clinique, Hôpital Robert Debré) p 18 En période périnatale, indications chirurgicales très précoces Dr Delphine MITANCHEZ (Hôpital Necker) p 20 Repérage du handicap chez les grands prématurés ; organisation d'un réseau de suivi Dr Véronique ZUPAN (Hôpital Antoine Béclère) p 21 Après la naissance, place des réseaux et associations dans le suivi des maladies génétiques, neuromusculaires, métaboliques Pr Arnold MUNNICH (Hôpital Necker) p 22 2
ANOREXIE ET BOULIMIE A L'ADOLESCENCE ACTUALITE ET DEVENIR 3
Les troubles des conduites alimentaires : approche épidémiologique Marie Choquet, Directeur de Recherche, Inserm U 472 L’auteur se propose, à partir de résultats d’enquête, d’aborder les questions méthodologiques qui concernent l’étude des TCA auprès des adolescents en population générale : • D’abord les problèmes de définition, à cause de la variété des troubles et le continuum qui va du symptôme à la pathologie. • Ensuite les problèmes liés aux facteurs de risque, leur variété (sociaux, familiaux, scolaires, génétiques), leurs spécificités et leur rôle étiologique • Enfin, les problèmes liés à l’interdisciplinarité, car l’étude des TCA impose d’inclure la composante sociale, en particulier les formes les plus légères. Elle propose aussi de pointer les manques dans la recherche épidémiologique actuelle sur les TCA, en particulier en France. 4
Anorexiques et boulimiques devenues adultes Dr Christine FOULON Praticien hospitalier Unité des troubles alimentaires Hôpital Ste Anne Paris L’anorexie mentale est un trouble qui débute classiquement à l’adolescence le plus souvent après l’apparition des premières règles. L’étiopathogénie reste encore largement méconnue. Il arrive dans certains cas que les patientes soient en aménorrhée primaire c’est à dire que l’anorexie commence avant que la puberté ne soit terminée. La prédominance féminine des troubles reste caractéristique de ce trouble (1 cas masculin pour 9 cas féminins). Le début des troubles peut se faire sous forme de restrictions, de régimes, de grignotages (à l’origine d’un léger surpoids) par des vomissements provoqués ou des véritables crises de boulimie. Il existe un continuum dans l’évolution des troubles alimentaires avec un passage d’une forme restrictive à une forme boulimique. 50% des patients qui ont présenté un épisode d’anorexie ou de régime strict développeront à un moment de leur évolution des comportements boulimiques quelques mois ou quelques années après le déclenchement de l’anorexie. La prévalence de l’anorexie est de 1% dans une population de jeunes femmes. L’anorexie mentale est une situation médicale, psychopathologique et interpersonnelle complexe, grave et souvent chronique. La plupart des symptômes physiques et psychologiques résultent de la dénutrition. La prise en charge précoce est souvent compliquée par le déni de la maladie et les troubles de l’image corporelle. Les patients ne perçoivent pas la gravite de leur état, le fait qu’il existe un danger vital, elles se voient grosses alors qu’elles sont décharnées. Elles ont souvent une hyperactivité physique, ne ressentant pas la fatigue à leurs dires. Les traitements associent différents types d’approches : diététiques et nutritionnelles, cognitivo-comportementales, psychothérapiques individuelles et de groupe, approches corporelles et thérapie familiale. Les programmes de soins prévoient des actions thérapeutiques en ambulatoire s’il n’existe pas de critères de gravité ou une hospitalisation si le tableau est plus grave. Dans 1/3 des cas environ l’évolution est favorable. Dans 2/3 des cas les troubles s’installent avec persistance des restrictions et/ou des boulimies, des vomissements de prise de laxatifs. Les patients arrivent à l’âge adulte avec les complications somatiques (ostéoporose, troubles de fertilité) mais aussi des difficultés psychologiques et un déficit social. A l’âge adulte, le déni est moins important, la désorganisation comportementale est plus nette, les conséquences sociales plus évidentes. L’hospitalisation est souvent nécessaire mais n’est que la première étape du traitement qui devra se prolonger pendant plusieurs années. 5
Les formes prépubères Dr Catherine DOYEN Service de Psychopathologie de l’Enfant et de l’Adolescent, Hôpital Robert Debré, PARIS Historiquement des formes précoces d’anorexie mentale sont décrites, la plus connue d’entres elles étant celle de Catherine de Sienne qui dès l’âge de 7 ans avait exclu toute viande de son alimentation. Bien que la phénoménologie du trouble anorexie mentale évoque un trouble associé à l’adolescence, désormais dès l’âge de 8 ans, des fillettes et leurs familles consultent pour ce motif. A l’âge de l’école primaire, des formes de restriction alimentaire et des stratégies de contrôle du poids peuvent être observées et ce, avec une fréquence allant grandissant. Si l’on peut regretter la rareté des études évaluant le nombre d’enfants souffrant de ce trouble, des chiffres existent néanmoins. Dans une étude datant déjà d’une dizaine d’années, l’incidence de l’anorexie mentale chez des filles âgées de 10 à 14 ans a été estimée à 25,7 pour 100.000 habitants et à 3,7 pour 100.000 habitants chez les garçons. Au Danemark, l’année suivante, l’estimation a été de 9,2 pour 100.000 chez les filles. Dans notre service, il y a environ une dizaine d’années, sur 10 jeunes soignées pour anorexie mentale, 9 étaient adolescentes et avaient débuté leur puberté et une seule n’avait pas encore débuté sa puberté. Actuellement, sur