La gestion de la pandémie de grippe - A(H1N1) 2009 Retour d'expérience de la zone de défense et de Sécurité Nord
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
La gestion de la pandémie de grippe A(H1N1) 2009 Retour d'expérience de la zone de défense et de Sécurité Nord Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011
Durant près de 10 mois, plusieurs milliers de professionnels, médecins, infirmières, administratifs, étudiants et retraités du Nord Pas-de-Calais et de Picardie, ont œuvré pour assurer la protection de la population face à une menace que l’Organisation mondiale de la Santé jugeait à la fois sérieuse et très préoccupante. À défaut d’une connaissance des paramètres principaux, la réalité observée fut, et c’est heureux, en deçà des scenarii envisagés. Cependant, si l’épidémie s’est caractérisée par une mortalité directe et indirecte plus faible qu’à l’accoutumée, elle a été d’expression clinique plus sévère pour une partie des malades et a touché une population beaucoup plus jeune avec plus de 1 300 enfants, adolescents et adultes en réanimation et quelques centaines de décès. Au regard de la commande publique, les acteurs de la zone de défense et de Sécurité Nord ont su préparer le système de santé à affronter la charge liée aux situations les plus plausibles, tant en durée qu’en intensité au prix d’un fort engagement général, d’une charge de travail importante et de réajustements continus. Afin d’améliorer les dispositifs de préparation et de mise en oeuvre des mesures de contrôle, de prévention et de soins, le service zonal de défense et de sécurité de l’Agence régionale de santé a organisé un retour d’expérience sous forme de questionnaires, séminaire et entretiens. Nous tenons à remercier l’ensemble des acteurs de terrain pour leur engagement pendant toute la durée de cette pandémie. Lors du séminaire du 22 juin 2010 dit de « retour d’expérience », nous avons pu rencontrer un grand nombre d’entre eux, venant des différents départements de la zone de défense et de sécurité Nord. Ce séminaire a ainsi été l’occasion d’échanges et de partage très enrichissants, et c’est à partir des travaux de ce groupe que les auteurs ont pu bâtir les bases du rapport que nous vous présentons. Quels que soient les progrès qui restent à faire et que ce rapport décrit, celui-ci restera l’occasion de saluer le professionnalisme et l’engagement de tous, qu’ils en soient chaleureusement remerciés. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 1
SOMMAIRE 1 - Le retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) dans la zone Nord ..........................................p 3 2 - La grippe A(H1N1)2009 dans la zone Nord ..............................................................................p 5 2-1 Le contexte épidémique et la surveillance...............................................................................p 5 2-2 Les mesures de contrôle sanitaire aux frontières ....................................................................p 9 2-3 La gestion des stocks grippe.................................................................................................p 10 2-4 La régulation des appels pour grippe ....................................................................................p 13 2-5 La prise en charge des patients grippés et des sujets contacts ............................................p 14 3- La campagne de vaccination ...................................................................................................p 19 3-1 La campagne nationale de vaccination .................................................................................p 19 3-2 La campagne de vaccination dans la zone Nord ..................................................................p 22 3-2-1 L’organisation générale .....................................................................................p 22 3.2.2 Les centres de vaccination et les équipes mobiles de vaccination ....................p 23 3-2-3 La gestion des stocks de la campagne de vaccination ......................................p 25 3-2-4 La mobilisation des équipes et la gestion des plannings ...................................p 27 3-2-5 L’information et la formation des personnels participant à la campagne de vaccination .................................................................................................................p 29 3-2-6 Le fonctionnement des centres de vaccination ..................................................p 30 3-2-7 La plate-forme téléphonique d’aide à la prescription en centre de vaccination...p 35 3-2-8 La gestion des déchets d’activité de soins à risques infectieux (DASRI) ...........p 37 3-2-9 Le désarmement ...............................................................................................p 38 3-2-10 Les financements et indemnisations................................................................p 39 3- 3 Les résultats de la campagne de vaccination .......................................................................p 40 4 - La gestion de crise ..................................................................................................................p 42 4-1 Les relations entre les niveaux national, zonal, local et l’inter-ministérialité...........................p 42 4-2 L’organisation de la gestion de crise dans la zone Nord........................................................p 43 4-3 L’information et la communication .........................................................................................p 46 5 – Conclusion ..............................................................................................................................p 49 Glossaire ......................................................................................................................................p 53 Annexes.........................................................................................................................................p 54 Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 2
