L'Italie : un vieux pays, un jeune État - (Histoire de son unification et présentation géographique)
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L’Italie : un vieux pays, un jeune État (Histoire de son unification et présentation géographique) 1
1861-2011 : 150è ANNIVERSAIRE DE L’UNITÉ ITALIENNE Les pères de l’unité italienne (de gauche à droite : Mazzini, Cavour et Garibaldi) Affiches qui célèbrent le 150è anniversaire de l’unité italienne 2
En Préambule 2011 est l’année du 150è anniversaire de l’unification italienne. En effet, c’est le 17 mars 1861 que le nouveau royaume d’Italie est proclamé à Turin avec comme roi Victor Emmanuel II. Turin est ainsi la ville fondatrice du processus d’unification de la péninsule italienne, le risorgimento (résurgence = réapparition, renaissance ou résurrection de la grandeur de l’Italie). Au début du XIXe siècle, Napoléon Ier s’attribue le titre de roi d'Italie en complément de celui d'empereur des Français. Mais sa chute en 1815 entraîne la mainmise directe ou indirecte de l'Autriche sur la plupart des principautés italiennes. Ce qui a pour conséquence un retour aux divisions antérieures. Toutefois, l’année 1848 voit naître un nouvel espoir d’indépendance des peuples et d’unification des États en Europe et notamment en Italie. En effet, une nouvelle contagion révolutionnaire gagne une bonne partie de l’espace européen : le « Printemps des peuples ». 1848 : L’Europe du « Printemps des peuples » Partie de Paris le 24 février (le roi Louis-Philippe est renversé), cette révolution gagne l’Autriche, l’Allemagne et l’Italie en quelques semaines. En France, la IIè République est proclamée et le suffrage universel masculin est instauré. Connus dans les capitales européennes, les événements français réveillent les aspirations libérales et nationalistes. En mars 1848, à Vienne, à Berlin, à Rome et à Prague, des insurrections éclatent et contraignent les souverains autoritaires à la fuite ou aux concessions. Le pape, le roi de Prusse, celui de Bavière, l’empereur d'Autriche, accordent des constitutions et reconnaissent les libertés fondamentales. Les 3
mouvements nationalistes ne sont pas en reste : alors que la Hongrie ou la Bohême imposent plus provisoirement leur autonomie aux Habsbourg, les différents États allemands et italiens posent les jalons d’une unité nationale. N.B. : Grecs et Belges obtiennent leur indépendance dès 1830. Lithographie de Frédéric Sorrieu : « La république universelle démocratique et sociale », Le Pacte. 1848, musée Carnavalet, Paris Frédéric Sorrieu, lithographe français du XIXè s., exécute une série de quatre lithographies gouachées qui a pour thème « La république universelle démocratique et sociale ». Elles présentent les principales idées et utopies des révolutionnaires de 1848. Dans l’une d’elle, intitulée Le Pacte, Sorrieu illustre la dimension nationaliste du « Printemps des peuples » : une procession des nations européennes (dans laquelle se mêlent des personnes de tous les sexes, âges et classes sociales) défile devant un arbre de la liberté, puis une statue de l’allégorie de la république. Les nations sont identifiables par leurs drapeaux (français, allemand, italien, hongrois, tchèque) et leurs costumes traditionnels. On notera que si le peintre anticipe la constitution de l’État- nation allemand, en faisant figurer le nom d'Allemagne sur le drapeau, il se refuse en revanche à représenter 4
l’Italie unifiée (les trois drapeaux vert-blanc-rouge portent les inscriptions des principaux états : royaume des Deux-Siciles, Lombardie et Romagne). La déchéance des monarques est symbolisée par un sol jonché d'attributs royaux. À noter que la puissance divine est aussi représentée : le Christ bénit la fraternité retrouvée des humains et les anges chassent les souverains. L’artiste exprime ainsi l’intime mélange de volonté politique et de croyance religieuse qui caractérise l’esprit de 1848 en Europe. Mais le « Printemps des peuples » va succéder à « l’Hiver des princes ». Les révolutionnaires sont divisés et les opinions publiques