Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages - L'ESSENTIEL - OECD
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Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages POLICYHIGHLIGHTS L’ E SS ENT I E L Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 1
Un moment critique pour nous tous Il est grand temps désormais de s’attaquer aux impacts du changement climatique. La dernière évaluation scientifique du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat ne laisse aucun doute quant à la gravité des dangers climatiques qui nous attendent ; des phénomènes de grande ampleur aux impacts terribles – comme la fonte de la banquise et la modification radicale des courants océaniques – ne peuvent non plus être exclus. La situation dans laquelle nous nous lente, les phénomènes météorologiques trouvons est de plus en plus dangereuse. extrêmes et les points de basculement. Il Une grande partie de la population actuelle analyse ensuite les dispositifs politiques, et future du globe terrestre sera confrontée financiers et technologiques qui sont à des dangers climatiques plus fréquents et requis pour réduire et gérer les risques plus intenses. Le nombre d’États adoptant de pertes et de dommages induits par le des objectifs de neutralité carbone est changement climatique. encourageant. Cependant, il faut que cela se traduise par des actions et des résultats L’OCDE amplifie son soutien aux pays concrets. À court terme, les actions ne pour les aider à faire face aux défis contribuent souvent pas à réduire les climatiques qui les attendent, et ce risques climatiques, bien au contraire. rapport en fait partie. Un certain nombre de recommandations importantes y Il est extrêmement important, pour sont formulées. En plus de limiter le atteindre les objectifs exposés réchauffement à 1.5°C, les États doivent dans l’Accord de Paris, d’accroître la étudier avec attention les incertitudes transparence, la confiance et la solidarité. des risques climatiques avant de prendre Cet accord est lui-même un instrument de des mesures et des décisions en matière transparence qui fournit des mécanismes d’investissement. Les pays développés de contrôle pour encourager une action doivent accroître leur soutien technique climatique véritable et de plus en plus et financier aux pays en développement ambitieuse. Chaque État a la responsabilité et le rendre plus accessible et prévisible. très importante de tenir les engagements Mon espoir est que ce rapport permette pris dans le cadre de cet accord. La réussite d’alimenter les discussions relatives dépendra toutefois de la solidarité entre aux pertes et dommages dans le cadre les pays et en leur sein, de l’efficacité des du processus des Nations Unies sur le institutions, de la cohérence des politiques climat. Son but est également d’étayer publiques et de leur capacité à mettre en les mesures politiques, financières et place des incitations adaptées dans tous technologiques qui seront prises sur le les secteurs de l’économie, de l’innovation terrain pour accroître l’efficacité des dans les partenariats et les technologies, actions visant à réduire et gérer les risques de l’adoption d’approches porteuses de de pertes et dommages induits par le transformations, et de l’investissement changement climatique. visant l’amélioration de la résilience. Bien que l’on ne sache pas exactement Mathias Cormann à quoi ressemblera le changement Secrétaire général, OCDE climatique dans les différentes régions au cours des prochaines décennies, ce n’est pas une raison pour retarder l’action. Le rapport de l’OCDE passe en revue les incertitudes qui planent concernant les risques climatiques et examine en détail les trois principaux types de dangers, à savoir : les changements à évolution Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 1
Un présent incertain et un avenir menaçant Le changement climatique est rapide et ses manifestations d’une intensité croissante se constatent de toutes parts. L’influence de l’être humain dans ce changement est sans équivoque. Si des perturbations sont observées à tous les niveaux, leur gravité n’est cependant pas la même partout. Les pays en développement – en particulier les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID) – subissent ainsi ou à évolution lente, la disparition EXEMPLES DE PERTES ET de façon disproportionnée les effets du d’objets/de lieux chargés de culture et DOMMAGES LIÉS AUX DANGERS changement climatique. Cela est dû à la de paysages, l’appauvrissement de la CLIMATIQUES fois à leur emplacement géographique ainsi biodiversité, et enfin le sentiment de la qu’à leur niveau élevé d’exposition et de perte d’identité et de sécurité. Ces effets L’Inde a enregistré en 2018 quelque vulnérabilité face aux dangers climatiques. intangibles sont difficiles à mesurer et 13.8 milliards USD de pertes économiques Pour citer un exemple, la progression apparaissent rarement dans les évaluations suite aux vagues de chaleur, sécheresses, relative moyenne des températures socioéconomiques. Or pour de nombreuses inondations et tempêtes qu’elle a connues. extrêmes est la moitié plus rapide dans les personnes, la vulnérabilité de certains ___________ PMA que dans le reste du monde. Dans la aspects non matériels (comme la santé La République populaire de Chine a subi zone OCDE, en revanche, la modification des proches ou le sentiment de sécurité) en 2019 les effets d’une saison des pluies relative de ces