Le marché du travail suisse entre incertitudes et manque de personnel qualifié
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Swiss Economics Le marché du travail suisse entre incertitudes et manque de personnel qualifié Moniteur Suisse | 4ème trimestre 2021 Conjoncture suisse Focus Politique monétaire Reprise seulement Postes vacants L’inflation continue ralentie au plus haut d’augmenter Page 6 Page 12 Page 18
Éditorial Chère lectrice, cher lecteur, L’année qui touche à sa fin a de nouveau été placée sous le signe de la pandémie de Covid-19 et nous devons probablement nous préparer à vivre encore un certain temps avec le virus. De diffciles mois d’hiver nous attendent sûrement. Découvrez dans notre article sur la conjoncture suisse (en page 6) comment l’économie de notre pays a jusqu’à présent surmonté cette situation problématique. À la fin du 3e trimestre 2021, le produit intérieur brut (PIB) helvétique dépassait déjà son niveau d’avant-crise de 1,4%. La Suisse s’en sort certes mieux que la plupart des pays sur le plan économique, mais la progression des cas de Covid-19 et les mesures d’endiguement plus strictes ainsi que les problèmes affectant les chaînes d’approvisionnement mondiales assom- brissent les perspectives. Deux tiers des entreprises industrielles que nous avons interrogées avec l’association professionnelle pour les achats et le supply management procure.ch ont par exemple déclaré s’attendre à des interruptions de production dues aux pénuries d’intrants dans les mois à venir. En outre, les branches de services comme la restauration ou le tourisme devraient subir des restrictions répétées jusqu’au printemps prochain au moins du fait de la pandémie. Malgré toutes ces incertitudes, nous anticipons toujours une poursuite de la reprise en 2022 et vous présentons les motifs à l’origine de notre optimisme – modéré – à partir de la page 6. La situation de l’emploi est un moteur essentiel de l’évolution économique. Après avoir aussi dure- ment ressenti les effets de la récession mondiale de 2020, le marché du travail suisse s’est rapi- dement redressé. Le chômage recule depuis plusieurs mois, le nombre de postes à pourvoir ne cesse d’augmenter et certains employeurs recherchent déjà même désespérément des travailleurs qualifiés. Découvrez dans notre article Focus en page 12 les facteurs qui viennent encore compli- quer le recrutement et leur impact sur l’emploi dans les différentes branches. Nous vous souhaitons une agréable lecture, de très joyeuses fêtes et une excellente santé pour la nouvelle année. André Helfenstein Claude Maurer CEO Credit Suisse (Suisse) SA Chef économiste Suisse Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 3
Sommaire Conjoncture suisse 6 Reprise seulement ralentie La pandémie de COVID-19 va impacter la Suisse encore un certain temps. La vague actuelle ne devrait toutefois que temporairement ralentir la reprise conjoncturelle. Nous tablons sur une croissance de 2,5% en Suisse l’année prochaine, après 4,0% en 2021. Conjoncture | Moniteur 8 Branches | Moniteur 9 Focus | Marché du travail 12 Postes vacants au plus haut La reprise se poursuit sur le marché du travail suisse: le chômage baisse, tandis que le nombre de postes vacants augmente. De plus en plus d’entreprises font de nouveau état de difficultés de recrutement de personnel qualifié. Des disparités importantes sont toutefois observables entre les branches. Pour 2022, nous tablons sur une croissance totale de l’emploi de 1,2% et une hausse des salaires nominaux de 0,8%. Politique monétaire 18 L’inflation continue d’augmenter Malgré une modeste accélération, l’inflation en Suisse est restée inférieure à la plupart des autres pays, surtout en raison du poids relativement faible de l’énergie dans l’indice des prix à la consommation (IPC) – d’où l’absence de pression à durcir la politique monétaire. Politique monétaire I Moniteur 19 Immobilier | Moniteur 20 Indicateurs avancés du Credit Suisse 21 Prévisions et indicateurs 23 Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 4
Conjoncture suisse Reprise seulement ralentie La pandémie de COVID-19 va impacter la Suisse encore un certain temps. La vague actuelle ne devrait toutefois que temporairement ralentir la reprise conjoncturelle. Nous tablons sur une croissance de 2,5% en Suisse l’année prochaine, après 4,0% en 2021. Performance La rétrospective conjoncturelle se révèle réjouissante: le produit intérieur brut (PIB) suisse au économique 3e trimestre 2021 a nettement dépassé son niveau d’avant-crise. Sur le plan économique, la supérieure au niveau Suisse tire ainsi mieux son épingle du jeu que la plupart des autres pays (fig. 1). Après son effon- d’avant-crise drement de 2,4% en 2020, le PIB devrait avoir en moyenne progressé de 4,0% cette année. Les perspectives pour l’année prochaine sont toutefois assombries par l’augmentation des cas de CO- VID-19 et les mesures qui ont été prises en réponse, ainsi que par les problèmes d’approvisionne- ment observables partout dans le monde. L’économie et la L’évolution de la pandémie est pratiquement impossible à prédire, comme le rappelle la nouvelle société parviennent à inconnue du variant Omicron. Cela dit, l’on observe que les contaminations se sont jusqu’à pré- mieux gérer le virus sent toujours déroulées par vagues, ce qui laisse penser que les mesures et le changement des comportements – ainsi que les progrès réalisés dans la vaccination – ont porté leurs fruits. Nos analyses économétriques montrent en outre que les répercussions conjoncturelles de la pandémie se sont nettement atténuées au cours des vagues pandémiques successives. La figure 2 illustre comment la corrélation entre les chiffres d’affaires dans le secteur tertiaire et la mobilité de la po- pulation a diminué pendant les différentes vagues. Cela s’explique par le fait que les mesures plus strictes mises en place affectent désormais moins l’activité économique et aussi par la capacité des prestataires et des ménages à mieux gérer le virus et donc à mieux adapter leur comporte- ment à l’évolution pandémique. Quelques branches Nous partons par