Nouveautés Québec français - Érudit
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Document généré le 10 nov. 2023 06:18 Québec français Nouveautés Numéro 30, mai 1978 URI : https://id.erudit.org/iderudit/56600ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Les Publications Québec français ISSN 0316-2052 (imprimé) 1923-5119 (numérique) Découvrir la revue Citer ce document (1978). Nouveautés. Québec français, (30), 4–10. Tous droits réservés © Les Publications Québec français, 1978 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/
fants, et 96 pages en couleurs illustrent près critique sociale grinçante. Dans «l'autruche», PÉDAGOGIE de 3000 mots concrets. une autruche rencontre le petit Poucet qui Un guide pédagogique, La pratique d'un meurt d'être abandonné par sa famille; elle dictionnaire, dû à Nadine Chabaud, aidera les le console et lui fait la morale: «Ah, Mon- Nouveau Larousse des débutants enseignants à familiariser leurs élèves avec sieur Poucet te battait, c'est inadmissible. Larousse, 1977, 844 p. ($8.75) ce nouvel instrument. Ce guide constitué par Les enfants ne battent pas leurs parents, un poster, un jeu de 24 diapositives et un petit pourquoi les parents battraient-ils leurs en- Pour l'enfant qui sait lire, le dictionnaire cons- livret permet une exploration systématique et fants.» Dans «Les premiers ânes», les hom- titue un instrument essentiel qui assure à son une exploitation maximale de ce nouveau mes, après s'être rendu compte que les ânes utilisateur une véritable autonomieen lecture dictionnaire. Il n'y manque qu'une note sur le ne sont pas bons à manger, qu'ils ne savent et lui permet d'accéder aux connaissances fameux M. Durand, monstre omniprésent, ni lire ni écrire, ni compter décident qu'ils sans devoir constamment demander assis- dont on apprend à la même page qu'il est porteront leurs paquets: «C'est nous qui tance à un maître ou à ses parents. capitaliste, qu'il a du caractère et qu'il est sommes les rois, en avant!» Voilà donc seize récits, tous bien écrits qui offrent une multi- Encore faut-il que le dictionnaire n'offre pas cardiaque'. (C.V.) tude de possibilités d'exploitation aux pro- lui-même des résistances insurmontables au fesseurs du premier cycle du secondaire. lecteur débutant. Nous avons probablement Folio Junior Ces contes, offerts aux enfants, ont besoin tous buté un jour ou l'autre sur ces définitions toutefois d'être découverts par leurs profes- savantes qui conféraient une opacité irrémé- Il faut féliciter la maison Gallimard de seurs. Lisons-les donc!... pour le bonheur diable au mot qu'elles étaient censées éclai- nous présenter une nouvelle collection qui de nos élèves. (J. R.) rer ; ou qui, par un jeu de renvois circulaires, regroupe des romans, des récits, des livres ramenaient invariablement au point de dé- d'aventures soit un panorama d'œuvres ac- part. Il faut aussi que le dictionnaire soit léger cessibles aux élèves du secondaire. A l'heu- Le français au collège et facile à manier : l'enfant qui éprouve de la re où l'on déplore le peu de textes disponi- Sébastien JOACHIM difficulté à prendre en main son dictionnaire bles pour cette clientèle, Folio Junior nous Les Presses de l'université du Québec, 1978, sera peu porté à le consulter. Mais cette propose, en plus des textes spécialement 285 p. maniabilité si nécessaire ne peut être atteinte écrits pour les jeunes, des classiques de que par une diminution du nombre de mots Jules Verne, de Jack London et de Dickens. Le professeur débutant dans l'ensei- retenus et des exemples fournis. Et cette Cette collection a l'avantage de se présenter gnement du français au collégial accueillera réduction de volume augmente proportion- en format de poche à un prix acceptable. ce livre avec soulagement : c'est le manuel nellement les risques de recherches infruc- Chaque livre est abondamment illustré afin dans lequel il puisera idées et plans de tueuses. À quoi bon ouvrir un dictionnaire de faciliter aux jeunes lecteurs le passage cours, recettes et exercices avec leur corri- quand plusieurs expériences vous ont appris de l'album d'images au livre sans illustration. gé. Il saura quoi enseigner (la littérature d'a- que les mots que vous y cherchiez ne s'y Trois titres ont particulièrement retenu bord) et comment l'enseigner. Il ne lui reste- trouvaient pas! notre attention: «Au pays du grand condor» ra qu'à se présenter devant sa classe avec Un dictionnaire scolaire constitue donc de Nadine Garret, « Contes pour enfants pas enthousiasme et détermination pour attein- toujours un difficile compromis entre la ma- sages» de Jacques Prévert et «Le prince dre philosophiquement les objectifs qu'il se niabilité, la quantité de termes expliquéset la heureux» de Oscar Wilde. sera fixés: passer de «l'indispensable» (le clarté des définitions. Le Nouveau Larousse Chaque volume présente des contes mer- code grammatical