Quoi de neuf dans la prise en charge de la dermatite atopique de l'enfant et de l'adolescent? - Edimark
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Médecine & enfance Quoi de neuf dans la prise en J. Czernielewski, E. Comte Krieger, charge de la dermatite atopique S. Christen-Zaech, unité de dermatologie pédiatrique, services de dermatologie et vénérologie et de pédiatrie, CHUV, de l’enfant et de l’adolescent? Hôpital de l’enfance, Lausanne Article initialement publié par la Revue médicale suisse (mars 2018, p. 692-7) et reproduit avec son aimable autorisation DERMATOLOGIE La meilleure compréhension de la pathogenèse combinée au besoin d’amé- liorer la prise en charge a créé un environnement favorisant le développement de nouveaux traitements pour la dermatite atopique (DA). Plusieurs molécules sont étudiées, chez l’adulte principalement. La DA a cependant une prédomi- nance pédiatrique, avec une prévalence d’environ 20 % d’enfants et 5 % d’adultes. Aux Etats-Unis, le crisaborole (inhibiteur de la phosphodiestérase 4) topique a déjà sa place pour traiter la dermatite atopique chez l’adolescent et l’enfant, tandis que des études prometteuses sont en cours pour le dupilumab (inhibiteur des IL-4 et IL-13) systémique. Afin de renforcer la prise en charge médicale, l’éducation thérapeutique du patient joue un rôle essentiel dans l’op- timisation thérapeutique et l’encadrement des patients. Le modèle lausannois au sein de l’unité de dermatologie pédiatrique est détaillé dans cet article. INTRODUCTION de médicaments plus ciblés, avec moins d’effets secondaires à long terme pour La dermatite atopique (DA) est une der- la prise en charge de cas sévères, a créé matose à prédominance infantile un environnement favorisant le déve- (figures 1 et 2) nécessitant un accompa- loppement de nouveaux traitements. gnement personnalisé et une prise en Ainsi, parmi de multiples molécules en charge spécifique, car les retentisse- cours d’investigation, deux nouveaux ments sur la qualité de vie et le dévelop- agents, l’inhibiteur topique de la phos- pement psychosocial peuvent être phodiestérase 4 (PDE-4) (crisaborole majeurs et les comorbidités non négli- onguent) et l’inhibiteur des IL-4 et IL-13 geables. La meilleure compréhension par voie générale (dupilumab) ont de la pathogenèse combinée au besoin récemment émergé sur le marché. En outre, l’éducation thérapeutique du Figure 1 patient (ETP) a une place centrale pour Eczéma atopique disséminé aider les sujets avec DA et leur famille à Figure 2 Eczéma atopique des zones convexes du visage septembre 2018 page 181
Médecine & enfance développer une autogestion optimale et tement de référence des poussées de pimécrolimus a une pénétration 70 à à améliorer leur qualité de vie. Grâce à DA. Comme autres anti-inflammatoires 100 fois moins importante que les CT une approche humaniste, les besoins locaux pour cette indication, nous dis- mais aussi 9 à 10 fois inférieure au éducatifs de chaque patient sont définis posons des inhibiteurs de la calcineurine tacrolimus. Une étude a mesuré la et les nouveaux apprentissages réalisés. (ICT), du tacrolimus (onguent à 0,03 % concentration plasmatique après appli- Il s’agit, entre autres, de tenter d’ac- ou 0,1 %), approuvé en décembre 2000, cation de pimécrolimus à 0,03 % chez croître l’adhésion thérapeutique en sou- et du pimécrolimus (crème à 1 %), mis 54 enfants âgés de trois à vingt-quatre tenant le patient et sa famille dans leur sur le marché une année après. Leur uti- mois et a retrouvé que 97 % des échan- parcours de santé. lisation est particulièrement indiquée tillons sanguins avaient une concentra- sur des zones de peau fine et délicate tion médicamenteuse inférieure à TRAITEMENTS TOPIQUES (visage, plis, région génitale…) pour 1 ng/ml, 20 % de ceux-ci ayant une une application continue à long terme, concentration au-dessous de la valeur Les émollients sont le premier et le plus du fait de l’absence d’atrophie cutanée détectable (0,025 ng/ml) [5]. élémentaire soin de peau dans la DA. et en tant qu’agent d’épargne des