Le paysage - Cité scolaire de Chantilly
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
le paysage Le paysage, qui s’est constitué en genre autonome au XVIIème siècle, est un chapitre important de l’histoire des arts. Sa présence se manifeste de façon variable selon les civilisations et les époques et évolue aux rythmes des innovations techniques de représentation de l’espace. Selon la manière dont le paysage est représenté ou évoqué, il traduit et évoque la contemplation, l’admiration ou la curiosité. Le genre ne cesse de susciter l’intérêt des artistes contemporains qui le sollicitent et participent à la synthèse de nouvelles perceptions de l’espace, du temps et de l’environnement. définition : qu’est-ce-qu’un paysage ? références littéraires I - historique d’un genre cinéma les prémices : de l’antiquité au moyen âge film d’artistes la renaissance : vers une tendance réaliste glossaire affirmation d’un genre à part entière II - révolution du paysage une réalité modifiée, renversée au contact direct de la nature paysages utopiques dossier de médiation Les dossiers de médiation sont consacrés à des thématiques spécifiques en lien avec l’histoire de l’art et d’autres disciplines, ainsi que les œuvres et les artistes acquis par le fracpicardie. Ils réunissent des textes et des commentaires comme premiers moyens de documenter et situer les pratiques artistiques contemporaines. Des cartels développés sur les œuvres et les artistes ainsi que des propositions d’ateliers de pratique artistique autour d’un thème précis sont également disponibles sur demande. Ils constituent la base documentaire ou pédagogique à tout projet. Au centre de documentation du fracpicardie, accessible à tous, des ressources complémentaires sont consultables. L’intégralité des œuvres du fonds sont consultables en ligne sur : www.frac-picardie.org onglet œuvres et expositions. fonds régional d’art contemporain de picardie 45 rue Pointin - 80000 Amiens - tél. 03 22 91 66 00 public@frac-picardie.org service des Publics : Chloé Ducroq, Laure Marcou, Sophie Malivoir centre de documentation : Christophe Le Guennec www.frac-picardie.org
qu’est-ce-qu’un paysage ? I - historique d’un genre Définition les prémices : de l’antiquité Etymologiquement, le terme « paysage », qui apparaît dans la langue française au au moyen âge XVIème siècle, signifie : étendue de pays. La période hellénistique C’est : Dans l’art de l’Orient ancien, le paysage - « une étendue de pays que l’on n’apparaît que comme décor de scènes peut embrasser dans son ensemble » de la vie civile ou militaire tandis que (Larousse), l’être humain reste le sujet central de Renie SPOELSTRA, Misty Road, 2014. - « l’étendue d’un pays que l’on voit l’art grec classique. L’intérêt porté au d’un seul aspect » (Littré), paysage est peut-être la plus grande - la « partie d’un pays que la nature nouveauté de la période hellénistique : présente à l’œil qui la regarde » les peintres, à l’instar des poètes, (Robert). s’essayent à l’évocation pour les citadins des plaisirs de la campagne. Le paysage est un chapitre important Ils composent leurs paysages en de l’histoire de l’art. Sa présence se faisant varier l’intensité des couleurs manifeste de façon variable selon pour créer des effets de perspective. les civilisations et les époques. Il Les fresques retrouvées sur les murs apparaît sous des formes diverses des maisons de Pompéi en constituent dans des œuvres à thèmes historiques, un bel exemple. Vincent VAN GOGH, Paysage avec cyprès et arbres en fleurs, religieux, commémoratifs. Il s’est aussi 1889. constitué en genre autonome, c’est-à- Paysages idylliques dire comme forme d’art reconnaissable « Ces peintures ne représentent pas à ses techniques et à son iconographie, de sites précis ; on y voit réunis tous mais de façon tardive et en restant les éléments que comporte une idylle : longtemps considéré comme mineur. des bergers, des troupeaux, un temple rustique, des maisons de campagne et Selon la manière dont le paysage est des montagnes lointaines. Tout, dans représenté ou évoqué, il traduit et/ou ces peintures, est disposé d’une façon suscite des sentiments aussi divers charmante, et le peintre tire le meilleur que l’admiration, le plaisir de s’évader parti de chaque élément. Nous avons ou de retrouver un lieu connu, le vraiment l’impression d’assister désarroi, l’inquiétude. Il est en effet à une scène paisible. Et pourtant, le lieu, à certaines époques plus que ces peintures sont beaucoup moins d’autres, d’interrogations sur les liens réalistes qu’elles ne le paraissent à qu’entretiennent l’humain et la nature. première vue. Nous ne savons pas à quelle distance de la maison se trouve Une histoire du paysage nécessite de le temple et si le pont en est proche ou retracer l’évolution des techniques de éloigné. Nous serions incapables de représentation de l’espace, celles qui, dessiner un relevé topographique de notamment, permettent de suggérer l’endroit. les différences de dimensions, En effet, les artistes hellénistiques Georg BASELITZ, La forêt sur la tête, 1969. l’éloignement et qui atteignent un haut ignoraient les lois de la perspective. Ils degré de perfectionnement en Europe ne savaient pas faire fuir vers l’horizon au XVème siècle avec l’introduction une colonnade ou une allée d’arbres. de la perspective géométrique. Elle Les artistes dessinaient les sujets balaye aussi l’ensemble des formes lointains plus petits, plus grands les sous lesquelles il est apparu et dont objets proches ou les plus importants, on ne mentionnera ici que les plus mais la loi de la diminution progressive, marquantes. à mesure que grandit la distance, l’armature géographique où nous installons nos tableaux, étaient choses inconnues de l’Antiquité classique. Un millénaire devait s’écouler encore Paysage, 1er siècle ap. J.C., peinture murale - Rome Villa Albani. avant cette découverte. » (GOMBRICH, E. H. Histoire de l’art. Paris : Gallimard, 1987, p. 114.)