et stylistique) au «néces- des débutants constitue sans doute le com- veilleux dont les personnages principaux saire» (le travail du texte) dans le «respect promis le plus intéressant réalisé à ce jour sont des animaux. Ces animaux sont doués des stratégies de composition», selon «dif- pour les enfants de 7 à 10 ans. Les mots ne de pouvoirs magiques dans les récits de férents modes d'intervention en salles de sont plus définis comme des entités. Ils sont Nadine Garret expriment la lutte des indiens cours» qui lui auront permis de respecter le d'abord replacés dans un contexte, une phra- de l'Amérique du sud contre les riches pro- rythme et l'intérêt personnels de l'étudiant. se simple qui permet à l'utilisateur de recon- priétaires terriens. Dans le Lama blanc par Le professeur chevronné — et ne le sont- naître l'emploi exact du terme dont il recher- exemple, un petit indien, aidé de son lama, ils pas tous aujourd'hui ? — y verra surtout che le sens. Cette phrase est suivie par des fait échec aux patrons et redonne l'espéran- matière à réflexion et sans doute à contesta- équivalents ou des contraires qui précisent le ce à ses frères dans leur lutte. Dans les tion. L'auteur nous livre en des pages abon- sens du mot. Ainsi, à politique on trouve: «n.f. contes symbolistes de Oscar Wilde, les ani- dantes le fruit de ses expériences, de ses M. Durand s'intéresse à la POLITIQUE, à la maux cette fois illustrent la puissance de réflexions et de ses convictions. Ses juge- manière dont le pays est gouverné.» Cette l'amour. Un rossignol donne son sang et ments sur les débordements idéalo-péda- méthode, tout à fait récente en matière de meurt afin qu'un jeune étudiant puisse offrir gogiques des Cégeps en choqueront cer- dictionnaire, a prouvé son efficacité depuis une rose rouge à celle qu'il aime. Un hiron- tains. D'autres y trouveront ce qu'ils se di- longtemps: n'est-ce pas de cette façon que deau, au prix de sa vie, aide un «prince sent tout bas. Rien de très original mais un nous avons acquis notre vocabulaire oral? heureux» à soulager la misère de ses sujets. ouvrage qui peut avoir sa place dans la re- Par ailleurs, le nombre d'entrées est de 16000 Les animaux de Prévert sous le couvert de mise en question de l'enseignement du fran- mots, ce qui est assez étendu pour des en- la fantaisie et de l'humour véhiculent une çais dans les collèges. (C. B.) I IÏXMci * HT )\ isSP v^lL.^la_4L
L'apprentissage précoce de la lecture habituels (lire: les méthodes connues). Le dépasse par son souci plus nettement péda- Rachel COHEN concept de maturité pour l'apprentissage de gogique. Un exercice comparant une BD P.U.F., Paris, 1977, 239 p. la lecture est directement relie à ces métho- tirée d'un roman et le passage correspondant des d'instruction. Il suffit de modifier l'ap- du texte pourra inspirer bien des maîtres. Ce livre est un plaidoyer enthousiaste en proche pour renverser les conceptions éta- (C.V.) faveur d'un apprentissage précoce de la lec- blies en ce domaine. C'est ce que Rachel ture se produisant dès l'âge de 3 — 5 ans. Il Cohen cherche à démontrer par la recher- se compose de deux parties distinctes. Dans che qu'elle a entreprise. la première partie, l'auteur veut faire connaî- Elle présente des résultats qui tendent à ROMANS tre su public francophone les théories et montrer que certains enfants de 4 et 5 ans expériences américaines où elle puise les sont parvenus à apprendre à lire dans un fondements de sa thèse. Dans la seconde environnement structuré qui réunit les con- Les Remparts de Québec partie, elle rapporte une expérience d'ensei- ditions définies comme adéquates. Le livre Andrée MAILLET gnement de la lecture à des enfants de 3 — présente une description soignée de l'ap- L'Hexagone, Montréal, 1977, 235 p. 5 ans qu'elle a menée en France. proche pédagogique qu'a développée l'auteur Avec une précision qui évite habilement dans le cadre de sa recherche. Ce roman raconte l'histoire d'une jeune l'excès d'information, l'auteur rapporte les La méthodologie de type pré-expérimen- fille de la haute société québécoise aspirant résultats des principales expériences améri- tal employée dans sa recherche ne permet à la liberté, contrecarrée dans son légitime caines évaluant les effets de programmes pas à l'auteur d'établir rigoureusement que et précoce désir d'émancipation. Cette mer- d'interventions structurées pour stimuler le les apprentissages précoces constatés sont veilleuse histoire se déroule sur les Rem- développement intellectuel, linguistique et le résultat de sa méthode d'instruction. En parts, «murailles dérisoires» de «l'une des social d'enfants d'âge préscolaire. Suivant outre, la recherche ne démontre pas sans douze plus belles villes du monde», Québec. son interprétation, la somme de ces recher- équivoque que l'apprentissage précoce de Dès les premières lignes, Arabelle avoue son ches fait la preuve