ENCOURAGEMENT DES ACTIVITÉS CULTURELLES
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ENCOURAGEMENT DES ACTIVITÉS CULTURELLES 20.XXX Rapport du Conseil d'État au Grand Conseil à l'appui d'un projet de loi sur l’encouragement des activités culturelles et de la création artistique (Du … 2020) Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, RÉSUMÉ Depuis l’entrée en vigueur en 1991 de la première loi neuchâteloise sur l’encouragement des activités culturelles (LEAC) de nombreux changements ont jalonné le paysage culturel et institutionnel. Ces évolutions appellent une refonte de la base légale, afin de mieux prendre en compte les réalités des milieux artistiques et les attentes des acteurs culturels neuchâtelois dans un contexte qui, par ailleurs, dépasse de plus en plus les frontières cantonales. Cette nouvelle mouture, de même que la version adoptée en 1991, reste une loi-cadre. Elle se veut, toutefois, porteuse d’une vision ambitieuse qui puisse servir de base aux futures politiques culturelles de l’État. Mais avant d’en dessiner les lignes de force, il convient de préciser comment il faut entendre, ici, le mot « culture ». Au cours des siècles, en effet, le terme s’est chargé de significations multiples véhiculées dans l’usage contemporain. Dans le cadre de la présente révision, on tâchera donc, autant que possible, d’en resserrer le champ. Concrètement, il s’agit de cerner un domaine, celui de la production artistique, qui se distingue à la fois du développement personnel, de l’animation socioculturelle ainsi que du divertissement dans ses formes les plus consensuelles ou commerciales. Les activités culturelles se définiront alors par l’enrichissement qu’elles proposent, fruit de la recherche et du travail exigeants d’artistes, d’actrices et d’acteurs culturels confirmés. En d’autres termes, l’État entend mettre les artistes professionnels au cœur de la nouvelle loi, avec, pour corollaire, une reconnaissance de leur statut. Il se doit, d’une part, de mieux veiller à la durabilité des carrières des créateur et créatrices, dont il a, d’ailleurs, souvent financé la formation. Il lui faut, d’autre part, assumer sa responsabilité sociale envers eux, non seulement au cours de leur activité professionnelle, mais également dans la perspective de leur retraite. Cette volonté de l’État de se concentrer, en priorité, sur la création professionnelle implique une meilleure coordination entre les différents niveaux de pouvoir. Jusqu’ici prévalait un principe de subsidiarité, selon lequel l’attribution des subventions du Canton est
subordonnée au soutien préalable des communes ou de tiers. Or, depuis quelques années, le besoin d’un principe de complémentarité et d’une définition plus claire des rôles et des missions de chacun a été exprimé par un nombre croissant d’acteurs culturels. Il est également perceptible dans les récentes révisions des lois cantonales sur la culture dans les cantons de Berne, Genève et Vaud. Le principe de complémentarité permettra à l’État d’agir de façon autonome. Dans la nouvelle répartition des tâches entre le Canton et les communes, il conviendra alors de distinguer les activités artistiques de la vie locale et régionale des projets de plus grande envergure. Enfin, l’État entend élargir les portes de l’accès à la culture et soutenir les activités de médiation culturelle. Pour beaucoup, en effet, la culture se dresse comme une citadelle inaccessible ; sont invoqués, souvent, soit un prix trop élevé de ces activités, soit un contenu ressenti comme hermétique et élitiste. Le Conseil d’État s’est d’ores et déjà engagé dans la voie de partenariats permettant d’accéder à l’offre culturelle à un prix abordable, notamment en faveur du jeune public. Conjointement à l’encouragement des formes et contenus artistiques originaux et exigeants, il appartient également à l’État de développer l’axe de médiation culturelle afin de familiariser un large public à des productions nouvelles et diversifiées, et ainsi, d’étendre le champ d’attente de celui-ci. Cependant, cette volonté n’implique pas que l’on recourt à une simplification et à une aseptisation des discours artistiques. Les actions dont l’État veut se porter le garant doivent, au contraire, fournir à tout un chacun les codes et les clés de lecture propres à un art. 1. INTRODUCTION 1.1. Culture : définition La loi neuchâteloise sur l'encouragement des activités culturelles de 1991 (LEAC), comme la plupart des lois cantonales romandes sur le sujet, s’est gardée de définir explicitement le terme culture. L’ambiguïté de celui-ci, de même que son évolution continuelle rend en effet toute définition synthétique difficile et vouée à une obsolescence relativement rapide. Ce constat reste valable dans le cadre d’une révision de la LEAC. En ce sens, l’ajout des termes et de la création artistique dans l’intitulé de la loi répond à une volonté globale de clarification quant à la nature prioritaire des activités concernées, mais n’en trace pas de stricts contours. Toutefois, s’il reste sage de ne pas figer légalement la portée du terme culture, il importera ici d’en saisir le champ, d’en cerner au mieux les limites et d’en nuancer les implications dans le contexte neuchâtelois. Issu du latin cultura, le mot culture est primitivement apparu en français dans le domaine agricole, au Moyen Âge. Il désigne alors un champ ensemencé ; puis, assez rapidement, il inclura l’action visant à cultiver ce champ. Cette ambiguïté du terme – qui tantôt désigne un état, tantôt un processus ou un développement – perdurera au-delà des réalités agricoles. Par un glissement au sens figuré, l’acception s’est ensuite étendue au développement d’une faculté ou d’un domaine particulier - culture des lettres, des arts, des sciences, etc… Finalement, au XVIIIe siècle, elle devient synonyme de l’instruction ou de l’éducation qui vise à élever l’être humain : la culture s’oppose alors à la nature, à un état primitif et animal. Dans l’esprit des Lumières, elle représente la somme des savoirs accumulés et transmis par l’humanité. Elle est alors complémentaire à la notion de civilisation, qui, à la même époque, évoque plus spécifiquement le processus d’amélioration des organisations collectives (institutions, législations, systèmes éducatifs). 2