ces 10 mêmes jeunes soignées, 7 sont des adolescentes et 3 sont des enfants. Un tiers des consultations pour trouble des conduites alimentaires est désormais dédié aux enfants. Dans une cohorte récente de 17 enfants souffrant d’anorexie mentale, il est remarquable de noter qu’en comparaison à un groupe d’adolescents ayant une anorexie mentale on retrouve certaines particularités cliniques. Les fillettes restreignent leur hydratation dans 42% des cas, leur BMI à la première consultation est plus bas d’une déviation standard que chez les adolescentes. Des antécédents familiaux de troubles des conduites alimentaires sont retrouvés dans 1/3 des cas. La comorbidité anxieuse et dépressive est plus fréquente que chez les adolescentes. Enfin une hospitalisation à temps plein doit être décidée dans 83% des cas. L’évolution quant à elle nécessite d’être étudiée au sein d’enquêtes prospectives qui sont encore rares à ce jour. Dans une recherche longitudinale portant sur 15 ans, 7% des jeunes souffrant d’anorexie mentale âgés de 12 à 17 ans présentait une rechute après la première hospitalisation et après 15 ans d’évolution 75% d’entre eux ne présentait plus de symptômes. Pour les plus jeunes, les chiffres sont à interpréter avec prudence mais il apparaît que si le jeune âge ne semble pas être un facteur de mauvais pronostic, le très jeune âge de début du trouble, c’est à dire entre 6 et 8 ans le serait. Des études restent à mener pour développer des stratégies thérapeutiques spécifiques qui tiennent compte du développement affectif et cognitif de ces jeunes patients. BIBLIOGRAPHIE -Bryant-Waugh R. and Lask B.: Annotation: Eating disorders in children. J. Child Psychol. Psychiat., 1995, 36, 2: 191-202. -Cook-Darzens S. (2002), Thérapie familiale de l’adolescent anorexique. Paris : Dunod. -Doyen C., Cook-Darzens S. (2004), Anorexie, boulimie, vous pouvez aider votre enfant – Des moyens d’agir dès 8 ans, Paris : Interéditions -Gowers S.G., Crisp A.H., Joughin N. and Bhat A.: Premenarcheal anorexia nervosa. J. Child Psyhol. Psychiat., 1991, 32, 3:515-524. -Steiner H. and Lock J.: Anorexia nervosa and bulimia nervosa in children and adolescents: a review of the past 10 years. J. Am. Acad. Child Adolesc. Psychiat., 1998, 37, 4: 352-359 -Steinhausen H.C.: Annotation: Outcome of anorexia nervosa in the younger patient. J. Child Psychol. Psychiatry, 1997, 38, 3: 271-276. 6
Les approches thérapeutiques Nathalie Godart Pédopsychiatre, médecin adjoint. Service de psychiatrie de l’Adolescent et du jeune Adulte, Institut Mutualiste Montsouris, 42, Bd Jourdan, 75014 Paris L’anorexie et la boulimie se manifestent par des symptômes alimentaires, des symptômes physiques, des symptômes psychiques et les conséquences sociales de ces troubles qui sont tous des motifs de consultation. Tout comme la symptomatologie de ces troubles est multiple, le traitement de l’anorexie mentale et de la boulimie doit être multifocal, incluant une prise individuelle (psychique, somatique et sociale) et une prise en charge familiale. Tous ces éléments doivent être développés en parallèle, avec une intensité variable en fonction du moment évolutif. Les TCA évoluent généralement sur plusieurs années, ils doivent bénéficier de soins au long court, le plus souvent en ambulatoire et rarement en hospitalisation. Dans les communications faites sur les thérapeutiques de l’anorexie et de la boulimie l’accent est souvent porté sur l’importance de la part psychiatrique des soins. Elle est indéniablement fondamentale, mais doit être complétée par la nécessité d’un suivi somatique très scrupuleux. On oublie trop souvent, en miroir du déni des patients, que ces troubles peuvent mettre en jeu le pronostic vital, soit le plus souvent du fait de troubles somatiques, soit parfois du fait de troubles psychiatriques. Sur le plan somatique, le principal danger est une défaillance hémodynamique. Les facteurs majorant ce risque sont des signes de gravité : un amaigrissement important (>30% du poids théorique, ou BMI
désinvestissements affectif et social de l’anorexie, se majorent avec la durée d’évolution des troubles. La dépression et les troubles anxieux sont très fréquents chez les sujets AN AN et BN nécessitent une coordination importante entre médecins somaticiens et psychiatres, le traitement du versant psychique et du versant somatique sont tout deux indispensables et se potentialisent l’un l’autre. 8
MALADIES CHRONIQUES Pour une continuité médicale et psychologique de la prise en charge, de l'enfance à l'âge adulte 9
Les maladies rhumatismales et auto-immunes De l’enfant malade à l’adulte : exemple des maladies rhumatismales et auto-immunes Anne-Marie Prieur. Hôpital Necker Enfants Malades Les maladies rhumatismales et auto-immunes ne sont pas exceptionnelles à l’âge pédiatrique et elles peuvent commencer chez l’enfant très jeune. Dans de nombreux cas, ces pathologies se poursuivent de nombreuses années. Ces enfants et leur famille ont un parcours très difficile. L’évolution au cours de la croissance est en effet émaillée d’évènements très déstabilisants, de thérapeutiques insuffisamment efficaces, et de complications liés à la maladie et aux divers traitements. Nous allons illustrer notre propos par un exemple clinique caractéristique . Exemple clinique Ce jeune garçon a commencé à l’âge de 2 ans une affection caractérisée par une fièvre très élevée, des éruptions, des douleurs intenses, et une atteinte articulaire rapide concernant toutes ses