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Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Décharge “L’ENSEA N’ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION, NI IMPROBATION AUX OPINIONS ÉMISES DANS CE MÉMOIRE, ELLES DOIVENT ÊTRE CONSIDÉ- RÉES COMME PROPRES A LEURS AUTEURS” Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 1
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Dédicace A TOUTES LES FILLES DE PAR LE MONDE QUI SONT VICTIMES DE MUTILATIONS GÉNITALES Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 2
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Table des matières Décharge 1 Dédicace 2 Avant-propos 5 Remerciements 7 Liste des sigles et abréviations 8 Résumé / Abstract 11 0 Introduction générale 12 0.1 Contexte et justification du thème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 0.2 Intérêt du sujet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 0.3 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 0.4 Les hypothèses de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 0.5 Plan du document . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 I CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL (GÉNÉRALI- TÉS) 16 1 Notions de religion et excision 17 1.1 Notion d’excision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 1.2 Notion de religion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 1.3 Causes et conséquences de la pratique de l’excsion . . . . . . . . . . . . . . 19 2 Revue de littérature 22 2.1 Christiannisme et excision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 2.2 Islam et excision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 3 Données et sources de données 29 3.1 Présentation des données d’Abidjan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 3.1.1 Taille d’échantillon et procédures d’échantillonnage . . . . . . . . . 30 3.1.2 Collecte des données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 3.1.3 Traitements, exploitation des données et méthodes d’analyse . . . . 30 3.2 Présentation des données de l’enquête d’intérieur . . . . . . . . . . . . . . 31 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 3
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 3.2.1 Zone d’enquête . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 3.2.2 Stratification et domaines d’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 3.2.3 Mode de tirage de l’échantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 3.2.4 Base de sondage des unités primaires . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 3.2.5 Documents de collecte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 3.2.6 Dénombrement des ménages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 3.2.7 Saisie et traitement des données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 3.2.8 Analyse des données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 3.3 Traitements relatifs aux bases de données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 II CADRE MÉTHODOLOGIQUE ET EMPIRIQUE 35 4 Analyse descriptive et premiers résultats 36 4.1 Caractéristiques de la population des individus enquêtés . . . . . . . . . . 36 4.1.1 Caractéristiques de la population des femmes excisées . . . . . . . . 36 4.1.2 Caractéristiques de la population des femmes non excisées . . . . . 38 4.1.3 Caractéristiques de la population des individus ayant l’intention d’exciser leurs filles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 4.1.4 Caractéristiques de la population des individus n’ayant pas l’inten- tion d’exciser leur fille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 4.2 Résumé des principales caractéristiques des populations étudiées . . . . . . 42 4.3 Présentation des résultats de tests d’indépendance effectués . . . . . . . . 43 5 Analyse multivariée : analyse en composante principale et classification 46 5.1 Choix de l’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 5.1.1 Présentation des variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 5.1.2 Choix et interprétation des axes factoriels . . . . . . . . . . . . . . 47 5.2 Classification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 5.2.1 Classe 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 5.2.2 Classe 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 5.2.3 Classe 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 5.2.4 Classe 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 5.3 Recherche des causes évoquées par les pratiquants de l’excision . . . . . . 48 Conclusion 53 Présentation des résultats de l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Limites de l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 Recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 Références bibliographiques 56 Annexes 57 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 4
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Avant-propos L’école nationale supérieure de statistique et d’économie Appliquée (ENSEA) est une école publique qui a pour vocation la formation en deux ans de cadres qui reçoivent un enseignement et acquièrent la pratique des techniques leur permettant de diriger l’exécution des travaux statistiques, de participer à la conception des enquêtes et de collaborer à la préparation des programmes économiques. Elle prépare au diplôme d’Ingénieur des Travaux Statistiques qui sanctionne un cycle d’enseignement orienté vers les techniques appliquées de la statistique et de l’économie, sans négliger pour autant l’acquisition de solides bases théoriques. La 16ieme promotion des Ingénieurs des Travaux Statistiques a commencé sa formation le 26 septembre 2010, formation qui suit son cours à la date de production de ce document. L’objectif de ce travail académique est d’initier les étudiants aux travaux de recherche scientifique