corti- Concernant les infections cutanées, Plusieurs études démontrent qu’ils coïdes. Dans ces indications, ils repré- dans de larges cohortes, l’incidence représentent une méthode simple, sûre sentent une thérapie de choix malgré était similaire pour les groupes traités et et efficace dans la prévention de la leur prix plus élevé. Leur utilisation peut placebo, et était en lien avec la prédis- maladie, tant en retardant son appari- cependant être limitée par des effets position atopique chez ces patients tion qu’en diminuant son intensité. La secondaires locaux à type de brûlures et (impétigo, molluscum contagiosum, comparaison de deux groupes de nou- picotements. A noter que cette classe etc.) [6, 7]. Par ailleurs, une étude pédia- veau-nés à risque (anamnèse familiale médicamenteuse a longtemps préoc- trique sur l’utilisation exclusive de d’atopie) de développer une DA, un cupé les praticiens et suscite encore tacrolimus rapporte un risque d’infec- groupe avec application quotidienne beaucoup de questions du côté des tion herpétique localisé de 2,6 % versus d’un émollient pendant les 32 pre- patients et des parents quant à sa sécu- 0,9 % pour le groupe contrôle, soit mières semaines de vie versus un rité vis-à-vis du développement de lym- 6 cas, dont 2 ont présenté une dissémi- groupe exempt d’émollients, a montré phomes systémiques et de cancers cuta- nation en un eczéma herpétique, en une diminution de 32 % du développe- nés et d’une potentielle augmentation comparaison de seulement 1 cas ment de la DA pour le groupe où l’appli- d’infections cutanées. (0,75 % de dissémination) dans le cation fut quotidienne [1]. Une étude Concernant les cancers, en 2006, l’ad- groupe contrôle. Un cas additionnel de similaire, randomisée, incluant jonction d’une mise en garde supplé- dissémination dans le groupe contrôle a 124 nouveau-nés à risque de DA (anam- mentaire dans la notice vis-à-vis du aussi été rapporté trois jours après l’ar- nèse familiale d’atopie) a retrouvé un risque théorique de survenue de lym- rêt du médicament [8]. A ce jour, la litté- effet protecteur significatif sur l’inci- phome a favorisé la baisse de la pres- rature ne permet pas d’établir un lien dence cumulée lors de l’application cription des ICT. Depuis lors, plus d’une clair entre l’application d’ICT et la dissé- d’émollients, avec une réduction de décennie plus tard, aucun lien clair mination herpétique, qui reste tout de 50 % du risque relatif (RR : 0,50 ; IC à entre le risque de survenue de lym- même faible. 95 % : 0,28-0,9 ; p = 0,017) [2] . De phome et leur utilisation n’a pu être Deux décennies plus tard, plusieurs larges études cliniques sont en cours démontré formellement malgré les nouvelles thérapies locales alternatives afin de confirmer ces données. études épidémiologiques massives, la font l’objet d’études cliniques afin de L’application d’émollients est essentielle pharmacovigilance et le monitoring des concurrencer ces pionniers. Le crisa - dans la prise en charge de la DA. effets secondaires du Food and Drug borole onguent, un inhibiteur de la D’après une large revue de la littérature Administration Adverse Event Repor- PDE-4, a été autorisé aux Etats-Unis, en regroupant 77 études randomisées ting System. Les cancers cutanés ont décembre 2016, pour traiter les (pour un total de 6 603 patients), l’ap- aussi été surveillés dans la population patients âgés de deux ans et plus souf- plication d’émollients améliorerait pédiatrique sur près de 8 000 patients frant d’une DA légère à modérée [9, 10]. significativement le SCORAD (scoring utilisant le pimécrolimus sur dix ans, et Deux études multicentriques randomi- atopic dermatitis). De plus, la fréquence aucun lien n’a pu être retrouvé [4]. sées en double aveugle versus placebo des poussées de DA (RR : 0,40 ; IC à De plus, l’utilisation topique d’ICT n’a (AD-301 : NCT02118766 ; AD-302 : 95 % : 0,23-0,70), de même que la jamais induit d’immunosuppression sys- NCT02118792) ont été menées chez quantité de corticostéroïdes topiques témique au long cours démontrée ni 1 522 individus souffrant de DA légère (CT) utilisée sur 6 à 8 semaines (diffé- d’altération de la réponse vaccinale à modérée ; la population pédiatrique rence moyenne : 9,30 g ; IC à 95 % : chez les enfants. L’absorption transcuta- (deux-onze ans) de ces études repré- 15,3-3,27), a diminué [3]. née a été étudiée pour les ICT et reste sentait 60 % des participants [11]. Envi- Les CT restent toujours et encore le trai- largement inférieure à celle des CT. Le ron 50 % des patients inclus ont atteint septembre 2018 page 182