articulations. Le diagnostic de forme systémique d’arthrite juvénile idiopathique (FS-AJI ou maladie de Still) est rapidement porté et une corticothérapie à forte dose instaurée. De nombreux traitements sont associés à cette corticothérapie pour essayer de la réduire : traitements de fond divers, METHOTREXATE, CICLOSPORINE, immunoglobulines intra-veineuses, et plus récemment un traitement par ETANERCEPT. Parallèlement, de nombreuses infiltrations intra-articulaires par corticoïdes sont administrées, n’empêchant pas la poursuite d’une maladie très active. Les conséquences de ces traitements sont majeures : retard de croissance, retard pubertaire, handicap fonctionnel important obligeant à certains moments cet enfant à se déplacer en chaise roulante. Une ostéoporose entraîne des tassements vertébraux, une fracture du fémur. La synovite persistante entraîne une destruction articulaire en particulier au niveau des hanches nécessitant une arthroplastie bilatérale précoce. Une sub-luxation atlas-taxis instable entraîne une irritation médullaire nécessitant une arthrodèse cervicale. Malgré ce parcours extrêmement lourd et difficile, cet enfant a poursuivi une scolarité aussi normale que possible et envisage son futur à l’âge adulte. Commentaires Il s’agit d’une situation tout à fait typique d’un patient pour lequel il est nécessaire de mettre en place une période de transition afin d’effectuer un transfert dans de bonnes conditions vers la médecine adulte. Mais le plus souvent, le transfert d’un adolescent avec une maladie chronique s’effectue dans des conditions difficiles. - Considérations médicales pour le futur en secteur adulte ? -Tout d’abord, il est clair que ce patient n’a pas une polyarthrite rhumatoïde et les traitements proposés pour cette dernière ne seront pas forcément ni efficaces, ni bien tolérés dans les FS-AJI. Il n’y a actuellement aucun traitement qui permette un contrôle de l’activité d’une FS- AJI. Les nombreuses recherches faites actuellement dans le traitement des maladies inflammatoires permettent malgré tout d’espérer que de nouvelles molécules mieux ciblées. -Le traitement des complications. La possibilité de mieux manipuler l’hormone de croissance pendant la période pré-pubertaire donne un espoir de réduire un peu les inconvénients de la corticothérapie. L’ostéoporose induite à la fois par la maladie inflammatoire et l’immobilité physique ainsi que par la corticothérapie est un problème très important. Il n’y a pas actuellement chez l’enfant d’indication au traitement par les biphosphonates, mais cette possibilité thérapeutique pourrait être envisagée dans le futur. Il existe un risque infectieux accru en raison de nombreux traitements immunosuppresseurs utilisés dans cette pathologie, un risque de cataracte dû à une thérapeutique corticoïde utilisée à long terme, et 10
les destructions articulaires qui peuvent être non seulement liées à la maladie, mais également à la corticothérapie par un mécanisme de nécrose articulaire. Quand envisager le moment idéal pour transférer cet adolescent vers un secteur de Rhumatologie Adultes ? Il n’y a pas de date fatidique et il est nécessaire d’attendre que ce jeune accepte un tel transfert et un certain nombre de pré-requis sont indispensables. - La date du transfert est fonction d’un certain nombre de facteurs : l’âge chronologique, la maturité psychologique, l’acceptation de ce transfert, la possibilité d’une certaine indépendance, la possibilité de faire face aux modalités de fonctionnement d’un service de Médecine Adultes, l’acceptation de l’adolescent et de ses parents, la connaissance du rhumatologue adultes des maladies rhumatismales commençant dans l’enfance… Certains, notamment en Grande Bretagne, ont établi un plan permettant d’estimer si l’adolescent est prêt à être transférer dans un service d’Adultes. Ce plan comprend schématiquement 3 groupes de questions concernant la connaissance de l’adolescent sur sa maladie, sa possibilité d’indépendance dans sa vie quotidienne, et ses projets pour acquérir une profession. - Une étude prospective nationale en Grande Bretagne publiée en 2004 par l’envoi de 1670 aux professionnels de diverses Sociétés savantes a apporté des informations importantes, non seulement pour la rhumatologie, mais aussi pour toute maladie chronique atteignant les adolescents. Il en résulte - Seulement 28% des centres interrogés appliquent peu ou prou un programme de transition. - Une approche multidisciplinaire incluant les parents et les adolescents est nécessaire. - Ceci en agrément avec l’article 12 de la Charte des droits de l’enfant de 1989. - Le rôle du médecin généraliste comme lien permanent pendant le transfert est souligné. - Nécessité d’une information sur les conséquences de la maladie : économiques, culturelles et sociales incluant des informations sur la vie future en couple - Les médecins spécialistes (pédiatre ou rhumatologue) ne sont pas très à l’aise pour cette période de transition. - Les parents ont du mal à accepter d’abandonner le rôle qu’ils ont joué et de responsabiliser leur enfant. - La capacité des adolescents pour se prendre en charge ne dépend pas que de leur propre volonté de devenir indépendants, mais repose aussi sur les aides environnementales qui doivent les accompagner. Référence : « Developing a programme of transitional care for adolescents with JIA : results of a postal survey (Shaw et al Rheumatology 2004, 43 :211-19) ». 11
