Forum pour l'avenir de l'agriculture 2022 : Viser la transformation du système alimentaire - N 198
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N° 198 European Landowners’ Organization MARS-AVRIL 2022 - BIMENSUEL- FR Forum pour l’avenir de l’agriculture 2022 : Viser la transformation du système alimentaire Per Espen STOKNES, professeur adjoint à la BI Norwegian Business School
CountrySide 198 Tables Editorial Thierry de l’ESCAILLE, Secrétaire général des matières La Commission européenne bien consciente de la nécessité d’adresser les crises climat et biodiversité l’a fait, mais quand on se donne le recul nécessaire, vu ce qui se dessine d’une façon malheureusement précipitée, mettant en exergue l’urgence sans prendre en compte 3 Discours de clôture du mois de mars prononcé la géostratégie de la sécurité alimentaire. lors de la session de clôture le 29 mars Aujourd’hui les secteurs agricoles et forestiers sont dans 7 Intégrer l’atténuation du changement climatique une position extrêmement complexe, car on ne peut faire fi de la géostratégie. Le fait que le collège des com- et la régénération de la biodiversité dans la missaires se justifie en disant qu’il ne donne transformation des systèmes alimentaires qu’une vision non obligatoire quand en même temps la commission traduit dans les textes législatifs ses 8 Renforcer la collaboration entre l’UE et les États ambitions, laisse perplexe. membres pour transformer les systèmes alimentaires Même le secteur bio que d’aucuns pensaient largement favorisé par le Pacte vert est plongé par ce dernier dans 9 Les mécanismes des prix alimentaires : comment une crise de marché sans précédent : je ne peux qu’être le système alimentaire paie-t-il la transforma- consterné par la non prise de conscience des problèmes de ce secteur et effrayé de voir la liste de ceux qui tion de ses coûts réels ? abandonnent le secteur quand ils ne mettent pas la clé 10 Faire de l’alimentation saine le choix le plus sous le paillasson. simple Nous attendons de la Commission qu’elle prenne ses responsabilité en mettant en place une politique qui 11 Session de clôture de la conférence annuelle tienne en compte les trois défis à la fois. Donnons-nous le temps de la réflexion stratégique et non pas unique- 12 Résumé de la session de clôture du Mois de mars ment juste le temps « politique » qui n’est générale- du ForumforAg 2022 ment pas plus que celui d’une mandature. Organisons ces secteurs en leur donnant de vraies 14 Le Mois du mars du ForumforAg 2022 a égale- perspectives d’avenir. Utilisons les entreprises privées ment consisté en des discussions de groupes et , les agriculteurs et les forestiers pour faire face aux des dialogues animés grands défis du changement climatique, de la biodiversité et de la géostratégie alimentaire. Mais de 16 ForumforAg 2022 grâce faisons-le avec eux , et non de façon empirique. Le Pacte vert doit porter l’espoir, doit être l’occasion d’une grande évolution, et doit grâce aux évolutions technologiques que nous identifions permettre de ne plus consommer notre planète tout en produisant 2 sérieusement. A ces conditions nous pourrons accomplir les trois objectifs ( biodiversité climat, sécurité alimentaire) sans que l’un détruise l’autre. L'équipe ForumforAg 2022
Janez POTOČNIK, Discours d'ouverture de la conférence annuelle prononcé le 15 mars Discours de clôture du mois de mars prononcé lors de la session de clôture le 29 mars Janez POTOČNIK, président ForumforAg 2022 et président Fondation RISE Nous sommes arrivés à la fin d’un mois fas- cinant du Forum pour l’avenir de l’agricul- Janez POTOČNIK, a ouvert la conférence annuelle 2022 dont le thème principal ture. Au cours de ces dernières semaines, était « Lutter pour la transformation du système alimentaire». plus de 2000 d’entre nous se sont réunis pour débattre et écouter les points de vue et les opinions des autres sur notre sys- Il a souligné que la conférence, qui s’est tenue pour la première fois en direct et en ligne depuis que la Covid a imposé son annulation en 2020 et limité 3 tème alimentaire. Et ce faisant, nous nous la participation à une participation en ligne en 2021, se déroulait sommes rapprochés, nous l’espérons, de « à l'ombre du conflit en Ukraine ». l’élimination des barrières qui nous en- Il a exprimé les condoléances et le soutien du Forum à tous ceux qui souffrent de tourent et de la recherche de moyens pour la guerre et a prévenu qu'elle aurait un impact considérable sur le système alimen- créer une transformation. taire européen. Toutefois, les événements de la journée se concentraient sur la Ceux qui se sont joints à nous pour la jour- mission principale du Forum : « contribuer à concrétiser la vision d'une agriculture durable en harmonie avec la nature, où les agriculteurs peuvent née principale du ForumforAg le 15 mars ont mener une vie décente et où chacun a accès à une alimentation saine et nutritive ». pu en un écouter un impressionnant éven- tail d’intervenants - décideurs politiques, agriculteurs, industrie alimentaire et ONG. Je n’ai pas le temps ici de résumer chaque bler peu, mais je peux vous dire qu’il y a 10 sont transmis sans intention, ce ne sont session, ni de rendre hommage à chacun ans, nous étions encore en train de débattre que des phrases qui nous font nous sentir des intervenants et j’invite ceux qui ne l’ont de la nécessité de changer le système ali- mieux sur le moment et qui ne servent qu’à pas encore fait à visiter le site web du Fo- mentaire. L’acceptation du fait que des nous faire perdre du temps. rum pour revoir les événements. Je vais plu- changements doivent avoir lieu doit être re- tôt résumer ce qui a été pour moi certains Il a été suggéré que nous parlions encore connue comme un premier pas important, des langues différentes, et je suis d’accord. des messages clés qui ont été développés mais le défi est maintenant de trouver un Ce n’est qu’en réunissant tout le monde au- au cours de la journée. moyen de les réaliser. La phrase la plus fré- tour de la table et en créant ensemble un Tout d’abord, j’ai été extrêmement encou- quemment répétée par beaucoup au cours véritable récit encadrant la transformation ragé d’entendre que chacun des interve- de la dernière décennie est qu’il n’y a plus que nous pourrons avancer collectivement. nants a reconnu la nécessité de transformer de temps à perdre. Ce sont des messages Pour reprendre les mots de Per-Espen, notre système alimentaire. Cela peut sem- transmis avec une bonne intention, et s’ils « nous devons dépasser la petite histoire
