Résidences seniors Le développement des en France - ENTRE TÂTONNEMENTS ET MATURITÉ - EHPA
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Le développement des Résidences seniors en France ENTRE TÂTONNEMENTS ET MATURITÉ 2 èm e éd i t io n I Fév r ie r 2 0 1 6
L’auteur de ce rapport Après avoir été chargé de mission dans une agence régionale de santé puis consultant dans un cabinet de conseil en stratégie, Aurélien Bordet a rejoint le cabinet EHPA Conseil où il a notamment produit une étude sur la télémédecine en France et un rapport sur les résidences seniors. Il intervient également à Sciences Po dans le cadre de l’Executive master « Politiques du vieillissement et Silver économie ». Le cabinet EHPA Conseil EHPA Conseil est un cabinet de conseil spécialisé dans les questions liées aux politiques du vieillissement et à la Silver économie. Il est dirigé par Luc Broussy, également auteur d’un rapport remis au Premier ministre en 2013 sur l’adaptation de la société au vieillissement, président de France Silver Eco et directeur de l’Executive master « Politiques du vieillissement et Silver économie » de Sciences Po. EHPA Conseil a conduit de nombreuses missions dans le domaine des résidences seniors. Après avoir produit la première édition de ce rapport, qui a contribué à faire reconnaître un statut législatif à cette forme d’habitat, EHPA Conseil a lancé la première newsletter sectorielle entièrement dédiée aux résidences seniors et accompagne aujourd’hui les principaux groupes de résidences seniors, des promoteurs ainsi que des gestionnaires. Nos compétences : Réalisation d’études d’opportunité ou de faisabilité Rédaction de notes de synthèse Elaboration de plans stratégiques Montage de projets complexes Organisation de séminaires de formation Organisation de colloques Elaboration de plans de communication Remerciements Nous adressons nos remerciements les plus sincères à Solenne Brugère, avocate associée au sein du cabinet Carakters, qui a apporté sa précieuse contribution à ce rapport pour éclairer les points de droit relatifs au cadre juridique des résidences seniors. 2
Sommaire Sommaire......................................................................................................................... 3 Synthèse .......................................................................................................................... 4 Préambule ........................................................................................................................ 6 Partie 1 – Les seniors d’aujourd’hui et de demain ............................................................8 Un constat d’ordre démographique 9 Un constat d’ordre sociologique 10 Un constat d’ordre économique 10 Partie 2 – Le besoin d’une nouvelle offre d’habitat pour seniors ......................................14 La difficile adaptation des logements 15 Une offre en présence peu satisfaisante 17 Les résidences seniors comme réponse possible 20 Partie 3 – L’émergence d’une nouvelle génération de résidences seniors.........................24 De la première à la deuxième génération 25 Les spécificités du modèle de deuxième génération 27 Un développement croissant… mais encore balbutiant 29 Le choix d’un modèle plus flexible 34 Partie 4 – Une contribution forte à la prévention de la perte d’autonomie........................38 Les cinq dimensions du bien vieillir dans les résidences seniors 40 Des externalités positives à prendre en compte 49 Partie 5 – Vers l’arrivée à maturité du marché des résidences seniors..............................52 Vers une logique sectorielle 53 Quatre défis 57 Quatre relais de croissance 59 Annexe : Liste des entreprises et des marques citées ..............................................................62 3
Synthèse L’explosion du nombre de Quatre relais personnes âgées autonomes de croissance La France n’a jamais compté autant de Plus que jamais, il est donc nécessaire seniors. Surtout, elle n’a jamais compté d’apporter des clés de lecture de ce autant de seniors pouvant vieillir chez marché. Ce constat vaut à la fois pour les eux en autonomie. Les personnes âgées, résidents et leurs familles, les élus locaux, aujourd’hui, veulent avoir le choix. Elles mais aussi les investisseurs institution- sont à la recherche d’un « chez-soi social » nels (Caisse des Dépôts et Consignations, où elles pourront vivre parmi des personnes caisses de retraite, mutuelles, OPCI, etc.). qui leur ressemblent. Parallèlement, il Alors que le modèle de la vente à découpe n’est pas toujours évident d’adapter son est aujourd’hui menacé par les incertitudes