Du Diabète à l’adolescence à l’adolescent diabétique P CZERNICHOW, Hôpital Robert Debré, PARIS Tous les diabétologues s’accordent à dire que le diabète insulinodépendant se détériore à l’adolescence et plus particulièrement chez les filles. Le contrôle glycémique est beaucoup moins bon comme le démontre l’augmentation de l’hémoglobine glyquée (HbA1c). Il n’est donc pas surprenant que c’est à cette période de la vie que surviennent les complications du diabète et en particulier celles qui résultent d’une micro angiopathie. Les pédiatres qui s’occupent de diabète ont essayé de comprendre les raisons du déséquilibre du diabète à cette période de la vie. Certaines sont d’ordres somatiques et relativement bien cernées. La période pubertaire est marquée par une résistance à l’insuline. Cette résistance existe évidemment chez l’adolescent diabétique et rend la gestion de l’insulinothérapie plus difficile. L’augmentation de l’hormone de croissance (GH) du facteur de croissance GH dépendant (IGF1) est nécessaire au développement normal pubertaire et il est souvent anormal chez l’adolescent diabétique avec une GH élevée et un taux d’IGF1 bas. Bien évidemment, l’adolescence n’est pas uniquement marquée par une évolution physique et une maturation sexuelle. C’est l’époque de la vie où débute le processus de séparation de la cellule familiale, d’indépendance et que s’affirme la personnalité du jeune adulte. Pour que ce processus se développe avec harmonie, il faut que naissent une confiance en soi, une estime personnelle indispensable à cette maturation ainsi qu’une relation de confiance et de compréhension de la part des parents. La maladie chronique - le diabète – va rendre ce processus complexe parfois impossible chez certains adolescents. Pour les parents, la période est aussi compliquée. Alors qu’ils ont veillé avec soin au « bon contrôle » du diabète depuis plusieurs années, il leur faut transférer cette charge à leur enfant. C’est parfois difficile voir impossible. Certains parents sont trop protecteurs, étouffent l’adolescent. D’autres au contraire, les laissent totalement libres alors qu’ils ne savent pas, et ne peuvent pas gérer leur diabète. Il n’est donc pas surprenant que, d’une part, l’évolution de la maladie soit moins simple et que, d’autre part, les processus psychiques qui se mettent en place à l’adolescence soient perturbés et conduisent à des anomalies psychiatriques de gravité variable. L’adolescent est en période de vulnérabilité encore plus grande en situation de maladie chronique telle que le diabète. L’équipe soignante dans ce contexte n’a guère le choix et doit rester garante de « l’ordre médical » Le médecin, pédiatre, diabétologue doit continuer a affirmer son désaccord avec l’attitude « déviante » de l’adolescent diabétique et dire de manière malheureusement répétitive qu’il n’est pas complice du « mauvais » traitement. Cela permet de garder intact le rôle du soignant. Mais par ailleurs, il ne faut pas rompre le dialogue médical, accompagner à tous prix cela permet d’attendre le moment ou l’adolescent aura compris qu’il doit préserver son corps fragile et qu’il doit s’en occuper plus et lui, mieux que qui conque. C’est un programme difficile auquel doit collaborer tous les soignants. Le médecin pédiatre référent et le pédiatre qui joue un rôle essentiel dans la « prolongation » du message médical, dans son application et son décryptage auprès des parents. Seule cette collaboration rend compréhensible un message médical complexe. 12
Quelle vie après un cancer traité dans l’enfance ? Danièle SOMMELET, Hôpital d’Enfants, Onco-hématologie pédiatrique, Vandoeuvre- Nancy, Entre 0 et 18 ans, 2000 nouveaux cas de cancers sont observés en France chaque année. Le taux de guérison étant passé de 25 % avant 1970 à 75 % actuellement, on admet qu’en 2010 1/850 sujets âgés de 20 à 45 ans aura survécu à un cancer traité dans l’enfance, ce qui correspond à plus de 25 000 personnes. La nécessité d’un suivi à long terme s’est imposée rapidement pour évaluer, décrire, traiter et prévenir les risques de mortalité tardive et de morbidité. L’incidence et le degré de sévérité des séquelles physiques dépendent du type et de la localisation du cancer, de son traitement, de l’âge au diagnostic ; le retentissement psychologique, familial et socio-professionnel est aussi une composante potentielle importante de cette morbidité. L’activation de Groupes d’Etude des Effets Tardifs (Royaume Uni, Pays Bas, Allemagne, l’Amérique du Nord) et de Registres Nationaux des Cancers, a permis d’évaluer l’incidence de cette morbidité autour de 60% et le risque cumulé de mortalité tardive à 14 %, 25 ans après le diagnostic. Des structures de prise en charge à long terme ont été proposées, en liaison avec des généralistes et des spécialistes d’adultes. Les objectifs d’un suivi systématique prolongé des patients, débutant 2 ans après la fin du traitement et durant en théorie toute la vie sont les suivants : l’évaluation de la qualité de vie des patients ; la prise en charge adaptée de complications connues ou prévisibles ; leur retombée dans l’élaboration des recommandations et des essais thérapeutiques (« guérir plus et guérir mieux ») ; l’amélioration du soutien psychologique et socio-familial ; la transmission d’un éventuel conseil génétique ; le mode de vie des sujets « guéris : nutrition, conduites addictives, accès à l’emploi, sédentarité… En France, nous manquons d’informations sur les modalités de suivi et l’évaluation de la qualité de la guérison