conséquent du principe que le préjudice économique de la vague pandémique fortement affectées actuelle restera gérable et que la reprise ne sera que temporairement ralentie. Quelques branches par la vague actuelle devraient cependant être plus fortement affectées que d’autres. Une partie de l’hôtellerie-restau- ration, des clubs et des entreprises de loisirs devra en effet composer avec des mois d’hiver très incertains. Mais c’est dans le tourisme intercontinental que les répercussions risquent d’être les plus rudes et la normalisation de la demande espérée avant la fin 2022 semble désormais bien illusoire. Fig. 1: Économie suisse au-dessus de son niveau d’avant-crise Fig. 2: L’impact du virus sur la mobilité et les CA diminue PIB réel, corrigé des effets saisonniers, 4e trimestre 2019 = 100 Indice issu du nombre de cas et de décès, du taux de résultats positifs, de la rigueur des mesures, variation de la mobilité niveau avant-pandémie (03.01–06.02.2020), variation des CA par rapport à 2019; moyennes mobiles sur 7 jours 105 Évolution virale Mobilité CA services 90 100 1re vague 2e vague Vague actuelle 60 95 30 90 France Allemagne 0 85 Italie Grande-Bretagne 80 -30 États-Unis Suisse 75 -60 12/2019 04/2020 08/2020 12/2020 04/2021 08/2021 -90 mars.20 juil..20 nov..20 mars.21 juil..21 nov..21 Source: Datastream, Credit Suisse. Dernières données: 3e trimestre 2021 Source: Monitoring Consumption Switzerland, Google Mobility Report, Datastream, Credit Suisse. Dernières données: 6 décember 2021 Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 6
Les difficultés La reprise dans l’industrie est actuellement affectée par des difficultés d’approvisionnement: plus d’approvisionnement des deux tiers des directeurs d’achat que nous avons interrogés en collaboration avec l’Associa- entraînent des arrêts tion pour les achats et le supply management procure.ch indiquent s’attendre à des pertes de pro- de la production dans duction dans les six prochains mois en raison de telles difficultés. Environ 20% des entreprises deux tiers des concernées n’ont eu d’autre choix que de réinstaurer le chômage partiel. L’examen des stocks entreprises rapportés au Centre de recherches conjoncturelles de l’EPFZ (KOF) donne des indications sur les branches les plus durement touchées par ces difficultés d’approvisionnement (fig. 3). Dans le pa- pier et les meubles, ainsi que dans l’électronique, l’horlogerie et la pharmacie, les stocks trop faibles d’intrants vont de pair avec des stocks de produits finis trop peu fournis, ce qui suggère que la pénurie d’intrants freine la production et la vente. En revanche, les stocks d’intrants trop faibles dans des branches comme la métallurgie et les machines ne semblent pas avoir d’impact négatif généralisé sur les stocks de produits finis. Seulement une La demande de marchandises va diminuer que lentement sur fond de persistance de la pandémie légère amélioration de coronavirus. Si l’on ajoute à cela que les capacités de production et de transport ne sont que de la situation timidement augmentées ou remises en service à pleine capacité, il ne faut pas s’attendre à une en 2022 amélioration sensible de la situation avant le milieu de l’année prochaine. Dans l’électronique – et surtout les semi-conducteurs (puces) –, la situation devrait même rester tendue jusqu’en 2023. L’électronique est Les hausses de prix liées aux difficultés d’approvisionnement sont l’une des raisons pour les- surtout importée quelles nous attendons une inflation plus élevée pour 2022 qu’en moyenne sur les dernières an- nées (cf. «Inflation» en page 8). Deux facteurs devraient toutefois limiter l’impact de l’inflation sur la croissance du PIB: premièrement, un ménage moyen consacre moins de 7% de ses dépenses de consommation à des produits contenant des semi-conducteurs, et ses produits sont majoritai- rement importés. Tout repli des achats lié à des prix trop élevés ne toucherait donc qu’indirecte- ment l’industrie helvétique. Deuxièmement, le rebond du marché du travail dans l’industrie et dans l’ensemble de l’économie se poursuit en dépit des problèmes actuels (cf. également article Focus en page 12). Et cette embellie sur le front de l’emploi devrait continuer d’améliorer le climat de consommation en 2022. Croissance de 2,5% La persistance des problèmes dans les chaînes d’approvisionnement et la situation difficile sur le du PIB en 2022 front épidémiologique freinent donc certes la croissance conjoncturelle, mais nous continuons de tabler sur une poursuite de la reprise en 2022. Plus concrètement, nous anticipons une progres- sion de 2,5% du PIB l’année prochaine. Le creux hivernal devrait en effet avoir été compensé d’ici la fin de l’année. claude.maurer@credit-suisse.com Fig. 3: Les branches ne sont pas toutes logées à la même enseigne Les valeurs négatives indiquent que la plupart des entreprises d’une branche disposent de stocks trop limités 40 30 Textiles Imprimerie Machines 20 Autres marchandises Automobile Produits alimentaires Stocks produits finis 10 VerreMétallurgie Boissons Produits en métal 0 -40 -30 -20 Bois -10 0 10 20 30 40 Caoutchouc et plastique Chimie Pharmacie -10 Papier Meubles -20 Matériel informatique, Équipement électrique horlogerie -30 -40 Stocks intrants Source: Centre de recherches conjoncturelles de l’EPFZ (KOF), Credit Suisse Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 7
