Prévention et dépistage des cancers cutanés : au- delà du convenu, que devrions-nous faire ? - Journées Interactives de ...
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réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales Prévention et Breslow (mm) dépistage des Croissance rapide cancers cutanés : au- delà du convenu, que devrions-nous faire ? Croissance lente Durée S. MONESTIER Service de Dermatologie et Oncologie Détection 1 Détection 2 Détection 3 dermatologique, CHU de la Timone, MARSEILLE. Fig. 1 : Impact du screening sur le Breslow en fonction de la cinétique tumorale. T raiter en 10 minutes le thème “prévention et dépistage des ● Faible épaisseur signifie faible agressi- sant (espoir des traitements adjuvants cancers cutanés” est une mission vité. Cela est faux : l’épaisseur tumorale innovants ?). impossible, qui a donc été traitée de n’est pas représentative du comporte- façon partielle et partiale, en espérant ment biologique du mélanome. Une ● Le dépistage précoce ne peut être stimuler le questionnement de nos pra- faible épaisseur peut correspondre soit délétère. Si vous diagnostiquez un tiques. Pour des raisons évidentes de à une tumeur peu agressive, soit à un mélanome très précocement, l’épais- temps, le raisonnement déroulé s’appli- diagnostic précoce d’une tumeur agres- seur tumorale n’est pas représentative quera essentiellement à la surveillance sive. Une forte épaisseur peut corres- de l’agressivité réelle. D’où le risque nævique assistée (ou mole mapping des pondre soit à une tumeur agressive, soit de classer à tort des tumeurs agressives Anglo-Saxons), sous forme de questions à un diagnostic tardif d’une tumeur peu dans un groupe jugé “moins à risque”, dont les réponses ne sont évidentes agressive (fig. 2). avec une prise en charge peut-être moins qu’en apparence. optimale (pas de recherche de ganglion ● La chirurgie viendra à bout d’un sentinelle, pas de traitement adjuvant, >>> Le mole mapping permet de détec mélanome agressif si elle est réalisée pré- d’où une possible perte de chance). ter précocement les mélanomes et donc cocement. Nous n’avons en fait aucune de réduire l’épaisseur tumorale idée de la proportion de mélanomes >>> La plupart des mélanomes détec curables par une chirurgie précoce. 50 % tés par mole mapping auraient tué les ● Oui, si c’est un processus lent. Dans ce des décès par mélanomes viendront de patients cas, l’impact sur l’épaisseur tumorale est tumeurs de stades I et II considérées très mineur. comme traitées par chirurgie précoce. Le monitoring nævique de patients avec Même avec une chirurgie précoce, un nævi multiples détecte principalement ● Cela devient très incertain si la crois- “tueur” tuera probablement… à moins des mélanomes à croissance lente, qui ne sance tumorale est rapide : entre deux d’appliquer un traitement médical puis- sont pas des “tueurs” et qui auraient été visites, l’épaisseur sera alors très impor- tante, à moins de réduire considérable- Très agressive Épaisseur tumorale ment l’intervalle des visites, ce qui n’est pas réaliste à l’heure actuelle (fig. 1). Faible épaisseur veut dire : Peu agressive >>> Le dépistage anticipé a un impact – soit une tumeur peu agressive sur la survie – soit un diagnostic précoce d’une tumeur agressive Ce n’est pas si évident car cela repose sur Temps plusieurs postulats discutables : Forte épaisseur veut dire : – soit tumeur agressive ● Un délai diagnostique court veut dire – soit un diagnostic tardif d’une faible épaisseur. Plusieurs études épidé- tumeur peu agressive miologiques internationales ont montré l’absence de lien entre le délai diagnos- tique et l’épaisseur tumorale. Fig. 2 : L’épaisseur tumorale n’est pas une représentation de l’agressivité biologique d’un mélanome. 47
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales détectés plus tard, sans vraie incidence sur Merci à mon Maître, le Professeur Jean- la mortalité en termes de santé publique. Jacques Grob, qui m’a autorisée à s’ins- pirer très largement de sa présentation >>> Les patients soumis au mole map- au WCD 2019 de Milan. ping sont la bonne cible du dépistage L’auteure a déclaré ne pas avoir de conflits Les patients cibles du mole mapping et d’intérêts concernant les données publiées les cancérophobes ne sont pas les patients dans cet article. les plus “à risque”. Il faut distinguer le “risque de développer un mélanome” du “risque de mourir d’un mélanome”. Les personnes avec nævi multiples sont Mélanome de à haut risque de mélanome, mais pas Dubreuilh : y-a-t-il une forcément à haut risque de mourir d’un mélanome. Or, les mélanomes à crois- alternative crédible sance rapide se développent chez des à la chirurgie en individus sans phénotype distinct au sein de la population générale. pratique clinique ? J.-M. AMICI Service de Dermatologie, CHU de BORDEAUX. Conclusion Faut-il poursuivre une pratique dermato- Chirurgie ou traitement logique peu efficace, chronophage et coû- alternatif ? teuse ? Avec mobilisation d’experts peu nombreux, suréquipés, surveillant des La chirurgie est le traitement recom individus déjà sensibilisés et sans doute mandé en première ligne car c’est le seul hyperanxieux ? Le bénéfice reste incer- traitement “contrôlé”, permettant une tain, même chez les patients à risque : analyse histologique de la pièce d’exé- diminution d’épaisseur de mélanomes rèse. Il remplit l’objectif de radicalité car- peu agressifs, sans impact sur la survie ? cinologique et obtient le plus faible taux Fig. 1 : Plastie en S italique horizontalisée, carcino- de récidive à 5 ans : 6 à 8 % [1]. logique, fonctionnelle et cosmétique. Faut-il conserver cette activité pour des cas finalement assez rares – les patients Selon les recommandations de bonne tation pluridisciplinaire, les traitements impossibles à surveiller du fait de leur pratique, une marge de sécurité de 1 cm alternatifs, dominés par la radiothérapie phénotype nævique (les “léopards”) – est nécessaire pour l’exérèse