ainsi que de structures individualisées pour assurer ce suivi et la transition avec les médecins d’adultes. Il s’agit là d’un problème commun à beaucoup de maladies chroniques diagnostiquées dans l’enfance, mais les spécificités sont les suivantes : les séquelles possibles sont polymorphes et parfois décelées longtemps après ; les conséquences psychologiques et socio-familiales ou professionnelles relèvent de propositions individualisées. Organisation du suivi : règles et difficultés Le suivi des patients doit être proposé, recommandé, mais ne peut être imposé ; il convient de tenir compte du risque de méconnaître un problème grave (par exemple une cardiomyopathie tardive), de l’angoisse entretenue par une surmédicalisation ou au contraire du besoin d’être rassurés et soutenus. Le suivi précoce, dans les 5 à 10 premières années, est en règle beaucoup mieux accepté (rôle des parents) qu’à l’âge adulte. La surveillance régulière et prolongée de tous les patients a un coût et il serait important de pouvoir démontrer son efficacité (rythme et nature des examens complémentaires). Enfin, les séquelles évoluent avec les modalités thérapeutiques : leur renforcement, leur désescalade. L’organisation du suivi requiert une structuration régionale et nationale et une articulation internationale pour certaines études ; elle doit avoir un impact individuel et collectif. Au niveau régional : Des procédures générales de suivi individuel, dépendant du type de cancer et du traitement sont proposées et figurent en règle dans les protocoles thérapeutiques. Leur application demeure néanmoins variable selon : les Centres de références en cancérologie pédiatrique ; la délégation, en règle partielle, de cette surveillance à des hôpitaux de proximité et/ou aux médecins traitants (pédiatres, généralistes) ; l’âge et l’acceptation du patient. La prise en charge doit être multidisciplinaire, tout comme le traitement initial du patient, mais les spécialistes sont multiples en fonction de l’organe touché. Les oncopédiatres, en relation avec d’autres pédiatres spécialisés, assurent en règle le suivi de patients bien au-delà de l’âge de 20 ans, 13
en raison de leurs compétences, mais aussi d’un attachement réciproque soignants-soignés. Les problèmes scolaires, psychologiques, sociaux et professionnels, nécessitent des intervenants multiples et peu formés, travaillant dans des structures souvent cloisonnées, sources de ruptures (par exemple : difficultés de réinsertion après traitement pour tumeur cérébrale). Quand le patient est devenu un adulte, il est logique qu’il puisse bénéficier de la poursuite d’une surveillance adaptée à ses besoins et à sa demande dans un environnement approprié. Mais il est indispensable aussi à l’équipe de cancérologie pédiatrique d’être tenue au courant et même de contribuer à cette prise en charge, afin d’éviter une rupture dans l’approche personnalisée du patient et l’enrichissement des connaissances sur leur devenir à long terme. Le médecin traitant conserve bien entendu une place majeure, à condition de recevoir des recommandations appropriées à chaque cas ; leur place dans les Réseaux de Cancérologie doit leur garantir formation et valorisation en relation avec une « clinique de suivi » des adultes « guéris » d’un cancer pédiatrique, associant : un oncologue médical ou un interniste, un oncopédiatre, un radiothérapeute, des spécialistes d’organes formés, des infirmières formées à la cancérologie, un psychologue et/ou un psychiatre, une assistante sociale, un généticien. Le patient et sa famille doivent être en possession de tous les documents utiles à la connaissance de sa pathologie, du traitement reçu, des éléments et du rythme de sa surveillance. L’accès informatique sécurisé à un dossier médical partagé est devenu indispensable. Au niveau national : les données individuelles recueillies doivent être transmises - à un Registre National des Cancers de l’Enfant ; - à un Groupe national d’Etudes des Effets à long terme, en charge de l’exploitation épidémiologique de ces données, de leur transmission aux responsables de comités et protocoles, de la révision des procédures de suivi, de la proposition de conseils de prise en charge des patients. Au niveau international il est indispensable d’assurer la place de notre pays au sein des évaluations épidémiologiques et des études comparatives des politiques de Santé Publique. 14
Les maladies psychiatriques Pr Philippe JEAMMET (Institut Mutualiste Montsouris) Un rapport récent de l’Académie de Médecine1 sur la santé mentale de l’enfant relève que de multiples indices donnent à penser que la santé mentale n’est pas satisfaisante chez une proportion notable d’enfants comme le soulignent divers rapports2, articles et livres, ainsi que la récente expertise collective de l’Inserm3. Il rappelle que les adolescents français sont, dans l’Union Européenne, parmi ceux qui fument le plus, boivent le plus, consomment le plus de cannabis (avec une augmentation particulièrement rapide de cette consommation depuis dix ans), se suicident le plus, sont le plus victimes d’accidents en particulier de la voie publique, sont le plus souvent contaminés par le virus du VIH et les plus gros consommateurs de somnifères et de tranquillisants. La France est aussi un pays où l’obésité infantile est très marquée, s’est développée rapidement et est d’autant plus répandue que ces enfants appartiennent à des milieux dont le niveau socioculturel est moins élevé. Il faut enfin