Les enjeux sociaux de la régionalisation - Pour lA solidArité, contre l'exclusion - Collectif solidarité ...
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ensemble ! pour la solidarité, contre L’exclusioN Numéro 70 / Trimestriel Février 2011 Les enjeux sociaux de la régionalisation u Activation Chômeurs sous contrat, chômage sous contrainte... Belgique - België P.P. u CPAS La santé, un luxe pour les pauvres ? 1020 Bruxelles 2 1/1480 u Pauvreté Deux mille dix, l’année catastrophe !
Infor GazElec L'énergie, c'est un droit ! Choisir un meilleur fournisseur d’énergie, oui mais... Quel est le fournisseur le plus intéressant pour votre consommation d’énergie? Comment changer de fournisseur? Quels sont vos droits ? Infor Gaz Elec fait pour vous une comparaison des offres et des prix, vous aide à faire un changement... informations et conseils gratuits : 02/209.21.90 www.inforgazelec.be Infor Gaz Elec est un centre d’information non commercial créé à l’initiative du Collectif Solidarité Contre l’Exclusion asbl et financé grâce au soutien de la Ministre Bruxelloise de l’Environnement et de l’Energie. Éd. resp. A. Lismond, CSCE asbl / Infor Gaz Elec. 51 Ch. de Haecht 1210 Bxl.
Édito Par le haut et par le bas 2 / Arnaud Lismond Président du CSCE 2010, désignée par l’Union européenne demandeurs d’emploi” et en “favorisant la nus) plutôt que dans les déductions fiscales “année de lutte contre la pauvreté”, vient création d’emplois” par la “diminution de visant les hauts revenus ? de se terminer. Où en est-on ? En Belgique, la fiscalité sur le travail” et “l’allégement des selon les derniers chiffres du Service fédéral contraintes administratives” A. En particulier, la région bruxelloise a déjà de l’économie, 14,6 % de la population connu un avant-goût de ce processus. “présente un risque élevé de pauvreté” La crise financière n’a donc pas fait dévier Depuis les années 50, le fossé social entre (revenu mensuel inférieur à 966 euros pour le cours fondamental des politiques celle-ci et sa périphérie s’est élargi en raison un isolé). Les disparités régionales sont économiques et de l’emploi impulsées par d’une émigration sélective des hauts reve- significatives : il y a 10,1 % de personnes sous l’UE. Celle-ci reste une machine de guerre nus en direction des villas à quatre façades ce niveau en Flandre, 18,4 % en Wallonie et contre les travailleurs pour démolir leurs de la périphérie (“ suburbanisation”). L’écart plus d’une sur quatre à Bruxelles. acquis sociaux et enrichir la rente. Mettre entre les revenus moyens est aujourd’hui en concurrence, sans socle commun de pro- d’environ 32 % en défaveur des Bruxellois. Le Service fédéral de l’économie rappelle tection sociale significatif, les travailleurs La commune dont le revenu imposable que “dans la lutte contre la pauvreté, les belges (revenu médian annuel : 17 500 par habitant est le plus faible de Belgique transferts sociaux (allocations etc.) jouent euros) avec les travailleurs polonais (3 500 (Saint-Josse), est ainsi tenue de lever une un important rôle correcteur. [...] Si, du jour euros), hongrois (4 000 euros) et roumains taxe additionnelle à l’impôt sur les per- au lendemain, toutes les allocations sociales (1 500 euros), reste l’axe du projet européen sonnes physiques bien plus élevée que, par étaient supprimées, y compris les pensions pour construire l’amitié entre les peuples et exemple, Lasne, 4e plus riche commune du de retraite, ce chiffre [de personnes vivant leur développement commun. pays. dans la pauvreté] serait de 40,7 %”. Cette reconnaissance du rôle protecteur des Mais le niveau national n’est pas en La gestion calamiteuse des demandeurs allocations n’est pas l’optique de l’Union reste. Adossé au patronat, le mouvement d’asile en ce début d’hiver, rejetés d’une européenne. Celle-ci, en conclusion de son flamand appelle à passer d’un “fédéralisme région à l’autre en l’absence de plan de année de lutte contre la pauvreté, appelle à de consommation” à un “fédéralisme de répartition fédéral, pourrait n’être qu’un la mise en place de la stratégie économique responsabilité”... ce qui signifie en clair signe avant-coureur de cette chasse aux “Europe 2020”. Ce programme prévoit que organiser la concurrence fiscale et sociale pauvres qui serait demain ouverte entre les d’ici cette date il conviendrait de “réduire entre les régions. Dans ce schéma, plus les régions par une concurrence fiscale accrue. de 20 millions le nombre de personnes habitants d’une région sont riches, plus elle menacées par la pauvreté”... notamment reçoit de moyens... Chaque région se trouve Un vœu pour 2011 ? Trouver collectivement en améliorant “le fonctionnement des contrainte pour survivre de surenchérir la force de dire “non” à toutes les résigna- marchés du travail grâce aux mesures dans la “chasse aux pauvres” vers la région tions et à ceux qui organisent la régression suivantes : proposer des contrats facilitant voisine et dans l’octroi de prébendes pour généralisée au profit de quelques-uns. l’accès à l’emploi et prévoyant la progres- attirer les hauts revenus. Quelle est la région sivité des droits ; adapter les indemnités de qui investira encore dans le logement social A “Résumé pour les citoyens - Stratégie pour des chômage ; personnaliser l’aide apportée aux (qui fixe sur son territoire de faibles reve- compétences nouvelles et des emplois”, UE, 2010. ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be (3)