1 - Le retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) dans la zone Nord L’épidémie de grippe A(H1N1) 2009 a constitué un événement exceptionnel par son ampleur. Elle a nécessité la mise en place de mesures et d’organisations jusque là inédites, ainsi que la mobilisation de tous les acteurs et secteurs d’activités dans la durée. Un retour d’expérience zonal Afin de capitaliser l’expérience acquise au sein de la Zone de défense Nord et d’améliorer la gestion locale de futures crises sanitaires, M. Jean-Michel BERARD, Préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, Préfet de la Zone de Défense Nord, Préfet du Nord, a souhaité réaliser un retour d’expérience zonal (RETEX), en lien avec M. Daniel LENOIR, Directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) de zone. Cette démarche concerne la zone de défense Nord, qui regroupe cinq départements au sein des régions Nord-Pas-de-Calais (départements du Nord et du Pas-de-Calais) et Picardie (départements de l’Aisne, de l’Oise et de la Somme) et couvre une population de six millions d’habitants. Les principaux objectifs assignés au retour d’expérience de la zone Nord sont : - Partager une vision globale de l’événement ; - Identifier l’évolution de l’événement dans ses diverses composantes (techniques, humaines, organisationnelles), et déterminer l’ensemble des actions entreprises ; - Repérer les points positifs et les capitaliser ; - Identifier les points négatifs pour proposer des axes d’amélioration ; - Valoriser l’expérience acquise et l’efficacité des structures pour la gestion des événements futurs ; - Démultiplier les enseignements tirés de cette démarche et sensibiliser les acteurs potentiels. Limitée au fonctionnement interne de la zone Nord, cette analyse locale complète, sans s’y substituer, les analyses réalisées au niveau national [commissions d’enquêtes parlementaires, Cour des comptes, ministère de l’Intérieur, Délégation inter-ministérielle à la lutte contre la grippe aviaire (DILGA), Sécurité civile et grandes entreprises, Institut national de veille sanitaire (InVS), Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)…] ou sur le terrain [autres zones de défense, ARS zone Sud, établissements de santé, Cellule de l’Institut de veille sanitaire en RÉgions (CIRE)…]. Un groupe de pilotage zonal, co-présidé par l’Etat major interministériel de zone de défense (EMIZD) et le Délégué de zone santé, a animé le processus1. Le secrétariat du groupe de pilotage était assuré par le service zonal de défense et de sécurité (SZDS). Une démarche participative Une très large participation des acteurs et des échanges ouverts ont été souhaités pour ce retour d’expérience. Pour ce faire, la démarche retenue s’est déroulée en deux temps, avec : - une enquête par questionnaire semi-directif auprès de représentants des différentes catégories professionnelles et secteurs d’activités ayant participé à la gestion de l’épidémie A(H1N1) 2009, - un séminaire largement ouvert ayant pour objectif de faire émerger les modalités de protection de la population face au risque sanitaire et d’en étudier les points positifs et les axes d’amélioration, notamment en matière de partenariat et d’adaptation aux besoins locaux. 1 Le comité de pilotage zonal était composé de représentants des préfets de départements, DDASS, DRASS et ARH/ARS de la zone de Nord, de l’établissement de santé de référence, des préfectures ou des SIDPC. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 3
L’enquête par questionnaire, centrée sur l’organisation au sein de la zone Nord lors de la crise, s’est déroulée d’avril à juin 2010. Elle a abordé les problématiques suivantes : - l’organisation et la gestion de crise au sein de chaque organisme (animation, mobilisation des personnes, astreintes, délégations, mise en œuvre du plan de continuité des activités, locaux, informatique, information interne et externe …), - la surveillance et la veille sanitaire (suivi des cas possibles ou probables, cas groupés, sujets contacts …), - le contrôle sanitaire aux frontières, - la gestion des stocks (masques, antiviraux, respirateurs, suivi des commandes et de la consommation…), - la régulation (hospitalière et ambulatoire), - l'organisation des soins (dont les prises en charge spécifiques), - la campagne de vaccination : cette thématique a été séparée en 3 sous-thèmes (logistique, organisation et fonctionnement quotidien des centres et des équipes de vaccination), - les relations avec le niveau national et l’inter-ministérialité (les modalités d’échanges, les remontées d’indicateurs…), - la communication interne et externe (documents, site Internet, relations presse …). 97 personnes ont répondu à un ou plusieurs de ces questionnaires. Pour chaque thématique, une synthèse écrite des réponses et des solutions d’amélioration proposées a été réalisée par le(s) rapporteur(s) désigné(s) au sein du groupe de pilotage2. Le séminaire, plus orienté sur les stratégies, les enjeux et les jeux d’acteurs, a réuni 88 participants le 22 juin 2010 à l’Ecole nationale de police de Roubaix. Les présentations, groupes de travail et débats (programme en annexe 1) ont permis le partage d’une vision globale de l’événement, la reconnaissance des points positifs à valoriser et l’identification des axes de progrès et des actions à mener dans le futur. En complément un dossier support, comprenant la description chronologique de l’événement et de son contexte3, a été remis à chaque participant au retour d’expérience. Au total, 156 professionnels d’horizons et secteurs différents ont apporté leur contribution au retour d’expérience de la zone Nord (liste des professionnels en annexe 2). 