Le Moyen Âge ouvrages le fruit de l’observation. Au Moyen Âge, le paysage n’apparaît Alors, paraît l’emploi du carnet de dans la peinture et l’art, alors croquis réunissant des esquisses de essentiellement religieux, que de façon plantes ou d’animaux choisis pour leur accessoire, en arrière-plan : domaine beauté ou pour leur rareté. » (GOMBRICH, E. H. Histoire de l’art. Paris : Gallimard, 1987, p. 218.) féodal pour l’évocation des « travaux et des mois », lieux de pèlerinage dans les œuvres qui leur sont consacrées, la renaissance : vers une ou encore jardins de fleurs. D’une tendance réaliste manière générale, la végétation est abondante mais avant tout symbolique La Renaissance et ornementale, comme on le voit par La Renaissance innove en représentant exemple dans les enluminures. l’espace terrestre selon les règles d’une perspective construite Episodes de la vie sacrée géométriquement. Cette méthode « Il était courant au Moyen Âge rationnelle permet de traduire de d’illustrer des calendriers par des façon réaliste l’espace tridimensionnel représentations des travaux des mois : sur un support plat, en prenant l’œil semailles, chasse, moisson. Un comme point de vue unique et dispositif calendrier, annexé à un livre d’heures de cadrage. Le paysage, dont la qu’un riche duc de Bourgogne avait représentation est ainsi profondément commandé à l’atelier des frères modifiée, ne figure encore souvent Limbourg, permet de mesurer tout ce qu’au second plan ; il témoigne dès lors que les scènes de la vie réelle avaient d’une curiosité topographique accrue Les Frères de LIMBOURG, Très Riches Heures du Duc de Berry : le gagné en vivacité et en justesse château de Saumur, vers 1412-1416, Chantilly, Musée Condé. et d’un lien profond à la nature. d’observation depuis le temps du Psautier de la reine Mary. Diversité des paysages « A l’aube du XVIème siècle, quelques Car lorsque nous remarquons de courants d’idées ouvraient au paysage quelle manière l’artiste a situé sa des voies nouvelles : le rêve de scène devant une sorte de rideau contrées inconnues, lié aux grandes d’arbres que dominent les toits d’un découvertes, le goût de la topographie, grand château, nous nous apercevons encouragé par la gravure d’illustration, que nous sommes en fait loin de la la littérature arcadienne en Italie. [...] réalité. Cet art est si distant du récit Un peu avant que la théorie artistique symbolique des peintres antérieurs reconnaisse dans le paysage un genre qu’il nous faut faire un effort pour à part entière, différents styles de nous apercevoir que l’artiste n’est paysages apparaissaient : le paysage pas encore à même de représenter cosmique, évocateur des nouvelles l’espace dans lequel se meuvent ses dimensions de la Terre, d’où son figures et que, s’il obtient l’illusion de allure imaginaire. [...] Cette voie est la vie réelle, c’est plutôt grâce à une frayée dès la fin du XVème siècle par observation juste et minutieuse du [Jérôme] Bosch, dont les vues de détail. Ses arbres ne sont pas de vrais la plaine hollandaise s’élargissent arbres peints d’après nature, mais une en visions fantasmagoriques. Les rangée d’arbres symboliques et ses Albrecht ALTDORFER, Paysage, vers 1526-1528. pays germaniques contribuent visages eux-mêmes ne sont guère que avec originalité à la naissance des variantes aimables d’une formule du paysage autonome [...] : les unique. Pourtant, cet intérêt qu’il paysages panoramiques offrent, au porte à toute la splendeur joyeuse de lieu de la nature pittoresque mais la vie qui l’entoure montre bien que domestiquée des Flamands, des plans les idées de l’artiste concernant la d’eau solitaires. Mais cette attitude peinture et ses buts n’étaient plus du préromantique, qui fait du paysage tout celles du haut Moyen Age. Peu à le véhicule des émotions du peintre, peu, le centre de gravité s’est déplacé ; loin de se traduire toujours par le il ne s’agit plus de raconter un épisode paroxysme expressionniste, revêt d’histoire sacrée avec le maximum aussi la forme d’une enquête patiente de clarté et de puissance, mais de sur la configuration des arbres ou des représenter une scène de la vie réelle rochers dans les paysages intimes de aussi fidèlement que possible. Dès [Lucas] Cranach le Jeune et d’[Albrecht] lors, le métier d’artiste comportera Altdorfer ou dans certains dessins une tout autre science. Il faudra savoir et gravures de [Albrecht] Dürer et de étudier la nature et appliquer à ses
l’école du Danube. [...] Le rôle de l’Italie la rigueur intellectuelle de [Nicolas] dans l’essor du paysage fut plutôt de Poussin, les paysages de 1648-1650, concevoir la participation de celui-ci ordonnés par un système de relations à la scène comme le reflet d’un monde quasi mathématiques et ennoblis harmonieusement orchestré. Chez d’édifices antiques, apparaissent Léonard de Vinci, les bases en sont à comme l’expression de cette fois en la fois scientifiques, philosophiques et la raison qui confère au paysage la artistiques, puisque écrits et dessins dignité des thèmes de l’Antiquité ou de nous apprennent l’intérêt de celui-ci la fable. [...] A partir de 1655 environ, pour les phénomènes optiques, son [...] Poussin y réintroduit les valeurs acharnement à déchiffrer les secrets poétiques : celles de l’atmosphère, Nicolas POUSSIN, Paysage avec Saint Matthieu, 1640. de la nature, considérée comme un celles de l’exubérance d’une nature à être animé, et sa revendication de la laquelle l’homme se soumet. Affranchis liberté imaginative du peintre. de toutes théories artistiques, les Vers 1560-1570 apparaît aussi le Hollandais jettent sur la nature un paysage dit « maniériste ». A la vie qui regard neuf, sans mépriser ses aspects animait les paysages « héroïques » les plus humbles, la