nez-nous ! s rejoig Abonnez-vous à Ensemble! Le Collectif Solidarité Contre l'Exclusion, c'est... Créé en 1996, le Collectif Solidarité Contre l’Exclusion : emploi et reve- nus pour tous (asbl) associe des personnes, des associations et des acteurs syndicaux (dont la CSC-Bruxelles, la FGTB Bruxelles et la CNE) unissant leurs forces pour lutter contre l’exclusion. Notre préoccupation centrale : renforcer un réseau entre associations, syndicats et citoyens pour analyser, dénoncer et combattre ensemble les mécanismes économiques, sociaux, politiques qui produisent l’exclusion sociale. Le Collectif Solidarité Contre l’Exclusion publie depuis sa création un journal bimestriel et s’est particulièrement impliqué ces dernières 15 euros / an : travailleurs u années dans la défense du droit à l’aide sociale et au chômage. 8 euros / an : sans-emploi u et étudiants 30 euros / an: organisations u Abonnements groupés : u contactez notre secrétariat Adhérez au Collectif Plusieurs campagnes sont en cours : Vous recevrez le journal et les u Activation des chômeurs : www.stopchasseauxchomeurs.be invitations à nos assemblées générales. u Pour des CPAS conformes à la dignité humaine: www.asbl-csce.be u Relèvement des allocations sociales au seuil de pauvreté : 30 euros / an : travailleurs u www.releverlesallocationssociales.be 15 euros / an : sans-emploi u et étudiants 60 euros / an : organisations u Si vous souhaitez contribuer à la réussite 30 euros / an : petites organisations u de nos actions vous pouvez : ou organisations de sans-emploi u Faire connaître l’association et son journal à votre entourage Numéro de compte au nom du Collectif u Vous impliquer dans la vie de l’asbl en collaborant au journal, aux Solidarité Contre l’Exclusion : actions, aux forums ou en renforçant notre conseil d’administration 068-2370559-03 u Devenir membre et soutenir ainsi pleinement le Collectif (et par là Ajouter en communication : ABO ou COTIS, même recevoir le journal) suivant votre choix. u Vous abonner au journal du Collectif Merci à tou(te)s pour votre soutien ! www.asbl-csce.be (4) ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be
sommaire ensemble ! pour la solidarité, contre l’exclusion Une publication du Collectif Solidarité Contre l'Exclusion, Place Loix 7 (bte 27), 1060 Bruxelles. 02/535.93.50. Édito (42) Réprimer la mendicité ou lutter Rédacteur en chef contre la pauvreté ? (3) P ar le haut et par le bas (Carte blanche) Carlos Crespo (crespoxc@hotmail.com) (Arnaud Lismond) (43) Écolo veut le retrait du terme Secrétaire de rédaction “mendicité” de l’arrêté Daniel Flinker régionalisatiON (44) (Gérald Hanotiaux) Le PS garde confiance en l’Olivier (daniel.flinker@asbl-csce.be) (6) L es travailleurs bruxellois dans la tourmente (Gérald Hanotiaux) ont participé à ce numéro Abida Allouache, Éric Buyssens, de la 6e réforme de l’État (Éric Buyssens) (45) Le MR, une majorité alternative ? Luca Ciccia, Carlos Crespo, (10) Q uelques aspects institutionnels du suivi des (Gérald Hanotiaux) Denis Desbonnet, Éva Detierre, Jean Faniel, Daniel Flinker, Gérald chômeurs (Jean Faniel) (46) La volte-face du cdH Hanotiaux, Arnaud Lismond, Delphine Masset, Annette Per- (Gérald Hanotiaux) daens, Peggy Pierrot, Véronique Chasse aux Pisano, Sébastien Robeet, Paul Vanlerberghe chômeurs CPAS dessins Titom (www.bxl.attac.be/titom) (14) 100 000 victimes ! (Daniel Flinker) (48) L a couverture santé, un luxe pour les Stiki (http://ledessindulundi.site. allocataires ? (Denis Desbonnet) voila.fr/) (17) Chômeurs sous contrat, chômage Les illustrations de Titom ainsi sous contrainte (52) “ Un simple souci d’équité et de saine que ce journal sont mis à dispo- gestion” (Denis Desbonnet) sition suivant la licence Creative (Abida Allouache, Daniel Flinker) commons. (20) Le contrat d’activation : repères et dérives (56) “ Une régression sociale qui pénalise les Merci à Michel Loriaux pour la plus vulnérables” (Denis Desbonnet) photographie de la troisième de (Delphine Masset) couverture (22) Les regards des cours et tribunaux Mise en page sur le contrat d’activation (Delphine Masset) énergie Graph’X - Étienne Mommaerts (60) C ompteurs à budget : l’avis des CPAS Remerciements Stéphane Pastor et Christian wallons (Véronique Pisano) LIVREs (62) Wallonie veut se doter d’un réseau La Nauwelaers pour leur relecture attentive. (26) L a démocratie contre les pauvres électrique durable et intelligent Éditeur responsable (Peggy Pierrot) (Paul Vanlerberghe) Arnaud Lismond (64) L a société civile flamande critique les Place Loix 7 (bte 27), 1060 Bruxelles compteurs intelligents Pauvreté (Paul Vanlerberghe) Le contenu des articles n’engage que leur(s) auteur(s). Tous les (28) Douze mois de lutte effective et stimulante articles peuvent librement être (Denis Desbonnet) syndicats reproduits à condition de mentionner la source. (30) Les actions du Réseau belge de lutte (66) Pour construire l’avenir, la CSC exige la contre la pauvreté (BAPN) fin de l’économie casino Avec le soutien de (Denis Desbonnet) (Sébastien Robeet) La Communauté française de Belgique (32) Quand les mobilisations européennes convergent à Bruxelles… (Denis Desbonnet) droits (34) Initiatives à retenir (Denis Desbonnet) fondamentaux (36) L’état de la pauvreté à Bruxelles (68) U n droit pénal aux relents guerriers (Annette Perdaens) (Éva Detierre) (73) Brèves Le Collectif Solidarité Contre Mendicité (Daniel Flinker) l’Exclusion asbl a été reconnu en tant qu’association d’éducation (40) Répression de la mendicité permanente inscrivant son action dans l’axe 3,2; soit la production au sein de la STIB, un an plus tard d’analyses et d’études, diffusées (Gérald Hanotiaux) par imprimés et Internet. ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be (5)