températures y est plus est jugée plus importante que celle de la arrivée avec retard et de façon virulente. Les faible que la moyenne mondiale. consommation pour les hauts revenus. inondations et les glissements de terrain ont frappé directement 6 millions de personnes et Le changement climatique a des impacts Les bouleversements économiques causés se sont soldés par 91 décès et des coûts directs dramatiques qui vont encore s’aggraver, par la pandémie de COVID-19 n’ont à d’environ 3 milliards USD. causant des pertes et des dommages. Les première vue pas ralenti la progression ___________ vagues de chaleur, incendies et inondations du changement climatique. Alors que La Fédération de Russie a connu en qu’ont connus de nombreuses régions du les émissions en glissement annuel ont 2010 une vague de chaleur extrême et des monde ces dernières années sont un avant- ponctuellement chuté en 2020, les incendies gigantesques, au cours desquels 55 goût de ce qui se produira à l’avenir. Les concentrations de dioxyde de carbone 736 personnes auraient trouvé la mort. Cet vies humaines, les moyens de subsistance et (CO2) dans l’atmosphère ont continué de épisode de canicule a également entraîné une même la stabilité économique et sociale des croître rapidement. Dans la plupart des hausse de plus de 60 % des prix des céréales pays et des régions se trouvent menacés, plans de relance post-COVID, un faible sur le marché mondial entre juin et août de la de même que l’environnement naturel dont pourcentage seulement des sommes même année. nous dépendons tous. Les populations allouées vise à réduire les impacts sur le ___________ et communautés marginalisées – au sein climat et l’environnement au sens large ; d’un même pays ou d’un pays à l’autre en revanche, des montants nettement plus Le Mozambique a été frappé en 2019 par les cyclones tropicaux Idai et Kenneth, qui ont – sont particulièrement vulnérables. Les élevés sont consacrés à des investissements propulsé la dette publique à plus de 100 % générations futures vont payer le prix du et des activités qui font fi des objectifs du produit intérieur brut (PIB). Deux autres laxisme des générations actuelles et passées climatiques ou environnementaux, voire cyclones de grande ampleur ont éclaté en en matière d’action climatique. vont empirer la situation. janvier et février 2021, ce qui devrait porter la dette de l’État à 125 % du PIB d’ici la fin Les populations et les communautés sont Un changement de cap s’impose. Il prendra de l’année. également vulnérables face aux pertes et du temps, et n’empêchera pas que des ___________ dommages non économiques induits par pertes et des dommages supplémentaires le changement climatique. Des problèmes se produisent. Dans ce contexte, le rapport Aux Bahamas, l’ouragan Dorian a causé en psychologiques ou des altérations de met l’accent sur ce qui peut être fait pour 2019 au moins 70 décès ainsi que des pertes et dommages estimés à environ un quart du PIB. la santé mentale peuvent ainsi être réduire et gérer les risques actuels et futurs provoqués par les phénomènes extrêmes de pertes et dommages de ce type. 2 Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel
Application d’une approche de précaution La complexité du changement climatique et la vitesse à laquelle il a lieu mettent à l’épreuve la capacité d’adaptation des systèmes humains et naturels. Même avec un réchauffement du globe de 1.5°C, une grande part de la population, des infrastructures et des écosystèmes du monde connaîtront, aujourd’hui et demain, des dangers climatiques de plus en plus fréquents et dramatiques. Dans un monde interconnecté, les pertes et les dommages survenant dans un pays – et les réponses qui y sont apportées – peuvent dépasser les frontières géopolitiques, y compris en provoquant des perturbations des chaînes d’approvisionnement, la propagation de maladies infectieuses et des déplacements communautés les plus défavorisées afin Dans ce rapport, les risques de populations. de les protéger des risques de pertes et de pertes et dommages de dommages. De nombreux pays en Les initiatives de réduction et de gestion développement auront besoin, pour y font référence aux effets des risques doivent inclure des actions arriver, de recevoir un soutien adéquat de néfastes potentiels i) des intervenant sur les trois composantes du la communauté internationale. dangers, ii) de l’exposition risque climatique conceptualisées par le Groupe d’experts intergouvernemental sur Les décisions ayant trait aux dangers, à et iii) de la vulnérabilité l’évolution du climat (GIEC) : l’exposition et à la vulnérabilité ne sont pas qui, liés au climat, peuvent prises isolément mais font partie intégrante être réduits et gérés à l’aide • Limiter l’augmentation de la fréquence des stratégies des pays en matière de de mesures d’atténuation et de l’intensité des dangers par la développement durable. Elles doivent donc réduction significative et urgente des être évaluées dans le cadre plus général des et d’adaptation, ainsi que émissions de gaz à effet de serre (GES) objectifs et des risques socioéconomiques. d’autres interventions comme ainsi que par des actions de protection Si elles ne sont pas correctement la prévention des risques de et d’amélioration des puits de carbone administrées, certaines mesures visant à catastrophes naturelles – et naturels. réduire et gérer les risques peuvent avoir des effets préjudiciables sur le bien-être son financement – et l’aide • Réduire au minimum l’exposition des populations, voire accroître les risques humanitaire. des vies humaines, des moyens de de pertes et dommages pour d’autres subsistance et des actifs à ces dangers. segments de la société ou d’autres pays. • Réduire la vulnérabilité des systèmes Les pertes et les dommages peuvent humains et naturels exposés à ces dangers. survenir même lorsque les risques sont bien compris et potentiellement évitables. Il incombe à la fois aux pays développés et Cela peut être dû à plusieurs facteurs : aux grandes économies en développement le coût de la réduction des risques et les qui enregistrent une croissance rapide ressources financières disponibles (aux et de fortes émissions de prendre les niveaux national et international) ; l’échec rênes de l’atténuation des émissions, de l’atténuation des émissions de GES de manière à limiter les dangers futurs (collectivement) et de l’adaptation (à conformément à l’objectif de température l’échelle nationale ou locale) ; les barrières fixé dans l’Accord de Paris. Les niveaux ou les inégalités économiques, sociales ou actuels d’exposition et de vulnérabilité technologiques ; l’efficacité et la cohérence sont le résultat de processus complexes des interventions des pouvoirs publics ; les datant du passé. Outre l’adoption d’une limites physiques à l’adaptation ; enfin, le approche de précaution – pour limiter rôle de facteurs aggravants tels que des le réchauffement à 1.5°C –, tous les maladies ou des crises économiques. À pays doivent réduire l’exposition et la ces difficultés s’ajoutent différents types vulnérabilité, en particulier celles des d’incertitudes. Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 3
Différents types d’incertitudes et compréhension des risques de pertes et de dommages Il y a peu de doutes quant au lien direct qui existe entre certains prévisions à court terme du moment aspects du changement climatique et le réchauffement du exact où auront lieu des événements système climatique, ni quant à la gravité des impacts qui y sont extrêmes, et les résultats diffèrent de l’un à l’autre. En revanche, les projections à liés. En revanche, il existe des incertitudes concernant le lieu court terme du changement climatique et le moment où se produiront les dangers climatiques – et de survenant à l’échelon local ou régional quelle façon –, et concernant l’interaction qu’ils auront avec les peuvent renseigner sur les différentes perturbations que pourront connaître les événements socioéconomiques futurs qui détermineront les systèmes humains et naturels, même s’il niveaux d’exposition et de vulnérabilité. est impossible de prédire de façon fiable leur date et leur portée exactes. Ces incertitudes constituent un appel fort plus élevés, des impacts généralisés et de à l’accélération de l’action plutôt qu’à son plus grande gravité, ce qui augmenterait Le graphique 1 représente les projections ralentissement. Un changement climatique les risques de pertes et de dommages. des températures extrêmes sur un an pour de grande intensité pourrait mettre en Hyderabad (Inde) et Paris (France), réalisées danger les êtres humains et les moyens à l’aide de quatre modèles climatiques de subsistance, et menacer les avancées Incertitudes des projections des différents. Deux échelles spatiales et trois réalisées en termes de développement. dangers climatiques futurs dans scénarios de réchauffement croissant sont Un décideur bien informé des différents certaines régions utilisés. Lorsque la résolution spatiale est degrés de risques et des incertitudes basse, les projections sont très disparates correspondantes est capable de déterminer L’incertitude concernant la façon dont le et ne présentent aucune corrélation quelles sont les mesures efficaces et changement climatique se manifestera quant au moment où se produiront robustes permettant de réduire et de au fil du temps à différents endroits est des températures extrêmes au cours gérer ces risques. Les différents types grande. À titre d’exemple, l’occurrence de d’une année. Lorsque la résolution est d’incertitudes et leurs implications en phénomènes extrêmes dans une région plus élevée, les projections deviennent matière d’élaboration des politiques sont précise dépendra de la dynamique du plus sûres, la courbe devenant plus présentés succinctement ci-après. climat, qui est difficile à modéliser. Un régulière du fait du nivellement de la constat inquiétant est qu’avec le niveau variabilité climatique sous-jacente. Ce de réchauffement actuel, des événements nivellement masque cependant les pics de Incertitudes concernant extrêmes et des phénomènes à évolution températures pouvant se produire, raison la réponse de la Terre lente ont déjà des effets néfastes sur la pour laquelle les projections à grande à l’augmentation de la vie des êtres humains et leurs moyens échelle ne peuvent indiquer avec confiance concentration de gaz à effet de subsistance. Les modèles climatiques quel sera le climat à l’échelon local à un de serre n’ont pas été conçus pour fournir des moment donné. Une question qu’il convient de se poser en tout premier lieu concernant un plan ou une stratégie climatique est celle de son efficacité au regard de l’atténuation du changement climatique. La réponse à cette question dépend du degré – incertain – de réchauffement de la planète qui sera provoqué par l’augmentation de la concentration de GES dans l’atmosphère. L’estimation la plus probable du réchauffement à long terme résultant de la multiplication par deux de la concentration de CO2 est de 3°C, avec une fourchette comprise entre 2.5°C et 4°C. Cette incertitude souligne l’urgence d’une réduction radicale des émissions de GES. Bien que visant un réchauffement limité à 1.5°C, la planète pourrait se retrouver avec des niveaux de réchauffement beaucoup 4 Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel
Vus sous l’angle de l’élaboration des pourrait se traduire par des niveaux de perfectionnement des systèmes de mesure politiques, les modèles à haute résolution températures que les systèmes humains et (par exemple du niveau de la mer et des spatiale fournissent des informations sur naturels ne pourraient physiologiquement températures) et d’imagerie terrestre les grandes tendances et sur le risque que supporter. Il est par conséquent important (avec la télédétection par satellite). Malgré certaines régions connaissent des épisodes de comprendre le lien entre un lieu cela, il reste encore du chemin avant de de chaleur extrême au cours du siècle à géographique et son climat général dans le pouvoir compter sur un dispositif de venir. Ces informations peuvent ensuite contexte de la projection du changement surveillance systématique et exhaustive du être utilisées pour élaborer des politiques climatique pour comprendre le danger climat au niveau mondial. La qualité et la de gestion des risques climatiques. climatique encouru par ces régions et les disponibilité des données sont par exemple Le graphique 1 montre que dans les risques de pertes et de dommages. très hétérogènes à l’échelle mondiale, scénarios où le réchauffement est le plus ce qui entraîne une qualité variable des important (RCP 4.5 et RCP 8.5), les pics de prévisions météorologiques dans les températures peuvent dépasser la moyenne Incertitudes dues à la qualité et différentes régions et limite les travaux de des maximales obtenues pendant la période la quantité des données issues recherche sur le climat. de référence (d’une durée de 20 ans) de de l’observation 10°C au plus dans les deux villes examinées. La Terre fait aujourd’hui l’objet Incertitudes dues aux Hyderabad se caractérise par un climat d’observations plus détaillées et plus données et projections sec avec des températures d’ores et déjà systématiques que jamais auparavant. socioéconomiques beaucoup plus élevées qu’à Paris en La capacité d’observation du climat raison de son emplacement géographique. s’est en outre considérablement Les données et les évaluations Un dépassement des températures améliorée ces dernières années grâce aux socioéconomiques revêtent une extrêmes moyennes de 10°C à Hyderabad progrès technologiques, notamment le importance capitale pour prendre des Graphique 1. Anomalies des températures extrêmes à différentes échelles spatiales RCP 1.9 RCP 4.5 RCP 8.5 Hyderabad 10 5 PETITE Anomalies des températures maximales (en °C) 0 Échelle spatiale −5 10 GRANDE 5 0 −5 Paris 10 PETITE 5 Échelle spatiale 0 −5 10 GRANDE 5 0 −5 2020 2040 2060 2080 2100 2020 2040 2060 2080 2100 2020 2040 2060 2080 2100 Temps (années) Note : Anomalies des températures extrêmes en surface sur un an à différentes résolutions spatiales autour de Paris (France) CAMS−CSM1−0 et d’Hyderabad (Inde). Pour les résolutions faible et grande, la moyenne des températures extrêmes est calculée sur des cellules de 1x1, 15x15 et 50x50 degrés autour des villes en question. Les données proviennent de la base de données EC−Earth−3 du CMIP6 pour les températures extrêmes quotidiennes, pour les combinaisons des scénarios RCP (profils représentatifs MIROC6 d’évolution de concentration)/SSP (trajectoires socioéconomiques partagées) RCP1.9 (SSP1), RCP 4.5 (SSP2) et RCP 8.5 (SSP5), ainsi que pour les modèles CAMS-CSMi-0, EC-Earth-3, MIROC et UK-ESM1-0-LL. Les anomalies des températures extrêmes UKESM1−0−LL équivalent à la différence entre les températures maximales enregistrées pendant une année donnée et la moyenne des maximales annuelles sur la période 1986-2005. Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 5
décisions efficaces sur le climat. Or, ces données cruciales ne sont souvent pas disponibles ou pas exhaustives. Les décideurs publics peuvent alors avoir besoin d’utiliser d’autres méthodes telles que des variables de substitution ou des analyses de régression, qui risquent d’introduire des incertitudes supplémentaires. Même sans tenir compte du changement climatique, la situation socioéconomique future est hautement incertaine. Les systèmes socioéconomiques sont en outre incroyablement complexes. Les projections et les estimations dépendent évidemment des postulats normatifs, politiques, économiques et méthodologiques qui sont adoptés. Le tableau 1 donne un aperçu des pertes et dommages induits par le changement l’ampleur des pertes et des dommages capables – de représenter correctement climatique qui ont été estimés à l’aide de actuels, mais les résultats risquent de les principaux mécanismes susceptibles toutes sortes de méthodologies ; il montre ne pas être stables car le changement de générer à l’avenir des pertes et des bien le caractère incertain de l’ampleur des climatique et les actions engagées pour dommages (par exemple la disparition pertes et dommages estimés. réduire et gérer les risques évoluent avec éventuelle des services écosystémiques le temps. Par ailleurs, les différentes ou les effets des événements climatiques