LES OISEAUX MARINS EN BRETAGNE - DOSSIER - 17 ESPÈCES NICHENT EN BRETAGNE
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
DOSSIER LES OISEAUX MARINS EN BRETAGNE N°6 - avril 2014 Les réponses UN RÉSEAU TRÈS STRUCTURÉ D’ORGANISMES SPÉCIALISÉS Fiche nature Les impacts 17 ESPÈCES NICHENT QUELLES MENACES EN BRETAGNE À TERRE…ET EN MER ? DE LA DÉLICATE GESTION DES GOÉLANDS URBAINS
Dossier n°6 - avril 2014 Les oiseaux marins en Bretagne DIRECTEUR DE PUBLICATION Ronan Lucas (GIP Bretagne environnement) SOMMAIRE ÉTAT DES LIEUX LES RÉDACTION Emmanuèle Savelli (GIP Bretagne environnement) Des effectifs plutôt stables ou qui augmentent P.4 OISEAUX MARINS EN COLL ABOR ATION Aurore Sterckeman Agence des aires marines protégées Bernard Cadiou FICHE NATURE 17 espèces nichent en Bretagne P.7 EN BRETAGNE Bretagne Vivante Gilles Bentz LES IMPACTS Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) Quelles menaces à terre… Michel Ledard et en mer ? P.16 Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement en Bretagne (Dreal Bretagne) Pascal Provost Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) Pierre Yésou Office national de la chasse et de la faune sauvage CRÉDITS PHOTOS Photo de couverture et édito Plongeon d’un fou de Bassan immature © Laëtitia Beauverger Goéland marin © Laëtitia Beauverger De la délicate gestion des goélands urbains P.19 CONCEPTION / RÉALISATION GR APHIQUE Stéphanie Vétier (GIP Bretagne environnement) QUE DIT LA LOI ? La réglementation CARTOGRAPHIE sur les oiseaux marins P.21 Emilie Massard (GIP Bretagne environnement) LES RÉPONSES Un réseau très structuré d’organismes spécialisés P.23 Par sa situation géographique et la diversité de ses milieux littoraux, la Bretagne est une terre d’accueil privilégiée pour les oiseaux marins. Ce dossier est édité par le GIP Bretagne environnement | 6-A rue du Bignon 35000 Rennes |Tél: 02 99 35 45 80 C’est d’ailleurs la première région de France, tant par la diversité Fax: 02 99 41 73 54 |contact@bretagne-environnement.org | www.bretagne-environnement.org des espèces qui s’y reproduisent régulièrement que par leur nombre. Tous droits réservés © GIP Bretagne environnement, 2014 Les dossiers sur l’environnement en Bretagne présentent les enjeux et actions engagées en matière d’environnement dans la région. Ils sont réalisés par le GIP Bretagne environnement en collaboration avec des experts scientifiques et techniques. 2 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 3
Le dernier dénombrement 50% des oiseaux national remonte marins nicheurs en France se trouvent à 2009-2011 en Bretagne pendant leur migration. La pénin- sule bretonne est en effet située sur des couloirs de migration impor- Parce qu’ils limitent les risques de dérangement et de prédation. 3% des espèces tants entre le nord de l’Europe et Une partie des nicheurs s’installe d’oiseaux État des lieux l’Atlantique, mais aussi entre le sud sur les falaises continentales du cap du monde de l’Europe, voire l’hémisphère aus- Fréhel, de Plouha, de la presqu’île sont marines DES EFFECTIFS PLUTÔT STABLES tral, et le nord. de Crozon et du cap Sizun. Les oi- © Laëtitia Beauverger seaux marins ne se reproduisent pas OU QUI AUGMENTENT Des îles et îlots inhabités à l’intérieur des terres dans notre région, à l’exception des milieux Comptés tous les 10 ans urbains colonisés par les goélands Comptage de macareux moines à Malban (Réserve des Sept-Îles) Hormis Ouessant, Groix et Belle-Île- depuis une quarantaine d’années et Depuis 1969-1970, des ornitho- en-Mer, les oiseaux marins nichent de quelques marais accueillant des logues comptent tous les 10 ans plutôt sur des îles et îlots inhabités. sternes ou des grands cormorans. les populations d’oiseaux marins L a côte Force est de constater que les oi- bretonne seaux marins semblent apprécier Les oiseaux marins nicheurs sur la période 2009 -2012 accueille de la Bretagne. Probablement pour son littoral étendu et la variété de nombreux oiseaux marins. Ils viennent y nicher, hiverner ses milieux naturels côtiers. Avec dix-sept espèces qui s’y repro- Les ou seulement y duisent régulièrement, cette situa- tion est exceptionnelle en France. oiseaux séjourner lors d’une halte migratoire. Les colonies installées dans la ré- gion regroupent plus de la moitié marins La situation des des oiseaux marins nicheurs de la métropole. D’ailleurs certaines nichent dix-sept espèces qui s’y reproduisent espèces ne se reproduisent qu’en Bretagne [1]. plutôt sur régulièrement est satisfaisante. Pour Sur des couloirs des îles la majorité d’entre de migrations et îlots elles, les effectifs sont stables ou Et puis, il y a tous ces oiseaux marins inhabités qui ne nichent pas mais qui fréquen- augmentent. tent tout de même la région. Cer- tains parmi les dix-sept espèces ni- viennent en Bretagne entre deux cheuses sont encore immatures [2], saisons de reproduction, à l’instar ou n’ont pas trouvé de partenaire du puffin des Baléares qui se re- ou encore attendent qu’une place produit en Méditerranée. Et enfin, se libère dans une colonie. D’autres d’autres hivernent ou font une halte © Données : Orom • Fonds : © IGN BDCarto ® 2010, © IGN Geofla ® Départements • Infographie : GIP Bretagne environnement - Avril 2014 4 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 5