ALISATION RÉGION Les travailleurs bruxellois dans la tourmente de la 6 réforme de l’État e L Le 3 janvier dernier, Johan Vande La- notte a soumis une nouvelle propo- sition d’accord sur la 6e réforme de l’État aux sept partis qui négocient la formation d’un gouvernement depuis les élections de juin 2010. Comme on le sait, elle a été rejetée par la N-VA et le CD&V, la jugeant trop peu radicale et le conciliateur a démissionné. Les discussions se Quels sont les enjeux sociaux de la régionalisation qui pourrait voir le jour ? Comment les appréhender ? Pistes de réflexion autour du cas bruxellois… / Éric Buyssens Directeur du bureau d’études de la FGTB de Bruxelles poursuivent malgré tout, avec le de transferts. Les négociations notre modèle social et démembrer présager à l’avance d’une réaction spectre d’un retour aux urnes ! Il est butent sur les nouvelles règles de un peu plus cet État social de populaire massive ? Hélas, les difficile de jouer au devin mais tout financement des entités fédérées services publics, qui est le fruit des cartes sont bien trop brouillées au- porte à croire qu’on est loin d’être et de leur autonomie fiscale, sans luttes ouvrières du XXe siècle. De jourd’hui. Même s’il faut, plus que sortis de l’auberge… Une chose est parler des autres points de dis- l’autre côté, on nous promet, en jamais, poursuivre les efforts de sûre, avec ou sans accord, le monde corde à venir, qui ne sont pas non cas d’échec, un plongeon abyssal sensibilisation de l’opinion publique du travail va être pris dans une plus des points de détail, comme dans la crise de régime, avec une aux mérites de la solidarité sociale formidable tourmente sociale et sera la scission de l’arrondissement de paralysie totale de l’État exposant et aux dangers auxquels cette 6e le premier à payer les frais. Bruxelles-Hal-Vilvorde et surtout le pays à tous les dangers (écono- réforme l’expose, il faut sans doute “ miques, sociaux et financiers B). préférer une réforme contestable Le retour aux urnes n’y changera au néant et tenter de transformer On nous propose une rien et pourrait au contraire blo- quer le pays davantage. ce chambardement politique et institutionnel en opportunité de réforme qui va ébran- changement social. Nous ne pouvons être que des plus ler les assises de dubitatifs quant à la résistance du La réforme, notre modèle social” monde du travail face à l’exaltation ambiante des identités négatives, une opportunité sociale ? À l’examen des contours probables opposant travailleurs flamands et de cette réforme, qui semblent francophones, voire même bruxel- satisfaire tout au moins cinq Malgré un embargo assez strict, les mesures de crise à prendre sur lois et wallons. Si l’ultranationa- partis négociateurs sur sept D, on entretenu depuis juin sur les le plan socio-économique (avec lisme flamand peut nous effrayer, peut néanmoins relever quelques négociations institutionnelles, ces quelque 17 à 20 milliards de ne négligeons pas non plus la force acquis positifs des négociations les contours les plus probables déficit public à combler à moyen centrifuge d’un certain régiona- en cours. Les fondements de base de cette réforme de l’État sont terme). Et donc “tant qu’il n’y a pas lisme wallon et l’émergence d’un de la solidarité interpersonnelle connus. À la fin 2010, un ac- d’accord sur tout, il n’y a d’accord mouvement identitaire bruxellois, (la Sécurité sociale) ne seraient cord semble se dessiner sur sur rien” ! porté par quelques citadins nantis pas trop malmenés. Les relations les politiques fédérales qui sont en quête de distinction existen- collectives du travail resteraient du susceptibles d’être, a minima, La peste ou le choléra ? tielle C. Peut-on vraiment imaginer ressort fédéral. Le droit du travail transférées aux régions et aux Face à cette situation, une certaine aujourd’hui un sursaut populaire, resterait unifié. On n’évoque plus la communautés A. La droite fla- perplexité s’impose. Que préférer : de grande ampleur, en réaction perspective de donner aux régions mande en attend évidemment plus la peste ou le choléra ? D’un côté, à la remise en cause des acquis et aux communautés la faculté mais les autres parties prenantes on nous propose une réforme sociaux, même si les commémo- législative de donner elles-mêmes aux négociations se sont déjà “copernicienne” qui va immanqua- rations des grèves de l’hiver 60 force obligatoire à des conventions accordées sur un imposant paquet blement ébranler les assises de nous rappellent que rien ne laisse collectives du travail conclues (6) ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be
en lien avec leurs domaines de aussi relever la détermination de forme d’autonomie constitutive, compétence (formation, concilia- certains négociateurs (mais pas au même titre que les deux autres tion avec la vie familiale, etc.). Le partagée par tous) à préserver la régions. Le principe d’un refinan- rapport salarial continuerait à se capacité financière du gouverne- cement structurel de la région lui négocier collectivement au niveau ment fédéral, qui sera nécessaire permettant d’assurer ses fonctions national pour tout le secteur privé pour faire face aux défis sociaux de capitale, notamment en termes (via la dynamique des accords de l’avenir, comme le financement de transports publics, semble interprofessionnels et accords des pensions. Tout cela est assez également reconnu… nonobstant sectoriels). Finalement, mais essentiel pour sauvegarder l’unité évidemment les objections de la cela reste à vérifier, les réformes et la solidarité des travailleurs. N-VA et du CD&V. envisagées ne porteraient atteinte à ces véritables tabous syndicaux Autre élément de satisfaction toute La régionalisation peut qu’au travers du transfert aux relative : le fait régional bruxellois virer au cauchemar régions et aux communautés des s’en trouverait malgré tout ren- pour les travailleurs règles d’attribution des allocations forcé. La plupart des compétences bruxellois… familiales, de l’octroi des réduc- seraient transférées aux régions, Sur le plan socio-économique, les tions des cotisations patronales y compris les allocations fami- régions hériteraient ainsi des plans pour les groupes cibles, des liales qui atterriraient à Bruxelles d’activation de l’emploi, à savoir conditions d’accès au congé-édu- dans les mains de la Commission principalement les subsides sala- cation payé ou encore des moyens communautaire commune F. riaux pour les groupes cibles G du fonds des équipements et des La Région de Bruxelles-Capitale et le contrôle de la disponibilité et services collectifs E. On peut pourrait même accéder à une la sanction des chômeurs H. ➔ ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be (7)
