L'Afrique de l'Ouest face au Covid-19 - Projections macroéconomiques et financières et capacités d'atténuation de la crise - Futuribles
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L’Afrique de l’Ouest face au Covid-19 Projections macroéconomiques et financières et capacités d’atténuation de la crise 17 avril 2020 Thierry Hommel* * Directeur de Thierry Hommel Conseil et du Forum prospectif de l’Afrique de l’Ouest (Futuribles International), enseignant à l’École nationale des ponts et chaussées. © Futuribles International - 22 avril 2020
Sommaire 1) Impacts macroéconomiques et financiers de la crise sanitaire dans la CEDEAO _ 4 Chute des exportations et des importations, et pénuries alimentaires ? ________________ 5 Baisse des transferts de fonds des migrants _________________________________________ 6 Contraction des investissements ____________________________________________________ 8 Augmentation du poids de la dette extérieure ________________________________________ 9 2) Faire face aux besoins des plus vulnérables et soutenir le secteur privé _______ 10 Des capacités variables pour formuler des réponses_________________________________ 10 Des capacités limitées de financement des réponses ________________________________ 15 Des partenaires techniques et financiers au chevet de la sous-région ? _______________ 16 Du passé faire table rase ? _________________________________________________________ 19 Projections macroéconomiques et financières 2 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
La présence du virus Covid-19 en Afrique de l’Ouest et la perturbation des échanges internationaux ont conduit les États de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à réagir (carte 1). Partout dans la sous-région, des plans de réponse sanitaire sont conçus pour prévenir l’épidémie, mieux détecter les personnes infectées et améliorer la prise en charge des patients. Anticipant les conséquences socio-économiques de cette crise sanitaire — baisse des échanges, récession économique, explosion des déficits budgétaires et accroisse- ment de la vulnérabilité des populations —, un grand nombre d’États ouest-africains travaillent en parallèle à l’élaboration de stratégies de court et moyen termes pour atténuer les effets adverses de la crise. Dans le contexte économique actuel, le financement de ces stratégies suppose la mise à disposition de financements exceptionnels et une injection rapide de ressources mobilisées par les partenaires techniques et financiers (PTF) 1. Carte 1 — Pays membres de la CEDEAO 1 Les partenaires techniques et financiers (PTF) regroupent des institutions financières multilatérales (Banque mondiale, Fonds monétaire international [FMI], Banque africaine de développement [BAD]), des unions et communautés économiques partenaires (Union africaine, Union européenne [UE], etc.) et des États partenaires (États-Unis, Chine, États membres de l’UE, etc.). Projections macroéconomiques et financières 3 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
1) Impacts macroéconomiques et financiers de la crise sanitaire dans la CEDEAO Des recettes d’exportation en baisse 2, des hausses de prix des matières premières et des produits importés, des déficits publics en hausse et une vulnérabilité accrue des populations ; telles seraient les perspectives de la sous-région ouest-africaine pour 2020 et 2021. En tout état de cause, la contraction économique mondiale induite par la pandémie de Covid-19 devrait accroître le poids des déséquilibres macroéconomiques des pays ouest-africains. La pandémie affectera à la fois le commerce international, les transferts des migrants, l’activité économique nationale, les investissements et les finances publiques. L’accroissement des déficits publics et courants devrait conduire les pays en manque d’excédents budgétaires à recourir à de nouveaux flux d’endettement pour stabiliser et relancer l’activité économique. Encadré 1. La Banque mondiale pessimiste Dans une publication récente qui concerne l’Afrique subsaharienne dans son ensemble, la Banque mondiale élabore deux scénarios d’avenir. Le premier, optimiste, est basé sur les hypothèses suivantes : 1) la pandémie atteint son point culminant dans les économies avancées, permettant ainsi un retrait progressif des mesures de confinement au cours des deux prochains mois ; 2) la pandémie s’estompe en Chine ; et 3) des épidémies locales sont maîtrisées dans d’autres pays et en Afrique subsaharienne. Le deuxième scénario, pessimiste, est basé sur l’hypothèse suivante : la flambée de Covid-19 continue de peser sur l’économie au cours du troisième et du quatrième trimestre 2020, et en 2021, imposant ainsi des mesures de distanciation sociale pour maintenir la propagation du virus à des niveaux maîtrisables. Dans le scénario de base et dans le scénario pessimiste, la croissance économique chute en deçà du taux régional moyen de croissance démographique de 2,7 % pour l’Afrique subsaharienne. Ainsi, en l’absence de mesures d’atténuation appropriées, l’épidémie de Covid-19 compromet le bien-être d’un grand nombre de personnes et contribue à une augmentation de la pauvreté en Afrique subsaharienne. La vigueur de la croissance démographique de pays comme le Niger, le Mali et le Burkina Faso ou le nord du Nigeria, et la vulnérabilité extrême de certaines populations plongées dans un contexte sécuritaire très préoccupant, pourraient entraîner des tensions sociales susceptibles d’amplifier les crises sécuritaires existantes si aucun mécanisme de stabilisation n’est mis en place rapidement. Source : CALDERON Cesar et alii, « Assessing the Economic Impact of Covid-19 and Policy Responses in Sub-Saharan Africa », Africa’s Pulse, n° 21, avril 2020, Banque mondiale. URL : https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/33541/9781464815683.pdf. Consulté le 21 avril 2020. 