Lutter contre le décrochage et l'échec scolaire des élèves dys

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Lutter contre le décrochage et l'échec scolaire des élèves dys
Bibliothèque des expérimentations pédagogiques

ROUEN                                                                                                                        15/07/2019

                                Lutter contre le décrochage et l’échec scolaire des
                                élèves dys

                                                          (Expérimentation terminée)
                                Collège Léonard de Vinci
                                30 rue DE BARRIERE , 27950 ST MARCEL
                                Site : http://cellule-innovation.spip.ac-rouen.fr/spip.php?article117
                                Auteur : Natacha HALLOUIN, Certifiée Lettres Modernes
                                Mél : natacha.hallouin@ac-rouen.fr

   Nous regroupons les élèves dyslexiques, dyspraxiques ou dysphasiques d'un niveau et intégrons ce groupe dans une classe
   lambda (à effectif réduit) Nous proposons des aménagements (cours saisis et imprimés, barèmes différents, schémas,
   supports visuels..) en partenariat avec les orthophonistes et les familles, afin de permettre à ces élèves de reprendre
   confiance en eux et de progresser. Le but est qu'ils obtiennent le brevet et la meilleure orientation possible, compte-tenu de
   leurs difficultés.

   Plus-value de l'action
   Ce type de projet permet réellement d'aider les « dys » à progresser et à ne plus prendre leur handicap comme une fatalité. Il
   reste à le généraliser à l'ensemble des établissements. Pour ce faire, il faut former les enseignants à l'inclusion des élèves en
   situation de handicap. Pour pérenniser ce type d'inclusion, le pourcentage d'élèves handicapés doit être pris en compte lors
   des dotations horaires des établissements.

   Nombre d'élèves et niveau(x) concernés
   Élèves dys (dyslexie, dysorthographie, dyspraxie, dysphasie) suivis ou en pause.
   Tous les niveaux sont concernés, les élèves sont regroupés sur une ou deux classes, l'idéal étant de ne pas dépasser 7-8
   élèves sur une classe de 20 à 22 élèves.
   En 2013-2014, le projet regroupait 38 élèves sur 5 classes (effectif total du collège: 450 élèves).

   A l'origine
   En 2007, des parents d’enfants dyslexiques et une orthophoniste nous ont sollicités afin de mettre en œuvre une pédagogie
   adaptée à ces troubles cognitifs. La principale de l'époque, Mme Dumont, a alors réuni une équipe de professeurs volontaires;
   la copsy s'est engagée dans le projet dès le départ.

   Objectifs poursuivis
   Il s'agit d'éviter le décrochage de ces élèves, en proposant des aménagements qui prennent en compte leurs difficultés, et
   leur permettent de progresser sans se décourager. Le but est qu'ils obtiennent le brevet des collèges et trouvent la meilleure
   orientation possible.
   Nous souhaitons également rassurer les parents sur la prise en compte des troubles de leur enfant. Le changement
   d'établissement, la multiplication des interlocuteurs et le niveau des exigences du collège sont autant de sources d'inquiétude
   pour ces parents.
   Ce travail permet également aux enseignants de mieux reconnaître des enfants « dys » et d'inciter les familles à faire un bilan
   orthophonique. Le fait d'adopter des stratégies différenciées apporte une aide à d'autres élèves « non dys » en difficulté.
Sous-objectifs :

- Identifier des élèves non suivis, mais présentant des troubles des apprentissages.

- Faire bénéficier d’autres élèves en difficulté de certaines aides et tenter de les motiver.