d’un len- et l’imiquimod [4]. Ces traitements sont mais qui ont un impact limité sur la mor- tigo malin intra-épidermique, avec la envisageables en adjuvant ou néo- talité globale car elle représente une part possibilité de réduire à 0,5 cm pour des adjuvant si une surveillance attentive infime des cas de mélanomes ? lésions étendues et/ou en cas de préjudice et un suivi par un praticien expérimenté fonctionnel induit par la chirurgie et sous sont effectués. Les données pour le 5-FU, Ne faudrait-il pas changer de modèle et réserve de pratiquer un contrôle strict et les rétinoïdes, le laser et la cryochirurgie générer de nouvelles techniques permet- exhaustif des berges [2]. La chirurgie règle sont peu robustes. tant une généralisation du mole mapping un grand nombre de situations avec des en population générale (systèmes auto- techniques simples d’exérèse-suture, non matisés, intelligence artificielle, etc.) délabrantes, carcinologiques, fonction- Radiothérapie pour ensuite diriger les individus sélec- nelles et optimisant le suivi [3] (fig. 1). tionnés vers des experts ? 10 études rétrospectives montrent que la Toutefois, chez les patients d’âges très radiothérapie constitue une excellente Il faut aussi probablement progresser avancés, la chirurgie devient inappro- alternative bien tolérée donnant de bons dans les biomarqueurs permettant de priée et déraisonnable pour les lésions résultats cosmétiques versus chirurgie détecter les vraies tumeurs agressives étendues, générant des dégâts anato- sur lentigo malin étendu. Selon la tech- afin de traiter précocement et de surveil- miques. C’est dans cette situation que nique de radiothérapie, le taux de réci- ler de façon plus adaptée ces patients. vont se discuter, en réunion de concer- dive est de l’ordre de 11 à 13 %. C’est le 48
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales plus faible taux après la chirurgie [5, 6]. évaluables de 72 ans d’âge moyen ont ment and therapeutic modalities. Br J La radiothérapie de basse énergie est été inclus, ils recevaient l’imiquimod Dermatol, 2003;48:703-708. utilisée selon un protocole de 2 fois par avec une marge de 2 cm autour du len- 2. Tzellos T, Kyrgidis A, Mocellin S et al. Interventions for melanoma in situ, semaine pendant 3 semaines sur une tigo malin 5 fois par semaine durant including lentigo maligna. Cochrane zone cible comportant des marges de 12 semaines, soit 60 applications. Database Syst Rev, 2014:CD010308. 1 cm et avec une pénétration de 5 mm. La Une exérèse chirurgicale était ensuite 3. Amici JM, Beilly JY, Taieb A. Horizontal tolérance est habituellement bonne, sans pratiquée pour examen histologique. stretching concept in oncologic derma- séquelle. Elle constitue une alternative à Les résultats montent 46 % de rémis- tologic surgery of the face. J Eur Acad Dermatol Venereol, 2010;24:308-316. la chirurgie si celle-ci est “impossible” sion clinique pour 37 % de rémission 4. Read T, Noonan C, David M et al. A sys- ou refusée par le patient. Elle peut être histologique seulement, avec 73 % d’irri- tematic review of non-surgical treat- utilisée en traitement complémentaire tations modérées à sévères sans corréla- ments for lentigo maligna. J Eur Acad après excision incomplète. tion avec la réponse. Ce taux de réponse Dermatol Venereol, 2016;30:748-753. insuffisant ne justifie pas une phase III 5. Hedblad MA, Mallbris L. Grenz ray chirurgie vs imiquimod. treatment of lentigo maligna and early lentigo maligna melanoma. J Am Acad Imiquimod Dermatol, 2012;67:60-68. Un PHRC IMIREDUC, conduit par le 6. Fogarty GB, Hong A, Scolyer RA et al. L’imiquimod est un puissant immuno- Pr B. Dreno, a évalué l’intérêt de l’imi- Radiotherapy for lentigo maligna: modulateur irritant, hors AMM dans quimod en néo-adjuvant sur les lentigos a literature review and recommen- le traitement du lentigo malin. Il a fait malins du visage afin de diminuer la taille dations for treatment. Br J Dermatol, l’objet de 11 études rétrospectives sur de l’exérèse et le risque d’exérèse intra- 2014;170:52-58. 7. Tio D, van der Woude J, Prinsen CAC des lentigos malins histologiquement lésionnelle. L’imiquimod était appliqué et al. A systematic review on the role prouvés traités par imiquimod 5 % en 5 jours sur 7 durant 2,5 mois avant exé- of imiquimod in lentigo maligna and monothérapie ou combiné avec un autre rèse chirurgicale avec 2 mm de marges. lentigo maligna melanoma: need for topique [7]. Les résultats montrent une Le taux de récurrence du lentigo malin standardization of treatment schedule réponse clinique complète dans 78,3 % était évalué après suivi clinique prolongé and outcome measures. J Eur Acad Dermatol Venereol, 2017;31:616-624. des cas et une réponse histologique dans de 5,5 ans. 334 patients ont été inclus. 8. Marsden JR, Fox R, Boota NM et al. 77 % des cas. 9 lentigos malins (1,8 %) 12 récidives locales (3,9 %) sont surve- Effect of topical imiquimod as pri- étaient diagnostiqués 3,9 mois après nues avec un délai moyen de 4,3 ans, soit mary treatment for lentigo maligna: traitement. L’analyse multivariée avec un taux équivalent à la chirurgie de Mohs. the LIMIT-1 study. Br J Dermatol, régression logistique montrait : 2017;176:1148-1154. – 6 à 7 applications par semaine sont associées à un OR 6,47 supérieur Conclusion (p = 0,017) de réponse clinique complète, L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflits d’intérêts concernant les données publiées comparativement à 1 à 4 applications par La stratégie se discute au cas par cas dans cet article. semaine ; en réunion de concertation pluri – 6 à 7 applications par semaine sont disciplinaire, prenant en compte les associées à un OR 8,85 supérieur critères TOP : tumeur (taille, atteinte (p = 0,003) de réponse histologique com- organes nobles…), opérabilité (raison- plète, comparativement à 1 à 4 applica- nable ou inappropriée) et patient (ses Kératoses actiniques : tions par semaine ; attentes, son adhésion au traitement…). y a-t-il des stratégies – appliquer de l’imiquimod plus de En fait, il n’y a pas d’opposition entre 60 fois durant une période de traitement chirurgie et traitement alternatif mais thérapeutiques de 12 semaines montre un OR 7,75 supé- une complémentarité immédiate ou meilleures que rieur (p = 0,001) de réponse histologique différée, faite de combinaisons et rota- complète, comparativement à moins de tions thérapeutiques, avec un retour d’autres ? 