Les estimations économétriques peuvent méthodes de modélisation omettent extrêmes). fournir des informations importantes sur parfois – ou ne sont pas toujours Tableau 1. Quelques estimations des pertes et dommages prévus au niveau mondial Méthode Danger Catégorie d’effet Estimation Modèle de Hausse des températures et Niveaux de pauvreté Entre 30 et 130 millions de personnes en rééchantillonnage et de phénomènes extrêmes situation d’extrême pauvreté supplémentaires à repondération [1] l’horizon 2030 Modèle CGE [2] Hausse des températures, élévation Effets économiques Environ 1.5 % du PIB à l’horizon 2050 (1-3 %) du niveau de la mer, cyclones et températures extrêmes Méthode économétrique Hausse des températures Effets économiques 23 % du PIB par habitant à l’horizon 2100, 10 % à [3] l’horizon 2050 MEI [4] Hausse des températures Dommages non Dommages non économiques aux écosystèmes économiques aux équivalents à environ 190 000 milliards USD à écosystèmes l’horizon 2050 Modèles climat-santé [5] Hausse des températures, régimes Coûts des soins de santé Coûts annuels en soins de santé compris entre 2 et pluviométriques variables et 4 milliards USD entre 2030 et 2050 températures extrêmes, et leurs répercussions sur la malnutrition, le Mortalité due à la 250 000 décès supplémentaires par an entre 2030 stress thermique et l’incidence de la malnutrition, au stress et 2050 diarrhée et du paludisme thermique, à la diarrhée et au paludisme Examen des études Phénomènes extrêmes Santé mentale Effets marqués sur la santé mentale, qui toucheront publiées [6] les groupes les plus marginalisés de façon disproportionnée Systematic case Changement climatique Pertes et dommages non Développement partout dans le monde de pertes analysis [7] économiques immatérielles et du sentiment d’insécurité Note : Les pourcentages renvoient au niveau pour l’année indiquée ; par exemple, sur la deuxième ligne, une baisse de 1.5 % à l’horizon 2050 signifie que le PIB en 2050 équivaudra à 98.5 % de ce qu’il aurait été sans changement climatique. MEI est l’acronyme de « modèle d’évaluation intégrée ». Source : [1] (Jafino et al., 2020) ; [2] (OCDE, 2015) ; [3] (Burke, Hsiang et Miguel, 2015) ; [4] (Bastien-Olvera et Moore, 2020) ; [5] (OMS, 2014) ; [6] (Hayes et al., 2018) ; [7] (Tschakert et al., 2019). 6 Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel
Les impacts du changement climatique et leurs effets en cascade LES CONSÉQUENCES DE L’ÉLÉVATION DU NIVEAU DE LA MER SUR LES PRIORITÉS D’ACTION DES PEID Les mesures prises par les pouvoirs publics des PEID pour faire face à l’augmentation du niveau de la mer peuvent être classées en quatre catégories, chacune présentant des avantages et des inconvénients selon le Les systèmes naturels, Le rapport s’intéresse à trois grands contexte naturel et socioéconomique : types de dangers climatiques : i) les sociaux et économiques sont • Protéger – Réduire les pertes et les changements à évolution lente dommages en mettant en place des reliés entre eux à différents comme la montée du niveau de la structures hydrauliques ou des solutions niveaux : régional, national mer, l’acidification des océans, la fonte inspirées de la nature. et international. Les impacts des glaciers, l’appauvrissement de la biodiversité et la désertification ; ii) les • Prendre de l’avance – Prévenir l’extension du changement climatique phénomènes météorologiques des événements survenant sur les côtes peuvent se propager au sein extrêmes, notamment l’augmentation de vers l’intérieur des terres en construisant de nouvelles protections au large et en d’un même pays (par exemple la fréquence et de la gravité des vagues de hauteur. lors du déplacement de chaleur, sécheresses, fortes précipitations et cyclones ; iii) les points de bascule populations faisant suite à une (graphique 2), dont l’arrêt de la circulation • S’adapter – Réduire la vulnérabilité des populations, des moyens de subsistance et catastrophe naturelle) ou dans méridienne océanique de retournement de des constructions. le monde entier (par exemple l’Atlantique (AMOC) et le dépérissement de la forêt tropicale amazonienne. Ces dangers • Se retirer – Réduire ou éliminer à cause des répercussions totalement l’exposition en déplaçant les représentent de sérieuses menaces pour les sur le commerce mondial, les systèmes humains et naturels et entraînent populations, les infrastructures et les flux financiers et les réseaux déjà, dans le cas des phénomènes extrêmes activités humaines loin des zones à risque. d’approvisionnement). Ces et à évolution lente, des pertes et des Compte tenu de la grande incertitude qui dommages. Un grand nombre de ces effets en cascade – souvent mal dangers devraient acquérir une gravité règne concernant l’élévation future du niveau de la mer, les PEID doivent déterminer quelles compris – entre les secteurs, croissante et pourraient globalement décisions à long terme peuvent être reportées les pays et les frontières posent conduire à une aggravation des risques. jusqu’à ce que l’incertitude diminue. Celles des problèmes pour l’évaluation qui ne peuvent pas l’être (par exemple les investissements relatifs à l’infrastructure des risques. L’élévation du niveau de la mer essentielle) doivent prendre en compte les dans les petits États insulaires effets de l’augmentation du niveau de la mer. Les préférences des parties prenantes eu égard en développement aux incertitudes influenceront les choix qui seront effectués. De nombreuses solutions Les petits États insulaires en techniques sont disponibles pour faire face à développement (PEID) représentent un des élévations encore plus fortes du niveau groupe hétérogène. Indépendamment de des eaux. Leur mise en place à grande échelle leurs différences, tous ont une vulnérabilité serait cependant coûteuse et modifierait au changement climatique, notamment complètement les paysages côtiers. Elle aurait à la montée du niveau de la mer. Tout également pour effet de menacer la grande d’abord, les zones les plus habitables des diversité culturelle et le patrimoine des PEID. Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 7
