Réduire les méfaits de l'alcool en réglementant les activités transfrontalières de marketing, de
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Réduire les méfaits de l’alcool en réglementant les activités transfrontalières de marketing, Reducing the harm fromde alcohol by regulating cross-border publicité et de promotion dealcohol l’alcool marketing, advertising Alcohol, Drugs and Addictive Behaviours Department of Mental Health and Substance Use World Health Organization and promotion Résumé 20, Avenue Appia 1211 Geneva 27 Switzerland A technical report Email: msd-ada@who.int Website: https://www.who.int/health-topics/alcohol À sa cent quarante-sixième session en février 2020, le Conseil exécutif a demandé au Directeur général d’élaborer un plan d’action pour la période 2022–2030 afin de mettre en œuvre de manière efficace la Stratégie mondiale visant à réduire l’usage nocif de l’alcool (appelée ci-après la « Stratégie mondiale sur l’alcool »)1 en tant que priorité de santé publique, en consultation avec les États Membres et les parties intéressées, qui sera soumis à la Soixante-Quinzième Assemblée mondiale de la Santé pour examen, par l’intermédiaire du Conseil exécutif à sa cent cinquantième session en 2022. Dans cette même décision, le Conseil exécutif a demandé au Directeur général d’établir, avant sa cent cinquantième session, un rapport technique sur l’usage nocif de l’alcool, en particulier sur les activités transfrontalières de marketing, de publicité et de promotion, notamment celles qui ciblent les jeunes et les adolescents, qui pourrait contribuer à l’élaboration du plan d’action.2 Ce rapport technique décrit l’alcool comme « un produit préoccupant pour la santé publique » et attire l’attention sur le fait que le marketing de produits alcoolisés franchit de plus en plus les frontières nationales, souvent par des canaux numériques et souvent sans considération pour l’environnement social, économique ou culturel des pays destinataires. Les études montrent que le marketing de boissons alcoolisées accroît la consommation d’alcool, que le marketing ciblé accroît la consommation des publics cibles et que souvent, ce marketing séduit avant tout les gros buveurs.3,4,5,6 1 OMS (2010). Stratégie mondiale visant à réduire l’usage nocif de l’alcool. Genève, Organisation mondiale de la Santé (https://www.who.int/substance_abuse/alcstratenglishfinal.pdf, consulté le 5 septembre 2021). 2 OMS (2020). Décision EB146(14). Intensifier l’action pour réduire l’usage nocif de l’alcool. Dans : Conseil exécutif, cent quarante-sixième session, Genève, du 3 au 8 février 2020. Résolutions et décisions, annexes. Genève, Organisation mondiale de la Santé : 38-39 (EB146/2020/REC/1; https://apps.who.int/gb/ebwha/pdf_files/EB146-REC1/B146_REC1-fr.pdf, consulté le 10 janvier 2022). 3 Noel JK, Babor TF, Robaina K, Feulner M, Vendrame A, Monteiro M (2017). Alcohol marketing in the Americas and Spain during the 2014 FIFA World Cup Tournament. Addiction. 112(Suppl. 1):64–73. 4 Noel JK, Xuan Z, Babor TF (2018). Perceptions of alcohol advertising among high-risk drinkers. Subst Use Misuse. 53(9):1403–10. 5 Sargent JD, Babor TF (2020). The relationship between exposure to alcohol marketing and underage drinking is causal. J Stud Alcohol Drugs. (Suppl. 19):113 24. 6 Maani Hessari N, Bertscher A, Critchlow N, Fitzgerald N, Knai C, Stead M et al. (2019). Recruiting the “heavy-using loyalists of tomorrow”: an analysis of the aims, effects and mechanisms of alcohol advertising, based on advertising industry evaluations. Int J Environ Res Public Health. 16(21):4092–108.
