Enjeux psychiques en fin de vie: détresse des malades, deuil des proches Johanne de Montigny, psychologue - Salle : Giuseppe-Saputo
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Enjeux psychiques en fin de vie: détresse des malades, deuil des proches Salle : Giuseppe-Saputo Johanne de Montigny, psychologue
08.03.2017 Enjeux psychiques en fin de vie: détresse des patients, deuil des proches Rendez-vous de la formation de l’OPQ (Webdiffusion et captation vidéo) Atelier (bloc de six heures) Laval, le 10 mars 2017 (Hôtel Sheraton) Johanne de Montigny, M.A.Ps. Soins palliatifs (1988-2015) Pratique privée, Montréal: jo.de.montigny@videotron.ca Parcours personnel et professionnel: Vers les soins palliatifs et le deuil 1
08.03.2017 Objectifs de la formation Saisir le lien entre la détonation psychique à l’annonce d’une maladie grave et la détresse qui s’ensuit. Reconnaître les principaux mécanismes de défense contre les pertes physiques et comprendre l’influence de leurs représentations. Contextualiser la quête de sens du malade à une étape où sa vie est menacée. Distinguer la portée des interventions psychologiques et ses limites dans un encadrement hors du commun. Teneur de la présentation Entre le diagnostic et la fin de vie Les projets basculent. L’identité vacille dans un corps harponné par la douleur, brisé par ses limitations, marqué par ses modifications. Devant le cortège de pertes, de deuils multiples (pertes physiques successives) et la détresse du malade (impacts psychologiques), la présence du psychologue, son accompagnement et ses interventions sont essentiels pour venir en aide aux personnes propulsées vers l’impensable (la mort), interpellées par une cascade d’ajustements (processus de mourir). 2
08.03.2017 Éléments de contenu Soins palliatifs (repères historiques et définition). Annonce d’une maladie létale: le cancer ‐ ses enjeux psychiques (le langage du corps malade, le miroir brisé). Changements physiques en fin de vie et impacts. Changements psychologiques en fin de vie et impacts. Étude de Van Lander (2015): détresse, crise d’identité, mécanismes de défense. Deuil et quête de sens du malade en fin de vie. Interventions psychologiques ou l’importance de la place du psychologue dans un contexte hors du commun: Quand la vie tire à sa fin. Soins palliatifs Repères historiques 1967: Ouverture du Saint-Christopher’s Hospice en Grande Bretagne, destiné aux personnes atteintes de cancer. Fondatrice: Dame Cecily Saunders, infirmière, assistante sociale, médecin et écrivaine. 1974: Ouverture de l’Unité de soins palliatifs de l’Hôpital Royal Victoria de Montréal. Fondateur: Dr Balfour Mount. 1979: Ouverture de l’Unité de soins palliatifs de l’Hôpital Notre-Dame (Mtl). Co-fondateurs: Dr Yves Quenneville, Dr Maurice Falardeau, Andrée Gauvin. 3
08.03.2017 Soins palliatifs Repères historiques… 1985: Ouverture de l’Unité de la première maison de soins palliatifs au Canada. La Maison Michel Sarrasin, Québec. Fondateur: Dr Louis Dionne. 1987: Ouverture de l’Unité de soins palliatifs à l’Hôpital international de la Cité universitaire de Paris. Fondateur: Dr Maurice Abiven. Première psychologue en soins palliatifs en France: Marie de Hennezel. Définition de soins palliatifs Les soins palliatifs sont des soins actifs dans une approche globale de la personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif: Soulager les douleurs physiques et autres symptômes de fin de vie et prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle. Les soins palliatifs et l’accompagnement sont interdisciplinaires. Fauré (2016) 4
08.03.2017 Définition de soins palliatifs… Ils s’adressent au malade en tant que personne, à la famille et à ses proches. Le suivi de deuil fait partie intégrante des soins palliatifs. La formation et le soutien des soignants et des bénévoles font partie de cette démarche. Les soins palliatifs et l’accompagnement considèrent le malade comme un être vivant et la mort comme un processus naturel. Fauré (2016) Définition de soins palliatifs Ils se refusent à provoquer intentionnellement la mort. * Ils s’efforcent de préserver la meilleure qualité de vie possible jusqu’au décès et proposent un soutien aux proches en deuil. Ils s’emploient par leurs pratiques cliniques, leur enseignement et leurs travaux de recherche à ce que ces principes puissent être appliqués. Fauré (2016) 5
08.03.2017 L’annonce d’une maladie potentiellement mortelle: le Cancer L’annonce d’une maladie heurte de plein fouet la compréhension que l’on a de soi‐même et de la vie, car notre conception de la vie est dissociée de celle de la mort. Cette vision dichotomique nie la mort et la rejette hors de la vie. Elle produit un sentiment faussé et de la vie et de la mort. L’éventualité de la mort en devient d’autant plus intolérable. Fischer (2008) L’annonce d’une maladie potentiellement mortelle… Le diagnostic du cancer projette le patient et sa famille dans une réalité modifiée de manière irréversible. Rien n’est plus comme avant. Les événements qui entourent le diagnostic sont imprimés de manière indélébile dans la mémoire du patient et de sa famille. L’expérience subjective lors du diagnostic contient des connotations de mort. Fischer (2008) 6