Graphique 2. Éléments de basculement candidats dans le système climatique Banquise arctique Inlandsis du Pergélisol Groenland Forêt boréale Forêt boréale Gyre subpolaire Plateau Circulation tibétain méridienne de retournement de l’Atlantique Mousson ouest- Sahel Mousson africaine indienne El Niño/Oscillation australe Forêt Récif corallien amazonienne tropical Partie occidentale de Banquise de l’océan Austral Glace du bassin l'inlandsis de l'Antarctique de Wilkes Entités de la cryosphere Régimes de circulation Composantes de la biosphere Note : Carte mondiale des éléments candidats de basculement du système climatique et des cascades de basculement potentielles. Les flèches montrent les interactions potentielles entre les éléments de basculement qui pourraient générer des cascades de basculement, sur la base de l’élicitation des experts. Source : Carte du monde obtenue auprès de Peel, M. C., Finlyson, B. L., et McMahon, T. A. (Université de Melbourne). PEID sont les zones côtières de faible connaissent un changement d’intensité qui était considéré comme rare par le élévation. Ensuite, compte tenu de leurs plus rapide. Les températures maximales passé (diagramme A). emplacements, ces États sont beaucoup sur terre augmentent plus rapidement plus exposés aux catastrophes climatiques. que les températures moyennes à l’échelle 2. Le jour le plus chaud enregistré à Enfin, les PEID ont des économies fragiles, mondiale, d’un facteur pouvant atteindre l’avenir au cours de l’année la plus un éventail de ressources naturelles limité 1.8 à certains endroits. Les variations froide qui dépasserait les températures et peu de lien avec les marchés extérieurs. relatives des températures extrêmes les plus élevées relevées par le passé Les pertes et les dommages que peuvent en fonction des différents niveaux de (diagramme B). subir ces États du fait de la montée du réchauffement ne seront pas les mêmes niveau de la mer sont nombreux et ont des dans toutes les régions du monde. Les Même avec des niveaux de réchauffement liens entre eux : inondations et érosion des océans tropicaux sont de loin les zones déjà connus (diagramme A), la chaleur côtes, disparition de terres, d’écosystèmes où les températures extrêmes changent extrême qui était considérée comme et de ressources en eau douce. le plus rapidement ; ils sont suivis par les rare par le passé est en train de devenir régions arides d’Afrique du Nord et du la norme dans de nombreuses régions Évaluer l’influence du Moyen-Orient, puis par les autres zones du monde. Les températures extrêmes changement climatique grâce à terrestres tropicales. pourraient rendre de nombreuses régions l’attribution des phénomènes inhabitables par l’être humain, même s’il extrêmes Le changement climatique modifiera n’existe pas de définition ni de seuil précis de plus en plus à l’avenir ce que nous pour établir à quel moment une zone n’est Évaluer et mesurer les impacts du connaissons. Le graphique 3 montre les plus « habitable ». changement climatique dans le monde niveaux du réchauffement moyen de la réel est un défi continu. Comme le planète qui sont requis pour parvenir La gravité d’un danger physique est un montrent les analyses résultant de la localement au dépassement de deux indicateur imparfait de la gravité des science de l’attribution, les épisodes seuils définissant l’émergence de la chaleur impacts ; la vulnérabilité et l’exposition de chaleur extrême deviennent plus extrême. Ces seuils sont les suivants : jouent également un rôle crucial pour fréquents et plus graves que les autres déterminer l’ampleur des pertes et types de phénomènes météorologiques 1. Le jour le plus chaud enregistré à dommages. En fait, même les dangers extrêmes et, dans certaines régions, l’avenir au cours d’une année moyenne climatiques relativement courants et 8 Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel
Figure 3. Réchauffement requis pour dépasser à l’avenir les seuils de la chaleur extrême par rapport au passé (A) Émergence de températures maximales (B) Émergence de températures maximales quotidiennes sur un an quotidiennes sur un an sans précédent 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 Seuil du réchauffement global où le jour le plus chaud enregistré à Seuil du réchauffement global où le jour le plus chaud enregistré à l’avenir au cours d'une année moyenne était rare par le passé (en °C) l’avenir au cours de l’année la plus froide dépasse toutes les températures extrêmes relevées par le passé (en °C) Note : Les diagrammes A et B fournissent une estimation (à l’aide du modèle RCP8.5) de la hausse de la température moyenne de la planète qui est nécessaire pour dépasser deux seuils, à savoir : i) le jour le plus chaud enregistré à l’avenir au cours d’une année moyenne qui serait