CountrySide 198 pour passer à un récit plus large » et nous côté, nous avons le courageux Pacte vert mat. Mais encore une fois, sans incitations demander « comment peindre une histoire qui pousse les agriculteurs dans une direc- adéquates venant du marché, il est difficile authentique sur ce à quoi ressemble réelle- tion, et les mécanismes du marché dans d’espérer que les gens se comportent de ment un système alimentaire positif pour la une autre. Le commentaire de M. PIATTI manière responsable à l’encontre de leurs nature et le climat ?». est l’exemple parfait du besoin urgent d’ali- incitations comportementales rationnelles. gner les deux. Et comme l’a succinctement Et les indicateurs joueront un rôle impor- Ces débats, introduits lors du Forum princi- dit Amina MOHAMMED, il faut cesser d’in- tant à cet égard. Grâce aux indicateurs, pal, ont été approfondis dans plus de 14 we- vestir dans les profits à court terme au dé- nous pouvons mieux comprendre le coût binaires organisés tout au long de ces deux triment des objectifs à long terme alignés réel de notre système alimentaire, conce- semaines - portant sur le dialogue transa- sur la maximisation du bien-être social. voir nos politiques en conséquence, trans- tlantique, l’innovation, les systèmes d’éle- former nos modèles commerciaux et mieux Le partage de la charge de notre système vage, la mise à l’échelle de l’agriculture ré- informer les consommateurs. Les indica- alimentaire incombera également au générative, les sols et les objectifs de bio- teurs peuvent contribuer à créer le langage consommateur, ce qui a constitué un élé- diversité. Une fois encore, je vous invite à commun dont nous avons besoin. ment central de la discussion de deux des vous rendre sur le site web du Forum et à sessions sur la tarification des aliments. regarder à nouveau les excellents moments Une partie de ce récit repose également sur On craint bien sûr que si nous appliquons de convergence d’idées. la question de savoir qui porte le fardeau de la transformation, une question qui a été la comptabilité des coûts réels à l’alimen- La crise en Ukraine a fait vaciller certains soulevée à plusieurs reprises au cours de la tation, nous risquons d’augmenter le prix d’entre nous dans notre marche en avant journée. Les agriculteurs sont souvent pré- des aliments, ce qui touchera surtout les pour le changement. Mais cela ne devrait sentés comme la solution, ceux qui peuvent plus pauvres. Mais comme l’a dit Pavan pas être le cas. Oui, nous devons développer à la fois créer de la résilience dans nos sys- SUKHDEV, nous payons déjà pour les ex- des stratégies à court terme pour répondre tèmes alimentaires, améliorer la biodiver- ternalités de la nourriture, seulement à tra- aux inquiétudes immédiates concernant la sité et réduire les émissions de GES, ou le vers différents portefeuilles. L’argent que sécurité alimentaire mondiale, mais j’ai été problème. Mais cela a été remis en question nous payons pour la nourriture passe par le encouragé d’entendre Maciej GOLUBIEWS- à juste titre. Les agriculteurs peuvent effec- porte-monnaie du supermarché, mais nous KI, le chef de cabinet du commissaire à tivement être la solution, mais la charge du payons aussi par le porte-monnaie de la l’agriculture, Janusz WOJCIECHOWSKI, qui changement ne doit pas reposer unique- santé, le porte-monnaie des coûts pour les pense que cela ne doit pas se faire au détri- ment sur leurs épaules. Des appels ont été générations futures et le porte-monnaie de ment de la stratégie à long terme du Pacte lancés pour que la responsabilité, le coût et l’impact du changement climatique. Le pro- vert. Parce que les crises vont continuer à se le risque de la transformation soient parta- blème est seulement que ces portefeuilles succéder, et qu’elles seront plus rapides et gés de manière égale et équitable sur l’en- ne sont pas gardés dans la même poche, et plus dures à mesure que les effets du chan- semble de la chaîne alimentaire, de la ferme que les intérêts qui y sont liés ne sont pas gement climatique s’intensifieront. Et si à la table. liés aux mêmes personnes. nous ne prenons pas des mesures urgentes dès maintenant, notre capacité à amortir J’ai été particulièrement frappé par le com- Le message sur la consommation est éga- ces chocs futurs inévitables diminuera, et mentaire d’un intervenant, Zeno PIAT- lement passé haut et fort. Si nous voulons les effets seront pires et plus étendus. TI, un agriculteur biologique autrichien, transformer notre système alimentaire, il un agriculteur qui voulait manifestement ne suffira jamais de se concentrer unique- Chers amis, les Objectifs de développement bien faire pour l’environnement et le cli- ment sur la production. Nous devons si- durable ont fixé la bonne boussole à l’hu- mat, mais qui a honnêtement dit au Forum multanément nous attaquer à la consom- manité, le Pacte vert européen est un do- que les mécanismes du marché poussent mation et faire évoluer notre société vers cument visionnaire reconnaissant que le les agriculteurs comme lui à marginaliser un régime alimentaire durable, tant pour bien-être futur dépend de la manière dont la biodiversité s’ils veulent survivre. D’un sa santé que pour l’environnement et le cli- nous construirons et respecterons notre re-