sont déçues. Dès la fin de l’année 1848, un retour à l’ordre brutal est affirmé. Les souverains et l’armée écrasent dans le sang les patriotes et les libéraux. « À Naples, le meilleur des rois continue à faire régner l’ordre dans ses États. » Caricature de presse par Daumier, 1849, BNF, Paris I. L’unification de l’Italie 1. Deux rêves pour une Italie libre Dans les années 1820, les jeunes bourgeois libéraux, imprégnés de romantisme révolutionnaire, développent avec ferveur le rêve d'une Italie réunifiée comme à l'époque de la Rome antique. Parmi eux, l'avocat génois Giuseppe Mazzini, né en 1805. Réfugié à Marseille, il fonde le mouvement, Jeune Italie (Giovine Italia). Son programme tient en deux mots : l'unité dans la République, avec une devise : «Dio e popolo» (Dieu et le peuple). Puis, le comte piémontais Camillo Benso di Cavour, né en 1810, cultive l'ambition de transformer le royaume de Piémont-Sardaigne, le seul qui soit véritablement indépendant, en une puissance respectable. Il édite en 1847 avec son ami Cesare Balbo un journal dont le titre, Il Risorgimento (Résurgence), va donner son 5
nom au mouvement national italien. Mais lui-même ne souhaite pour l'heure que d'agrandir son petit royaume alpin aux dépens des possessions autrichiennes. 2. Faux espoirs Républicains et monarchistes croient leur heure venue quand éclate à Paris la Révolution de Février 1848. À Rome, où une émeute a poussé le pape à la fuite, Mazzini proclame la République et reçoit l'appui de Giuseppe Garibaldi et de ses légionnaires à la chemise rouge. À Turin, le roi Charles-Albert (roi de Piémont-Sardaigne entre 1831 et 1849) entre en guerre contre l'Autriche pour chasser celle-ci de Lombardie et de Vénétie. Il a le soutien de Cavour. Mais les Piémontais sont défaits à Custozza et, l'année suivante, à Novare. Charles-Albert, pour échapper à l'humiliation, abdique en faveur de son fils, Victor-Emmanuel II. La République romaine de Mazzini ne survit pas plus longtemps. Elle est renversée par un corps expéditionnaire français. De même, tombe une éphémère République de Venise. La Vénétie rentre dans le giron autrichien. 3. Les bons offices de la France Cavour devient Premier ministre du Piémont-Sardaigne en 1852. Froid politique, il a conscience que le Piémont ne pourra expulser l'Autriche d'Italie sans un coup de main extérieur. Pour s'attirer les bonnes grâces des grandes puissances, il engage les troupes piémontaises dans la guerre de Crimée, aux côtés des Français et des Anglais. Peu importe que leur contribution demeure symbolique. L'important est le geste. Les patriotes italiens, y compris les républicains de la mouvance de Mazzini, commencent à se faire à l'idée d'une Italie unie autour du roi Victor-Emmanuel II. Cavour, lui aussi, se rallie à cette idée et ne veut plus se contenter d'un agrandissement du Piémont. Malgré toute sa sympathie pour la cause italienne et le «droit des peuples à disposer d'eux-mêmes», malgré son désir de défaire l'Europe du Congrès de Vienne, Napoléon III hésite à répondre aux sollicitations de Cavour... Cependant en janvier 1858, l'empereur des Français, alors au sommet de son prestige, manque d'être tué lors de l'attentat d'un patriote italien, Felice Orsini. À la veille d'être guillotiné, le terroriste supplie l'empereur de secourir l'Italie et sa lettre, complaisamment étalée dans la presse, bouleverse l'opinion française et l'empereur lui-même. Les 20 et 21 juillet 1858, dans la station thermale de Plombières, dans les Vosges, Cavour rencontre en secret Napoléon III et le convainc d'apporter son aide militaire aux Piémontais dans leur guerre à venir contre l'Autriche. Les deux hommes conviennent qu'en cas «d'un acte agressif de l'Autriche», la France viendrait au secours du Piémont et libérerait la Lombardie et la Vénétie. Elle aiderait aussi à la libération des principautés de Parme et Modène et de la Toscane. En échange du rattachement de ces terres au royaume de Piémont-Sardaigne, elle recevrait la Savoie et Nice. Cavour n'a plus qu'à provoquer l'Autriche en accueillant des déserteurs de l'armée autrichienne. L'Autriche, maladroitement, déclare la guerre. Napoléon III, comme prévu, accourt. La plus grande partie des troupes françaises débarquent à Gênes en vue de déborder les Autrichiens sur leur flanc gauche. Napoléon III lui-même arrive par le Nord. À Magenta a lieu le premier affrontement le 4 juin 1859. Battus, les 6