logement. Parfois coûteuse, cette adapta- qui pèsent sur les dispositifs de défiscali- tion est également source de nuisances et sation existants, la vente en bloc à ce type implique d’avoir pleinement conscience de d’investisseurs apparaît en effet comme son état de santé. Or, le propre de la vieil- un levier de croissance important au côté lesse est qu’elle est difficilement admise de la concentration, de la diversification et par les principaux intéressés. Dans ce de l’internationalisation. La création d’un contexte, les résidences seniors offrent une label qualité devrait par ailleurs permettre solution adéquate à qui souhaite profiter de faire avancer le marché dans la bonne d’un logement plus adapté et de services à direction. la carte, dans un environnement sécurisé et dans un cadre permettant le maintien des liens sociaux. La forte croissance Quatre défis du marché à relever Le marché des résidences seniors est Enfin, il appartiendra aux principaux aujourd’hui en plein boom. Le nombre de opérateurs de s’organiser pour relever un résidences devrait passer d’environ 500 certain nombre de défis, tels que l’unifica- aujourd’hui à près de 900 d’ici 2020. La tion du secteur, la professionnalisation de plupart des promoteurs nationaux se sont la filière et l’organisation de la communi- lancés, soit en prenant des participations cation vis-à-vis du grand public. Les prin- dans les principaux exploitants, soit en cipaux gestionnaires-exploitants de rési- développant leur propre enseigne, soit dences seniors pourraient jouer un rôle les deux. Des promoteurs de taille plus d’ensemblier pour l’ensemble de la filière modeste se lancent également, donnant de la Silver économie car ils allient toutes lieu à un foisonnement des concepts avec les composantes de cette industrie, de plusieurs niveaux de différenciation : l’amélioration du bâti à l’incorporation de gamme, localisation, nature des services technologies pour l’autonomie, en passant proposés, taille des équipes et des espaces par les usages des nouvelles technologies. collectifs… Enfin, on assiste à une hybri- L’une des clés du succès résidera donc dation des concepts, alors que certains dans la capacité à générer des revenus gestionnaires associatifs et bailleurs complémentaires et à porter cette nouvelle sociaux commencent de s’intéresser de offre à l’international. près à ce secteur. 4
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Préambule U n peu plus d’un an après la parution discussions, qui devraient déboucher d’ici du rapport Bien vieillir chez soi grâce la fin de l’année 2016 sur la création d’un aux résidences seniors1, EHPA Conseil label assorti d’une procédure de labellisa- publie la deuxième édition de son étude tion. annuelle consacrée au paysage des rési- dences seniors en France. Ces travaux devraient logiquement accé- lérer la phase de transition à laquelle nous Pourquoi cette deuxième édition ? De l’eau nous trouvons actuellement. Il était donc a coulé sous les ponts depuis la sortie de la indispensable de décrire cette évolution. première mouture du rapport en 2014. En- Car nous assistons aujourd’hui à la fin d’un fin votée à l’unanimité par l’Assemblée na- monde, celui des établissements d’hé- tionale et le Sénat, la loi d’adaptation de la bergement pour personnes âgées dépen- société au vieillissement a été promulguée dantes (Ehpad). Quantitativement, nous le 28 décembre 2015. Au total, trois ans se avons été témoins de l’explosion du secteur seront écoulés depuis son lancement en commercial, passé en un quart de siècle de janvier 2013 par le président de la Répu- 20 000 lits à plus de 100 000 lits. De 1986 et blique. 2011, le secteur associatif a quant à lui évo- lué de 90 000 à 160 000 lits. Dans le même Souvenez-vous, il y a un an, notre rapport temps, le secteur public a connu une sta- faisait sept propositions, parmi lesquelles bilisation quantitative de son parc d’Ehpad la reconnaissance législative des rési- et d’unités de soins de longue durée (USLD) dences seniors. Le Sénat a repris cette pro- confondu. Le robinet des appels à projets position, également portée par d’autres, et étant fermé, les groupes d’Ehpad privés a introduit dans la loi un article 15 nouveau commerciaux privilégient aujourd’hui une tendant à reconnaître officiellement les ré- croissance externe qui repose principale- sidences seniors de nouvelle génération. ment sur l’international. Qualitativement, Une telle reconnaissance apporte des ga- ensuite, beaucoup de progrès ont été faits ranties tant aux résidents et leurs familles dans les Ehpad depuis la loi 2002-2. Les