2 Réduire les méfaits de l’alcool en réglementant les activités transfrontalières de marketing, de publicité et de promotion de l’alcool La Stratégie mondiale sur l’alcool, adoptée par la Soixante-Troisième Assemblée mondiale de la Santé en mai 2010 dans la résolution WHA63.13, définit le marketing comme toute « forme de communication ou de message commercial conçu dans l’intention ou ayant pour effet de faire reconnaître plus facilement ou de rendre plus attrayants certains produits et services et/ou d’en augmenter la consommation. Il peut comprendre n’importe quel élément contribuant à faire de la publicité pour un produit ou un service ou à le promouvoir d’une quelconque façon. » La stratégie souligne le besoin de réduire l’impact du marketing « surtout sur les jeunes et les adolescents... L’exposition des enfants et des jeunes à un marketing séduisant est particulièrement préoccupante ».1 Le Plan d’action mondial OMS 2013–2020 pour la lutte contre les maladies non transmissibles indique que l’adoption et l’application d’interdictions ou de restrictions générales de l’exposition à la publicité en faveur de l’alcool sont des interventions très rentables pour protéger la santé.7 Le marketing transfrontalier inclut le marketing sortant (émanant du territoire d’un État) et le marketing entrant (à destination du territoire d’un État). Une part importante de l’alcool est produite et commercialisée par des entreprises transnationales qui font également partie des acteurs investissant le plus dans la publicité et la promotion à l’échelle mondiale. La mondialisation et l’essor des technologies numériques ont banalisé le marketing transfrontalier de boissons alcoolisées, qui est souvent initié et contrôlé par des acteurs extérieurs au pays destinataire. Le rapport propose une synthèse des pratiques de marketing visant à accroître l’usage de boissons alcoolisées et à toucher de nouveaux groupes de consommateurs. Les modes de publicité classiques, pour une marque de produit ou pour une image institutionnelle, et le parrainage d’événements sportifs et culturels de grande ampleur (et souvent de diffusion internationale), s’accompagnent désormais de placements de produits plus manifestes dans les productions cinématographiques et télévisuelles ciblant les marchés internationaux, de campagnes de responsabilité sociale des entreprises servant à promouvoir des marques, et de promotion sur les médias sociaux. L’alcool fait partie des substances psychoactives les plus néfastes pour la santé mondiale et pour les populations enregistrant un taux élevé de prévalence de la consommation d’alcool. Pour autant, le marketing de ces boissons est nettement moins contrôlé que celui des autres produits psychoactifs. Même si chacun de nous doit faire preuve de prudence en matière de consommation d’alcool, certains groupes de populations doivent être protégés contre le marketing de boissons alcoolisées. C’est notamment le cas des enfants et des adolescents, mais également des buveurs dépendants et des personnes atteintes de troubles liés à la consommation d’alcool ou encore des personnes qui souhaitent être soutenues dans leur décision de s’abstenir. Il est largement reconnu que bien plus de la moitié de l’alcool consommé par une population est bue par vingt pour cent de consommateurs d’alcool, faisant des gros buveurs et des buveurs dépendants une cible stratégique pour les ventes et la publicité d’alcool. Les patients alcoolo-dépendants déclarent souvent ressentir un besoin accru de boire de l’alcool quand ils sont confrontés à des signaux liés à l’alcool.8,9,10 Pourtant, ces personnes disposent rarement d’un moyen efficace d’éviter la teneur des publicités ou des promotions. De même, des groupes de populations importants s’abstiennent de consommer de l’alcool pour des raisons personnelles, sociales ou religieuses, en particulier les femmes, et pourtant, ils peuvent difficilement éviter de recevoir des promotions de boissons alcoolisées. 7 OMS (2013). Global action plan for the prevention and control of noncommunicable diseases 2013–2020. Genève, Organisation mondiale de la Santé (https://www.who.int/publications/i/item/9789241506236, consulté le 5 septembre 2021). Le Plan d’action mondial a été adopté par la Soixante-Sixième Assemblée mondiale de la Santé en mai 2013 (résolution WHA66.10) et reconduit jusqu’en 2030 par la Soixante- Douzième Assemblée mondiale de la Santé en mai 2019 (décision WHA72(11)). L’annexe 3 a été adoptée sous sa forme actualisée en mai 2017 par l’Assemblée mondiale de la Santé à sa Soixante-Dixième session (résolution WHA70.11). 8 Townshend J, Duka T (2001). Attentional bias associated with alcohol cues: differences between heavy and occasional social drinkers. Psychopharmacology. 157(1):67–74. 9 Mainz V, Drüke B, Boecker M, Kessel R, Gauggel S, Forkmann T (2012). Influence of cue exposure on inhibitory control and brain activation in patients with alcohol dependence. Front Hum Neurosci. 6:92. 10 Babor TF, Robaina K, Noel JK, Ritson EB (2017). Vulnerability to alcohol‐related problems: a policy brief with implications for the regulation of alcohol marketing. Addiction. 112(Suppl. 1):94–101.