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CountrySide 198 lation avec la nature, et la stratégie «De la cessaire à l’alimentation, à l’énergie, aux les partenariats fondés sur l’équité sont ferme à la table» est un document de mise métaux, ou à tout autre défi lié à la sécurité essentiels si nous voulons relever les dé- en œuvre bien intentionné et conçu. Plus et à l’autonomie stratégique. fis auxquels nous sommes collectivement nous nous rapprochons de la création de confrontés. Et nous ne devons pas oublier Deuxièmement, nos efforts pour verdir/ mesures concrètes qui nécessitent un ac- que les normes et les modèles de compor- nettoyer/optimiser le modèle économique cord et un soutien, plus la résistance po- tement liés au modèle économique actuel existant ne suffiront malheureusement tentielle est élevée, ce qui n’est pas sur- ont été établis par les pays à haut reve- pas à atteindre les objectifs de décarboni- prenant. Mais le changement est la seule nu. Nous sommes donc tenus de montrer sation et de découplage et à limiter - dans option, du moins raisonnable. Un engage- que nous sommes désireux et capables de les pays à haut revenu, à réduire - l’utili- ment constructif sur la manière de réaliser changer la réalité que nous avons créée, et sation de ressources naturelles vierges. Si ce changement est donc la seule approche de mener les efforts de transition. les questions liées à la surconsommation logique. De même, lorsqu’il s’agit du do- et aux ombres de l’impérialisme fondé sur Je sais que les défis auxquels nous sommes cument « De la ferme à la table»». Tout le les ressources, qui nous ont conduits à une confrontés aujourd’hui peuvent parfois reste ne ferait que (de nouveau) retarder la énorme dépendance à l’égard des impor- sembler insurmontables, mais en tant transition nécessaire et cela n’aiderait per- tations de ressources, ne sont pas abor- qu’êtres humains, nous nous sommes rele- sonne, y compris les agriculteurs. dées de manière sincère et efficace, le fos- vés à maintes reprises au cours de l’histoire Continuons à nous écouter les uns les sé entre les pays à haut et à faible revenu pour faire face à d’énormes changements. 6 autres et à construire un langage collectif pour aller de l’avant, mais...pour vraiment ne fera que se creuser. Cela ne créerait pas les conditions propices aux partenariats in- Et comme Margaret MEAD l’a dit un jour : « Ne doutez jamais qu’un petit groupe de ci- aller de l’avant. ternationaux efficaces et au partage de la toyens réfléchis et engagés puisse changer souveraineté qui seront nécessaires. Dans le monde. En fait, c’est la seule chose qui Fondamentalement, il y a deux problèmes ce monde interconnecté et interdépendant, l’ait jamais fait. » principaux, qui mériteraient une attention particulière. Premièrement, notre attention et notre comportement sont trop axés sur le court terme. Le temps qui passe met à nu tous nos problèmes liés à la fragilité et à la sé- curité, et les événements indésirables de- viennent encore plus fréquents et graves. L’expérience de Covid et les conséquences de la terrible guerre en Ukraine rendent cela plus qu’évident. Il est bien sûr né- cessaire de remédier à ces conséquences, mais il est surtout important de commen- cer à construire systématiquement une économie et une société plus résilientes. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons évi- ter, ou du moins limiter, les chocs qui nous surprennent de manière répétée, et ce n’est qu’ainsi que nous resterons crédibles lorsque nous réclamerons l’attention né-
Countryside 198 SESSION 1 Intégrer l’atténuation du changement climatique et la régénération de la biodiversité dans la transformation des systèmes alimentaires Lors de son intervention, Per Espen STOKNES, professeur adjoint à la BI Norwe- gian Business School, a cherché à savoir com- ment réussir à convaincre les 450 millions de consommateurs de l’Union européenne et tous les acteurs de la chaîne alimentaire d’appliquer les solutions développées par la recherche et la science. Il a vivement conseil- taires soit utile à notre santé, aux opportu- responsable des marchés environnemen- lé de ne pas adopter une approche fondée nités et à la société, prévoir des signaux pour taux chez Cargill, a souligné : « Nous de- sur le déficit d’information, dans laquelle les le retour d’information et raconter une his- vons produire plus de nourriture avec moins consommateurs sont simplement nourris de toire. « Chaque aliment s’accompagne d’une d’émissions, préservant ainsi la nature. faits et de données : « La recherche montre histoire et nous devons passer d’une petite C’est un casse-tête presque impossible à ré- que montrer la recherche aux gens ne fonc- histoire à un récit plus vaste. » soudre ». Toutefois, en combinant l’élan des tionne pas ». Une telle stratégie déclenche entreprises, des ONG, des banques, des in- Lors du panel de discussion qui a suivi, Al- cinq mécanismes psychologiques. Ces der- vestisseurs et des gouvernements, ainsi que berto ARROYO SCHNELL, responsable des niers sont : la distance (le problème est ail- des capitaux suffisants pour intensifier les leurs), le malaise (une capacité limitée aux politiques et des programmes du bureau initiatives existantes, « nous serons sur la mauvaises nouvelles), la dissonance (ten- régional européen de l’Union internationale bonne voie ». sion entre la connaissance et l’action), le déni pour la conservation de la nature (UICN), a souligné