Les acceptions du terme évolueront, au tournant du XXe siècle, sous l’impulsion des sciences sociales en développement, mais aussi grâce à l’émergence de nouveaux courants de pensée nationalistes. L’une et l’autre feront osciller l’usage du terme d’une perspective universaliste à une vision particulariste : d’un côté « la culture », vers laquelle doit tendre le genre humain tout entier, de l’autre « les cultures », aussi nombreuses que les groupes sociaux identifiables. La notion de culture s’élargit en se parant alors d’une dimension identitaire et distinctive, comme le reflète toujours la définition du terme établie par l’UNESCO en 1982 : « la culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances » (Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles. Conférence mondiale sur les politiques culturelles, 1982). La loi sur la culture du canton de Genève, seule loi cantonale romande à donner une définition légale du terme, en propose une acception proche (art. 1, al. 1) : « la culture est l’expression des traits intellectuels, artistiques et spirituels d’une société ou d’un groupe social ». Issu de ces différentes notions, l’emploi contemporain du terme culture est donc multiple, aussi bien dans la langue politique que quotidienne. Il peut, d’une part, renvoyer à un savoir, ou à l’acquisition de celui-ci. On parle alors de culture générale, comme on se cultive en visitant un musée. D’autre part, il renvoie aux traits distinctifs de groupes sociaux plus ou moins larges : culture occidentale, culture bourgeoise, culture hippie, culture queer, etc. Dans le cadre de la révision de la LEAC, il ne faut pas perdre de vue les risques de déviation potentiellement soulevés par ces deux interprétations qui s’enchevêtrent fréquemment. En effet, établir une définition trop identitaire de la culture pourrait engendrer certains amalgames dont l’État doit s’affranchir. Promouvoir la culture dans le canton de Neuchâtel ne doit pas revenir à favoriser une culture de l’identité neuchâteloise dans une perspective politique, traditionnelle ou folklorique. En outre, on en évacuera ici la question de la sauvegarde du patrimoine culturel, aussi bien matériel qu’immatériel, traitée dans la loi du 4 septembre 2018. Ensuite, si la notion d’enrichissement intellectuel ou émotionnel paraît fondamentale dans la définition d’une activité culturelle, on veillera à ne pas traduire cet enrichissement par l’acquisition d’un savoir qui soit uniquement érudit et élitiste, ni par la reconnaissance exclusive des arts historiquement perçus comme supérieurs. Il s’agira plutôt de stimuler la réflexion et le débat sous toutes leurs formes ; de favoriser l’esprit critique et l’ouverture au monde ; d’interroger l’individu dans son rapport à lui-même, aux autres et à l’existence ; d’éveiller, de nuancer et de renouveler les sensibilités esthétiques ; de remettre en question et de réinventer les langages artistiques, d’élargir le champ d’attente de chacun en la matière ; enfin, de susciter des émotions multiples, nouvelles, potentiellement complexes et contrastées. Même ainsi étendu, cet idéal d’enrichissement n’en reste pas moins un objectif exigeant, qui ne peut se réaliser qu’à travers l’investissement conséquent et la liberté créatrice d’artistes et d’acteurs culturels confirmés. En ce sens, il s’agira encore de distinguer les activités dites culturelles de pratiques artistiques dont le principal objectif est de divertir. Parmi ces dernières, se range d’une part le divertissement que l’on qualifiera d’industriel parce qu’il obéit à des schémas de production soumis à des impératifs économiques. L’uniformisation des œuvres prend alors le pas sur la liberté de création. On y trouve aussi la pratique d’activités artistiques menée à titre de simple loisir avec, parfois, une dimension de développement personnel. Extrêmes opposés en termes de moyens financiers, les productions issues de ces deux domaines sont néanmoins caractérisées 3
l’une et l’autre par la malléabilité de leurs exigences qualitatives et n’ont d’ailleurs généralement pas la prétention d’exceller. 1.2. Historique et avenir À Neuchâtel, la nécessité d’établir une loi cantonale sur l’encouragement des activités culturelles a été motivée par plusieurs éléments : l’augmentation des dépenses publiques allouées à ce domaine pendant les années 1980 ; la prise de conscience de l’impact de la culture en termes de développement territorial ; enfin, la volonté de regrouper les précédentes lois, décrets et arrêtés en lien avec le domaine de la culture et de la création artistique. La LEAC, acceptée en 1991, a eu pour ambition d’être une loi-cadre. Elle l’a été, et l’est encore. Sa souplesse a permis la succession de différentes politiques culturelles au cours des vingt-huit dernières années. Elle se caractérise notamment par l’importance du rôle laissé aux communes, aux prestations desquelles une intervention de l’État est en principe subordonnée (LEAC, art. 4, al. 2). Ce principe de subsidiarité reflétait alors une pratique observable dans