60 applications. possible à la chirurgie si elle a été récusée en première ligne. J.-M. AMICI Service de Dermatologie, CHU de BORDEAUX. Par contre, un essai de phase II a mesuré la performance de l’imiquimod en pre- L’ BIBLIOGRAPHIE mière ligne de traitement, avec pour incidence des kératoses acti- critère principal le taux de rémission 1. Zalaudek I, Horn M, Richtig E et al. niques (KA) double tous les histologique complète après 60 appli- Local recurrence in melanoma in situ: 10 ans de façon proportionnelle cations d’imiquimod [8]. 27 patients influence of sex, age, site of involve- au vieillissement de la population [1]. 50
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Son génie évolutif est variable avec La dermoscopie permet de distinguer les 28,9 %. Ce dernier vient de faire l’objet 3 possibilités : la stabilité, la régression KA stade 2 avec leur “aspect en fraise” d’une recommandation de prudence de partielle ou complète ou la transforma- des KA suspectes de Bowen avec “aspect l’ANSM en raison de l’émergence de car- tion en carcinome épidermoïde avec en starburst vasculaire” [5]. cinomes épidermoïdes contemporaine un risque estimé à 10 % à 10 ans. La de son application. KA est un précurseur de 60 % des car- Il faut ici s’interdire une cryothérapie cinomes épidermoïdes [2]. En pratique et pratiquer une biopsie. Celle-ci doit L’imiquimod obtient 70 à 80 % de RC de vraie vie, on distingue 3 situations être guidée par la clinique et être parfois après 1 à 2 cycles et 17 à 39 % de réci- cliniques : multiple en cas de lésion étendue. Enfin, dives à 12 mois [8]. La PDT obtient – les kératoses actiniques isolées débu- il faut garder à l’esprit que la biopsie ne 83,3 % de RC et 17 % de récidives à tantes ; vaut que pour l’endroit biopsié. 12 mois [9]. La photothérapie dynamique – les kératoses actiniques menaçantes en lumière du jour, moins douloureuse (récidivantes, à croissance rapide, en que la PDT conventionnelle et autogé- zone à haut risque ou sur terrain à risque) ; Traitement du champ rée par le patient, a fait la preuve de sa – les kératoses actiniques multiples en de cancérisation non-infériorité face à la PDT convention- champ de cancérisation. nelle pour les KA légères à modérées per Il nécessite une prise en charge étalée protocole à S12 [10]. dans le temps du fait de son évolution Kératoses actiniques isolées chronique. Il est l’objet de combinai- sons thérapeutiques et de rotation thé- Prévention Elles relèvent en première ligne d’une rapeutique. Le traitement du champ de cryothérapie, simple, rapide, peu coû- cancérisation repose sur les traitements La photoprotection par l’application teuse (recommandation SFD 2009). La topiques, la PDT et la Daylight PDT régulière d’écran solaire a fait la preuve cryothérapie obtient 32 % de rémission (fig. 1) [6]. de son efficacité chez des greffés d’or- histologique à 6 semaines avec un taux gane sur KA et K cutanés [11]. de récidive de 72 % à 12 mois [3]. Un essai randomisé comparatif a inclus 624 patients présentant plus de 5 KA sur La chémoprévention a démontré son une zone de 25-100 cm2 du visage et du efficacité dans une étude ayant inclus KA menaçantes, récidivantes cuir chevelu. Le critère principal était 386 patients atteints de cancer cutané ou à croissance rapide la réduction de 75 % des KA à 12 mois/ dans les 5 ans précédents. Un groupe a baseline et le maintien de la réponse com- reçu 500 mg de nicotinamide matin et Elles sont suspectes de dégénérescence plète (RC) à 12 mois [7]. Le 5-FU obtient soir 12 mois versus un placebo dans le et des critères cliniques permettent de 74,7 % de RC, l’imiquimod 53,9 %, la groupe contrôle. Les résultats montrent les identifier [4]. La localisation en zone MAL-PDT 37,7 % et l’ingénol mébutate 20 % de cancers cutanés en moins à à risque est déterminante à prendre en 12 mois dans le groupe nicotinamide et compte, en particulier oreille, lèvre et 11 % de KA en moins [12]. extrémités. Les critères majeurs (IDRBEU) sont les Prise en charge des kératoses suivants : actiniques – induration/inflammation ; – diamètre > 1 cm ; La figure 2 présente l’algorithme de prise – rapide augmentation de taille ; en charge des KA [13]. – bleeding (saignement) ; – érythème ; – ulcération. Conclusion Les critères mineurs sont les suivants : Les traitements des KA présentent des – pigmentation ; performances thérapeutiques différentes – palpables ; selon les études d’AMM et de vraie vie. – douleur ; Chaque traitement a des avantages et des – prurit ; inconvénients avec des protocoles très – hyperkératose. Fig. 1 : Champ de cancérisation du scalp. différents à adapter à chaque patient, en 51