08.03.2017 Face à l’impensable de sa propre mort La personne à qui on annonce une maladie grave est brutalement confrontée à une réalité insoutenable: elle apprend qu’elle risque de mourir, non pas un beau jour encore lointain, mais peut‐être à plus ou moins brève échéance. Cette situation met brutalement le malade face à un aspect habituellement oublié dans la vie ordinaire: il se trouve confronté de manière particulièrement inacceptable à une réalité impensable, celle de sa propre mort. Fischer (2008) Le mot « cancer » Vivre avec le cancer génère un stress psychologique qui origine du CINE: (Contrôle, l’Imprévisible, Nouveauté, Ego) La maladie est souvent vécue comme une perte de Contrôle du corps, l’étiologie (cause et facteurs) exacte du cancer étant imprécise. Le succès thérapeutique est Imprévisible, la certitude d’une absence de récidive est impossible. Audet‐Lapointe (2016) 7
08.03.2017 Le mot « cancer »… Le parcours oncologique est parsemé de Nouveauté (la nouveauté, la maladie, les traitements, le langage médical). Vivre avec le cancer nous met en présence de l’idée de la mort et provoque une menace à l’Ego dans son sens large. Audet‐Lapointe (2016) Cancer et enjeux psychiques Le cancer secoue une vie… La compréhension de la maladie que nous avons le plus souvent est centrée sur le mal physique, et l’attention que nous portons au malade est elle aussi bien souvent limitée à cet aspect. Sur le plan psychologique, être malade du cancer comporte également une tout autre dimension: c’est être pris dans un engrenage qui impose une autre façon de vivre à travers la dégradation de ses forces, la mutilation de son corps, le sentiment du temps compté. Fischer (2010) = 8
08.03.2017 Cancer et enjeux psychiques… La maladie cancéreuse peut prendre toutes les formes d’expression d’une crise existentielle. La crise existentielle vécue à travers le cancer s’exprime souvent en terme de rupture, de tournant de l’existence, de transitions confrontés à des choix de vie qui inaugurent un temps nouveau marqué par l’incertitude. Fischer (2013) Cancer et enjeux psychiques… L’enjeu psychique pour le malade réside dans le caractère inacceptable de ce qui lui arrive. Le caractère inacceptable éprouvé est particulièrement lié au sentiment de perte et d’impuissance face à une réalité contre laquelle on ne peut plus rien. Les premières réactions de révolte, de refus ou de déni sont autant d’expressions symptomatiques de non acceptation; on évite de voir la situation en face, on se protège de ce qui est trop dur à supporter; on compose avec l’inacceptable en le niant. Fischer (2008) 9
08.03.2017 Cancer et enjeux psychiques… L’acceptation de l’inacceptable révèle un choix intérieur, un choix fondamental, celui de reconnaître ce qui est. Une telle acceptation exprime au fond la seule attitude juste face à la vie: celle de s’adapter à ce qui arrive. L’acceptation de l’inacceptable est l’attitude la plus difficile mais au fond la seule vraie; elle seule permet d’agir psychologiquement sur nous‐même et non plus sur l’existence d’un événement. Fischer (2008) Cancer et enjeux psychiques… L’acceptation permet de faire ce qui est de notre ressort, à savoir prendre sa vie en main avec ce qu’elle a d’inacceptable. La force d’adaptation la plus efficace psychologiquement face à la maladie serait la capacité de l’accepter. En ce sens, la maladie teste la capacité intérieure à reconnaître la réalité. Fischer (2008) 10
08.03.2017 Le langage du corps malade Interventions chirurgicales Traitements Amaigrissement Mutilation Lorsque la maladie fait irruption, c’est toute notre vie qui est ébranlée; le corps malade devient le nouvel espace où nous vivons. Transformation de l’image corporelle. Fischer (2008) Le langage du corps malade… Vivre avec son corps malade est une épreuve où les douleurs physiques sont indissociables de notre être psychique. La maladie grave qui touche le corps touche toujours quelqu’un dans sa vie. Fischer (2008) 11
08.03.2017 Le langage du corps malade… Si on distingue habituellement la douleur qui désigne les manifestations physiques qui font mal et la souffrance qui qualifie le mal psychique, ces deux sensations sont le plus souvent liées. Les réactions des malades montrent l’importance du retentissement psychique des symptômes physiques. Fischer (2008) Le miroir brisé de sa vie La maladie ne touche pas seulement le corps, mais l’image du corps; elle atteint l’identité, c’est‐à‐dire ce lien mystérieux que l’on a avec soi‐même et à travers lequel on se sent être soi, c’est‐à‐dire différent de tous les autres. L’identité désigne en effet l’image que chacun se fait de lui‐ même, pour qui il se prend, pour qui les autres le prennent. Fischer (2008) 12
08.03.2017 Le miroir brisé de sa vie… Si l’image du corps est touchée de plein fouet dans la maladie, l’identité ne se réduit pas non plus à l’image corporelle. Les femmes atteintes de cancer du sein ont parlé de la modification de leur image corporelle en disant qu’elles avaient développé une autre image d’elle-même, moins centrée qu’auparavant sur les caractéristiques corporelles. Elles qualifiaient leur image d’elles-mêmes de « moi intérieur » qu’elles distinguaient de l’image du corps. Fisher (2008) Le miroir brisé de sa vie L’expérience de la maladie peut être l’expérience d’une déflagration profonde de l’identité; elle fait voler en éclats un sentiment de soi jusque‐là essentiellement ancré dans l’image corporelle. Fischer (2008) 13