que l'enfant de 2 à 5 ans la lecture est accessible à tout jeune enfant escapade nocturne: «Hier, dans la nuit du possède un potentiel d'apprentissage beau- placé dans un programme adéquat de sti- vingt-six au vingt-sept juillet, je me suis pro- coup plus grand qu'on ne l'admet générale- mulation. Des recherches ultérieures devront menée toute nue dans les Plaines d'Abraham. » ment. Plus il est jeune, plus ses chances en faire la démonstration. Mais ce livre pré- Et les 16 chapitres commenceront par cet d'apprendre sont grandes quand il est placé sente une conception précise de ce que peut «Hier», leitmotiv lancinant, qui marque un dans un environnement offrant des stimula- être un environnement stimulant pour l'ini- essai de rupture avec le passé. Demain ne tions adéquates et structurées. Ce faisant, tiation à la lecture qui ne vaut certes pas sera peut-être plus semblable... on favorise le développement de sa person- que pour des essais d'apprentissage préco- Le lecteur apprendra graduellement, par nalité tout entière et non pas le développe- ce. C'est sans doute sa contribution la plus d'habiles retours en arrière, les principaux ment de ses seules fonctions intellectuelles importante. (M. P.) éléments de la vie d'Arabelle: son enfance ou psychomotrices. et son adolescence ouatées, surprotégées, remplies d'interdits, de défenses, de leçons De l'ensemble de ces données théoriques Le livre et la construction de la personnalité horripilantes de bienséance, surtout ses et expérimentales, Rachel Cohen dégage les de l'enfant révoltes devant ce monde étouffant, paraly- fondements d'une remise en question de André MAREUIL sant et stérilisant, devant ses parents (père l'enseignement de la lecture, tant au plan Casterman, 1977 et mère), et son initiation à l'amour lors d'un des méthodes d'instruction habituellement séjour européen qui devait l'assagir... Son pratiquées qu'au plan des conceptions éta- L'enseignement du français à l'ère des media principal auditeur est un Américain de pas- blies qui fixent à 6 ans l'âge optimal pour le André MAREUIL sage, un fermier de l'Idaho, spécialisé dans début de l'initiation à la lecture. PUF, Coll. L'Éducateur, 1978, 157 p. la pomme de terre, et qui refusera, dans son A l'âge de 3 — 5 ans, la volonté spontanée puritanisme choqué de poursuivre l'initia- d'apprendre à lire et le plaisir qu'y trouve Ces deux livres de notrecollaborateur, André tion d'Arabelle, que ses parents considèrent l'enfant l'amènent à répondre positivement à Mareuil, professeur à l'Université de Sher- un peu folle et qu'ils entendent ramener à la un environnement qui sait entretenir sa mo- brooke, s'adressent particulièrement aux en- raison. Finalement, elle se donnera au pre- tivation et qui multiplie les occasions de lire seignants, pédagogues et bibliothécaires. mier venu. en situation de jeu. Si on respecte, en outre, Le premier constitue un plaidoyer pour les Si la présentation des faits et des person- la démarche naturelle de l'enfant qui procè- livres et la lecture. Les arguments sont essen- nages semble embarrassante et quelque peu de du globalisme à l'analyse puis à la syn- tiellement d'ordre psychanalytique et mon- déroutante au début, le reste du roman est thèse, on réunit les conditions nécessaires trent le rôle important que joue le livre dans délicieusement raconté, dans une langue et suffisantes à la réussite de l'enfant. l'élaboration de la personnalité. admirable et souple chargée d'ironie et d'é- L'âge minimum de 6 ans a été fixé, à l'usa- Le second volume, malgré son titre diffé- motion. Faut-il souligner le symbole de la ge, en fonction de la capacité qu'a l'enfant rent, recoupe le précédent dans ses chapitres révolte impuissante d'Arabelle? Un passage d'apprendre selon les procédés d'instruction sur la place et le rôle de la lecture. Mais il le comme celui-ci ne laisse aucune équivoque : André Mareuil l'enseignement a\ndrée du français MaAJLLET le livre à l'ère des media etlaco andré mareuil delenfant Les Remparts La daaarrm do In jeunesse devant In - choc dus cullures • * Essai d'eiplicâition psychanalytique • I n livre, moyen da catharsis • La cferxMiverte da la realms de Québec semelle at la • sublimation • grâce aux livras • Les modèles litter.lire* comme antidote a ceux daa •n-sdta » L'année au • pUisir du texte • • La rencontre dea grandes ceuvms Z. A L'HEXAGONE Mai 1978 Qjucbccfiançais 5