campagne ou le de Titien ou de [Pieter] Bruegel tend ciel gris, dont ils notent les moindres à se substituer un paysage décoratif. nuances ; les panoramas eux-mêmes Ainsi, dans la composition, on note ont pour source les plaines de Hollande une préférence pour le schéma en [...] comme dans les gravures de « V », qui encadre d’un premier plan Rembrandt. [...] La figure humaine, non souvent sombre une perspective plus image mythologique ou sacrée, claire... Simultanément, un autre mais image du peuple hollandais saisi Jacob VAN RUYSDAEL, Etang entouré d’arbres, 1665-1670. type de paysage reflète les tendances dans sa vie quotidienne, se fond dans intellectualistes du moment : les ruines. le paysage. De 1680 à 1790, la veine Dans la suite du dessin néerlandais paysagiste s’épuise, prolongeant des environs de 1530, surgissent les dans une manière idyllique et factice « fabriques » semées dans les paysages les grandes tendances de l’époque de Véronèse [...] » (LAURIOL, Claude. « Paysage ». précédente. L’Italie oscille entre un In Dictionnaire des courants picturaux, tendances, mouvements, écoles, genres du Moyen Âge à nos jours. Classicisme « en mineur » et le goût Paris : Larousse, 1990.) théâtral de Rosa. » (LAURIOL, Claude. « Paysage ». In Dictionnaire des courants picturaux, tendances, mouvements, écoles, genres du Moyen Âge Autonomie du genre à nos jours. Paris : Larousse, 1990.) C’est au XVIIème siècle que le paysage devient, d’abord en Europe du nord, Peindre en atelier Joseph MALLORD, William TURNER, Vapeur dans une tempête un genre à part entière. En Hollande, Au XVIIIème siècle, la peinture du paysage de neige, 1842. Jacob Van Ruysdael, Albert Cuyp innove peu, prolongeant les grandes ou Jan Van Goyen, s’y consacrent tendances de la période précédente. exclusivement, privilégiant les sites qui On citera néanmoins les nombreuses leurs sont familiers et se spécialisant productions des Vedutistes italiens dans les vues de campagne, de dunes, (Canaletto, Francesco Guardi, Bernardo de canaux, de marines ou dans les vues Belloto, etc.), liées à la demande des de ville. voyageurs venus de toute l’Europe et Une conception différente du paysage qui associent un goût du détail précis à se développe bientôt en Italie. Les des effets d’atmosphère et de coloris. paysages d’Annibal Carrache puis de Leurs tableaux sont peints en atelier Claude Gellée dit le Lorrain et Nicolas à partir de notes prises à l’extérieur, Poussin, grandes figures de la tradition parfois à l’aide de camera obscura, et classique française, se caractérisent donnent à voir sites et vues réels ou par l’ordonnancement élégant et imaginaires. rigoureux des éléments du tableau et En France notamment, la vogue des par la présence d’édifices ou de ruines « fêtes galantes » et des spectacles en antiques. plein air favorise par ailleurs les scènes champêtres. Elles sont pourtant jugées Pluralité des styles inférieures par l’Académie de peinture « Au XVIIème siècle, le foisonnement car elles ne requièrent ni maîtrise du siècle précédent fait place à une poussée des lois de la composition ni situation clarifiée selon trois lignes de connaissances historiques. force : le paysage idéal italo-français, le naturalisme hollandais et le baroque, représenté presque exclusivement par [Pierre Paul] Rubens. En accord avec
Influence italienne Le romantisme « Dans un genre seulement, l’art italien « [...] Il ne semble pas excessif s’est montré vraiment novateur au d’attacher à la période 1790-1860 le cours du XVIIIème siècle. Il s’agit, et le nom de Romantisme, dans le sens d’une fait est assez caractéristique, de la conscience commune de la nature peinture et de la gravure de vedute, qui domine l’homme [...] sous forme de vues. Les voyageurs, qui, de tous de paysages dramatiques, souvent les coins du monde, affluaient en Italie hostiles, nés des rêves passionnés de pour en admirer les beautés, désiraient l’artiste. [...] L’aquarelle, technique souvent emporter des souvenirs de de la spontanéité, fait également son leur séjour. apparition. En Angleterre, Constable A Venise qui, plus que toute autre ville et son contemporain Turner vont Gustave COURBET, La falaise d’Étretat après l’orage, 1870. italienne, offre au peintre des thèmes travailler à partir d’une couleur pure incomparables, se développa toute appliquée par touches discontinues une école susceptible de répondre et seront plus préoccupés de rendre à cette demande. [...] Comme les l’atmosphère du paysage qu’une fresques de [Giovanni Battista] Tiepolo, représentation strictement réaliste. les peintures de [Francesco] Guardi Les représentants de la veine montrent que l’art vénitien n’avait tourmentée sont [Eugène] Delacroix, rien perdu ni de son sens du spectacle mais surtout Paul Huet qui affectionne ni de sa maîtrise dans le traitement la mer déchaînée dans ses grands de la lumière et de la couleur. [...] Il tableaux. [...] Entre le romantisme le a compris que l’impression générale plus pathétique et le naturalisme de d’une vue d’ensemble est essentielle Courbet se situent les paysagistes de et que le spectateur ne demande qu’à Barbizon. La forêt de Fontainebleau, Paul CÉZANNE, Sainte-Victoire vue de la route du Tholonet, 1895-1900. laisser jouer son imagination pour en qui les réunit vers 1827-1829, répond à préciser le détail. » (GOMBRICH, E. H. Histoire la fois à leur amour pour les Néerlandais de l’art. Paris : Gallimard, 1987, pp. 444-445.) du XVIIème siècle et à celui des motifs « sublimes » - landes sauvages, arbres affirmation d’un genre à gigantesques, étangs mélancoliques - mais que ces artistes traitent avec part entière un extrême souci de vérité, exécutant leurs esquisses à l’huile en plein air. Traduire le monde Tous excellent dans