2 Les rapporteurs désignés sont : - L’organisation et la gestion de crise : Valentine JAYAIS et Edith PONS, ARS de la zone Nord avec la collaboration de Mylène BERTIDE, ARS de Picardie. - La surveillance et la veille sanitaire : Sophie MOREAU de la CIRE Nord. - Le contrôle sanitaire aux frontières : José LEJEUNE, ARS de Picardie avec la collaboration de Hélène PETITOT-GALLE et Jean Marc DI GUARDIA , ARS du Nord-Pas-de-Calais. - La gestion des stocks : Julien DENYS et Marion QUENIART, ARS du Nord-Pas-de-Calais. - La régulation des appels pour grippe : Edith PONS et Valentine JAYAIS, ARS de la zone Nord. - L'organisation des soins : Edith PONS et Valentine JAYAIS, ARS de la zone Nord, avec la collaboration de Carole BENBRAHIM et Elisabeth VERITE, ARS du Nord-Pas-de-Calais, Astrid DERODE, ARS de Picardie et Sophie MOREAU, CIRE Nord. - La campagne de vaccination : José LEJEUNE, ARS de Picardie (stocks), Sébastien NGUGEN (organisation de la campagne) et Marie-Cécile VADEAU-DUCHER (fonctionnement des centres) de l’ARS du Nord-Pas-de-Calais. - Les relations avec le niveau national et l’inter-ministérialité : Valentine JAYAIS et Edith PONS, ARS de la zone Nord. - La communication interne et externe : Edith PONS et Valentine JAYAIS, ARS de la zone Nord, avec la collaboration de Astrid TOMBEUX de la Préfecture du Nord et Béatrice DEGRUGILLERS de l’ARS Nord-Pas-de-Calais pour les relations presse. Les travaux de synthèse sont disponibles sur demande auprès du service zonal de défense et de sécurité. 3 Le dossier comprenait un bulletin relatif aux données épidémiologiques (CIRE), un récapitulatif des instructions nationales (Zone), un chronogramme des grandes actions mises en œuvre au niveau zonal et dans chaque département [SZDS et cellule de défense et de sécurité (CDS)], une synthèse bibliographique de la revue de presse par grands thèmes (service de documentation de la DRASS NPDC), un chronogramme des principales étapes de la gestion de la grippe A (H1N1)2009 (CDS du Nord). Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 4
La synthèse des réponses aux questionnaires et des travaux du séminaire du 22 juin 2010 fait l’objet du présent rapport. Cette synthèse a été réalisée par le service zonal de défense et sécurité (SZDS) de l’ARS de la zone Nord, avec l’appui d’un comité de lecture4. Elle présente successivement : - le retour d'expérience de la zone Nord (présent chapitre), - la grippe A(H1N1) 2009 dans la zone Nord (le contexte épidémique et la surveillance, le contrôle sanitaire aux frontières, la gestion des stocks grippe, la régulation des appels et la prise en charge des patients grippés et des sujets contacts), - la campagne de vaccination en France et dans la zone Nord (l'organisation générale, les centres et les équipes mobiles, la gestion des stocks, la mobilisation des équipes, l’information et la formation, le fonctionnement des centres, la plate-forme téléphonique, les déchets d'activités de soin, le désarmement, les financements et indemnisations), - la gestion de crise dans la zone Nord (les relations entre les niveaux national, zonal, local et l'inter-ministérialité, l'organisation de la gestion de crise dans la zone, l’information et la communication), - la conclusion du retour d'expérience. 2 - La grippe A(H1N1)2009 dans la zone Nord 2-1 Le contexte épidémique et la surveillance Une surveillance évolutive en fonction du contexte épidémique Le 24 avril 2009, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) lance une alerte de santé publique de portée internationale, en raison de la survenue de cas de grippe à transmission inter-humaine dus à un nouveau variant du virus grippal A(H1N1), identifiés au Mexique et aux Etats-Unis depuis mars/avril 2009. Dès l’alerte internationale, le ministère de la Santé, en lien avec l’Institut de veille sanitaire (InVS), met en place un dispositif de surveillance de la grippe A(H1N1), relayé localement par les Cellules de l’InVS en REgion (CIRE) et les équipes de veille sanitaire des Directions Départementales des Affaires Sanitaires et Sociales (DDASS). Dans un premier temps, la phase de « confinement » ou « contingentement » a pour objectif de retarder autant que possible la circulation du virus sur le territoire. La surveillance est individuelle, elle vise à détecter avec réactivité tout cas suspect de grippe (et ses contacts proches) chez les voyageurs de retour d’une zone où la circulation du virus est avérée, afin de mettre en œuvre les mesures de contrôle (isolement, prélèvement naso-pharyngé et traitement antiviral) autour de chaque cas et retarder ainsi l’implantation du virus en France. Le 30 avril 2009, le gouvernement français décide, par précaution, le passage au niveau 5 A du plan de prévention et de lutte «pandémie grippale»5 correspondant à la phase de préparation et de mobilisation des services de l'Etat [plan préparé pour répondre à l’émergence d’une pandémie à virus A(H5N1), virus hautement pathogène]. Le 1er mai 2009, la France déclare ses deux premiers cas confirmés de grippe A(H1N1) 2009 chez des voyageurs exposés en zone de circulation avérée du virus. Le 11 juin, l’OMS relève le niveau d’alerte pandémique de la grippe A(H1N1) de la phase 5 à la phase 6, en raison de la propagation du virus dans le monde. La pandémie, de gravité «modérée», touche 4 Le comité de lecture est composé, pour le volet administratif, des membres du groupe de pilotage zonal : Corinne BILLAUT, Julien DENYS, Valérie GUIGON, Christian MERLE, Sébastien NGUGEN, Maryse PANDOLFO, Hélène PETITOT- GALLE, Marion QUENIART (ARS Nord-Pas-de-Calais), Pascal CHAUD, Sophie MOREAU (CIRE Nord) et pour le volet scientifique des professeurs Benoît GUERY, Yves MOUTON, Jean-Luc SCHMIT et Yazdan YAZDANPANAH. 5 Version n° 150/SGDN/PSE/PPS du 20 février 2009. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 5