qu’aux maires qui autorisent la construc- établissements se recentrent progressive- tion de telles résidences sur le territoire de ment sur la prise en charge de la très grande leur commune. Là est toute la difficulté : dépendance, laissant tout un champ de les résidences seniors sont-elles du loge- l’accueil des personnes âgées inoccupé. ment classique, au même titre que n’im- porte quelle copropriété régie par la loi de Le dynamisme du secteur des résidences 1965, ou s’agit-il d’une catégorie particu- seniors contraste fortement avec la forme lière d’immobilier géré ? Désormais, la dis- de routine qui semble s’être emparée du tinction entre les résidences services sous secteur des Ehpad. Un exemple ? Son dé- forme de copropriétés et les résidences part du troisième groupe d’Ehpad français locatives de nouvelle génération est claire- DomusVi à peine digéré, Jean-François Vi- ment actée. Une autre de nos propositions toux s’est empressé de monter au capital est en passe de se concrétiser : la création du groupe de résidences seniors fondé par du premier label qualité de la profession. Valérie Bertone, Les Essentielles, dont il est Les deux principales organisations repré- aujourd’hui le président. Soyons clairs, il ne sentatives que sont le Synerpa RSS et le s’agit pas de nier l’effet de mode qui carac- SNRA ont engagé des discussions dans le térise les résidences seniors. La meilleure but d’élaborer un cahier des charges com- illustration de ce phénomène est la nou- mun. Cette action est indissociable de la velle dénomination des logements-foyers, reconnaissance législative des résidences rebaptisés résidences autonomie dans la seniors et relève de l’initiative privée, même loi d’adaptation de la société au vieillisse- si les pouvoirs publics seront amenés à ment. Les résidences seniors portent en contribuer. C’est ce chemin qu’ont pris les elles une image de modernité que n’ont tout 6
simplement pas les autres formes d’héber- campagne, « cela n’existe pas »2, un Ludovic gement. Peut-on pour autant se conten- Savariello lance avec Sairenor un concept… ter de cette vision simpliste ? A l’évidence, de résidences rurales pour seniors actifs. non. Une petite révolution est en train de se Bref, il n’y a pas de norme. jouer sous nos yeux. Une révolution alimen- tée par un cycle permanent d’innovations Au côté des grands promoteurs nationaux qui sont en train de donner naissance à un (Nexity, Bouygues Immobilier, Vinci, Altarea nouveau secteur appelé également habitat Cogedim, etc.), des promoteurs locaux ou de intermédiaire, habitat alternatif ou encore taille plus modeste (Heurus, Groupe C3A, habitat regroupé avec services. Sefiso Aquitaine, etc.) se lancent eux-aus- si. Les abandons sont nombreux. Il y a donc Le marché des résidences seniors tâtonne. fort à parier qu’un « écrémage » aura lieu au D’après l’Institut Montaigne, il ne repré- cours des prochaines années. Quoiqu’il en senterait qu’1,3% du parc de résidences soit, le développement des résidences se- non-médicalisée contre 4% au Royaume- niors en France ne va cesser de s’accroître. Uni et 7% au Québec. De plus, on est La barre des 900 résidences devrait être confronté à la multiplication des concepts. franchie avant 2020, alors que ces rési- C’est d’abord une réalité au niveau global, dences n’étaient que 500 en 2014.3 Comme alors qu’il n’est pas toujours facile de dis- nous allons le voir, le marché va trouver de tinguer entre les résidences d’ancienne nouveaux relais de croissance. Parallèle- génération, les résidences seniors de ment, il devra trouver les réponses à de nouvelle génération, les villages seniors, nombreux défis qui, une fois relevés, lui les immeubles pour seniors offrant peu permettront demain d’apparaître comme de services… C’est également un constat un secteur aux fondamentaux solides. Ce qu’on peut faire à un niveau plus fin. Quand sont ces évolutions, passionnantes, que un Claude Cheton, patron du groupe Eme- nous avons voulu placer au cœur de cette ra, explique qu’une résidence seniors à la deuxième édition. 7
1. Les seniors d’aujourd’hui et de demain Quels sont les bons mots pour désigner les hommes et les femmes dont nous allons parler pendant ces trois jours ? Âgés, anciens, aînés, seniors, silvers, retraités : les mots ne manquent pas pour nommer les bénéficiaires de ces politiques. Cette profusion révèle surtout que le mot «vieux», encore toléré comme adjectif, est cependant proscrit comme substantif, comme si le vieux était ipso facto objet de discrimination, et l’aîné objet de respect. Laurence Rossignol, secrétaire d’Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie4 lors de l’ouverture de la discussion sur le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement à l’Assemblée nationale, 9 septembre 2014 8