Qu’est-ce qu’un oiseau marin ? Par définition, un oiseau marin est étroitement asso- cié au milieu marin pendant une partie importante Fiche nature de son cycle annuel. Il exploite régulièrement ce mi- lieu pour s’alimenter et se reproduit principalement sur les îles et les zones côtières. Sous cette appella- tion sont regroupés les manchots, albatros, fulmars, 17 ESPÈCES NICHENT EN BRETAGNE damier, pétrels, puffins, océanites, prions, paille- en-queue, pélicans, cormorans, frégates, labbes, laridés (goélands, mouettes, sternes, noddis), bec- en-ciseaux, et alcidés (guillemots, pingouins, maca- reux, mergules, alques). D’autres espèces, elles aussi liées au milieu marin, y sont parfois associées (canards L marins, plongeons, grèbes et phalaropes). Cela repré- © Laëtitia Beauverger sente au total un peu plus de 300 espèces, soit 3 % e vocable oiseaux Chez 98 % des espèces d’oiseaux marins, la reproduction des espèces d’oiseaux dans le monde. marins rassemble se fait en colonie. En Bretagne, ces colonies comptent de quelques individus à plusieurs milliers d’oiseaux. La pé- Goéland marin des espèces riode de reproduction varie beaucoup selon les espèces, véritablement marines le cormoran huppé détenant le record avec près de 11 et d’autres plus terrestres. mois entre le cantonnement des couples les plus pré- coces et l’émancipation des derniers jeunes ! Différentes nicheurs en France [3]. Le dernier Globalement que quelques couples nicheurs de Voici un tour d’horizon espèces peuvent coexister sur une même colonie, ce qui dénombrement national remonte satisfaisant sterne de Dougall. Pour combien de des espèces qui se provoque une compétition spatiale et peut favoriser la à 2009-2011. Les informations sont centralisées dans une base de don- nées nationale gérée par le Groupe- La situation en Bretagne est res- tée globalement satisfaisante sur la temps encore ? ▪ [1] C’est le cas du puffin des Anglais, de la reproduisent régulièrement prédation entre oiseaux marins, notamment de la part des goélands. Ces derniers s’attaquent aux œufs, pous- sins et même aux adultes de puffins des Anglais, d’océa- ment d’intérêt scientifique « Oiseaux période 2009-2012 ; la plupart des sterne de Dougall, du guillemot de Troïl, du petit pingouin et du macareux moine. en Bretagne. nites tempêtes ou encore de sternes et de mouettes tri- marins » (Gisom). espèces ont des effectifs stables ou [2] La plupart des espèces d’oiseaux marins dactyles, et d’autres goélands. se reproduisent à partir de 3-4 ans, parfois en augmentation. Les populations de même seulement après 10 ans. sterne de Dougall et de macareux [3] Pour certaines espèces rares ou mena- moine en revanche régressent. Ce cées, les dénombrements de population sont annuels. sont des espèces classées en danger Des espèces [4] D’après la liste rouge des espèces mena- critique d’extinction à l’échelle na- cées en France, Union Internationale pour la Conservation de la Nature – Muséum natio- tionale [4]. Les effectifs de goéland La sterne argenté reculent également. Mais nal d’histoires naturelles (2011). fidèles à leurs colonies dans ce cas, il s’agit probablement Bibliographie de Dougall ▪ Cadiou B. (2002) Les oiseaux marins d’un rééquilibrage naturel suite à nicheurs de Bretagne, Éditions Biotope la disparition des décharges à ciel ▪ Cadiou B., Jacob Y., Provost P., Quénot F., et le ouvert qui fournissaient artificielle- ment des ressources alimentaires à Yésou P. et Février Y. (2013) Bilan de la sai- son de reproduction des oiseaux marins en Bretagne en 2012. Rapport de l’Observa- macareux cette espèce opportuniste. toire régional des oiseaux marins en Bre- tagne, Brest, 40 p. Plus ou moins près de la côte moine sont ▪ Cadiou B., Pons J.M. et Yésou P. (2004) La situation du macareux est plus Oiseaux marins nicheurs de France métro- politaine (1960-2000). Biotope, Mèze. 118 p. dans une précaire. Car dans la région, l’es- La plupart des oiseaux marins sont très pèce se trouve en limite méridio- fidèles à leur colonie, tout au moins tant situation nale de son aire de répartition. Et le changement climatique modifie que les échecs de la reproduction ne sont pas massifs. Et les jeunes en âge de se reproduire re- précaire la répartition de ses ressources alimentaires. Enfin, il ne reste plus Fou de Bassan © Laëtitia Beauverger tournent souvent dans leur colonie natale ou à proximité. 6 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 7
puffin des Anglais et l’emblématique macareux moine font L’océanite tempête 98% partie de cette catégorie. Ils vivent la plupart du temps au large dans la zone océanique, pour partie bien au-delà du Avec un peu moins de 40 cm d’envergure et seulement plateau continental. 25 g, l’océanite tempête est le plus petit et le plus léger Des oiseaux de D’autres comme le guillemot de Troïl, le petit pingouin ou des oiseaux marins se reproduisant en Europe. Oiseau de mer par excellence, il hiverne principalement au large de des oiseaux marins mer qui nichent… le fou de Bassan demeurent dans la zone côtière qui sur- plombe le plateau continental, souvent plus poissonneuse. l’Afrique du Sud. Il ne revient à terre que pour se repro- duire, et uniquement de nuit. nichent en colonies dans des terriers Quant au littoral, il est plutôt réservé aux cormorans et aux goélands qui restent souvent en vue des côtes pendant la journée et reviennent à terre pour passer la nuit. Ses mœurs nocturnes, le fait qu’il niche dans des ter- riers et la présence de nombreux oiseaux non-repro- ducteurs sur les colonies rendent les dénombrements 345 couples de La durée de vie de ces espèces peut dépasser plusieurs Le fulmar boréal difficiles. C’est l’oiseau marin le plus difficile à recenser. fulmars boréaux dizaines d’années. De façon générale, le taux annuel de Seule une inspection minutieuse des terriers permet de survie des adultes est supérieur à 75 %. Leur fécondité en Le fulmar boréal a une silhouette qui peut porter à confu- le repérer. L’effectif breton d’océanites serait d’environ revanche est plutôt faible. Selon les espèces, les femelles pondent 2 à 3 œufs, mais pour certaines d’entre elles un seul œuf. Seuls les cormorans pondent parfois jusqu’à 6 sion avec le goéland argenté, bien qu’il soit plus petit (1,10 m d’envergure au lieu d’1,40 m). On le reconnaît à ces narines tubulaires proéminentes et à la rigidité de ses 910 couples [1]. Actuellement, l’espèce est présente sur- tout en Finistère, sur une dizaine de colonies. 