considéré comme rare par le passé ; ii) le jour le plus chaud enregistré à l’avenir au cours de l’année la plus froide qui dépasserait les températures les plus élevées relevées par le passé. LES RÉCENTES VAGUES DE CHALEUR DANS LE NORD-OUEST DU PACIFIQUE La vague de chaleur qui a sévi dans le nord- ouest du Pacifique en 2021 a frappé en juin les États-Unis et l’ouest du Canada, une vaste masse d’air de forte pression étant installée sur ces régions pendant quatre jours. Dans de nombreuses régions, les températures ont dépassé de loin les 40°C. La température la plus élevée – 49.6°C – a été relevée à Lytton, en Colombie-Britannique ; outre le nouveau record ainsi atteint à l’échelle du pays, cette chaleur a provoqué un incendie qui a détruit une grande partie de la ville. Ces fortes températures ont eu des effets particulièrement néfastes dans cette région qui n’est pas habituée à l’extrême chaleur. Plus de 500 décès et 180 incendies ont été déclarés en Colombie-Britannique, ainsi qu’environ fréquents peuvent avoir des impacts lourds d’améliorer la collecte et l’interprétation 200 morts dans les États de l’Oregon et et néfastes s’ils frappent des communautés des données relatives aux phénomènes de Washington, avec une nette hausse des vulnérables et exposées. extrêmes et à leurs impacts dans les pays consultations auprès des services d’urgence. en développement, notamment pour La science de l’attribution offre la renforcer les études d’attribution et la La vague de chaleur de 2021 a provoqué la disparition massive d’espèces marines et possibilité d’établir un lien causal entre les politique climatique. la restructuration de vastes écosystèmes phénomènes météorologiques extrêmes marins. D’après les premières estimations, et le changement climatique. Le problème L’attribution des phénomènes extrêmes des milliards d’animaux marins auraient péri est qu’elle produit trop souvent des nécessite l’utilisation de modèles sous l’effet de la chaleur extrême. Cela inclut résultats non concluants lorsqu’elle est climatiques simulant de façon réaliste les des moules qui vivaient le long des côtes appliquée à des phénomènes touchant types de phénomènes observés. Ainsi, les ainsi que des créatures marines vivant parmi les pays à faible revenu. Les obstacles à impacts des tornades ou des orages de elles. Ces disparitions auront des effets en la production d’études d’attribution en grêle très violents ne pourront être évalués cascade sur les autres animaux, par exemple les quantité suffisante et de qualité lorsqu’il tant que les modèles de la génération canards qui se nourrissent de moules avant de s’agit de cette catégorie de pays sont actuelle ne parviendront pas à simuler de migrer vers leurs zones de reproduction d’été dans l’Arctique. les suivants : le manque de données façon satisfaisante les processus physiques d’observation, l’inadéquation des modèles qui interviennent. Dans ces circonstances, climatiques à faible résolution et les l’utilisation de méthodes non probabilistes différences des dispositifs de notification (comme des canevas narratifs) pour mettre des phénomènes extrêmes. Il est urgent en évidence et caractériser les risques Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 9
climatiques peut aider à limiter et gérer les risques des pertes et dommages. L’arrêt de la circulation méridienne océanique de retournement de l’Atlantique L’affaiblissement ou l’arrêt brutal de ce courant – appelé AMOC – sous l’effet du réchauffement de la planète entraînerait un changement du climat aux conséquences régionales – voire mondiales – majeures. La réorganisation du système climatique provoquée par cet arrêt aurait des impacts graves et de grande portée, notamment sur la santé humaine, les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, les écosystèmes, l’approvisionnement en eau et la croissance économique. la tendance de fond au réchauffement. La La modification de la température – de la Les projections de la modification de la plus grande partie de l’hémisphère nord mer et de surface – et des précipitations température de l’air en surface et des serait dans une situation de sécheresse, à dans l’Atlantique au niveau des Tropiques précipitations qui serait provoquée par un l’exception de l’Amérique du Nord, où le aura des conséquences sur la stabilité de arrêt de l’AMOC dans l’Atlantique au niveau climat deviendrait en moyenne légèrement la forêt tropicale. D’après les analogues des Tropiques sont représentées sur le plus humide. Dans cet exercice de climatiques prenant en compte à la fois graphique 4. L’hémisphère nord connaîtrait modélisation, l’Inde perd plus de la moitié les températures et les précipitations, le un refroidissement généralisé (en particulier de ses précipitations actuelles sous l’effet climat futur de la région de l’Amazonie dans l’Atlantique Nord) : l’Europe verrait ses de l’arrêt de l’AMOC. correspondra au climat actuel des savanes températures moyennes de l’air en surface ou des zones pastorales d’Afrique, ce qui perdre entre 1 °C et 8 °C sur un an, tandis L’AMOC est le « grand ordonnateur » du laisse supposer qu’il y aurait un ample que l’Amérique du Nord enregistrerait système climatique. Son arrêt aurait donc dépérissement de la forêt amazonienne. une baisse moins marquée. À l’inverse, des répercussions sur les autres sous- l’hémisphère sud connaîtrait une nouvelle ensembles du système, à savoir la forêt Les forêts boréales d’Europe et d’Asie