Conjoncture | Moniteur Inflation Pic de l’inflation au 1er trimestre 2022 En glissement annuel, en % L’inflation sera probablement plus élevée en 2022 qu’en 2 Prévision 2021 sous l’effet de trois facteurs. Premièrement, les prix 1.5 des denrées alimentaires ont diminué sur l’année en cours 1 et cette situation devrait se stabiliser en 2022. Deuxième- ment, nous anticipons une certaine normalisation de l’évolu- 0.5 tion saisonnière des prix, surtout pour les voyages à forfait, 0 durement frappés par la pandémie et dont les prix se sont effondrés. Troisièmement, les pénuries affectant la produc- -0.5 tion industrielle mondiale devraient exercer une pression -1 haussière sur les prix de certains biens importés. Nous rele- -1.5 vons donc notre prévision d’inflation pour 2022 de 0,5% à 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 1,0%. Produits pétroliers Autres biens et services Taux d'inflation maxime.botteron@credit-suisse.com Source: Refinitiv Datastream, Credit Suisse. Dernières données: nov. 2021. Contri- bution des produits pétroliers anticipée sur la base de prix du pétrole constants. Marché du travail Recul des inquiétudes autour de l’emploi Indice du climat de consommation, questions sur l’évolution du marché de l’emploi, cor- rigé des variations saisonnières et calendaires; lignes pointillées: moyenne 2007–2021 Le recul du nombre de chômeurs et la hausse des postes Sécurité de l’emploi Évolution future du chômage 150 vacants ont récemment entraîné une augmentation des diffi- cultés de recrutement du point de vue des employeurs 100 (cf. Focus, p. 12). Dans le même temps, les inquiétudes des salariés quant à l’emploi diminuent, ce que démontrent 50 également les réponses à l’enquête trimestrielle sur le climat 0 de consommation. Après avoir atteint un plancher au tour- nant 2020/2021, le sous-indice relatif à la sécurité de l’em- -50 ploi se rapproche actuellement à nouveau de sa moyenne à long terme. Simultanément, le sous-indice concernant l’évo- -100 lution attendue du chômage s’inscrivait à son plus bas ni- -150 veau depuis 2011 en octobre 2021. 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021 emilie.gachet@credit-suisse.com Source: Secrétariat d’État à l’économie, Credit Suisse. Dernières données: oct. 2021 Immigration Marge de manoeuvre sur le front des contingents d’immigration Taux d’utilisation des contingents d’autorisations de courte durée (L) et de permis de séjour (B) en %, état à la fin octobre 2021 Hormis les permis de séjour destinés aux ressortissants croates exerçant une activité lucrative, une certaine marge Pays tiers de manoeuvre s’observe sur le front des contingents d’immi- gration. À ce jour, les entreprises suisses ont très peu fait usage du contingent pour les travailleurs originaires du Royaume-Uni Royaume-Uni, créé en vue d’atténuer l’impact du Brexit. Pour 2022, le Conseil fédéral a décidé de maintenir les Croatie nombres maximaux à leur niveau de 2021 et d’accorder la libre circulation complète des personnes à la Croatie. Au vu Prestataires de l’accélération attendue de la dynamique de l’emploi, cette de services UE/AELE Contingents B mesure devrait aider les entreprises suisses à recruter du plus de 120 jours Contingents L personnel qualifié. 0% 20% 40% 60% 80% 100% sara.carnazzi@credit-suisse.com Source: Secrétariat d’État aux migrations Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 8
Branches | Moniteur Industrie pharmaceutique Important moteur de la croissance Croissance des exportations de marchandises vs même trimestre année précédente, par branches et total, corrigée des variations saisonnières Au 3e trimestre 2021, les exportations de l’industrie pharma- Pharmacie Chimie MEM Montres Autres ceutique suisse ont atteint un nouveau sommet de presque 26 mrd CHF – évolution positive à l’origine de près d’un tiers de la progression totale en glissement annuel des ex- T3 2021 18% portations de marchandises du pays. Leur contribution à la croissance globale de quelque 18% s’établit à 5,5 points de pourcentage, et a donc fortement augmenté depuis le début T2 2021 27% de l’année. La demande internationale de produits pharma- ceutiques devrait rester élevée dans les prochains mois, en particulier grâce aux besoins en vaccins. T1 2021 2% -5% 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% tiziana.hunziker.2@credit-suisse.com Source: Administration fédérale des douanes, Credit Suisse Machines, équipements électriques et métaux (MEM) Recul des stocks de produits semi-finis en septembre Exportations MEM en glissement annuel en %, corrigées des variations saisonnières; solde entre les entreprises estimant les stocks de produits semi-finis trop importants et celles les jugeant trop bas Les exportations de la branche MEM s’inscrivaient au-delà Stocks de produits semi-finis Exportations 25 de leur niveau d’avant-crise au 3e trimestre 2021. Dans le 20 même temps, les stocks de produits semi-finis ont fortement 15 diminué en septembre. Sur ce mois, le solde entre les entre- 10 prises estimant leurs stocks de produits semi-finis trop im- 5 portants et celles les jugeant trop bas est tombé à un plan- 0 cher inférieur à –12%. Cette évolution s’explique par les -5 goulets d’étranglement dans les chaînes d’approvisionne- -10 ment internationales. La demande d’exportations MEM de- -15 vrait rester soutenue, mais la productivité risque de s’inscrire Avr. 2018 Oct. 2018 Avr. 2019 Oct. 2019 Avr. 2020 01/07/2020 Avr. 2021 Juil. 2018 Juil. 2019 Janv. 2018 Juil. 2020 Janv. 2019 Juil. 2021 Janv. 2020 Janv. 2021 en léger repli sous l’effet des difficultés de livraison. tiziana.hunziker.2@credit-suisse.com Source: Administration fédérale des douanes, KOF de l’EPFZ, Credit Suisse Industrie horlogère Chine, États-Unis et Royaume-Uni: moteurs des exportations Exportations de montres, variation vs même trimestre de l’année précédente, par pays, corrigées des variations saisonnières et importance des pays en 2019 Les exportations de montres suisses ont progressé de T1 2021 T2 2021 T3 2021 Pondérations 2019 80% 1.2 4,3% en glissement annuel au 3e trimestre 2021 grâce à la 60% forte demande des principaux débouchés que sont la Chine, 1 40% les États-Unis et le Royaume-Uni. Mais la demande reste 20% 0.8 sous son niveau d’avant-crise dans nombre de pays euro- 0% 0.6 péens. L’activité de voyage réduite de beaucoup d’Asia- -20% 0.4 tiques, qui auparavant achetaient des montres durant leurs -40% 0.2 séjours et le font désormais dans leurs propres pays, n’est -60% 100% 9% 11% 1% 6% 5% 35% 5% 2% 4% 1% 7% 12% pas non plus étrangère à cette situation. Et cela n’est pas -80% 0 Royaume-Uni Chine États-Unis France Allemagne Italie Hong Kong Total Pays-Bas Autres Espagne Autriche Japon près de changer sur les prochains mois. La part de la Chine dans le total des exportations de montres devrait donc de- meurer supérieure à son niveau d’avant-crise à l’avenir éga- lement. tiziana.hunziker.2@credit-suisse.com Source: Administration fédérale des douanes, Credit Suisse Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 9