la nécessité d›une transformation. Poursuivant la discussion, Heske VERBURG, (enfouissement des faits inconfortables) et l’identité (la critique des choix alimentaires « Tous les acteurs doivent faire partie de la directeur général de Solidaridad Europe, in- est une attaque contre les individus). solution, sinon nous sommes condamnés», tervenant via zoom depuis le Ghana, a lancé a-t-il déclaré, en mettant particulièrement un appel fort pour que l’on cesse de traiter l’accent sur les agriculteurs car « du point de les agriculteurs comme des victimes ou des vue de l’environnement, seuls les agriculteurs coupables du changement climatique. Ils de- Il a expliqué comment les cinq outils per- sont en mesure d’apporter un changement ». vraient être considérés comme des «héros du mettent de surmonter ces réactions né- climat» grâce à des pratiques à faible émis- gatives. Mettre l’accent sur la dynamique Au cours de la discussion, Robert HORSTER, sion de carbone et à l’énorme potentiel de sociale plutôt que sur les faits et les gra- directeur mondial du développement du- stockage du carbone sur leurs terres. « Nous phiques, rester simple, faire en sorte que rable pour les chaînes d’approvisionnement devons commencer à en payer le prix et les la communication sur les produits alimen- agricoles et les ingrédients alimentaires et agriculteurs devraient être incités à adopter des pratiques durables. » En complément au dialogue, Dirk JACOBS, 7 directeur général de FoodDrink Europe, a mis en évidence les « quatre C de la crise » auxquels les entreprises sont confrontées : covid, conflits de guerre, changement clima- tique et coûts. Il a appelé à la stabilité des relations commerciales et à « la nécessité d’intégrer les moyens d’atténuer les risques de la transition, de faire face à la volatilité qui augmentera avec le temps et d’inciter les agriculteurs (aux changements) ». La réglementation peut créer les conditions nécessaires, mais les codes de conduite vo- lontaires permettent de définir des visions et des voies communes pour l’avenir. Les participants s’accordent à dire que les agriculteurs doivent jouer un rôle clé dans la transformation, qu’ils ont besoin d’un soutien financier, en particulier les petits producteurs, et que la guerre en Ukraine ne doit pas détourner l’UE de ses stratégies énergétiques, environnementales et agri- Dirk JACOBS, Robert HORSTER, Alberto ARROYO SCHNELL, Stephen SACKER, Heske VERBURG (sur l'écran) coles actuelles.
CountrySide 198 SESSION 2 Renforcer la collaboration en- tre l’UE et les États membres pour trans- former les systèmes alimentaires Ouvrant la session 2 de la conférence annuelle, Geneviève PONS, directrice générale de l’Europe - Jacques DELORS à Bruxelles, a estimé que les plans stratégiques nationaux constituaient « une intention louable de donner plus Au cours de son intervention Maciej GOLU- culture doit assurer une alimentation durable de responsabilités aux États membres » BIEWSKI, chef de cabinet du commissaire et la sécurité alimentaire ». Il a indiqué que dans la mise en œuvre de la Politique à l’agriculture, Janusz WOJCIECHOWSKI, a la plupart des plans stratégiques nationaux Agricole Commune (PAC). Elle a toutefois souligné l’importance pour l’UE et les États pourraient être adoptés avant l’été et fonc- souligné l’absence de lien direct entre membres de travailler « main dans la main » tionner à partir de janvier 2023. Une légis- le Pacte vert européen et la PAC et pour réaliser une transformation ambitieuse lation est également nécessaire pour assu- l’incapacité de la Commission à rejeter du système alimentaire. Il a souligné que la rer une mise en œuvre adéquate. Il a souli- un plan stratégique s’il ne respecte pas nouvelle politique transfère une grande res- gné la nécessité de soutenir les agriculteurs les objectifs environnementaux plus ponsabilité aux États membres pour sa mise dans les défis à venir. « Il est très compliqué en œuvre par le biais de plans stratégiques pour les agriculteurs de respecter toutes ces larges de l’UE. nationaux. Lorsque la Commission approu- normes élevées sans le soutien de l’ensemble vera les plans, elle assurera la nécessaire de la filière alimentaire », a-t-il déclaré. Elle a souligné que la stratégie « De la ferme « connexion entre les parties de la straté- Zeno PIATTI, agriculteur autrichien, vice-pré- à la fourchette » est un pas dans la bonne di- gie « De la ferme à la fourchette » relatives à sident du Land&Forst Betriebe, a soutenu rection, mais qu’elle ne fournit pas « le cadre l’agriculture et la nouvelle PAC », tout en te- que le débat était « un peu naïf ». « Les agri- juridique et politique solide pour le système nant compte des circonstances nationales culteurs ne se mettent pas au vert simple- alimentaire durable dont nous avons be- spécifiques. ment parce que cela ne nous rapporte rien. soin ». Appelant à une direction claire pour Nous n’agissons donc pas en conséquence », M. GOLUBIEWSKI, a souligné que la stra- guider la transformation, elle a présenté a-t-il expliqué. Ce revenu supplémentaire tégie est suffisamment flexible pour tenir quatre façons dont une politique alimen- devrait provenir soit de prix plus élevés pour compte des besoins à court et moyen terme taire pourrait établir un lien entre les acti- les agriculteurs, soit de paiements publics. Il causés par la guerre en Ukraine et que son a appelé à une refonte des chaînes d’appro- vités européennes et nationales. Les poli- impact sur l’alimentation, les revenus et la tiques doivent être alignées sur des objectifs visionnement pour renforcer la position des sécurité sera suivi de près. agriculteurs et à des paiements pour les ser- et des principes communs, une vision à long terme de la transformation est nécessaire, Lors de la table ronde, Achim IRIMESCU, mi- vices éco-systémiques qui protègent la bio- les nombreuses initiatives distinctes doivent nistre plénipotentiaire, représentation per- diversité et assurent un climat stable. 