D e qui parle-t-on au juste ? Dans la littérature scientifique, une personne est considérée comme autonome lorsqu’elle est en capacité d’accomplir seule des gestes de la vie quo- tidienne dans l’environnement lequel elle vit. Cela n’exclut pas qu’elle ait recours à des aides techniques ou à des aménagements du logement destinés à prolonger l’autonomie à son domicile. C’est précisément à ce public de 75 ans ou plus que s’adressent les résidences seniors. Un constat d’ordre c’est-à-dire lié à l’allongement de l’espé- rance de vie. démographique À ce phénomène s’ajoute celui de l’arrivée La hausse de l’espérance de vie conju- en âge des baby-boomers. En 2010, la guée au papy-boom se traduit par une France comptait 14,4 millions de personnes explosion du nombre de personnes âgées. âgées de 60 ans ou plus, dont 5,6 millions Fait notable, un nombre croissant de ces de personnes âgées de 75 ans ou plus. La personnes ne sont pas dépendantes, occa- part des plus de 60 ans dans la population sionnant une pression sans précédent est passée de 16,2% à 22,6% en l’espace sur le stock de logements destinés à des de 60 ans. Le nombre de personnes âgées seniors autonomes. de 75 ans ou plus a été multiplié par près de quatre entre 1950 et 2010, passant de 1,6 Hausse de l’espérance de vie million à 5,6 millions.7 L’effet du papy-boom et papy-boom devrait atteindre son maximum en 2035. Le vieillissement démographique est un phénomène qui touche tous les pays L’explosion du nombre de personnes du monde. Deux changements sont à très âgées mais autonomes l’œuvre : la diminution de la fécondité Qui dit vieillissement ne dit pas nécessaire- et l’allongement de la durée de la vie. La ment augmentation de la dépendance à un France a été pionnière, ses habitants ayant niveau global. Les seniors sont de plus en été les premiers à limiter volontairement plus nombreux à vieillir sans perte d’auto- leurs naissances dès la fin du 18e siècle, nomie majeure. D’après le Conseil d’Orien- soit un demi-siècle à un siècle avant ceux tation des Retraites (COR), l’espérance de vie des autres pays européens. Entre 1950 et sans incapacité évolue plus favorablement 2010, l’Hexagone est passé de 63 ans à 78 après 65 ans qu’entre 50 et 65 ans.8 L’explo- ans pour les hommes, et de 69 ans à 85 sion du nombre de personnes très âgées et ans pour les femmes5. Cette évolution est faiblement dépendantes se traduit par une encore plus flagrante lorsqu’on considère pression inédite sur le stock de logements l’espérance de vie à 75 ans, qui est de 11 destinés aux seniors autonomes, comme ans pour les hommes et de 14 ans pour les le note Luc Broussy dans son rapport : « Il femmes. Cette hausse sans précédent est est nécessaire que les pouvoirs publics se notamment la conséquence des progrès concentrent désormais sur les formules médicaux et de l’amélioration des condi- d’hébergement pour personnes autonomes tions de vie depuis la fin de la Seconde dont notre pays va particulièrement avoir Guerre Mondiale. L’Insee fait clairement le besoin dans les deux décennies à venir. »9 constat d’un vieillissement « par le haut »6, Les seniors d’aujourd’hui et de demain 9
1. Un constat d’ordre Le fort attachement au lien social sociologique La valeur de liberté est au cœur de l’hé- ritage de mai 68. Liberté d’aller et venir, Les baby-boomers ont connu mai 1968. bien sûr, mais aussi liberté de choix. Les Ils sont attachés aux valeurs de liberté et opérateurs publics, privés et associatifs d’expérience collective, en rupture avec les en ont tiré les conséquences. A propos de modes de vie de leurs parents et sont à la l’allocation personnalisée pour l’autonomie recherche de confort. (Apa), Loïc Trabut écrit ainsi : « En finançant directement les individus dans le cadre des Vieillir chez soi : politiques de la dépendance, les décideurs permettent le développement d’un panel de un projet de vie partagé services censé faciliter l’exercice de ce libre- Alors que les générations d’après-guerre choix. La multiplication des services d’aide, ont été en quelque sorte surprises par l’al- des maisons de retraite et des services en longement sans précédent de l’espérance tout genre en direction des personnes âgées de vie, on peut considérer que les généra- en est une parfaite illustration. »11 tions actuelles seront mieux à même d’an- ticiper les effets de l’avancée en âge. Beau- La notion de vie en collectivité est coup ont fait l’expérience