désormais plus de 27.000 personnes dans 73 pays. La France maintient le niveau d'alerte 5A, en raison d’une absence de circulation active du virus sur le territoire national. Mi-juin 2009, en France, le dispositif de confinement est complété par la détection précoce et la surveillance des cas groupés de grippe, afin de déceler le démarrage d’une circulation virale communautaire. Tout épisode de cas groupés de syndrome grippal doit être signalé sans délai aux DDASS et donne lieu à une évaluation clinique épidémiologique et virologique et à des préconisations de fermeture de classes et d’établissements scolaires selon les résultats d’analyses. Le 7 juillet 2009, la phase de confinement fait place à une « phase de limitation », en raison de l’augmentation du nombre de cas sans lien avec des cas importés. La surveillance est désormais populationnelle, basée sur le suivi d’indicateurs (incidence des infections respiratoires aiguës, données virologiques). L’objectif est de suivre la dynamique de l’épidémie et de réduire son impact sanitaire, notamment en identifiant les groupes les plus à risque de formes graves pour adapter les mesures de contrôle et préparer l’organisation de la campagne de vaccination. Cette surveillance repose sur les réseaux de surveillance de la grippe saisonnière renforcés6 et parallèlement, sur un dispositif de surveillance des cas sévères ad hoc, mis en place en partenariat avec les sociétés savantes de réanimation afin de recenser et décrire les cas présentant un tableau clinique grave. Mi-octobre 2009, devant l’augmentation importante des signalements, notamment suite à la rentrée scolaire, le dispositif de surveillance des cas groupés de grippe A(H1N1) est recentré sur les collectivités hébergeant des personnes à risque de complications. Le 2 novembre 2009, la surveillance des hospitalisations pour grippe en France est limitée aux cas graves admis en réanimation, soins intensifs ou continus. Le 10 août 2010, l’OMS déclare le passage en période post-pandémie compte tenu d’une part, de l’arrêt de circulation du virus A(H1N1) 2009 durant l’été dans l’hémisphère nord, de la faible circulation du virus dans l’hémisphère sud durant l’hiver austral et de la prédominance moins nette du virus A(H1N1) 2009 par rapport aux autres virus grippaux, et d’autre part, de l’absence de mutation virale observée. La France, restée au niveau d’alerte 5A pendant toute la pandémie, demeure encore à ce niveau d’alerte début décembre 2010. Un bilan épidémiologique contrasté En France, l’épidémie a duré 10 semaines (mi-octobre à fin décembre 2009). Le nombre de patients ayant consulté en métropole pour syndrome grippal pendant la période épidémique est estimé à 3 137 380, soit 5 % de la population. Par ailleurs, le nombre total de personnes infectées par la grippe A(H1N1) 2009 est évalué entre 7,7 et 14,7 millions par l’InVS. Cette estimation tient compte du nombre de consultations pour syndrome grippal attribuable à la grippe A(H1N1) 2009, de la proportion de personnes grippées ayant eu recours aux soins en médecine de ville et de la proportion de patients infectés mais asymptomatiques. En zone Nord, la vague épidémique a également duré 10 semaines. Elle a débuté dans la semaine du 5 au 11 octobre 2009 dans le Nord-Pas-de-Calais et dans la semaine du 19 au 26 octobre 2009 en Picardie. 6 En ville : réseau SOS Médecins, réseau Sentinelles (Sentiweb) et réseau des Groupements régionaux d’observation de la grippe (GROG). Les données des réseaux Sentiweb et GROG ont été fusionnées afin d’améliorer la représentativité et la sensibilité de la surveillance ; à l’hôpital réseau OSCOUR (Organisation de la Surveillance COordonnée des URgences) et serveur régional de veille et d’alerte permettant aux hôpitaux de transmettre leurs données d’activité hospitalière en lien avec l’épidémie. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 6
Dans la zone, le nombre de patients ayant consulté pour syndrome grippal durant l’épidémie est estimé à 300 660, soit 5 % de la population. Il semblerait que la proportion de consultations dans la population soit plus importante en Nord-Pas-de-Calais (5,9 %) qu’en Picardie (3,4 %). En France, un total de 1 334 cas graves a été signalé à l’InVS mi-avril 2010. Les enfants de moins de 15 ans représentaient 14 % des cas graves. Les principaux facteurs de risque remarqués étaient les pathologies respiratoires chroniques (31 % des cas graves), le diabète (10 %), l’insuffisance cardiaque (7%), le déficit immunitaire acquis ou iatrogène (7 %), l’obésité morbide (5 %) et la grossesse (5 %). Par ailleurs, 20 % des cas n’avaient aucun facteur de risque. Dans la zone Nord, un total de 97 cas graves a été recensé, soit un taux d’admission en réanimation estimé à 16,3 par million d’habitants. Pour 16,5 % d’entre eux, aucun facteur de risque n’a été retrouvé. Les taux d’admission en réanimation sont comparables entre le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, et les facteurs de risque observés sont identiques