8 être rassemblées dans un cadre plus cohé- rent et la responsabilité de la transition doit manente de la Roumanie auprès de l’UE, a soutenu l’évolution vers une alimentation M. PIATTI a critiqué les plans stratégiques nationaux, affirmant qu’ils allaient dans des être répartie équitablement tout au long de verte, mais a rappelé à l’auditoire que « nous directions totalement différentes. « Nous la chaîne de valeur alimentaire. devons également garder à l’esprit que l’agri- avons des distorsions du marché où des fermes voisines d’une frontière entre elles se font concurrence à des niveaux totalement différents ». Au cours du dialogue, le professeur Peter PICKEL, chercheur et responsable des re- lations extérieures chez John Deere a ex- pliqué la vision qui sous-tend la transition vers l’agriculture 4.0. « Nous traitons chaque plante comme un individu ». En fournissant des mesures phytosanitaires, des engrais et de l’eau avec précision, on minimise les intrants, on maximise les rendements et on augmente les revenus des agriculteurs. Il a appelé les gouvernements à veiller à ce que les agriculteurs aient accès aux finan- cements nécessaires pour investir dans les nouvelles technologies qui les aideront à être plus durables que par le passé. Derrière ces technologies, a-t-il souligné, se cache la conviction « qu’elles apportent une valeur ajoutée au client ». Peter PICKEL, Zeno PIATTI, Achim IRIMESCU, Rose O'DONOVAN
CountrySide 198 SESSION 3 Les mécanismes des prix alimentaires : comment le système alimentaire paie-t-il la transformation de ses coûts réels ? Máximo TORERO CULLEN, économiste en chef de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), dans le premier discours liminaire de la session, a décrit le prix réel des aliments comme un prix équitable qui reflète tous Maximo TORERO CULLEN Paven SUKHDEV les actifs utilisés dans la production ali- mentaire. « C’est un prix social qui met maladie dans le monde » et que le système consommation a un impact », a-t-elle décla- en évidence les effets néfastes du travail alimentaire humain est responsable d›en- ré. Elle a souligné la manière dont l’entre- des enfants et empêche la perte du patri- viron la moitié des émissions de gaz à effet prise travaille avec des ONG pour améliorer moine, et c’est un prix qui peut aider un les performances en matière de biodiversi- de serre. Il a prédit que le changement est à consommateur à choisir des options plus venir, car les systèmes alimentaires sont ré- té et réduire les coûts réels. Elle soutient les saines », a-t-il expliqué. Aujourd’hui, ce- évalués et « les énormes externalités le long agriculteurs en leur versant une prime pour pendant, il n’existe pas de norme ou de de la chaîne alimentaire doivent être recon- les produits en voie d’être entièrement biolo- méthode unifiée, tandis que la mesure nues, mesurées, évaluées et gérées ». En fai- giques. Cette démarche profite aux consom- des valeurs dans différentes dimensions sant pression pour le changement, l’accent mateurs (plus de choix), à l’entreprise (sécu- nécessite beaucoup d’informations et de doit être mis sur les avantages pour les per- rité des futurs produits biologiques) et aux nombreuses hypothèses. sonnes et la santé. agriculteurs (récompense de leurs efforts). M. SUKHDEV a déclaré qu’il était possible de Poppy EYRE, responsable du soutien à l’in- mesurer de manière exhaustive les systèmes novation chez SusMetro pour FoodSHIFT L’adoption d’une approche fondée sur le coût 2030, a expliqué le manifeste que dix jeunes alimentaires. Cette approche holistique ne réel permettra de mieux comprendre com- avaient créé dans le cadre du programme se limite pas au profit par hectare, mais uti- ment utiliser plus efficacement les intrants ‘FutureFoodMakers 2021’. Leur menu du lise un modèle pour évaluer des systèmes et minimiser les externalités. Elle est utile alimentaires entiers, en mesurant les flux et changement en six points comprend une aux gouvernements, aux investisseurs, aux en évaluant les résultats et les impacts, tels véritable comptabilité analytique. Ce n’est producteurs et aux consommateurs, car elle que les changements dans le capital naturel, peut-être pas une réalité aujourd’hui, mais permet d’identifier le coût réel des intrants humain et social. elle a prédit : « Ma génération va certaine- sur l’environnement et l’impact des poli- ment voir cela ».La jeune femme de 23 ans a tiques nécessaires à la transformation du Au cours de la table ronde, Julia RISS, res- exhorté les jeunes à penser de manière sys- système agroalimentaire - un concept plus ponsable du bureau de Bruxelles du groupe témique et à remettre en question le statu large que la seule production alimentaire. Rewe, a décrit comment son entreprise avait quo, et a demandé aux personnes occupant Pavan SUKHDEV, fondateur et PDG de GIST Impact, dans le deuxième discours principal, appliqué la comptabilité en coûts réels au prix de certains de ses produits de base dans des postes à responsabilité de les aider. Un changement radical de nos systèmes éco- 9 en direct depuis Mumbai, a soutenu que les le cadre d’une expérience unique. Elle les a nomiques est nécessaire et cela impliquera systèmes alimentaires existants sont cas- affichés à côté du prix réel pratiqué, susci- des risques. « Plonger dans l’inconnu est une sés à bien des égards. Il a cité des analyses tant un intérêt considérable de la part du pu- chose effrayante à faire, mais je pense que montrant que « nos régimes alimentaires blic et des médias. « Notre message était de c’est notre