- Intégrer des élèves handicapés.
Description
Les élèves dyslexiques, dyspraxiques ou dysphasiques d'un niveau sont regroupés et intégrés dans une classe de préférence
avec des élèves qui ont l’option latin ou bilangue (à l'origine cette classe avait un effectif réduit). Nous proposons des
aménagements (cours saisis et imprimés, barèmes différents, schémas, supports visuels..) en partenariat avec les
orthophonistes et les familles.
Modalité de mise en oeuvre
-Les élèves (dyslexiques, dyspraxiques ou dysphasiques) sont regroupés dans une même classe à effectif réduit. Ce
regroupement permet aux enseignants de mieux les identifier et de proposer des aménagements dans une seule classe.
Quant aux élèves, ils comprennent qu'ils ne sont pas seuls à rencontrer ces difficultés. Les autres élèves comprennent eux
aussi que ce n'est pas un phénomène rare et ne stigmatisent pas ces élèves.
-Les enseignants adoptent des pratiques différentes. Les cours sont saisis en « comics sans ms 14 », les leçons sont
synthétisées sous forme de schémas, afin de faciliter les apprentissages. Les collègues qui ont un vidéoprojecteur s'appuient
davantage sur des supports visuels. Nous adaptons également la longueur des contrôles ou le barème à leurs difficultés
(l'orthographe n'est pas pénalisée par exemple) Quand cela est nécessaire, nous initions progressivement l'élève à l'utilisation
de l'ordinateur. Nous plaçons de préférence ces élèves au premier rang à côté d'un élève bien organisé, non bavard (pour
faciliter la concentration et le repérage dans le cahier ou classeur).
- Les enseignants, quand c'est possible, échangent avec l'orthophoniste de chaque élève (avec autorisation parentale) afin de
cerner au mieux les difficultés mais aussi les points forts de chacun. Ainsi les aménagements sont personnalisés. Une
rencontre régulière des parents permet de mettre en évidence leur place dans ce projet, ils doivent relayer le soir les
adaptations que nous proposons à l'école. Ce partenariat parents-enseignants-orthophonistes permet à l'élève de se sentir
compris et soutenu dans ses efforts. Beaucoup d'enfants dyslexiques sont en situation de décrochage, quand ils ont
l'impression que leurs enseignants ne tiennent pas compte de leurs difficultés, du travail qu'ils font avec les orthophonistes et
des efforts qu'ils fournissent à la maison. Il ne s'agit pas pour autant de revoir nos exigences à la baisse, mais de s'appuyer
sur leurs points forts (l'oral, la créativité..) pour les remotiver.
-Ces classes bénéficient d'une demi-heure hebdomadaire supplémentaire de français (depuis la rentrée 2009)
-les quatre premières années, nous avons constitué les équipes de façon à mêler de nouveaux collègues à des collègues
déjà investis dans le projet (ce qui a facilité la transmission des informations, des expériences et permet de pérenniser le
projet) les élèves étaient rassurés d'avoir des enseignants déjà connus, sans pour autant avoir toujours les mêmes et prendre
les mêmes habitudes de la 6° à la 3°.
- un enseignant coordonne le projet (regroupe les informations sur les élèves, (fiche de liaison) suit la constitution des classes
et des équipes, réfléchit à l'amélioration du projet..)
Trois ressources ou points d'appui
1) La bonne volonté de l'équipe
La stabilité de l'équipe investie dans le projet a permis d'organiser des stages sur site et de les réinvestir. Les enseignants ont
acquis une expérience et modifié leurs habitudes de travail.
Les collègues communiquent avec les orthophonistes.
La coordination de l'action par une enseignante semble nécessaire à la continuation du projet et à sa cohérence.
L'équipe de direction appuie ce projet, qui influe sur la constitution des classes, des équipes pédagogiques, et des emplois du
temps.