2 Le commerce extérieur de la CEDEAO est dominé par l’extraction et la production d’hydrocarbures qui représentent trois quarts des exportations. Ceux-ci sont essentiellement fournis par le Nigeria (73 %). Le cacao et les aliments à base de cacao (5 % des exportations), les pierres précieuses (3 %), le coton, les fruits, les plastiques, le bois et les produits ligneux, le poisson et les crustacés (environ 1 %), constituent, avec les hydrocarbures, les principaux produits d’exportation de la CEDEAO. L’Europe représente environ 28 % des exportations, et les Amériques 40 %. Les pays d’Asie et d’Océanie représentent 16 % des exportations. Ces exportations sont dominées par le Nigeria et la Côte- d’Ivoire qui, à eux deux, représentent 87 % des transactions. Le Nigeria fournit 77 % des exportations régionales et la Côte-d’Ivoire 10 %. Le Ghana et le Sénégal, troisième et quatrième, représentent respectivement 4 % et 2 % des exportations régionales. Source : .https://www.ecowas.int/faire-des-affaires-dans-la-cedeao/import-export/?lang=fr Projections macroéconomiques et financières 4 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Chute des exportations et des importations, et pénuries alimentaires ? Dans un contexte de fermeture des frontières, le commerce international est durement touché. Les exportations des pays ouest-africains sont concernées. La baisse des recettes d’exportation concerne l’ensemble des pays de la sous-région. Un malheur ne venant jamais seul, la chute des exportations en volume devrait être accompagnée par une baisse du cours pour ces matières premières (pétrole, or, et coton notamment). Après une embellie relative entre 2016 et 2018, les pays de la sous-région concernés par ces différentes ressources vont voir leurs revenus d’exportation fondre. En effet, le Burkina Faso et le Mali sont fortement dépendants de l’or : en 2018, l’or représente respectivement 68 % et 69,7 % des exportations totales de biens pour ces deux pays. Le coton représente 56,7 % des exportations de biens pour le Bénin (le Togo, le Mali et le Burkina Faso sont également dépendants), alors que le Nigeria, le Ghana, la Côte-d’Ivoire et le Niger sont concernés par la baisse constante des cours du pétrole et de la demande de brut. Ajoutons que des incertitudes pèsent également sur le cours du cacao ou de l’anacarde (noix de cajou), ce qui fragilise la Côte-d’Ivoire, le Ghana et la Guinée-Bissau. La fermeture des frontières pénalise également les importations et les approvisionnements locaux. Il devient plus difficile d’accéder aux intrants et aux services, les problèmes liés aux restrictions de mouvement de la main-d’œuvre et les difficultés d’accès au crédit ou aux liquidités s’accumulent. Ces problèmes s’ajoutent aux perturbations des chaînes d’approvisionnement au niveau mondial, telles que les interdictions d’exporter qui affectent la sécurité alimentaire de pays ouest-africains, tous importateurs à différents degrés de denrées alimentaires. Or, la sous-région compte déjà 17 millions de personnes en situation de crise alimentaire et nutritionnelle, et 50 millions de personnes actuellement sous pression qui risquent de basculer en phase de crise d’ici juin-août 2020 (carte 2). Carte 2 — Situation alimentaire et nutritionnelle en Afrique de l’Ouest Source : Analyses du cadre harmonisé, coordination régionale, Niamey, Niger, mars 2020. En l’absence de réponses politiques et économiques, les membres du Réseau de prévention des crises alimentaires (RPCA) estiment qu’il sera difficile d’éviter une crise alimentaire majeure en Projections macroéconomiques et financières 5 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Afrique résultant du Covid-19 3. Afin de l’éviter, la Banque mondiale suggère de maintenir ouverts les grands couloirs logistiques de la sous-région pour prévenir l’apparition d’une crise alimentaire 4. Elle invite les systèmes d’alerte précoce de pénuries alimentaires et les systèmes d’approvisionnement alimentaire d’urgence à se livrer à un examen rapide des besoins. Baisse des transferts de fonds des migrants Graphique 1 — Importance des transferts de fonds des migrants, en volume et en % du PIB pour quelques pays de la CEDEAO en 2017 Source : « Migration and Remittances: Recent Developments and Outlook / Special Topic: Transit Migration », Migration and Development Brief, n° 29, avril 2018. URL : https://www.knomad.org/sites/default/files/2018- 04/Migration%20and%20Development%20Brief%2029.pdf. Consulté le 21 avril 2020. De nombreux migrants résidant en Europe, aux États-Unis ou en Asie sont frappés par l’inactivité : cela devrait affecter leurs transferts de fonds vers la sous-région. L’importance des envois des migrants dans les pays de la CEDEAO (graphique 1) varie selon les pays. En 2017, le trio de tête des pays recevant le plus de fonds en volume est composé du Nigeria (22 milliards de dollars US), du Sénégal (2,2 milliards de dollars US) et du Ghana (2,2 milliards de dollars US). En pourcentage du produit intérieur brut (PIB), c’est au Liberia (27,1 % du PIB), en Gambie (20,8 % du PIB) et au Sénégal (13,9 % du PIB) qu’ils sont les plus importants. Avec la pandémie, les migrants seront affectés dans leur pays d’accueil et les flux de transfert des migrants en direction de l’espace CEDEAO, en hausse significative depuis plusieurs années, devraient baisser. Or, ces revenus sont importants pour le financement du développement économique. Selon une enquête conduite par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) au sein de 3 « Relevé de conclusions », Réseau de prévention des crises alimentaires (RPCA), réunion restreinte du 2 avril 2020. URL : www.food-security.net/wp-content/uploads/2020/04/RPCA2020_summary-of-conclusions_FR-1.pdf. Consulté le 21 avril 2020. 