la plupart des autres cantons. Comme cela avait déjà été relevé à l’époque, cette loi n’attribue pas à l’État un rôle moteur ; elle ne lui définit pas de réelles missions, ni de priorités. Toutefois, les dispositifs mis en place par le Canton se sont multipliés depuis 1991, de nombreux soutiens se sont consolidés et un service dédié, le service de la culture, (SCNE), a été créé en 2001. On observe cependant un manque de lisibilité de l’action de l’État en matière de soutien dans le domaine. Dès lors, une révision de la loi doit permettre de clarifier les rôles et les missions des différents niveaux de pouvoir, c’est-à-dire entre l’État et les communes. Le passage à un principe de complémentarité, que plusieurs cantons romands ont récemment commencé à mettre en œuvre, serait en ce sens une avancée significative. Les tâches attribuées devraient alors être définies en fonction de l’ambition et des capacités de chaque niveau de pouvoir en matière culturelle. Cette répartition des tâches ne doit toutefois pas devenir un carcan trop contraignant : il s’agit de garder une loi- cadre qui permette, en particulier aux communes, de continuer à agir de manière autonome. Depuis l’acceptation de la LEAC, seul son sixième article, relatif au fonds d’encouragement des activités culturelles et artistiques, a été retouché : après une première modification en 1996, cet article a été vidé de son contenu en 2016, suite à la suppression des fonds engendrée par l’adoption de la Loi sur les Finances de l’État et des Communes (LFinEC) en 2014. Il faut toutefois rappeler la présentation d’un premier projet de modification de la loi en 2004. Son ambition était alors de renforcer la politique culturelle du Canton dans les domaines suivants : « création et diffusion ; formation des enseignants et sensibilisation des élèves à la culture; diversification des formes d’aides ; encouragement du mécénat; soutien aux musées régionaux dans le cadre d’actions coordonnées touchant au patrimoine » (Conseil d’État : Rapport du Conseil d’État au Grand Conseil à l’appui d’un projet de loi portant modification de la Loi sur l’Encouragement des Activités Culturelles). Ce projet a toutefois été retiré une année plus tard. Bien que plusieurs de ses points ne soient plus d’actualité, cette tentative avortée marque la nécessité de thématiser légalement de nouveaux domaines que l’État a, pour la plupart, commencé à soutenir en l’absence de cadre légal spécifique. Il s’agit de la diffusion de la création artistique et de la médiation culturelle. Mais il faut également y ajouter la question de l’accès à la culture et de nouveaux secteurs d’activités artistiques. Sur ce dernier point, il apparaît aussi nécessaire d’actualiser la terminologie des activités plus établies. 4
L’actuelle LEAC (art. 3b) reconnaît notamment les secteurs d’activité culturelle et artistique suivants : « littérature, beaux-arts, musique, danse, théâtre, centre culturels, cinéma, photographie, arts populaires ». Si cette délimitation relativement vaste n’a pas été en elle- même un frein au développement de nouvelles formes artistiques sur le territoire neuchâtelois, il restera important, au sein d’une loi-cadre, de ne pas cloisonner les différents domaines par des dénominations trop strictes. Ainsi, la tendance actuelle à parler d’arts vivants pour désigner non seulement le théâtre et la danse, mais aussi le nouveau cirque, les créations interdisciplinaires, la marionnette, le catch impro ou les arts en espace public, a le double avantage de mieux répondre aux pratiques d’aujourd’hui et d’anticiper toute extension à des disciplines nouvelles. Parallèlement, là où la dénomination beaux-arts pouvait induire une vision classique de la peinture et de la sculpture, celle, plus générale, d’arts visuels laisse la porte ouverte aux formes contemporaines. Ainsi, l’État souhaite également s’accorder la possibilité d’encourager à l’avenir des disciplines créatives encore mal reconnues, soit parce qu’elles sont trop récentes, soit parce qu’elles sont généralement subordonnées à des projets commerciaux (design architectural, textile, mobilier, web…). D’autres disciplines n’ont été que nouvellement reconnues : c’est notamment le cas du jeu vidéo, dont le potentiel culturel et artistique est désormais admis par un nombre croissant d’autorités, telles que la Confédération et Pro Helvetia. La reconnaissance du domaine des arts numériques dans la loi permettra de mieux prendre en compte, au côté d’autres formes de création numérique, ce secteur en expansion. La loi doit rester perméable à ces formes nouvelles ou hybrides. 1.3. Contexte légal Le soutien des activités culturelles dans le Canton de Neuchâtel et le cadre législatif qui l’accompagne doivent être mis en perspective avec les mouvements observés dans les autres cantons romands et les récents changements aménagés dans certains d’entre eux. Les premières lois cantonales consacrées à l’encouragement de la culture datent des années 1970 : Berne adopte sa loi en 1975 (révision en 2012), le Jura et Vaud en 1978 (Vaud la révise en 2014), Fribourg en 1991 et, enfin, le Valais et Genève en 1996 (révision genevoise en 2013). Chacun de ces cantons a créé des entités administratives (ainsi le Service des Affaires Culturelles vaudois, le Service de la Culture fribourgeois ou l’Office de la Culture jurassien) visant à répondre aux artistes et aux institutions. Pour assister les organes de l’État dans leurs actions, les différentes lois cantonales instituent un conseil ou une commission (Fribourg, Genève, Jura, Valais), voire plusieurs commissions alors organisées par domaines (Vaud, Berne). Toutes, celle de Berne