prendre en compte la violence et l’incivilité qui sont d’autres symptômes d’un malaise grave des jeunes. Ces troubles, apparemment très disparates, sont fortement corrélés entre eux et apparaissent être liés au niveau socioculturel des familles et au niveau de sécurité apporté par la structure familiale. Comme le dit l’OMS, santé physique, santé mentale et santé sociale doivent être considérées globalement. La loi de 1970 prescrivait 20 examens systématiques entre 0 et 6 ans et valorisait 3 de ces examens en les complétant d’un certificat médical obligatoire à la naissance, 9 mois et 24 mois, ces examens devant être, par la suite, complétés par les bilans de santé réalisés à l’école maternelle par la PMI (3 à 4 ans), puis par la médecine scolaire à l’entrée à l’école élémentaire (5 à 6 ans). L’objectif était de dépister les anomalies de développement physique et psychique et d’instituer un traitement d’autant plus efficace que précoce. Des résultats appréciables ont été obtenus, notamment dans le surveillance de la croissance et le dépistage des anomalies sensorielles. Mais ce programme est malheureusement très diversement appliqué en France et il existe de fortes inégalités départementales. De ce fait, une partie non négligeable des troubles de l’enfant demeurent méconnus. Chez l’enfant, certains troubles sont assez fréquents (troubles du comportement avec ou sans hyperactivité, troubles des apprentissages), d’autres ne présentent pas nécessairement une incidence et une prévalence aussi importante que chez l’adulte (en particulier pour ce qui concerne les troubles anxieux ou dépressifs) mais les enquêtes longitudinales montrent que ces troubles de l’enfance sont retrouvés dans les antécédents des adolescents à problèmes. L’équilibre psychologique du jeune enfant et son bien-être, l’image qu’il a de lui même, retentiront sur la santé mentale de l’adolescent, et c’est pendant l’adolescence que s’acquièrent les comportements à risque (tabac, alcool, déséquilibres alimentaires, manque d’exercice physique, violences contre les autres et contre soi-même, etc…) qui handicapent la santé de l’adulte. Santé mentale et santé physique sont étroitement liées. Une des meilleures préventions des troubles de l’adolescence consiste en un repérage et un soin efficace des difficultés de l’enfance. De plus quelle que puisse être la multiplicité des facteurs qui favorise leur apparition, les symptômes comme les troubles du comportement acquièrent une fonction de langage et de maîtrise de la distance relationnelle entre l’enfant et l’adolescent et son environnement. A ce titre ils s’adressent toujours à autrui et sont une façon d’être enfin vu et reconnu. Mais en même temps ils sont une façon pour le jeune de marquer sa différence et d’échapper au pouvoir de l’adulte tout en sollicitant son attention. 1 Rapport sur la santé mentale de l’enfant de la maternelle à la fin de l’école élémentaire. 2 Notamment le rapport du Haut Comité de Santé Publique : santé des enfants, santé des jeunes. Paris La documentation française 1997. 3 Inserm. Expertise Collective : troubles mentaux – Dépistage et prévention chez l’enfant et l’adolescent. Inserm 2002. 15
Il risque alors d’osciller, dans ses relations, d’une excessive proximité en quête d’appui à une rupture ou à un éloignement brutal, sauvegarde de son indépendance. A ce paradoxe central du développement de l’enfant et de l’adolescence qui fait de c don ton a besoin une menace pour l’autonomie , les conduites d’opposition s’offrent comme une solution. Elle se présentent comme un compromis possible par lequel l’adolescent s’appuie sur ceux auxquels il s’oppose, tout en affirmant, en s’opposant, son apparente indépendance. Malheureusement les habituelles oppositions banales et constructives de l’adolescence peuvent se transformer en de conduites plus graves de conséquences par lesquelles l’adolescent attaque et sabote ses potentialités, voire son corps. Il dégrade alors son image de lui-même, renforce sa dépendance et la nécessité où il se trouve de s’opposer davantage, s’enfermant alors dans des comportements négatifs qui s’auto-entretiennent et s’auto-renforcent en un cercle vicieux dangereux. Ces comportements interrogent particulièrement les adultes dans leurs capacités à préserver ce lien dont les enfants et les adolescents ont un besoin tel que, ne pouvant le tolérer, ils le mettent sans cesse à l’épreuve ; C’est aux adultes à chercher les aménagements relationnels qui rendent la relation tolérable et profitable aux jeunes. La diversité de nos approches peut faciliter la réponse et garantir une certaine richesse, si tant est qu’elle ne se fasse pas dans l’incohérence et la confusion, mais au contraire s’appuie sur un minimum de compréhension commune des enjeux de cet âge. 16
LA PLACE DU MEDECIN GENERALISTE DANS LA DETECTION PRECOCE DU HANDICAP 17