« N'avoir pas de pays, n'appartenir à person- Bonheur d'occasion partie des réflexions de l'auteur sur son livre ne, n'être qu'une fille et cependant avoir Gabrielle ROY et dans une deuxième partie intitulée «Dos- tous les droits, n'ayant rien, et tous les pou- Stanké, Montréal, 1978, 396 p. sier de presse» les commentaires qu'a sus- voirs en puissance. Nue et les mains vides, (Collection Québec 10/10) $3.95 cités dans différents journaux la parution en effrayée par l'inconnu, je ressemble à ma 1964 de la première édition. nation.» (G. D.) Point n'est besoin de présenter Gabrielle Nous pouvons nous réjouir de cette ex- Roy, ni son roman Bonheur d'occasion, de- cellente initiative des éditions Parti pris. venu un classique de la littérature québé- (M.E.) coise, avec Menaud, maître-draveur, Trente Arpents, Prochain Episode et quelques au- Les confitures de coings et autres textes. tres. Qu'il suffise de rappeler que ce roman, THÉÂTRE Jacques FERRON le premier de l'écrivain de Saint-Boniface, Parti pris, Montréal, 1977, 296 p. d'abord paru en deux volumes aux Éditions Pascal en 1945, est acclamé par la critique Le cœur étoile suivi de Chrysanthème Les Éditions Parti pris ont récemment réé- et salué comme un événement littéraire. Il et de Miroir de nuit. dité plusieurs classiques de la littérature mérite à son auteur de nombreuses distinc- Louise MAHEUX-FORCIER québécoise, dans la nouvelle collection Pro- tions littéraires, dont le prix Femina (1947). Le Cercle du Livre de France/Pierre Tissey- jections libérantes. Le n° 3 rassemble Les Dès cette reconnaissance, le Literary Guild re, Montréal, 1977, 233 p. Confitures de coings, «version entièrement des États-Unis le choisit comme livre du nouvelle de La nuit» un Appendice aux mois avec un tirage initial de 750,000, sous L'argument du Cœur étoile de Louise Confitures de coings ou Le Congédiement le titre The Tin Flute. Le roman est réédité Maheux-Forcier pourrait se résumer ainsi: de Frank Archibald Campbell, La Créance et en 1947 et en 1965, à Montréal, et à Paris en Daniel, un enfant couvé par sa mère, aime An- Papa Boss, en plus du Journal des Confitu- 1947. Par la suite, il a été traduit en norvé- drée, la secrétaire de son père, malgré leur res de coings, regroupement des principaux gien, danois, suédois, espagnol, roumain, différence d'âges. Il refuse de s'engager dans articles parus dans les périodiques sur ces slovaque et russe et a été l'objet de nom- l'entreprise paternelle, le commerce du bois. ouvrages. breuses thèses et études. Et la fortune de ce Seule récriture le tente. Pour le mûrir, le Les confitures de coings racontent une roman dont l'action se déroule à Saint-Henri, faire réfléchir, rien de mieux que « l'oubli par fugue nocturne de François Ménard, «qua- quartier défavorisé de Montréal, pendant la l'exil ». On l'envoie donc faire sa « cure d'Eu- dragénaire descendant vers la cinquantaine, dernière guerre mondiale, est loin d'être ter- rope». De retour, il apprend qu'Andrée a l'èchevinat et la gérance d'une petite suc- minée! (A. B.) décidé de suivre son chemin à elle avec cursale de banque en banlieue plate». La David. Espérant modifier le cours des évé- raison de cette fugue? Un policier, Frank Le Cassé et les autres nouvelles suivi de nements, il accepte de travailler avec son Archibald Campbell, lui a donné rendez-vous Le Journal du « Cassé» père, installe son bureau près de celui d'An- à la morgue de Montréal. Délaissant la chau- Jacques RENAUD drée, lui soumet un manuscrit à corriger, de épaule de sa femme endormie — qui lui Éditions Parti pris, Montréal, 1978, 198 p. s'incruste... L'explosion du séchoir à bois servira d'alibi —, il court retrouver Frank en précipite l'explication entre Daniel et An- lui promettant de lui apporter son cadavre. Les Éditions Parti pris ont réédité Le Cas- drée. La mère et le fils chercheront des con- Il lui apporte en fait un pot de confitures de sé de Jacques Renaud. Il faut relire en parti- solations insolites, en s'évadant momenta- coings dont Frank mourra. La nuit se dérou- culier la longue nouvelle du même nom qui nément du réel. Que deviendra Daniel? Ac- le dans une trépidante frénésie de souvenirs ne semble pas vieillir et dont les personna- ceptera-t-il de continuer à vivre? vécus, entre l'arrestation jadis de François ges «de plus en plus fictifs (p. 9)» ressem- La représentation télévisée de la pièce par Frank. Ce voyage au creux de la nuit blent à de plus en plus de gens. Au fond, les sous le titre Le Manuscrit ne rend pas plus offre mille prétextes à méditer sur certains choses n'ont pas tellement changé depuis facile son interprétation. On risque alors de aspects mythiques et politiques de la socié- 1964. Les exploités, les rejetés, les parias de la juger selon la réalisation de Jean Faucher té québécoise et sur le chemin parcouru par la société sont tout aussi nombreux. Ils par- seulement. Le thème central, pour être un le narrateur depuis son enfance. La mort de lent tous la même langue, une langue crue, peu traditionnel, ne s'égare pas, en tout cas, Frank lui permettra de récupérer son âme et violente, à la mesure de leurs désillusions et dans l'éternel triangle amoureux: David arri- d'assumer pleinement son destin. A la nuit de leurs désespoirs. Une langue déchirée, vé, Daniel n'a plus qu'à céder la place. Puis, complice des aveux, des amours (licites ou défigurée, parfois d'une poésie