Autrichiens évacuent la Lombardie, qui est annexée par le Piémont-Sardaigne. L'empereur des Français fait une entrée triomphale à Milan, ravivant le souvenir de Napoléon le Grand. La victoire de Magenta réveille les patriotes d'Italie centrale qui commencent à voir en Victor-Emmanuel II un futur roi. La guerre franco-piémontaise contre l’Autriche en 1859. La guerre, cependant, n'est pas finie. L'empereur autrichien François-Joseph Ier prend lui-même le commandement des opérations. Les armées s'affrontent à nouveau à Solferino le 24 juin 1859, au sud du lac de Garde. Au terme d'une journée sanglante, les Français conservent leurs positions, ce qui fait d'eux les vainqueurs. Mais ils sont presque aussi épuisés que les Autrichiens. 7
24 juin 1859. Dans la chaleur étouffante qui enveloppe l’Italie du Nord, 300 000 soldats livrent une terrible bataille. Balles, grenades et baïonnettes font 40 000 morts. Des milliers de blessés sont abandonnés dans les tranchées. N.B. : C’est à la suite de cette bataille qu’Henri Dunant fonde le mouvement humanitaire international de la Croix rouge. Napoléon III est sensible à l'horreur de la bataille. Il est d'autre part inquiet de voir les Prussiens se ranger aux côtés des Autrichiens et ne veut pas entrer en conflit avec le pape, qui règne à Rome. Il décide donc d'arrêter les frais et propose un cessez-le-feu. Tant pis pour Nice et la Savoie. Il signe l'armistice de Villafranca le 11 juillet 1859 sans même en référer à son allié. Furieux, Cavour démissionne du gouvernement piémontais. Mais il se ravise bientôt, et négocie, par le traité de Nice du 24 mars 1860, le rattachement par plébiscite des principautés de Parme, Modène et Toscane au Piémont-Sardaigne ainsi que la cession de la Savoie et du comté de Nice à la France. 4. L’intervention de Garibaldi Le Premier ministre piémontais est conscient d'avoir déjà beaucoup fait pour l'unité italienne. Mais l'avancée est fragile et pour la consolider sans qu'interviennent les grandes puissances européennes, il a besoin d'un peu de tranquillité. Mais Garibaldi reproche à Cavour son approche prudente et lui en veut d'avoir cédé sa ville natale, Nice, à la France. Comme vient d'éclater en Sicile un soulèvement contre le roi des Deux-Siciles, établi à Naples, Garibaldi quitte son asile de Caprera afin d'unir les Deux-Siciles à la couronne piémontaise. Il rassemble un millier de volontaires à la chemise rouge (1089 exactement) et s'embarque à Gênes pour la Sicile. C'est le début de l'épique «expédition des Mille». Cavour laisse faire, avec le secret 8
espoir qu'elle échouera... En débarquant à Marsala le 11 mai 1860, à l'ouest de Palerme, les Chemises rouges sont désappointées de n'être pas accueillies par le peuple comme ils l'espéraient. Ils marchent néanmoins vers Palerme. Jouant d'audace, Garibaldi s'empare de la Sicile, s'attribue le titre de dictateur au nom du roi Victor-Emmanuel II, traverse le détroit de Messine et marche vers le Nord, avec des visées sur Rome. Cavour sent le danger, d'autant que Garibaldi, républicain et anticlérical de cœur, n'est pas l'allié le plus sûr qui soit pour Victor-Emmanuel II et la maison de Savoie. Il décide donc de prendre les devants et de marcher sur Naples. Mais cela implique de traverser les États du pape. Comme il n'est pas question de se mettre à dos les catholiques français, Cavour avertit Napoléon III de ses intentions et l'empereur lui fait répondre par son ambassadeur : «Faites, mais faites vite», en lui suggérant de longer la côte adriatique et d'éviter Rome où stationne une garnison française. Pendant ce temps, le 6 septembre 1860, le dernier Bourbon s'enfuit de Naples. Le lendemain, Garibaldi arrive en train dans la ville. Plus