l’étude des effets Au XIXème siècle, c’est au romantisme momentanés de lumière […]. Les que revient de libérer le paysage de impressionnistes se réclameront aussi l’idéalisation propre aux réalisations Pierre BURAGLIO, Les Sainte-Victoire de Z, 1986. de [Gustave] Courbet, associé par le antérieures. Empreint d’une forte public aux artistes de Barbizon, bien tension émotionnelle, celui-ci devient qu’il ait surtout travaillé isolément. le véhicule des sentiments de l’artiste. L’originalité des paysages de ce peintre Alors que l’introduction de la technique est le refus de toute effusion comme de l’aquarelle permet aux artistes de de toute référence à la tradition ; plus travailler en extérieur et favorise la qu’à l’atmosphère, Courbet s’intéresse spontanéité, les Anglais explorent des à la matérialité des choses. [...] En voies différentes : rendu « réaliste » marge de tous ces mouvements, des vues de campagne chez John Corot a su concilier une immédiateté Constable, visions « cosmiques » du de vision par laquelle il s’apparente à paysage chez William Turner. Dans ses contemporains. Dans les études leur peinture, le sujet s’efface devant de petits tableaux exécutés pour lui- la recherche technique, mais aussi même et ses amis, il ne retient que devant la volonté de traduire par des l’essentiel. » (LAURIOL, Claude. « Paysage ». couleurs le monde des idées et des In Dictionnaire des courants picturaux, tendances, sentiments. mouvements, écoles, genres du Moyen Age à nos jours. Paris : Larousse, 1990.) Avec Jean-Baptiste Camille Corot en France, les études d’après nature, auparavant modèles destinés à composer dans l’atelier de vrais paysages, acquièrent le statut d’œuvres à part entière. Quant aux paysages des peintres de l’école de Barbizon, ils gardent une part de la spontanéité des esquisses qu’ils réalisent en plein air dans la forêt de Fontainebleau.
pittoresques auxquels il arrivait firent II - révolution du paysage qu’on lui pardonna assez rapidement la manière dont il avait dissous la forme sculpturale. Par ailleurs, les une réalité modifiée, renversée nuages, la vapeur, le brouillard, l’eau et l’atmosphère n’étaient pas Les impressionnistes supposés avoir de forme définie et Avec les Impressionnistes, l’approche par conséquent, ce que nous prenons du paysage est profondément maintenant pour une démarche modifiée. Quittant leurs ateliers, ils audacieuse vers l’abstraction n’était à saisissent dans l’immédiateté des l’époque qu’un fait de naturalisme. heures et des saisons les vibrations Piet MONDRIAN, Pommier en fleurs, 1912. La même remarque s’applique à des couleurs, s’intéressant avant tout la dernière période de Monet. Les à la fragmentation de l’image par la couleurs chatoyantes satisferont lumière. toujours le goût commun et seront Plusieurs artistes participeront du donc toujours plus ou moins acceptées dépassement de ce courant : Paul comme substitut à la vraisemblance. » Cézanne qui, en géométrisant les (FERRIER, Jean-Louis. « Greenberg : le tableau en tant phénomènes et formes de la nature en que champ ». In L’aventure de l’art au XXème siècle. Paris : Chêne, Hachette, 1988, p. 519.) facettes, annonce les développements cubistes, Georges Seurat par le S’émanciper du réel Olivier DEBRÉ, Signe Paysage, 1974. divisionnisme des couleurs, Vincent Si l’abstraction fournit ensuite les Van Gogh et son expressionnisme expressions les plus originales du coloré ou encore Paul Gauguin puis genre paysage – Wassily Kandinsky, les fauves qui utilisent les couleurs de Piet Mondrian et d’autres encore –, façon arbitraire. la veine figurative ne tarit pas pour autant. En témoignent notamment les Traduction instantanée paysages naïfs et surréalistes. « La première conquête des impressionnistes est la spontanéité L’abstraction géométrique de la sensation dans la clarté du « [...] Seul Mondrian, prenant pour plein air. Entre 1864 et 1870, [Claude] point de départ de sa théorie des Monet, [Camille] Pissarro et [Alfred] relations pures les horizontales et les Sisley observent les variations des verticales du paysage, accomplit entre couleurs locales selon l’environnement 1912 et 1914 la logique du Cubisme. Mais et découvrent le principe des ombres l’abstraction géométrique abandonne colorées, qu’ils appliquent, entre vite toute référence à la nature [...] autres, aux effets de neige. [...] C’est grâce aux théories et à l’exemple entre 1869 et 1875 que Monet et de Kandinsky dès 1909. [...] [C]hez Pissarro, notant les reflets sur la Seine, les « paysagistes non figuratifs », en particulier à Bougival, parviennent à la dislocation ultime de l’espace une dissociation vibrante de la touche chantalpetit, Sans titre de la série Hölder Nil, 1998. (croisements de lignes de force chez - en virgules ou en points de plus en [Maria Helena] Vieira da Silva, nœud de plus menus - qui décompose la lumière rythmes chez [Alfred] Manessier, chaos solaire selon les couleurs pures du primordial chez [Jean] Dubuffet). D’où prisme, mais qui permet, par l’accord le lyrisme de plus en plus intense de la des complémentaires, la reconstitution couleur, si remarquable en particulier à distance de l’impression première. En chez [Nicolas] De Staël, le plus grand 1873, Sisley et Cézanne adhèrent à ce paysagiste récent. mode révolutionnaire. » (LAURIOL, Claude. « Paysage ». In Dictionnaire des courants picturaux, [...] Négation brutale des recherches tendances, mouvements, écoles, genres du Moyen Age de profondeur et de reproduction à nos jours. Paris : Larousse, 1990.) des apparences au profit d’un jeu de signes synthétisant les La lumière de William Turner rapports entre esprit et nature, « Ce fut en fait William Turner qui, le telle semble l’ultime conséquence premier, rompit de manière significative de l’Abstraction, qu’elle soit de les conventions d’ombre et de lumière. nuance expressionniste ou de nuance Dans la première période, il groupait géométrique, comme si le paysage les intervalles de valeur à l’extrémité devenait « l’espace du dedans ». » claire de la gamme de couleurs pour (LAURIOL, Claude. « Paysage ». In Dictionnaire des montrer comment la lumière du ciel, courants picturaux, tendances, mouvements, écoles, genres du Moyen Age à nos jours. Paris : Larousse, ou tout autre phénomène lumineux, 1990.) tendait à estomper les demi-teintes et les nuances d’ombre. Les effets