08.03.2017 Changements physiques en fin de vie Il existe des manifestations physiques que l’on pourrait qualifier d’universelles car elles apparaissent systématiquement quand la mort s’approche quelle que soit la pathologie et ses symptômes particuliers en phase terminale. Le corps d’une personne en phase avancée et/ou terminale perd progressivement sa force vitale. Son niveau d’énergie décroît petit à petit. Fauré (2016) Changements physiques en fin de vie… Fatigue, asthénie Apparition d’oedeme et de « marbrures » cutanées Modifications du fonctionnement des intestins et de la vessie; Modifications respiratoires Spasmes musculaires: les myoclonies (contraction ou relâchement musculaire incontrôlé) Variations de la tension artérielle, du pouls, de la température corporelle (diminution TA, accélération du pouls, refroidissement progressif des extrémités, fièvre). Fauré (2016) 14
08.03.2017 Le deuil comme métamorphose La maladie impose une autre vie et par ce passage contraint et forcé, le malade fait l’expérimentation d’une métamorphose fondatrice d’un autre devenir. Cet état existentiel profondément bouleversé tant du point de vue physiologique et corporel que d’un point de vue psychique et affectif avec son cortèges de souffrances, de désarroi et d’incertitude comporte trois enjeux au regard de la métamorphose psychique: Fischer (2008) Le deuil comme métamorphose Le bouleversement (la brisure de l’identité) Le changement des valeurs La maturation, germination d’un autre rapport à la vie et à soi‐même. Fischer (2008) 15
08.03.2017 Quête de sens Le sens que prendra la vie à la suite d’une perte significative demeure central au dénouement du deuil. Comme l’énonce Vicktor Frankl (2009): C’est seulement dans la mesure où l’être humain trouve un sens à sa vie qu’il s’accomplit. Et, par le fait‐même, découvrirait‐il un sens à sa mort? Changements psychologiques en fin de vie Alors que le corps se dégrade lentement, la vie psychique suit un chemin parallèle. Un détachement progressif. La personne malade commence à se retirer du monde. Ce mouvement s’est déjà un peu amorcé dès les premiers temps de la maladie. Fauré (2016) 16
08.03.2017 Changements psychologiques en fin de vie… L’anxiété L’anxiété est un symptôme extrêmement fréquent en fin de vie. Elle est le reflet de notre interrogation d’être humain sur ce qui va se passer maintenant et après. Il est vain de vouloir complètement la supprimer. Il est important de rechercher d’éventuelles causes physiques qui pourraient provoquer cette anxiété (embolie pulmonaire, occlusion intestinale, confusion mentale). Fauré (2016) Changements psychologiques en fin de vie La confusion mentale Fluctuante en intensité au fil du temps, elle est assez fréquente car elle touche près de 70% des malades en phase terminale. L’agitation en fin de vie Si la confusion mentale est particulièrement intense et prend un caractère aigu, elle peut induire une agitation qui vient perturber le cours de la fin de vie. La personne est très confuse et désorientée, avec une inversion de sa perception du rythme jour/nuit. Elle est effrayée, elle tient parfois des propos délirants. Fauré (2016) 17
08.03.2017 Changements psychologiques en fin de vie… L’agitation en fin de vie Plus rarement, la personne peut sembler calme extérieurement, alors que son discours et son attitude prostrée reflètent une panique intérieure envahie d’idées délirantes. C’est souvent dans ce cas que les soignants passent à côté du diagnostic d’agitation terminale. Rarement (mais cela peut arriver malheureusement), la mort peut survenir dans ce contexte de grande agitation. Fauré (2016) Changements psychologiques en fin de vie… Causes de l’agitation La maladie elle‐même, notamment quand elle touche le cerveau (métastases) Un effet secondaire des médicaments Une douleur mal contrôlée Il existe également des causes psychiques à l’origine de l’agitation (façon inconsciente de se « déconnecter » de la confrontation trop anxiogène avec la fin de la vie). Fauré (2016) 18
08.03.2017 Changements psychologiques en fin de vie… L’agitation en fin de vie est très anxiogène et éprouvante à vivre pour les proches. Le souvenir de la fin de vie de leurs proches, dans ces conditions, peut venir hanter le vécu du deuil, des mois ou des années après le décès. Fauré (2016) Étude de Van Lander (2015) La détresse en fin de vie La détresse en fin de vie constitue le thème central du livre d’Axelle Van Lander (2015) intitulé Les apports de la psychologie clinique aux soins palliatifs. Elle écrit: La perte de sens de l’existence, lorsque surgissent des angoisses diffuses, des vécus extrêmes de vulnérabilité, de solitude profonde et l’impression de perte de soi est tributaire de cette détresse en fin de vie. Appréhender, entendre, analyser la détresse des patients en fin de vie s’impose pour pouvoir proposer une prise en charge efficiente. Elle a choisi de l’entendre comme le signe potentiel d’une souffrance identitaire. 19
08.03.2017 Étude de Van Lander (2015) La détresse en fin de vie Fruit d’un travail de recherche que l’auteur a conduit dans le cadre de sa thèse de doctorat en psychologie, son travail s’inscrit dans une démarche de recherche phénoménologique qui permet de comprendre la signification des phénomènes subjectifs, sans les dénaturer, à partir du récit de la personne malade. Van Lander a proposé à des psychologues intervenant en soins palliatifs en France d’étudier la détresse de leurs patients et ses liens avec une crise d’identité, et ce, à partir d’une même trame d’analyse. Étude de Van Lander (2015) La détresse en fin de vie Durant une année, 26 psychologues ont analysé tous les entretiens qu’ils réalisaient de façon habituelle: 344 malades ont ainsi été suivis à l’aide de 1,120 entretiens. Si la détresse est réellement liée à une période transitoire de perte de soi, cela signifie qu’elle ne trouve pas uniquement son origine dans la peur de mourir comme on peut initialement le penser, mais plutôt dans le fait de perdre son identité. 20