910 couples œufs. ailes en vol plané. Il s’alimente en haute mer, principale- Le puffin des Anglais d’océanites tempêtes ment en bordure du plateau continental. Et il consomme Quand on considère les 17 espèces d’oiseaux marins ni- surtout du zooplancton et des céphalopodes. L’espèce Autre oiseau tout aussi difficile à observer : le puffin des chant régulièrement en Bretagne, on constate qu’elles s’éloignent plus ou moins de la côte pendant l’année pour se nourrir. exploite aussi les rejets de pêche derrière les chalutiers. L’espèce compte parmi les oiseaux marins les plus Anglais. Sa population bretonne serait comprise entre 130 et 246 couples. Lui aussi est nocturne et lui aussi niche dans un terrier. Mais à la différence de l’océanite et à l’instar du 130 à 246 couples de abondants de l’hémisphère nord, avec 5 à 7 millions de macareux moine, il est capable de le creuser lui-même, puffins des Anglais Chacune a sa propre stratégie de pêche. Certaines se couples, dont moins de 4 millions en Europe. Mais seule- avec ses pattes et son bec. Assez petit (80 cm d’envergure), nourrissent en surface, d’autres plongent à une profon- ment 345 couples environ nichent en Bretagne. c’est un remarquable voilier alternant battements d’ailes et deur plus ou moins grande. Il y a le club de celles qui ne vol plané au ras des vagues. touchent terre que pour se reproduire. Le fulmar boréal, le Grand voyageur, le puffin des Anglais quitte l’Atlantique réaux nord en automne pour entamer un long périple qui Fulmars bo l’amène sur les côtes d’Amérique du Sud, et notamment du Brésil, principal quartier d’hivernage de l’espèce. Celle-ci reste cependant présente en hiver, mais en faible auverger nombre, dans les eaux européennes. Les deux plus im- © Laëtitia Be portantes colonies bretonnes sont situées aux Sept-Îles (Côtes-d’Armor) et dans l’archipel de Molène (Finistère). L’océanite tempête est l’oiseau Océanite te mpête marin le plus difficile à recenser e Vivante) diou (Bretagn 8 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 © Bernard Ca www.bretagne-environnement.org • 9
Beauverger © Laëtitia En 1950,il y avait probablement plus de 7 000 couples de macareux en Bretagne ouin Petit ping Le macareux moine 164 à 187 couples de Le macareux moine est surnommé le « perroquet de mer » en raison de son bec tricolore. Il est d’ailleurs plus connu Guillemots de Troïl avec les couleurs vives qu’il arbore en période de repro- macareux moines duction qu’avec sa livrée hivernale plus terne. Comme le puffin des Anglais, il pond son œuf unique au fond d’un En période inter-nuptiale, les guillemots se dispersent 287 à 298 © Laëtitia Be auverger terrier, qu’il creuse le plus souvent lui-même. probablement vers le sud. Les adultes restent en géné- ral à proximité des colonies. Les plus jeunes, par contre, En France, ses colonies sont situées en Bretagne et prin- s’éloignent davantage, jusqu’en Méditerranée pour cer- Le petit pingouin couples de cipalement aux Sept-Îles (Côtes-d’Armor). C’est la limite tains originaires des colonies de mer d’Irlande et de la guillemots de Troïl méridionale de son aire de reproduction européenne. Manche. L’espèce ne fréquente que rarement la très haute Le petit pingouin (appelé aussi pingouin torda) est, avec la En 1950, il y avait probablement plus de 7 000 couples de mer, au-delà du plateau continental. La baie du Mont- sterne de Dougall, l’oiseau marin nicheur le plus rare et le 46 à 48 macareux, répartis sur une quinzaine d’îlots bretons, et Saint-Michel est une zone importante pour le stationne- plus menacé de France. S’il fréquente les mêmes milieux essentiellement concentrés aux Sept-Îles. En 2012, il n’en ment de l’espèce en juillet. On y observe des rassemble- littoraux que le guillemot, le pingouin occupe cependant restait qu’entre 164 et 187 couples. ments d’adultes accompagnés de jeunes, probablement des sites moins exposés (fissures, amas de blocs) où il couples de originaires du cap Fréhel, voire des îles anglo-normandes. niche souvent en colonies lâches voire en couples isolés. petits pingouins Ce déclin rapide peut sans conteste être attribué pour Ses populations sont difficiles à recenser. Et comme elles partie aux pollutions par les hydrocarbures, en particulier En Bretagne, la population de guillemots de Troïl est sont très faibles – il n’y a que 47 couples reproducteurs aux marées noires du Torrey Canyon et de l’Amoco Cadiz. d’environ 293 couples. Depuis le milieu des années 2000, en Bretagne, il est difficile de bien comprendre sa bio- Il semble cependant que des modifications de l’environne- les effectifs sont relativement stables pour la colonie du logie de reproduction ou de connaître précisément les ment marin dans l’Atlantique nord, liées au réchauffement cap Fréhel (Côtes-d’Armor). Ils ont augmenté aux Sept- dates de retour aux colonies. des eaux, y aient aussi contribué à une large échelle. Îles. Et les autres colonies déclinent. Globalement, l’es- pèce n’est pas considérée comme menacée à l’échelon Lorsqu’elle ne niche pas, l’espèce se disperse sur la La concentration des colonies sur les îlots des Sept-Îles européen. Mais son statut en France est bien précaire. côte du golfe de Gascogne, et hiverne