à ceux retrouvés au niveau national. En France, 312 décès liés à la grippe ont été signalés, soit un taux de décès estimé à 5 par million d’habitants, dont 9 % chez des enfants de moins de 15 ans et 16 % chez des patients sans facteur de risque. Lors des épidémies de grippe saisonnière, les personnes de moins de 65 ans représentent moins de 10 % des décès contre 75 % pour l’épidémie due au virus A(H1N1) 2009. Dans la zone Nord, 24 décès ont été signalés, soit un taux de mortalité de 4 par million d’habitants. Quatre patients (16,6 %) ne présentaient pas de facteurs de risque connus. Les taux de mortalité sont comparables entre les deux régions. Au total, selon l’InVS, le bilan de la pandémie en France est contrasté. La vague épidémique A(H1N1) 2009 a été plus précoce que les épidémies de grippe saisonnière de ces dix dernières années. Elle aurait atteint entre 13 et 24 % de la population en métropole, avec une mortalité directe et indirecte quantitativement faible et dans la plupart des cas une grande bénignité, voire une absence de symptômes. En revanche, une gravité particulière a été observée dans certains cas avec un nombre d’hospitalisations et d’admissions en réanimation supérieur à celui observé habituellement en période de grippe saisonnière dans toutes les tranches d’âge, mais de manière plus importante chez des sujets jeunes et sans facteurs de risque. Les tableaux de grippe « fulminante », caractéristiques des nouveaux virus grippaux, ont été fréquents alors qu’ils ne sont quasiment pas rencontrés lors des épisodes saisonniers. La zone Nord ne présente pas de particularités par rapport aux données nationales. Un réel intérêt du suivi des cas7 Le retour d’expérience de la zone Nord montre un intérêt réel du suivi épidémiologique des cas isolés, puis des cas groupés et des cas graves et enfin des indicateurs fournis par les systèmes de surveillance (GROG, OSCOUR®, SOS médecin, surveillance des formes graves). La confrontation de ces indicateurs a donné une vision globalement fiable de la dynamique et de l’impact de la pandémie. La phase de confinement a contribué à gagner du temps pour améliorer les connaissances sur le virus et préparer les protocoles de gestion et les dispositifs de surveillance. Les mesures de repérage et d’isolement ont visé à éviter la diffusion au sein des établissements de santé. Le suivi des cas groupés a permis d’objectiver et de quantifier la circulation virale autochtone. Il a confirmé le rôle catalyseur et amplificateur des regroupements de population au sein des collectivités dans le démarrage et la dynamique des épidémies. La gravité de l’épidémie a pu être mesurée par la surveillance des cas graves et des décès. En outre, l’épidémie de grippe A(H1N1) 2009 a été l’occasion de développer et de renforcer les réseaux de surveillance et les partenariats régionaux. Les points épidémiologiques hebdomadaires diffusés par la CIRE Nord pendant l’épidémie de grippe 7 Les travaux de synthèse relatifs à la surveillance épidémiologique dans la zone Nord sont disponibles sur demande auprès du service zonal de défense et de sécurité Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 7
A(H1N1) 2009 ont été jugés intéressants et informatifs par l’ensemble des destinataires. Leur périodicité hebdomadaire a été jugée pertinente et les lecteurs ont trouvé leur présentation adaptée et leur contenu clair. Mais un dispositif lourd de surveillance et de gestion des cas La qualité du réseau professionnel et du partenariat développés antérieurement à l’épidémie ou pendant la période de gestion de la grippe a permis un suivi et une gestion efficaces des cas et des sujets contacts. Toutefois, le dispositif de suivi et de réponse a été jugé très lourd et inadapté aux réalités de terrain. Les modifications fréquentes des protocoles nationaux de surveillance et de prise en charge ont aggravé les difficultés des équipes (DDASS, service zonal, CIRE, établissements de santé, SAMU, Education Nationale…) et demandaient une mobilisation permanente pour adapter les pratiques. Par ailleurs, la définition des sujets contacts était imprécise, rendant la prophylaxie difficile à mettre en œuvre, notamment au début de l’épidémie. Le dispositif de suivi des cas possibles et des sujets contacts, très consommateur de temps, s’est fait au détriment des autres activités des services. Au sein des établissements scolaires, les fermetures de classes ou d’établissements ont été difficiles à gérer pour les responsables d’établissements, les autorités sanitaires et les familles. Leur intérêt est en outre discuté, car les mesures d’isolement des personnes exposées n’étaient pas nécessairement respectées par les élèves et les familles en dehors des établissements scolaires. Enfin, les consignes nationales uniques pour tout le territoire ne permettaient pas d’adapter les décisions de fermetures d’écoles à la situation épidémiologique locale, ces fermetures étant inefficaces en situation épidémique. Les représentants de la médecine libérale considèrent que l’information professionnelle a été défaillante en particulier sur la surveillance des cas groupés. Ils aimeraient disposer d’une information en temps réel. Cependant il convient de souligner les difficultés rencontrées par les services de l’Etat qui ne disposent pas de liste de diffusion d’adresses électroniques exhaustive pour communiquer aux professionnels libéraux les informations nécessaires en cas de crise (un tiers des adresses disponibles actuellement). Les propositions d’amélioration Les axes de progrès dégagés par les acteurs de la zone Nord afin d’améliorer la surveillance épidémiologique sont : - Au niveau national, tenir compte des contraintes locales pour l’élaboration des consignes, protocoles et recommandations. Simplifier notamment les protocoles d’investigation et de gestion ; - Renforcer les liens entre le niveau national et les zones, échanger des propositions ou protocoles élaborés sur le terrain dans le cadre d’un réseau DGS/InVS/zone… ; - Permettre aux zones d’adapter la doctrine nationale en fonction de la réalité épidémiologique, sous réserve de garanties techniques et scientifiques, éventuellement sous forme d’un « cahier des charges » ; - Rendre « obligatoire » pour la médecine libérale l’inscription à une liste de diffusion d’adresses électroniques (type DGS-Urgent) réservée à la communication des informations essentielles en cas de crise ; - Améliorer la communication envers le public et les professionnels de santé du secteur ambulatoire ; - Au sein de la zone Nord, améliorer les dispositifs de surveillance développés pendant l’épidémie de grippe A(H1N1) 2009 : o Renforcer la couverture et la qualité des données transmises par les établissements hospitaliers participant à la surveillance, en incluant de nouveaux services d’urgences dans le dispositif OSCOUR et en informatisant les services d’urgences ; o Consolider le réseau des médecins libéraux participant à la surveillance de la grippe (GROG et Sentiweb) par le recrutement de nouveaux médecins. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 8
2-2 Les mesures de contrôle sanitaire aux frontières8 Des mesures utiles pour retarder l’arrivée de l’épidémie Dès le 28 avril 2009, les premières mesures de Contrôle sanitaire aux frontières (CSF) ont été mises en place en application du Règlement sanitaire international (RSI), dont l’objectif est la prévention de la propagation par voie terrestre, maritime ou aérienne des maladies transmissibles9. Ces dispositions, qui ont été progressivement élargies, concernent l’information des passagers à destination ou en provenance de pays à risque et la prise en charge de passagers en provenance de pays à risque présentant des symptômes grippaux. Ces mesures de contrôle sanitaire aux frontières ont probablement contribué à retarder l’introduction du virus en France. Elles ont ainsi permis de mieux préparer les dispositifs de prise en charge des patients et d’attendre la disponibilité des vaccins. Une bonne implication des opérateurs zonaux Dans la zone Nord, les mesures de contrôle sanitaire aux frontières ont été mises en place au niveau des points d’entrée internationaux, c'est-à-dire les ports de Dunkerque, Calais et Boulogne-sur-Mer, les aéroports de Lille-Lesquin et Beauvais-Tillé, les gares du réseau ferré en lien avec les pays frontaliers et le tunnel transmanche. Leur application a été facilitée par l’adhésion et l’implication des acteurs locaux. Des coordonnateurs ont été identifiés rapidement par les opérateurs de transport. Des circuits de veille et d’alerte ont été mis en place permettant la traçabilité des événements. Des précisions nationales et une coordination transfrontalière cependant nécessaires Le retour d’expérience a néanmoins fait ressortir certaines difficultés relatives au manque de précision nationale sur le rôle des acteurs locaux, à la mise en place de l’information des passagers réalisée plus ou moins facilement en fonction du support demandé (affiches, dépliants, messages sonores) ou encore à la doctrine imprécise de protection des personnels intervenant dans les structures de transport. Par ailleurs, les acteurs de la zone Nord soulignent un manque de coordination transfrontalière. Les propositions d’amélioration Les axes de progrès dégagés par les acteurs de la zone Nord afin d’améliorer l’opérationnalité du contrôle sanitaire aux frontières sont : - Au niveau international, renforcer la coordination transfrontalière par des décisions communes entre pays frontaliers ; - Au niveau interministériel, mieux définir le rôle des différents acteurs locaux en matière de contrôle sanitaire aux frontières ; - Etablir un schéma d’intervention des acteurs en cas d’alerte au niveau des ports maritimes ; - Disposer d’une conduite à tenir nationale en matière de protection des personnels pour tout type d'aéroports, ports ou gares ; - Préciser les modalités de protection des personnels intervenant dans les structures de transport ; - Compléter les modalités d’information des passagers (circuits de commande, reproduction et distribution des affiches et dépliants, traduction en d’autres langues étrangères des supports d’information…). 8 Les travaux de synthèse relatifs au contrôle sanitaire aux frontières sont disponibles sur demande auprès du service zonal de défense et de sécurité 9 Article 2 du Règlement sanitaire international adopté le 23 mai 2005 Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 9