L’abstraction lyrique Ce qui est détruit ici, c’est la notion « [L’abstraction lyrique est immémoriale, reprise par le cubisme, l’] expression employée pour du bord du tableau comme limite : désigner, en opposition à l’abstraction avec Newman, le bord du tableau est géométrique ou constructiviste, répété à l’intérieur, il fait le tableau la tendance à l’expression directe au lieu d’être simplement redoublé. de l’émotion individuelle. […] C’est Les bords des plus grandes toiles vers 1947, dans la jeune génération fonctionnent exactement comme les de l’école de Paris d’après-guerre, lignes à l’intérieur : diviser mais non pas que l’opposition aux contraintes séparer, enfermer ou borner ; délimiter géométriques s’est généralisée et qu’un et non limiter. Les tableaux ne se Richard LONG, Four Days and Four Circles (Quatre jours et quatre fort courant d’Abstraction lyrique s’est fondent pas dans l’espace environnant ; cercles), 1994. développé sous des aspects divers. » ils gardent - lorsqu’ils sont réussis - (BREUILLE, Jean-Philippe, Dictionnaire de peinture et sculpture, l’art du XXème siècle, Larousse, 1991, p. 16). leur intégrité et leur unité propre. Mais ils ne se dégagent pas non plus de La nature ressentie chez Olivier l’espace comme autant d’objets isolés ; Debré en bref, ce ne sont pratiquement pas Olivier Debré, un des représentants des peintures de chevalet - et pour français de l’abstraction lyrique - aussi cette raison, ils échappent à la notion appelé par ce dernier « abstraction d’ « objet » (et d’objet de luxe) fervente » -, réalise au sein même du qui s’attache de plus en plus à ce paysage de grands formats peints où la type de peinture. En définitive, les couleur et la matière s’expriment dans tableaux de Newman doivent être de grands champs monochromes. vus comme champs. » (FERRIER, Jean- Sensible à l’atmosphère, la lumière, les Louis. « Greenberg : le tableau en tant que champ ». In L’aventure de l’art au XXème siècle. Paris : couleurs et aux saisons qui rythment Chêne, Hachette, 1988, p. 519.) la nature, l’artiste matérialise les émotions suscitées au contact des pays au contact direct de la nature qu’il traverse ou des bords de Loire. Dès 1953 c’est ces « signes paysages » Les Land artistes qui rendent comptent de cela. « En français [« Land Art » signifie] « L’espace ouvert est structuré en approximativement « art du paysage » couleurs comme il l’était en formes. ou « art de plein air ». Dans les Libéré, il se prolonge au-delà de la déserts américains ou dans d’autres toile, poussant les couleurs vers les lieux abandonnés, des artistes bords où elles s’y accumulent en prennent, dans les années 60, le parti ponctuations. Ces empattements d’interventions sur la nature elle- sont comme des signes. […] Le voyage même ou d’installations en plein air. mêle impressions physiques, culture De grandes dimensions, en osmose et esprit du lieu. Au-delà du folklore avec le site, voulant transformer il subit l’endroit. Chaque œuvre est la celui-ci par l’art contemporain. Les transposition du lieu où elle est créée, artistes sortent de leur atelier, comme elle incarne sa propre émotion. » l’avaient fait un siècle plus tôt, les (MOZZICONACCI, Jean-François, Olivier Debré, rétrospective 1943-1993. Editeurs : musées de impressionnistes, ou, un siècle et demi Montbéliard/Valence/Ajaccio/Théâtre de Saint- Quentin en Yvelines, 1993, pp.13-14.) auparavant, les nomades du Far West ; comme eux, les land artistes partent Le Color field américain à la conquête de terres vierges. Du côté de la peinture américaine les Leurs constructions minérales, voire grandes surfaces colorées se déploient végétales, sont souvent des traces sous le terme du critique Clément éphémères, dans la neige par exemple. Greenberg par Color field. « La chaleur Et autant en emporte le vent, mis sombre de la couleur dans les peintures à part la pérennité des matériaux de [Barnett] Newman, [Mark] Rothko préparatoires et des photographies et [Clyfford] Still estompe les valeurs postérieures. L’arrière-pensée est et donne à la surface une planéité souvent conceptuelle. La première nouvelle, qui vibre et respire. Rompues exposition a lieu à New York en 1967. » (DELARGE, Jean-Pierre, Dictionnaire des arts par relativement peu d’accidents plastiques modernes et contemporains. Editions de dessin ou de composition, les Gründ, Paris, 2001, p. 701.) surfaces exhalent la couleur avec un effet enveloppant accru par le format même du tableau. On réagit à un environnement autant qu’on réagit à un tableau accroché au mur. […]