de la recherche également largement partagée, ce qui d’une place en Ehpad pour un parent n’exclue pas de disposer d’un espace proche ou ont dû jouer le rôle d’aidant. privatif. A cet égard, les résidences seniors La capacité des seniors à vivre chez eux en semblent proposer une réponse adaptée autonomie est favorisée par le fait qu’ils puisqu’elles sont constituées de logements sont de plus en plus entourés. Une situa- indépendants organisés autour d’espaces tion qui s’explique notamment par le déve- collectifs. D’après un sondage de l’Institut loppement des usages connectés et par le du bien vieillir Korian, 63% des seniors fait qu’il sera de plus en plus rare, pour une anticipent la création de lieux de vie où ils personne âgée, de vieillir sans conjoint ou pourront vivre en communauté avec les sans enfant.10 personnes qui leur ressemblent et qu’elles apprécient le plus.12 En d’autres termes, les seniors aspirent à un « chez-soi social ». Des générations qui Dernier point, l’héritage culturel de mai 68 veulent « bien vieillir ». se traduit pour certains par l’éclatement de la cellule familiale, provoquant par ricochet Les nouvelles générations de seniors l’explosion des problèmes liés à la solitude, souhaitent bénéficier de services afin de notamment chez les personnes âgées. faciliter la vie quotidienne, manger une nourriture équilibrée et variée, avoir la possibilité de pratiquer une ou plusieurs Un constat d’ordre activités physiques, accéder facilement à la culture et aux loisirs, partager avec d’autres économique des instants de convivialité… Enfin, elles Même s’il faut tenir compte des disparités veulent pouvoir déménager à l’envi : pour entre les générations et de l’impact futur du se rapprocher des enfants, pour emmé- morcellement des carrières et des réformes nager dans un logement plus petit suite au successives du système de retraites, on décès du conjoint, pour se rapprocher d’un peut dire que les revenus des seniors sont hôpital suite à l’apparition d’une maladie globalement plus élevés que ceux du reste chronique... de la population. Ils disposent en outre d’un 10
patrimoine important, notamment immo- mieux rémunérés car plus qualifiés.14 La bilier, qui leur permettrait de verser des majeure partie de ces revenus provient en loyers confortables. effet des pensions de retraite. Depuis le grand rattrapage des années 1970 à 1990, les niveaux de vie des plus de 65 ans et des Des revenus plus élevés… actifs évoluent parallèlement.15 La France est le pays où la retraite dure le plus longtemps. C’est ce que montrent les Quant aux revenus du patrimoine, on sait chiffres de l’Organisation de coopération et que les seniors épargnent beaucoup : 26% de développement économiques (OCDE). La pour les plus de 70 ans contre -10% en retraite dure 27 ans pour les femmes et 23 moyenne pour les plus jeunes. D’après le ans pour les hommes. Un record national Crédoc, l’augmentation du pouvoir d’achat qui s’explique par une espérance de vie plus des seniors est un phénomène inéluctable : longue et des politiques plus généreuses. « L’allongement prévisible de la durée des La génération qui est entrée sur le marché carrières, l’augmentation de la part des du travail en 2014 devra liquider ses droits doubles retraites chez les couples âgés et à 63 ans, contre plus de 65 ans en moyenne les revenus du patrimoine permettront de dans l’OCDE au cours de la décennie 2050. continuer à drainer des ressources vers les Rappelons qu’on travaille jusqu’à 65 ans seniors. »16 en Allemagne, 67 ans aux Etats-Unis et en Italie, et 68 ans au Royaume-Uni. …malgré des signaux d’alerte à prendre en compte Les seniors voient leurs revenus augmen- ter de manière structurelle. Une analyse Cette situation ne doit pas masquer les confirmée par le Centre de recherche pour fortes disparités qui existent entre les l’étude et l’observation des conditions de différentes générations de retraités. vie (Crédoc) : « L’allongement prévisible D’après l’Insee, le niveau de vie des seniors de la durée des carrières, l’augmentation les plus jeunes progresse plus rapidement de la part des doubles retraites chez les que celui des seniors les plus âgés, notam- couples âgés et les revenus du patrimoine ment parce que les femmes bénéficient permettront de continuer à drainer des de carrières salariales plus complètes ressources vers les seniors. »13 et partent à la retraite avec des niveaux de pensions plus élevés. La diversité des Le niveau de vie moyen des 65 ans ou plus situations matrimoniales a également un s’établit à 22 530 euros par an en 2009, soit impact. Les couples