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales cer in organ transplant patients by reg- ular use of a sunscreen: a 24 months, ÉVALUATION DES LÉSIONS : NOMBRE ET ASPECT prospective, case-control study. Br J Dermatol, 2009;161 Suppl 3:78-84. 12. Chen AC, Martin AJ, Choy B et al. A KA isolées KA multiples phase 3 randomized trial of nicotina- mide for skin-cancer chemoprevention. 1re intention KA non KA KA KA non KA hyperkératosiques hyperkératosiques suspectes hyperkératosiques hyperkératosiques N Engl J Med, 2015;373:1618-1626. – Cryothérapie – Cryothérapie – Exérèse Traitements topiques Décapage 13. Dréno B, Amici JM, Basset-Seguin N – Curetage – Biopsie – 5-FU 5 % – manuel et al. Management of actinic keratosis: – imiquimod 5 % – chimique – diclofénac sodique 3 % a practical report and treatment algo- – mébutate d’ingénol rithm from AKTeamTM expert clini- Traitements physiques cians. J Eur Acad Dermatol Venereol, – laser 2014;28:1141-1149. 2e intention – PDT Association de traitements physiques, Chirurgie si récidive/résistance topiques ou chirurgie L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflits d’intérêts concernant les données publiées dans cet article. PHOTOPROTECTION – PHOTORÉPARATION Fig. 2 : Algorithme de prise en charge des KA (d’après [13]). Comment je prends gérant la douleur et les réactions cuta- 4. Quaedvlieg PJ, Tirsi E, Thissen MR et al. Actinic keratosis: how to differenti- en charge une nées locales. Il faut donc recommander une prise en charge personnalisée qui ate the good from the bad ones? Eur J papulose bowénoïde Dermatol, 2006;16:335-339. dépendra de l’opérateur, de son exper- J.-N. DAUENDORFFER 5. Röwert-Huber J, Patel MJ, Forschner T tise et de l’attente, de la compliance et et al. Actinic keratosis is an early in Hôpital Saint-Louis, PARIS. de l’observance des patients. Les KA situ squamous cel carcinoma: a pro- constituent une pathologie évolutive, posal for reclassification. Br J Dermatol, L une maladie chronique selon l’OMS qui 2007;156;S3:8-12. a papulose bowénoïde (PB) cor- bénéficiera de combinaisons et rotations 6. S tockfleth E. The importance of respond à une néoplasie intra treating the field in actinic keratosis. thérapeutiques. Il faut toujours associer épithéliale (NIE) HPV-induite du J Eur Acad Dermatol Venereol, 2017;31 une photoprotection et une répara- Suppl 2:8-11. pénis, de la vulve ou de l’anus. Il est tion, voire une chémoprévention, mais 7. Jansen MHE, Kessels JPHM, Nelemans PJ en effet d’usage de distinguer histo- surtout garder le bon sens clinique ! et al. Randomized trial of four logiquement les NIE HPV-induites et approaches for actinic keratosis. N Engl les NIE différenciées, les premières étant BIBLIOGRAPHIE J Med, 2019;380:935-946. liées à une infection à papillomavirus 8. Lebwohl M, Swanson N, Anderson LL (HPV 16 essentiellement), les secondes 1. D e V ries E, van de P oll -F ranse LV, et al. Ingenol mebutate gel for actinic keratosis. N Engl J Med, 2012;366: survenant le plus souvent sur une der- Louwman WJ et al. Predictions of skin matose génitale chronique (lichen cancer incidence in Netherlands up to 1010-1019. 2015. Br J Dermatol, 2005;152:481-488. 9. Szeimies RM, Matheson RT, Davis SA scléreux). 2. Smit P, Plomp E, Neumann HA et al. The et al. Topical methyl aminolevuli- influence of the location of the lesion nate photodynamic therapy using red La PB survient chez les sujets jeunes et réa- on the absolute risk of the develop- light-emitting diode light for multiple lise des maculo-papules volontiers poly- ment of skin cancer in a patient with actinic keratoses: a randomized study. Dermatol Surg, 2009;35:586-592. morphes et multifocales, pigmentées ou actinic keratosis. J Eur Acad Dermatol 10. Lacour JP, Ulrich C, Gilaberte Y et al. blanches (leucoplasiques), voire érythé- Venereol, 2013;27:667-671. 3. K rawtchenko N, R oewert -H uber J, Daylight photodynamic therapy with mateuses, parfois regroupées en plaques. Ulrich M et al. A randomised study methyl aminolevulinate cream is effec- of topical 5% imiquimod vs. topical tive and nearly painless in treating Les lésions multiples de PB ne doivent 5-fluorouracil vs. cryosurgery in immu- actinic keratoses: a randomised, inves- pas être confondues avec de simples nocompetent patients with actinic ker- tigator-blinded, controlled, phase III study throughout Europe. J Eur Acad condylomes plans ou papuleux, d’autant atoses: a comparison of clinical and histological outcomes including 1-year Dermatol Venereol, 2015;29:2342-2348. plus que PB et condylomes, tous deux follow-up. Br J Dermatol, 2007;157 11. Ulrich C, Jürgensen JS, Degen A et al. HPV-induits, peuvent être présents chez Suppl 2:34-40. Prevention of non-melanoma skin can- un même patient. 52
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Le diagnostic de PB nécessite une biop- sie. L’examen histologique montre une Les toxicités limbique imputable à l’immunothéra- pie. Malgré la suspension du pembro- NIE HPV-induite (présence d’atypies définitives des lizumab, la corticothérapie orale et les cytonucléaires étagées sur toute la hau- teur de l’épithélium avec présence de immunothérapies : immunoglobulines IV, le tableau neuro logique s’aggrave et le patient décède koïlocytes) qui peut correspondre à deux comment éclairer quelques semaines plus tard. entités cliniques, la PB et la maladie de Bowen, d’évolution et de prise en charge le choix des patients ? >>> Le cas n° 2 est celui d’un homme de spécifiques, nécessitant de la part du 67 ans mis sous pembrolizumab en traite- dermatologue de réaliser une confronta- C. DUTRIAUX ment d’un mélanome métastatique. Dès Service de Dermatologie, CHU de BORDEAUX. tion anatomoclinique. la 2e cure, une élévation importante de la T4 et un effondrement de la TSH sont L Malgré une image histologique inquié- es inhibiteurs de checkpoints notés, accompagnant un tableau clinique tante (atypies présentes sur toute la ont transformé le pronostic des d’hyperthyroïdie : palpitations, sueurs, hauteur de l’épithélium) et la présence patients atteints de mélanome. oppression thoracique. Une hypothy- d’HPV oncogènes, la PB évolue rarement L’amplification des phénomènes effec- roïdie périphérique biologique s’installe en carcinome épidermoïde invasif sauf teurs de la réponse immune, par la quelques jours après, facilement substi- chez les sujets immunodéprimés. Un levée des freins physiologiques à l’ac- tuée par L-thyroxine. L’immunothérapie bilan d’extension de l’infection à HPV tivation des lymphocytes T, explique à est poursuivie et le bilan thyroïdien reste est indispensable, comportant un exa- la fois leur efficacité antitumorale et la vérifié à chaque perfusion. men clinique génital, anal et buccal, une survenue possible d’effets secondaires anuscopie en cas d’antécédents de rap- immuno-induits. L’oncodermatologue >>> Le cas n° 3 permet d’illustrer une ports sexuels anaux réceptifs, un frottis doit désormais savoir les identifier, les toxicité cutanée perdurant à l’arrêt du cervical, un bilan à la recherche d’une évaluer et les traiter. Bien que la majorité nivolumab chez un patient de 72 ans infection sexuellement transmissible et des toxicités engendrées aient une évo- traité pour mélanome stade IV et ayant un examen du ou de la partenaire. lution favorable, avec ou sans traitement développé au cours de son traite- glucocorticoïde, certaines sont plus tar- ment plusieurs effets immuno-induits Le caractère volontiers multifocal des dives et/ou chroniques, et leur évolution résolutifs : hépatite grade 2, polyarthrite lésions de PB rend l’exérèse chirurgicale est plus incertaine. Un impact fonction- grade 2 et vitiligo. L’apparition de le plus souvent inadaptée. La stratégie de nel, un handicap, une détérioration lésions papulo-vésiculeuses et papulo- traitement est proche de celle des condy- cognitive, une altération de la qualité kératosiques prédominant au tronc, très lomes (cryothérapie en cas de lésions de vie peuvent aussi se manifester alors prurigineuses, fait soulever l’hypothèse peu nombreuses, imiquimod topique si que la maladie oncologique est parfois d’une maladie de Grover (dermatose lésions nombreuses), quoique les résis- parfaitement contrôlée [1]. acantholytique transitoire), confirmée à tances aux traitements locaux habituels et la biopsie cutanée. les récidives soient plus fréquentes en cas Nous donnons dans cet article quelques de PB, expliquant la fréquente nécessité exemples de toxicité “chroniques” sous Ces 3 cas issus de la pratique d’un ser- de recourir à la vaporisation au laser CO2. immunothérapie par anti-PD1. vice hospitalier d’oncodermatologie montrent que la toxicité des inhibiteurs La persistance d’un HPV oncogène sur >>> Le cas n° 1 concerne un homme de de checkpoints, même en monothérapie, la muqueuse génitale au décours de 81 ans, traité pour un mélanome avancé peut être d’évolution chronique, sans l’éradication des lésions impose une par pembrolizumab et développant tendance à la restitution de l’organe surveillance clinique annuelle, voire 3 mois après l’initiation de l’anti-PD1, atteint. Les effets secondaires neuro pluriannuelle chez les patients immuno- de façon insidieuse, un syndrome logiques centraux sont très rares, mais déprimés (VIH+, greffés d’organes) chez apraxo-aphaso-agnosique et des troubles ils peuvent mettre en péril les fonc- qui, d’une part, la disparition complète mnésiques. L’IRM cérébrale montre une tions psycho-cognitives, sensorielles des lésions cliniques n’est pas toujours atrophie des unci et des hippocampes, et motrices, et entraîner un handicap obtenue et, d’autre part, les récidives en hypersignal flair, sans aspect de définitif [2]. sont plus fréquentes. progression tumorale, et la ponction lombaire une réaction lymphocytaire, Les hypothyroïdies, fréquentes sous sans cellules anormales. Le diagnostic anti-PD1, sont accessibles à une substi- L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflits d’intérêts concernant les données publiées retenu après élimination des autres étio- tution hormonale et n’entravent pas la dans cet article. logies potentielles est une encéphalite poursuite du traitement anticancéreux. 53
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales Cependant, elles sont le plus souvent 4. A mini -A dle M, B alme B, D alle S. sporine) [3-5]. Les anti-TNFα paraissent chroniques, de la même façon que Grover’s-like drug eruption under avoir surtout un rôle révélateur ou promo- anti-PD-1 therapy for metastatic les déficits corticotropes, obligeant le melanoma. Ann Dermatol Venereol, teur à partir de lésions pré-cancéreuses patient à une hormonothérapie à vie et 2018;145:802-803. en début de traitement, dans les pre- nécessitant une “éducation” par l’endo miers mois [3]. Ce risque ne paraît pas crinologue ainsi qu’un monitoring augmenter avec le temps d’exposition, biologique au long cours [3]. L’auteure a déclaré ne pas avoir de conflits contrairement à ce que l’on observe avec d’intérêts concernant les données publiées dans cet article. des immunosuppresseurs comme les Les effets cutanés immuno-induits de anticalcineurines ou l’azathioprine chez type Grover sont assez rares, décrits les patients transplantés. À ce jour, il n’y dans la littérature avec les anti-PD1 et a pas de surrisque démontré avec l’usteki- les anti-CTLA4, mais impactent la qua- numab (USK) [6] et les anti-IL17 (brodalu- lité de vie des patients par le prurit et Cancers cutanés et mab, ixekizumab et secukinumab) [7-9]. l’altération de l’image corporelle qu’ils biothérapies : quelles entraînent. Ils peuvent parfois s’auto- 2. Mélanomes nomiser alors même que l’immunothé- décisions prendre ? rapie est stoppée, malgré un traitement Des cas de reprises évolutives chez des symptomatique bien conduit [4]. L. DEQUIDT patients aux antécédents de mélanome Service de Dermatologie, Hôpital Saint-André, CHU de BORDEAUX. ont été décrits lors de l’initiation d’un L’expertise médicale, l’accompagne- anti-TNFα, néanmoins il n’y a pas de ment paramédical, les soins de support, surrisque démontré de mélanome chez la préservation de la fertilité, le recours Existe-t-il un surrisque de les patients traités par anti-TNFα [8]. Là aux patients partenaires sont autant cancer au cours d’un encore, il n’y a pas de surrisque démon- d’axes complémentaires de prise en traitement par biothérapie ? tré chez les patients traités par USK ou charge permettant d’aider les patients à anti-IL17 (brodalumab, ixekizumab et tolérer ces effets adverses, à “vivre avec”. Les traitements biologiques, principa- secukinumab) [6-9]. L’utilisation récente de ces molécules en lement les anti-TNFα, font l’objet de phase adjuvante fait émerger les mêmes controverses concernant le risque de can- 3. Lymphomes cutanés problématiques mais chez des patients