2-3 La gestion des stocks grippe10 Parallèlement aux mesures de contrôle sanitaire aux frontières, la mise à disposition des « stocks grippe » a été organisée très vite. Les stocks grippe concernent les masques de protection individuelle (masques FFP2 destinés aux professionnels de santé et masques chirurgicaux destinés aux personnes grippées) ainsi que les médicaments antiviraux utilisés pour la prévention et le traitement précoce de la grippe [Tamiflu® adultes (75mg), Tamiflu® pédiatrique (45mg et 30mg) et Relenza 5mg pour les femmes enceintes]. Une mise à disposition graduée, pas toujours bien comprise par les professionnels La mise à disposition de ces stocks auprès des établissements de santé a été graduée, avec une priorité donnée aux établissements de santé sièges de Service d’aide médicale urgente (SAMU) tout début mai. Puis dans un deuxième temps, à compter du 16 juin 2009, les livraisons ont eu lieu dans les établissements de santé de 1ère ligne et de repli susceptibles de prendre en charge des cas de grippe A(H1N1) 2009. Ces dotations ont été complétées et renouvelées ensuite en fonction des besoins des établissements. Les antiviraux à usage pédiatrique ont été mis à disposition plus tardivement et de façon plus restrictive [mi-mai 2009 au Centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Lille, le 2 juillet 2009 dans les 5 établissements de santé sièges des SAMU de la zone Nord]. Les médecins libéraux ont pu disposer de kits de protection dès le mois de mai 2009 dans les établissements de santé puis au sein des plates-formes départementales logistiques organisées par les préfectures. Ce dispositif a été ouvert le 26 juin 2009 à d’autres professionnels de santé libéraux (pharmaciens, infirmiers, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinésithérapeutes et sages-femmes), puis délocalisé au sein de sites de mise à disposition de proximité le 30 juillet 2009. Les kits étaient composés, selon les conditionnements des fournisseurs, d’une cinquantaine de masques chirurgicaux et d’une vingtaine de masques FFP2. Pour la majorité des acteurs, les stocks d’amorce en antiviraux étaient adaptés à l’urgence de la prise en charge des tout premiers patients. Toutefois, les dotations en antiviraux ont été très vite inappropriées à l’évolution de l’épidémie et de la prise en charge, car trop centralisées et parfois insuffisantes, notamment en ce qui concerne les antiviraux pédiatriques. Ainsi les établissements de santé de 1ère ligne n’ont été approvisionnés en traitements pédiatriques que le 9 octobre 2009, obligeant auparavant les familles à effectuer de longs déplacements pour faire prendre en charge leurs enfants dans l’établissement siège de SAMU du département. Par ailleurs, des professionnels ou structures impliqués dans la prise en charge des patients se sont sentis exclus du dispositif d’attribution des stocks grippe. En effet, tous les professionnels de santé libéraux et les ambulanciers n’étaient pas concernés par la mise à disposition de kits de protection. De même, les établissements de santé non dotés (non de première ligne ou de repli), ainsi que les établissements médico-sociaux et sociaux, ont mal compris l’absence ou le retard de dotation de leurs structures en antiviraux et/ou en masques (selon leur vocation). La stratégie de communication adoptée au niveau national, réservant l’information aux seuls personnels et structures dotés, a aggravé l’incompréhension. Pour les services déconcentrés de l’Etat, la sortie de la circulaire relative à la doctrine d’emploi des masques pour les agents de l’administration (circulaire interministérielle Intérieur/Santé du 7 octobre 2009) a été trop tardive et postérieure à la finalisation des plans de continuité des activités. Un dispositif de stockage et des outils opérationnels, mais perfectibles L’instruction interministérielle Intérieur/Santé en date du 26 juin 2009, très complète, décrit les 10 Les travaux de synthèse relatifs à la gestion des stocks grippe sont disponibles sur demande auprès du service zonal de défense et de sécurité Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 10
structures de stockage et les circuits d’approvisionnements en stocks grippe. Cette instruction a été préparée avec les acteurs locaux par l’intermédiaire des zones de défense, pour une plus grande opérationnalité. Au total, la zone Nord disposait d’une plate-forme zonale gérée par l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), de sept plates-formes logistiques départementales, de cinq plates-formes pharmaceutiques (pharmacies à usage intérieur des établissements de santé sièges de SAMU) et de 83 sites11 de mise à disposition, identifiés au sein de casernes de sapeurs- pompiers, de gendarmeries ou de mairies. La structure générale du dispositif de stockage et d’approvisionnement s’est révélée performante, aux niveaux zonal, départemental et local. Le choix d’implantation des plates-formes pharmaceutiques départementales au sein des établissements de santé sièges de SAMU a été judicieux et efficace. Cependant, cela a engendré une surcharge de travail pour les personnels des pharmacies à usage intérieur de ces établissements, dont les effectifs étaient faibles. Par ailleurs, les professionnels libéraux se sont montrés peu satisfaits des conditions de mise à disposition des kits de prévention, en raison du nombre insuffisant de sites de distribution et des contraintes d’horaires et de déplacements. Tous les professionnels de santé, hospitaliers et libéraux, ne semblaient pas connaître les instructions d’utilisation des masques. La doctrine d’emploi était trop générale et imprécise. De façon générale, la communication a été jugée insuffisante. Les établissements de santé dotés auraient souhaité plus de transparence sur les échéances et lieux de livraisons. Les établissements non dotés et les professionnels de santé libéraux ont souligné un manque d’information à leur intention et les services déconcentrés auraient aimé être informés en temps réel des livraisons réalisées. Les instructions relatives au financement des plates-formes logistiques départementales ont été trop tardives entraînant la mise en œuvre de conventions a posteriori ainsi que des disparités et des réajustements d’organisation qui étaient évitables. Les différences de conditionnement selon les fournisseurs et les dates de validité, parfois à court terme, ne facilitaient pas la gestion des stocks au sein des sites de mise à