disposent en effet de 1 877 euros par mois. La démonstration est moyens supérieurs aux personnes seules. d’autant plus forte lorsqu’on s’intéresse à la situation des femmes, qui constituent Le Haut comité pour le logement des l’essentiel de la population dans beaucoup personnes défavorisées alerte de son de résidences seniors. En moyenne, une côté sur « la fin d’une période favorable »17. femme qui prend sa retraite perçoit 43% Certes, le taux de pauvreté des plus de 65 de plus qu’une femme qui a pris sa retraite ans a fortement reculé, passant de 35% en il y a vingt ans. La retraite d’une femme 1970 à 10% en 2006. Après cette période aujourd’hui s’établit ainsi aux environs de de rattrapage, il a peu varié au cours des 942 euros contre 658 euros auparavant, dernières années et reste même inférieur sans tenir compte de la pension de réversion. à celui de l’ensemble de la population qui Cet écart provient du fait qu’elles ont eu est de 13,5%. Mais l’organisme met en des carrières plus longues et des emplois exergue « plusieurs éléments qui donnent à Les seniors d’aujourd’hui et de demain 11
1. penser qu’à cette stabilisation va succéder une période d’adaptation » : « le contexte économique des trente dernières années », « l’impact des réformes successives des retraites » ; et « l’érosion du pouvoir d’achat du minimum vieillesse ». Parmi les populations les plus exposées : les femmes, les immigrés, les retraités qui ont connu une carrière précaire et les ruraux. C’est donc au cours des deux prochaines décennies que les résidences seniors connaîtront probablement leur développement le plus important. Le logement bien placé dans le patrimoine des seniors Le logement occupe une place prépondé- rante dans le budget des ménages âgés. Sa part ne cesse d’ailleurs d’augmenter avec l’âge, puisqu’elle est respectivement de 16,7% pour les 65 à 74 ans et de 20,9% pour les 75 ans et plus18. Déjà, en 1997, Pascal Pochet commentait : « La ventilation par poste de ce budget consommation montre que les dépenses des retraités se structurent autour de l’entretien du corps et du domicile […] Le logement représente toujours le premier poste en dépit de la faible part tenue par le loyer. »19 Rappelons que 75% des 65 ans ou plus sont aujourd’hui propriétaires de leur logement, contre 58% pour le reste de la population française. L’attachement des Français à la propriété peut sembler un obstacle au dévelop- pement des résidences locatives avec services, d’autant plus que les personnes âgées épargnent dans le but d’avoir une épargne de transmission par opposition à une épargne de précaution. Certains gestionnaires-exploitants adoptent donc des stratégies de contournement pour rendre liquide le patrimoine des seniors, à l’instar de Vie Jeune, l’enseigne du Groupe Financière Duval, qui se charge de mettre en location le bien de la personne âgée pour lui permettre de compléter sa retraite et d’être en mesure de verser un loyer. 12 Les seniors d’aujourd’hui et de demain
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2. Le besoin d’une nouvelle offre d’habitat pour seniors Derrière la crainte des personnes âgées de « partir en maison de retraite » se cache la peur de renoncer à leur liberté. Elles savent bien que si elles sont obligées de quitter leur « chez elle » pour un établissement, l’exercice de leur liberté sera plus limité, notamment au niveau des repas, des visites, des horaires d’ « extinction des feux »... L’habitat individuel constitue pour la personne âgée le lieu où elle est chez elle, c’est-à-dire où elle peut faire ce qu’elle veut, où elle peut inviter qui elle veut quand elle veut, sans avoir de compte à rendre. En définitive, l’habitat constitue le dernier espace de liberté de la personne âgée. Etude Autonomie et bien vieillir. Habitat, territoires et numérique de la Caisse des Dépôts et Consignations, 2014 14
F ace à la difficile adaptation des logements et les insuffisances de l’offre d’habitat pour per- sonnes âgées autonomes, notamment en ce qui concerne les anciens logements-foyers, les résidences seniors apportent une solution d’hébergement moderne, pertinente et qui, au surplus, n’est pas consommatrice de fonds publics. Ceci explique sans doute en grande partie de l’attrait dont elles font l’objet actuellement. La difficile adaptation de plus de 50 ans et plus pensent avoir les moyens financiers pour adapter leur loge- des logements ment.21 L’adaptation des logements n’est parfois Un deuxième frein est le faible consen- ni souhaitable, ni nécessaire, et ce pour de tement à payer des seniors. 