Médecine & enfance l’objectif principal, c’est-à-dire être libres ou quasiment libres d’eczéma ou Figure 3 Figure 4 présenter une amélioration d’au moins Eczéma atopique érosif et craquelé Eczéma atopique érosif et craquelé deux points du score ISGA (investiga- du dos du pied du dos de la main tor’s static global assessment). L’effet secondaire dû au traitement actif le plus souvent rapporté (45 % des cas) était la sensation de brûlure et de pico- tement après application. Pour le moment, il n’existe aucune donnée comparative entre le crisaborole et les CT ou les ICT. Des études de phase 4 sont encore en cours chez les enfants de trois à vingt-quatre mois. TRAITEMENTS SYSTÉMIQUES jeune et de 3 ou 4 (DA modérée à sévère) chez les adolescents. Ces pre- Si, malgré un traitement topique adé- miers résultats mettent en évidence une quat et bien conduit, la réponse théra- pharmacocinétique du médicament chez peutique s’avère insuffisante, un traite- l’enfant qui est comparable à celle ment systémique doit être discuté retrouvée chez l’adulte. Les résultats, (figures 3 et 4). Il n’existe cependant pas très prometteurs, sont superposables de consensus sur l’algorithme thérapeu- dans les deux groupes d’âge (enfant et tique de ces traitements. Une enquête adolescents) et de dosage (2 et en Amérique du Nord, la PeDRA TREAT 4 mg/kg/semaine) avec un score EASI survey, interrogeant 133 membres de la (Eczema Area Severity Index) qui est Société de dermatologie pédiatrique, a réduit de 30 à 50 % après la première montré que les traitements systémiques injection et d’environ 70 % après de première ligne le plus fréquemment 12 semaines d’utilisation. A noter que le utilisés chez l’enfant étaient la ciclospo- groupe traité avec 2 mg/kg/semaine rine (45,2 %) et le méthotrexate présentait moins d’effets secondaires que (29,6 %) ; en seconde ligne, on trouve celui ayant reçu 4 mg/kg/semaine. Chez le méthotrexate (31,3 %) et le myco- de la même année comme traitement l’adulte, la conjonctivite est l’effet secon- phénolate mofétil (30,4 %) et, en troi- biologique de premier choix chez daire le plus souvent rapporté. Dans ce sième ligne, l’azathioprine (33 %) et le l’adulte dans les formes modérées à premier échantillonnage de population mycophénolate mofétil (24 %) [12]. Ces sévères de DA ne répondant pas à un pédiatrique, il n’y a eu aucune conjoncti- traitements systémiques sont générale- traitement topique bien mené. Chez vite dans le groupe d’adolescents ni dans ment utilisés à court terme, avec une l’enfant, cette molécule a terminé une le groupe d’enfants traités avec surveillance rapprochée en plus d’un étude de phase 2A (NCT02407756). La 2 mg/kg/semaine. Seuls 2 des 19 traitement topique adéquat. A noter pharmacocinétique, l’efficacité et la enfants traités avec 4 mg/kg/semaine que leur toxicité organique et leurs sécurité ont été évaluées chez ont présenté une conjonctivite [13]. En potentiels effets indésirables sont des 78 patients divisés en deux groupes général, le dupilumab semble bien facteurs limitant leur utilisation. Il d’âge, six à onze ans et douze à dix-sept toléré, cependant la taille de cette existe en effet, dans la prise en charge ans, et en deux dosages différents, 2 et cohorte ne permet pas de tirer des de la DA sévère, une forte demande 4 mg/kg/semaine (dose totale maxi- conclusions fermes. Le lien direct entre pour des traitements systémiques plus male de 300 mg). Le médicament a été de possibles effets secondaires et ce trai- spécifiques avec moins d’effets secon- administré aux semaines 0, 8, 9, 10 et tement ainsi que son immunogénicité daires permettant une administration 11, avec un examen clinique final à (anticorps anti-médicament) sont en au long cours. 20 semaines. Les critères d’inclusion cours d’évaluation. En effet, deux études Le dupilumab, inhibiteur des IL-4 et étaient un score IGA (investigator’s glo- de phase 3 (randomisées, en double IL-13, a été autorisé aux Etats-Unis en bal assessment) de plus de 4 (DA aveugle, avec deux dosages différents de mars 2017 et en Europe en septembre sévère) dans la tranche d’âge la plus dupilumab versus placebo) ont débuté septembre 2018 page 183