Modifier le paysage pittoresque. La Spiral Jetty (1970) vous « Le rapport que les artistes du Land entraîne en spirale dans le paysage, Art entretiennent avec le paysage en encadrant des perspectives sur le est complexe. […] Mais, négatif ou paysage, et vous amène aussi à vous positif, ce rapport au paysage est de concentrer sur sa structure interne, à toute façon privilégié dans la mesure mesure qu’elle se love sur elle-même. » (TIBERGHEIN, Gilles, « Paysages, de près, de loin ». In où ces artistes interviennent dans Land Art. Paris : Editions Carré, 1993, pp. 199-208.) un environnement naturel qu’ils modifient, si peu que ce soit, de façon Habitué au déplacement d’immense délibérée. masse de terre pour ses réalisations, Robert SMITHSON, Spiral Jetty, 1970. en 1970, Robert Smithson construit Le premier paysage est celui que l’on cette spirale de 450 mètres à l’aide de voit d’une fenêtre, celui qu’un cadre galet de roche balsamique noire. Dans découpe, prélève sur le pays. […] le grand lac salé de l’Utah aux Etats- Comment alors les artistes du Land Unis, la terre est comme une extension Art, avant de modifier cette vision, se qui témoigne de la croissance confrontent-ils au paysage lui-même ? organique, d’un caractère intemporel. L’une des fonctions primordiales de Les photos qui rendent comptent l’art fut de « schématiser » notre de la scène originale de ce « site- regard, de lui fournir une forme de sculpture » témoignent du façonnage représentation de la nature variable du paysage qui détermine une nouvelle selon les époques et les cultures, qui définition du lieu. Le paysage est rendu détermine notre jugement esthétique. pittoresque par son prolongement qui On peut, de ce point de vue, considérer renforce la puissance de la nature. les jardins comme une « application » de ces schèmes, qu’un certain nombre Faire l’expérience d’un lieu d’artistes du Land Art n’ont fait que « Pour les autres, le paysage est devenu reconduire sous d’autres formes, mais le lieu d’une expérience, intellectuelle, dans une perspective toute classique. perceptible et sensible. Plus qu’un Et c’est vrai que Nancy Holt, Christo, objet de contemplation, il fut un Walter De Maria, des premiers travaux simple partenaire esthétique. Plus les éphémères de [Michael] Heizer et de œuvres des artistes ont un caractère Jan Dibbets ou des photographies de durable, moins compte pour elles Richard Long. On a parlé de ce dernier leur inscription dans le paysage. Cela comme d’un « paysagiste », c’est-à-dire ne signifie pas pour autant qu’elles un artiste qui construit une vision du ne s’y intègrent pas avec harmonie, paysage. Et c’est bien de construction puisque tout, au contraire, contribue qu’il s’agit en effet, puisque les à les mettre en valeur, le chemin qui photographies des lieux où prennent y conduit, l’horizon sur lequel elles se place ses cercles ou ses alignements découpent, la couleur de la terre ou de sont accompagnées d’un ensemble l’eau, ou la position du soleil dans le d’informations, toponymes, mesures ciel. En retour, elles fixent ces espaces indiquant l’altitude ou la distance, qui qui cessent d’être des étendues en constituent en quelque sorte les traversées, pour devenir des paysages instruments, en permettent en tout œuvrés. […]. cas la « lecture » […]. On a pu considérer la démarche Parfois, devant l’immensité des des artistes du Land Art comme la espaces, la grandeur des œuvres, manifestation d’un intérêt renouvelé on se prend à songer au sublime. Le pour le pittoresque et pour la « mise pittoresque, intermédiaire entre beau en scène », déjà d’ailleurs cultivée par et sublime, peut-être associé tantôt le minimalisme. Richard Serra, quand à l’un, tantôt à l’autre, de sorte que on lui demande si l’objet sculpturale l’on peut aussi bien parler d’un beau dans le paysage ne joue pas vis-à- pittoresque que d’un pittoresque vis de celui-ci le rôle de cadre ou de sublime. Ce n’est pas des objets socle, répond qu’en effet il devient cependant que naît ce sentiment un élément de définition du paysage, de sublime, mais des idées qu’ils mais pas un cadre : »Si vous utilisez évoquent. Le jugement par lequel le mot « cadre » par rapport au nous déclarons un paysage sublime paysage, vous introduisez une notion constitue une manière de penser et non de pittoresque », ce qui, ajoute-t-il, d’appréhender […] » (Ibid., pp. 217-219.) ne l’a jamais préoccupé. Il poursuit : « [Robert] Smithson s’intéressait au
Christo et Jeanne-Claude du monde de l’art. Ces avancées Christo et Jeanne-Claude, couple technologiques ont permis aux artistes d’artistes rendu célèbre pour leurs d’exploiter les nouveaux médias et d’en projets paysagés d’empaquetages, faire les outils de leurs réalisations. réalisent des œuvres éphémères Le genre du paysage n’échappe pas notamment au sein d’environnements à cette nouvelle forme d’expression naturels comme l’illustre l’œuvre artistique et vit aussi une expansion. Surrounded Islands, réalisée en 1980- Les paysages numériques deviennent 1983. Onze îles, qui s’étendent sur onze le reflet de nouveaux questionnements kilomètres de la baie de Biscayne à et d’utopies. Miami, sont entourées d’un plastique rose fuchsia. L’intervention à l’échelle Images numériques de la nature est pour ces artistes un « Les premières expériences de création moyen de redéfinir le paysage par un d’images numériques, notamment changement radical. Le paysage et les celles de l’artiste américain Charles éléments le constituant sont mis en Csuri, illustrent parfaitement certaines scène pour en révéler la structure, la des caractéristiques fondamentales du forme et la grandeur. médium informatique, en particulier la possibilité de répéter une forme Atteindre le sublime grâce à une fonction mathématique. « D’ailleurs, et plus généralement, SineScape (1967) est un dessin au trait l’échelle et l’immensité des paysages d’un paysage que Csuri a numérisé Christo et Jeanne-Claude, Surrounded Islands, 1980-1983. américains dans lesquels se trouvent puis modifié à l’aide d’une fonction les œuvres de [Michael] Heizer, d’onde selon une procédure répétée [Robert] Smithson, [Walter] De une dizaine de fois. A l’issue de ce Maria ou Nancy Holt les associent processus d’abstraction, le paysage immédiatement au sublime et cela apparaît comme une notation de en raison du rapport qui peut