49% des multiples raisons. La solution peut alors personnes interrogées dans un autre être de déménager dans un logement qui, sondage OpinionWay estiment que les lui, est déjà adapté. adaptations du logement – douche, esca- lier, toilettes, etc. – doivent être finan- De nombreux freins à dépasser cées au travers d’aides publiques22. Ce faible consentement à payer est partagé Une grande partie des besoins concernera y compris par les retraités aux revenus à l’avenir l’adaptation des logements privés. élevés. Il n’est pas anormal que la collecti- On estime qu’un tiers des plus de 65 ans et vité soit mise à contribution pour financer la moitié des plus de 85 ans font au moins l’adaptation des logements, y compris des une chute chaque année. Deux fois sur logements privés. D’une part, l’adaptation trois, ces chutes surviennent au domicile.20 du domicile peut constituer un facteur L’adaptation des logements est donc inévi- important d’économies : hospitalisations table. Cependant, quatre types de freins inutiles, transports sanitaires, aggravation font obstacle à cette nécessaire adapta- de la dépendance, soins à domicile… Impos- tion : le coût des aménagements et des sible de concevoir un dispositif national aides techniques, le faible consentement à d’adaptation des logements et son finance- payer des seniors, le facteur psychologique ment sans aborder conjointement la ques- et les impossibilités techniques. tion des économies générées par une telle action. D’autre part, les pouvoirs publics se Le coût des aménagements et des aides sont beaucoup concentrés jusqu’à présent techniques est souvent sous-estimé. sur le financement de la prise en charge L’Agence nationale de l’habitat (ANAH) de la perte d’autonomie et de la dépen- estime les besoins d’adaptation des loge- dance. Il peut sembler légitime, désormais, ments individuels à 2 millions chez les que, la structure démographique du pays personnes de 60 ans et plus, pour un coût évoluant, une partie des fonds mobilisés global de 24 milliards d’euros. Au niveau soit réorientée vers le financement de individuel, le coût des adaptations varie l’adaptation des logements. Un large éven- sensiblement, de 1 500 euros pour une tail d’outils de financement existent : Apa, adaptation légère à 30 000 euros à 40 fonds sociaux des caisses de retraite, crédit 000 euros pour une adaptation lourde, la d’impôts, aides directes des communes, de moyenne se situant aux alentours de 12 000 leurs CCAS ou des départements, etc. Il y a euros. Or, d’après un sondage OpinionWay donc sans doute matière à revoir l’articula- datant de 2012, seul un tiers des Français tion de ces différents dispositifs. Le besoin d’une nouvelle offre d’habitat pour seniors 15
2. C’est dans ce contexte qu’a été lancé le inadapté aux besoins des personnes ; vaste plan national d’adaptation de 80 000 envie de nature et de densité de services logements privés programmé avec la Caisse à proximité… Et quand ce n’est pas l’adap- nationale d’assurance vieillesse (Cnav) et tation qui pose problème, c’est la volonté l’Anah dans le cadre de la loi d’adaptation de déménager qui fait défaut. Déménager de la société au vieillissement. Il reste pour- implique de renoncer à une partie de ses tant un écueil majeur à contourner, celui de habitudes et à la routine qui caractérise l’avance sur travaux. Sans parler du finan- un environnement maîtrisé, de risquer de cement du coût total des travaux, nombreux perdre une partie de son réseau relationnel sont les foyers qui n’ont tout simplement et, éventuellement, de faire une croix sur le pas les moyens d’avancer les centaines statut de propriétaire auquel bon nombre voire les milliers d’euros nécessaires pour de Français restent attachés. L’ensemble lancer le chantier avant le versement de de ces éléments explique la faible mobilité l’aide. L’accès à l’emprunt peut s’avérer résidentielle des ménages âgés. On estime compliqué à la fois compte tenu de leur âge ainsi que les plus de 60 ans déménagent et de leur situation financière. Cette problé- trois fois moins que les générations plus matique prenant de l’ampleur, plusieurs jeunes. acteurs institutionnels se sont emparés de la question pour développer des disposi- Dernier point, et pas des moindres, la tifs d’aide ou de micro-crédit, à l’instar de question des impossibilités techniques. la Caisse des Dépôts ou de La Poste. L’Anah Au-delà de la question financière, il n’est accepte aujourd’hui de verser une avance pas toujours possible techniquement de représentant jusqu’à 70% du montant de réaliser les aménagements nécessaires l’aide. La Caisse des Dépôts, quant à elle, (ex. installer une