Médecine & enfance en avril (NCT03054428) et en décembre par dupilumab. Les dates prévues de car ils auront probablement un effet 2017 (NCT03345915) pour évaluer l’ef- l’autorisation de ce biologique pour trai- significatif pour améliorer la qualité de ficacité et la sécurité d’emploi du dupilu- ter la DA modérée à sévère sont 2019 vie du patient atteint d’une DA sévère et mab, administré une fois toutes les deux chez l’adolescent, 2020 chez l’enfant âgé possiblement sur leurs comorbidités. Ce semaines chez des sujets âgés de six à de six et onze ans et au plus tôt 2023 développement accentue l’importance onze ans souffrant d’une DA modérée à chez l’enfant entre six mois et cinq ans. de l’éducation thérapeutique du patient sévère (IGA 3 ou 4) et de douze à dix- De nombreux autres immunosuppres- (ETP) dans la prise en charge de cette sept ans avec une atteinte sévère seurs sélectifs, comme les médicaments pathologie chronique. Effectivement, (IGA 4). Le nombre d’inclusions a été biologiques et les petites molécules afin de poser la bonne indication pour fixé à un minimum de 240 adolescents et (inhibiteurs de la PDE-4 et de Janus ces nouvelles thérapies, il est important 240 enfants chez qui le dupilumab sera kinase) sont en cours d’évaluation dans de différencier les rares cas véritable- administré en monothérapie, respective- la DA de l’adulte. Des études cliniques ment résistants aux traitements locaux ment en association avec des CT. L’objec- incluant des adolescents et enfants de ceux où l’adhésion aux traitements tif principal de ces études est une dimi- commenceront prochainement. topiques est sous-optimale. L’anamnèse nution du score IGA à 0 ou 1 et du score et l’examen clinique médical seuls ne EASI à 75 %. Les premiers résultats sont permettent pas toujours de déterminer attendus pour juillet 2018 et avril 2019. ALTÉRATION DE LA QUALITÉ la cause de l’échec de la prise en charge. Un autre essai clinique de phases 2 et 3 DE VIE DES ENFANTS ET L’ETP est pour cela une approche pré- combinées (NTC03346434) a débuté en cieuse et indispensable, permettant le décembre 2017 afin d’évaluer la sécurité ADOLESCENTS ATOPIQUES renforcement des connaissances et des d’emploi, la pharmacocinétique et l’effi- ET COÛTS DE SANTÉ compétences des patients, ainsi que le cacité du dupilumab chez 280 enfants développement des capacités d’ajuste- âgés de six mois à cinq ans souffrant La qualité de vie des enfants et adoles- ment permanent afin de faire face à d’une DA sévère. Une partie A ouverte cents atteints d’une DA est considéra- d’éventuels obstacles rencontrés dans la (open-label) vise à déterminer la dose blement réduite, tout comme celle de vie quotidienne. L’ETP contribue égale- (phase 2), une partie B (randomisée et leurs proches. La DA peut également ment à prévenir les complications évi- contrôlée par placebo) à définir l’effica- avoir des répercussions importantes sur tables, et ainsi à réduire les coûts de la cité (phase 3) du médicament dans cette leur développement psychosocial. De santé tout en améliorant la qualité de catégorie d’âge. La fin de cet essai cli- nombreux enfants atteints de DA pré- vie du malade. L’ETP doit donc désor- nique est planifiée pour 2022. Une sentent des troubles du sommeil lors mais faire partie intégrante de la prise étude d’extension (NCT02612454) a des poussées. Des études ont aussi mon- en charge de la DA et permettre la mise débuté en octobre 2015, incluant environ tré une