troublante. que penser de ce grand garçon qui, tout en non), des basses oeuvres du monde interlo- Le livre de Renaud est un cri discordant à la regimbant contre un amour maternel pos- pe se substitue finalement la nuit annoncia- mesure de Tit-Jean, le personnage principal, sessif, se jette dans les bras d'une femme qui aime et tue avec une semblable volupté. trice de l'aube précurseur de la renaissance plus âgée que lui ? Enfin, le revirement de la Un document choc aux accents de vérité. d'une race. Un roman, un témoignage vivant situation, quand même un peu préparé, rap- à relire. L'assemblage des textes de ce volu- Cette nouvelle édition est augmentée de pelle le théâtre classique. me en fait un document inestimable pour quatre nouvelles inédites et du Journal du Le traitement qu'en a donné Faucher a les amateurs de Ferron. (G. D.) «Cassé» qui rassemble dans une première peut-être exagérément mis l'accent sur une iBM LES CONFITURES DE COINGS et autres textes ETOILE! i prolK.liO'.* HMrantM 1 ' 6 Qpébec français Mai 1978
émotivité et une sensibilité à fleur de peau, Hubert Aquin romancier que favorisait sans doute le drame intérieur CRITIQUE Françoise MACCABÉE IQBAL des personnages. Il n'est pas aisé, en effet, Les Presses de l'université Laval, 1978,288 p. de «faire passer» télévisuellement sembla- Surréalisme et littérature québécoise. bles états d'âme. L'auteur l'a senti, qui a, par André-G. BOURASSA Un an après la mort d'Hubert Aquin, une un assemblage minutieux d'indications scé- Éditions l'Étincelle, 1977, 375 p. étude critique nous convie à une relecture du niques, tenté de diriger le jeu des acteurs et romancier. Françoise Iqbal analyse successi- celui du réalisateur. Il convient aussi de se Dans son essai d'histoire littéraire — et vement Prochain épisode, Trou de mémoire, demander si les dialogues « passent». L'écri- même culturelle — intitulé Surréalisme et l'Antiphonaire et Neige noire. Elle met en ture raffinée de Louise Maheux-Forcier se littérature québécoise, M. André-G. Bouras- évidence la structure de ces romans, les prête admirablement à la lecture, mais ne sa analyse la fortune du surréalisme au relations espace-temps, les personnages et nuit-elle pas à la spontanéité du langage Québec. Il identifie les créateurs, surtout leurs relations équivoques avec l'auteur, le théâtral? (G. D.) peintres et poètes, les groupes, les anima- langage et les grandes images mythiques teurs de revues et de maisons d'éditions qui d'eau et de feu qui traversent cette oeuvre. ont adopté cet état d'esprit, il présente puis Des liens s'établissent d'un roman à un Joseph-Philémon Sanschagrin, ministre évalue leurs travaux. Il indique les rapports a u t r e et l ' e n s e m b l e s ' é c l a i r e par les Bertrand B. LEBLANC qu'ont entretenus les écrivains et artistes nombreuses lectures parallèles auxquelles a Leméac, Montréal, 1977, 111 p. québécois avec leurs collègues français. Il puisé le critique avec une érudition et une étudie dans quelle mesure ces recherches finesse psychologique remarquables. Après avoir tâté du roman avec Horace ou ont pu préparer la révolution culturelle des Hubert Aquin disait de la lecture qu'elle l'art de porter la redingote (Jour, 1974) et années 1960. Il tire ainsi de leur oubli et de était «une célébration muette» à laquelle Moi, Ovide Leblanc, j'ai pour mon dire (Le- leur isolement relatifs des dizaines d'agents participent l'écrivain et le lecteur. Avec ce méac, 1976), Bertrand B. Leblanc signe sa québécois du surréalisme, parvenant ainsi à livre, cette célébration se poursuit et s'enri- première pièce de théâtre avec Joseph-Phi- harmoniser en quelque sorte leur action, à chit de la mise à jour des multiples réseaux de lémon Sanschagrin, ministre, qu'il dédie à montrer qu!en notre pays, sans interruption, sens que permet cette oeuvre foisonnante. Marcel Dubé, un des principaux artisans du s'est maintenue une tradition de progrès et (C.V.) théâtre d'ici. Et pour un coup d'envoi, c'est de liberté. une réussite. Car, même si la pièce n'a en- Axée sur de tels objectifs et fondée sur core intéressé aucune compagnie théâtrale une documentation dont l'abondance ne ni aucun metteur en scène, elle est intéres- cède rien à l'intérêt ni à la variété, cette sante à plus d'un point de vue. étude s'impose par sa nécessité et par son ESSAIS D'abord par l'argument lui-même qui ra- originalité. Pour la première fois est précisé conte, en trois actes, un épisode de la vie l'apport des groupes successifs de moder- Hommage a Lionel Groulx politique de Joseph-Philémon Sanschagrin nistes qui ont exprimé jusqu'à nos jours dif- sous la direction de Maurice FILION (J. P. prononcé a l'anglaise pour les inti- férentes modalités du surréalisme. Leméac, Montréal, 1978, 224 p. mes), député de Beaumont (Gaspésie) et Tout naturellement, t'étude trouve son ministre (patronaux) de la Voirie dans le centre de