au nord, les troupes pontificales affrontent dans un baroud d'honneur les Piémontais à Castelfidardo le 18 septembre 1860. Les États pontificaux, amputés de la Romagne et des Marches de la côte adriatique, sont réduits désormais au quadrilatère romain. Le 1er octobre de la même année se déroule une des grandes batailles du Risorgimento, tant par le nombre de combattants impliqués que par les résultats obtenus par Garibaldi, qui met fin à l'offensive de l'armée des Bourbon. Environ 24 000 Garibaldiens, qui constituent l'armée méridionale, sont engagés contre environ 50 000 hommes de l'armée des Bourbon. Cette victoire difficile pour les troupes sardes et garibaldiennes ouvre la conquête de l’Italie méridionale à Victor-Emmanuel II. Il ne reste plus qu'à légitimer par un plébiscite la soumission de l'Italie méridionale au roi Victor- Emmanuel II. La capitale du royaume est transférée de Turin à Florence, en attendant Rome. Enfin, le 14 mars 1861, le Parlement italien donne à Victor-Emmanuel II le titre tant espéré de roi d’Italie. 9
L’unité italienne (1859-1924) 5. L'Italie du «Risorgimento» Cavour meurt, peu après, le 6 juin 1861, en laissant au roi le soin de régler les questions de Venise et de Rome. En 1866 éclate la guerre entre la Prusse du chancelier Bismarck et l'Autriche de François-Joseph Ier. Le roi d'Italie propose son alliance à la Prusse en échange de la Vénétie, en cas de victoire sur l'Autriche. D'un autre côté, Napoléon III s'engage auprès de l'Autriche à rester neutre dans ce conflit à condition qu'au terme de la guerre, la Vénétie soit cédée à l'Italie. En d'autres termes, l'Italie est gagnante à tous les coups. C'est ainsi qu'après la défaite magistrale des Autrichiens à Sadowa (3 juillet 1866) face aux Prussiens et malgré la prestation décevante des Italiens, l’Italie reçoit comme promis la Vénétie par l'intermédiaire de la France. Reste Rome. Dans la Ville éternelle stationnent des troupes françaises et les Italiens se sont engagés devant Napoléon III à ne pas les attaquer ni à porter atteinte à l'intégrité des possessions pontificales. En 1867, Garibaldi, au mépris des conventions internationales, tente de conquérir la cité. Mais ses Chemises rouges sont défaites à Mentana, près de Rome, par le corps expéditionnaire français et les troupes 10
pontificales. «Les chassepots ont fait merveille», dit-on avec ironie des fusils qui équipent les soldats de Napoléon III. C'est une nouvelle guerre étrangère qui va permettre aux Italiens d'achever l'unité de la péninsule. Le 2 septembre 1870, Napoléon III et son armée sont capturés à Sedan par les Prussiens. Deux jours plus tard, Paris proclame la République. Plus rien ne retient les Italiens. Leurs troupes entrent à Rome le 20 septembre 1870 et annexent la ville après un nouveau plébiscite, l'érigeant en capitale. Pie IX se déclare prisonnier au Vatican. C'est seulement par les accords de Latran du 11 février 1929 que sera définitivement réglée la Question romaine. Ces accords définissent l’indépendance et les limites du Vatican. Entre temps, après la Première Guerre mondiale (1914-1918) au Traité de Saint-Germain-en-Laye (le 10 septembre 1919), l’Italie reçoit les régions de l’Istrie et du Haut-Adige, la ville de Trieste et plusieurs îles de la côte de Dalmatie, zones précédemment sous souveraineté de l’Autriche-Hongrie. Enfin, le 16 mars 1924, l’Italie de Mussolini annexe l’État libre de Fiume. Vittoriano : le monument au premier roi de l’Italie réunifiée, Victor-Emmanuel II Monument dédié à Victor-Emmanuel II (aussi connu sous le nom de Vittoriano) Il se trouve sur la Piazza Venezia (Place de Venise) à côté du Capitole. Au centre du monument surgit l'Autel de La Patrie (Altare della Patria), tandis qu'à l'intérieur du bâtiment se trouve le musée sur la réunification de l’Italie (Museo del Risorgimento). 11