4 World Bank Group, “Assesing the Economic Impact of Covid-19 and Policy Responses in Sub-Saharian Africa”, Africa’s Pulse, vol. 21, avril 2020. URL : https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/33541/9781464815683.pdf. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 6 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) 5, les fonds reçus alimentent la consommation des ménages (54,6 %), l’investissement dans le secteur de l’immobilier (15,8 %), pourvoient aux dépenses d’éducation et de santé (respectivement 6,4 % et 3,4 %), ainsi qu’aux autres investissements (5,5 %). Les événements familiaux et religieux mobiliseraient selon cette enquête 8,7 % des transferts de fonds des travailleurs migrants 6. Encadré 2. Quatre pays à la loupe Le Ghana anticipe une réduction de ses échanges Le Nigeria récupère lentement de la récession domestiques et internationaux. Le pays a déjà observé économique vécue en 2016 du fait de la baisse des cours une réduction de ses volumes d’échanges avec la Chine, du brut et de l’insuffisance de ses réserves en devises premier partenaire commercial pour les importations utilisées pour financer ses importations. Le budget 2 272,6 millions de dollars US (3,64 % du PNB) et fédéral approuvé pour l’année 2020 a été préparé en deuxième partenaire à l’exportation 2 032,27 millions de pariant sur de fortes améliorations des exportations par dollars US (3,26 % du PNB). La baisse du prix du pétrole rapport à l’année 2019. Il projetait des revenus à hauteur va réduire les revenus pétroliers du pays. Le Ghana avait de 8 240 milliards de nairas (21 milliards de dollars US), calculé un prix du baril de 62,60 dollars US dans le soit une augmentation de 20 % par rapport au budget budget 2020. Or, le prix du baril, qui était encore à 51,8 2019. Les hypothèses concernant les revenus pétroliers dollars US au 2 mars puis à 36 dollars US le 9 mars. Il étaient une augmentation de la demande mondiale (2,18 s’échange à 23,21 dollars US au 10 avril 2020. Avec un millions de barils / jour) et un prix de marché stable à 57 prix moyen annuel de 50 dollars US, le gouvernement dollars US. Sachant que le pétrole représente 91% des perdrait environ 484 millions de dollars US de recettes exportations, le Nigeria à lui seul pourrait perdre pétrolières. Le manque à gagner pourrait atteindre 936,4 19 milliards de dollars US en 2020. De plus, dans un pays millions de dollars US avec un prix moyen de 30 dollars où la pauvreté est forte, les coupes budgétaires ne US. Dans le contexte actuel, les exportations d’or sont pourront se faire aux dépens des plus vulnérables alors bloquées et d’importants risques pèsent sur la stabilité que plus de 87 millions de personnes vivent avec moins de la monnaie. Dans ses projections les plus pessimistes, de 2 dollars US par jour. le ministère des Finances ghanéen envisage une Sources : http://cseaafrica.org/the-implication-of-covid19-on-the- croissance du PIB de 1,5 % pour l’année 2020 contre nigerian-economy/ ; 6,8 % initialement, soit la plus faible progression du PIB https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/03/17/en-afrique-face- en 37 ans. En 2017, le taux d’accroissement naturel de la au-covid-19-70-de-nos-pays-ne-sont-pas-prets_6033389_3212.html population ghanéenne était de 2,4 %. Source : https://www.credendo.com/country-news/ghana-will- struggle-impact-covid-19-and-oil-price-shock En Guinée, le FMI prévoyait un taux de croissance de Le Rapport sur les mesures de mitigation des effets du l’économie guinéenne de 6 % en 2020 (contre 5,6 % en Covid-19 sur l’économie nationale présente les 2019). Il est fort probable que les conséquences du perspectives économiques et financières du Burkina Covid-19 se traduiront par une baisse qui pourrait Faso pour 2020 et 2021. Il tient compte 1) d’effets atteindre environ 1 % du PIB en 2020 selon les autorités endogènes et exogènes de la pandémie sur les secteurs guinéennes, certainement optimistes dans cette économiques, le cadre macroéconomique et les finances estimation. Outre la baisse du taux de croissance publiques ; et 2) des mesures fiscales et budgétaires annuelle, le niveau de l’inflation, déjà peu maîtrisé — il potentielles pour atténuer les effets du Covid-19 sur les était de 9,8 % en 2018 et de 9,7 % en 2019 —, devrait secteurs de production et sur les populations croître, sachant que le cours du franc guinéen devrait notamment les plus vulnérables. Le document anticipe encore se déprécier* et s’écarter de la trajectoire une contre-performance de la croissance à 2 % du PIB, 5 L’UEMOA comprend huit États ouest-africains : le Sénégal, la Côte-d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Burkina Faso, le Mali, le Niger, le Togo et le Bénin qui partagent une monnaie commune le franc CFA. Le franc CFA devait être remplacé par l’eco au 1er juillet 2020. 6 GBENOU Kpégo Didier Anatole, Impacts macroéconomiques des transferts de fonds des migrants dans les pays de l’UEMOA, Document d’étude et de recherche DER/14/03, janvier 2015, Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest. URL : https://www.bceao.int/sites/default/files/2017- 11/impacts_macroeconomiques_des_transferts_de_fonds_des_migrants_dans_lespays_de_l_uemoa.pdf. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 7 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