forte association entre la DA et en œuvre d’un réel partenariat soi- 765 patients de six à dix-sept ans atteints des troubles de l’attention et l’hyperac- gnant-enfant malade-famille. Elle est de DA modérée à sévère, afin d’évaluer la tivité. De plus, la famille supporte sou- d’ailleurs fortement recommandée par sécurité et l’efficacité du médicament au vent un lourd fardeau financier, expli- l’Organisation mondiale de la santé et long cours. Il s’agit de patients pédia- qué par les jours de travail manqués l’ETFAD (European Task Force For Ato- triques inclus dans les études précédem- pour les visites médicales, les traite- pic Dermatitis) [16]. ment mentionnées qui poursuivent le ments en partie coûteux, non rembour- traitement. Ce modèle est conçu de sés ou seulement partiellement, et le MAUVAISE ADHÉSION manière à ce que les patients aient la pos- temps investi dans les soins cutanés. sibilité d’être traités jusqu’à la mise sur le Aux Etats-Unis, l’impact économique de AU TRAITEMENT marché du médicament. Des premiers la DA a été estimé entre 364 millions et ET CORTICOPHOBIE résultats sont attendus pour 2018. 3,8 milliards de dollars par an [14, 15]. Plus largement, le dupilumab a égale- En général, l’adhésion aux traitements ment démontré son efficacité dans la ÉDUCATION est faible dans les maladies chro- prise en charge d’autres problèmes du niques [17]. Concernant la DA, ce manque spectre atopique comme l’asthme aller- THÉRAPEUTIQUE d’adhésion est complexe et multifacto- gique persistant et difficilement contrô- DU PATIENT : ESSENTIELLE riel. Il peut être expliqué entre autres par lable chez les adultes et adolescents le défaut de connaissances, la com- (douze ans et plus), plusieurs études DANS LA PRISE EN CHARGE plexité du traitement, les compétences étant en cours pour les enfants de six à DE LA DERMATITE ATOPIQUE spécifiques nécessaires incomplètes et la onze ans. En Suisse, il y a actuellement fréquence insuffisante des visites médi- 18 adultes et 1 enfant souffrant d’une DA La mise sur le marché de nouveaux trai- cales. De plus, nombre de croyances au sévère qui bénéficient d’un traitement tements systémiques est très attendue, sujet de la maladie et différentes peurs septembre 2018 page 184
Médecine & enfance en lien avec le traitement participent à cette mauvaise adhésion [18]. Une des Figure 5 IMPLICATIONS PRATIQUES peurs les plus répandues parmi les Education thérapeutique du patient : un processus en quatre étapes (d’après [21]) 첸 La dermatite atopique nécessite une patients, les parents et certains profes- prise en charge spécifique chez l’enfant et sionnels de la santé est la corticophobie. Bilan éducatif l’adolescent en association avec une éduca- La crainte principale, en grande partie tion thérapeutique afin de permettre un irraisonnée, concerne les effets secon- Objectifs éducatifs meilleur contrôle de la maladie. daires locaux et systémiques associés à 첸 Grâce aux récents progrès dans la l’application régulière de cortisone. Une Acquisition des compétences recherche et le développement de thérapies non-adhésion aux soins liée à ces théra- ciblées, nous entrons dans une nouvelle ère Evaluation pies a été rapportée chez 36 % des de traitement. patients [19]. Bien que certains parents ne soient pas contre les CT et qu’ils soient changement de comportement qui fait convaincus de leur efficacité, ils en limi- sens pour lui et qui s’adapte à son à l’écoute et l’encadrement multidisci- tent souvent l’utilisation. Dans ce rythme intrinsèque. Pour ce faire, il est plinaire pendant tout un après-midi. contexte, le médecin et les spécialistes possible de s’appuyer sur un référentiel Bien souvent, le soutien du groupe aide en ETP peuvent jouer un rôle clé dans d’éducation du malade [20] qui propose à dédramatiser la maladie. l’identification des croyances autour du des moyens d’apprentissage et des outils L’école est ouverte à tous et l’inscription traitement. Ils vont également pouvoir (matériel spécifique, démonstration sur se fait directement sur le site internet de accompagner les patients