Branches | Moniteur Commerce de détail CA inférieurs à l’année précédente Évolution des CA nominaux du commerce de détail corrigés des variations saison- nières vs même trimestre de l’année précédente Les fortes variations à la hausse comme à la baisse des 20% 40% chiffres d’affaires du commerce de détail ne semblent pas 15% 35% encore finies. Au 3e trimestre 2021, les taux de croissance 10% 30% se sont révélés négatifs tant dans l’alimentaire/near-food 5% 25% que dans le non-alimentaire. Cette évolution s’explique en 0% 20% grande partie par les chiffres d’affaires record enregistrés -5% Alimentaire/near-food 15% durant la pandémie de COVID-19, difficilement réalisables Non-alimentaire -10% 10% dans des circonstances normales. Pour les trois prochains -15% 5% mois, il faut donc encore s’attendre à des valeurs négatives -20% 0% par rapport à l’année passée. Nous supposons toutefois que -25% -5% les chiffres d’affaires de la branche se maintiendront au- dessus de leur niveau d’avant-crise en termes absolus. -30% -10% T1 2016 T1 2017 T1 2018 T1 2019 T1 2020 T1 2021 tiziana.hunziker.2@credit-suisse.com Source: GfK, Credit Suisse Tourisme Le tourisme à un niveau très inférieur à celui de l’avant-crise Nuitées; indice: janv. 2010 = 100, moyenne sur 12 mois Le rebond des nuitées a légèrement fléchi dans les com- 130 Communes touristiques munes touristiques au 3e trimestre 2021. L’évolution est 120 Centres et communes suburbaines Total certes restée dynamique dans les centres et communes su- 110 burbaines, mais s’inscrit en deçà de son niveau d’avant la 100 crise encore plus largement que dans les régions touris- tiques. Ces dernières devraient cependant se rapprocher da- 90 vantage de leur niveau pré-COVID durant la saison des 80 sports d’hiver du début 2022, d’autant plus que les clients 70 nationaux et européens devraient soutenir la reprise des nui- 60 tées dans les stations suisses. 50 40 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 tiziana.hunziker.2@credit-suisse.com Source: Office fédéral de la statistique, Credit Suisse Technologies de l’information (TI) Nette amélioration du climat Solde entre les entreprises évaluant la marche de leurs affaires comme positive et celles la jugeant négative, en %, moyenne sur 5 ans Le climat s’est éclairci dans la branche des TI et s’avère 80 Fourniture de services informatiques Moyenne à long terme même meilleur qu’en 2019, avant la crise: le solde entre les 70 entreprises évaluant la marche de leurs affaires comme po- 60 sitive et celles la jugeant négative s’établissait à presque 56% au début du 4e trimestre 2021 – une valeur élevée qui 50 n’avait plus été atteinte depuis 2017. Les investissements 40 des entreprises s’étant effondrés durant la pandémie, ils af- 30 fichent une importante marge de progression, ce dont la branche devrait continuer de profiter. 20 10 0 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021 tiziana.hunziker.2@credit-suisse.com Source: Centre de recherches conjoncturelles de l’EPFZ (KOF), Credit Suisse Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 10
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Focus | Marché du travail Postes vacants au plus haut La reprise se poursuit sur le marché du travail suisse: le chômage baisse, tandis que le nombre de postes vacants augmente. De plus en plus d’entreprises font de nouveau état de difficultés de recrutement de personnel qualifié. Des disparités importantes sont toutefois observables entre les branches. Pour 2022, nous tablons sur une croissance totale de l’emploi de 1,2% et une hausse des salaires nominaux de 0,8%. Repli de l’emploi La crise du coronavirus a ébranlé le marché du travail suisse. Suite au premier confinement, l’em- suite à la crise du ploi total a baissé de 0,9% en glissement trimestriel corrigé des effets saisonniers au 2e tri- coronavirus mestre 2020 (fig. 1) et ainsi signé son plus fort repli trimestriel depuis presque 30 ans. Comparé compensé à l’effondrement historique du produit intérieur brut (PIB), le marché du travail s’en est toutefois relativement bien sorti, ce qui est en grande partie imputable au recours massif au chômage par- tiel. La reprise au 2e semestre 2020 a été aussi rapide que le déclin a été brutal. Après un bref contrecoup début 2021, pendant le deuxième confinement, l’emploi a connu une forte croissance depuis le printemps. À la fin septembre 2021, il dépassait son niveau d’avant-crise d’environ 0,9%. Baisse du chômage Les chiffres du chômage reflètent également la dynamique positive sur le marché de l’emploi d’un côté … suisse (fig. 1). À la fin novembre, le nombre corrigé des effets saisonniers de chômeurs inscrits auprès des offices régionaux de placement (ORP) avait baissé de près de 24% par rapport à fé- vrier 2021 (soit env. –37 000 personnes). Une inversion de la tendance s’observe depuis le prin- temps 2021 également dans la statistique du chômage au sens du Bureau international du travail (BIT), qui englobe aussi les personnes qui recherchent activement un emploi, mais ne sont pas inscrites auprès d’un ORP. L’évolution divergente de ces deux indicateurs au 2e semestre 2020 et au début de l’année 2021 est ici intéressante, lorsque les chiffres du chômage au sens du BIT continuaient d’augmenter alors que le nombre de chômeurs enregistrés avait déjà commencé à diminuer. Une possible explication est le «découragement» de certains chercheurs d’emploi, qui au vu des incertitudes générales et des procédures de recrutement mises en attente par de nom- breuses entreprises pendant le premier confinement avaient abandonné leur recherche active d’un emploi. Dans la statistique, ces personnes apparaissent non pas en tant que chômeurs, mais en tant que personnes non actives. Ce n’est qu’après avoir repris leurs démarches que ces per- sonnes ont commencé à réapparaître progressivement dans la statistique du chômage au