excepté, permettent également l’institution de sous-commissions ou de jurys d’experts. Les domaines attribués à ces sous-commissions, qui naissent et évoluent au gré du contexte artistique de chaque canton, ne sont pas directement définis au sein des lois. Il en va de même pour les modalités du fonctionnement administratif de ces organes cantonaux. À titre d’exemple, si ces organes recueillent, pour la plupart, les demandes de subvention par le biais de dispositifs électroniques qui leur sont propres, ces outils ne font pas l’objet de dispositions légales. En termes de financement, la plupart des lois cantonales romandes (à l’exception de celles de Genève et du Jura) instituent des fonds, comme le fit celle de Neuchâtel jusqu’en 2016. Aucune de ces lois ne définit la part du budget cantonal alloué à la culture, qui est en général fixé annuellement. Un point sur lequel les lois romandes diffèrent grandement concerne la répartition des tâches entre État et communes. À l’origine, toutes ont laissé transparaître un principe de subsidiarité plus ou moins marqué, subordonnant les subventions du Canton à celles des 5
communes ou de tiers. Mais les révisions récentes de Berne, Genève et Vaud ont abandonné ce principe en donnant à l’État la possibilité d’agir seul sur certains points, notamment dans le développement des coopérations suprarégionales (VD, GE), le subventionnement d’institutions d’importance nationale (BE), ou encore le soutien à la création professionnelle et à sa diffusion (VD). Les révisions bernoise et genevoise marquent également la volonté d’une meilleure concertation et coopération de l’État avec les communes. Plus généralement, les révisions récentes des lois des cantons de Berne, de Genève et de Vaud laissent transparaître des préoccupations qui ne sont pas sans résonnance avec la vie culturelle neuchâteloise. Ces trois révisions répondent ainsi à la volonté de mettre en place une médiation culturelle plus affirmée et un meilleur accès à la culture ; mais on y relève également un souci accru de la sécurité sociale des artistes. Ce dernier point reflète également une préoccupation fédérale : depuis 2013, la Loi fédérale sur l'Encouragement de la Culture, (LEC) dispose d’un article stipulant le versement d’un pourcentage des montants alloués aux acteurs culturels à la prévoyance sociale. La collaboration intercantonale fait rarement l’objet d’articles dédiés dans les différentes lois romandes sur la culture, mais elle apparaît néanmoins à différents degrés. Ainsi, « la coopération, la coordination et les échanges culturels aux niveaux intercantonal, national et, le cas échéant, international » sont inscrits au sein des missions de l’État dans la loi vaudoise (art. 5, al. 1c). Dans la loi fribourgeoise (art. 5b. g.), l’État « favorise » ces mêmes éléments. À Genève (art. 5b), le Canton encourage « la diffusion des œuvres et le rayonnement des artistes et des institutions, notamment en développant des coopérations régionales et internationales ». Cette mission est moins précise en Valais, où l’État (art. 4b. d.) « favorise les échanges à l'intérieur du canton et avec l'extérieur », et totalement absente de la loi jurassienne. Dans les faits, toutefois, chacun des cantons, y compris celui de Neuchâtel, contribue financièrement à différentes structures intercantonales, organisées par domaines et œuvrant pour la coopération, la diffusion et la mobilité artistique. 1.4. Impact économique de la culture Les activités culturelles, bien qu’elles soient souvent considérées comme non marchandes, sont des biens économiques à part entière. Ainsi, l’impact économique des activités culturelles est fréquemment étudié et permet de montrer que ces activités génèrent des flux de revenu importants. Les dépenses publiques en faveur de la culture deviennent alors des investissements qui agissent en faveur de la vie économique. Ainsi, la dépense culturelle génère un effet « multiplicateur » qui se répercute sur l’ensemble de l’activité économique. Plusieurs villes en ont fait le pari : pour la période 2008-2018, la politique culturelle de Bâle lui a permis, selon les chiffres de l’Office fédéral de la statistique et HotellerieSuisse, d’augmenter de 26% le nombre des nuitées alors que ces dernières enregistraient une baisse de 2% en moyenne sur le reste de la Suisse. Certains exemples sont des cas d’école, comme celui du musée Guggenheim à Bilbao. Au sommet d’une multitude de facteurs économiques, sociaux et conjoncturels propres à la région vient se dresser, dans la ville basque, un musée qui allait redéfinir le lien entre culture et économie. Le financement de 135 millions d’euros pour la construction du musée a engendré 735 millions d’euros d’investissement pour son agglomération. Baptisé « effet Guggenheim », ces retombées ont contribué à redynamiser l’ensemble de sa région. À l’échelle cantonale, la construction du Latenium, qui a permis au musée cantonal d’archéologie de présenter ses collections dans un écrin remarquable, a également contribué à faire connaître la région au travers de son patrimoine d’envergure 6