prévue. Le déficit budgétaire devrait pour sa part contre 6,3 % en scénario tendanciel, soit un écart de s’aggraver, et passer de 3,4 % à 6 % du PIB du fait de 4,3 %. Au niveau des finances publiques, les recettes l’accroissement des besoins de financement induits par totales et dons devraient atteindre 1 917,8 milliards de la riposte économique à la pandémie : la Guinée est francs CFA* contre 2 223,7 milliards de francs CFA, soit fortement dépendante de ses recettes minières qui vont un écart de 306 milliards de francs CFA, dont 227,1 chuter ; le pays sera également pénalisé par les milliards de recettes fiscales et 18,9 milliards de recettes restrictions internationales aux mouvements de non fiscales. Le taux de pression fiscale ressortirait à personnes, qui fragilisent le tourisme, l’hôtellerie et la 16,1% contre 18,1% en tendanciel. Les dépenses totales restauration. Cette récession a pour toile de fond un et prêts nets se situeraient à 2 361,9 milliards de FCFA à climat politique délétère. fin décembre 2020 contre 2 498,8 milliards de FCFA en *Le franc guinéen est passé de 1 797 pour 1 dollar US en 2000 à 9 011 tendanciel, soit une baisse de 137 milliards de FCFA. en 2018, en raison notamment du faible niveau de rapatriement des Le déficit global se situerait à 444,3 milliards de FCFA, recettes d’exportation des produits miniers. soit 5% du PIB contre 275,1 milliards de FCFA (3% du Sources : PIB), soit une dégradation du déficit de 169 https://www.imf.org/en/Publications/REO/SSA/Issues/2019/04/01/sre milliards de FCFA. o0419 ; https://www.lepoint.fr/afrique/guinee-bilan-sanglant-a- nzerekore-capitale-forestiere-26-03-2020-2368885_3826.php. *1 milliard de francs CFA = 1,6 million de dollars US. Source : https://www.wakatsera.com/38646-2/ Contraction des investissements À court terme, la situation va modifier l’attractivité des marchés africains pour les investisseurs privés. Une baisse des investissements directs à l’étranger (IDE) doit être anticipée. La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) se montre désormais fort pessimiste pour les IDE 7 qui pourraient chuter de 30 % à 40 % en 2020-2021. Cette tendance baissière prévaudra également pour les investissements domestiques. De ce fait, les projets en cours, publics comme privés, pourraient prendre du retard. D’autres décisions d’investissement seront repoussées et n’interviendront pas sans que les marchés, à l’échelle mondiale, aient retrouvé une plus grande visibilité. D’ici là, les secteurs qui devraient pâtir des baisses importantes sont : 1) les activités du secteur tertiaire, et particulièrement les activités d’hôtellerie, de restauration, du divertissement et les transports ; 2) le secteur du bâtiment et travaux publics (BTP) qui est fortement tributaire des investissements publics ; 3) le secteur pétrolier, du fait d’un prix bas du brut et de la faible visibilité existante sur les marchés ; selon Bloomfield Investment, cette situation pourrait entraîner des retards dans l’exécution de projets structurants au Sénégal et au Niger 8 ; 4) le secteur agricole, du fait de problèmes d’approvisionnement en intrants et de la baisse de la demande. 7 « Le coronavirus va entraîner une chute importante des investissements, selon l’ONU », ONU info, 26 mars 2020. URL : https://news.un.org/fr/story/2020/03/1065052. Consulté le 20 avril 2020. 8 « L’impact du Covid-19 sur la zone UEMOA », Bloomfield Investment, 2020. URL : https://news.abidjan.net/documents/docs/CODIV-UEMOA-Final.pdf. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 8 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Augmentation du poids de la dette extérieure Encadré 3. Définition et composition de la dette extérieure des pays d’Afrique de l’Ouest La dette extérieure brute est égale au montant des engagements contractuels en cours et ayant donné lieu à versement des résidents d’un pays vis-à-vis des non-résidents, comportant obligation de remboursement du principal et de paiement d’intérêts. La dette extérieure est composée de : — la dette publique : contractée par les emprunteurs publics (États et entreprises publiques) auprès des particuliers, des banques, des gouvernements, des entreprises ; — la dette privée : contractée par les emprunteurs privés (banques commerciales, grandes entreprises). La dette publique multilatérale comprend les prêts contractés auprès des institutions financières internationales comme la Banque mondiale, le FMI, les banques et les fonds régionaux de développement comme la Banque africaine de développement. La dette publique bilatérale comprend les emprunts contractés par un État auprès d’un autre État. Le rééchelonnement et l’annulation de la dette bilatérale sont négociés au sein du Club de Paris. La dette publique à l’égard des banques commerciales privées comprend les emprunts contractés auprès des banques commerciales privées. Le rééchelonnement est négocié au sein du Club de Londres. Le ralentissement économique va induire de fortes baisses des recettes budgétaires fiscales et douanières. Cette diminution des recettes renforce le poids des dettes (tableau 2) dont la soutenabilité interrogeait déjà les analystes avant la crise. Dans la CEDEAO, le poids de la dette aurait quasiment doublé dans la sous-région par rapport à 2010. Au Togo, au Ghana comme au Nigeria, les dynamiques d’endettement défavorables et les faibles capacités de financement et de gestion de la dette inquiètent les analystes financiers. Selon Moody’s 9, le Mali et le Niger seraient particulièrement sensibles à des chocs susceptibles d’augmenter de manière significative le poids de la dette. Le Sénégal et la Côte-d’Ivoire affichent la plus importante dette extérieure contractée auprès des créanciers du secteur privé en pourcentage de PIB, mais se montreraient plus performants en termes de gestion financière. Tableau 2. Endettement des États ouest-africains, 2018 Service de la dette totale (% Service de la dette Service de la dette sur la dette des exportations de biens, de multilatérale (service de la extérieure, total (service de la services et de revenus) dette totale, $US courants) dette totale, $US) Bénin 7,8 169 315 574 214 307 340 Burkina Faso 3,9 (n-3) 80 933 204 143 932 090 Cap-Vert 5,6 33 854 170 55 627 590 Côte-d’Ivoire 17,1 (n-1) 75 049 239 1 655 950 080 Gambie 16,8 (n-1) 24 029 322 45 127 190 Ghana 9,4 (n-1) 115 418 017 2 624 696 530 Guinée 2,2 35 318 533 89 829 010 Guinée-Bissau 1,9 (n-1) 4 999 830 8 176 180 9 « Le poids accru de la dette en Afrique de l’Ouest soulève des préoccupations quant à sa soutenabilité », Moody’s, 17 février 2020. URL : https://www.moodys.com/research/Moodys-In-West-Africa-higher-debt-burdens-raise-debt- sustainability--PBC_1214836. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 9 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Liberia 2,8 (n-1) 20 182 859 33 608 700 Mali 4,4 (n-1) 143 321 580 254 275 160 Niger 8,5 (n-1) 67 936 588 123 713 780 Nigeria 8,3 274 670 665 5 795 975 470 Sénégal 13,5 (n-1) 144 306 701 720 991 440 Sierra Leone 7,2 (n-1) 24 633 370 58 318 490 Togo 5 (n-1) 48 578 198 117 399 100 Sources : URL : https://donnees.banquemondiale.org/indicator/dt.tds.dect.ex.zs?end=2018&locations=bj-bf-cv-ci-gm-gh-gn-gw-lr-ml-ne-ng-sn-sl- tg&start=2018&view=bar ; https://donnees.banquemondiale.org/indicator/dt.tds.mlat.cd?end=2018&locations=bj-bf-cv-ci-gm-gh-gn-gw-lr-ml- ne-ng-sn-sl-tg&start=2018&view=bar. Consultés le 21 avril 2020. Dans le tableau, n représente l’année de référence (2018). Toujours est-il que les services de la dette dépensent des sommes très importantes pour rembourser les prêts contractés auprès des institutions multilatérales, leurs États partenaires et les institutions privées. Ces encours de dette 10 réduisent fortement les marges de manœuvre des États ouest-africains à l’heure de débloquer des moyens de riposte face à la pandémie de Covid-19 alors que des dépenses exceptionnelles doivent être engagées. 2) Faire face aux besoins des plus vulnérables et soutenir le secteur privé Pour affronter la crise, pourvoir aux besoins des personnes les plus vulnérables et soutenir le secteur privé, les États imaginent des plans de sauvegarde dont l’enjeu est double (tableau 3) : il s’agit d’une part de rassurer les populations et les partenaires, d’autre part d’affirmer son autorité et son leadership. Ce faisant, les dirigeants espèrent certainement éviter « l’effet pangolin » 11 - la chute de nombreux régimes dans l’espace sahélien mais aussi centre-africains - que certains redoutent et d’autres appellent de leurs vœux. Des capacités variables pour formuler des réponses Alors que certains dirigeants tardent à annoncer des mesures pour faire face à la pandémie (Bénin), d’autres ont déjà budgété le coût des mesures de riposte et annoncé des plans de sauvegarde. Au Sénégal ou en Côte-d’Ivoire, d’importants plans ont également été annoncés pour juguler la hausse des prix et permettre aux populations comme aux entreprises de supporter l’inactivité. Les États les plus performants en termes de gestion financière — le Sénégal, la Côte- d’Ivoire — ont opté pour la création de fonds de riposte pour financer des mesures d’urgence. Ces fonds ont vocation à être abondés par l’argent public, le secteur privé et les partenaires du développement. 10 Cette somme correspond au montant total des emprunts restant à rembourser, on parle aussi de capital restant dû. Le service de la dette est la somme que l’emprunteur doit payer chaque année pour honorer sa dette. 11 Du nom du titre d’une note confidentielle du Centre d’analyse et prospective stratégique (CAPS). Pour lire la note : https://blogolivierpiot.com/2020/04/03/leffet-pangolin-en-afrique-selon-une-note-du-caps/ ; la note présente la pandémie de Covid-19 comme la crise de trop et lui confère un pouvoir de changement certainement très exagéré, et qui pourraient tout autant s’appliquer à un grand nombre de pays plus développés où les impacts sanitaires et les impacts économiques sont également très significatifs. Cette note est d’autant plus surprenante que la France met jusqu’ici, avec ses partenaires, tout en œuvre pour assister les gouvernements en question. Projections macroéconomiques et financières 10 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Le gouvernement fédéral est proactif au Nigeria ; il a introduit des mesures pour faire face aux conséquences socio-économiques de la crise sanitaire à travers la mise à disposition d’un montant de 15 milliards de nairas (38,8 millions de dollars US) pour faire face aux besoins sanitaires, soutenir l’économie et protéger les plus vulnérables. En complément, le gouvernement a identifié 10,7 millions de personnes vulnérables auxquelles des transferts de cash seront effectués au cours des deux prochains mois. Des mesures additionnelles concernent les personnes déplacées auxquelles deux mois de ratios alimentaires doivent être distribués. Mais ces dépenses additionnelles (+ 20 % des dépenses programmées) vont également contribuer à creuser le déficit : programmé initialement à 1,5 % du produit national brut (PNB), il pourrait atteindre 8,3 % en 2020 12. La maîtrise de l’inflation va également poser de très importants problèmes aux autorités qui pourraient rapidement manquer de réserves de change. Plus largement, le tableau 3 fait état des mesures retenues dans les différents pays de la CEDEAO pour atténuer les effets de la crise. Tableau 3 — Mesures de confinement et plans de riposte par pays de la CEDEAO Plan de riposte sanitaire et de mitigation des effets socio- Mesures sanitaires économiques Restriction des visas d’entrée Pas de confinement : cordon sanitaire autour des Bénin Pas d’annonce au 11 avril 2020 communes les plus exposées et mise en quarantaine des personnes infectées Plan de riposte sanitaire estimé à 177 914 978 612 francs CFA (293,3 millions de dollars US (US$), dont 41 017 556 333 francs CFA (63,8 millions de US$) réservés aux dépenses urgentes. Plan de réponse économique et social budgété à 384 milliards de francs CFA (639,4 millions de US$) qui doivent permettre de prendre Burkina État d’urgence sanitaire en charge les mesures sociales et les mesures économiques auprès des Faso Couvre-feu 19h-5h entreprises et des ménages. https://www.gouvernement.gov.bf/informations/actualites/details?tx_ news_pi1%5Baction%5D=detail&tx_news_pi1%5Bcontroller%5D=News &tx_news_pi1%5Bnews%5D=322&cHash=9010971afdf99fc612c00f249 c41380c 12 « The Covid-19 Pandemic in Nigeria. Potential Impact on the North-East », UNDP Nigeria Brief, n° 2, 3 avril 2020. URL : https://www.undp.org/content/dam/rba/docs/Covid-19-CO-Response/UNDP-NE-Covid19-Briefing.pdf. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 11 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Le gouvernement estime qu’il lui faudra environ 150 millions de US$ pour faire face à la pandémie et en supporter les effets économiques. La Banque mondiale a accepté de financer un plan de réponse sanitaire à hauteur de 5 millions de US$. L’Union européenne (UE) et le système État d’urgence des Nations unies doivent également participer au financement. Pas de couvre-feu, https://www.worldbank.org/en/news/press- Cap-Vert Pas de confinement release/2020/04/02/world-bank-supports-cabo-verdes-covid-19- Mesures pour éviter la response propagation La Banque centrale a annoncé des mesures pour soutenir le secteur à hauteur 400 millions de US$. https://macauhub.com.mo/2020/03/27/pt-banco-de-cabo-verde- disponibiliza-400-milhoes-de-euros-a-banca-em-resposta-ao-covid-19/ Plan de riposte sanitaire pour détecter et prendre en charge, dont le budget estimé à 95 880 020 628 francs CFA (159,6 millions US$) Plan de soutien économique, social et humanitaire de 1 700 milliards de francs CFA (2,83 milliards de US$). Les mesures de soutien aux entreprises comprennent, notamment, la suspension des contrôles fiscaux pendant trois mois, le report de trois mois du paiement des taxes forfaitaires pour les petits artisans, le report pour une période de trois mois du paiement des impôts, taxes et autres versements dus à l’État ainsi que les charges sociales. Pour préserver l’outil de État d’urgence production et l’emploi, le gouvernement annonce la mise en place d’un Côte- fonds de soutien au secteur privé pour un montant de 250 milliards de Fermeture des frontières d’Ivoire francs CFA (416,3 millions de US$), d’un fonds de garantie, d’un fonds Couvre-feu 21h-5h à Abidjan spécifique d’appui aux entreprises du secteur informel, ainsi que le soutien aux principales filières de l’économie nationale. Les mesures les plus concrètes en faveur des populations sont le report du paiement des factures d’électricité et d’eau, et l’octroi de primes pour les agents de santé et des forces de l’ordre ainsi que de défense sur la durée de la crise sanitaire. https://www.koaci.com/article/2020/03/30/cote- divoire/economie/cote-divoire-covid-19-plan-de-riposte-contre-les- infections-respiratoires-aigues-a-coronavirus_140023.html Gambia Covid-19 Response and Preparedness Project financé à hauteur de 10 millions de US$ par la Banque mondiale. Plan de réponse sanitaire axé sur la détection et la prise en charge, et la État d’urgence communication des bonnes pratiques. Gambie Fermeture des frontières https://www.worldbank.org/en/news/press- release/2020/04/02/world-bank-supports-the-gambias-covid-19- response Pas d’état d’urgence Ghana Covid-19 Emergency-Preparedness and response project : plan Pas d’état d’urgence sanitaire de riposte sanitaire ; 35 millions de US$ pour la réponse sanitaire et 65 Entrée interdite à toute millions de US$ en plus pour l’équipement et l’assistance financière aux personne venant d’un pays ménages mis en quarantaine touchés par le Covid-19. L’ensemble est Ghana où plus de 200 infections ont financé par la Banque mondiale. été déclarées. http://documents.worldbank.org/curated/en/895671585952003880/G Confinement total à Accra et hana-COVID-19-Emergency-Preparedness-and-Response-Project Kumasi, couvre-feu dans Analyse des conséquences socio-économiques ; Plan de soutien l’ensemble du pays la nuit annoncé. Projections macroéconomiques et financières 12 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Plan de riposte sanitaire et économique de plus de 3 000 milliards de francs guinéens (316,3 millions de US$), articulé autour de trois axes : une composante sanitaire, destinée à contenir et juguler l’épidémie, une composante sociale, qui a pour but d’atténuer les conséquences de la crise sanitaire pour les ménages, et une composante appui au État d’urgence sanitaire secteur privé, pour mitiger les effets de l’épidémie sur les entreprises, Fermeture des vols en particulier les secteurs les plus affectés. commerciaux avec les pays Création d’un Fonds spécial de riposte et de stabilisation de Guinée touchés et suspension de l’économie, le Fonds de riposte Covid-19, qui s’élèvera à un montant l’émission des visas minimum de 2 500 milliards de francs guinéens (263,66 millions de Couvre-feu 21h-5h US$), et sera alimenté par l’État à travers différentes sources de financement déjà identifiées et par les contributions volontaires des particuliers et des entreprises. https://www.guineenews.org/guinee-le-pm-kassory-decline-un-plan- de-riposte-economique-de-plus-de-trois-mille-milliards-gnf-au-covid- 19/ Appui du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour la réponse sanitaire, mais pas de réel plan national https://www.undp.org/content/dam/rba/docs/Covid-19-CO- État d’urgence Response/undp-rba-covid-guineabissau-apr2020.pdf Guinée- Fermeture des frontières Bissau Mesures de soutien économique et social annoncées mais non Confinement partiel