ALISATION RÉGION ➔ Des opportunités pourraient liards) et sur les leviers structurels les interlocuteurs sociaux (patrons rait aux pouvoirs publics la tâche s’ouvrir pour envisager leur de la compétitivité (la formation et syndicats). Enfin, le sous-finan- ingrate de policer cette classe ur- réforme, dans le but de mieux les professionnelle, l’innovation, la R cement structurel de Bruxelles baine laborieuse, qui est indispen- adapter aux réalités du marché & D, etc.), les régions et les com- n’offre pas beaucoup de marges sable au bon fonctionnement de de l’emploi régional et d’éviter les munautés deviendraient désormais budgétaires pour envisager des la métropole mais qui ne restera exclusions injustes du chômage. incontournables pour maîtriser politiques de développement social pas sans réaction à son expulsion En 2007, au lendemain des au niveau national l’évolution des ambitieuses, en matière, notam- progressive de la ville. précédentes élections fédérales, coûts salariaux par rapport aux ment, d’enseignement, de forma- Cette évolution cauchemardesque le front commun syndical reven- pays voisins. En clair, la négocia- tion professionnelle, d’aide sociale toucherait d’abord les travailleurs diquait déjà de tels changements tion des futurs accords interprofes- ou encore d’accueil de l’enfance. bruxellois (c’est-à-dire ceux à Bruxelles en faveur de l’emploi sionnels sur l’évolution des salaires qui travaillent et/ou habitent à des jeunes I. Mais les marges de et des conditions de travail serait Quand les patrons rêvent Bruxelles), mais n’épargnerait pas manœuvre seront certainement de moins en moins possible sans de Bruxelles leurs camarades de Flandre et de très étroites, tant les nouvelles associer les régions aux tentatives Les forces progressistes doivent Wallonie. Car l’apparition, au cœur règles de financement risquent de médiation que le gouvernement prendre conscience du risque de l’économie belge, d’une espèce d’être drastiques. Les critères fédéral assure, jusqu’à présent, encouru par une ville-région, qui de trou noir social, abandonné de financement de la politique de seul entre les représentants des s’appauvrirait fiscalement et qui au “laisser-faire”, aurait vite fait l’emploi ne sont pas arrêtés à ce patrons et des syndicats. Ce qui serait abandonnée à son sort, d’ébranler le développement éco- jour et font manifestement l’objet n’est pas vraiment rassurant, tant coupée de la solidarité interrégio- nomique et social de l’ensemble du de rudes tractations. Certains ont leurs approches des enjeux so- nale. Sa planche de salut pourrait pays… la ferme volonté de responsabiliser ciaux sont divergentes et la concur- bien être de parier sur ses atouts les régions en faisant dépendre rence interrégionale importante. de métropole en espérant ainsi Le plan syndical le financement pour des com- accroître les dividendes fonciers Il est urgent d’ouvrir une alternative pétences d’emploi de l’évolution Bref, il est à craindre que ces “op- de son essor international et attirer à ce projet de ville franche de libre- régionale du chômage, du nombre portunités” de changement social des cadres internationaux à haut échange auquel cette réforme de de résidants mis au travail (taux se traduisent en cauchemar pour revenu qui viendraient renforcer sa l’État pourrait nous conduire. Il est d’emploi) ou encore de la capacité les travailleurs bruxellois. Le terri- capacité fiscale L. C’est claire- impératif de mobiliser les forces fiscale (revenu) des habitants. Une toire régional est particulièrement ment l’ambition que le patronat progressistes et d’y opposer un soupape est néanmoins envisagée perméable aux mouvements en- donne à son projet BMR (Brussels projet de développement durable dans ces mécanismes de bonus- trants et sortants des travailleurs Metropolitan Region), qui rencontre et solidaire de Bruxelles qui soit malus, évoqués pour sanctionner et des entreprises J. Cette grande aujourd’hui son petit succès fondé sur le droit à la ville pour (responsabiliser) financièrement les porosité des frontières régio- mondain. Derrière ses aspects tous et toutes. C’est dans cette politiques régionales via une prise nales rend difficile toute maîtrise séduisants se cache le projet d’une perspective que la FGTB de en compte du nombre d’emplois publique du marché de l’emploi. De ville franche, d’une ville de libre- Bruxelles a proposé, en 2007, de occupés par des non résidants ce fait, l’effet direct des politiques échange offerte aux investisseurs manière prémonitoire, de négocier (soit 52 % des emplois bruxellois). régionales sur le taux de chômage étrangers et aux “talents” (dixit), avec les pouvoirs publics un pacte Si tout cela se concrétise, il reste et le taux d’emploi est assez où les Bruxellois moins talentueux de croissance urbaine durable M. à saisir cette occasion pour tenter aléatoire. La très forte sensibilité (ndlr) seraient invités à en assurer La conclusion d’un tel accord de donner aux politiques d’acti- du marché bruxellois à la concur- les “commodités”. Pour attirer et social aurait pour objet, d’une part, vation une autre orientation, plus rence des deux autres régions s’allier ces investisseurs et gens de conditionner le développement favorable aux Bruxellois. rend quasiment impossible toute “talentueux”, les pouvoirs publics international de Bruxelles à une imposition de normes sociales plus bruxellois devraient bien évidem- amélioration des conditions de D’autres leviers économiques restrictives. Elle pousse plutôt les ment leur consentir de nouvelles travail et à un développement seraient également régionalisés, pouvoirs publics à s’aligner sur la libéralités fiscales, leur dédier des des services et des équipements touchant notamment à la promo- région la plus libérale pour préser- équipements de prestige, leur collectifs et, d’autre part, d’organi- tion du commerce extérieur, à ver l’attractivité économique de la donner accès à des