seule option ». sont devenus le premier facteur de risque de créer la transparence et de montrer que notre Cliona HOWIE DEL RIO, directrice générale de Foundation Earth, a souligné qu’une vé- ritable comptabilité analytique doit être fon- dée sur des données scientifiques, crédibles et transparentes, et favoriser le change- ment. Son organisation développe un label indépendant pour les aliments et les bois- sons. Celui-ci apportera « des atouts et de la valeur à l’ensemble de la chaîne de valeur, jusqu’aux agriculteurs, en donnant du mérite là où il est dû ». Scientifique environnemen- tale ayant 25 ans d›expérience, elle souligne : « Nous devons changer la façon dont nous produisons et cultivons les aliments pour of- frir aux gens de meilleures options ». Cela nécessite une approche holistique et systé- mique, implique l’éducation et la sensibilisa- tion et exige que tous les leviers du change- ment soient déclenchés simultanément. Cliona HOWIE DEL RÍO, Poppy EYRE, Julia RISS, Stephen SACKER
CountrySide 198 SESSION 4 implication et un engagement forts », a-t- elle déclaré au Forum. Faire de l’alimenta- Silviu POPOVICI, PDG de PepsiCo Europe, tion saine le choix le a déclaré qu’il était optimiste quant à l’évolution vers une alimentation plus saine plus simple et plus durable, car les consommateurs, les détaillants, les agriculteurs et l’industrie Lors de son discours d’ouverture, vont tous dans la même direction. Il a Stella KYRIAKIDES, commissaire à la fait remarquer que l’entreprise réduit santé et à la sécurité alimentaire considérablement la teneur en sucre des de la Commission européenne, a sou- boissons gazeuses, travaille à l’élaboration de produits sans substances artificielles ligné la responsabilité de chaque et utilise des contrôles de portions pour génération envers ses successeurs. inciter les consommateurs à manger moins. « C’est exactement pour cette raison que « Nous cherchons à transformer les produits l’Europe ne peut tout simplement pas que nous vendons pour que les produits plus se permettre de faire l’erreur de revoir à sains occupent une plus grande place dans la baisse notre ambition de rendre nos notre portefeuille. Nous pensons que cette systèmes alimentaires, notre agriculture, transformation fera une énorme différence Stella KYRIAKIDES notre consommation alimentaire plus dans la façon dont les gens mangent et ce respectueux de notre planète », a-t-elle qu’ils mangent », a-t-il prédit. afin qu’il favorise les choix sains et non le déclaré dans un discours d’ouverture PepsiCo expérimente l’internalisation du prix contraire. « Si nous pouvons faire en sorte enregistré. du carbone afin que les employés prennent que les aliments aient bon goût, les gens les conscience de son coût lorsqu’ils prennent choisiront. Et une part de plus en plus grande des décisions. Mais M. POPOVICI a mis en de l’assiette deviendra plus saine et il ne sera Elle a énoncé les objectifs d’un futur garde : « Je pense que si on tient compte pas nécessaire de forcer les gens à le faire. Ils écosystème alimentaire européen : rendre des externalités, nos coûts d’exploitation le feront parce qu’ils le veulent ». les systèmes alimentaires plus résilients, vont augmenter et je ne pense pas que le explorer de nouvelles façons d’impliquer Il a soutenu que le débat actuel ne devrait consommateur sera prêt à payer pour cela ». les citoyens et les parties prenantes et pas être formulé comme si l’agriculture était introduire un cadre de labels alimentaires Jack BOBO, directeur de la politique mondiale le problème. Les agriculteurs ont fait des durables. « Des personnes en bonne santé de l’alimentation et de l’eau au The Nature progrès considérables en matière d’efficacité font des économies et des sociétés en bonne Conservancy, a observé que l’environnement et de rendement. Si le secteur utilisait encore santé ». La voie à suivre est claire, mais alimentaire a considérablement changé au les techniques de 1960, « il nous faudrait un pour que la transition plus que nécessaire cours des dernières décennies. L’Américain milliard d’hectares de terres supplémentaires fonctionne, « nous attendons de toutes les moyen consomme aujourd’hui 20 % de pour nourrir le monde que nous connaissons parties prenantes de la chaîne alimentaire calories de plus qu’en 1970. Il a appelé à aujourd’hui », a-t-il ajouté : « Je dirais plutôt ainsi que de nos partenaires mondiaux une un remodelage de cet environnement, que l’agriculture est bonne et s’améliore, mais pas assez vite ». Katrien VERBEKE, PDG de Let Us, aide à tisser des liens entre les initiatives à petite échelle et les acteurs plus importants afin de combler les lacunes du système alimentaire. 10 « Il s’agit beaucoup de nouer des liens et donc de susciter le respect ». Elle a travaillé sur la première politique alimentaire urbaine de Belgique, à Gand. Elle a mis en place un conseil alimentaire impliquant différentes voix dans le système alimentaire. Celui- ci était chargé de décider de la direction à prendre par la ville et de la manière d’utiliser son budget. Les villes prennent l’initiative dans ce domaine car elles sont proches de leur écosystème local et leur priorité est le bien-être de leurs citoyens, et non l’argent. Elle a appelé les entreprises à être plus orientées vers les objectifs plutôt que vers l’argent, et a suggéré qu’elles aussi « invitent leurs parties prenantes à décider où va l’argent et comment il est investi de la bonne manière ». Mme VERBEKE a insisté sur le pouvoir de l’alimentation à créer des emplois et a décrit des programmes mis en place à Toronto et en Équateur pour aider les gens, notamment les réfugiés, à acquérir Silviu POPOVICI (sur l'écran), Katrien VERBEKE, Jack BOBO, Rose O'DONOVAN les qualifications nécessaires.