internationale et à attirer des visiteurs en provenance de toute l’Europe ainsi que des milliers de jeunes visiteurs en course d’école. Pour terminer sur ce point, il convient de souligner que l’économie culturelle et créative génère 3,9% de la valeur ajoutée brute de la Suisse. Les statistiques suisses en la matière mentionnent également que, en 2013, les industries culturelles et créatives employaient plus de 275 000 personnes dans environ 71 000 entreprises. Cela représente 10,9 % des entreprises et 5,5 % des emplois du pays. Ce secteur est ainsi comparable à celui de l’industrie touristique qui concentre 4,8% des emplois, ainsi qu’à celui de la finance pour qui le pourcentage s’élève à 5,6%. Les industries culturelles et créatives génèrent une valeur ajoutée brute d’environ 22 milliards de francs et un chiffre d’affaires de 69 milliards de francs. Lorsque l’on réduit le périmètre à l’industrie musicale, la chaine du livre, le cinéma et les arts du spectacle les chiffres consolidés de 2013 indiquent que ce segment concerne 70’256 personnes employées dans 20’225 entreprises. Les études d’impact menées récemment dans les cantons de Genève et du Valais confirment le poids de l’économie culturelle dans les régions concernées. 1.5. Vie culturelle et création artistique dans le canton de Neuchâtel. La région neuchâteloise est reconnue pour la vitalité et la diversité de son offre culturelle et artistique. Les initiatives foisonnent : près de trois milles propositions en 2019. Portés par des amateurs et amatrices passionné-e-s ou conduits par des professionnel-le-s, ces projets contribuent à la qualité de vie des Neuchâtelois et Neuchâteloises tout en participant au rayonnement du canton. En effet, de nombreux évènements suscitent de l'intérêt bien au-delà des frontières cantonales et attirent des visiteurs loin à la ronde. Facteur de rayonnement à l’extérieur du canton, la spécificité et l’excellence des propositions artistiques et culturelles neuchâteloises participent également à la cohésion cantonale. Ainsi, les Neuchâtelois et Neuchâteloises ont appris à saisir, avec bonheur, les opportunités qui leur sont présentées sur l’ensemble du territoire. Cette extraordinaire vitalité n'est pas nouvelle. Elle est bien ancrée dans l'ADN des Neuchâtelois et Neuchâteloises. Contrairement à d'autres cantons, les institutions culturelles plus que cinquantenaires ne sont pas rares sur le territoire cantonal. À ce sujet, il convient de rappeler notamment que le théâtre de la Ville de La Chaux-de-Fonds fut érigé en 1837, soit quelques années avant l'hôpital de la ville! Poursuivant sur cette trajectoire, la Ville de La Chaux-de-Fonds se distinguera vraisemblablement, au niveau national cette fois-ci, en devenant, en 2025, la première Capitale culturelle de Suisse. La diversité de l'offre en matière de culture mérite également d'être soulignée. Pour chacun des domaines de la création artistique, le public peut orienter ses choix en passant du plus classique au plus pointu. Dans cette dernière variante, les artistes neuchâtelois-e-s se distinguent souvent par leur volonté d'aborder de nouveaux territoires ou d'investiguer de nouvelles formes. Ce penchant pour les démarches innovantes ou singulières permet d'attirer l'attention des spécialistes et se voit récompensé par des distinctions prestigieuses. Les Prix suisse de la Musique, du Théâtre et de Littérature sont venus récemment couronnés des artistes neuchâtelois et neuchâteloises. Cette prédisposition pour l’innovation et l’excellence est encouragée par l’offre de formation, publique ou privée, dans les différents domaines artistiques. L’exemple de la musique est particulièrement parlant. En effet, cet enseignement est institutionnalisé depuis près de cent ans, tant dans les Montagnes que sur le Littoral. Parmi les milliers d’élèves qui ont suivi les classes de musique, nombreux et nombreuses sont ceux et celles qui continuent à pratiquer, de manière amateur ou professionnelle, dans des ensembles 7
de musique. Il en va de même, à plus petite échelle, dans le domaine des arts appliqués, des beaux-arts, ou du théâtre. Terre ouverte, notre canton n’a jamais vécu replié sur lui-même. De nombreux artistes ou acteurs et actrices culturel-le-s s’y sont établi-e-s, apportant dans leurs bagages de nouveaux points de vue, de nouvelles pratiques. De leur côté, les Neuchâtelois et Neuchâteloises n’hésitent pas à aller se frotter à leurs homologues du monde entier. Se nourrissant de ces échanges, la vie culturelle et la création artistique de notre canton ne souffre pas de la comparaison avec des régions plus urbaines et importantes en termes de nombre d’habitants. D’ailleurs, il convient de rappeler ici que dans le domaine de l’offre muséale, plus de 30 institutions sont affiliées au Groupement des Musées neuchâtelois (GMN) ce qui , du point de vue de la diversité, est remarquable pour une population qui présente une taille similaire à celle de la Ville de Lausanne. 1.6. Encouragement des activités culturelles dans le Canton de Neuchâtel Selon l’Office Fédéral de la Statistique (OFS) le Canton de Neuchâtel se situait, en 2015, en troisième position en ce qui concerne les dépenses culturelles par habitant : avec ses 381.- par habitant, il n’est dépassé que par Genève (832.-) et, loin devant, Bâle-Ville (1254.-). Or, si ce classement rend compte de la vitalité de la vie culturelle sur le territoire neuchâtelois, il doit toutefois être nuancé. En effet, outre le fait que ces chiffres renvoient à des réalités parfois inégales d’un canton à l’autre, ils tiennent compte de l’action conjointe de l’État, des communes et de la Loterie Romande (LoRo). Une observation plus précise montre la prépondérance de la participation des communes et de l’important soutien de la LoRo. L’action du Canton se chiffre alors à 70.- par habitant, ce qui le place dès lors en 19ème position (derrière, par exemple, le canton du Jura) et en-dessous de la moyenne suisse (93 francs). Les dépenses des communes et de la Loterie sont quant à elles bien au-dessus de la moyenne (représentant respectivement 262.- pour une moyenne de 133.- et 55.- pour une moyenne de 33.