divulguées https://www.journaldeconakry.com/guinee-bissau-covid-19-letat- durgence-prolonge/ Le plan de réponse sanitaire du Liberia est financé par la Banque mondiale à travers le mécanisme MPA Fast-Track Facility. Il est estimé à 7,5 millions de US$. État d’urgence https://www.worldbank.org/en/news/press- Fermeture des frontières release/2020/04/09/more-support-to-boost-liberia-covid-19-response Liberia Confinement indiqué et non respecté Pas encore d’annonce concernant des mesures de soutien aux ménages et aux entreprises. https://frontpageafricaonline.com/front-slider/liberia-senators- demand-national-covid-19-response-plan-amid-lockdown/ Plan de riposte (prévention et réponse à la maladie) budgété à 3 372 417 000 francs CFA (5,6 millions de US$). https://www.humanitarianresponse.info/sites/www.humanitarianresp onse.info/files/documents/files/plan_covid19_mali_4mars.pdf.pdf État d’urgence sanitaire Annonce le 10 avril de la mise en place d’un plan de riposte contre le Fermeture des frontières Covid-19 de 500 milliards de francs CFA (environ 830 millions de US$), Mali Instauration annoncée d’un dont un fonds spécial de 100 milliards de francs CFA (près de 166 couvre-feu millions de US$) pour soutenir les familles les plus vulnérables, déployé dans 703 communes du pays. https://www.maliweb.net/nation/plan-de-riposte-contre-le-covid-19- ibk-annonce-des-mesures-sociales-estimees-a-500-milliards-fcfa- 2867688.html Projections macroéconomiques et financières 13 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Plan de réponse prenant en compte aussi bien les effets sanitaires de la pandémie que les effets négatifs de la pandémie sur la situation socio- État d’urgence sanitaire économique dont le budget s’élève à environ 597 milliards de francs Niger Fermeture des frontières CFA mais qui n’est pas intégralement pris en charge par la Banque Couvre-feu à Niamey, 19h-6h mondiale. https://www.afro.who.int/fr/news/niger-table-ronde-des-ptf-pour-le- financement-du-plan-global-de-reponse-la-pandemie-du-covid Le gouvernement fédéral a introduit des mesures pour faire face aux conséquences socio-économiques de la crise sanitaire. Il souhaite débloquer 15 milliards de nairas (39 millions de US$) pour faire face Fermeture des frontières aux besoins sanitaires, soutenir l’économie et protéger les plus Nigeria Confinement total des vulnérables. En complément, le gouvernement a identifié 10,7 millions populations à Abuja et Lagos de personnes vulnérables auxquelles des transferts de cash seront effectués au cours des deux prochains mois. https://www.undp.org/content/dam/rba/docs/Covid-19-CO- Response/UNDP-NE-Covid19-Briefing.pdf Programme de résilience économique et sociale : 1) soutien au secteur de la santé à hauteur de 64,4 milliards de francs CFA, pour couvrir toutes les dépenses liées à la riposte contre le Covid-19 ; 2) renforcement de la résilience sociale des populations à hauteur de 84,5 milliards de francs CFA ; 3) sauvegarde de la stabilité État d’urgence macroéconomique et financière, et soutien au secteur privé ; et 4) Fermeture des frontières approvisionnement régulier du pays en hydrocarbures, produits Sénégal médicaux, pharmaceutiques, et denrées de première nécessité. Les aériennes Couvre-feu 20h-6h dépenses seront couvertes par le Fonds de riposte contre les effets du Covid-19, FORCE-Covid-19, doté de 1 000 milliards de francs CFA, financé par l’État, le secteur privé et les partenaires bilatéraux et multilatéraux. https://www.sec.gouv.sn/actualité/message-à-la-nation-de-son- excellence-monsieur-le-président-macky-sall-à-l’occasion-de-2 Sierra Leone Covid-19 Emergency preparedness and response project, financé à hauteur de 7,5 millions de US$ par la Banque mondiale. Pas État d’urgence encore de mesure d’accompagnement des ménages et des entreprises Sierra Fermeture des frontières annoncées. Leone Confinement total initial de trois jours, prolongé http://documents.worldbank.org/curated/en/743811585949825322/p df/Sierra-Leone-Covid-19-Emergency-Preparedness-and-Response- Project.pdf Projections macroéconomiques et financières 14 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
Pas d’estimation du coût total du volet sanitaire de la réponse pour lequel le Togo a reçu l’appui de la Banque mondiale ; 2 milliards de francs CFA ont été débloqués pour les actions urgentes. https://www.financialafrik.com/2020/03/16/covid19-le- gouvernement-togolais-debloque-une-somme-de-2-milliards-de-f-cfa- et-suspend-des-vols/ Le Togo a également créé une Force spéciale mixte anti-pandémie, composée de 5 000 agents des forces de défense et de sécurité, afin de Fermeture des frontières faire respecter les mesures en vigueur. Le Togo prévoit de lancer Togo rapidement des mesures sociales (transferts monétaires à l’endroit des Couvre-feu 19h-6h personnes les plus affectées par la crise, gratuité pour une période de trois mois de l’eau et l’électricité pour les tranches sociales défavorisées, réduction des frais de branchement pour l’eau de 75 à 25 000 francs CFA, etc.). À plus large échelle, le Togo annonce la mise en place d’un Fonds national de solidarité économique, de 400 milliards de francs CFA, notamment pour appuyer les entreprises victimes de la pandémie. https://vert-togo.com/faure-gnassingbe-annonce-un-transfert- monetaire-aux-couches/ Des capacités limitées de financement des réponses À l’instar des pays susmentionnés, le Cap-Vert, le Burkina Faso, le Mali et la Guinée affichent des ambitions. D’autres sont encore en retrait : les annonces continuent de se faire attendre au Bénin. Au Togo, des suspensions de traites et de paiements ont d’ores et déjà été annoncées, mais l’ensemble des mesures reste à finaliser. Le Liberia ou la Sierra Leone ont obtenu un financement direct de leurs