CountrySide 198 diquant les moyens d’y parvenir. Des investissements ciblés sont nécessaires pour améliorer la qualité et la diversité des aliments ; les secteurs de l’alimentation et de l’agriculture doivent être soutenus pour accroître la disponibilité d’aliments diversi- fiés, sûrs et nutritifs ; une approche des sys- tèmes alimentaires peut rendre les aliments sains moins chers et garantir l’accès à des ré- gimes alimentaires abordables et durables pour tous ; enfin, des mesures doivent être mises en place pour résister aux chocs tels que les pandémies et le changement cli- matique. Le Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires a recensé plus de 2 000 solutions. « Utilisons ces outils pour transformer les systèmes alimentaires, nour- rir l’humanité et construire un monde plus sain et plus durable pour tous », a-t-elle dé- sous un angle plus large et impliquer toute claré. Session de clôture une série de parties prenantes. L’ancien di- Janez POTOČNIK, président du ForumforAg recteur général de l’Organisation Mondiale de la conférence du Commerce a déclaré que l’impact de la 2022 et président de la Fondation RISE, en clôturant les discussions, a souligné que le annuelle guerre en Ukraine était un bon exemple de dernier rapport du Groupe d’experts inter- ce qui se passe lorsque les marchés alimen- gouvernemental sur l’évolution du climat taires mondiaux sont perturbés. Il a forte- était sinistre à lire. « Les impacts liés au cli- Pascal LAMY, président du Forum de Pa- ment déconseillé l’introduction de restric- mat réchauffent le monde à un niveau supé- ris sur la paix, vice-président de l’Europe tions à l’exportation qui ne feraient qu’ag- rieur à ce que la plupart d’entre nous avaient Jacques DELORS, a ouvert la session de graver la situation, notamment pour les pays prévu et à un rythme accéléré ». Le choix qui clôture en examinant l’avenir de l’agricul- fortement dépendants des céréales russes nous attend est soit d’utiliser la petite fe- ture dans le contexte des tendances du et ukrainiennes. nêtre d’opportunité qui existe pour gérer « la commerce mondial. Il a indiqué qu’aupa- Dans son discours au Forum, Amina MO- transition nécessaire de manière organisée , ravant, le débat s’était concentré sur les HAMMED, vice-secrétaire générale de l’Orga- soit d’attendre que les conséquences nous coûts et les avantages de la protection des nisation des Nations Unies et présidente du obligent à changer. Je n’ai pas besoin de vous producteurs. Cette époque est en train de Groupe des Nations Unies pour le développe- expliquer ce que cela signifiera dans la vie reculer, principalement parce que les prix ment durable a averti que chaque Objectif de réelle ». Il a demandé qu’une évaluation de de l’agriculture, et dans une certaine me- développement durable (ODD) est en dan- l’impact intergénérationnel soit obligatoire sure de l’alimentation, sont en hausse à ger, car les finances sont canalisées vers « le pour toutes les propositions politiques. moyen et long terme. « Je pense que nous profit à court terme, plutôt que la résilience Après avoir remercié toutes les personnes évoluons désormais dans ce que j’appelle à long terme ». Cela affecte l’ODD 3 qui ap- impliquées dans les événements de la jour- l’ère de la précaution, bien plus que de la pelle à assurer une vie saine et à promouvoir née, il a réitéré son appel à la fin de « la protection. Les producteurs ne sont pas le bien-être à tout âge. « Nous devons faire guerre insensée » et des souffrances en l’enjeu principal de la politique agroali- en sorte que les régimes alimentaires sains Ukraine. Mais il a terminé sur une note opti- mentaire ». soient au cœur de la transformation des sys- miste : « Malgré tout, restez optimiste. Il ne tèmes alimentaires », a-t-elle déclaré dans un message vidéo adressé au Forum, en in- faut jamais oublier que les optimistes vivent plus longtemps et mieux. » 11 Il a identifié trois facteurs clés - la nature, la santé et la sécurité - comme « le nouvel ensemble d’objectifs et de cibles pour abor- der le modèle de l’agriculture et de l’alimen- tation futures dans l’Union européenne, ce qui implique une transformation du système agroalimentaire de l’UE ». Cela implique une évolution vers une agriculture plus régénéra- trice, une réglementation visant à protéger la santé humaine et l’adoption des mesures de précaution nécessaires pour garantir la disponibilité et l’accessibilité financière des aliments. Il a fait une distinction claire entre la sécurité alimentaire, qu’il soutient, et la souveraineté alimentaire, qu’il ne soutient pas. La première « consiste à fournir de la nourriture à un prix abordable ». La seconde « consiste à produire ce que vous mangez ». M. LAMY a soutenu que la transition vers le Pacte vert nécessitera de profonds change- ments dans la Politique Agricole Commune, un aspect qui a été jusqu’à présent « large- ment négligé ». Le débat doit être envisagé
CountrySide 198 Mark TITTERINGTON, Martin GERZABEK (sur l'écran), Janez POTOČNIK Résumé de la session mission aide l’agriculture ukrainienne en facilitant les voies terrestres pour ses ex- rative, a souligné la nécessité de disposer de modèles. « Les agriculteurs ont besoin de de clôture du Mois portations et en fournissant du diesel à ses preuves pratiques que l›approche positive agriculteurs. Il s’est dit confiant que l’UE de mars du poursuivra sur la voie de la transformation, pour la nature fonctionnera économique- ment avant de l›essayer à grande échelle. » ForumforAg 2022 tout en ciblant des mesures à court terme L’agriculture étant de plus en plus consi- pour aider les producteurs. Il a souligné dérée dans le contexte du changement cli- que l’UE était « prête à aider les parties du matique, contrairement à il y a dix ans, elle Janez POTOČNIK, président du Forumfo- monde qui regardent vraiment avec crainte rAg 2022 et président de la Fondation s’est montrée optimiste quant à l’avenir. les conséquences possibles » de la guerre en Elle a toutefois invité les décideurs à « aider RISE, a ouvert la dernière session de la Ukraine. les agriculteurs à supporter les coûts liés à série d’événements organisés par le Fo- Dans une interview exclusive, Robert BON- la transition vers une agriculture durable ». rum pendant un mois, notamment la NIE, sous-secrétaire américain