-). Cette situation n’est cependant pas à interpréter comme le fruit d’une construction politique, encore moins d’une volonté délibérée des uns ou des autres. Elle découle d’évolutions historiques, propres à chacun des intervenants. L’intervention importante des communes est liée à la présence de centres urbains très actifs culturellement. Neuchâtel, La Chaux-de-Fonds et Le Locle abritent à eux seuls plus de 75% des activités économiques culturelles. On y constate en effet une concentration, due à la présence d’infrastructures adéquates, des pratiques professionnelles collectives et des institutions culturelles. La création professionnelle individuelle (notamment dans les domaines de la littérature et des arts plastiques) est quant à elle un peu moins liée aux centres urbains. Enfin, l’importance de l’intervention de la Loterie Romande est liée à un particularisme neuchâtelois : certains services du domaine social, auxquels peut usuellement contribuer la LoRo, ont en effet été étatisés dans notre canton. La LoRo s’en est donc désengagée au profit, entre autres, de la culture. En regard de son action dans d’autres cantons, la LoRo, incarnée par la commission neuchâteloise des bénéfices de la Loterie romande agit à Neuchâtel avec beaucoup d’indépendance dans la fixation de ses objectifs et dans son fonctionnement. La nouvelle législation fédérale et la prochaine loi cantonale sur les jeux d’argent, qui devra entrer en vigueur au premier janvier 2021, n’auront, selon toute vraisemblance, pas d’impact majeur sur la situation actuelle ni sur les modalités et critères d’attribution. Précisément, lors de la 8
session du Grand Conseil du 19 février, les députés ont adopté, à une large majorité, la motion 20.118 « Maintenir la pratique actuelle de la LoRo est primordial ». On relèvera ici que l’impact du mécénat privé n’est pas quantifié par l’OFS. Neuchâtel est le seul canton romand à le mentionner dans sa loi (article 5 : « L'État s'appuie sur la législation fiscale en vigueur pour encourager le mécénat privé »), mais il est difficile d’évaluer la portée concrète de cette mention. L’action de l’État peut être quantifiée plus précisément par l’intermédiaire du rapport annuel Panorama publié en ligne par le Service de la Culture. Ainsi, en 2019, ce dernier a géré un volume financier de 12’511’348 francs, dont 6’614'792.- ont été alloués au patrimoine et 951'966.- aux archives. La somme des subventions attribuées au titre de l’encouragement des activités culturelles et artistiques s’est élevée à 4'770’332 francs. A ce montant, il convient de retrancher 1'960’000.- destinés aux fonds documentaires conservés dans les bibliothèques des Villes. Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur la sauvegarde du patrimoine culturel, (LSPC), le budget réservé à la sauvegarde des fonds documentaires sera basculé, dès 2021, dans l’enveloppe dédiée à l’office des archives. Les subventions cantonales se distinguent, d’une part, en subventions structurelles, c’est- à-dire renouvelables, et en subventions ponctuelles allouées aux projets. En 2019, dans les domaines des arts vivants, de la musique, des arts plastiques, de la littérature et du cinéma, la part de subventions structurelles s’élevait à 1'738'314.- sur un total de 2 089 322.-. La marge de l’État pour attribuer des subventions ponctuelles, notamment pour la création, est donc réduite, et ce d’autant plus que les charges structurelles ont tendance à augmenter chaque année. Dès lors, il convient de relativiser ici l’impact des subventions de l’État sur la création. Comparées à celles des Villes et aux contributions de la Loterie Romande, elles ne se montrent jamais déterminantes dans le financement d’un projet. Les discussions avec les créateurs et créatrices révèlent toutefois que le soutien de l’État représente un investissement émotionnel fort. Dans ces conditions, l’approbation et le soutien du Canton sont surtout perçus comme un symbole de reconnaissance de la qualité d’un projet, qui permet souvent d’obtenir d’autres soutiens. 9
1.7. Rôle et fonctionnement du service de la culture Dans le canton de Neuchâtel, l’organisation de l’encouragement aux activités culturelles et à la création artistique est confiée au service de la culture (SCNE) créé en 2001, et qui est rattaché, depuis 2013, au Département de la justice, de la sécurité et de la culture (DJSC). Il faut se rappeler ici que le SCNE remplit deux missions distinctes mais néanmoins convergentes. S’il est en charge de toutes les questions liées à l’encouragement des activités artistiques et culturelles, il a également la responsabilité de la sauvegarde du patrimoine. L’office des archives (OAEN) et l’office de l’archéologie et du patrimoine neuchâtelois (OPAN) qui comprend la section archéologie et le Latenium, sont en effet rattachés à la direction du SCNE pour constituer une équipe forte de plus de 50 collaborateurs. Étant réglées par des lois spécifiques, les missions patrimoniales du service ne sont pas concernées par la révision de la Loi sur l’encouragement des activités culturelles. Il en va de même pour le soutien à la lecture publique, qui est régi par une base légale ad hoc. Au sein de l’État, le SCNE a également pour mission de coordonner les activités des différents départements et services amenés à traiter de questions en lien avec la culture 10