et surtout les préparer à la rédaction de leur mémoire de fin de formation qui se fera à l’issue d’un stage d’apprentissage d’une durée de 3 mois. La rédaction de ce document s’est faite sous la supervision d’un Directeur de Recherche qui nous a suivi tout au long de l’évolution de notre étude dont le thème est “religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire”. L’étude s’est faite sur la base de l’enquête VBG 2007 1 dont la première phase s’est déroulée à Abidjan suivi de la seconde phase à l’intérieur du pays dans 8 départements 2 . Le but de ce rapport est triple. D’abord, comme dit plus haut, il permet de familiariser l’étudiant à la recherche scientifique ainsi qu’à la préparation de la rédaction de son mémoire. Ensuite, il est un cadre pratique d’application des connaissances acquises par l’ITS 3 tout au long de ses deux années de formation. Enfin, le thème de recherche confié à l’étudiant répondant à une préoccupation de la vie de tous les jours que ce soit sur la plan social, économique ou alors démographique le document produit peut aussi servir d’éclairage à la prise de décision au niveau du politique afin d’améliorer le bien-être de la population. Par ailleurs, les générations à venir pourront aussi s’inspirer de la méthodologie, des résultats et des conclusions formulés dans ce document dans le cadre de leur propre recherche. Si vous tenez ce document entre les mains cela signifie que vous êtes probablement intéressé par la thématique de l’excision. Tout en espérant que ce document contribuera à 1. Violences basées sur le genre 2. Bouaké, Daloa, Danané, Duékoué, Guiglo, Korhogo, Man et Yamoussoukro 3. Ingénieur des Travaux Statistiques Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 5
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 répondre à un certain nombre de préoccupations qui sont vôtre nous vous souhaitons une agréable lecture. Les auteurs Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 6
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Remerciements En Afrique, un vieux dicton affirme “une seule main ne peut attacher convenablement un paquet”. Ce dicton est d’autant plus vrai dans la mesure où ce document que vous tenez entre les mains, fruit de plusieurs mois de recherche peut être considéré comme ledit paquet. En effet, la rédaction de ce document aurait été difficilement concevable sans les conseils et l’assistance directe ou indirecte de nombreuses personnes Ainsi, nous tenons à exprimer notre gratitude à l’égard de notre Directeur de Recherche Monsieur SIKA Lazare dont les précieux conseils, l’assistance et le suivi nous ont permis d’arriver au bout de ce challenge. Il a bien voulu nous consacrer de son temps malgré son agenda extrêmement rempli. Nous remercions également notre Directeur des études Monsieur KOUAKOU N’Goran Jean Arnaud qui nous a inculqué la valeur travail tout au long de notre formation. Nous remercions le Directeur de l’ENSEA Monsieur KOFFI N’Guessan qui nous a enseigné un nouvel esprit, celui du développement de l’Afrique que nous croyons pouvoir sauver des maux qui minent sont développement. Nos remerciements vont également à l’endroit de tout le personnel enseignant et admi- nistratif de l’ENSEA qui ne cessent d’œuvrer afin que celle-ci soit un “Centre d’excellence en Afrique de l’Ouest”. Qu’il nous soit permis de remercier ici nos camarades de classe ITS 2 avec qui nous avons traversé ces deux années pas les plus faciles mais d’autant plus passionnantes qu’elles nous ont permis d’échanger tant sur le plan culturel qu’académique. Nous remercions également les camarades qui ont bien voulu relire ce document et faire des remarques afin que nous puissions l’améliorer au quotidien. Que tous trouvent ici l’expression de toute notre gratitude à leur égard. Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 7
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Liste des sigles et abréviations ACM : Analyse des correspondances multiples CAH : Classification ascendante hiérarchique CDE : Convention sur les droits de l’enfant CEDEF : Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes CEDIF : Comité élargi de défense des individus et des familles DR : District de recensement E/MGF : Excision / Mutilations génitales féminines ECOSOC : Conseil économiques et social des Nations Unies EDS : Enquête démographique et santé EIS : Enquête sur les indicateurs du SIDA ENSEA : École Nationale Supérieure de Statistique et d’Économie Appliquée INS : Institut national de la statistique ITS : Ingénieur des Travaux Statistiques ITS 2 : Ingénieur des Travaux Statistiques deuxième année MGF : Mutilations génitales féminines MICS : Enquête à indicateurs multiples OMS : Organisation mondiale de la santé ONG : Organisation non gouvernementale PNUD : Programme des Nations Unies pour le développement RCA : République CentrAfricaine RDC : République Démocratique du Congo RGPH : Recensement Général de la Population et de l’Habitation SIDA : Syndrome d’immunodéficience acquise SPAD : Système portable pour l’analyse des données SPSS : Statistical package for social science UNFPA : Fonds des Nations Unies pour la population UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l’enfance UNIFEM 4 : Fonds des Nations Unies pour la femme VBG : Violences basées sur le genre VIH : Virus d’immunodéficience humaine WHO : World health organization Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 8