L'immense monument d'un blanc immaculé qui s'inspire du célèbre Autel de Pergame, a été conçu par Giuseppe Sacconi et réalisé entre 1895 et 1911 pour célébrer les 50 ans de l’unité italienne. Il fut bâti en l'honneur de Victor-Emmanuel II (premier roi de l'Italie unifiée : 1861). La construction de ce bâtiment fut controversée parce qu'elle causa la destruction d'un quartier médiéval autrefois accroché aux pentes du Capitole. Le monument, ainsi que son grand escalier, est tout entier de marbre blanc éblouissant. C'est une profusion de colonnes et de fontaines où trône une statue équestre de Victor-Emmanuel II, due au sculpteur Enrico Chiaradia. Les reliefs représentent les villes italiennes, par Eugenio Maccagnani. Les grands reliefs des deux côtés de l'Autel de la nation sont d'Angelo Zanelli. Ces sculptures évoquent l'Italie dans l'art, la science, la religion et le droit. La structure mesure 135 mètres de large et 70 mètres de haut. Au-dessus du bâtiment, de chaque côté, deux statues de la déesse Victoria conduisent un quadrige. Au- dessous brûle la flamme éternelle, sur la tombe du Soldat inconnu. La fontaine, à gauche, symbolise la mer Adriatique et celle de droite la mer Tyrrhénienne. La réalisation du Vittoriano provoqua beaucoup de protestations: pour les uns, c'était le râtelier, pour d'autres, la machine à écrire, le lavabo... Ses adversaires trouvaient le bâtiment trop colossal et très mal assorti avec le centre historique de Rome. Cependant, aujourd'hui, la plupart des romains considèrent ce monument, qui attire de nombreux visiteurs, comme un des symboles de leur ville. En guise de conclusion L’unité italienne c’est d’abord et avant tout sa langue. Dans une interview du 18/03/11 (pour Le Monde Magazine), l’écrivain universitaire Umberto Eco affirme que « l'Italie c'est avant tout une langue. Si un Français feuillette aujourd'hui un livre de Rabelais dans sa version originale, il aura des difficultés à comprendre le texte. Idem pour un Britannique s'il parcourt un ouvrage de Chaucer. En revanche, un chauffeur de taxi italien peut comprendre aisément La Divine Comédie, de Dante. La langue italienne a très peu évolué depuis mille ans. » Ainsi, l’Italie est d’abord une culture portée par une langue. Sa diffusion se propage en trois grandes phases : « D'abord grâce à l'école, au service militaire et, surtout, à la Première Guerre mondiale. Cinq millions d'Italiens furent mobilisés. Ils apprirent à vivre et à mourir ensemble sous l'uniforme italien. La guerre fut un creuset : pour la première fois, les gens du Nord et du Sud se côtoyaient. Puis la deuxième phase : ce furent les gigantesques migrations du Sud, agricole, vers le Nord, plus industrialisé. Des épreuves terribles attendaient les nouveaux arrivants, qui communiquaient très difficilement avec les autochtones. Cette deuxième phase se termine dans les années 1950. Commence alors la troisième phase, la plus intensive : l'unification de la langue par la télévision, qui fournit aux Italiens un lexique et une syntaxe élémentaires. Elle a créé aussi des références communes à un pays qui en manquait. (…) En propageant cette langue, la télévision a joué un rôle fondamental. Aujourd'hui, un chauffeur de taxi s'exprime comme un avocat des années 1930, il est même capable de citer des articles de loi parce qu'il 12
a été exposé constamment à la télévision. Même Berlusconi parle un bon italien. » Finalement, l’Italie est un pays jeune (plus jeune que les Etats-Unis !) comparé à la France, à l’Angleterre et à l’Espagne. C’est donc un pays en devenir… II. Une géographie de l’Italie 1. L'identité italienne L’Italie est la première puissance économique de la Méditerranée. Sixième puissance mondiale, l’Italie est un pays de forts contrastes, qui se retrouvent dans l’organisation de son espace. L’Italie est ancrée à l’Europe, à la charnière de l’Europe occidentale et de l’Europe orientale. C’est à la fois un morceau de l’Europe continentale et une terre s’avançant dans la mer (une péninsule). Allongée sur plus de 1 200 km du nord au sud et couvrant 300 000 km2, l’Italie associe à cette péninsule deux grandes îles (la Sicile et la Sardaigne). Le relief au nord est dominé par une plaine cernée de massifs montagneux, la plaine du Pô. Le sud est constitué de montagnes (le massif des Apennins), avec quelques plaines le long des littoraux. Le climat italien, sauf au nord, est méditerranéen. Relief, climats et contraintes naturelles Le territoire de l’Italie oppose un Nord à un Sud. Le Nord appartient à la mégalopole européenne, car il concentre les plus grandes entreprises du pays et est plus riche que la partie Sud. 13