gravité dans le chapitre qui traite L'heure est aux hommages. Après les Mé- cabinet Larue. Un épisode précis qui com- du Refus global, chapitre médian où abou- langes offerts aux professeurs Paul Wyc- mence avec la contestation de la population tissent et d'où rayonnent les tentatives des zynski et Marcel Trudel (Éditions de l'Uni- et... des journalistes entourant la réalisation diverses écoles surréalistes que l'auteur versité d'Ottawa), Leméac, pour souligner le d'une autoroute à Québec, et qui se termine s'est appliqué à définir et à ordonner. centenaire de naissance du chanoine Groulx, par la chute du gouvernement et du minis- En conclusion, l'auteur livre en ces termes publie Hommage à Lionel Groulx. On y trou- tre, qui perd non seulement son poste, mais le juste résultat de ses recherches : « le sur- ve rassemblées des études rédigées par des aussi sa maîtresse, ses amis et même sa réalisme a exercé une profonde influence amis intimes, François-Albert Angers, Richard femme qu'il croyait pourtant fidèle. Il ne au Québec et y a même pris des connota- Ares, Fernand Dumont, Benoît Lacroix et le peut survivre à tant d'épreuves, même si tions particulières». Plus encore que la ré- regretté Guy Frégault, qui nous révèlent «c'est bête de mourir sans jamais avoir été vélation de la collaboration entre peintres et certains aspects nouveaux de l'homme et de malade, pis dans l'opposition à part de ça». poètes, largement démontrée tout au cours son oeuvre. (J'aurais quand même grande- du travail, c'est, je crois, davantage celle des ment apprécié une étude de Groulx littéra- La pièce intéresse encore par la peinture spécificités de l'automatisme de l'égrégore teur, auteur de l'Appel de la race, de Au cap. grandeur nature d'une certaine forme de po- Borduas par rapport aux groupes français Blomidon et des Rapaillages). litique qui n'a pas toujours des dessous bien rassurants, par le portrait du héros, bour- qui donne son prix à cet ouvrage, dont on La deuxième partie réunit des témoigna- geois parvenu, qui n'est pas sans rappeler peut dire sans l'ombre d'un doute qu'il cons- ges de personnes qui ont connu Groulx ou certains personnages de Molière, et par la titue une contribution indispensable à la qui l'ont appuyé dans sa lutte pour débar- verve et l'humour de l'auteur. A lire... surtout connaissance du mouvement littéraire qué- rasser les Canadiens français de « leur atti- à l'approche des élections... (A. B.) bécois. (J. B.) tude de colonisés et de leur pauvreté intel- Françoise Maccabée Iqbal HUBERT AQUIN romancier Vie des Lettres québécoises 8 Quebec français Mai 1978
lectuelle», tels Victor Barbeau, Joseph Blain, dienne. Une poésie qui, comme le poète cherche dans la blancheur de la page, entre Guy Dufresne, Jacques Genest (son méde- errant et mendiant, se dépouille. Ce qui ne les lignes et malgré le champ miné des mots. cin personnel), René Lévesque, Jacques- l'empêche pas, dans son lyrisme interlinéai- Une poésie solidaire, qui se lit comme un Yvan Morin, Hélène Pelletier-Baillargeon, ro, d'éclater dans la violence du temps qui essai dans sa prose contenue et qui se dilate Anatole Vanier, Denis Vaugeois. pourrit. (A. G.) souvent dans une oasis habitable du monde La troisième partie contient des documents crevassé. Une nouvelle maison d'édition inédits de Groulx, poème, discours, pages Les Forges froides pour un poète qui continue de frayer sa de journal, plan de cours... On y trouve en- Chanel MALENFANT voix. (A. G.) core une chronologie soigneusement établie par sa secrétaire et collaboratrice, Juliette L'auteur des Poèmes de la mer pays fait Vivre en ce pays ou ailleurs Lalonde Rémillard. de son deuxième recueil le lieu sacré où il Pierre CALVÈ Un document unique, agréablement pré- invente et fixe sa rêverie. Des Forges froides L'Acadie sans frontières senté et abondamment illustré. (A. B.) s'élève un chant funèbre, plainte de l'an- Edith BUTLER goisse dévastatrice : « le temps tourne ô sup- Les Goélettes de Charlevoix plice de la roue». Revenu des «gouffres Michel DESGAGNÉ Jeanne dite «Jeanne d'Arc» des songes anciens», le poète s'engage en Leméac, 1977, 135, 129 et 182 p. Henri GUILLEMIN cette vie vers les clartés de l'absolu pour y Gallimard. Folio, 1977, 339 p. ($3.75) trouver « le levain du premier jour du mon- Trois beaux livres. Les deux premiers par- de». Une poésie qui rejoint la recherche é- ce qu'ils nous donnent les paroles de deux Il est peu de destinées aussi belles et si ternelle de l'homme. (Y. M.) chansonniers du Québec et d'Acadie. Un tragiquement terminées que celle de Jeanne Calvé nénuphar d'Amérique et une Butler d'Arc. Cette jeune paysanne qui à treize ans Poèmes, 1959-1960-1961 toujours «dépaysée» dans le Dominion of... entendait des voix et voulait délivrer son pays Suzanne PARADIS Le dernier livre, parce qu'il est un poème des Anglais avait à peine 17 ans quand elle Garneau, Québec, 