ou la pratique artistique. En remodelant son administration cantonale en 2013, le Canton a notamment séparé les domaines de la culture et de l’éducation, anciennement réunis dans le Département de l’éducation, de la culture et des sports (DECS) mais aujourd’hui rattachés respectivement au DJSC et au Département de l’éducation et de la famille (DEF). Or ces deux domaines sont souvent appelés à collaborer. Ainsi, le Conservatoire de Musique Neuchâtelois (CMN) qui dépend du service de l’Enseignement Obligatoire du DEF, forme les artistes de demain et entretient de nombreuses interactions avec la création culturelle notamment grâce aux nombreux chefs de chœurs et chorales et directeurs de fanfares qui y ont été formés. Les cours décentralisés du CMN permettent en outre de sensibiliser à la musique la jeunesse de toutes les régions du canton. Les services du DEF sont également amenés à collaborer avec le service de la culture dans le cadre de la vie culturelle dans les écoles. Cela concerne en particulier les actions de médiation culturelle qui y sont proposées. Dans un autre registre, le SCNE a été amené à jouer le rôle de facilitateur entre les acteurs cultuels et le service des contributions. Il collabore avec le service de l’économie lorsque celui-ci intervient financièrement pour soutenir des projets artistiques et culturels et est également étroitement associé aux réflexions qui prennent place dans le cadre des discussions relatives aux Accords de positionnement stratégiques (APS). Il prévoit aussi de renforcer ses liens avec le service de la consommation et des affaires vétérinaires (SCAV) pour les questions liées à l’obtention d’autorisations, notamment lors de manifestations culturelles et artistiques. Les tâches du service de la culture qui sont couvertes par la nouvelle loi concernent prioritairement : - l’encouragement à la création et à la recherche dans les différents secteurs de l'activité culturelle et artistique (littérature, arts visuels, arts vivants, musique, centre culturels, cinéma, arts populaires, etc.) ; - le soutien aux manifestations culturelles et artistiques ; - les échanges, la diffusion et la communication des valeurs culturelles ; - l'information faite auprès des élèves de l'école obligatoire en faveur des diverses institutions et manifestations culturelles du canton ; - le soutien à la médiation culturelle. 1.7.1. Organisation du service En comparaison intercantonale en Suisse romande, le service de la culture du Canton de Neuchâtel est le plus chichement doté en matière de ressources humaine pour effectuer les missions qui relèvent de l’encouragement à la culture et à la création artistique. L’ensemble des questions et travaux relatifs à ce volet repose en effet sur un modeste 1,15 EPT. L’inconfort de cette situation se traduit parfois par des tensions dans les relations avec les acteurs culturels qui reprochent au SCNE de ne pas consacrer suffisamment de temps et d’énergie pour développer une compréhension mutuelle au travers d’un dialogue harmonieux et constructif. L’approfondissement de thématiques, la recherche et le développement de nouveaux dispositifs ou projets pâtissent également de ce manque de moyens. De facto, le SCNE agit trop souvent de manière réactive au détriment d’une démarche proactive. 11
1.7.2. Soutiens accordés par le service L’État accorde plusieurs types de soutiens. Il verse, comme dit plus haut, des subventions ponctuelles, délivrées à certaines échéances en fonction des demandes reçues. On y adjoindra les séjours, assortis de bourses, dans les ateliers de Paris et Berlin. Il octroie par ailleurs des subventions structurelles. Ces soutiens, en principe renouvelables, sont alloués pour permettre à des institutions ou des producteurs culturels d’honorer des charges fixes liées à leur infrastructure. Depuis 2016, la plupart des subventions 12
structurelles sont assorties de conventions établies pour des périodes de trois ans. Ces conventions pluriannuelles permettent aux acteurs culturels de se projeter dans le moyen terme en assurant une subvention annuelle de base liée au fonctionnement. Elles précisent en outre les attentes de l’État en matière de prestations et de conditions de réalisation. Enfin, le soutien au domaine des arts plastiques s’effectue principalement par le biais d’acquisitions d’œuvres d’artistes neuchâtelois. Longtemps le canton s’est limité à une position réactive. Pour mieux mettre en évidence ses priorités en matière d’encouragement à la culture et à la création artistique, il recourt depuis quelques années à des appels à projets. Ces derniers permettent, tout comme les conventions en matière de soutien structurel, de préciser les attentes de l’État. Dans le cadre de la future clarification des missions entre les différentes collectivités publiques, l’État entend recourir plus fréquemment à cet instrument qui sera intégré dans les prochaines politiques culturelles et programmes d’encouragement. Afin de répondre aux demandes de subvention ponctuelles émanant d’acteurs culturels (institutions, compagnies, artistes), et pour évaluer les propositions réceptionnées suite à des appels à projets, le service de la culture, qui ne compte pas de spécialistes dans ses rangs, s’adjoint les compétences d’experts de domaine, regroupés dans des sous- commissions thématiques. La mise en place de sous-commissions découle de l’alinéa 4 de l’article 11 de la LEAC, mais aucune législation ne désigne formellement les domaines, qui dépendent de la politique culturelle et de l’évolution dans les pratiques de création. Les personnes appelées à siéger sont choisies dans le canton et au-dehors de celui-ci. Il peut s’agir d’acteurs ou de producteurs culturels, de représentants d’associations faîtières ou encore de journalistes. Nommés par le Conseil d’État pour une durée de quatre ans, ces experts étudient les dossiers et émettent des préavis qui sont soumis au chef du département. Depuis l’année 2016, les demandes de subvention se font au moyen de la plateforme cantonale en ligne Culturac. Les