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Table des figures 4.1 Répartition en pourcentage des femmes excisées selon l’appartenance à un groupe ethnique (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . . . 37 4.2 Répartition en pourcentage des femmes excisées selon l’appartenance à un groupe religion (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . . . 37 4.3 Répartition en pourcentage des femmes non excisées selon l’appartenance à un groupe religieux (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . 39 4.4 Répartition en pourcentage des femmes non excisées selon le groupe ethnique (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 4.5 Répartition en pourcentage des individus ayant l’intention d’exciser leurs filles selon la religion (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . 40 4.6 Répartition en pourcentage des individus ayant l’intention d’exciser leurs filles selon le groupe ethnique (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) 40 4.7 Répartition en pourcentage de la population des individus n’ayant pas l’intention d’exciser leurs filles selon la religion (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 4.8 Répartition en pourcentage de la population des individus n’ayant pas l’intention d’exciser leurs filles selon le groupe ethnique (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 4.9 Résumé des principales caractéristiques de la population des femmes excisées, non excisées et des individus ayant l’intention d’exciser ou non leurs filles (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire (nos estimations d’après la base de données)) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 4.10 Présentation des résultats de p-value des tests d’indépendance effectués entre les variables X et Y (Source : Enquête VBG 2007, nos calculs sous Stata) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 4.11 Répartition des femmes selon leur statut d’excision ainsi que celui de leurs filles (Source : Enquête VBG 2007) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 4.12 Répartition des femmes selon leur statut d’excision et selon l’intention de faire exciser leurs filles (Source : Enquête VBG 2007) . . . . . . . . . . . . 44 5.1 Proportion des individus justifiant la pratique de l’excision comme nécessité religieuse ou non (Source : Enquête VBG 2007) . . . . . . . . . . . . . . . 49 5.2 Proportion des individus justifiant la pratique de l’excision comme bonne tradition ou non (Source : Enquête VBG 2007) . . . . . . . . . . . . . . . . 50 5.3 Répartition en pourcentage des individus selon le groupe ethnique et du motif évoqué pour justifier la pratique de l’excision (Source : Enquête VBG 2007) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 9
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 5.4 Répartition en pourcentage des individus selon le groupe ethnique et du motif évoqué pour justifier la pratique de l’excision (Source : Enquête VBG 2007) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 5.5 Répartition des individus pratiquant l’excision selon la religion ainsi que la raison évoquée (Source : Enquête VBG 2007, Côte d’Ivoire) . . . . . . . . . 51 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 10
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Résumé / Abstract L’excision est une pratique qui remonte depuis l’Egypte antique et qui n’a cessé de se perpétuer au fil des ans. Les raisons évoquées pour justifier ce phénomène sont nombreuses comme le soulignent les auteurs qui ont travaillé sur la question 5 . Depuis le motif de préservation de la vie de couple en gardant la femme vierge jusqu’au mariage à la nécessité religieuse en passant par les coutumes et traditions les raisons ne manquent pas. Cette étude dont le thème porte sur la religion et la pratique de l’excision en Côte d’Ivoire, nous a permis de mettre en évidence deux facteurs déterminants dans le cadre de la pratique de l’excision en Côte d’Ivoire. Il s’agit bien entendu de la religion et du groupe ethnique. Ces deux facteurs étant aussi fortement corrélés. La religion musulmane est apparue comme celle où la proportion des femmes excisées est la plus élevée ce qui n’est pas le cas chez les chrétiens et animistes. Les Mande du Nord apparaissent comme le groupe ethnique où l’excision des filles est très fréquente. Ce peuple est par ailleurs, très favorable à la perpétuation de l’excision. A l’opposé, les Akan qui sont un peuple à majorité chrétienne (catholique et protestant) sont moins enclins à exciser leurs filles et présentent une faible prévalence de l’excision. Female circumcision is a practice dating from ancient Egypt and who has continued to be perpetuated over the years. The reasons given to justify this are many, as the authors point out that worked on the issue. Since the motive of preserving life by keeping the torque virgin until marriage to religious necessity through the customs and traditions the reasons are not lacking. This study focuses on the theme of religion and the practice of female circumcision in Ivory Coast, has allowed us to highlight two key factors in the practice of female circumcision in Côte d’Ivoire. This is of course religion and ethnicity. These two factors are also highly correlated. The Muslim religion has emerged as one where the proportion of circumcised women is the highest which is not the case among Christians and animists. The Northern Mande ethnic group appears as where female circumcision is very common. This people are also very favorable to the perpetuation of female circumcision. In contrast, the Akan people who are predominantly Christian (Catholic and Protestant) are less likely to circumcise their daughters and have a low prevalence of female circumcision. 5. Voir chapitre 2, revue de littératuure Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 11