services de ser la transition économique vers l’innovation et à la recherche-déve- ville. La complexité institutionnelle luxe. Il faudrait également libérer le un développement égalitaire, juste loppement. bruxelloise ne va pas non plus faci- marché du travail de ses “rigidités” et durable. Cette ambition pour Au travers de toutes ces nouvelles liter la mise en œuvre de certaines actuelles pour répondre aux be- Bruxelles nécessite d’associer les compétences économiques et compétences, dès lors qu’elles soins très flexibles des affairistes deux autres régions à la gestion sociales, une autre opportunité impliquent les communautés ou et autres clientèles huppées. solidaire de la croissance urbaine, de changement social se dessine concernent les navetteurs K. De Sans complexe, le patronat prend pour mettre fin aux concurrences dans le cadre de la loi de 1996 plus, la concertation sociale entre en exemple l’emploi du secteur interrégionales, qui sont particu- sur la promotion de l’emploi et patrons et syndicats a encaissé HORECA, qui est trop réglementé à lièrement stériles et antisociales. la sauvegarde préventive de la beaucoup de retard par rapport son goût. Les négociations d’un pacte de compétitivité. En prenant la main à la Flandre et à la Wallonie. Trop croissance urbaine durable vien- sur une part substantielle des préoccupée par les questions Dans cette vision de la ville-lumière nent tout juste de démarrer… Bref, subsides salariaux qui sont pris en d’aménagement du territoire, la où, comme en 1900, grouillerait l’avenir reste malgré tout ouvert au compte dans le calcul de la masse jeune Région bruxelloise a trop en arrière-cour une multitude de progrès social. n salariale (à concurrence de 4 mil- longtemps négligé le dialogue avec travailleurs sans-grade, il incombe- (8) ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be
A En recoupant les propositions successives les Bruxellois à la Flandre et à la Wallonie I “Plan pour l’emploi des jeunes à bruxellois devront subsidier de leurs propres de Di Rupo, De Wever et Vande Lanotte, dans la gestion des matières culturelles et Bruxelles”, CSC Bruxelles, CGSLB Bruxelles deniers les titres-services achetés par on peut en effet identifier l’essentiel des personnalisables. & FGTB Bruxelles, 22 juin 2007. les ménages bruxellois mais sans pouvoir compétences transférées aux régions et en limiter l’usage aux seules entreprises aux communautés qui font aujourd’hui D PS, Écolo, cdH, sp. a et Groen. J Le phénomène des navettes dont on employant des travailleurs bruxellois, eu accord : l’organisation des soins de santé de connaît surtout les déplacements quotidiens égard à la libre circulation des services. première ligne, les allocations familiales, les E Le FESC est alimenté par les cotisations mais dont on sous-estime les déménage- Non seulement ces mauvais emplois vont politiques d’activation du marché de l’em- des employeurs et subventionne des ser- ments résidentiels. Nombreux sont par coûter cher aux Bruxellois mais ne vont pas ploi, l’organisation de la justice, les aides vices d’accueil des enfants de salariés. exemple les travailleurs sans emploi qui, contribuer pleinement à réduire le chômage économiques fédérales, le droit locatif et le une fois insérés durablement dans l’emploi, à Bruxelles. code de la route. F Entité fédérée communautaire autonome, quittent la région pour trouver à se loger cogérée par les Bruxellois francophones plus décemment. La migration dans les L La Région tire aujourd’hui ses principales B Le Fonds monétaire international et et néerlandophones suivant le principe de zonings flamands et wallons des jeunes ressources budgétaires des impôts fonciers l’agence de notation Standaard & Poors la double majorité. Cette fameuse Cocom entreprises en développement fausse (droits d’enregistrement, droits de succes- qui ont publiquement prévenu les autorités assure déjà depuis 1989 la tutelle sur les 19 également les retombées sur l’emploi des sion, etc.) et de la dotation fédérale calculée belges des risques majeurs d’attaque spécu- CPAS bruxellois et les hôpitaux publics. Bruxellois des aides apportées par la Région sur base de la contribution des Bruxellois à lative si un gouvernement de plein exercice à leur création. l’impôt sur les personnes physiques (IPP). n’est pas rapidement mis en place. G Les réductions de cotisations sociales pour les groupes cibles, les mesures d’acti- K L’exemple du transfert aux communau- M “Pour un nouveau pacte de croissance C On se souviendra du manifeste “nous vation des allocations sociales (Activa, plan tés du congé éducation payé est éloquent. urbaine”, Philippe VAN MUYLDER, in “le existons” lancé par des personnalités bruxel- win-win, programme de transition profes- Dans une même entreprise, on pourrait se syndicat dans la ville”, Les hors série de loises issues du monde académique, culturel sionnelle, article 60…), les titres-services, le retrouver avec 2, 3 voire 4 régimes diffé- Politique, HS8, décembre 2007 (téléchar- et associatif. Ils revendiquent pour Bruxelles congé éducation, etc. rents selon que le travailleur soit flamand, geable sur www.fgtbbruxelles.be) une plus grande autonomie régionale et bruxellois néerlandophone, bruxellois surtout communautaire. Ils prônent ainsi H Le volet fédéral du plan d’accompagne- francophone, wallon voire germanophone. la disparition des Communautés française ment et de suivi actif des chômeurs de La régionalisation des titres-services ne sera et flamande, qui, à les entendre, aliènent 2004. pas évidente non plus : les pouvoirs publics ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be (9)