L’Italie : un « pont » entre l’Europe et la Méditerranée Chargée d’histoire et de monuments célèbres, l’Italie est l’un des pays où est né le tourisme. Aujourd’hui, c’est la quatrième destination des touristes dans le monde, venant admirer les richesses architecturales comme la ville de Venise, Florence ou Rome. Photographie du Grand canal à Venise 14
Photographie aérienne de la cathédrale de Florence, Santa Maria del Fiore Photographie du Forum à Rome 15
2. Les Italiens La population de l’Italie se caractérise aujourd’hui par des changements dans l’espace, dans la démographie et dans la société. Les 58 millions d’Italiens sont ainsi très inégalement répartis dans l’espace. Si le pays est densément peuplé en moyenne (192 habitants par km2), le Nord et les littoraux concentrent des densités de population très supérieures au centre de la péninsule. La population italienne : répartition et grandes agglomérations Aujourd’hui, les grandes villes sont nombreuses, mais le réseau urbain est particulièrement dense dans le nord du pays. Les Italiens sont urbains à 70%. Ils se concentrent sur les plaines littorales et dans les villes, sous l’effet d’un fort exode rural. Deux « capitales » dominent le réseau urbain, marqué par l’abondance de villes petites et moyennes : Milan (capitale économique de 4 millions d’habitants) et Rome (capitale politique et religieuse). C’est donc une population de plus en plus urbaine que connaît l’Italie, et de plus en plus attirée par les plaines du nord du pays. La population italienne a doublé en moins d’un siècle, mais depuis trente ans c’est la fin des familles 16
nombreuses. Le taux de natalité a fortement baissé et est aujourd’hui inférieur au taux de mortalité : l’accroissement naturel est donc négatif (il y a plus de décès que de naissances, la population diminue). Le taux de fécondité en Italie est de 1,3 enfant par femme. C’est devenu le plus faible en Europe. Il en résulte un vieillissement de la population. Les pyramides des âges de l’Italie en 1952 et 2004 Pendant longtemps terre d’émigration (départ pour d’autres pays), l’Italie est devenue un pays d’immigration (arrivée d’étrangers). Aujourd’hui, elle attire les populations pauvres d’Afrique et d’Europe de l’Est à la recherche de meilleures conditions de vie (travail, logement, alimentation, soins, éducation,...). Évolution de l’immigration italienne de 1960 à 2008 17
3. L’Italie, une puissance en transition Le système économique italien se caractérise par une grande souplesse et l’association de plusieurs acteurs : 1. les grandes entreprises d’État, aujourd’hui souvent privatisées, 2. le dynamisme de grands groupes industriels privés (Benetton, Tiscali, Fiat, Olivetti), 3. un tissu de PME (Petites et moyennes entreprises) et de sous-traitants tournés vers l’exportation (surtout le textile, l’électroménager ou l’agroalimentaire). Mais parallèlement, l’économie souterraine (activités illégales, exercées en dehors des circuits économiques officiels), présente surtout dans le Sud, assurerait plus de 27 % du PIB. De plus, avec la mondialisation, les Mafias italiennes (Camorra, Cosa Nostra et la ‘Ndrangheta notamment) sont à la tête d’empires économiques puissants et gangrènent le pays. Les activités économiques dominantes en Italie L’économie italienne repose sur une industrie dynamique concentrée pour les 2/3 au nord du pays et qui subit de plus en plus la concurrence internationale. L’agriculture, spécialisée dans les produits méditerranéens, a connu d’importants progrès mais n’est intensive que dans la plaine du Pô. L’Italie est le premier producteur de riz en Europe (230 000 hectares de rizières en Italie du Nord), culture presque entièrement consacrée à la préparation d’un plat très populaire, le risotto (riso = riz en italien). Enfin, le tourisme constitue un secteur clé : l’Italie accueille 41 millions de visiteurs par an, sur les littoraux, dans ses villes et les stations alpines. 18