régulièrement en rend la population bretonne de macareux fragile. Outre Pour mémoire, la marée noire de l’Erika a entraîné la Méditerranée occidentale. Les plus jeunes parcourent la compétition spatiale avec les fous de Bassan sur Rou- mort de plus de 110 à 150 000 oiseaux durant l’hiver les plus grandes distances. Les adultes des colonies de zic, elle est de plus en plus vulnérable à toute menace 1999-2000, dont une très large majorité de guillemots mer d’Irlande hivernent soit sur place soit en Manche. extérieure, de type marée noire ou modification des res- originaires de colonies du nord de l’Europe (surtout des La Bretagne représente sa limite méridionale de repro- sources alimentaires. îles britanniques). duction. Et les Sept-Îles abritent la plus grosse colonie de la région. Le guillemot de Troïl Le guillemot de Troïl est un plongeur hors-pair, capable de pêcher à plus de 100 mètres de profondeur. L’espèce La marée noire de l’Erika niche perchée sur des falaises maritimes. Elle y pond un a entraîné la mort de plus de 110 à 150 000 oiseaux œuf unique à même la roche, sans la moindre ébauche de nid, entre le début avril et la mi-juin. Macareux moine durant l’hiver 1999-2000 © Laëtitia Beauverger 10 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 11
Aucune menace particulière ne pèse sur l’espèce, mais Évolution de l’effectif annuel de sternes de Dougall entre 1977 et 2012 le fait qu’il n’y ait qu’une seule colonie importante en France [2] accroît sa vulnérabilité face à des événements catastrophiques comme les marées noires. Ce risque est Le fou de Bassan accentué par le fait que bon nombre des colonies euro- péennes sont à proximité des grandes voies de navigation est le plus grand maritime. Il en est de même pour les zones de pêche ex- ploitées par l’espèce. L’utilisation fréquente de débris di- des oiseaux vers (en particulier bouts de filets, cordes, etc., jetés à la mer par des pêcheurs et des plaisanciers) pour construire de mer leurs nids entraîne chaque année la mort d’adultes et de poussins, empêtrés dans ces cordages. Mais globale- de nos côtes ment, cette mortalité indirectement due à l’activité hu- maine reste limitée. La mouette tridactyle Le fou de Bassan La mouette tridactyle est souvent confondue avec les Avec 1,70 m d’envergure, le fou de Bassan est le plus goélands malgré sa plus petite taille. Elle niche sur des © Orom, 2014 grand des oiseaux de mer de nos côtes. On le reconnaît falaises escarpées du littoral où elle côtoie le cormoran sans ambiguïté grâce à son corps fuselé et ses longues huppé, et localement le goéland argenté, le fulmar boréal les colonies bretonnes déclinent sous l’effet du déran- ailes. Dès lors qu’ils ont atteint leur quatrième année, les ou le guillemot de Troïl. En Bretagne, l’espèce n’a pas co- gement et d’une prédation par d’autres oiseaux (faucon adultes ont un plumage blanc, avec l’extrémité des ailes lonisé de structure artificielle (phare, jetée ou bâtiment), pèlerin, corneille noire, goélands, grand corbeau). noire et une tête jaunâtre. comme c’est le cas dans d’autres régions de France ou dans d’autres pays. Les sternes L’espèce niche en colonie très dense (184 nids/100 m 2 sur les zones les plus peuplées aux Sept-Îles). Au point En dehors de la période de reproduction, l’espèce vit en Quatre espèces de sternes nichent annuellement en Bre- que les ornithologues doivent utiliser des photographies haute mer en Atlantique nord, en Méditerranée occiden- tagne. Elles passent pour la plupart l’hiver en Afrique. La aériennes pour leur recensement. Les fous se sont instal- tale, voire pour certains individus du cap Sizun sur les sterne caugek est la plus grande sterne de nos côtes, alors Sterne pierregarin lés sur l’île Rouzic (archipel des Sept-Îles) depuis 1935 au côtes occidentales du Groenland. Moins d’un cinquième que la sterne naine est la plus petite. La sterne de Dougall © Laëtitia Beauverger moins. De 30 nids en 1939, ils sont passés à près de 20 320 des effectifs nationaux niche en Bretagne (964 couples est l’espèce d’oiseau marin nicheur la plus rare et la plus nids en 2012 ! reproducteurs en 2012). C’est d’ailleurs depuis la Bre- menacée. La quatrième espèce de sterne présente dans la tagne que l’espèce a essaimé dans d’autres régions. Mais région est la sterne pierregarin. auverger alors que l’espèce gagne du terrain en Manche orientale, L’ensemble du littoral breton regroupe une quinzaine © Laëtitia Be de secteurs qui hébergent une ou plusieurs colonies de Fou de Bas sternes. Il s’agit d’oiseaux très sensibles au dérangement san et à la prédation. Depuis 1950, leurs populations ont grandement fluctué. La situation actuelle en Bretagne est plutôt satisfaisante pour les sternes caugek, pierregarin et Mouette trid actyle naine, mais critique pour la sterne de Dougall. 20 320 couples de fous de Bassan Les sternes 964 passent l’hiver couples de mouettes tridactyles en Afrique auverger © Laëtitia Be 12 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 13