ALISATION RÉGION Quelques aspects institutionnels du suivi des chômeurs D Depuis le milieu des années 1970, beaucoup de pays européens sont confrontés à un chômage de masse. Une des réponses apportées à ce problème a été de transformer les dispositifs d’aide aux chômeurs afin d’“activer” ceux- ci. Parallèlement, la Belgique a connu une succession de réformes institutionnelles qui ont notamment En cas de réforme de l’État, quelles seraient les conséquences du transfert du “contrôle de la dispo- nibilité des chômeurs” de l’ONEm vers les régions ? / Jean Faniel Centre de recherche et d’information socio-politiques (CRISP) les demandeurs d’emploi doivent a quintuplé, passant de 100 000 (OCDE) et, à sa suite, l’Union affecté la politique de l’emploi. Les être disposés à travailler et doivent chômeurs complets indemnisés en européenne ont ainsi développé un régions ont reçu diverses compé- accepter toute offre d’emploi 1974 (4,3 % de la population ac- discours axé sur la nécessité de tences en la matière, devenant pro- convenable qui leur est présentée tive) à 500 000 en 1984 (10,9 %). restreindre les dépenses qualifiées gressivement coresponsables de la par les services de placement. Les Le taux de chômage est resté de “passives” et de les remplacer lutte contre le chômage, tandis que chômeurs peuvent être sanction- élevé par la suite, ne descendant par des dépenses “actives”. Par l’autorité fédérale a conservé la nés, y compris par l’exclusion de jamais sous le chiffre de 7 % de la l’usage même de ce vocabulaire, main sur la Sécurité sociale et sur l’assurance-chômage, s’ils ne res- population active (ou 11,5 % de la les dépenses d’indemnisation ont certaines matières touchant à l’em- pectent pas ces obligations. Enfin, population assurée, soit les seuls été disqualifiées, tandis qu’ont ploi. Aujourd’hui, les négociations les chômeurs peuvent percevoir salariés ; cela représente 350 000 été valorisées celles destinées à prégouvernementales entendent leur allocation par le biais de la chômeurs complets indemnisés, remettre les chômeurs à l’emploi : modifier à nouveau le découpage Caisse auxiliaire de paiement des ce nombre n’intégrant pas les accompagnement dans les dé- institutionnel en vigueur. Cela n’est allocations de chômage (CAPAC) personnes sans emploi retirées des marches pour chercher un emploi, pas sans conséquences. ou par l’entremise d’un des trois statistiques par différents biais – dépenses de formation, mais aussi syndicats reconnus comme statut de chômeur âgé, dispense réduction de cotisations sociales “Assurance chômage” caisses de paiement (CGSLB, CSC de recherche d’emploi pour raisons et aides pour les employeurs En Belgique, le mécanisme ou FGTB) B. familiales, etc. –, et dont la prise embauchant des chômeurs, etc. d’assurance-chômage mis en en compte fait parfois doubler ce En Belgique, ces mesures se sont place après-guerre est marqué par Du point de vue socio-économique, nombre C). multipliées depuis les années différentes spécificités. Pour autant les deux périodes de trente ans qui 1970 et ont été particulièrement qu’ils soient involontairement privés ont suivi la guerre se caractérisent La différence de contexte entre valorisées depuis la fin des années d’emploi, les salariés ont droit à de manière assez différente. Il ne ces deux périodes de trente ans 1990, dans le cadre notamment une allocation de chômage après serait pas tout à fait exact de consi- et l’évolution socio-économique de la promotion du concept d’État avoir travaillé (et donc cotisé à la dérer les trois premières décen- observée plus largement dans social actif D. Sécurité sociale) durant un certain nies comme “Trente Glorieuses”. l’ensemble des pays occiden- nombre de mois. Les jeunes qui En Belgique, le chômage est taux, marquée notamment par le En 2004, le ministre fédéral de ont achevé leurs études et n’ont resté à un niveau non négligeable chômage de masse, ont eu un l’Emploi, Frank Vandenbroucke pas encore d’emploi ont droit, jusqu’au début des années 1960. impact significatif sur l’évolution de (sp.a), a réformé le mode de après une période appelée stage La situation était toutefois sans l’assurance-chômage, en Belgique contrôle des chômeurs. Depuis d’attente, à des allocations dites commune mesure avec celle qui comme ailleurs. lors, ceux-ci doivent prouver d’attente, d’un montant inférieur s’est développée à partir de 1975. régulièrement qu’ils cherchent aux allocations de chômage A. Le Entre janvier et décembre de cette Dépenses “passives” activement un emploi, sous peine versement de ces allocations est année charnière, le nombre de chô- et “activation” de sanctions pouvant aller jusqu’à en principe accordé sans limitation meurs a crû de 70 %. Au cours de L’Organisation de coopération et l’exclusion de l’assurance-chô- dans le temps. En contrepartie, la décennie qui a suivi, ce nombre de développement économiques mage. L’Office national de l’emploi (10) ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be
(ONEm), organisme parastatal fédéral, mène des auditions. Des “facilitateurs” reçoivent les chô- meurs, examinent leurs preuves de recherche d’emploi et décident si elles sont ou non suffisantes. Si l’avis est négatif, le facilitateur impose, par contrat, une série de tâches, dont il vérifiera l’accomplis- le départ, le ministre l’a présenté les régions et la Communauté complexe. Les chômeurs ont dès sement lors du deuxième entretien. comme un accompagnement et germanophone, les organismes de lors parfois du mal à savoir à qui En cas de nouvel avis défavo- une aide offerts aux chômeurs. placement de ces entités fédérées ils doivent s’adresser dans leurs rable, la sanction peut être pour transmettent à l’ONEm les informa- démarches. Mais ils ne sont pas certaines catégories de chômeurs À côté de ce dispositif fédéral, tions dont ils disposent concernant les seuls à être déroutés par cette la suspension du versement de les régions et la Communauté les chômeurs qui refusent une offre complexité. Ainsi, La Libre Belgique l’allocation pendant 4 mois, ce qui germanophone sont chargées du d’emploi jugée convenable ou qui du 16 mars 2010 utilisait, pour n’est pas sans conséquences sur placement des chômeurs. Les ne se présentent pas à un entretien parler du même sujet, les expres- les personnes