Résumé 3 Même si la consommation d’alcool dans les pays à faible revenu est nettement inférieure à celle des pays à revenu élevé, le taux de préjudices imputables à l’alcool y est plus élevé.11 Le « préjudice par litre » est également plus élevé chez les personnes les plus pauvres que chez les plus riches. En matière d’équité en santé, des arguments solides plaident en faveur d’une limitation plus stricte des activités de marketing et de promotion de l’alcool à l’endroit des personnes plus pauvres et disposant de moins de ressources. Les décisions relatives au contrôle du marketing de boissons alcoolisées doivent tenir compte de ce facteur. De même, si trois quarts de l’alcool consommé dans le monde sont bus par des hommes, les spécialistes du marketing ont tendance à considérer le faible taux de consommatrices comme une opportunité d’encourager davantage de femmes à boire et montrent souvent la consommation d’alcool par les femmes comme un symbole d’autonomisation et d’égalité. Malheureusement, les études sur les violences conjugales indiquent que les violences contre les femmes sont plus fréquentes quand elles et leur partenaire ont tous les deux bu, ce qui risque de réduire leur pouvoir au sein du couple, plutôt que de l’accroître.12 L’essor du marketing de boissons alcoolisées se fait en grande partie sur les réseaux sociaux. La collecte et l’analyse de données sur les habitudes et les préférences des utilisateurs par les fournisseurs mondiaux d’accès à internet offrent aux spécialistes du marketing de boissons alcoolisées des opportunités grandissantes pour cibler plus précisément des groupes spécifiques avec des messages persuasifs. Les produits peuvent être commercialisés sous des marques différentes selon les publics et les pays. La publicité ciblée sur les médias sociaux est particulièrement efficace, non seulement parce qu’elle utilise des données détaillées sur les intérêts et les comportements des utilisateurs, mais également parce que son impact peut être renforcé par l’influence sociale. Même si les « influenceurs sociaux » (qui peuvent être payés pour promouvoir un produit, mais ne le sont pas systématiquement) en sont les vecteurs les plus manifestes, ce type de publicité peut passer par la promotion de marques ou de produits que des « amis » ont « aimé ». Cette forme de marketing par les pairs brouille les frontières entre le contenu marketing et les activités des pairs sur la toile. Sur les plateformes des médias sociaux, l’alcool est couramment exhibé et presque toujours présenté de manière positive. Ces évolutions du marketing et des technologies numériques sont apparues récemment et rapidement, ce qui présente des difficultés pour leur réglementation. La transformation rapide de l’écosystème numérique et des méthodes utilisées pour inonder de publicités pour l’alcool les espaces personnels en ligne montre à quel point il est urgent pour les pays et les institutions internationales de mener des actions concertées. Les intérêts économiques et mercatiques prennent généralement le pas sur les intérêts sanitaires lors des négociations et des différends portant sur le commerce ou les investissements liés à l’alcool. La prudence doit être de mise afin de s’assurer que ces négociations ne limitent pas la capacité des États à réglementer le marketing transfrontalier de l’alcool. Les pays ont le pouvoir de réglementer le marketing quand il franchit leurs frontières. Or, le marketing en ligne est essentiellement transfrontalier par nature. Dans 66 % des pays du monde, les autorités publiques n’ont défini aucune réglementation spécifique pour le marketing numérique de l’alcool ; 17 % seulement imposent des restrictions partielles et 18 % l’interdisent.13 11 OMS (2018b). Global status report on alcohol and health 2018. Genève, Organisation mondiale de la Santé (https://www.who.int/publications/i/item/global-status-report-on-alcohol-and-health-2018, consulté le 5 septembre 2021). 12 Devries KM, Child JC, Bacchus LJ, Mak J, Falder G, Graham K et al. (2014). Intimate partner violence victimization and alcohol consumption in women: a systematic review and meta‐analysis. Addiction. 109(3):379–91. 13 OMS. Système mondial d’information sur l’alcool et la santé. Genève, Organisation mondiale de la Santé, (https://www.who.int/data/gho/data/themes/global-information-system-on-alcohol-and-health, consulté le 7 janvier 2022).