08.03.2017 Étude de Van Lander (2015) La détresse en fin de vie Dans cette étude deux questions essentielles sont abordées: La détresse en fin de vie s’articule‐t‐elle à une crise d’identité? Cette crise d’identité peut‐elle évoluer de façon favorable au malade dans le cadre de soins palliatifs? La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) Les psychologues de l’étude confirment la présence d’une crise du mourir chez plus des trois‐quarts des patients rencontrés en soins palliatifs. Des ruptures identitaires altèrent pour la moitié d’entre eux au moins trois des six sentiments d’identité (les sentiments de continuité, d’unité ou de cohérence, d’originalité ou d’unicité, de diversité, de réalisation de soi par l’action, d’estime de soi). Les sentiments de continuité et de soi réalisé par l’action sont les plus altérés. 21
08.03.2017 La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) On imaginerait que les sentiments d’identité deviennent de plus en plus douloureux en se rapprochant du moment du décès, dans cette période où, la maladie s’aggravant, les pertes physiques se succèdent rapidement malgré les soins apportés. L’identité est cette liaison interne‐externe qui fait que l’on devient soi par le regard de l’autre. La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) C’est au début de la prise en charge de la phase terminale que les sentiments d’identité sont les plus altérés (bien avant que la dépendance ne s’installe). Les sentiments d’identité s’améliorent quelque peu ensuite. Ces ruptures identitaires vont même pouvoir se résilier. C’est perceptible dans 28% des entretiens. 22
08.03.2017 La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) Les entretiens psychologiques confirment que la maladie fait bien trauma. Dans les analyses des psychologues, les pertes somatiques sont clairement corrélées avec les modifications identitaires des patients. La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) Les modifications de l’image du corps (la corporalité) génèrent une rupture du sentiment de continuité et d’unité. Le patient ne se sent plus le même au fil du temps. Il est intéressant que les atteintes de l’image du corps génèrent également une grande lassitude, de façon supérieure même à la détresse. 23
08.03.2017 La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) La perte d’une image unifiée du corps produit une difficulté à se mouvoir psychiquement au même rythme qu’antérieurement, avec cette impression de lourdeur et de perte d’envie. Quant aux fonctionnalités du corps (la corporéité), les perdre affecte le sentiment de se réaliser par l’action. La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) La détresse est deux fois plus importante en présence d’une rupture d’un sentiment d’identité que lorsque le sentiment est restauré. Indéniablement, la présence de rupture identitaire explique le niveau de détresse des patients. Cette crise identitaire augmente incontestablement la détresse. 24
08.03.2017 La crise d’identité des 344 patients de l’étude de Van Lander (2015) Lorsque vient également une rupture du sentiment de soi réalisé par l’action, il s’éprouve comme inutile désormais. Il ne se réalise plus à travers ce qu’il peut faire. Ses moyens d’action se réduisant, il peut se percevoir comme un incapable. Le sentiment d’unité est ensuite le plus fréquemment atteint (altéré). Le patient se ressent comme éparpillé, clivé, comme s’il ne correspondait plus à ce qu’il est normalement. Il n’a plus la sensation de se ressembler. Mécanismes de défense Les mécanismes archaïques telles la régression et la dissociation permettent de se défendre de la menace sans pour autant l’élaborer au niveau psychique. L’humour et la rêverie sont des mécanismes plus évolués. On peut les qualifier de résilients puisqu’ils opèrent une action de transformation sur la menace. Des sentiments de bien‐être pourraient coexister avec des sentiments de détresse. Ce mécanisme de dissociation maintiendrait l’illusion des patients d’une unité du Soi et d’une bonne santé mentale, en tant qu’elle permettrait de supporter les changements discontinus au niveau du soi générés par la maladie létale. Van Lander (2015) 25
08.03.2017 Mécanisme de défense (la dissociation) Un processus identitaire serait donc possible chez les patients en fin de vie qui présenteraient un double niveau de conscience: au niveau conscient et rationnel, la pleine conscience de leur mortalité; au niveau pulsionnel, leur désir de vivre. Ce dernier ne serait pas le signe d’un déni de la mort mais du maintien de la capacité à se projeter dans l’avenir dans une possible continuité de soi. Van Lander (2015) Mécanismes de défense (la dissociation) Michel de M’Uzan (1977) décrit dans son œuvre De l’art à la mort, ce puissant mouvement d’expansion libidinale des patients comme « une tentative de se mettre complètement au monde avant de disparaître. » De M’Uzan M. (1977). De l’art à la mort (chapitre: le travail du trépas). Paris, Gallimard, p. 185 – cité par Van Lander (2015) 26