Découverte d'anomalies in utero comment progresser vers un diagnostic ; prise en charge familiale Pr Alain Verloes, Unité de Génétique Clinique, Fédération de Génétique, Hôpital Robert Debré. La découverte d'une anomalie foetale survient dans 2 circonstances très distinctes: l'examen prénatal est suscité ou orienté par un antécédent personnel ou familial qui place les parents d'emblée dans un groupe "à risque", ou l'anomalie est une découverte de hasard, au cours d'un examen systématique, éventuellement justifié par un test de dépistage maternel anormal. Affronter une grossesse "à risque" pour une pathologie connue, observée dans la famille, dont les conséquences peuvent être dramatiques (handicap physique et/ou mental, létalité précoce ou retardée) demeure une épreuve humainement difficile : des questions éthiques, psychologiques et affectives foisonnent, que peuvent susciter la décision de mettre en route une grossesse dont l'issue peut être menacée et qui peut conduire à une décision d'IMG . Le MG peut et doit jouer un rôle dans l'accompagnement, le soutien et l'information des couples avant la grossesse, et lorsqu'une récidive est diagnostiquée. Plusieurs points devraient idéalement être éclaircis avant toute décision de grossesse. Dans l'optique du médecin généraliste (MG), le temps le plus important est celui de la reconnaissance de la situation "à risque", dont les patients peuvent ne pas être conscient, surtout lorsque le cas index de la famille n'est pas un enfant du couple. Adresser le couple à la consultation de génétique avant toute grossesse est une étape cruciale. Il faudra s'assurer de l'exactitude du diagnostic chez le patient index, et établir en conséquence le risque de récurrence. Cette étape peut être longue, et nécessiter des investigations complémentaires peu ou pas compatibles avec l'urgence gravidique. Une fois documentée la situation du cas index, les stratégies de diagnostic prénatal (DPN) pourront être esquissées, avec plusieurs modalités: un DPN est-il possible ? Si oui, le diagnostic de récidive peut-il être fait précocément (sur villosités choriales) ou plus tardivement (par imagerie, sur liquide amniotique,...), voire seulement en fin de grossesse. Le pronostic peut-il être fixé de façon simple par le DPN (anomalie chromosomique autosomique, SMA, X fragile chez un garçon...) , ou la sévérité de la maladie est-elle à ce point variable que le diagnostic prénatal ne permet d'établir ce pronostic qu'en terme probabiliste (X fragile chez une fille,...) Quelle attitude envisager en cas de DPN positif ? Le diagnostic fortuit d'une anomalie foetale pose d'autres problèmes. Ce diagnostic survient le plus souvent lors d'un examen échographique de routine, plus rarement suite à un examen cytogénétique justifié par un signe d'appel non spécifique (marqueurs sériques, âge maternel...) Ici, le challenge est d'abord d'aider et de soutenir le couple face à cette découverte inopinée, confronté aux délais et aux incertitudes du DPN. Confirmer la gravité d'une pathologie foetale prend du temps, nécessite des investigations répétées ou étalées dans le temps. Le pronostic peut se modifier avec l'évolution des signes d'appel (dillatation ventriculaire, uropathie,...) ou demeurer incertain et probabiliste (anomalies gonosomiques...) Là encore, le MG peut être d'un grand secours pour la prise en charge psychologique du couple, pour les explications qu'il peut fournir aux hésitations et aux incertitudes des professionnels du DPN, pour un avis "extérieur", ou pour aider les parents à opter entre une attitude conservative et une IMG. Enfin, dans tous les cas de figure, le MG, plaque tournante du suivi médical de la famille, pourra jouer un rôle crucial dans la coordination de l'encadrement médical de l'enfant né avec un handicap dépisté par le DPN et dans le soutien psychologique et social de sa famille. Si la grossesse a été interrompue, il pourra être amené à expliquer les résultats des examens post-mortem, et, le cas échéant, à réorienter le couple vers les services spécialisés (foetopathologie, génétique) pour une information plus complète ou de nouveaux examens. 18
Dans toute les situations évoquées ci-dessus, il est indispensdable et fondamental qu'un dialogue puisse s'installer entre le MG et les équipes impliquées dans le DPN, car de toutes les épreuves qu'affrontent un couple chez qui une anomalies a été découverte in utero, la discordance entre les discours médicaux est l'une des plus déstabilisante et des plus anxiogène. 19
En période périnatale, indications chirurgicales très précoces Delphine Mitanchez, Elizabeth Walter-Nicolet, Sylvie Séguret, Philippe Hubert Unité de réanimation néonatale, hôpital Necker-Enfants Malades, Paris. Certaines pathologies malformatives dépistées durant la vie fœtale nécessitent une prise en charge chirurgicale précoce dès la naissance. Dans certaines situations, le bien-fondé de la chirurgie doit être discuté en fonction du risque de séquelles ultérieures. La hernie de coupole diaphragmatique congénitale (HCD) est le résultat d’un défect de la cloison musculo-aponévrotique qui sépare la cavité thoracique de la cavité abdominale. Ce défect entraîne, pendant la vie fœtale, le passage des viscères abdominaux dans le thorax. Il en résulte un développement pulmonaire anormal avec hypoplasie pulmonaire exposant au décès ou au risque d’insuffisance respiratoire chronique. L’incidence de l’HCD est de l’ordre de 1/2000 grossesses. Elle peut être isolée ou associée à des anomalies chromosomiques ou d’autres malformations. Nous n’envisagerons ici que le cas des HCD isolées. Cette malformation est le plus souvent diagnostiquée au cours de l’échographie du deuxième trimestre. Plusieurs critères pronostiques sont établis sur les données de l’échographie ou de l’IRM fœtale. L’objectif est de tenter d’établir un pronostic en terme de survie ou de difficultés de prise en charge néonatale. La combinaison des différents critères aboutit à la détermination de trois groupes pronostic : favorable, défavorable ou incertain. Pour un individu donné, aucune de ces catégories n’a de