sens du BIT. La forte – mais aussi temporaire – baisse du taux d’activité de la population au 2e tri- mestre 2020 confirme cette hypothèse. Fig. 1: Emploi au-dessus du niveau d’avant-crise en septembre 2021 Fig. 2: Plus de postes vacants qu’avant la crise du COVID-19 Emploi total: état à la fin du trimestre, indice T4 2019 = 100; chômeurs: valeurs tri- Postes vacants selon différents indicateurs, indices T4 2019 = 100 mestrielles moyennes; corrigées des effets saisonniers 350 000 103 200 Chômeurs au sens du BIT Chômeurs inscrits Statistique de l'emploi (STATEM) 300 000 Emplois (éch. de droite) 102 180 Postes déclarés auprès des ORP (moyenne trimestrielle) Adecco Group Swiss Job Market Index 160 250 000 101 Jobradar (x28) 140 200 000 100 120 150 000 99 100 100 000 98 80 50 000 97 60 T4 2019 T1 2020 T2 2020 T3 2020 T4 2020 T1 2021 T2 2021 T3 2021 0 96 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 2019 2020 2020 2020 2020 2021 2021 2021 Source: Office fédéral de la statistique, Secrétariat d’État à l’économie, Credit Source: Office fédéral de la statistique, Secrétariat d’État à l’économie, Adecco Suisse Group Switzerland/Université de Zurich, x28 AG, Credit Suisse Dernières données: 3e trimestre 2021 (emplois, chômeurs inscrits), 2e tri- Dernières données: 3e trimestre 2021 mestre 2021 (chômeurs au sens du BIT) Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 12
… et augmentation La reprise sur le marché du travail se montre aussi dans l’évolution du nombre de postes vacants du nombre de postes dans notre pays (fig. 2). Les indicateurs disponibles pour l’évaluation du nombre de postes va- vacants de l’autre cants diffèrent certes en termes de date et de méthode de recensement (sondage, recherche d’annonces sur Internet ou encore décompte des postes vacants déclarés auprès des ORP), ce qui peut entraîner certaines divergences s’agissant des niveaux relevés et de l’évolution dans le temps, mais la tendance positive est indiscutable. Les variations à la baisse et à la hausse supé- rieures à la moyenne du nombre de postes déclarés auprès des ORP s’expliquent en grande par- tie par des modifications apportées à l’obligation d’annoncer les postes vacants: cette dernière a en effet été temporairement suspendue du 26 mars au 8 juin 2020. Suite à la forte hausse du chômage en 2020, la liste des professions soumises à l’obligation de déclarer a en outre été élar- gie en janvier 2021. Les chiffres des ORP ne constituent donc pas un indicateur fiable pour l’évo- lution réelle des offres d’emploi en Suisse. Les autres indicateurs suggèrent qu’après un effon- drement au 1er semestre 2020 et une hausse dans un premier temps très progressive, le nombre de postes proposés par les entreprises augmente de nouveau depuis le 2e trimestre 2021. Au 3e trimestre 2021, les valeurs de la fin 2019/du début 2020 – et donc les anciens niveaux re- cords – ont même été dépassées. Selon le Jobradar de la société x28, plus de 212 700 postes étaient proposés en août sur les pages web des entreprises et agences de recrutement en Suisse, contre environ 210 300 en février 2020. Conséquence: Le nombre de postes vacants sur le marché du travail suisse n’était donc plus que légèrement in- tension croissante férieur à celui des personnes sans emploi au 3e trimestre 2021. Les données officielles concer- sur le marché du nant les chômeurs au sens du BIT n’étaient pas encore disponibles à la clôture de rédaction. travail du point de Nous estimons toutefois leur nombre à environ 220 000 (non corrigé des effets saisonniers). Le vue des employeurs rapport entre postes vacants et personnes sans emploi est appelé tension sur le marché du travail. Si la valeur est supérieure à 1, c’est (pour simplifier) la demande de main-d’œuvre qui prédomine; lorsqu’elle est inférieure à 1, c’est l’offre qui prime. Ce chiffre fournit donc des indications quant à la difficulté des employeurs à pourvoir les postes vacants et peut – jusqu’à un certain point – être interprété comme indicateur de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Après avoir atteint son plus haut niveau depuis 2008 à la fin 2019, peu avant le début de la crise du coronavirus, la tension sur le marché du travail a sensiblement diminué en 2020, pour la première fois depuis la crise fi- nancière (fig. 3). Cette évolution s’explique par la hausse significative du chômage sur fond d’ef- fondrement du nombre de postes vacants lors du premier confinement. L’indicateur est toutefois nettement reparti à la hausse depuis le printemps 2021. Au 3e trimestre 2021, l’on dénombrait pour chaque personne sans emploi environ 0,97 offre d’emploi, contre seulement 0,6 en début d’année. Les difficultés de nouveau croissantes que rencontrent les entreprises à pourvoir les postes avec du personnel qualifié se reflètent aussi dans l’indicateur des difficultés de recrute- ment, qui se fonde sur un sondage de l’Office fédéral de la statistique auprès de 65 000 entre- prises des secteurs secondaires et tertiaires (fig. 3). Au 3e trimestre 2021, la part des sociétés in- terrogées ayant déclaré avoir eu des difficultés à trouver de la main-d’œuvre qualifiée ou ne pas l’avoir trouvée s’établissait à presque 35% – contre 28% en 2020 et 33% à la mi-2019. Fig. 3: Retour des difficultés de recrutement Fig. 4: Déplacement de la courbe de Beveridge durant le COVID-19 Tension sur le marché du travail: rapport entre postes vacants (estimations basées Courbe de Beveridge: chômeurs (au sens du BIT) et postes vacants (estimations ba- sur le Jobradar de x28 et l’Adecco Group Swiss Job Market Index) et chômeurs (au sées sur le Jobradar de x28 et l’Adecco Group Swiss Job Market Index) en milliers, sens du BIT); indicateur des difficultés de recrutement: part des entreprises interro- valeurs trimestrielles, non corrigées des effets saisonniers, 2008–2021 gées (pondérée par effectifs) qui ont eu des difficultés à trouver de la main-d’œuvre qualifiée ou ne l’ont pas trouvée; lignes pointillées: moyenne sur 4 trimestres 38% 1.4 220 Indicateur des difficultés de recrutement (STATEM) T3 2021 Tension sur le marché du travail (éch. de droite) T1 2020 T2 2021 200 34% 1.2 T1 2019 T2 2020 T1 2014 T1 2021 180 T1 2017 Postes vacants T1 2015 30% 1.0 T1 2008 T1 2018 T1 2012 160 T1 2016 26% 0.8 T1 2011 T1 2013 140 T1 2010 2008–2013 22% 0.6 T1 2009 120 2014–2019 2020–2021 18% 0.4 100 150 170 190 210 230 250 270 290 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Chômeurs Source: Office fédéral de la statistique, Adecco Group Switzerland/Université de Source: Office fédéral de la statistique, Adecco Group Switzerland/Université de Zurich, x28 AG, Credit Suisse Zurich, x28 AG, Credit Suisse Dernières données: 3e trimestre 2021 (chômeurs au sens du BIT: estimation du Dernières données: 3e trimestre 2021 (chômeurs au sens du BIT: estimation du Credit Suisse) Credit Suisse) Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 13