touchées, dont le organismes pararégionaux (Actiris à d’embauche. sions “activation des chômeurs”, revenu est déjà inférieur, dans bien Bruxelles, Forem en Wallonie, VDAB “accompagnement des chômeurs” des cas, au seuil de pauvreté (966 en Flandre) et l’Arbeitsamt de la Parallèlement, Bruxelles Formation, et “contrôle des chômeurs”. euros par mois pour une personne Communauté germanophone reçoi- le Forem, le VDAB et l’Arbeitsamt isolée). En outre, cette suppression vent les demandeurs d’emploi, les proposent des formations, acces- À l’heure où les négociations des moyens intervient alors que le orientent et servent d’intermédiaire sibles aux chômeurs pour les aider institutionnelles préalables à la for- chômeur doit remplir une nouvelle entre ceux-ci et les employeurs en à retrouver un emploi. mation d’un nouveau gouvernement série de tâches imposées par un collectant les offres d’emploi que envisagent de modifier la répar- nouveau contrat. Cela rend cette ceux-ci leur transmettent. Leur mis- Outre qu’elle mêle des dépenses tition des compétences entre les mission d’autant plus compliquée. sion première n’est pas de contrôler “passives” d’indemnisation des chô- niveaux de pouvoir en matière de Ce dispositif est dénommé par les chômeurs. Néanmoins, en vertu meurs et des mesures d’“ activa- gestion de l’emploi et du chômage, l’ONEm “activation du comporte- d’un accord de coopération conclu tion” de ceux-ci, cette architecture une clarification sémantique et ment de recherche d’emploi”. Dès en 2004 entre l’autorité fédérale, institutionnelle est pour le moins institutionnelle s’impose. ➔ ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be (11)
ALISATION RÉGION Répartition des en cause E. Corrélativement, les ou via des titres-services. Cela paraît pour le moins inexact, voire compétences employeurs sont collectivement signifie donc que l’ONEm pousse délibérément mensonger. Dans le Jusqu’en 1978, l’ONEm remplissait responsables de fournir du travail très concrètement vers des formes découpage institutionnel actuel, à la fois une fonction de placement aux salariés et les pouvoirs publics d’emploi précaire, parfois fort l’ONEm ne peut plus proposer des chômeurs et une fonction de doivent tout mettre en œuvre pour éloignées du contrat de travail à d’offres d’emploi aux chômeurs, contrôle de ceux-ci. À travers leurs assurer le plein-emploi et favoriser durée indéterminée et à temps les aider à rédiger un curriculum contacts quotidiens avec leurs la rencontre entre les offres d’em- plein qui était progressivement de- vitae ou les guider vers certains affiliés sans emploi dont le nombre ploi et les chômeurs. venu la norme en matière d’emploi. employeurs. Ce rôle revient aux ne cessait de croître, les syndicats Cela signifie également que des organismes régionaux et commu- constataient qu’il est malsain de Depuis 2004, les chômeurs critères relativement standardisés nautaires. L’“activation du com- tenter d’aider des gens tout en doivent démontrer qu’ils recher- et quantitatifs sont appliqués aux portement de recherche d’emploi” faisant planer sur eux le risque chent activement du travail. Cette chômeurs, indépendamment de ne peut dès lors être autre chose direct d’une sanction. Ils ont dès preuve qu’ils doivent fournir et le leur profil personnel ou de leur qu’un contrôle, quel que soit le lors fait pression sur les pouvoirs caractère contractuel de la relation situation familiale. Depuis 2004, le nom qu’on lui donne. publics pour que les fonctions de soulignent que la responsabilité nombre de sanctions prononcées placement et de contrôle soient de la situation de chômage et de s’est accru chaque année. La Implication de la réforme scindées et exercées par des ser- la capacité à retrouver un emploi recrudescence du chômage depuis institutionnelle projetée vices différents de l’ONEm. Quand pèse désormais essentiellement la crise de 2008, particulièrement En outre, ce n’est pas sous la “ le Forem, l’ORBEm (devenu au- contrainte d’une sanction que l’on jourd’hui Actiris) et le VDAB ont été peut obtenir de quelqu’un qu’il créés au niveau régional en 1989, l’ONEm a conservé les fonctions En cas de réforme, se forme utilement, mais en lui proposant un emploi convenable. de contrôle et de sanction, tandis que les organismes régionaux ont c’est sous la menace L’ONEm n’a plus le droit de faire cela. Et les organismes régionaux repris les missions de placement d’une sanction que les et communautaires de placement des chômeurs et, pour le VDAB, le Forem et Bruxelles Formation (ces chômeurs se présen- et de formation ne sont pas censés contrôler les chômeurs, deux derniers à partir de 1993), de formation professionnelle. tant aux services ré- même s’ils doivent transmettre certaines informations à l’ONEm gionaux de placement lui permettant de sanctionner les Aujourd’hui, en vertu de cette demandeurs d’emploi dans cer- division institutionnelle des tâches, devraient accepter taines conditions. Globalement, la l’ONEm ne peut donc pas remplir de missions de placement ou de d’effectuer certaines séparation des tâches adoptée en 1978 reste d’application. Mais les formation professionnelle. Il n’en démarches pour re- choses pourraient changer. a tout simplement ni le droit, ni la En effet, au milieu du mois vocation. Il n’en a pas non plus les chercher un emploi.” d’août 2010, les sept partis qui né- moyens. Ce n’est plus l’ONEm qui gocient une réforme institutionnelle collecte les offres d’emploi et les dans le cadre de la formation d’un transmet aux chômeurs. Dès lors, sur le chômeur lui-même et n’est en Flandre, va accélérer encore futur gouvernement fédéral sem- le dispositif d’“activation du compor- plus partagée par les employeurs ce mouvement. Puisqu’il y a moins blent s’être accordés sur le transfert tement de recherche d’emploi” géré et les pouvoirs publics. d’offres d’emploi, il va devenir de du “contrôle de la disponibilité des par l’ONEm ne peut légalement être plus en