disposition. Des initiatives locales ont été proposées et partagées par les DDASS pour pallier ces difficultés, comme la réalisation d’un vade-mecum. Un outil de gestion nommé « BILANLIN » a été mis à disposition de tous les acteurs locaux en charge de la gestion des stocks. Cet outil national, simple d’utilisation, a été jugé d’une grande utilité dans le suivi quotidien des stocks. Toutefois, sa fonctionnalité doit être améliorée. Par ailleurs la régularité des mises à jour par les structures, à chaque mouvement de stock, est indispensable à son opérationnalité. Pour faciliter les commandes, le service zonal a élaboré et diffusé au sein de la zone Nord un modèle de bon de commande reprenant les informations utiles à la validation. Cette initiative a été appréciée par la majorité des acteurs. Cependant, la diffusion d’un autre bon de commande par le niveau national en décembre 2009 pour le réapprovisionnement en antiviraux, généralisé à l’ensemble des établissements de santé, a nécessité un réajustement du protocole zonal. Par ailleurs, la multiplicité des échelons de validation (DDASS/DRASS/service zonal de défense et de sécurité/DGS/EPRUS) et le nombre limité de personnes pouvant valider ces bons au sein de la Direction générale de la santé (DGS) ont constitué des freins à la rapidité ou l’opérationnalité des validations. 11 43 sites de mise à disposition dans le Nord, 11 dans le Pas-de-Calais, 5 dans l’Aisne, 12 dans l’Oise, 12 dans la Somme. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 11
Une vie quotidienne difficile malgré des relations efficaces et cordiales La qualité du travail collaboratif et des relations entre les partenaires aux niveaux national, zonal, départemental et local est soulignée par tous. Le professionnalisme de l’EPRUS est également observé, ainsi que l’implication et la disponibilité des nombreux acteurs [agents hospitaliers, collectivités territoriales, Services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), gendarmerie, armée, Directions départementales de l’équipement, associations…] pour le fonctionnement des plates-formes logistiques départementales et des sites de mise à disposition. Toutefois, des difficultés dans la gestion quotidienne des stocks ont été relevées. La doctrine nationale relative au point d’entrée unique par département (correspondant à une plate-forme départementale logistique par département) pénalisait les départements les plus peuplés (notamment en termes de capacité de volumes de stockage). Les problèmes et questionnements relatifs à l’applicabilité des instructions relatives à la gestion des stocks n’ont pas toujours eu de réponse, en raison des effectifs de répondants limités au niveau national. Les propositions d’amélioration Les principaux axes de progrès dégagés par les acteurs de la zone Nord afin d’améliorer la gestion des stocks grippe sont : - Transmettre les directives nationales aux services déconcentrés plus tôt, avec une marge de temps adaptée à la préparation de la mise en œuvre des instructions. - Utiliser le réseau des conseillers de zone pour échanger et mettre en commun au niveau national les propositions ou réalisations locales. - Faciliter le rôle de la plateforme départementale pharmaceutique des établissements de santé sièges de SAMU en communiquant sur ses missions et en élaborant des fiches de postes spécifiques. Anticiper le renfort en personnel nécessaire dans le cadre des plans de continuité des activités des établissements concernés. - Revoir le dispositif gradué de mise à disposition des stocks grippe au sein des établissements de santé, à la lumière de la grippe A(H1N1) 2009. Les établissements de santé considèrent comme préférable de prévoir des dotations en stocks d’amorce d’antiviraux dans tous les établissements de santé de 1ère ligne dès le début de la crise pour rassurer les acteurs et éviter la délocalisation au dernier moment à partir des établissements de santé sièges de SAMU. - Informer l’ensemble des acteurs, y compris ceux qui ne sont pas directement concernés (tels les établissements de repli et de seconde ligne) sur les mesures mises en œuvre, afin de clarifier les dispositifs et limiter les questionnements. - Lutter contre le phénomène important de péremption des stocks grippe par la rotation, en gestion courante, des « stocks Etat » de masques avec les stocks internes des établissements de santé, ou par la livraison de stocks avec des dates de péremption (masques et antiviraux) plus éloignées. - Définir au niveau interministériel une doctrine d’emploi des masques précise et partagée, diffuser largement cette doctrine. - Réaliser un vade-mecum national qui synthétise les informations utiles à la distribution des stocks afin de répondre aux questions les plus fréquentes. - Renforcer au niveau national (Direction générale de la santé) la permanence dédiée à la validation des commandes et aux réponses aux interrogations relatives à la gestion des stocks. - Uniformiser dès le départ les bons de commande, ce qui simplifierait la tâche à l’ensemble des échelons. - Etablir au niveau national des modèles de convention ou un cahier des charges précis pour l’identification des structures de stockage et de distribution, afin d’éviter les différences d’organisation au niveau local et faciliter la mobilisation des personnels. - Laisser une marge de manœuvre plus importante aux zones de défense, dans un cadre technique prédéfini, pour adapter les instructions nationales aux réalités du terrain et rechercher des solutions adéquates. Retour d’expérience sur la grippe A(H1N1) Agence Régionale de Santé de la Zone Nord - Février 2011 12
Vous pouvez aussi lire