Le concept de La figure 4 utilise les mêmes données relatives aux postes vacants et aux chômeurs que l’indica- la courbe de teur de la tension sur le marché du travail, mais les représente différemment, à savoir sous la Beveridge forme d’une courbe de Beveridge. Celle-ci se révèle généralement descendante: en cas de solide conjoncture, le chômage est en principe faible et le nombre de postes vacants élevé, tandis que l’inverse s’observe en cas de récession. Le positionnement de la courbe de Beveridge permet en outre d’évaluer l’étendue du chômage structurel. Si la courbe est proche du point d’origine des axes, cela indique une médiation efficace entre chômeurs et postes vacants. En revanche, si le taux de chômage et le taux de vacances sont élevés simultanément, cela suggère de possibles problèmes dans les processus de réallocation. C’est par exemple le cas lorsque les profils des chercheurs d’emploi ne correspondent pas ou seulement de façon limitée aux exigences des postes à pourvoir. En pareil cas, l’économiste parle d’inadéquation ou de «mismatch». Ces inadé- quations peuvent concerner l’appartenance sectorielle, les qualifications ou encore les régions. Un déplacement de la courbe de Beveridge peut aussi être dû à des changements au niveau du chô- mage frictionnel de courte durée. Celui-ci survient parce que la recherche d’emploi et le proces- sus de recrutement prennent toujours un certain temps, même lorsque les profils des candidats correspondent aux exigences des postes. Indices d’un L’évolution de la courbe de Beveridge suggère que le chômage structurel a augmenté sur le mar- «mismatch» croissant ché du travail suisse depuis la crise financière de 2008/2009. L’on constate en effet un décalage sur le marché du vers la droite entre les points des années 2008 à 2013 et ceux de la période 2014–2019, déca- travail suisse lage qui s’est encore accentué en 2020/2021 pendant la crise du coronavirus. Pendant le pre- mier confinement du printemps 2020, beaucoup de recrutements se sont révélés compliqués, voire ont été gelés, et ce, même dans les branches moins touchées par les mesures de restriction anti-COVID-19, ce qui a sans doute fait augmenter le chômage frictionnel. La raison principale de l’inadéquation croissante entre chômeurs et postes vacants reste cependant les fortes diver- gences observées dans l’évolution des différents secteurs pendant la pandémie. Les secteurs dans lesquels le nombre de postes vacants a connu la plus forte progression au cours des der- niers trimestres ne sont en effet pas forcément ceux dans lesquels le nombre de chercheurs d’emploi est particulièrement important. La situation varie L’analyse plus détaillée de la tension actuelle sur le marché du travail et des possibles problèmes toutefois d’une d’inadéquation à l’échelon sectoriel révèle d’importantes divergences (fig. 5). Pour ces calculs, branche à l’autre nous utilisons d’une part les chiffres des chômeurs inscrits auprès des ORP, puisqu’ils sont – con- trairement à la statistique du chômage au sens du BIT – disponibles rapidement ventilés par branches. Les chiffres concernant le nombre de postes vacants par secteur proviennent quant à eux du Jobradar de la société x28, le recensement sectoriel se fondant ici uniquement sur les pages web des entreprises (sans les agences de recrutement). Les valeurs obtenues à l’échelon sectoriel pour la tension sur le marché du travail ne sont donc pas directement comparables à celles présentées plus haut à l’échelle du pays. Fig. 5: Disparités sectorielles en matière de marché du travail Fig. 6: Changements de branche fréquents dans la restauration en 2020 Postes vacants (Jobradar x28) et chômeurs inscrits (moyenne trimestrielle) pour une Personnes actives interrogées au 4e trimestre 2019, selon leur statut au 4e tri- sélection de branches, 3e trimestre 2021, en comparaison directe (tension sur le mar- mestre 2020, en % (n = 8443 personnes interrogées les deux trimestres); entre pa- ché du travail) et par rapport à l’emploi dans le secteur. Les couleurs indiquent le ni- renthèses: résultats à interpréter avec prudence en raison de la taille réduite de veau de l’indicateur par rapport à la moyenne toutes branches confondues, les signes l’échantillon. plus et moins indiquent si le niveau au 3e trimestre 2021 était supérieur ou inférieur à celui du 3e trimestre 2019 respectivement au point le plus bas de la crise du coronavi- rus (différent selon les branches). Tension sur le marché du travail Postes vacants Chômeurs Niveau p.r. au p.r. au minimum Actives dans une autre 9% par rapport à l'emploi T3 2021 T3 2019 2020–2021 branche (18%) 4% Agriculture/sylviculture 2 ++ + 1 1 Industrie - ++ 2% 4 4 3 (15%) Produits alimentaires + ++ 3 3 5 Sorties du marché du Chimie/pharma 5 ++ + 5 2 Industrie des métaux 3 = ++ 3 4 travail Électrotechnique/techn. médicale 4 - ++ 4 4 (8%) Machines 5 -- ++ 5 2 (10%) Construction 3 + ++ 2 3 Devenues sans emploi Commerce de gros 1 = + 1 5 (6%) Commerce de détail 3 = + 4 5 Transports/logistique 1 -- ++ 1 3 Hôtellerie-restauration 2 -- ++ 5 5 (8%) Informatique 5 - + 5 2 Actives dans la même Finance/assurances 2 - + 3 4 branche Conseils juridiques/aux entreprises 1 + ++ 2 3 Architecture et conception 5 = + 4 1 Administration publique 4 -- + 2 1 Inconnu Restauration Enseignement 2 ++ + 1 1 Santé et action sociale 4 ++ + 3 2 Toutes les branches Hébergement Arts/divertissements/loisirs 1 = ++ 2 4 Légende ++ + = - -- inférieur à la moyenne supérieur à la moyenne plus élevée moins élevée Source: Secrétariat d’État à l’économie, x28 AG, Credit Suisse Source: Office fédéral de la statistique (ESPA), Credit Suisse Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 14