08.03.2017 Mécanisme de défense (la dissociation) Il est étonnant que ce mécanisme de dissociation soit si peu connu dans les équipes. Il explique bien ce qui souvent les déstabilise: ce grand écart à faire entre des propos mortifères et ceux pleins de vie... Le patient au niveau rationnel se projette dans sa propre mort qu’il organise, mais il peut également prendre plaisir à se projeter dans des perspectives agréables. Van Lander (2015) Mécanisme de défense (la régression) La régression Le patient ne rompt pas les relations avec son entourage. Il apprécie même les attentions des soignants. Il refusera par contre les sollicitations qui ont pour objectif de le stimuler. Il se tient dans une certaine passivité, profitant de ce qu’on peut lui donner, et se montre porté par une tendance à la rêverie. Van Lander (2015) 27
08.03.2017 Mécanisme de défense (la régression) L’investissement du monde imaginaire interne et le désinvestissement du monde extérieur coûtent moins d’efforts, dans ce temps où l’énergie est limitée. Dans ce temps de la régression, les mécanismes de défense plus évolués sont limités par la détresse, ce qui vient signer une certaine rigidité des organisations défensives. Dans cet espace psychique figé, les sentiments d’identité sont rompus… C’est le temps de la régression qui permet au patient de survivre psychiquement la crise du mourir. Van Lander (2015) Des processus de résilience Les malades parviennent à se récréer une vie agréable sur « le fil du rasoir ». Ils rebondissent dans cette nouvelle réalité composée pour une large part de la maladie, et pourtant toujours susceptible d’être riche de multiples facettes. Ce rebond fait appel à des mécanismes comme l’humour ou la rêverie (mécanismes plus évolués). On peut les qualifier de résilients puisqu’ils opèrent une action de transformation sur la menace. Van Lander (2015) 28
08.03.2017 Patiente curieuse de la suite Des processus de résilience Face à la maladie mortelle, deux voies sont possibles pour les patients: Soit une rigidification des défenses pour survivre au moyen de la régression et de la dissociation Soit l’élaboration de la menace aux moyens des mécanismes évolués. Par exemple, l’humour permet de rire avec autrui de ce qui est dramatique, l’humour permet de transformer ce qui pourrait faire pleurer. Parfois, la maladie fait vivre des situations cocasses, et en rire permet de se sentir vivant. Van Lander (2015) 29
08.03.2017 Crise du mourir et détresse La maladie occasionne un certain nombre de pertes somatiques qui sont à l’origine de ce qu’on peut qualifier de « crise du mourir. » Les personnes mortellement malades présentent cette crise spécifique, repérable par une souffrance des sentiments d’identité. À l’origine, une effraction somatique. Van Lander (2015) Crise du mourir et détresse La crise du mourir est celle du choc avec la prise de conscience de sa finitude et de sa mortalité. Pour le patient, le corps ne correspond plus à leur soi, et en même temps il sera la cause de leur disparition. Le mourir provient d’eux‐ mêmes. Pour continuer à exister jusqu’à l’épilogue de leur vie, ils doivent investir un nouvel abri autre que leur corps pour se ressentir à nouveau unifiés, valorisés et dans la continuité: un nouvel habit pour leur identité. Van Lander (2015) 30
08.03.2017 Mécanismes de défense Étude de Van Lander (2015) Comment les patients réagissent‐ils à leur détresse? Les mécanismes de défense sont‐ils repérables? Les patients dont le pronostic est engagé sont‐ils en capacité psychique d’affronter la crise du mourir? Qu’ont‐ils à leur disposition pour atténuer leur détresse? Mécanismes de défense (Résumé‐Résultats) Les défenses à l’œuvre, leur action chez les 344 patients de l’étude. La dissociation apparaît actuellement comme le mécanisme de défense le plus spécifique du mourir. Les psychologues évaluent la présence de mécanismes de défense dans 97% des 1,120 entretiens. Les défenses archaïques telles la régression et la dissociation sont les plus présentes dans 74% des entretiens. Van Lander (2015) 31
08.03.2017 Mécanismes de défense… Ce résultat confirme l’importance de la dissociation comme mécanisme de défense chez les patients en fin de vie. La régression apparaît également comme un recours important. Concernant les stratégies d’ajustement (coping, liens d’attachement), elles sont repérées dans 71% des entretiens. Même en situation de grande détresse, les liens d’attachement ne sont pas en péril. Cela confirme l’importance des liens d’attachement à la fin de la vie. Van Lander (2015) Mécanismes de défense Les défenses évoluées (résilientes) comme la rêverie et l’humour sont pour leur part peu présentes: elles apparaissent dans 75% des entretiens mais avec des intensités minimes. Van Lander (2015) 32
08.03.2017 Mécanismes de défense Seuls deux mécanismes sont en capacité de limiter l’importance de la détresse et d’augmenter la sensation de bien‐être: l’humour et la rêverie dont nous avons vu qu’ils étaient peu présents. Van Lander (2015) Conclusion de l’étude Van Lander (2015) Une détresse est significative chez plus de la moitié des patients suivis en soins palliatifs (chez 57% des patients lors de la première rencontre). La détresse réactivée par la situation de dépendance vitale correspond à des ressentis diffus et profonds de vulnérabilité, de peurs paniques irrationnelles, d’angoisses envahissantes, le tout coloré d’explosions de tristesse incontrôlée. 33