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Chapitre 0 : Introduction générale 0.1 Contexte et justification du thème Les violences basées sur le genre font partie des formes les plus graves d’atteinte aux droits de l’Homme car elles sont dirigées vers des individus en raison de leur appartenance à un groupe spécifique, particulièrement à un genre donné (homme ou femme). Elles font l’objet des enquêtes VBG (violences basées sur le genre) notamment l’enquête VBG 2007 sur laquelle se basera notre étude. L’expression « violences basées sur le genre » englobe bon nombre de pratiques dégradantes qui vont des violences physiques aux mutilations génitales féminines (MGF) en passant par toutes les autres formes de violences psycholo- giques, verbales et économiques. Comme le souligne bien l’UNICEF dans son rapport « Violences faites aux femmes en Afrique de l’ouest et du centre », les exemples de violences physiques, la forme la plus répandue, atteste de l’universalité du phénomène. Que ce soit au Canada, aux Pays-Bas, au Sri Lanka, en Zambie, en Tanzanie, au Ghana ou en République démocratique du Congo, l’ampleur de ces violences justifie qu’on lui accorde un intérêt particulier. Plus de 130 millions de filles et femmes auraient subi des MGF en 2005 dont une majorité en Afrique 6 . En ce qui concerne la Côte d’Ivoire 45% des femmes ont subi une forme de MGF 7 . Les MGF, elles englobent différentes pratiques traditionnelles qui entraînent l’ablation totale ou partielle d’organes génitaux féminins. L’excision qui est parfois utilisée sous le vo- cable MGF, est une pratique assez répandue à travers le monde particulièrement en Afrique où elle est la cause d’énormes ravages qui vont des simples traumatismes à des problèmes de santé notamment des problèmes de fécondité et de complication d’accouchement. C’est ainsi que le 2 juin 2006 à Genève, l’OMS montre en citant que “les femmes ayant subi une mutilation génitale féminine ont sensiblement plus de risques d’éprouver des difficultés lors de l’accouchement et que leurs bébés sont davantage exposés au risque de mourir. Parmi les complications graves de l’accouchement figurent notamment les risques de césarienne, de forte hémorragie après la naissance et d’hospitalisation prolongée. L’étude en question a montré que la gravité des complications augmentait avec l’étendue et la sévérité de la mutilation”. Par ailleurs, les femmes qui souffrent suite à la pratique de l’excision parfois ne savent pas que c’est celle-ci qui est la cause de leur souffrance. Ceci justifie l’intérêt particulier que revêt la lutte contre les MGF dans les pays où elles sont encore pratiquées. Sur le plan international, malgré les nombreuses conventions protégeant la jeune fille et 6. UNICEF 2005 7. UNICEF, EDS 1994, 1998/1999 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 12
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 la femme de ces pratiques pour le moins dégradantes, force est de constater que l’on est encore loin de son éradication complète. Parmi ces conventions, on peut citer : – La convention sur les droits de l’enfant (CDE) – La convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations envers les femmes (CEDEF) – La charte africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant – La charte africaine sur les droits humains et ceux des populations – Le protocole additionnel sur les droits des femmes (protocole de Maputo) – La convention européenne des droits humains En ce qui concerne l’Afrique, 28 pays sont concernés 8 avec des taux variant de 5% à 98% : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Djibouti, Égypte, Érythrée, Éthiopie, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Kenya, Liberia, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Ouganda, Sénégal, Sierra Léone, Somalie, Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, RCA et RDC. Malgré sa pratique assez répandue, l’excision est dans certains pays punie par la législation notamment en Côte d’Ivoire où la loi N˚ 98/757 du 23 décembre 1998 interdit sa pratique. Les contrevenants s’exposent à une peine privative de liberté allant de 1 à 20 ans et d’une amende de 360 000 à 2 000 000 FCFA. 0.2 Intérêt du sujet Parmi les déterminants les plus cités de la pratique de l’excision, on note l’appartenance à un groupe religieux donné (que nous désignerons dans toute la suite de ce document par « religion »). En Côte d’Ivoire, l’enquête MICS 2006 conduite par l’UNICEF estime à 36% le nombre de femmes excisées dans le pays avec 34% en milieu urbain et 38% en milieu rural. Cette pratique est bien plus fréquente dans la population musulmane avec un taux de 86% que dans la communauté chrétienne où elle n’est que de 16%. Une autre étude menée par l’UNFPA en collaboration avec l’ENSEA dont les résultats sont publiés dans le rapport intitulé « Crise et violences basées sur le genre en Côte d’Ivoire : résultats des études et principaux défis - Octobre 2008 » disponible en téléchargement sur internet, renchérit : « La pratique de l’excision varie considérablement selon l’appartenance religieuse. Les MGF sont dans l’ensemble plus fréquents chez les animistes (74%) et les musulmanes (66%) que chez les catholiques (40%) ou les protestantes (32%). Les femmes des autres religions viennent en dernière position (30%). Ce constat d’ensemble se vérifie également selon le milieu de résidence 9 ». Ces deux études à l’instar de bien d’autres qui ont été menées, mettent en évidence à priori l’existence d’une corrélation entre la religion et la pratique de l’excision notamment en ce qui concerne la Côte d’Ivoire. Cependant, est-il judicieux de considérer l’appartenance à un groupe religieux donné comme facteur explicatif de la pratique de l’excision ? De plus, l’existence d’une telle relation est-elle objective ou alors revêt-elle plutôt un caractère fortuit ? Le cas échéant, si 8. Amnesty International, 2005 9. Crise et violences basées sur le genre en Côte d’Ivoire : résultats des études et principaux défis - Octobre 2008, page 61 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 13