auverger © Laëtitia Be er Beauverg © Laëtitia Omnivores et opportunistes, Puffin des B aléares les goélands er Beauverg se nourrissent Et aussi des oiseaux marins © Laëtitia migrateurs aussi bien sur La Bretagne compte aussi des populations le littoral qu’à Goéland argenté importantes d’oiseaux marins migrateurs, qui passent par les eaux bretonnes ou y séjournent l’intérieur des Le grand cormoran en dehors de leur période de reproduction. C’est terres an le cas du puffin des Baléares. Entre deux saisons Grand cormor de reproduction en Méditerranée, il passe l’été Le grand cormoran est une espèce aux mœurs peu au large de la Bretagne. L’espèce est considérée connues en Bretagne. Depuis 1970, date de sa décou- en danger critique d’extinction. Alors qu’elle se Les goélands verte sur l’île des Landes en Ille-et-Vilaine, elle a poursui- cantonnait initialement au sud de la Bretagne, 890 vi son expansion sur le littoral nord de la Bretagne, avec la elle remonte progressivement vers le nord Autrefois confinés au littoral, les goélands argentés se colonisation de nouveaux îlots jusqu’à la pointe du Finis- chaque été. Le changement global qui touche le reproduisent désormais à l’intérieur des terres. Certains tère au début des années 1990. Une nouvelle étape a été golfe de Gascogne pourrait en être la raison. Car couples de ont même choisi l’Île-de-France, à 130 km de la mer ! En franchie depuis 2000, avec la nidification arboricole sur il modifie la répartition des ressources alimen- grands cormorans Bretagne, c’est dans la région de Rennes qu’on trouve les des îlots du golfe du Morbihan. taires de l’espèce. colonies les plus continentales. 5 950 La population bretonne est de l’ordre de 890 couples, Omnivore et opportuniste, l’espèce se nourrit aussi bien répartis sur une vingtaine de colonies insulaires ou conti- vers la mi-juin, exceptionnellement en juillet. La popula- sur le littoral que plus à l’intérieur des terres. Le goéland nentales. La tendance récente semble être à la stabilisa- tion mondiale de cormoran huppé serait de l’ordre de couples de argenté est un prédateur pour les oiseaux marins (y com- tion, au moins sur les colonies les plus anciennes en Bre- 78 000 couples, dont la quasi-totalité concentrée en Eu- cormorans huppés pris les œufs et nichées de ses congénères). tagne Nord. Les effectifs continuent de s’accroître sur les rope. En Bretagne, l’espèce est présente sur l’ensemble colonies d’installation récente, à la pointe du Finistère et du littoral et les effectifs sont d’environ 5 950 couples. Contrairement aux goélands argenté et marin, le goéland dans le Morbihan. brun peut être migrateur. Les oiseaux des populations oc- Alors que les diverses espèces d’oiseaux marins font l’ob- cidentales se dispersent principalement sur le littoral de Le grand cormoran est très sensible au dérangement et jet d’un suivi fin sur leurs sites de nidification, leur répar- la Manche, du golfe de Gascogne, atteignant les côtes du les colonies doivent être protégées par des interdictions tition en mer et leur usage du milieu marin restent encore nord-ouest de l’Afrique. Lors de la migration post-nuptiale, plusieurs milliers d’individus transitent et stationnent plus ou moins longtemps sur le littoral de la baie d’Audierne de débarquement. Si des captures accidentelles dans les filets sont parfois constatées, elles restent limitées. Et l’espèce semble être capable d’éviter ces engins de peu connus. [1] Année de référence : 2012 ▪ [2] Il existe une petite colonie en Normandie et quelques couples isolés (Finistère sud). pêche, contrairement à d’autres oiseaux marins. en Méditerranée. Bibliographie Le goéland marin est plus grand et d’allure plus massive que Le cormoran huppé ▪ Cadiou B. (2002) Les oiseaux marins nicheurs de Bretagne, Éditions les goélands argentés et bruns. Il s’en distingue aussi par la Biotope couleur plus sombre du dessus de ses ailes et de son dos. Le cormoran huppé est nettement plus petit que le grand ▪ Cadiou B., Jacob Y., Provost P., Quénot F., Yésou P. et Février Y. (2013) Bilan de la saison de reproduction des oiseaux marins en Bretagne en C’est un redoutable prédateur, prélevant œufs, poussins et cormoran, et s’en distingue aussi par une huppe caracté- 2012. Rapport de l’Observatoire régional des oiseaux marins en Bre- jeunes des autres espèces, allant même parfois jusqu’à s’at- ristique qui n’apparaît qu’au début de la période de repro- tagne, Brest, 40 p. ▪ Yésou P., Barzic A., Wynn R. B. et Le Mao P. (2007) « La France est taquer à des cormorans huppés, et capturant chaque année duction. La saison de reproduction de l’espèce est très éta- responsable de la conservation du puffin des Baléares Puffinus maure- plusieurs centaines d’océanites tempêtes lors de leur venue lée : près de onze mois entre le cantonnement des couples tanicus. » Alauda 75 pp. 287-289 nocturne sur les colonies de l’archipel de Molène (Finistère). les plus précoces et l’émancipation des derniers jeunes. ▪ Bretagne vivante – SEPNB (2012) Les oiseaux dans les zones de pro- tection spéciale en Bretagne : Effectifs, menaces et gestion. Synthèse Les premiers œufs sont pondus dès février, les derniers régionale (Étude 2003-2006), Penn Ar Bed n°211 Duo de goélands argentés © Laëtitia Beauverger 14 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 15
accidentellement par des engins de pêche. Les espèces comme les sternes et les goélands qui se nourrissent en surface sont plus sensibles aux appâts des palangres, lors de leur mise à l’eau. Alors que les guillemots de Troïl, les petits pingouins ou encore les cormo- rans huppés, qui plongent plus pro- fondément pour capturer leurs proies, risquent plutôt de se faire piéger dans des filets. Les activités de pêche ont aussi des conséquences indirectes sur les popu- lations d’oiseaux marins. Elles peuvent Les impacts diminuer les ressources alimentaires disponibles soit lorsqu’il y a sur- QUELLES MENACES À TERRE... pêche, soit aussi et paradoxalement lorsque les rejets de pêche diminuent © Marie-Josée Helias ET EN MER ? (suite à une réduction de l’effort de pêche ou au changement des tech- niques de pêche, etc.). Fous de Bassan morts dans un filet de pêche L’impact des déchets P Les divers déchets plastiques ou arce qu’ils suivent Ce n’est pas un hasard si les oiseaux