cer. Les données actuelles dans les mala- free of disease, ce qui pourrait fragiliser dies inflammatoires chroniques sont en La principale problématique est celle la balance bénéfices/risques d’un tel faveur de l’absence d’un surrisque de des mycosis fongoïdes pris à tort pour traitement. Une meilleure compréhen- cancer, en dehors des cancers cutanés un psoriasis et s’aggravant sous anti- sion des mécanismes d’apparition de ces épithéliaux [1]. Les facteurs de risque TNFα, comme le suggère l’étude multi- toxicités et l’identification de facteurs individuels sont néanmoins à prendre centrique récemment menée associant le prédictifs sont indispensables. en compte (maladie inflammatoire chro- Groupe français d’étude des lymphomes nique, traitements immunosuppresseurs cutanés et les données de pharmacovigi- antérieurs/en cours, tabac, alcool…). lance [10]. En revanche, il ne semble pas exister de surrisque chez les patients trai- BIBLIOGRAPHIE tés par biothérapie pour une pathologie 1. Champiat S, Lambotte O, Barreau E Biothérapies autre que le psoriasis. et al. Management of immune check- et cancers cutanés point blockade dysimmune toxicities: a collaborative position paper. Ann 1. Carcinomes cutanés Quelle attitude thérapeutique Oncol, 2016;27:559-574. chez un patient candidat 2. Touat M, Talmasov D, Ricard D et al. Neurological toxicities associated with Dans une méta-analyse de 76 articles, à une biothérapie avec immune-checkpoint inhibitors. Curr Askling et al. [2] ont montré un sur- un antécédent de cancer Opin Neurol, 2017;30:659-668. risque lié à l’utilisation des anti-TNFα. ou cancer actif ? 3. D e l i va n i s DA, G u s ta f s o n MP, Il s’agit principalement de carcinomes, Bornschlegl S et al. Pembrolizumab- notamment de type épidermoïde [1]. Le Groupe de recherche sur le psoriasis induced thyroiditis: comprehen- L’évaluation du risque de carcinome de la Société Française de Dermatologie sive clinical review and insights into underlying involved mechanisms. cutané doit là aussi tenir compte de a récemment publié des recommanda- Clin Endocrinol Metab, 2017;102: l’impact des traitements antérieurs/en tions pour le choix d’un traitement bio- 2770-2780. cours (photothérapie, thiopurine, ciclo logique dans ce contexte [11, 12]. 54
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 1. Pour tous les patients l’aprémilast ne permettent pas de le 3. Van Lümig PPM, Menting SP, van den recommander dans cette situation. Reek JMPA et al. An increased risk of non-melanoma skin cancer during Il convient de s’assurer que les pro- TNF-inhibitor treatment in psoria- grammes de dépistage organisé des En l’absence d’alternative, un traitement sis patients compared to rheumatoid cancers soient bien respectés (sein, col par biothérapie peut se discuter, en pré- arthritis patients probably relates to de l’utérus, colorectal). Cliniquement, férant l’USK ou un anti-TNFα (adalimu- disease-related factors. J Eur Acad il faut s’assurer de l’absence de cancer mab ou étanercept) en fonction du stade Dermatol Venereol, 2015;29:752-760. et en particulier de carcinomes cutanés. et du pronostic de la tumeur. 4. Paul CF, Ho VC, McGeown C et al. Risk of malignancies in psoriasis patients treated with cyclosporine: a 5 y cohort study. 2. Que faire en cas d’antécédent de 4. Que faire si un cancer apparaît sous J Invest Dermatol, 2003;120:211-216. cancer ? traitement ? 5. P eyrin -B iroulet L, K hosrotehrani K, Carrat F et al. Increased risk for non- L’attitude va dépendre du type de can- Il n’y a pas de recommandation spéci- melanoma skin cancers in patients cer, de son ancienneté, de son statut fique à ce sujet. Dans un premier temps, who receive thiopurines for inflamma- tory bowel disease. Gastroenterology, actuel, de son risque de récidive et de la biothérapie peut être suspendue. Le 2011;141:1621-1628.e1-5. son potentiel évolutif en cas de récidive. raisonnement est par la suite adapté au 6. Papp KA, Griffiths CEM, Gordon K et al. Dans tous les cas, la décision doit être cas par cas en fonction du patient, du Long-term safety of ustekinumab in discutée avec le patient et avec l’onco- type de cancer (pronostic, stade), de la patients with moderate-to-severe psoria- logue qui le suit. biothérapie, de la pathologie justifiant le sis: final results from 5 years of follow-up. Br J Dermatol, 2013;168:844-854. traitement par biothérapie et de l’exis- 7. Bissonnette R, Luger T, Thaçi D et al. En cas de cancer “invasif” en rémission, tence d’alternative thérapeutique. La Secukinumab demonstrates high sus- un traitement par biothérapie peut être décision sera pluridisciplinaire (onco- tained efficacy and a favourable safety envisagé après une période de 2 ans. logue, dermatologue, patient). profile in patients with moderate-to-se- En cas de cancer “agressif” (mélanome, vere psoriasis through 5 years of treat- poumon, sarcome, carcinome des voies En cas de carcinome épidermoïde, il n’y ment (SCULPTURE Extension Study). J Eur Acad Dermatol Venereol, 2018; urinaires, myélome), une période de a pas de contre-indication à poursuivre 32:1507-1514. 5 ans après la rémission est recomman- la biothérapie si l’exérèse est complète, 8. Lebwohl MG, Blauvelt A, Menter A dée. Pour les carcinomes cutanés, une sans arguments histopronostiques défa- et al. Efficacy, safety, and patient-re- fois l’exérèse réalisée, pas de contre- vorables. Concernant le mélanome, à ported outcomes in patients with mod- indication à débuter une biothérapie l’heure actuelle incurable, la poursuite erate-to-severe plaque psoriasis treated (hors carcinomes épidermoïdes avec de la biothérapie est à éviter mais peut with brodalumab for 5 years in a long- term, open-label, phase II study. Am J critères histologiques agressifs). se discuter pour un mélanome de faible Clin Dermatol, 2019;20:863-871. épaisseur, non ulcéré (Breslow < 1 mm). 