1978, 243 p. flottant comme une goélette, construite dans délivra Orléans et fit sacrer Charles VII à la dureté et la poésie du bois d'ici, dans le Reims. Deux ans plus tard, elle finissait sur le La maison Garneau publie les trois pre- génie patient des architectes marins. Tout le bûcher. miers recueils de la prolifique Suzanne Pa- fleuve-matrice et toute la mer dans ces li- Entrée d'emblée dans la légende, la « gen- radis. Ces recueils avaient été publiés à frais vres! (A. G.) tille Pucelle » devait par la suite être féroce- d'auteur (Les enfants continuels, A temps le ment attaquée par Voltaire et les Encyclopé- bonheur) et par Clément Marchand, au Bien L'octobre suivi de Dérives distes. Il en est resté une image un peu public (La chasse aux autres). Garneau de- Le cercle de justice trouble oscillant entre le cliché à l'eau de rose vait bien cela à celle qui, par une oeuvre Michel BEAULIEU et les sarcasmes des esprits" forts». Un solide constante, patiente et belle, a contribué à L'Hexagone, Montréal, 1977, 78 p. et 95 p. décapage s'imposait et Henri Guillemin a trou- donner du prestige à la maison d'éditions de vé là une nouvelle bataille à mener. C'est avec Québec. Ces poèmes, en vers mesurés pleins Deux livres des quatre que publie l'auteur une passion complice qu'il retrace la vie de de coupes gracieuses ou libres, font la quê- en 1977 et qui viennent dépasser la vingtai- Jeanne et en fait partager les enthousias- ne pour l'ensemble de son oeuvre. Cette te de la vie, de l'amour, «du meilleur de la mes et les périodes d'abattement. Et il réussit poésie de Beaulieu se lit aisément et en est terre». Poésie, chant de femmes, marquée à nous rendre magnifiquement proche et pas moins belle parce qu'ouverte à plus de de la blessure de ne pas durer et pour cela réelle cette jeune fille musclée, aux cheveux lecteurs. Une poésie d'un lyrisme toujours courts et passionnée de vivre. (C.V.) présente à l'arbre, à l'oiseau, à l'eau. Poésie spirituelle dans la constante recherche d'un contenu qui est réflexion philosophique sur chemin où avancer. Poésie comme une eau la vie, la mort, le temps et cet entre-deux de fraîche malgré le cimetière tout à côté. (A. G.) soi à soi. Dans Le cercle de justice, l'auteur montre bellement, avec une humanité qui POÉSIE touche et un grand respect de l'autre, com- ment la distance peut finalement se cons- Dedans dehors suivi de Point de repère Fragments paniques truire jour après jour entre deux quêtes Pierre LABERGE Marcel BÉLANGER d'existence. A lire, pour le plaisir et la beau- Le Noroît, Saint-Lambert, 1977, 92 p. Les Éditions parallèles, Québec, 1978, 89 p té. (A.G.) Une poésie qui interroge la condition de Le pays précaire de la parole, cri, colère, Mon refuge est un volcan l'homme dans la nudité de ses os. Une poé- tendresse, dans le vertige de vivre. Diogène Gilbert LANGEVIN sie qui soumet à la question ce monde ca- et Démosthène tout à la fois, recherche et L'Hexagone, Montréal, 1978, 89 p. duc, vide de sens. Une poésie, comme le parole pour soi, du dedans parcellaire, et, poète, dépouillée, réduite à l'essentiel de la pour les autres, dans leur vie fragmentée. Avec son dix-neuvième recueil de poè- recherche du signe malgré la mort quoti- Poésie de révolte autant que du délire qui mes, Gilbert Langevin continue de refuser Henri Guillemin te*' "/"v.a . # \ r t . • Jeanne diteJeanne d'Arc : **•"M : * ^^ Jr2 i w^ i •^MP^T *• fm ^ ^ H & M l .. aaJ\ afat La» r S E ffifafiv'afi etrn «a Mai 1978 Québec français 9
«1e salut des transfuges». Son refuge bout les pères qui prostituent leurs filles. A la Chansons politiques du Québec dans la quête qui (se) poursuit (dans) le campagne, au Québec, c'est monnaie cou- (1765-1833), tome 1 pays. Le recueil s'enracine dans des noms rante. » Maurice CARRIER et Monique VACHON et prend des dimensions qui visent la même De telles affirmations, gratuites, trop nom- Leméac, Montréal, 1977, 361 p. trajectoire de la naissance à finir pendant breuses, lassent le lecteur et affaiblissent la que neuf dessins de Cari Daoust vous jettent portée de l'ouvrage. On dirait que les au- A la chanson folklorique et au conte, il en pleine prison de ce monde qui vous con- teurs se sont laissés emporter par leur pas- manquait la chanson politique pour témoi- sume. La poésie, elle, de flash en flash, va sion et n'ont pu prendre leurs distances avec gner de notre passé historique. Les cher- toujours son petit bonhomme de chemin en leur sujet. A lire cependant. C'est un docu- cheurs Carrier et Vachon offrent donc au gardant le haut du pavé. (A. G.) ment sociologique unique sur le sujet. (A. B.) public une somme de travail extraordinaire. Ils délivrent de l'oubli la chanson politique qui affirme les luttes populaires à travers ce Les belles vieilles demeure* du Québec que Robert-Lionel Séguin appelle, dans sa DIVERS P. ROY WILSON belle préface, «la nuit de l'occupation». Il