Prédateurs Il représente une menace impor- autres, issus des activités de pêche, régulièrement marins nichent sur des falaises ou d’ici et d’ailleurs tante pour la conservation des peuvent également avoir un im- les colonies, des îlots inhabités, ou encore, pour oiseaux marins en Bretagne. Des pact négatif sur les oiseaux marins. certains goélands, sur des toits ur- Les oiseaux marins installent aussi colonies de sternes sont régulière- les scientifiques bains inaccessibles. Ils ont besoin leurs colonies de façon à en limiter ment sévèrement touchées par de identifient bien les de paix et de tranquillité pendant l’accès aux prédateurs. Lorsqu’ils telles attaques et d’autres espèces différentes pressions auxquelles les oiseaux leur période de reproduction. Et ils supportent difficilement le déran- ne viennent pas des airs (corneille noire, grand corbeau, goélands ou peuvent aussi être impactées (cas par exemple d’une colonie d’océa- Ils ont besoin de paix marins nicheurs sont soumis gement occasionné par des randon- neurs, des pêcheurs à pied ou les ac- faucon pèlerin), ils sont terrestres (rat noir, renard et fouine). nites tempêtes à Camaret, ou encore des cormorans huppés au cap Sizun et de tranquillité lorsqu’ils sont à terre en Bretagne. tivités nautiques - pour ne citer que quelques exemples de loisirs et de Il faut aussi désormais compter avec ou en baie de Morlaix). pendant la reproduction sports de pleine nature qui se sont de nouvelles espèces, introduites Captures accidentelles Mais c’est la grande fortement développés sur le littoral par l’homme et devenues invasives. inconnue dès lors que breton depuis cinquante ans. Le rat surmulot s’est ainsi répandu Les oiseaux marins doivent aussi l’on s’intéresse à sur les îles via des bateaux. Quant au affronter des périls en mer. Et si les leur vie en mer. Ponte abandonnée vison d’Amérique, il s’est échappé de scientifiques ont une assez bonne idée fermes d’élevage. de ce qui se passe sur les colonies bre- DE LA DÉLICATE Les espèces les plus sensibles au dérangement sont les sternes, mais Ce petit carnivore est redoutable pour tonnes, il est actuellement très difficile d’évaluer les menaces au large. GESTION DES toutes les espèces y sont sensibles. En cas d’alerte, les oiseaux aban- les oiseaux marins. C’est un très bon na- geur qui peut atteindre des colonies si- Les informations disponibles dans la GOÉLANDS donnent la ponte voire la colonie, ce tuées à un kilomètre de la côte. Et il est région suggèrent que, chaque année, URBAINS qui réduit à néant la production de capable d’anéantir en une seule incur- des centaines d’oiseaux (notamment jeunes pour l’année. sion une colonie de plusieurs dizaines des alcidés et des cormorans), et peut- p.19 voire centaines de couples d’oiseaux. être plus, pourraient être capturés 16 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 17
Les effets des polluants sur la fertilité L ou la survie des oiseaux marins sont es goélands mal connus. Il n’en demeure pas moins que les oiseaux en ingèrent, en Bretagne comme en témoignent les fortes semblent préférer Chaque année, des concentrations en polluants relevées de plus en plus la vie citadine à la vie marine. centaines d’oiseaux dans des œufs d’océanites tempêtes dans l’archipel de Molène. Au point que les pourraient être capturés Un mazoutage colonies urbaines pour les goélands accidentellement par discret mais continu argentés pourraient un jour devenir un des engins de pêche Enfin, même si les grandes marées noires qui ont eu lieu en Bretagne élément important restent des accidents rares [2], de leur conservation. elles ont particulièrement touché certaines populations d’oiseaux. 30 DE LA DÉLICATE GESTION De nombreux couples récupèrent Ainsi, ce sont environ 150 000 de gros déchets en mer ou sur la oiseaux, pour l’essentiel des oiseaux oiseaux côte pour la construction des nids. Les scientifiques ont noté des cas marins hivernants, qui sont morts suite au naufrage de l’Erika le 12 DES GOÉLANDS URBAINS mazoutés d’adultes ou de poussins morts em- décembre 1999. Le guillemot de Troïl chaque année berlificotés dans ces déchets. Les représentait plus des trois-quarts petits débris en plastique posent des victimes chez les oiseaux marins. sont soignés aussi problème. Car les oiseaux les Cela peut paraître difficile à croire, au centre de soin ingèrent [1], ce qui peut avoir des En dehors de ces accidents, mais il fut une époque - au début de de l’Île Grande effets sur leur survie. la pollution marine par les XXe siècle - où les couples nicheurs © Yann Jacob (Bretagne vivante) hydrocarbures existe tout au de goélands en France étaient aussi long de l’année (par dégazage rares que peuvent l’être ceux du et déballastage), provoquant un macareux moine aujourd’hui. Et mazoutage discret mais continu de puis, leurs effectifs ont fait un bond centaines d’oiseaux, notamment spectaculaire pendant les deux les alcidés. Le centre de soins des premiers tiers du XXe siècle. Jusqu’à Goélands urbains oiseaux blessés de l’Île Grande atteindre leur maximum à la fin des recueille aujourd’hui en moyenne années 1970. 