Tension sur le Selon nos calculs, la tension sur le marché du travail était la plus élevée au 3e trimestre 2021 marché du travail la dans le secteur informatique, suivie par les bureaux d’architecture, l’industrie chimique et pharma- plus marquée dans le ceutique et l’industrie des machines (fig. 5). Dans ces secteurs, l’on constate – mesuré à l’aune secteur informatique de l’emploi total de la branche – un taux supérieur à la moyenne de postes vacants et un taux de chômage relativement faible. Cela dit, des disparités apparaissent s’agissant de l’évolution depuis le début de la crise du coronavirus: si dans le secteur informatique et l’industrie des machines, la tension sur le marché du travail était toujours plus basse que deux ans plus tôt au 3e tri- mestre 2021, les niveaux de la fin 2019 ont déjà été dépassés dans l’industrie chimique et phar- maceutique. En chiffres absolus, c’est le secteur de la santé et de l’action sociale qui affichait le plus grand nombre de postes vacants au 3e trimestre 2021 (plus de 15 800 selon le Jobradar de x28, dont plus de 11 700 dans les soins). Par rapport à la taille de la branche, le taux de postes vacants dans la santé et l’action sociale reste pourtant dans la moyenne. Le taux de chômage étant toutefois relativement faible, il en résulte néanmoins une tension sur le marché du travail su- périeure à la moyenne. La tension s’est révélée la plus faible au 3e trimestre 2021 dans les trans- ports et la logistique, ainsi que dans le commerce de gros, où les postes à pourvoir restaient com- parativement rares. Fort «mismatch» Selon le Jobradar de x28, l’hôtellerie-restauration affichait le troisième plus grand nombre de dans l’hôtellerie- postes vacants après la santé et le commerce de détail au 3e trimestre 2021 (presque 10 100 an- restauration … nonces d’emploi), soit plus de deux fois plus que pendant le premier confinement du 2e tri- mestre 2020. Après le secteur informatique, l’hôtellerie-restauration était donc le secteur avec le taux de postes vacants le plus élevé. Simultanément, la branche affichait toutefois un très fort taux de chômage, ce qui témoigne d’un «mismatch» marqué entre chercheurs d’emploi et postes vacants. Outre les possibles divergences entre les profils de qualification proposés et recherchés, cela s’explique également par les réorientations professionnelles. Dans la statistique des ORP, les chômeurs sont en effet affectés à la branche dans laquelle ils ont eu leur dernier travail, ce qui ne signifie toutefois pas que c’est aussi dans cette branche qu’ils recherchent un nouvel emploi. … et de nombreuses Une analyse des données de l’Enquête suisse sur la population active montre par exemple que les réorientations changements de branche et les sorties du marché du travail (p. ex. pour entamer une formation ou un perfectionnement) étaient particulièrement fréquents chez les actifs de l’hôtellerie-restaura- tion en comparaison sectorielle en 2020 (fig. 6): 18% des personnes interrogées dans la restau- ration ont opté pour un poste dans une autre branche entre la fin 2019 et la fin 2020, tandis que 10% ont quitté le marché du travail. En moyenne intersectorielle, ces parts atteignaient «seule- ment» 9% et 4%. La tension sur le marché du travail calculée pour l’hôtellerie-restauration sous- estime donc une partie des difficultés de recrutement rencontrées au sein de la branche. De plus, le chômage partiel est encore relativement répandu dans l’hôtellerie-restauration (fig. 7). En sep- tembre 2021, presque 5% des effectifs de la restauration étaient concernés par une telle mesure. Seul le transport aérien affiche ici une part encore (beaucoup) plus importante. Plus le recours à la réduction de l’horaire de travail perdure, plus il faut se demander si cette mesure n’a pas pour unique effet de retarder le chômage des salariés concernés – et contribue donc à l’inadéquation entre chercheurs d’emploi et postes à pourvoir. Fig. 7: Chômage partiel encore relativement répandu dans l’hôtelle- Fig. 8: Croissance de l’emploi attendue dans toutes les branches rie-restauration en 2022 Part des salariés au chômage partiel dans le total de l’emploi (valeur approximative); Emploi en équivalents plein temps (moyenne annuelle), variation en glissement an- sont représentées les branches avec une part supérieure à 40% en avril 2020 nuel, en % 100% Secteur 2020 2021* 2022* 80% Industrie -1.0% -0.9% 0.6% 60% Construction 0.2% -0.5% 0.6% Commerce 0.3% -0.4% 0.4% 40% Transports/logistique -0.1% -0.7% 0.7% 20% Hôtellerie-restauration -9.0% -4.0% 4.1% 0% Information/communication 3.1% 1.4% 1.0% Avr. 2020 Juil. 2020 Oct. 2020 Jan. 2021 Avr. 2021 Juil. 2021 Sept. 2021 Finances et assurances 0.8% 2.0% 0.8% Transport aérien/maritime Restauration Hébergement Textiles/habillement Services aux entreprises -0.4% 2.0% 1.8% Conseil aux entreprises/sièges sociaux Arts/divertissements/loisirs Santé/services publics 2.5% 1.5% 1.6% Électronique/horlogerie Commerce automobile Autre industrie/réparation/installation Emploi total 0.1% 0.4% 1.2% Source: Secrétariat d’État à l’économie, Office fédéral de la statistique, Credit Source: Office fédéral de la statistique Suisse *Estimations pour 2021 et prévisions pour 2022: Credit Suisse Dernières données: septembre 2021 Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 15