2) La formation
La plupart des enseignants ont participé à des stages « la gestion mentale » et troubles des apprentissages.
La coordinatrice a obtenu le 2CA-SH.
3) Les TICE
La plupart des classes sont maintenant équipées d'un vidéoprojecteur (meilleure lisibilité, attention favorisée, cours plus
visuels) : les collègues d'histoire, par exemple, utilisent d'ailleurs un manuel numérique.
L'utilisation de logiciels adaptés (écho à la frappe) a permis une amélioration de l'expression écrite (il faut maintenant former
les collègues pour en généraliser l'usage).
Difficultés rencontrées
1) Les effectifs
Le nombre d'enseignants formés et expérimentés se restreint au fil des fermetures de postes et chaque enseignant doit suivre
davantage d'élèves dys.
Des élèves dys arrivent par dérogation (alors que tous les collèges sont censés accueillir les élèves handicapés).
Le nombre d'élèves reconnus par la MDPH augmente (10 élèves sur 38). Nous sommes donc confrontés à davantage
d'élèves fortement handicapés, ce qui demande toujours plus d'adaptations.
La DHG, de plus en plus réduite, ne permet plus d'avoir des effectifs réduits dans ces classes et menace ce projet.
Année 2014/2015 :
Niveau 6ème : 2 groupes de 6 élèves dys dans des classes de 28 élèves.
Niveau 5ème : 6 élèves dys sur 24.
Niveau 4ème : 7 élèves dys sur 23.
Niveau 3ème : 2 groupes de 7 élèves dans des classes de 26 élèves.

2) Les familles
Certaines familles ne sont pas assez investies dans la scolarité de leur enfant et ne sont pas le relais attendu dans l'aide aux
leçons. Ce sont les enfants que nous avons le plus de mal à faire progresser.
Il est parfois difficile de savoir si l'élève est en pause ou a abandonné son suivi orthophonique.
D'autres parents, au contraire, ont beaucoup d'exigences; il est difficile de leur faire comprendre que nous ne pouvons pas
faire toujours plus, et que ce n'est pas une solution puisqu'elle ne permet pas à ces élèves d'acquérir de l’autonomie.

Moyens mobilisés
-Une présentation des troubles des apprentissages par une orthophoniste retraitée, Mme Morcrette a permis de sensibiliser
les enseignants et de constituer une première équipe
-la copsy a constitué un dossier présentant ces différents troubles des apprentissages et les aménagements possibles en
classe.
-une enseignante avait déjà participé à un projet sur l'intégration des dys dans une autre académie.
- un stage sur site par Mme Morcrette a permis d'approfondir les connaissances sur les troubles dys et les aides
pédagogiques possibles à mettre en place en classe.
- ½ heure de français hebdomadaire a été ajouté à l'emploi du temps de ces classes.
- ½ heure d’histoire hebdomadaire supplémentaire en 3°.
- 2 membres de l'équipe ont suivi un stage PAF: scolarisation des élèves handicapés.
- l'enseignante coordinatrice avait suivi un stage PAF: trouble des apprentissages, proposé par une équipe de Charles-Nicolle
(CHU de Rouen). Elle fait partie d'un groupe de réflexion, coordonné par M Leblanc (IEN en charge des troubles des
apprentissages) sur les logiciels adaptés aux dys. Elle a obtenu le 2CASH en 2013.
- un stage sur site (présenté par une orthophoniste et les enseignantes ressources TSA) a permis de former les enseignants
qui se sont greffés au projet mais n'avaient pas bénéficié des premiers stages. Il a également permis une réflexion sur les
aménagements mis en place.
- Les fédérations de parents d'élèves ont organisé une conférence à l'attention des enseignants de maternelles, de primaire et
du collège, et une autre à l'attention des parents d'élèves. Ces conférences étaient proposées par Mme Garcia, orthoponiste,
membre de l’Association normande pour l'orthophonie et vice-présidente de la prévention au niveau national.
Partenariat et contenu du partenariat
- les orthophonistes du secteur qui suivent ces élèves
- la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) selon les cas (cela concernait 10 élèves cette année, 4
bénéficiaient d'une AVS et 8 d'un ordinateur portable)
Liens éventuels avec la Recherche
La participation au groupe formé par M. Leblanc a permis de découvrir et d'utiliser des logiciels adaptés (ex : balabolka, open
office vox qui sont des synthèses vocales).

Evaluation
Evaluation / indicateurs
LES EFFETS ATTENDUS
Permettre à ces enfants d’obtenir le DNB et la meilleure orientation possible.