plus difficile de postuler chômeurs” de l’ONEm aux régions. autre chose qu’un contrôle portant Mais il y a plus. Quelles sont les au nombre d’offres prescrit. Les En cela, ils rejoignent le plan que sur le respect par les chômeurs de obligations que l’ONEm impose lors agences d’intérim refusent déjà la ministre fédérale de l’Emploi, leurs obligations. Or, en la matière, de la signature du contrat ? L’ONEm d’inscrire des chômeurs car elles Joëlle Milquet (cdH), avait déposé la réforme de 2004 a introduit un ne propose aucune offre d’emploi, savent qu’elles ne pourront rien sur la table du gouvernement en vrai changement de philosophie. ni aucune formation spécifique au leur donner. Et puisque les critères mai 2008 F. Que les négociations chômeur contrôlé. On l’a dit plus appliqués sont quantitatifs, les actuellement en cours aboutissent Accompagnement haut, ce n’est pas son rôle mais sanctions tombent mécanique- ou non, l’idée est donc dans l’air. ou contrôle ? celui des organismes régionaux ou ment. Non pas en raison du zèle Depuis 1945 (et auparavant quand communautaires de placement et de l’un ou l’autre facilitateur, mais Si cela advenait, le placement les caisses syndicales indemni- de formation. L’ONEm fait prendre parce que l’ONEm applique scrupu- des chômeurs d’une part, et le saient leurs affiliés au chômage), des engagements aux chômeurs : leusement ce que le gouvernement contrôle et la sanction de ceux-ci les chômeurs sont tenus d’ac- envoyer tant de candidatures spon- fédéral lui a demandé d’appliquer. d’autre part, se trouveraient à cepter toute offre d’emploi dit tanées, répondre à tant d’offres nouveau dans les mêmes mains, convenable. Ils peuvent être exclus d’emploi, s’inscrire dans tant Par conséquent, parler du à rebours de l’évolution institution- du droit aux allocations en cas d’agences de travail intérimaire, ou “contrôle de la disponibilité des nelle décrite plus haut. C’est donc de refus ou d’abus. Les syndicats s’inscrire pour travailler dans une chômeurs” en le qualifiant de sous la menace d’une sanction que n’ont jamais remis cette obligation agence locale pour l’emploi (ALE) mesure d’“accompagnement” les chômeurs se présentant aux (12) ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be
services régionaux de placement qu’inquiéter les défenseurs des l’IRES, n° 115, novembre 2008, pp. 52-63, disponibles sur http://www.ires.fr/. devraient accepter d’effectuer sans-emploi et, plus largement, ceux certaines démarches pour recher- de l’ensemble des travailleurs, qui C Sur ces différentes catégories de chô- meurs, voir Pierre Blaise, “Le chômage en cher un emploi – et non pas en ne pourront que pâtir collectivement Belgique”, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° choisissant, avec un conseiller, les de l’augmentation de la contrainte 1182-1183, 1987. initiatives leur convenant le mieux pesant sur les chômeurs G. D Geoffroy Matagne, “De l’“État social actif” pour retrouver du travail. Si un tel à la politique belge de l’emploi”, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1737-1738, 2001. système peut paraître séduisant, La confusion entre les termes “ac- Notons qu’en matière d’assurance-chômage, et convainc manifestement les compagnement”, “contrôle” et “ac- le passage de mesures “passives” vers des mesures “actives” s’est généralisé en Europe partisans de l’“ activation” des tivation”, qu’elle soit délibérée ou au cours des dernières années. Voir notam- chômeurs, la confusion des genres inconsciente, brouille le débat sur ment Florence Lefresne (éd.), Unemploy- ment benefit systems in Europe and North qu’il induirait provoquerait sans la réalité des politiques d’emploi et America : reforms and crisis, Bruxelles, doute rapidement une méfiance de lutte contre le chômage. Trans- IRES-ETUI, 2010. généralisée des demandeurs posée au domaine des réformes E Guy Vanthemsche, “De oorsprong van d’emploi à l’égard des services de institutionnelles, cette confusion de werkloosheidsverzekering in België : placement censés les aider, ce qui risque également de s’avérer bien vakbondskassen en gemeentelijke fondsen (1890-1914)”, Tijdschrift voor sociale ges- s’avèrerait contreproductif pour problématique. n chiedenis, 1985, vol. 11, n° 2, p. 145 ; Joeri lutter contre le chômage. Januarius, “De werkloosheidsverzekering in de naoorlogse welvaartstaat : een blik op de werking van het ABVV”, Vlaams marxistisch A Avant 1982, les jeunes chômeurs avaient tijdschrift, 2008, vol. 42, n° 1, p. 6. Une telle réforme, couplée à celle de droit à des allocations de chômage comme 2004, donnerait raison aux acteurs les autres demandeurs d’emploi. Cf. Paul F Sur les implications communautaires de Palsterman, “La notion de chômage involon- qui combattent depuis le début le taire (1945-2003)”, Courrier hebdomadaire, cette idée, voir Jean Faniel, “Nous ne serons pas le mauvais élève…”, Imagine demain le “contrôle de la disponibilité” et l’ont CRISP, n° 1806, 2003, pp. 21 et 43. monde, à paraître en janvier 2011. rebaptisé “chasse aux chômeurs”. B Sur les bases de ce système et ses G Voir Jean Faniel, “Renouer les liens entre En effet, comment serait-il encore évolutions, voir Jean Faniel, “Belgique. Le travailleurs avec et sans emploi”, in Jean système d’assurance-chômage : un particu- possible de soutenir que le recou- larisme en sursis ?”, Chronique internationale Faniel, Corinne Gobin, Carl Devos, Kurt Vandaele (coord.), Solidarité en mouvement. plage de la carotte et du bâton a de l’IRES, n° 108, septembre 2007, pp. Perspectives pour le syndicat de demain, 15-25, et “Belgique. L’assurance-chômage uniquement pour but d’aider les chô- entre pressions européennes et polémiques Bruxelles, Centrale générale/Amsab-Institut d’histoire sociale/ASP, 2009, pp. 239-247. meurs ? Au contraire, cela ne pourrait régionales”, Chronique internationale de ENSEMBLE! / N°70 / FÉVRIER 2011 / www.asbl-csce.be (13)
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