valeur de certitude et bien souvent la grossesse se poursuit dans un climat d’incertitude quant aux risques pour l’enfant à naître. Le médecin de famille, sollicité au cours de cette période pour répondre à différentes interrogations, est un interlocuteur important entre l’équipe hospitalière et les parents pour expliquer la pathologie et les soutenir dans leur décision de poursuivre ou d’interrompre la grossesse. La prise en charge néonatale immédiate est médicale, la chirurgie étant différée de quelques jours. Cette période permet de stabiliser la situation respiratoire et hémodynamique et d’évaluer les capacités respiratoires de l’enfant. Le pronostic post-natal est lié au problème de l’hypoplasie pulmonaire qui entraîne une diminution des surfaces d’échanges gazeux et une altération de la vascularisation pulmonaire à l’origine d’une hypertension artérielle pulmonaire. Trois modes d’évolution sont possibles : décès rapide en quelques heures par insuffisance respiratoire sévère non contrôlée par les moyens de réanimation, absence de stabilisation de l’état hémodynamique et respiratoire et décision de ne pas réaliser l’intervention chirurgicale en raison du risque de handicap respiratoire majeur, stabilisation et chirurgie programmée au cours de la première semaine de vie. En cas d’évolution défavorable, le médecin traitant représente pour la famille un interlocuteur de confiance afin de discuter de l’attitude thérapeutique la plus appropriée à la situation. Parmi les enfants opérés qui ont survécu, des séquelles peuvent persister à moyen et à long terme. La dysplasie broncho-pulmonaire est secondaire à la fragilité du poumon hypoplasique mais aussi à l’agressivité de la ventilation et à l’oxygénothérapie néonatale. La capacité pulmonaire totale, la capacité résiduelle fonctionnelle et la capacité de diffusion s’améliorent au cours des premières années de vie. En revanche, le dysfonctionnement du diaphragme ne s’améliore pas avec la croissance. Le reflux gastro-oesophagien est fréquemment associé, s’accompagnant dans certains cas de troubles digestifs importants et d’un retard de croissance. Un geste chirurgical anti-reflux doit alors être envisagé. L’apparition d’une scoliose est à surveiller surtout en cas de réparation du diaphragme à l’aide d’une plaque. Enfin, certains enfants présentent des anomalies du développement psychomoteur, probablement secondaires à la réanimation intensive néonatale. Ces observations soulignent l’intérêt de la surveillance à long terme des enfants opérés d’une HCD dans laquelle le médecin de famille est impliqué à part entière. 20
Repérage du handicap chez les grands prématurés organisation d'un réseau de suivi Dr Véronique ZUPAN SIMUNEK et l’Association pour le Suivi des Nouveau-nés à Risque Les grands prématurés (nés avant 33 semaines d’âge gestationnel), qui représentent environ 1% des nouveau-nés, sont une population à risque de troubles du développement : • Les infirmités motrices (5 % à 10 %) se démasquent au cours des 12 premiers mois de vie ou au plus tard avant 2 ans ; • Les troubles cognitifs et les troubles du comportement (25 % à 50 % selon l’âge gestationnel) sont plus longs à s’exprimer : 2-3 ans minimum. Faute de dépistage, c’est souvent par des difficultés à l’école (troubles de l’attention, hyperactivité ou inhibition, troubles du langage, maladresse, pauvreté du graphisme …) qu’on découvre les problèmes. Après le dépistage, un bilan neuropsychologique approfondi est nécessaire pour adapter la rééducation (psychomotricité, ergothérapie, orthophonie, etc.). • Les troubles sensoriels : 1 % de surdité ; 25 % à 50 % de problèmes ophtalmologiques (strabisme, troubles de réfraction, amblyopie). Un suivi spécifique régulier et prolongé permet de dépister ces troubles, d’accompagner les familles et de leur offrir une prise en charge optimale. La méconnaissance des troubles expose à l’amplification des problèmes : désarroi des familles, « zapping » médical, aggravation des troubles psychologiques associés, échec de l’intégration scolaire, etc. Malheureusement ces situations sont fréquentes faute d’organisation suffisante du suivi. L’Association pour le Suivi des Nouveau-nés à Risque est promotrice d’un réseau ville- hôpital (en région sud et ouest francilienne) cherchant à mieux organiser le suivi et le dépistage. Les partenaires de proximité (libéraux, PMI), essentiels dans ce dispositif, ont pour missions : - Le suivi médical et l’accompagnement des familles après la sortie de l’hôpital (ces dernières font souvent état d’un grand désarroi après la sortie de néonatologie) ; - La sensibilisation des familles à la nécessité d’un suivi spécifique prolongé (7 ans) ; - La participation au suivi spécifique du réseau (protocole de suivi, bilans aux âges clés) : soit directement (formation spécifique), soit en adressant l’enfant à un autre partenaire du réseau (consultation hospitalière ou centre d’action médico-sociale précoce). - La transmission des données du suivi au centre coordonnateur. Ce centre coordonnateur aide si besoin à l’orientation diagnostique (bilans neuromoteurs, neuropsychologiques et sensoriels). Il aide aussi à l’orientation thérapeutique vers un centre de soins (centre d’action médico-sociale précoce, centre médico-psychologique etc.) ou vers une prise en charge en libéral selon les besoins : kinésithérapie, psychomotricité, ergothérapie, orthophonie, soutien psychologique etc. 21
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