exister ses propres caractéristiques. » (PAUL, Christine. L’art numérique. Editions Thames & Hudson, entre l’œuvre et le paysage, dont collection l’univers de l’art, 2004, pp. 27-28.) l’immensité, pour reprendre la formule de Kant, nous donne le sentiment de Révolution technologique ce qui est « grand absolument ». C’est « Les années 1990 ont connu une quand la nature est transformée en accélération sans précédent du Walter DE MARIA, The lightning field, 1974. théâtre que le sublime peut s’imposer développement technologique du à nous en désorganisant tout à coup ce médium numérique au point que l’on que l’art avait réussi à stabiliser dans a parlé de « révolution numérique ». un équilibre tendu avec elle. Entre […] Les artistes ont toujours été parmi la forme et ce qui la produit, il s’agit les premiers à réfléchir sur la culture d’une inadéquation qui concerne au et la technologie de leur époque, et premier chef la représentation elle- ils n’ont pas attendu la proclamation même. » (Ibid., p. 224.) officielle de la révolution numérique pour utiliser ce nouveau médium. […] Walter De Maria La véritable nouveauté réside dans le La notion contemporaine du sublime degré de développement auquel la Charles CSURI, SineScape, 1967. est illustrée dans l’œuvre The lightning technologie numérique est parvenue, fiel (1974) de Walter De Maria. Dans ouvrant ainsi des perspectives un champ isolé du Nouveau Mexique, radicalement nouvelles à la création et quatre cents poteaux d’acier sont à l’expérience de l’art. » (Ibid., p. 7.) dressés dans un rituel géométrique « Publié pour la première fois dans la mesuré pour attirer la foudre. Par la revue New Landscape Architecture en mise en scène de la dangerosité et 2016, « Lanscape Without Design ! » des intempéries de la nature, l’artiste est le manifeste de la révolution théâtralise le paysage. La puissance, paysagiste numérique du XXIème l’immensité et l’obscurité participent siècle […]. [Mais il ne faut] pas nous de cet effet. Par expansion de l’art, les faire oublier que l’essentiel de sa artistes cherchent une harmonie entre doctrine pour un renouveau radical leurs interventions et l’environnement, de la conception paysagiste trouve entre l’art et la nature. son origine dans la contestation, au nom des outils informatiques, de la paysages utopiques pratique du dessin telle qu’enseignée encore à cette époque dans les écoles L’apparition au début des années d’art, d’architecture et du paysage. 1960 et la diffusion croissante de […] Le projet de paysage porte sur l’informatique a provoqué une véritable un site donné. Il faut commencer révolution dans l’épanouissement par représenter ce site pour pouvoir
dessiner le projet. Or aucune carte découpage horizontal du site et surtout ne peut prétendre représenter par une approche plurielle du temps et parfaitement un site, puisque toute de l’espace. […] Comment comprendre carte est une abstraction de la réalité le paysage immersif de Michel Paysant ? spatiale. » (MAC GOOGLE, Philip-C. « Le paysage Nous sommes là devant et dedans. sans le dessin ». In Du dessin, Les carnets du paysage, actes sud et l’école nationale supérieure de paysage, Par son échelle dont il se présente 2013, pp. 65-67.) à nous, il semble pensé pour être parcouru aisément d’un regard, Paysage graphique de Kristina du moins il ne s’y soustrait pas. » Kristina SOLOMOUKHA, Paysage économique, 2001. Solomoukha (BEAUD, Marie-Claude et MINIGHETTI, Clément, Nusquam, « Michel Paysant », Mudam Luxembourg, C’est par l’étude du territoire que 2009, pp. 9-13. s’amorce la création de Paysage Economique (2001) de Kristina A l’aide d’un oculomètre, qui enregistre Solomoukha. Le paysage, au cœur de le mouvement de ses yeux, il redessine ses réflexions artistiques, traité avec les lignes et les contours de paysages l’emploi d’outils informatiques tend ou de sujets. Dans ses réalisations … vers une nouvelle dimension. et après (2011) il soumet à son regard « Telle une cartographe elle échafaude, des œuvres de maîtres (dessins et détaille et décortiques le paysage peintures), comme celle de Caspar urbain et tout ce qui constitue ses David Friedrich, afin d’en tirer un dessin marges, ses espaces abandonnés, vectoriel retranscrivant les lignes du Caspar David FRIEDRICH, Souvenir dans le massif des géants, 1835. ses friches, privilégiant toujours la parcours de ses yeux sur le tableau. représentation du territoire à celle de l’architecture. Comme l’indiques son Paysages éveillés titre, Paysage Economique, ce dessin se Si le paysage est changeant manifeste par sa simplicité apparente, dans le temps, au rythme de ses son emploi répétitif et machinal de transformations ou des saisons, son ligne et du trait. Paysage Economique image, sa représentation reste figée sur a pour origine un graphique le moment de sa captation. Au sein des représentant les courbes économiques arts numériques qui se développent au en relation avec un territoire début des années 1960, la vidéo occupe Michel PAYSANT, FRIEDRICH et après, 2013. géographique donné, selon une source une place importante et permet de précise et scientifique réalisée par déjouer cet aspect. Les artistes s’en ordinateur que l’artiste redessine, de saisissent alors pour animer, explorer, mémoire et à la main, brouillant les décortiquer les environnements qui différentes lectures possibles entre retiennent leur attention et donner le graphique et la représentation naissance à de véritables paysages d’un paysage montagneux. […] éveillés. Inspiré des cartographies et autres relevés topographiques, Paysage Les jardins de Hans Op de Beeck Economique plagie le tracé mécanique Par le biais de la vidéo, l’artiste belge de l’ordinateur pour finalement créer Hans Op de Beeck crée un panorama