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 l’on ne peut pas considérer la religion comme facteur explicatif de la pratique de l’excision, quel(s) est(sont) alors le(s) déterminant(s) réel(s) de ce phénomène qui date depuis la nuit des temps ? Afin d’apporter des éléments de réponse à ce questionnement, nous nous devons d’adop- ter une démarche scientifique. 0.3 Méthodologie Pour répondre à ce questionnement, nous adopterons la méthode de travail suivante. Premièrement, nous présenterons les résultats des différentes études et travaux qui ont été faits sur le sujet afin de se situer dans la continuité de ceux-ci. Cette étape consiste à répertorier et relever plus ou moins ce qui s’est dit et ce qui s’est fait en rapport avec le sujet. Ensuite, vu que notre étude se base sur l’enquête VBG 2007, nous allons sur la base de ces données présenter dans un premier temps les caractéristiques générales de la population enquêtée ensuite nous nous intéresseront à la population des femmes excisées. Nous préciserons ses caractéristiques notamment celles en rapport avec le thème. Il s’agira plus précisément d’effectuer une classification à la suite d’une ACM. Par ailleurs, les outils utilisés seront essentiellement descriptifs. 0.4 Les hypothèses de recherche A la fin de notre étude, nous devons être en mesure dire si objectivement la religion est un déterminant de la pratique de l’excision sur la base des données de l’enquête VBG 2007. Ce qui nous amène à formuler notre hypothèse de recherche. Hypothèse principale : L’appartenance à un groupe religieux donné détermine l’am- pleur de la pratique de l’excision en Côte d’Ivoire. Hypothèse secondaire : Les données issues de l’enquête VBG 2007 ne souffrent d’aucun biais et par conséquent reflètent bien le phénomène étudié. Ainsi, il s’agira pour nous tout au long de notre étude, d’affirmer ou d’infirmer ces hypothèses sur lesquelles est basé notre travail de recherche. 0.5 Plan du document Le présent document est constitué de 6 chapitres regroupés en 2 parties comportant chacune 3 chapitres. Une ébauche des thèmes traités dans chacun des chapitres est présentée ci-après. Dans le chapitre premier, il sera question de présenter les concepts tels que l’excision, Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 14
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 la religion, les MGF ainsi que ceux qui leur sont liés tout en mettant en évidence leur évolution au fil du temps. L’objectif visé étant de permettre au lecteur de maîtriser les concepts utilisés dans ce document et leur définition car celle-ci peut varier d’un auteur à un autre et affecter ainsi les résultats de l’étude. Puisque nous ne sommes pas les premiers à nous pencher sur la question de l’excision et le lien avec la religion, nous présenterons dans le chapitre 2 la vision des auteurs qui nous ont précédés. Il s’agira en clair de présenter les principales conclusions des études menées antérieurement sur le sujet. Comme mentionné plus haut, notre étude a pour circonscription l’enquête VBG 2007 menée en Côte d’Ivoire et qui a eu deux phases. Une « première phase » qui s’est déroulée à Abidjan et une « seconde phase » qui s’est déroulée à l’intérieur du pays. Ainsi, nous présenterons dans le chapitre 3, les informations relatives aux données issues de ces deux enquêtes ainsi que les méthodes de collecte, de traitement et d’apurement de ces derniers. Enfin nous présenterons les traitements que nous avons effectués sur la base de données afin de la rendre opérationnelle pour notre étude. Dans le chapitre 4, notre étude sera essentiellement descriptive. Dans ce sens, nous utiliserons les outils de la statistique descriptive uni-variée et bi-variée afin de présenter quelques caractéristiques principales de notre population ainsi que celles de nos unités d’analyse (femmes excisées). Dans le chapitre 5, nous utiliserons cette fois les outils de l’analyse multivariée en nous aidant du logiciel SPAD. Il s’agira pour nous de faire une ACM suivie s’une CAH 10 afin de regrouper les individus selon des groupes homogènes sur la base des données collectées. Enfin nous passerons en revue les résultats de notre étude, les limites ainsi que quelques recommandations. 10. Classification ascendante hiérarchique Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 15
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Première partie CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL (GÉNÉRALITÉS) Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 16
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Chapitre 1 Notions de religion et excision Comme dit plus haut dans l’introduction, l’excision est un véritable fléau social dans le monde particulièrement dans les pays d’Afrique. Elle préoccupe bien les Organisations Internationales (UNFPA, UNICEF, OMS, ONG) qui ont défini bon nombre de concepts qui lui sont liés. Afin de s’assurer de mesurer le même phénomène, une définition des différents concepts et expressions liés à l’excision sera faite dans ce chapitre premier. Ces définitions proviennent essentiellement de sources qu’à chaque fois nous préciserons. Avant de commencer, il importe de préciser quelques notions sur le vocabulaire employé dans ce document. Il est à noter que bon nombre de documents que nous avons exploité dans le cadre de cette étude, emploient beaucoup plus l’expression « mutilations génitales féminines » (MGF) à la place d’excision. Cette expression bien que largement employée car faisant « plus révélateur », peut se percevoir comme étant d’un champ plus vaste que celui de l’excision. Cependant, il n’en est rien. La définition des MGF adoptée par l’UNICEF 1 cadre avec celle que nous donnons au terme excision qui est la suivante : « L’ablation totale ou partielle des organes génitaux externes ou toute autre atteinte aux organes génitaux féminins pour des raisons culturelles ou pour d’autres raisons d’ordre non thérapeutique ». Ainsi défini, nous utiliserons aussi l’expression MGF pour désigner l’excision à la suite de ce document. Par ailleurs, l’utilisation de l’expression MGF a l’avantage de ressortir le fait que l’excision est une pratique essentiellement dirigée vers la femme et la jeune fille même car on peut être tenté d’inclure la circoncision masculine dans la panier de l’excision. La définition de l’excision donnée par l’UNICEF plus haut nous aide à faire cette distinction. En effet, cette définition précise que l’opération doit être justifiée par toutes raisons autres que thérapeutiques alors que la circoncision masculine est généralement pratiquée pour des nécessités thérapeutiques par des médecins dès la naissance ou parfois à des âges un peu avancés de l’enfant dans les cliniques et hôpitaux modernes. Un facteur à risque souvent relevé dans la pratique de l’excision est l’usage d’instruments non stérilisés, artisanaux et rudimentaires. Par ailleurs, la terminologie liée à l’excision a connu d’importantes évolutions. Lorsque la pratique commença à s’étendre au-delà des frontières des sociétés auxquelles elles y avaient initialement cours, elle était connue sous la dénomination « circoncision féminine 1. WHO, UNICEF and UNFPA (1997), Female Genital Mutilation : A joint statement, World Health Organization, Geneva, pp. 1–2 Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 17
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 » 2 ce qui laisse transparaître un parallèle avec la circoncision masculine. Dans le cas de la jeune fille et des femmes, le phénomène illustre une inégalité de genre aux racines profondes qui assigne à la femme une position inférieure dans la société, de même qu’il entraîne de graves conséquences physiques et sociales 3 . Ce qui n’est pas le cas chez les hommes où la circoncision est pratiquée pour des raisons thérapeutiques notamment pour aider à prévenir la transmission du VIH/SIDA 4 . 1.1 Notion d’excision L’OMS en collaboration avec l’UNFPA et l’UNIFEM projette de revoir la typologie des E/MGF qui fait ressortir cinq (05) formes d’excision. Cependant, la typologie la plus utilisée est constituée de 3 grands groupes répartis en fonction de la gravité du phénomène. Comme précisé plus haut, l’excision est aussi bien pratiquée chez la jeune fille que chez la femme adulte. Cependant, c’est le plus souvent à l’âge de l’enfance (4 – 12 ans) que la pratique est la plus fréquente. D’après le document d’information sur l’excision pour pères et mères 5 , en règle générale, le clitoris est éliminé partiellement ou totalement. Souvent les petites lèvres sont aussi enlevées. Du point de vue médical, ces formes peuvent être comparées à une élimination totale ou partielle du pénis, pour un garçon. Parfois, en plus du clitoris et des petites lèvres, les grandes lèvres sont amputées également. La peau restante est ensuite cousue de manière à ne laisser qu’une minuscule ouverture, permettant juste à l’urine et aux menstruations de s’écouler. Pour toutes les formes citées, la cicatrisation des tissus peut rendre l’ouverture du vagin si petite qu’il est nécessaire de rouvrir la cicatrice, lors de relations sexuelles et de la naissance d’un enfant. En 2007, l’OMS a classé les différentes formes de MGF en quatre (04) catégories : – Le type 1 ou clitoridectomie qui consiste en l’ablation partielle ou totale du clitoris et/ou du prépuce ; – Le type 2 ou excision qui consiste en l’ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans excision des grandes lèvres ; – Le type 3 ou infibulation : c’est le rétrécissement de l’orifice vaginal par la création d’une fermeture réalisée en coupant et en repositionnant les lèvres intérieures et parfois extérieures, avec ou sans ablation du clitoris ; – Le type 4 ou non classé : rentre dans cette catégorie toute autre procédure néfaste au niveau des organes génitaux de la femme à des fins non médicales, par exemple, 2. UNICEF, http ://www.unicef-irc.org/publications/pdf/fgm_fr.pdf 3. Yoder, P. Stanley, Noureddine Abderrahim et Arlinda Zhuzhuni, Female Genital Cutting in the Demographic and Health Surveys : A Critical and Comparative Analysis, DHS Comparative Reports N˚ 7, septembre 2004, ORC Macro 4. Reynolds SJ, Sheperd ME, Risbud AR, Gangakhedkar RR, Brookmeyer RS, Divekar AD, Mehendale SM, Bollinger RC (2004) “Male circumcision and risk of HIV-1 and other sexually transmitted infections in India”, The Lancet, 27 mars 2004 5. http ://www.terre-des-femmes.ch/files/FGM_PraeBroschuere_franzoesisch.pdf Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 18
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 piquer, percer, inciser, racler et cautériser les organes génitaux. Au vue de cette classification de l’OMS, il ressort que le terme excision est employé pour désigner un type bien précis de MGF en occurrence le type 2. Cependant dans toute la suite de ce document, nous utiliserons le vocable « excision » pour désigner toutes les autres types de MGF (type 1, type 2, type 3 et type 4). Ces types d’excision sont classés selon leur degré de gravité et de conséquence sur la santé de la jeune fille et de la femme. Par ailleurs, seuls les types 1 et 2 sont assez répandus dans nos pays. 1.2 Notion de religion Cicéron (consul romain, 63 av. J-C) définit la religion comme « le fait de s’occuper d’une nature supérieure que l’on appelle divine et de lui rendre un culte ». Dans le cadre de notre étude, nous définissons la religion comme étant le fait d’appartenir à un groupe qui vénère une divinité et dont les comportements et croyances sont influencés par celui-ci. Lors de l’enquête VBG qui a été réalisée en 2007, la question qui a été posée aux individus rencontrés sur le terrain afin de cerner l’appartenance à un groupe religieux donné a été la suivante : « Quelle religion pratiquez-vous ? ». Les