4 Réduire les méfaits de l’alcool en réglementant les activités transfrontalières de marketing, de publicité et de promotion de l’alcool Le contrôle du marketing transfrontalier de biens de consommation attrayants, mais problématiques, dans le cas présent de boissons alcoolisées, qui ne sont pas des produits ordinaires, requiert une coordination d’ampleur et une attention soutenue aux niveaux national, bilatéral et multilatéral.14 La protection des mineurs et des personnes atteintes de troubles liés à la consommation d’alcool est une question de santé publique qui bénéficierait d’une réglementation nationale forte du marketing de boissons alcoolisées. La majorité du marketing de ces produits revêtant aujourd’hui une dimension transnationale, le contrôle du marketing transfrontalier doit faire partie intégrante des efforts nationaux visant à limiter les méfaits de l’alcool. Ces efforts nationaux peuvent être appuyés par des interventions coréglementaires appropriées. Les codes de conduite des producteurs d’alcool ont été analysés, sans que leur efficacité pour réduire l’usage nocif de l’alcool soit démontrée.15,16,17,18,19 Les acteurs non étatiques pourraient jouer un rôle à cet égard, mais les restrictions du marketing transfrontalier en faveur de la santé publique devraient être élaborées par les gouvernements sur la base des intérêts pour la santé publique, à la lumière des meilleures données factuelles disponibles, et les personnes morales ou physiques visées par un conflit d’intérêts ne devraient pas participer à l’élaboration de ces politiques et réglementations.1 De plus, les réglementations relatives au marketing de boissons alcoolisées sont d’autant plus efficaces quand elles s’accompagnent d’outils qui en garantissent la conformité, le suivi et l’application. Le rapport conclut que la coopération et le soutien bilatéraux et multilatéraux entre les États peuvent renforcer l’impact des efforts réglementaires nationaux. Au niveau national, le contrôle ou l’interdiction du marketing de boissons alcoolisées, notamment de ses aspects transfrontaliers, devrait faire partie intégrante des stratégies de santé publique visant à réduire l’usage nocif de l’alcool et à limiter les méfaits résultant de la consommation d’alcool. Au niveau international, le contrôle efficace des aspects transfrontaliers du marketing de boissons alcoolisées requiert une collaboration entre les États et un outil international de coopération efficace dans ce domaine. La coopération internationale repose généralement sur un besoin impérieux d’action ou sur un degré élevé de similitudes entre les législations des pays. En cela, la réussite de la coopération internationale pourrait dépendre d’un certain niveau de consensus sur la nécessité de réglementer le marketing transfrontalier. 14 Babor T, Caetano R, Casswell S, Edwards G, Giesbrecht N, Graham K et al. (2010). Alcohol: no ordinary commodity – research and public policy, second edition. Oxford: Oxford University Press. 15 Noel JK, Babor TF, Robaina K (2017). Industry self-regulation of alcohol marketing: a systematic review of content and exposure research. Addiction. 112(Suppl. 1):28–50. doi: 10.1111/add.13410. Epub 2016 Oct 11. PMID: 27188217. 16 Noel JK, Babor T F, Robaina K, Feulner M, Vendrame A, Monteiro M (2017). Alcohol marketing in the Americas and Spain during the 2014 FIFA World Cup Tournament. Addiction. 112(Suppl. 1):64–73. 17 Hastings G, Brooks O, Stead M, Angus K, Anker T, Farrell T et al. (2010). Failure of self-regulation of UK alcohol advertising. BMJ. 340: b5650. 18 Noel J K, Babor T F (2017). Does industry self‐regulation protect young people from exposure to alcohol marketing? A review of compliance and complaint studies. Addiction. 112(Suppl. 1):51–6. 19 Carah N, Brodmerkel S (2021). Alcohol marketing in the era of digital media platforms. J Stud Alcohol Drugs. 82(1):18–27. doi: 10.15288/ jsad.2021.82.18. Alcool, drogues et conduites addictives Réduire les méfaits de l’alcool en réglementant les activités transfrontalières Département Santé mentale et usage de substances psychoactives de marketing, de publicité et de promotion de l’alcool : résumé [Reducing Organisation mondiale de la Santé the harm from alcohol by regulating cross-border alcohol marketing, 20, Avenue Appia advertising and promotion: summary] 1211 Genève 27 Suisse ISBN 978-92-4-004992-5 (version électronique) Courriel : msd-ada@who.int ISBN 978-92-4-004993-2 (version imprimée) Site Web : https://www.who.int/health-topics/alcohol © Organisation mondiale de la Santé 2022. Certains droits réservés. La présente publication est disponible sous la licence CC BY-NC-SA 3.0 IGO.
Vous pouvez aussi lire