Au vu de la hausse de la tension sur le marché du travail, les entreprises éprouvent de nouveau de Les salaires plus grandes difficultés à recruter qu’il y a quelques trimestres. La pression concurrentielle à pro- nominaux devraient poser de meilleures conditions de travail et/ou des salaires plus élevés s’accroît donc également. augmenter plus Comme l’indique notre analyse ci-dessus, les branches ne sont cependant pas toutes concernées fortement en 2022 dans les mêmes proportions par cette problématique. Dans l’ensemble, nous tablons pour 2022 qu’en 2021 sur une hausse des salaires nominaux de 0,8%, ce qui correspond plus ou moins à la moyenne observée sur les dix années ayant précédé la crise du coronavirus. En tenant compte des prévi- sions d’inflation actuelles (+1,0%, cf. p. 8), les salaires réels devraient toutefois légèrement bais- ser l’année prochaine. Ils ont selon toute vraisemblance déjà diminué cette année: selon nos pré- visions (légèrement revues à la hausse), la progression des salaires nominaux s’est en effet éta- blie à 0,4% en 2021, alors que l’inflation atteignait 0,6%. En 2022, nous attendons les plus fortes hausses de salaires dans les branches dans lesquelles la tension sur le marché du travail est relativement élevée, comme le secteur informatique et l’industrie chimico-pharmaceutique. En raison des difficultés de recrutement croissantes, l’hôtellerie-restauration, durement éprouvée par la crise du coronavirus, doit elle aussi faire face à une certaine pression salariale. En comparaison sectorielle, la hausse des salaires nominaux devrait toutefois y rester plutôt faible en 2022. Pronostic 2022: S’agissant de l’emploi, nous anticipons pour 2022 une croissance annuelle moyenne de 1,2% (en croissance de équivalents plein temps), alors que ce chiffre devrait atteindre 0,4% cette année. Après les fortes l’emploi de 1,2% en disparités observées en 2021, nous partons du principe que tous les principaux secteurs contri- moyenne annuelle bueront à la croissance de l’emploi en 2022 (fig. 8). Dans l’industrie, les transports et la logis- tique, mais surtout dans l’hôtellerie-restauration, la croissance attendue pour 2022 ne suffira tou- tefois sans doute pas pour que l’emploi renoue avec les niveaux d’avant-crise. Concernant le taux de chômage corrigé des effets saisonniers, nous tablons sur un nouveau repli l’année prochaine, même si celui-ci devrait se révéler moins dynamique qu’au 2e semestre 2021. Selon nos prévi- sions, le taux de chômage devrait atteindre 2,4% d’ici la fin 2022 et donc rester seulement légè- rement supérieur à son niveau du début 2020 (2,3%). emilie.gachet@credit-suisse.com Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 16
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Politique monétaire L’inflation continue d’augmenter Malgré une modeste accélération, l’inflation en Suisse est restée inférieure à la plupart des autres pays, surtout en raison du poids relativement faible de l’énergie dans l’indice des prix à la consommation (IPC) – d’où l’absence de pression à durcir la politique monétaire. L’énergie ne Alors qu’elle est élevée dans les économies avancées, l’inflation n’a que modérément accéléré en représente que 5,3% Suisse (fig. 1). Cette différence est surtout due à des facteurs structurels. Premièrement, la flam- de l’IPC suisse bée des prix de l’énergie n’a pas eu le même impact sur l’inflation suisse qu’ailleurs dans le monde au vu du faible poids de cette catégorie dans l’IPC de notre pays, où elle ne représente que 5,3% – contre 10,8% en Allemagne p. ex. (fig. 2). Les marchés du gaz et de l’électricité ne sont en outre pas libéralisés pour les consommateurs en Suisse, de sorte que l’envolée des prix de ces sources d’énergie ne leur a été répercutée que très partiellement. Deuxièmement, les prix alimentaires ont baissé en Suisse cette année. Les intempéries du printemps et de l’été ont en- traîné une réduction de la production agricole nationale, laquelle a été compensée par des impor- tations en provenance de régions moins chères. Troisièmement, les prix poursuivent leur déclin dans la santé, alors qu’ils tendent à augmenter dans d’autres économies avancées. Des hausses de prix Les prix à la consommation suisses n’ont toutefois pas été épargnés par les problèmes qui ont af- liées aux difficultés fecté les chaînes d’approvisionnement mondiales. Les voitures, les pièces détachées automobiles, d’approvisionnement le mobilier et l’électronique figurent parmi les catégories dont les prix ont augmenté et devraient s’observent dans continuer de grimper sur le 1er semestre 2022 – donc plus longtemps qu’initialement anticipé quelques catégories puisque les difficultés logistiques persistent. Dans le même temps, la forte accélération des prix à la production, c’est-à-dire des prix des biens départ usine en Suisse, n’augure selon nous pas de futures hausses pour les consommateurs. Nos analyses suggèrent en effet que l’actuel taux d’in- flation des prix à la consommation correspond à nos attentes eu égard au présent taux d’inflation des prix à la production (p. 19). Pas de pression à un Nous relevons notre prévision d’inflation de 0,5% à 1,0% (p. 8) pour 2022, mais restons con- relèvement du taux vaincus que l’inflation ne sera pas contraignante pour la politique monétaire. La Banque nationale directeurs, mais suisse (BNS) devrait donc maintenir son taux directeur inchangé à –0,75% en 2022. Dans un probable diminution contexte de hausse de l’inflation et de demande soutenue pour les biens suisses, elle peut tolé- des achats de rer un franc plus fort, si bien qu’elle ne réagira probablement pas à des épisodes d’appréciation devises du CHF par des interventions de change substantielles. maxime.botteron@credit-suisse.com Fig. 1: Inflation en Suisse largement plus faible que partout ailleurs Fig. 2: Poids réduit de l’énergie en Suisse Taux d’inflation des prix à la consommation, % en glissement annuel Poids de l’énergie dans l’IPC, en % 7 Suisse États-Unis 6 Zone euro Japon 5 Suisse 4 États-Unis 3 France 2 Italie 1 Zone euro 0 -1 Espagne -2 Allemagne 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 0 2 4 6 8 10 12 Dernières données: 10/2021. Source: Refinitiv Datastream, Credit Suisse Dernières données: 2021. Source: Office fédéral de la statistique, Bureau de statis- tique du Japon, US Bureau of Labor Statistics, Eurostat, Credit Suisse Swiss Economics I 4ème trimestre 2021 18
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