principales religions qui ont été retenues sont : catholique, protestant, musulmane, animiste/traditionnelle. Par ailleurs, non seulement il est important de connaître l’appartenance d’un individu à une religion donnée, mais aussi si celle-ci influence sa vie, son comportement, son mode de pensée et bien d’autres aspects de sa vie privée et sociale. C’est à cette fin qu’une autre question est posée à la suite de la première et consiste à savoir quelle est l’importance de la religion pour l’enquêté. Si ce dernier répond que la religion n’a aucune importance à ces yeux, alors on conclut que l’appartenance à un groupe religieux n’a pas d’influence sur les comportements et attitudes de l’individu notamment en ce qui concerne la pratique de l’excision. Par ailleurs, les religions catholique, protestante, musulmane et animiste sont essen- tiellement monothéistes c’est-à-dire qu’elles vénèrent un seul Dieu. Ce qui les distingue notamment c’est le lieu de culte ainsi que l’origine des textes sacrés. Chez les catholiques comme chez les protestants, le culte se déroule à l’église ou dans les temples et les textes sacrés proviennent de la bible tandis que chez les musulmans c’est plutôt dans une mosquée que le culte a lieu et la religion est fondée sur le coran. Par contre, les animistes n’ont pas de lieu de culte fixe ; ils offrent des sacrifices aux disparus (qu’ils croient avoir le pouvoir de réincarnation) dans des endroits considérés comme sacrés. 1.3 Causes et conséquences de la pratique de l’exc- sion Les raisons les plus généralement évoquées pour justifier la pratique de l’excision sont de plusieurs ordres. Selon Amnesty International dans un rapport publié en décembre 2005, les différentes raisons évoquées sont les suivantes : Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 19
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 – Les raisons psycho-sexuelles : il s’agit ici d’abord de réduire la sensibilité sexuelle du clitoris afin d’atténuer le désir chez la femme pour contrôler sa sexualité dans le but de garantir la virginité avant le mariage et la fidélité pendant le mariage. Ensuite de garantir le mariage car les hommes préfèrent les femmes excisées et enfin, d’accroître le plaisir sexuel masculin. – Les raisons d’ordre culturel : les défenseurs de l’excision avancent comme autre argument pour défendre la pratique le fait que la tradition ne doit pas être remise en question. A côté de cela, on note aussi que l’excision est un rite d’initiation de la fillette à la condition de femme et à l’intégration sociale. – Les raisons d’ordre religieux : malgré le fait qu’aucune religion (sauf interprétation erronée des livres sacrés) ne prescrit formellement la pratique de l’excision, ses défenseurs évoquent toujours celle-ci comme raison justifiant cette pratique ancienne. – Les raisons d’ordre esthétiques et hygiéniques. Par ailleurs, l’OMS lors d’une étude menée en 2006, dégage plusieurs conséquences liées à la pratique de l’excision. Parmi ces conséquences, les plus souvent cités sont : – Les risques de complication à l’accouchement : nombreuses sont les femmes qui après avoir subi l’excision dans l’enfance ont des complications durant l’accouchement. Cependant, bon nombre d’entre elles ne savent la plupart du temps pas que ces complications sont liées au fait qu’elles aient été excisées dans leur jeunesse. L’ampleur de la complication dépend du type d’excision subi par la femme. – L’augmentation du nombre de décès maternels : la complication de l’accouchement chez les femmes excisées augmente le risque de décès chez celles-ci. – Les problèmes d’incontinences : les femmes ayant subi une forme d’excision sont souvent exposées à des problèmes d’incontinence qui se traduit par l’incapacité de retenir l’urine. – Les problèmes d’ordre sexuel (perte de désir, absence d’orgasme) – Les douleurs atroces, traumatisme, hémorragies intenses : la plupart des femmes ayant été excisées ont souvent des mauvais souvenirs liés à ces moments. – Autres infections pouvant s’installer par les voies urinaires suite à l’excision L’évolution des mentalités et attitudes face à l’excision a provoqué un changement majeur en ce qui concerne les groupes d’exciseurs (exciseuses). De nos jours, ce ne sont plus les exciseuses seules qui s’y livrent avec des outils rudimentaires (lames, couteau. . .) mais on note de plus en plus que les professionnels de la santé s’y mettent également. Ceci peut éventuellement se justifier pour des raisons économiques : la recherche de gain dans la pratique de l’excision. C’est ainsi qu’on peut lire dans le rapport de Amnesty International cité précédemment “les exciseuses ou les barbiers (en Egypte) ainsi que le personnel de santé (pratiquent clandestinement) pourraient trouver dans cette pratique une source de revenus”. Parmi les causes évoquées ci-dessus, nous nous intéresserons de plus près à la religion. L’objectif visé est alors de vérifier à l’aide d’outils scientifiques la significativité de la variable religion dans l’explication du phénomène de pratique de l’excision. Par ailleurs, les autres raisons évoqués n’ont pas été testés par des outils statistiques solides mais plutôt Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 20
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 sur la base d’une description de la population des excisées. Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 21