dans l’enrichis- l’enfant, jeux éducatifs, plan d’action la Fondation Centre d’Allergie Suisse. sement de leurs connaissances et de personnalisé, mise en situation, jeux de leurs compétences en lien avec les CT. rôle…) adaptés à l’âge des patients et CONCLUSION spécifiques de leurs champs de compé- ÉDUCATION tence. Différents ateliers pour les enfants La dermatite atopique est une patholo- dès trois ans (trois-cinq ans, six-huit ans gie chronique nécessitant une prise en THÉRAPEUTIQUE : et huit-dix ans) et pour les adolescents charge adaptée et spécifique chez l’en- EN PRATIQUE ont été mis en place afin de viser, entre fant et l’adolescent. Grâce aux récents autres, une autonomisation maximale. progrès dans la recherche et le dévelop- Dans l’unité de dermatologie pédiatrique Ainsi, tous les patients adressés directe- pement de thérapies ciblées, nous de l’Hôpital de l’enfance à Lausanne, les ment par leur médecin de ville, quel que entrons dans une nouvelle ère de cette séances d’ETP sont régulièrement propo- soit leur âge, peuvent bénéficier de cette prise en charge. Une sélection optimale sées aux patients et à leurs proches (30 à prise en charge unique en Suisse des combinaisons thérapeutiques en 90 minutes, renouvelables). Elles sont romande. Depuis 2012, pour répondre association avec l’ETP permet un menées en partenariat entre un derma- aux besoins sans cesse croissants, l’ETP meilleur contrôle de la maladie en mini- tologue et une psychologue spécifique- s’est développée, entre autres grâce au misant les effets secondaires. L’ETP per- ment formée. La communication est cen- soutien de nos sponsors*, et atteint met encore de renforcer l’autonomie du trée sur le patient afin d’accéder à sa réa- aujourd’hui 300 consultations par an. patient et de sa famille, contribue à lité dans sa globalité psychosociale. Pour En 2009, l’école de l’atopie de Lausanne optimiser l’adhésion au traitement et à chaque famille, un bilan éducatif est réa- a été également développée en collabo- améliorer la qualité de vie. Elle se réa- lisé, dont les buts sont multiples : il s’agit ration avec la Fondation Centre d’Aller- lise au travers d’un regard centré sur le de définir les attentes et de mettre au gie Suisse. Elle est destinée à l’instruc- patient dans sa complexité et sa globa- jour non seulement les croyances indivi- tion et au soutien des parents d’enfants lité psychosociale en fonction du projet duelles, les ressources et les compé- de zéro à sept ans. Celle-ci est complé- de soins de chacun. 첸 tences déjà acquises, mais également les mentaire des consultations indivi- * Nous remercions la Fondation CK-Care, la Fondation contraintes qui pourraient faire obstacle duelles et est supportée par une équipe Centre d’Allergie Suisse, la Fondation Suisse de Derma- tologie Pédiatrique, la Fondation de la Dermatite Ato- au changement. Un des bienfaits composée d’une dermatologue pique, Pierre Fabre et La Roche Posay pour leurs soutiens majeurs est que cela permet un accord pédiatre, d’une allergologue pédiatre et financiers qui ont permis de mettre en place la consulta- patient-soignant sur les besoins éducatifs d’une psychologue. Elle présente l’avan- tion d’éducation thérapeutique de l’Unité de dermatolo- individuels. Au final, il sera possible de tage de permettre aux parents de sortir gie pédiatrique à l’Hôpital de l’enfance à Lausanne. déterminer quels sont les connaissances, de leur isolement et de se rencontrer Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêt en relation avec cet article. le savoir-faire et le savoir-être sur les- afin d’échanger sur leur quotidien en quels travailler ensemble (figure 5). Tout transférant des compétences souvent Références au long du suivi, il s’agira d’encourager très concrètes. Elle les encourage [1] HORIMUKAI K., MORITA K., NARITA M. et al. : « Application et de motiver le patient afin d’induire un encore à surmonter leurs craintes grâce of moisturizer to neonates prevents development of atopic septembre 2018 page 185
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