08.03.2017 Conclusion de l’étude Van Lander (2015) La détresse est générée par des douleurs somatiques insupportables qui font effraction, mais également par les ruptures identitaires. En l’absence de ces dernières, rares sont les patients qui présentent un vécu de détresse. Ces ruptures identitaires sont corrélatives d’événements traumatiques ponctuant l’avancée de la pathologie, l’annonce du diagnostic, les hospitalisations et les pertes somatiques. Conclusion de l’étude Van Lander (2015) L’identité de malade gomme leur particularité individuelle. Objet de soins, il ne s’éprouve plus acteur d’une vie planifiée. À l’image du corps fracturé par la maladie, répondent les sentiments d’insuffisance et d’incompétence. La honte prend place et supplante le sentiment de fierté vis‐ à‐vis de soi. Les patients éprouvent un sentiment de fracture de la continuité de soi dans le temps. 34
08.03.2017 Conclusion de l’étude Van Lander (2015) L’étude des suivis psychologiques démontre la possibilité d’un processus résilient de la crise identitaire, que la détresse n’entrave pas. Ces résultats peuvent nous remplir d’espoir pour le destin psychique des patients accompagnés en soins palliatifs, mais ils sont surprenants. Les états de bien‐être apparaissent peu fréquents aux psychologues: 7% des patients présentent un bien‐être significatif. Conclusion de l’étude Van Lander (2015) Un patient en grande détresse peut éprouver des sentiments de bien‐être, même infimes et fugaces. À l’inverse, un patient qui éprouve un bien‐être important n’éprouve aucune détresse. L’état de bien‐être exclut toute détresse et toute lassitude. L’objectif des soins palliatifs est donc réalisable: apporter un mieux‐être malgré l’impact de la maladie. 35
08.03.2017 Au moment de décès: La réalité de deuil Voir mourir celle ou celui que l’on a accompagné pendant des jours, des semaines ou des mois, compte parmi les expériences les plus fortes, les plus émouvantes et les plus complexes que nous ayons à traverser au cours de la vie. Toucher et voir le corps inanimé de la personne aimée confirme l’irréversibilité de la perte. C’est la rentrée brutale dans l’irrémédiable et dans une souffrance, à ce moment‐ là, spécifiquement liée au décès de cette personne. de Montigny (2016) La posture du psychologue dans un contexte de soins palliatifs (Expérience clinique). Le psychologue demeure sensible à l’ambiance qu’il crée et à la qualité de contact qu’il établit. Écoute les mots, contient les silences, installe une relation de confiance dans une première rencontre même brève, car elle pourrait aussi être la dernière. Accueille les valeurs, les croyances, les us et coutumes de chacun (la diversité, la différence). Respecte les refus de services et les limites de chacun. 36
08.03.2017 Attitude du psychologue dans un contexte de soins palliatifs Développe une attitude suffisamment bonne pour veiller à la dignité du malade. Conjugue le savoir‐faire avec le savoir‐être dans une proximité juste. Démontre son empathie, manifeste sa motivation à découvrir le récit de l’autre, à l’accompagner à son rythme. L’intégration des savoirs dans un contexte de soins palliatifs Trois composantes essentielles à l’accompagnement et à l’intervention psychologique: Le savoir (connaissances théoriques) Le savoir‐faire (techniques d’intervention) Le savoir‐être (attitude du thérapeute) Lecomte (1997) 37
08.03.2017 L’écoute du psychologue dans un contexte de soins palliatifs Écouter l’autre c’est considérer que ses appels ne visent pas forcément une réponse, à une action, mais qu’ils visent plutôt à la recherche d’un écho qui fait ricocher la parole dans le cadre d’une relation. Notre présence à l’autre n’est pas une technique d’intervention relationnelle. Nous sommes concernés et touchés par ce que l’autre partage de son destin. Pillot (1994) Le psychologue clinicien dans un contexte de soins palliatifs Développe son écoute du latent (ce que le malade n’a jamais dit jusqu’ici) au travers du manifeste (ce qu’il parvient à verbaliser). Décode les métaphores traduisant l’angoisse de mort. Reconnaît en l’espoir du malade l’expression de son instinct de vie. Porte les questions avec le patient, avec ses proches, avec ses collègues. Contient les détresses, apaise les crises, se rend disponible tout en respectant ses propres limites. Accepte le sentiment d’impuissance devant les façons individuelles de se séparer et de mourir. 38
08.03.2017 Observations cliniques dans un contexte de soins palliatifs Le malade et ses proches composent difficilement avec les quatre « i »: L’incertitude (comment mourir)? L’imprévisibilité (quand vais‐je mourir)? L’inconnu (qu’arrivera‐t‐il après) L’impuissance (absence de contrôle sur la maladie) Expertise du psychologue dans un contexte de soins palliatifs Évalue et soulage les symptômes dépressifs du malade (histoire antérieure à la maladie, persistance de la souffrance morale, et la perte de plaisir). Reconnaît les symptômes de la démoralisation. Tout comme dans la dépression, ce syndrome comprend la détresse, mais se distingue par le désespoir existentiel et le sentiment d’incompétence ou d’inutilité. Décode l’anxiété soulevée ou exacerbée par l’angoisse de mort. Le malade se sent à la fois démuni et totalement impuissant à se défendre (devant l’incontournable). 39