30 oiseaux mazoutés par an [3]. C’est 10 fois moins qu’avant 2000, Les goélands sont des espèces été parmi les premières villes grande part des ressources alimen- année de la marée noire de l’Erika. opportunistes. Elles ont profité concernées. taires d’origine humaine (suppres- Probablement parce que les de mesures de protection [1], et sion des décharges à ciel ouvert, ges- condamnations pour rejet volontaire de l’augmentation de ressources Des goélands de moins tion des déchets agro-alimentaires, d’hydrocarbure en mer ont eu un alimentaires d’origine humaine en moins marins réduction des rejets de pêche) effet dissuasif. ▪ (décharges, rejets de pêche et de l’industrie agro-alimentaire). L’arrivée des goélands en ville a créé des nuisances sonores et des dégra- s’accompagne d’une baisse globale des effectifs de goélands argentés et bruns [3]. Le goéland marin ne [1] La convention Ospar a étudié la teneur en particules de matière plastique dans l’estomac En 1978, il y avait environ 64 000 dations que les communes essaient semble pas encore concerné. du fulmar boréal, notamment en Manche. couples de goélands argentés en de limiter par des campagnes de [2] Une dizaine d’accidents entre 1967 (Torrey Canyon) et 2007 (MSC Napoli) qui ont eu un France. Cette expansion a saturé les régulation (stérilisation des œufs). Il s’agit en quelque sorte d’un réé- impact sur les côtes bretonnes. sites naturels pour la reproduction. Comme toutes les espèces d’oiseaux quilibrage de la situation puisque [3] Sauf en 2007, en raison de la pollution marins sont protégées (y compris Si bien que les goélands ont la nourriture s’est faite plus rare. © Gilles Bentz accidentelle du MSC Napoli. commencé à s’aventurer en ville les goélands), il faut une dérogation Aujourd’hui, il y a entre 26 900 et Bibliographie pour y construire leurs nids. Saint- pour réaliser de telles opérations 28 300 couples de goélands argen- Macareux moine mort mazouté ▪ Cadiou B. (2002) Les oiseaux marins nicheurs de Bretagne, Éditions Biotope Malo, Morlaix et Saint-Brieuc ont [2]. Aujourd’hui, la disparition d’une tés en Bretagne. 18 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 19
De plus en plus de colonies urbaines L’engouement des goélands pour 64 000 couples de goélands colonies urbaines 40 les toits urbains ne faiblit pas, et ceci malgré les campagnes de argentés en France de goélands régulation. En effet, en les dispersant en 1978 en Bretagne progressivement hors des limites des quartiers où se mènent des campagnes de contrôle, les opérations de stérilisation des bien moins bonne qu’en milieu termes d’effectifs nicheurs, plusieurs œufs contribuent à l’implantation urbain. Seules les colonies urbaines villes comptent déjà parmi les plus et au développement de nouvelles atteignent le seuil de 1,3 à 1,5 jeunes importantes colonies de goélands colonies urbaines dans d’autres quartiers et d’autres communes. On estime qu’il y aurait une quarantaine par couple, en-dessous duquel la population de goélands argentés ne serait plus stable. argentés. [1] Au XIXe siècle, on consommait des œufs et ▪ Que dit la loi ? des poussins. Des adultes étaient tués pour la de colonies urbaines en Bretagne plumasserie ou chassés. aujourd’hui. Trois espèces de goélands s’y reproduisent : l’argenté, Ce constat expliquerait-il la désaffection des goélands pour [2] Protégé par la loi en France, les goélands peuvent faire l’objet de régulations après LA RÉGLEMENTATION © Laëtitia Beauverger dérogation du préfet de département. le brun et le marin. les colonies en milieu naturel ? L’absence d’étude approfondie [3] Des observations analogues ont été faites en Grande-Bretagne. [4] Au moins 80 villes françaises sont SUR LES OISEAUX MARINS Rééquilibrage ou sur la comparaison de l’écologie concernées par ce phénomène sur la façade déclin ? alimentaire des goélands urbains Manche-Atlantique. Panneau d’information sur l’île aux Moines (Réserve des Sept-Îles) et des goélands insulaires ne Bibliographie Les effectifs de goélands argentés permet pas de disposer de tous les ▪ Cadiou B. (2002) Les oiseaux marins nicheurs semblent globalement toujours en éléments de réponse. Quoi qu’il en L de Bretagne, Éditions Biotope augmentation dans les colonies soit les effectifs urbains continuent ▪ Cadiou B., Pons J.-M. et P. Yésou (éds) (2004) Oiseaux marins nicheurs de France métropo- es suivis De 1962 à 1979, toutes les espèces tirés sur des bouchots à moules. Mais urbaines. Et surtout, la production à augmenter au détriment de ceux litaine (1960-2000). Éditions Biotope, Mèze, naturalistes d’oiseaux marins ont peu à peu été ces destructions nécessitent une dé- de jeunes en milieu naturel est en milieu naturel. Aujourd’hui, en 218 p. protégées par la loi en France. Cela rogation obtenue auprès du préfet de qui se sont signifie concrètement qu’il est inter- département après saisine du Conseil développés à partir dit de les tuer (y compris de détruire national de la protection de la nature. Goélands urbains sur la période 2009-2012 (goéland argenté, goéland brun et goéland marin) de la deuxième partie leurs œufs), de les déranger ou de dé- du XXe siècle grader leurs habitats, de les capturer, Conventions en Bretagne ont de les vendre ou de les acheter. En internationales permis très tôt Bretagne, seuls les œufs de goélands de faire émerger sont exceptionnellement détruits Certaines espèces d’oiseaux marins le rôle essentiel de dans le cadre de politiques de régu- sont protégées par des conventions in- lation des colo- ternationales. La convention de Berne la région pour les nies urbaines. pour la conservation de la vie sauvage oiseaux marins, et Et, beaucoup et du milieu naturel en Europe dis- les secteurs littoraux plus rarement, tingue les espèces protégées dans tous importants pour des adultes sont les États (fulmar boréal, puffin des An- leur conservation. Si bien qu’aujourd’hui, les secteurs majeurs De 1962 à 1979, toutes en Bretagne pour les espèces d’oiseaux la conservation des oiseaux marins sont marins ont peu à peu protégés. été protégées par © Données : Orom • Fonds : © IGN BDCarto ® 2010, © IGN Geofla ® Départements • Infographie : GIP Bretagne environnement - Septembre 2013 la loi en France 20 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 21