LES INDICATEURS DE RÉSULTATS RETENUS
Il est difficile de les chiffrer puisque le taux de redoublement et celui d’échec au DNB chez ses élèves, n’étaient pas connus
dans la mesure ou ils n’étaient pas répertoriés avant ce projet.
Documents
Aucun

Modalités du suivi et de l'évaluation de l'action
Auto-évaluation de l'action :
Il est difficile de mesurer l'efficacité de ce dispositif de façon chiffrée, puisque nous ne connaissons pas les taux de réussite
aux DNB qu'avaient les élèves « dys » avant sa mise en place. Cependant nous constatons que le taux de réussite de ces
élèves est supérieur à celui de l'ensemble de l'établissement et qu'ils ont tous trouvé une orientation. L'objectif qui était d'éviter
tout décrochage et de trouver une orientation à ces élèves est donc atteint.
Taux de réussite du groupe dys :
Brevet 2011 : 75 % (70, 43 % pour le taux de réussite de l’établissement)
Brevet 2012 : 100 % (86,82 % pour le taux de réussite de l’établissement)
Brevet 2013 : 92,3 % (87,72 % pour le taux de réussite de l’établissement)

D'un point de vue qualitatif, ce projet est satisfaisant : les élèves, pour la plupart, reprennent confiance en eux et progressent.
Les parents, investis, se sentent compris et accompagnés. Les orthophonistes et le centre des troubles des apprentissages,
avec lesquels nous communiquons, apprécient notre travail, en voient les répercussions sur les élèves et conseillent notre
établissement à d'autres élèves. Les enseignants, malgré la dégradation de leur condition d'exercice, restent investis dans un
projet qui fait évoluer leur pratique d'enseignement et dont ils voient les effets positifs sur les élèves.
Effets constatés
Sur les acquis des élèves :
Les élèves reprennent confiance en eux, ont une meilleure estime d'eux-mêmes, ils sont plus motivés. Les progrès sont
variables d'un élève à l'autre.
Sur les pratiques des enseignants :
Leurs pratiques ont évolué et ces changements bénéficient à tous les élèves. (Ex: utilisation du vidéoprojecteur, cours
synthétisés sous forme de schémas, multiplication de conseils méthodologiques.) Ils repèrent régulièrement d'autres « dys »
ce qui permet la mise en place de nouveaux suivis orthophoniques, et évite que ces élèves baissent les bras, ne comprenant
pas pourquoi ils sont en échec.
Sur le leadership et les relations professionnelles :
Les AVS qui interviennent auprès des élèves « dys » sont bien intégrées dans l'équipe éducative. Des relations se sont
créées avec des partenaires extérieurs : des orthophonistes du secteur, le centre de référence des troubles des
apprentissages (RETA 27). Depuis le départ, la conseillère d’orientation psychologue est également très investie avec ces
élèves afin de réfléchir avec eux à l'orientation la plus judicieuse possible.
Les équipes enseignantes communiquent davantage entre elles, afin de se concerter sur les élèves et sur les aménagements
à proposer, bien que nous n'ayons pas de temps de concertation prévu par équipe pédagogique. Malheureusement,
l'augmentation des effectifs décourage l'équipe et remet en cause le projet.
Sur l'école / l'établissement :
Des élèves, sur les conseils de leur orthophoniste, demandent des dérogations pour intégrer notre projet. Cette
reconnaissance des orthophonistes montre l’intérêt du projet mais elle le met en même temps en péril.
Plus généralement, sur l'environnement :
La liaison primaire /collège s'est affinée. Les professeurs des écoles sont plus attentifs aux « dys » et nous les signalent afin
de les intégrer dans le projet dès la sixième. La liaison collège/lycée est assurée par une fiche listant les aménagements dont
a bénéficié l'élève durant ses quatre années de collège et lors de la passation du brevet (tiers-temps, dictée aménagée ou
ordinateur). Le lycée de secteur a manifesté sa volonté d'améliorer cette liaison et de mieux accompagner ces élèves.
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