à l’agricul- Marie BRUESER, responsable de l’entre- conférence annuelle et divers webinaires, ture, a présenté les détails du programme preneuriat chez Thought For Food, a ex- pour débattre de l’avenir des systèmes de produits de base intelligents sur le plan alimentaires. Il s’est réjoui du fait que pliqué que son organisation aidait dans climatique mis en place par l’administra- l’ensemble du système alimentaire des 12 tous les intervenants ont reconnu la nécessité d’une réforme. Pour réaliser tion pour stimuler la production de bétail et de céréales, tout en réduisant les émis- start-up à pousser. Si le financement est essentiel, l’expérience des grandes entre- cette transformation, l’ensemble de la sions de gaz à effet de serre et en piégeant prises et leur soutien aux nouvelles idées chaîne alimentaire doit être impliqué, le carbone. Il a insisté sur les éléments de et pas seulement les agriculteurs, et la mesure, de suivi et de vérification du pro- consommation, ainsi que la production, gramme. « Nous demandons en somme au doivent changer, les deux étant encou- contribuable américain de venir aider nos ragées par des incitations commerciales agriculteurs, nos éleveurs, nos propriétaires appropriées. forestiers à mettre en place ces pratiques », a-t-il déclaré, ajoutant : « Notre meilleur argument est de disposer de données et de M. POTOČNIK a convenu de la nécessité démontrer que cela peut réellement fonc- d’élaborer des stratégies à court terme pour tionner ». répondre aux préoccupations mondiales en Dans le prolongement du lancement, en matière de sécurité alimentaire suscitées novembre dernier, de la plateforme tran- par la guerre en Ukraine, mais pas au dé- satlantique de collaboration en matière triment d’une stratégie à long terme. « Si d’agriculture, la sous-secrétaire BONNIE a nous ne prenons pas des mesures urgentes qualifié « d’importance capitale » l’échange maintenant, notre résilience pour contreba- d’informations entre les scientifiques et lancer les inévitables chocs futurs diminuera les agriculteurs européens et américains. et les effets seront pires et plus étendus », « Nous sommes tous dans le même bateau. a-t-il averti. Je pense qu’il y a beaucoup à apprendre ». Maciej GOLUBIEWSKI, chef de cabinet du Lors d’une discussion en ligne, Galina PEY- commissaire à l’agriculture, Janusz WOJ- CHEVA-MITEVA, une agricultrice bulgare www.telemak.com CIECHOWSKI, a expliqué comment la Com- pratiquant avec succès l’agriculture régéné-
CountrySide 198 Mark TITTERINGTON, Thierry de l'ESCAILLE, Jon PARR (sur l'écran) sont également nécessaires. Elle aussi est La remise du prestigieux Prix de la gestion Biais al Maset, à Albi, qui applique des me- optimiste quant à la voie à suivre. « Nous des terres et des sols - Land and Soil Mana- sures agro-écologiques depuis près de deux avons les gens, le capital, les technologies, gement Award - a clôturé le mois d’événe- décennies, et l’agroforesterie GUT&BÖSEL les connaissances. Tout cela combiné crée ments du ForumforAg 2022. Keyline, en Allemagne, une ferme biologique une très bonne configuration et de très régénératrice qui minimise l’érosion des sols Le prix a été lancé en 2008 par ELO, sous les bonnes solutions qui permettront de créer tout en renforçant la biodiversité et l’utilisa- auspices de la Commission européenne (DG ce dont nous avons besoin. » Mais la vraie tion prudente de l’eau. Environnement et le Centre commun de re- question est : « Aurons-nous le courage de cherche) et en association avec l’Université les faire avancer ? ». des ressources naturelles et des sciences Jon PARR, président de Syngenta Crop de la vie (BOKU) de Vienne, Syngenta, ainsi Protection, et Thierry de L’ESCAILLE, se- que le Centre des sciences du sol et de l’en- crétaire général de ELO, cofondateurs du vironnement de l’Université de Ljubljana. Forum il y a près de 15 ans, ont réfléchi au Depuis lors, le jury du prix a sélectionné des succès qu’il a rencontré en créant un espace réalisations exceptionnelles dans toute l’UE pour un échange ouvert et constructif sur dans le domaine de la gestion durable des l’agriculture et l’environnement - autrefois sols et des terres. 13 considérés comme mutuellement exclusifs. En sa qualité de président du jury, le pro- Tous deux ont souligné sa capacité à réunir fesseur Martin GERZABEK, BOKU, a an- Exploitant et/ou coordinateur des professionnels éminents de différentes noncé que parmi douze lauréats, le Centre d’exploitations agricoles disciplines. de recherche en astronomie et sciences de M.PARR a souligné la contribution essen- la terre de l’Institut géographique de Bu- tielle que la science peut apporter, la néces- dapest était le lauréat de cette année pour sité de « veiller à ce que nous continuions ses essais agricoles à long terme. « Le jury à parler d’encourager l’innovation pour ré- a été particulièrement impressionné par la soudre les équations qui ne fonctionnent pas longue durée des expériences, 19 ans, ce qui Belgique actuellement pour nous » et l’importance de n›est pas facile à réaliser pour un institut de support@agriland.be faire suivre les discussions par des actions. recherche », a-t-il déclaré. ✆ +32 (0)10 23 29 00 M. de l’ESCAILLE a souligné que le Forum Andrea VETTORI, membre du cabinet du tente de jeter un pont entre les crises liées commissaire à l’environnement, aux océans France à la covid, au climat et aux conflits afin de et à la pêche, Virginijus SINKEVICIUS, a expliqué que 60 à 70 % des écosystèmes damien.deriberolles@agrilandfrance.fr mieux comprendre et de trouver des solu- ✆ +33 (0)6 50 98 17 13 tions à leur impact sur la société et les sys- terrestres en Europe se dégradent. « C’est tèmes alimentaires. Le Forum de cette an- pourquoi, il y a plusieurs années, la Commis- née avait pour but de donner de l’espoir aux sion européenne, DG Environnement, a dé- agriculteurs afin qu’ils puissent « trouver cidé de s’associer à Syngenta et à l’organi- un moyen, non seulement d’être acceptés sation européenne des propriétaires terriens pour créer ce prix ». par la société, d’être utiles à la société, mais www.agriland.be aussi d’être suffisamment rentables dans Il a annoncé des diplômes de reconnaissance leurs entreprises ». à deux autres projets : La ferme française Lo
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