glais, etc.) de celles dont l’exploitation marins, celle des Sept-Îles créées en 17 est réglementée par certains États [1] 1976 et celle d’Iroise datant de 1992. (fou de Bassan, cormorans, macareux moine, etc.). La convention de Bonn Des réserves pour la conservation des espèces mi- naturelles nationales zones de gratrices appartenant à la faune sau- protection spéciale vage concerne toutes les espèces de La réserve des Sept-Îles protège un (directive Oiseaux) sternes. La convention Ospar, dédiée archipel de 40 ha toujours émergés à la protection du milieu marin de l’Atlantique du nord-est, liste notam- ment des espèces menacées ou en et de 240 ha d’estran. Elle est fré- quentée par environ 24 000 couples d’oiseaux de mer [1]. Une douzaine 2 réserves déclin (puffin des Baléares, mouette d’espèces s’y reproduisent. C’est la naturelles tridactyle, sterne de Dougall). Et plus importante colonie métropo- l’Acap (Agreement on the conserva- litaine toutes espèces confondues, nationales tion of albatrosses and petrels) prend et la principale colonie de macareux en considération la protection du puf- moines (environ 164 couples) et 9 Les réponses © Hélène Mahéo (Bretagne vivante) fin des Baléares vis-à-vis des captures de fous de Bassan (environ 20 000 accidentelles par les engins de pêche. couples) en France. arrêtés préfectoraux UN RÉSEAU TRÈS STRUCTURÉ de protection de biotope Des zones de protection spéciale La réserve d’Iroise accueille les plus importantes colonies françaises D’ORGANISMES SPÉCIALISÉS d’océanites tempêtes et la seconde La Communauté européenne a adop- colonie de puffins des Anglais. Elle Balaneg, l’une des îles de la réserve naturelle nationale d’Iroise té en 1979 une directive spécifique à la s’étend sur environ 40 hectares. Elle conservation des oiseaux sauvages, la comprend les domaines terrestres Réserve des Sept-Îles L directive Oiseaux. Au moins 17 zones des îles de Banneg, Enez Kreiz, Roch’ de protection spéciale abritent en Bre- Hir, Balaneg, Ledenez de Balaneg et es oiseaux Les naturalistes bretons surveillent Des données tagne des oiseaux marins nicheurs. Trielen. En 1880, on y observait pour • Date de création marins les populations d’oiseaux marins biologiques sur Pour trois d’entre elles, le nombre la première fois en France un couple 1976 bénéficient et s’intéressent à leur protection le long terme de couples nicheurs leur confère une nicheur de puffin des Anglais. La ré- • Superficie depuis les années 1950. Cet engage- en Bretagne d’un bon importance internationale [2]. Il s’agit serve est aujourd’hui un refuge pour 280 ha, dont 40 ment associatif de longue date est L’observatoire breton surveille les de l’archipel des Glénan pour la sterne nombre d’espèces d’oiseaux marins de terres toujours émergées réseau d’organismes désormais soutenu par une politique 17 espèces nichant régulièrement caugek et le goéland brun, de la baie (océanites tempêtes, sternes, goé- et 240 d’estran impliqués dans affirmée au niveau régional. En 2009 dans la région. Chaque année, il de Morlaix pour les sternes de Dou- lands argentés, bruns et marins, etc.). • Espèces d’oiseaux marins leur surveillance, la Bretagne s’est dotée d’un obser- dresse un bilan de la saison de re- gall, et enfin de l’archipel des Sept-Îles D’autres îles de l’archipel de Molène 12 espèces (macareux la gestion et vatoire régional des oiseaux marins production. Selon les espèces, il pour le fou de Bassan. L’estuaire de la (Béniguet, Litiri, etc.) sont d’un grand moine, fou de Bassan) la protection (Orom). Il regroupe une douzaine fournit les effectifs reproducteurs, Vilaine, le golfe du Morbihan et la baie intérêt pour les oiseaux marins et • Gestionnaire des colonies de d’organismes travaillant en réseau. des indications sur le déroulement du Mont-Saint-Michel sont également mériteraient d’être intégrées dans la Ligue pour la C’est l’interlocuteur pour la Bretagne de la reproduction et des chiffres reproduction et même des sites d’importance internationale réserve naturelle d’Iroise. protection des oiseaux du Groupement d’intérêt scienti- relatifs à la production en jeunes. en période de migration pour la sterne dans les soins fique Oiseaux L’acquisition de données biologiques de Dougall, le puffin des Baléares, les Il reste désormais à améliorer les dis- Réserve spécialisés de marins. sur le long terme permettra de sternes pierregarin et caugek. positifs de protection en mer. En par- d’Iroise ces animaux mieux identifier les causes de varia- ticulier, en achevant de rendre opé- sauvages. tions démographiques des oiseaux En Bretagne, il existe 9 arrêtés pré- rationnel le réseau Natura 2000 en • Date de création marins (dérangement, prédation, fectoraux de protection de biotope mer qui se veut complémentaire des 1992 concernant les oiseaux marins. Ils dispositifs de protection terrestres. • Superficie Une douzaine ont vocation à encadrer les usages aux abords des colonies lors de la [1] comme, par exemple, le macareux moine ▪ 40 ha • Espèces d’oiseaux marins océanites tempêtes, sternes, d’organismes bretons participent à l’observatoire reproduction. Dans la région, il y a en Islande également deux réserves naturelles [2] Année de référence : 2012 goélands, etc. régional des oiseaux marins nationales ayant des missions de • Gestionnaire Bibliographie conservation d’espèces d’oiseaux ▪ Les oiseaux dans les zones de protection Bretagne Vivante spéciale en Bretagne, Penn Ar Bed n°211 (2012) 22 • Dossier | Les oiseaux marins en Bretagne | avril 2014 www.bretagne-environnement.org • 23
Vous pouvez aussi lire