08.03.2017 Travailler en équipe dans un contexte de soins palliatifs L’interdisciplinarité (médecin, infirmière, psychologue, travailleur social, musicothérapeute, intervenant en pastoral…) nous engage dans des valeurs communes: principalement, assurer de bons soins et promouvoir la formation continue. La confiance partagée et la gratitude envers chacun sont sans nul doute les traits qui caractérisent notre plaisir de travailler ensemble. Réunions d’équipe (groupes de parole) dans un contexte de soins palliatifs Plusieurs membres de l’équipe expriment l’espoir d’apprendre des mourants et peut‐être de mieux penser leur propre mourir grâce à leurs expériences de soins et d’accompagnement. Malgré le stress du métier (côtoyer la mort au quotidien), les valeurs de soin protègent leur élan naturel d’aller vers l’autre dans un esprit de don de soi et du travail en équipe. 40
08.03.2017 Services offerts aux proches dans un contexte de soins palliatifs Soutien psychologique face à la mort annoncée, à la vie bouleversée, au pré‐deuil et au deuil. Réunions familiales en collaboration avec quelques membres de l’équipe soignante. Information sur les services offerts par l’équipe (l’union des potentiels de chacun). Grace… la bénévole 41
08.03.2017 Le pré‐deuil et le deuil dans un contexte de soins palliatifs Les proches souvent appréhendent la perte avec anxiété (la crainte de ne pas avoir été à la hauteur, de rater le dernier souffle, de vivre désormais sans l’autre). Mais parfois les proches vivent aussi la perte avec sérénité, gratitude et confiance. L’espoir du mourant L’espoir ne doit plus être tourné vers l’avenir, mais vers l’invisible. Seul celui qui se penche vers son cœur comme vers un puits profond retrouve la trace perdue… L’important est de tenter, toujours de tenter, sans souci de réussite, de mettre un instant au monde ce qui n’y était pas. Singer (2001) 42
08.03.2017 Il n’y a rien à craindre, jamais l’océan ne se noie. Christiane Singer Le deuil Le deuil nomme à la fois la mort d’un être cher et l’affliction profonde causée par cette irréversible disparition. Son processus est évolutif Il se termine lorsque la personne peut évoquer l’être perdu sans s’effondrer. Baussant‐Crenn (2003) 43
08.03.2017 Pré‐deuil ou deuil anticipé? Tandis que le pré‐deuil est envisagé comme un processus adaptatif de préparation à la mort d’un être aimé, le deuil anticipé serait au contraire un processus de désinvestissement de l’énergie psychique et serait associé à une moins bonne adaptation émotionnelle après le décès. Fasse, Sultan et Flahault (2013) Le deuil anticipé Le deuil anticipé se caractérise par l’apparition de toutes les manifestations résultant d’un travail de deuil, mais avant la perte réelle. Le deuil de la personne est vécu comme si la mort s’était produite, mais il n’en est rien. Il en résulte un détachement, un désinvestissement… comme si l’amour disparaissait entièrement avec l’idée de la perte. Bacqué (2003) 44
08.03.2017 Au moment du décès Approcher, voir et toucher le corps inanimé de la personne aimée confirme l’irréversibilité de la mort. C’est la rentrée brutale dans l’irrémédiable et dans une souffrance qui, à ce moment précis, est spécifiquement liée à la mort de cette personne. de Montigny (2016) La traversée du deuil (de Montigny, 2016) La traversée du deuil est exigeante, parfois décourageante, son rythme et son dénouement sont difficilement prévisibles. Le sentiment d’avoir perdu ses raisons de vivre en perdant l’être cher La lente réintégration de son univers La construction de sens s’inscrivent dans les étapes que traverse l’endeuillé 45
08.03.2017 Parcours de l’endeuillé Tous les endeuillés n’ont pas le même parcours; en quelques mois une personne peut évoluer de façon positive, alors qu’une autre tardera à reprendre la vie là où elle a été cassée. En perdant l’autre celle‐ci a le sentiment d’avoir perdu une partie d’elle‐même. On assiste à des périodes d’engourdissement suivies de dégel psychique. Les émotions fluctuent dans le désordre. L’oscillation du deuil. Parfois la personne est complètement centrée sur la perte, parfois elle s’adonne à des distractions « constructives. » Phases du deuil Choc et engourdissement Protestation et désir de retrouver la personne disparue Désorganisation et désespoir Réorganisation et résolution. (Phases reprises et décrites par plusieurs auteurs) 46
08.03.2017 Le modèle à double processus L’oscillation fait référence au modèle à double processus du deuil (Stroebe & Schut, 1999). Ce modèle propose deux orientations distinctes chez la personne endeuillée: L’orientation centrée sur la perte pousse l’individu à mobiliser ses énergies sur tout ce qui entoure la perte elle‐ même. L’orientation centrée sur la restauration signifie que les pensées et les activités sont investies vers la reconstruction, comme nouer de nouvelles relations ou acquérir de nouvelles compétences. La reconstruction… de sens La théorie de la reconstruction de sens stipule que la thérapie est un processus qui permet à la personne endeuillée de se réapproprier l’histoire de sa vie bouleversée par la perte vécue pour en faire un récit plus cohérent et porteur de sens. Neimeyer, Prigerson, Davis (2002) 47