Rimini : un littoral touristique 4. Des territoires contrastés Le territoire italien est décentralisé : il comprend 20 régions autonomes dont 5 ont des pouvoirs étendus. Les inégalités régionales sont fortes : alors que le Nord, dynamique, appartient aux zones les plus industrialisées d’Europe, le Sud (Mezzogiorno) reste une périphérie en retard. Ainsi, l’Italie présente de forts contrastes régionaux qui la rattachent à la fois au centre et aux périphéries de l’Europe. On peut distinguer alors trois grandes régions : 1. Le Nord qui appartient au cœur économique de l’Europe. Urbanisé et industrialisé, il concentre les activités et la population. Il s’organise autour de trois grands pôles qui forment le « triangle industriel » : Milan (métropole financière, industrielle et tertiaire), Turin (capitale de l’automobile car le groupe FIAT y possède ses usines et son siège sociale) et Gênes (premier port du pays). La riche plaine agricole du Pô a par ailleurs développé une agriculture intensive. 2. Le Mezzogiorno qui est une périphérie de l’Europe en retard. Cet espace reste rural et plus pauvre malgré les aides nationales et européennes qui ont financé la création de routes, de complexes industrialo- portuaires (Tarente, premier centre sidérurgique), l’extension de l’irrigation et le développement du tourisme. Mais ces fonds profitent aux littoraux et sont parfois captés par la Mafia. Même si l’émigration vers le Nord diminue et si certaines régions se développent, le chômage et le travail au noir restent importants. 3. Le centre qui est une périphérie dynamique de l’Europe. L’originalité de cette « troisième Italie » repose sur un tissu de PME innovantes, à structure familiale, implantées dans des « districts industriels », autour d’un réseau urbain de villes moyennes. Enfin, il existe aussi des contrastes entre les littoraux actifs, très peuplés (1/3 de la population), et les régions montagneuses de l’intérieur, désertées. Les îles souffrent d’isolement mais valorisent leur atout touristique. 19
En guise de conclusion Comme pour bon nombre de pays industrialisés, l’Italie doit faire face au problème énergétique. Le gouvernement de Silvio Berlusconi souhaitait relancer le programme nucléaire, abandonné en 1987 juste après l’accident majeur de Tchernobyl. Mais la catastrophe du 11 mars 2011 à Fukushima bouleverse cette stratégie. Dans un récent sondage, les 2/3 des Italiens sont opposés à ce retour au nucléaire. Ce projet était important pour l’actuel gouvernement car il devait permettre de réduire la dépendance énergétique du pays (notamment vis-à-vis de la France) et de faire baisser le prix de l’électricité. Ainsi, le défi de l’exploitation des énergies renouvelables se pose en Italie, comme ailleurs. Croquis de l’espace italien Source : http://www.palissy47.info/article.php3?id_article=1654 20
QUELQUES PHOTOGRAPHIES DES PRINCIPAUX ESPACES ITALIENS Photographie de la place Saint-Pierre à Rome 21
Photographie de la métropole milanaise (capitale économique de l’Italie) 22
Photographies de Gênes, premier port italien 23
Photographie des usines Fiat à Turin 24
Photographie d’un paysage rural du sud de l’Italie : le village troglodyte de Matera 25
Bibliographie sommaire - Manuels du secondaire Manuels d’Histoire-Géographie niveau 4è (Magnard et Belin, 2006) - Ouvrage général Milza Pierre, Histoire de l’Italie. Des origines à nos jours, Fayard, Paris, 2005 - Sites internet utiles http://www.herodote.net/ http://fr.wikipedia.org/wiki/Risorgimento http://www.atlas-historique.net/ http://www.histoire-image.org/site/rech/resultat.php?a=92&t=123 http://www.lemonde.fr/week-end/article/2011/03/18/umberto-eco-l-italie-c-est-avant-tout-une- langue_1494120_1477893.html Et bien d’autres sites qui contiennent bon nombre d’images… 26
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