plans de riposte sanitaire pour de faibles montants. Alors que des voix s’élèvent pour fustiger le retard pris dans leur mise en œuvre, rien ne présage de l’adoption de mesures d’atténuation des effets socio-économiques de la crise pour le moment. Au Liberia, l’inaction du gouvernement est fortement critiquée 13. En proie à d’importants problèmes de sécurité et exsangue de ressources propres, le Niger a sollicité directement les partenaires techniques et financiers. Considéré comme peu performant en termes de gestion budgétaire et financière, il peine à réunir des moyens de lutte alors que le pays est considéré comme particulièrement fragile. Si les partenaires techniques et financiers ont tenu à féliciter les autorités pour l’élaboration de ce plan de riposte intégré, les promesses de contribution ne couvrent pour l’instant que 20 % du budget estimé par les autorités nigériennes 14 : quelles que soient leurs capacités de formulation des plans et mesures de riposte et d’atténuation, la réalité des réponses que les pays de la CEDEAO pourront apporter pour atténuer les effets de la crise reste tributaire des moyens que la communauté internationale mettra à disposition des États de la sous-région. Dans les États les plus développés sur le plan économique (Nigeria, Côte-d’Ivoire, Sénégal, Ghana), les entreprises du secteur privé, bien que mises en difficulté par la crise, sont sollicitées 13 DODOO Lennart, « Liberia: Senators Demand National Covid-19 Response Plan amid Lockdown », Front Page Africa, 11 avril 2020. URL : https://frontpageafricaonline.com/front-slider/liberia-senators-demand-national-covid-19- response-plan-amid-lockdown/. Consulté le 20 avril 2020. 14 « Niger : Table ronde des PTF pour le financement du plan global de réponse à la pandémie du Covid-19 », Organisation mondiale de la santé (OMS), 26 mars2020. URL : https://www.afro.who.int/fr/news/niger-table-ronde- des-ptf-pour-le-financement-du-plan-global-de-reponse-la-pandemie-du-covid. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 15 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
financièrement et appuient les États sur le plan logistique dans la lutte contre le virus. Les contributions prennent la forme de dons financiers 15, de dons en nature 16 ou d’appui spécifique. Dans les États les plus fragiles, ces solutions ne sont pas disponibles, et ces derniers traitent directement avec les partenaires techniques et financiers. Des partenaires techniques et financiers au chevet de la sous-région ? Pour financer les réponses, les PTF envisagent de dégager des marges de manœuvre financières sur le budget des États. Depuis le 25 mars 2020, le FMI et la Banque mondiale appellent au gel du remboursement des dettes bilatérales pour les pays pauvres qui en font la demande, même s’il appartient ensuite à chaque pays de négocier ce gel avec les partenaires bilatéraux, le FMI et la Banque mondiale étant des institutions multinationales qui ne peuvent pas dicter leur conduite aux pays. Les suspensions de dette doivent permettre de différer les remboursements et d’utiliser les créances pour financer la riposte sanitaire et économique. Les pays de la CEDEAO, membres de l’International Development Association (IDA) une filiale de la Banque mondiale, sont éligibles à cette initiative 17. Dans la foulée, la Banque mondiale et la Société financière internationale (IFC) ont annoncé la mise à disposition de 14 milliards de dollars US pour accompagner les efforts déployés par les entreprises et les pays en vue de prévenir, détecter et faire face à la propagation rapide du Covid-19. Les autres partenaires — FMI, BAD, Banque interaméricaine de développement (BID), UE — ont également rapidement réagi 18 . À l’image de la France (encadré 4), les partenaires bilatéraux font également des annonces encourageantes. Pourtant, un tel élan de générosité interroge. Entend-il stabiliser la situation économique pour mieux relancer les investissements programmés ? S’agit-il de stabiliser la situation économique et sociale en amont de la reconstruction d’une vision pour le développement des pays ouest-africains, qui tire certaines leçons de la pandémie et des expériences passées ? 15 « Lutte contre la Covid-19 : Une entreprise fait un don d’une valeur de 100 millions destiné aux populations d’Abidjan et de l’intérieur du pays », Linfodrome, 11 avril 2020. URL : http://www.linfodrome.com/societe- culture/56686-lutte-contre-la-covid-19-une-entreprise-fait-un-don-d-une-valeur-de-100-millions-destine-aux- populations-d-abidjan-et-de-l-interieur-du-pays. Consulté le 20 avril 2020. 16 « Covid-19 : Senegindia fait un don en nature de 100 millions de francs CFA », Agence de presse sénégalaise (APS), 10 avril 2020. URL : http://www.aps.sn/actualites/societe/sante/article/covid-19-senegindia-fait-un-don-en-nature- de-100-millions-de-francs-cfa. Consulté le 20 avril 2020. 17 « Déclaration commune du Groupe de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international appelant à agir pour alléger le poids de la dette des pays IDA », Banque mondiale, 25 mars 2020. URL : https://www.banquemondiale.org/fr/news/statement/2020/03/25/joint-statement-from-the-world-bank-group-and- the-international-monetary-fund-regarding-a-call-to-action-on-the-debt-of-ida-countries. Consulté le 20 avril 2020. 18 HOMMEL Thierry, « L’Afrique de l’Ouest face au Covid-19 », Document de travail, Futuribles International, 31 mars 2020. URL : https://www.futuribles.com/fr/groupes/forum-prospectif-de-lafrique-de-louest/document/lafrique-de- louest-face-au-covid-19/. Consulté le 20 avril 2020. Projections macroéconomiques et financières 16 et capacités d’atténuation de la crise © Futuribles International - 22 avril 2020
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