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 Chapitre 2 Revue de littérature L’excision est parmi les questions qui suscitent de nos jours, beaucoup de débats et controverses. Mais, il est à constater qu’elle est encore mal comprise et mal connue même par les scientifiques. Même si beaucoup de choses ont été écrites dans ce domaine, il n’en demeure pas moins que les discours qui y dominent restent marqués par les idéologies. C’est fort de ce constat que nous avons entrepris, dans le cadre de cette étude de cas, de continuer à explorer cette réalité sociale. A travers la littérature sur la question, nous savons aujourd’hui que ceux qui pratiquent l’excision évoquent plus ou moins la religion pour légitimer leur acte. Plusieurs auteurs ont eu à travailler sur l’excision. Dans l’impossibilité de pouvoir faire une revue exhaustive de tous les écrits sur la question, nous avons choisi de nous référer seulement à quelques-uns d’entre eux en respectant l’ordre chronologique des publications. De ce fait, nous verrons respectivement les ouvrages de Benoîte Groult, Awa Thiam, Fran P. Hosken Renée Saurel, Michel Erlich, Marie et Hubert Prolonge sur l’excision. Tout d’abord essayons de voir ce qu’en écrit Benoîte Groult. Cette dernière, dans son ouvrage « Ainsi soit-elle », s’est montrée très critique vis-à-vis des MGF. D’après elle, rien ne justifie cette pratique à part la haine du clitoris. Se fondant sur la pensée populaire, elle caractérise “le clitoris” par : “le péché, la source de tout mal, c’est le trou méprisable, l’étui pour l’organe roi qui seul lui confère sa raison d’être. C’est en mot la femme. Par lui-même il n’est rien. Un trou n’est rien. Il est creux, négatif, vide”. Pour Groult, le monde reste encore muet pour réprimer cette pratique parce qu’il s’agit des “histoires d’organes féminins”. C’est “donc sans importance”. Personne n’en parle. L’auteur n’a même pas de complexe face à la religion. En effet, à ce sujet écrit-elle : “Il est juste de dire que le coran n’est pas l’inventeur de cette mutilation. L’excision comme le voile préexistaient à l’enseignement de Mahomet. Mais il l’a accepté partout où elle était pratiquée mieux, il s’en est réjoui. Les femmes juives peuvent rendre grâce à Moise qui, pour des raisons inconnues, ne ramena pas d’Egypte cette tradition et ne conserva que la circoncision”. Comme son titre l’indique, Awa Thiam dans son ouvrage “la parole aux négresses” 1 , donne la parole à celles qui pendant longtemps se sont tues non pas parce qu’elles n’avaient 1. Paris Editions DENOEL, 1978, 189 Pages Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 22
Religion et pratique de l’excision en Côte d’Ivoire ENSEA, Mai 2012 pas des choses à plaindre ou à réclamer, mais parce que le système d’oppression mâle ne leur permettait pas toute prise de parole. L’architecture du livre comprend trois parties : la première est intitulée « Des mots de négresses », la deuxième a pour titre « Des maux de négresses » et la troisième c’est « Féminisme et révolution ». Dans la première partie l’auteur donne la parole à des femmes qui racontent principale- ment leurs conditions désastreuses de mariage et de fiançailles. C’est seulement à partir de la deuxième partie qu’elle prend réellement position contre les maux dont souffrent les femmes noires en particulier. A ce propos, elle souligne que bien que tous les problèmes de femmes se recoupent, les femmes noires indépendamment de toute origine : « ont en commun la condition d’être exploitées et opprimées par le même système phallocratique, (...). Il n’est pas rare de retrouver en Afrique ou en Europe, des femmes battues, des femmes dont les maris sont polygames, institutionnellement ou illégalement ».Concernant la clitoridectomie et l’infibulation, Awa Thiam mentionne que ces pratiques sont présentes chez les musulmans, les chrétiens et les animistes. Partant de cette base, l’auteur récuse la thèse de la source islamique de ces opérations en les faisant remonter au règne du prophète Abraham. Dans la troisième partie de son ouvrage, Awa Thiam exhorte ses consœurs négresses à lutter pour la recherche de leur dignité et de la reconnaissance de leur spécificité d’êtres humains. Pour elle, la lutte que doit mener les femmes d’Afrique noire doit se situer à un niveau autre que celui des femmes européennes. En effet, “en Afrique noire sévissent la polygamie institutionnalisée, les pratiques mutilatrices sexuelles, les mariages forcés, les fiançailles d’enfants”. Ce qui est commun à toutes les femmes c’est la “violence phallocrati- que”. Or “la violence engendre non pas l’humain mais plutôt sa destruction. Elle a pour nom : fascisme phallocratique. Elle est donc à abolir dans toute société, dans tout groupe social”. Juste à la fin de l’année de publication de “Parole aux négresses”, Fran Hosken confie ses longues et vastes recherches sur l’excision sous forme d’un ouvrage. En effet, le “Génital and Sexual Mutilation of Females” est publié en 1978 et un peu avant le Séminaire de l’OMS à Khartoum en février 1979. Quand Fran Hosken a débuté ses investigations, il n’y avait pas beaucoup d’écrits sur les MGF contrairement à la circoncision masculine. C’est ainsi que l’architecte doublée de journaliste va entreprendre des recherches à travers le monde entier. C’est la raison pour laquelle, il n’y a presque pas aujourd’hui un travail qui se fait sur l’excision sans se référer à l’étude de Fran Hosken. A l’instar d’Awa Thiam, Fran Hosken, journaliste américaine, situe les MGF dans un passé pré-islamique. A ce propos, elle écrit : “It was first recorded in Egypt 2000 years ago” 2 . Elle avance également que ces pratiques ont tendance à augmenter à cause de la croissance démographique. Selon les types, Fran Hosken localise les MGF dans 41 pays d’Afrique. Pour elle, 110,529 millions de femmes et de filles sont mutilées en Afrique. En dehors, de l’Afrique, les MGF sont pratiquées dans la Péninsule Arabique et tout au long du Golfe Persique. Au niveau de l’Occident aussi, à cause de l’émigration, on note ces pratiques. 2. Traduit par : les MGF ont été enregistrés pour la première fois en Egypte il y a de cela 2000 ans Douala Roméo, Nguemo Ngueabou Joel − ITS 2012 23
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