9. Langley RG, Kimball AB, Nak H et al. 3. Que faire en cas de cancer datant de Long-term safety profile of ixekizumab moins de 2 ans ? Remerciements à Marie Beylot-Barry et in patients with moderate-to-severe Julien Seneschal. plaque psoriasis: an integrated analy- La prise en charge se fera là encore en col- sis from 11 clinical trials. J Eur Acad Dermatol Venereol, 2019;33:333-339. laboration étroite avec l’oncologue et/ou 10. Dequidt L, Franck N, Sanchez-Pena P l’équipe multidisciplinaire de soins. On et al. Cutaneous lymphomas appear- BIBLIOGRAPHIE pourra prioriser une alternative à la bio- ing during treatment with biologics: thérapie : traitement topique, acitrétrine, 1. Mariette X, Matucci-Cerinic M, Pavelka K 44 cases from the French Study Group photothérapie (sauf s’il s’agit d’un anté- et al. Malignancies associated with on Cutaneous Lymphomas and French cédent de mélanome). En cas d’échec tumour necrosis factor inhibitors in Pharmacovigilance Database. Br J registries and prospective observa- Dermatol, 2019;181:616-618. ou de contre-indication des alternatives tional studies: a systematic review 11. Amatore F, Villani AP, Tauber M et al.; de première ligne, le méthotrexate sera Psoriasis Research Group of the French and meta-analysis. Ann Rheum Dis, privilégié, en s’assurant de l’absence 2011;70:1895-1904. Society of Dermatology (Groupe de d’interaction médicamenteuse avec le 2. Askling J, Fahrbach K, Nordstrom B recherche sur le psoriasis de la Société traitement oncologique (toxicité héma- et al. Cancer risk with tumor necro- française de dermatologie). French tologique, rénale et hépatique). sis factor alpha (TNF) inhibitors: guidelines on the use of systemic meta-analysis of randomized con- treatments for moderate-to-severe pso- trolled trials of adalimumab, etaner- riasis in adults. J Eur Acad Dermatol Pour mémoire, la ciclosporine est formel- cept, and infliximab using patient level Venereol, 2019;33:464-483. lement contre-indiquée en cas d’antécé- data. Pharmacoepidemiol Drug Saf, 12. Amatore F, Villani AP, Tauber M et al.; dent de cancer et les données concernant 2011;20:119-130. Groupe de recherche sur le psoriasis 55
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales de la Société française de dermatolo- Les principaux critères cliniques à BIBLIOGRAPHIE gie. [French guidelines on the use of prendre en considération pour les systemic treatments for moderate-to-se- 1. Ro w e DE, C a r r o l l RJ, D ay CL et al. vere psoriasis in adults]. Ann Dermatol risques de récidive et de métastase sont : Prognostic factors for local recurrence, Venereol, 2019;146:429-439. – la localisation de la tumeur, avec ris metastasis, and survival rates in squa- que plus élevé de 10 à 20 % en zone péri- mous cell carcinoma of the skin, ear, orificielle (notamment sur les oreilles et and lip. Implications for treatment mod L’auteure a déclaré les liens d’intérêts la lèvre rouge) [1] ; ality selection. J Am Acad Dermatol, suivants : financement à des congrès par 1992;26:976-990. AbbVie, Celgene, Léo Pharma et Sanofi. – son plus grand diamètre (une taille 2. Wi n k e l h o r s t J T, B r o k e l m a n W J , ≥ 2 cm double le risque de récidive) [1] ; Tiggler RG et al. Incidence and clinical – sa survenue sur une zone cicatri- course of de-novo malignancies in cielle, y compris brûlure, ou de plaie renal allograft recipients. Eur J Surg chronique, avec un risque métastatique Oncol, 2001;27:409-413. Carcinomes d’environ 26 %. 3. Martinez JC, O tley CC, S tasko T et al. épidermoïdes cutanés et Defining the clinical course of meta- static skin cancer in organ transplant À l’anamnèse, il faut impérativement nouvelles classifications : rechercher une immunodépression recipients: a multicenter collaborative study. Arch Dermatol, 2003;139:301-306. quels facteurs sous-jacente [2, 3], qu’elle soit iatro- 4. Karia PS, J ambusaria -P ahlajani A, gène (patient greffé sous immunosup- Harrington DP et al. Evaluation of pronostiques le clinicien presseurs) ou liée à une pathologie American Joint Committee on Cancer, International Union Against Cancer, and doit-il avoir en tête ? (infection par le VIH, leucémie lym- phoïde chronique), et le caractère réci- Brigham and Women’s Hospital tumor staging for cutaneous squamous cell car- F. HERMS divant du CEC. Après examen cinoma. J Clin Oncol, 2014; 32:327-334. Service de Dermatologie, Hôpital Saint-Louis, PARIS. histologique, une attention particulière 5. Goepfert H, Dichtel WJ, Medina JE et al. doit être portée à l’épaisseur tumorale Perineural invasion in squamous cell P lusieurs classifications cliniques, (au-delà de 2 mm d’épaisseur, le risque skin carcinoma of the head and neck. Am J Surg, 1984;148:542-547. radiologiques et/ou histologiques métastatique est de 4 %, puis 16 % au- sont à la disposition du clinicien delà de 6 mm) [4]. Une extension au- pour lui permettre d’évaluer le degré delà de la graisse sous-cutanée est de L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflits d’intérêts concernant les données publiées de gravité d’un carcinome épidermoïde mauvais pronostic, avec 28 % de risque dans cet article. cutané (CEC). Cette recherche de facteurs de récidive et 27 % de risque métasta- pronostiques va permettre de guider la tique ganglionnaire. L’infiltration péri- prise en charge diagnostique (réalisation nerveuse est à haut risque de récidive d’un bilan paraclinique), thérapeutique et métastatique [5], et sa présence peut (évaluation des marges d’exérèse chirurgi- amener à proposer une radiothérapie Prolifération cale, réalisation d’un traitement adjuvant) adjuvante afin de limiter ces risques. mélanocytaire et également le suivi ultérieur du patient. Enfin, le type histologique (desmoplas- tique et adénosquameux sont de plus indéterminée : doit- La nouvelle classification AJCC 8 mauvais pronostic que le carcinome on cacher son (American Joint Committee on Cancer) invasif commun ou le verruqueux) et le de 2017 intègre les CEC de la tête et degré de différenciation tumorale doi incertitude derrière du cou, tandis que