une image en trois dimensions toute en en mouvement de différents jardins courbes, en relief quasi-géographique. dans son œuvre Garden of Loss (2004). […] La réflexion sur le paysage Les aquarelles ou photographies Hans OP DE BEECK, Garden of loss, 2004. romantique et sublime s’estompe de l’artiste qui représentent des au profit d’une recherche active et jardins à la française, à l’italienne ou sociologique du territoire. » (STAEBLER, à l’anglaise, s’enchainent par plans Claire, « Kristina Solomoukla ». In Landscope, le paysage et le dessin contemporain, Black Jack éditions, successifs. L’outil numérique permet 2008, p. 70.) aussi à Hans Op de Beeck de jouer avec la modulation des contrastes Les paysages immersifs de Michel et de luminosité de chaque plan afin Paysant d’accentuer planéité et profondeur, Chez Michel Paysant, seules les lignes noir et blanc et rappeler la présence de force composent ses paysages et et l’intervention humaines au sein de décontextualisent l’environnement vers la nature. une autre lisibilité. « Michel Paysant interroge les lieux Catharina Van Eetvelde : et les choses. Il s’y emploie avec un Cartographier le paysage véritable sens scientifique de l’art. Sa Le support vidéo est également pratique révèle de l’archéologie mais une possibilité pour faire dérouler aussi de la science […]. Il progresse par le paysage chez Catharina Van prélèvements et nomenclatures, par Eetvelde. La vidéo Slice (2005-2007)
présente en partie supérieure la par les régions françaises comme la coupe longitudinale d’un territoire Bretagne. Et pourtant les paysages indéterminé sur lequel progresse un qui se succèdent sont plausibles curseur. En partie inférieure plusieurs et tendent vers un environnement vues plus détaillées de cette frise se global. Par l’image, grâce au réseau développe. Comme une géomètre, internet et à ses applications de plus par le dessin vectoriel, elle dresse en plus sophistiquées, Julien Lévesque la cartographie d’un environnement propose un constat des territoires impersonnel où la neutralité du à l’échelle du monde, un paysage traitement technique en fait un universel. continent ou un microcosme inexploré. « Cette œuvre, lorsqu’elle est projetée Catharina VAN EETVELDE, Slice, 2005-2007. en divers endroits de la planète est Paysages connectés un paysage partagé. Sans omettre Les nouvelles technologies sont que nous visitons, bien souvent aussi un moyen pour les artistes de simultanément les mêmes lieux qui se connecter davantage au monde pourtant nous apparaissent déserts dans lequel ils évoluent. L’invention au sein de nos navigateurs. Inabrités, d’internet dans les années 1960, puis sa comme le sont les citées idéales popularisation dans les années 1990, a autrefois commanditées par les largement touché le champ artistique. humanistes en quête d’utopie » (MOULON, Dominique. « Les pratiques numériques d’un art Le réseau informatique qui permet contemporain ». In L’art dans le tout numérique, une connexion à l’échelle mondiale artpress 2, trimestriel n°29, juillet 2013, p. 19.) Julien LEVESQUE, Street Views Patchwork, 2009. en temps réel donne naissance à de véritables œuvres partagées, comme Avec les nouveaux-médias, les des paysages connectés. créateurs ont le pouvoir de se « Peut-on imaginer qu’en regardant un réapproprier l’image issue de la réalité paysage, nous voyions simultanément, et de l’emmener ailleurs. L’intervention en palimpseste, toutes les visions de numérique fait basculer le paysage ceux qui l’on traversé - comme c’est le vers une vision fantastique et utopique cas aujourd’hui dans Google Maps, une pour une réorientation totale de fois que l’on active le mode « photo » ? l’image. La perception n’est pas immuable, elle est soumise à l’histoire, elle aussi : références Walter Benjamin nous l’a rappelé, peut-être avec plus d’insistance que quiconque. Mais avant même d’engager littéraires une historicité des appareils de la Lord BYRON, Elle marche dans la sensibilité, cette historicité engage beauté, écrit en 1814 la temporalité de toute perception : ce que nous voyons dans le temps et Extrait c’est grâce au renouvellement continu « I. Elle marche dans sa beauté, du relief sensible que celui-ci gagne semblable à la nuit des climats en champ ; dans la perception, ce qui sans nuages et des cieux étoilés ; fut à l’instant s’efface pour mieux faire tout ce qu’ont de plus beau la lumière et place à ce qui vient. » (MAC GOOGLE, Philip-C. « Le paysage sans le dessin ». In Du dessin, Les carnets l’ombre est réuni dans ses traits et dans ses du paysage, actes sud et l’école nationale supérieure de yeux,brillantdecesmollesettendresclartés paysage, 2013, p. 53.) que refuse le ciel à la splendeur du jour. L’environnement universel chez II. Une ombre de plus, un rayon de Julien Lévesque moins diminuerait de moitié cette grâce Julien Lévesque convoque l’outil ineffable qui ondoie dans les tresses de internet pour la réalisation de son sa noire chevelure, ou éclaire doucement œuvre Street Views Patchwork réalisées ce visage où des pensées d’une sérénité en 2009. Elle se déploie sur onze suave disent combien est pure cette tableaux et chacun d’entre se compose demeure, combien elle leur est chère. de quatre bandes horizontales superposées les unes sur les autres III. Et sur cette joue, et sur ce front si doux, pour offrir une vue spécifique. A si calme, si éloquent, ce sourire séduisant, l’aide de l’outil google street view, il ces teintes animées, annoncent des jours présente l’état des lieux en temps réel passés dans la vertu, une âme en paix avec de quatre paysages du monde entier : tous, un cœur dont l’amour est innocent ! » de l’état américain de l’Utah, jusqu’à la Finlande ou le Japon en passant
Vous pouvez aussi lire