hausse générale des températures, l’arrêt tropicale amazonienne, les forêts boréales et ne réagiraient pas à l’arrêt de l’AMOC de de l’AMOC conduisant à l’amplification de les moussons d’Inde et d’Afrique de l’Ouest. la même façon que celles d’Amérique du Graphique 4. Modification de la température de l’air en surface et des précipitations qui serait provoquée par un arrêt de l’AMOC consécutif à un réchauffement de 2.5°C au-dessus des niveaux pré-industriels Arrêt de l’AMOC consécutif à un Arrêt de l’AMOC consécutif à un réchauffement de 2.5°C réchauffement de 2.5°C 60°N 60°N 30°N 30°N 0° 0° 30°S 30°S 60°S 60°S 180° 120°W 60°W 0° 60°E 120°E 180° 180° 120°W 60°W 0° 60°E 120°E 180° -8 -5 -3 -2 -1 1 2 3 5 8 -100 -90 -70 -50 -30 -10 10 30 50 70 90 100 Température de l’air en surface (en °C) Modification des précipitations (en %) Note : Température de l’air en surface (gauche) et précipitations (droite) dans des scénarios d’arrêt de l’AMOC tenant compte des effets du réchauffement du globe, modélisés à l’aide du scénario SSP1-2.6 (qui combine la trajectoire socioéconomique partagée SSP1 et le profil représentatif d’évolution de concentration RCP2.6) dans le modèle HadGEM3-GC31-MM. Ce modèle obtient un réchauffement global moyen de 2.5°C au-dessus des niveaux pré- industriels d’ici la fin du siècle (2071-2100). À ce profil du réchauffement sont ajoutés les impacts que produirait l’arrêt de l’AMOC, afin de déterminer quels seraient les impacts globaux de cet arrêt si le climat mondial venait à se réchauffer de 2.5°C par rapport à l’époque actuelle (2006-35). 10 Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel
Nord. La raison à cela est que le climat L’arrêt de l’AMOC entraînerait également climatique devrait provoquer les plus fortes deviendrait globalement plus froid et plus la perturbation des moussons d’Inde et baisses de précipitations de la planète. sec d’un côté, alors qu’il serait légèrement d’Afrique. En Inde, la mousson d’été – qui a L’arrêt de l’AMOC aurait pour effet de les plus frais mais plus humide de l’autre. lieu de mai à septembre – est fondamentale aggraver, ce qui pourrait aboutir à une La conséquence serait une baisse de la pour l’agriculture et l’économie du pays. Son vaste sécheresse sur une grande partie de productivité nette des forêts boréales en affaiblissement aurait des conséquences la région. Dans ce contexte de changements Europe et en Asie, ainsi que leur éventuelle pour les récoltes de riz et les moyens de de grande ampleur, les niveaux élevés de transformation en steppes, qui stockent subsistance de la population indienne. pauvreté et les moyens d’action limités moins le carbone. En Afrique de l’Ouest, le changement des pouvoirs publics ajouteraient des difficultés supplémentaires aux tentatives d’adaptation. Graphique 5. Modification de l’adaptabilité des terres aux cultures due à l’arrêt de l’AMOC consécutif à un réchauffement de 2.5°C L’arrêt de l’AMOC combiné au changement au-dessus des niveaux pré-industriels climatique aurait des effets catastrophiques Blé sur la sécurité alimentaire. Les principaux aliments de base que sont le blé, le maïs et le riz fournissent plus de 50 % des 60°N calories consommées au niveau mondial. Le pourcentage total de terres adaptées à ces 30°N cultures dans un monde sans changement climatique d’origine anthropique est 0° d’environ 20 % pour le blé, 14 % pour le maïs et 3 % pour le riz. L’arrêt de l’AMOC associé 30°S à un réchauffement de la planète de 2.5°C réduirait les zones adaptées à la culture du 60°S blé à seulement 8 % et celles pour le maïs à 5 %. Les terres propices à la culture du riz pourraient augmenter légèrement sous Maïs l’effet de l’arrêt de l’AMOC, mais cela paraît minime en comparaison avec les pertes de 60°N terres adaptées au blé et au maïs (voir le graphique 5). 30°N L’AMOC n’est que l’un des nombreux 0° éléments du système terrestre où peut apparaître un point de bascule. Selon 30°S le GIEC, l’arrêt de l’AMOC est « très peu probable » d’ici un siècle (c’est-à- 60°S dire 0 10 % de probabilité), mais il ne saurait être totalement exclu. D’après des études récentes, l’AMOC a atteint sa Riz plus faible intensité depuis un millénaire, et son affaiblissement va sans doute se 60°N poursuivre. Comme le recommande le GIEC, compte tenu des effets en cascade de 30°N potentielle grande portée qu’ils peuvent avoir, ces phénomènes peu probables mais 0° à fort impact doivent être pris en compte dans les évaluations des risques. 30°S Outre la réduction rapide et radicale 60°S des émissions de GES, la mesure et la surveillance des principaux sous- systèmes susceptibles de franchir un 180° 120°W 60°W 0° 60°E 120°E 180° point de bascule – comme l’AMOC – sont nécessaires pour fournir aux pays le plus -100 -80 -60 -40 -20 0 20 40 60 80 100 de temps possible pour mettre au point des stratégies permettant de faire face aux Modification de l’adaptabilité des terres (en %) conséquences de modifications brutales du Note : Les différences représentées ici correspondent au pourcentage de zones adaptées aux cultures système climatique. dans un monde sans arrêt de l’AMOC moins le pourcentage de zones adaptées après un arrêt de l’AMOC dans un scénario de réchauffement futur (SSP1-2.6). Ce graphique ne montre pas les zones où chacun de ces aliments est effectivement cultivé. Gérer les risques climatiques et faire face aux pertes et aux dommages L’essentiel 11
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