Cahiers du Québec/Hurtubise HMH, 1977, faut savoir gré aux auteurs de nous avoir 124 p. concrètement rappelé le goût de la liberté Profession: prostituée Rapport sur la prostitution au Québec qu'avaient nos pères. (A. G.) Un livre d'une grande utilité pédagogique Catherine TEXIER et Marie-Odile VÉZINA pour savoir regarder toutes ces belles de- Libre Expression, Montréal, 1978, 354 p. meures qui longent le fleuve et les rivières du Québec. Wilson a retenu quelques-unes de Rien détonnant avec Sol Pendant dix semaines, deux journalistes ces vieilles maisons et nous initie simplement ont vécu dans l'univers méconnu des prosti- Marc FAVREAU au déchiffrement du génie architectural de Stanké, Montréal, 1978, 173 p. tuées montréalaises. Ils nous livrent le fruit nos pères qui ont su, en épousant le paysage, de leur enquête dans ce rapport sur la pros- retraduire le génie français dans des maisons Voici réunis une vingtaine de monologues titution à Montréal surtout, et non au Qué- bec, comme le laisse entendre le sous-titre. d'ici. Des maisons belles comme des poèmes de Sol l'étonnant, notre Sol national, passé Un rapport donc partiel, sans prétention qui se livrent intimement à ceux-là seulement maître dans l'art de déformer les mots, de scientifique aucune, rapidement monté, mais qui apprennent à les regarder. Toute une tordre la langue, de la transformer au gré de qui jette la lumière sur l'exercice du plus civilisation s'avoue dans ces demeures où sa logique. Toujours dans un but bien précis vieux métier du monde dans la métropole, l'utilité, la géographie, l'architecture s'unis- cependant: faire passer un message, attirer sur les rapports existant entre «les filles de sent discrètement. Qui n'a pas rêvé de redon- l'attention, corriger une situation, dénoncer la gaffe» et les clients, et sur les clients eux- ner à l'une de ces maison encore nombreuses une injustice (la loi 22, dans « La Complainte mêmes. Après une courte première partie ses lignes, ses habits et sa grâce? (A.G.) du garnement»), gagner la sympathie du dé- où ils exposent leur démarche, les auteurs muni, du déshérité comme lui. Car Sol, qui font défiler sous nos yeux un certain nombre n'a pas de «lettres», comme il le dit, qui a de «filles de joie», choisies au hasard d'une du mal avec les mots, est le porte-parole du rencontre dans un bar ou dans une salle «pôvre», du désoeuvré, de l'abandonné, du Oui à l'indépendance du Québec laissé-pour-compte, tel la poubelle, oubliée d'un poste de police, les Barbara, Ginette, Pierre BOURGAULT sur le bord de la «cruelle», qui aime la «vi- Diane, Danièle, Francine, Natacha, Linda, Quinze, Montréal, 1977, 179 p. dangereuse» et qui risque, à tout instant de Patricia..., qui ont en commun l'art de faire beaucoup d'argent, rapidement (entre $35. «se retrouver en tôle». Comme aussi ces et $50. la passe de quinze minutes), en s'écar- Un petit livre fort simple qui reprend des vieux qui sont «bien isolés» dans leur «petit tant les cuisses jusqu'à dix fois par jour arguments familiers... pour les habitués de foyer modique» où ils bercent leur «ennui- dans les Tourist rooms de l'Est ou de l'Ouest la cause de l'indépendance. Dire oui à l'in- touflé» et pensent à leurs «maux myxtères», pour se payer du luxe ou de la dope, mais dépendance, par exemple, pour avoir une ou les habitants «d'en-dessous de la pla- jamais une parcelle de bonheur. terre natale non aliénante, pour donner une nète» qui ne «tourne pas rond», le «Fier dernière chance au Canada (le vrai, l'an- monde», ce monde bien différent de celui Un dossier intéressant certes, émouvant glais) d'exister par lui-même, pour sortir de qui fait partie des «États Munis» de «L'Am- même par ses témoignages, mais qui res- la névrose séculaire, pour inventer un projet nésique du Nord»... semble davantage à un plaidoyer en faveur de original de société conforme au génie qué- la légalisation de la prostitution (et pourquoi bécois, pour mener d'autres luttes, enfin, Volume amusant, enrichissant, qui provo- pas?) et qui agace parfois par les conclu- féministes, syndicales, économiques... Un li- que le rire, mais un rire souvent gênant, un sions rapides ou catégoriques des deux vre sobrement écrit pour les colonisés en- rire jaune. Volume encore enrichi de nom- journalistes, telles: «Eh oui! c'est ça, c'est core nombreux qui voient l'indépendance breuses photos de Sol et de son double, comme ça. C'est pas compliqué de com- du Québec comme un repliement et non Marc Favreau, et de nombreuses illustra- prendre pourquoi la prostitution existe, pas une ouverture et surtout comme une trans- tions réalisées par sa fille, Marie-Claude. la peine d'aller chercher bien loin: ce sont gression. (A. G.) (A. B.) PROFESSION: PROSTITUE RAPPORT SUR LA PROSTITUTION AU QUEBEC CATHERINE TEXIER i MARIE-00I (S LE VEZINAl S 10 Quebec français Mai 1978
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