08.03.2017 Distinction entre la dépression majeure et le deuil Deuil non compliqué: Bon fonctionnement, récit cohérent, affect approprié, objectifs de vie redéfinis, bon support social, recadrage possible des pensées. Deuil persistant: Difficulté prolongée à accepter la réalité de la mort (refus obstiné). Sentiment d’inutilité/absence de sens. Engourdissement, détachement. Épisode dépressive majeure: Anhédonie et perte d’intérêt. Culpabilité démesurée. Idéations suicidaires. de Montigny, MacKinnon (2012) Le repli et le retrait L’ambivalence des sentiments, la difficulté de prendre des décisions, d’aller de l’avant et, par‐dessus tout, la peur de ne plus ressentir du bonheur, sont des caractéristiques fréquentes chez les personnes en deuil. La personne en deuil émet un souhait et aussitôt que celui‐ci se concrétise, elle désire autre chose: en fait, c’est le défunt et lui seul qui lui manque. Pour un temps, le reste est sans importance. Au cours des six à douze mois suivant la perte, les endeuillés déploient de réels efforts pour réapprendre à vivre autrement. Les élans autrefois si naturels dorénavant semblent dénudés de sens. 48
08.03.2017 Profil de l’endeuillé L’être en deuil ressent un vide, il a le sentiment d’être un spectateur de la vie, de fonctionner à l’écart ou d’être en décalage avec celle‐ci. Tantôt, il s’isole, à d’autres moments, il voudrait hurler à la foule: Faites‐attention à moi, je suis fragile, je suis triste, j’ai mal et je n’ai aucune motivation. Surtout ne me dites rien. Je suis irritable. « Excusez‐moi, je suis en deuil. » (Titre du livre de Jean Monbourquette et D’Aspremon). Les gens continuent de courir, de rire, de faire comme d’habitude tandis que ma vie s’est écroulée. J’avance machinalement, je mange sans appétit, je dors sans me reposer, je travaille sans intérêt et je réagis à tout avec une hypersensibilité. Questionnement de l’endeuillé… Mon rôle, mon statut sont brisés (je ne suis plus une épouse mais une veuve), mes projets les plus pressants sont annulés, je ne sais pas vers quoi je vais, je ne sais plus très bien qui je suis. Je me sens déprimée. Je me questionne sur mes réactions: sont‐elles normales? 49
08.03.2017 DSM‐5 Le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (2015). Une attention particulière est portée à la distinction entre tristesse normale et deuil d’une part et épisode dépressif caractérisé d’autre part. Le deuil est susceptible d’induire une souffrance significative mais il n’induit habituellement pas d’épisode dépressif caractérisé. Quand le deuil et l’épisode dépressif caractérisé surviennent simultanément, les symptômes dépressifs et le handicap fonctionnel ont tendance à être plus sévères et le pronostic est aggravé par rapport à celui d’un deuil non accompagné d’un trouble dépressif caractérisé. (P.181) DSM‐5 Le deuil complexe persistant est diagnostiqué seulement si au moins 12 mois (6 mois chez l’enfant) se sont écoulés depuis le décès d’une personne proche. Ce délai distingue la peine normale de la peine persistante. (P. 927). La dépression associée au deuil a tendance à survenir chez des personnes qui présentent d’autres types de vulnérabilité aux troubles dépressifs et la guérison peut être facilitée par un traitement anti‐dépresseur. (P. 927) 50
08.03.2017 Médication appropriée: quand? (Hanus, 1997) Sévérité des symptômes Progrès insuffisants en psychothérapie Plans suicidaires Retard psychomoteur Auto‐dévalorisation ou culpabilité morbide Dysfonction psycho‐sociale importante Dépression personnelle réactivée Réaction normale ou dépressive? La réponse normale que l’on attend après un événement qui s’accompagne d’une perte majeure, incluant des sentiments de profonde tristesse, des ruminations autour de la perte et du manque, des troubles d’insomnie et d’appétit, peut ressembler à un épisode dépressif. La présence de symptômes tels qu’un sentiment d’inutilité, des idées suicidaires (en dehors de l’expression du désir de retrouver le défunt), le ralentissement psychomoteur, ainsi que la détérioration sévère du fonctionnement général font penser à un épisode dépressif majeur en plus d’une réaction normale à une grande perte. La durée en constitue la différence. Association of Death Education and Counseling (2012) 51
08.03.2017 Facteurs psychologiques du deuil et autres… Facteurs psychologiques: Incrédulité, tristesse, nostalgie, fatigue extrême, peur d’oublier/peur de la solitude. Déstabilisation. Facteurs cognitifs: Altération de la mémoire, déficit d’attention, hallucinations du deuil. Facteurs comportementaux: Désinvestissement social, troubles de l’appétit, recherche du défunt (visites fréquentes au cimetière) ou évitement de ce qui rappelle le défunt. (Fini la musique, les sorties). Facteurs physiques: Hypersensibilité au bruit, douleurs gastriques, faiblesse musculaire, etc. Les quatre tâches reliées au deuil (Keirse, 2000) Accepter la réalité de la perte (savoir ce qui s’est passé et comment la mort est survenue). Connaître la douleur de la perte. L’intensité de la douleur peut varier d’une personne à l’autre, la manière de la ressentir également, mais il n’est pas possible de perdre quelqu’un d’aimé sans l’une ou l’autre forme de douleur. S’adapter à son environnement sans le défunt. Cela dépendra de la relation entretenue avec le défunt, du rôle qu’il jouait dans notre vie. Donner une nouvelle place au défunt et réapprendre à aimer la vie. Toute l’attention n’est plus concentrée sur la vie perdue. 52
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