d’autres telles que la Brigham and Women’s Hospital vent également être pris en compte. des mots sans intérêt Tumor Staging System ou la classifica- La présence d’un critère clinique (loca opérationnel ? tion élaborée sous l’égide de la Société lisation, taille, CEC sur cicatrice), anam B. VERGIER Française de Dermatologie labelli- nestique (immunodépression, récidive) Service de Pathologie, CHU de BORDEAUX ; sée INCa-HAS de 2009 regroupent ou histologique (épaisseur, présence Inserm U 1053 UMR BaRITOn. les CEC sur l’ensemble du tégument. d’engainement périnerveux, type histo Plusieurs critères cliniques, histolo- logique et degré de différenciation) de P giques et anamnestiques sont indispen- mauvais pronostic doit toujours être our introduire ce sujet, il me sables à prendre en compte pour classer impérativement recherchée, et peut semble important de rappeler aux un CEC dans une catégorie de haut grade, conduire à des examens complémen- cliniciens dermatologues qu’il donc à plus haut risque de récidive ou taires et à un avis spécialisé pour la suite faut se méfier d’un médecin anatomo- métastatique. de la prise en charge. pathologiste plein de certitudes (qui ne 56
réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie n° 287_Décembre 2019 - Cahier 1 Questions flash – Pathologies tumorales doute jamais) car, comme vous, nous rationnel) ou épaisse ? quel est l’âge du par tous. Pour dépasser cette difficulté, il interprétons un tableau clinique à partir patient ? quel est le site lésionnel (che- suffit de bien communiquer avec “son” d’une image microscopique qui ne ré- ville plus difficile à reprendre que bras, clinicien. vèle pas toujours clairement qui elle est. par exemple) ? le contexte clinique (anté- Mais, à l’inverse, il me paraît important cédent récent de mélanome ?) ● Dire clairement de quel côté bascule d’apprendre aux pathologistes à ne pas l’incertitude. En effet, la notion de lésion émettre de doutes systématiquement sur ● Si l’intérêt opérationnel est minime (par atypique (par exemple, tumeur de Spitz leurs conclusions. En matière de tumeur exemple, une lésion atypique in situ ou atypique) ne dit pas au clinicien si le mélanique, l’utilisation de cette termi- invasive à faible Breslow ou une lésion doute est du côté “bénin” (nævus de nologie floride cachant notre incerti- présentant des atypies légères/modérées Spitz versus tumeur de Spitz atypique) tude (prolifération mélanocytaire avec sans critère pour un mélanome de type ce qui, finalement, n’a pas d’intérêt opé- atypies légères/modérées, de pronostic SSM même in situ), il convient de tou- rationnel réel une fois que la lésion est incertain, MIN, SELTUMP, MELTUMP, jours se demander si ces atypies peuvent enlevée en totalité ou du côté “malin” lésion mélanique ambiguë difficile à être expliquées (sur la lame et/ou par les (tumeur de Spitz atypique versus méla classer, tumeur mélanique de malignité renseignements cliniques). Par exemple, nome spitzoïde), ce qui a un réel intérêt incertaine, nævus composé atypique…) on peut très bien voir sur la lame des opérationnel. doit être choisie à bon escient et toujours signes de traumatisme ou d’irritation associée à une explication claire. expliquant des atypies intraépidermiques ● Ne pas utiliser des conclusions parfois évocatrices de SSM. Le patho “abruptes” type “nævus atypique logiste doit toujours se poser la question (point)” sans expliquer rapidement Doit-on cacher son incertitude de l’utilité réelle de signaler son incerti- pourquoi cette lésion est atypique et en tant que pathologiste ? tude dans la conclusion si l’impact opé- s’il existe des conséquences opération- rationnel est minime : n’est-ce pas une nelles à ces atypies. Bien sûr que non. Mais avant de faire façon “d’ouvrir le parapluie” ou de gérer part de son incertitude, le médecin patho sa propre angoisse (pathologiste, comme La difficulté reste de savoir si le patho- logiste doit appliquer certaines règles dermatologue, plus ou moins optimiste) ? logiste, dans un souci de clarté, doit d’or : proposer une conduite thérapeutique ● Utiliser un vocabulaire compréhen- (type reprise d’exérèse par exemple). ● Analyser les conséquences opération- sible par tout clinicien et c’est bien là le Personnellement, j’ai rencontré plus de nelles de son diagnostic (fig. 1) : la lésion problème car il n’existe pas un glossaire dermatologues opposés à cette option est-elle fine (pas ou peu d’impact opé- international compris de façon identique que de dermatologues souhaitant que le pathologiste propose une conduite thérapeutique. Il est probablement déli- cat d’affirmer une conduite thérapeu- 8 ans, joue tique dans la mesure où le pathologiste Quel intérêt opérationnel ? Doute Spitz atypique Mélanome (épais) n’a qu’une partie du dossier du patient. 20-30 ans, bras Par contre, tous les éléments d’une prise Doute entre mélanome simulant en charge optimale doivent être retrou- un nævus (épais) et nævus vés dans la conclusion. 40 ans, jambe (cheville) Doute entre SSM sur nævus et SSM invasif (épais) Par ailleurs, rapidement, en cas de lésion 40 ans, jambe (cheville) mélanique incertaine, la question d’en- Doute entre SSM in situ voyer ou non les lames pour deuxième et Spitz pagétoïde (ou atypies sévères) avis à un médecin pathologiste “expert” 50-70 ans, dos Atypies intraépidermiques va se poser. Là encore, il est important de Marges + réfléchir si réellement le deuxième avis 50-70 ans, dos aura un intérêt opérationnel sachant Atypies intraépidermiques que, pour une lésion intraépidermique Exérèse complète ou de faible Breslow, chez un sujet d’un certain âge, l’impact opérationnel sera Peu d’intérêt opérationnel Beaucoup d’intérêt opérationnel minime. En parallèle, ce deuxième dia- gnostic, sans impact opérationnel réel, Fig. 1 : Frise de l’intérêt opérationnel plus ou moins important à partir de quelques exemples. n’est pas pris en charge par la Sécurité 58
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