subventions sont attribuées sur la base de critères énoncés sur la page web du service de la culture. L’intérêt du projet, son degré de professionnalisme, son aspect novateur, son impact au niveau cantonal ou extra cantonal, son lien avec le canton et avec sa population, ses possibilités de diffusion, son montage financier, sa durabilité, sont examinés. Dans l’analyse des dossiers, il est également tenu compte du principe de subsidiarité/complémentarité avec les collectivités locales. De manière générale, la question des contenus n’est pas primordiale dans la mesure où l’État n’entend pas s’ériger en censeur ni entraver la liberté créatrice des artistes. La disparition, en 2016, du fonds d'encouragement pour les activités culturelles et artistiques laisse moins de flexibilité et de place à l’imprévu dans la répartition des subventions. L’enveloppe budgétaire est répartie par domaines sur la base des estimations des années précédentes. Ces enveloppes restent néanmoins fluctuantes et il est possible d’utiliser dans un domaine l’argent qui n’aurait pas été attribué à un autre. Dans certains cas, notamment pour les appels à projets ou les mises au concours, le nombre des dossiers retenus est volontairement limité pour éviter l’effet « arrosoir ». Aux côtés d’autres représentants de la société civile ayant une expertise avérée du champ de la culture dans le canton, un représentant de chaque sous-commission thématique siège au sein de la commission consultative de la culture. Cette dernière exerce un rôle de préavis sur la politique culturelle, sur les projets de lois et de règlements, sur les subventions renouvelables et sur le choix des artistes qui bénéficieront d’ateliers. 13
Répartitions des soutiens à la culture pour l’année 2019 L’enveloppe dédiée aux soutiens accordés par l’État s’est élevée, en 2019, à 4'778'400 francs dont 1'875'000 francs au titre des fonds documentaires et de la lecture publique. Le solde, soit 2'903'400 a été ventilé sur les différents domaines. Médiation et accès à la culture Sciences et formation 1% 3% Cinéma Arts vivants et centres 6% culturels 27% Musique 11% Arts plastiques 1% Fonds documentaires et Arts et lettres lecture publique 3% 48% 2. TRAVAIL PRÉPARATOIRE ET CONSULTATION PRÉALABLE L’élaboration du présent projet de loi a fait l’objet d’une démarche critique quant aux limites de l’actuelle LEAC, aux réalités des milieux artistiques et aux attentes des acteurs culturels neuchâtelois. L’État, par l’intermédiaire du service de la culture, a mis en œuvre dès 2017 un important processus d’analyse, mais aussi de consultation en vue de juger des évolutions nécessaires. 14
2.1. Rapport HEG Conscient d’une certaine perte de lisibilité de l’action de l’État dans son soutien aux activités culturelles (liée notamment à la multiplication des outils mobilisés), le service de la culture a mandaté deux chercheurs de la Haute Ecole de Gestion (HEG Arc), Jérôme Heim et Mathias Rota, pour documenter et analyser l’évolution de ce soutien depuis l’introduction de la LEAC en 1991. Remis en mai 2018, le rapport de 99 pages intitulé La politique d’encouragement des activités culturelles dans le Canton de Neuchâtel – Analyse du soutien cantonal aux activités culturelles de 1991 à 2018 se base sur d’importantes données quantitatives, mais également sur des entretiens qualitatifs faisant intervenir aussi bien des responsables politiques que des acteurs culturels. S’il valorise le travail du service de la culture, notamment en regard des moyens dont il dispose, le rapport constate les éléments suivants, et y adjoint quelques pistes de réflexion : - l’importance des moyens publics engagés pour la culture dans le canton, nuancée toutefois par la prédominance de l’effort des Communes et de la Loterie Romande ; - le manque d’indicateurs quant aux effets de la politique d’encouragement des activités culturelles ; - la nécessité d’une grande transparence dans la démarche de consultation entreprise dès 2017 par le service de la culture en vue de la révision de la loi ; - l’utilité de garder des critères d’éligibilité relativement souples dans l’attribution des subventions ; l’importance, toutefois, de communiquer adéquatement les objectifs politiques auxquels ces critères se réfèrent ; - la possibilité de faire du formulaire en ligne Culturac une porte d’entrée unique pour les demandes de soutien aux différents échelons (Canton et Communes) ; - la nécessité d’un dialogue régulier entre le service de la culture, les milieux culturels et les autres organes de financement ; la possibilité, pour les milieux culturels, de se regrouper en associations faîtières afin de faciliter ce dialogue ; - la nécessité d’une meilleure coordination des actions de l’État et des Communes, par exemple à travers la création d’une conférence des délégués culturels sur le modèle valaisan ; - l’avantage que le service de la culture aurait à développer une activité de conseil en matière de financement envers les acteurs culturels ; - l’avantage qu’il y aurait à désamorcer les conflits en amont des séances du législatif cantonal, par exemple en instaurant une commission de la culture du Grand Conseil. 2.2. Tables rondes Parallèlement à la démarche analytique, l’entreprise de refonte de la LEAC s’est appuyé sur un processus participatif qui s’est déroulé de 2017 à 2019. Les réflexions et discussions ont pris place au cours d’une série de tables rondes réunissant les acteurs culturels par domaines artistiques, mais aussi les représentants des Communes et les partenaires financeurs. Ces rencontres ont été organisées aux dates suivantes : 15
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