douche à l’italienne dans s’est engagée dans la voie du viager censé une copropriété verticale). Dans ce cas de redonner du pouvoir d’achat aux ménages figure, le déménagement dans un domicile âgés les plus modestes. Le chantier est adapté devient une obligation. donc sur la bonne voie, mais ces efforts seront-ils suffisants ? Un enjeu d’information Il convient aussi de prendre en compte le et de communication facteur psychologique. L’adaptation du Face à cette difficile adaptation du domi- domicile implique de renoncer à une partie cile, on peut se demander si la meilleure de l’« avant » pour créer quelque-chose solution pour les personnes âgées ne de nouveau. Elle implique de reconnaître consisterait pas à déménager en maison qu’on est sujet à un handicap physique ou de retraite médicalisée. On relève toutefois à un autre des effets possibles du vieil- un fort attachement de celles-ci au loge- lissement. Un pas que tous les seniors ne ment individuel. D’après le baromètre 55+ sont pas toujours prêts à franchir. De fortes publié par Cogedim Club, un senior sur six résistances se font parfois jour. Sans parler prévoit de déménager dans dix prochaines des contradictions qui peuvent naître entre années dans un autre logement que celui des aspirations multiples : recherche d’un dans lequel il habite actuellement (16%)23. habitat accueillant et sécurisé ; souhait Les personnes âgées confrontées à des de vivre ensemble et de préserver pour soi besoins d’adaptation de leur domicile sont un espace personnel au sein du ménage ; à la recherche d’un logement individuel volonté de réduire la facture énergétique dans un cadre sécurisé. Il existe donc bel et et augmentation de la consommation élec- bien un espace pour que se développent de trique liée aux nouveaux usages du numé- nouvelles formes d’habitat regroupé avec rique ; attachement à un habitat parfois services destinés aux seniors. 16
L’offre en présence bailleurs sociaux ne jouent pas toujours le jeu et les revenus modestes des locataires insatisfaisante des logements-foyers empêchent souvent de financer d’importants travaux. Ce D’un côté, les logements-foyers pèchent constat n’est pas nouveau puisque le par la vétusté de leur parc et par le carac- rapport Grunspan, en 2002 déjà, mettait tère limité de leurs prestations. De l’autre, en garde contre le renchérissement des les différentes formes d’habitat alternatif redevances au regard des travaux de réno- (béguinages, foyers soleil, etc.) n’ont pas vation ou d’adaptation à mener : « […] la encore trouvé leur modèle économique modernisation immobilière des logements- et sont, pour la plupart, de taille modeste foyers pour personnes âgées devenus ou (entre 30 et 40 logements). non EHPAD, leur adaptation à la montée des phénomènes de dépendance et de perte L’épuisement de l’offre d’autonomie des personnes représentent de logements-foyers un enjeu à la fois social et symbolique. Le risque encouru est en effet de voir les plus Pour reconstituer la genèse des loge- âgés de nos aînés ne plus pouvoir accéder ments-foyers, il faut remonter au rapport aux logements-foyers ou être contraints de Laroque paru en 1962. Ce dernier pointe les quitter pour des solutions de fortune, la situation alarmante concernant des voire les foyers les plus dégradés, sous l’effet personnes âgées concernées par l’iso- des hausses de redevance. »27 lement et le mal-logement. Le rapport Laroque dépeint le retraité comme une Face à cette situation, la loi d’adaptation personne active et invite les pouvoirs de la société au vieillissement prévoit publics à développer une forme d’héberge- un plan d’investissement à hauteur de ment favorisant l’autonomie des personnes 40 millions. A fin 2015, la moitié du plan âgées. Dès les années 1960-1970, les avait déjà été consommée, le programme municipalités lancent donc une vague de d’investissement lancé par la Caisse création de logements-foyers. Aujourd’hui, nationale d’assurance vieillesse (Cnav) les deux tiers des logements-foyers sont et la Caisse nationale de solidarité pour aujourd’hui gérés par des centres commu- l’autonomie (CNSA) en 2014 à hauteur de naux d’action sociale (CCAS). Le tiers 10 millions d’euros ayant été reconduit en restant est géré par des associations. 2015. Pas sûr, cependant, que cela suffise à On recense environ 80% de propriétaires moderniser des logements-foyers de plus HLM24 avec une répartition à peu près égale en plus vétustes. En 2014, la même somme entre les sociétés anonymes d’HLM d’un avait permis de financer… 27 dossiers sur côté et les offices publics d’HLM ou les 264 dossiers de demande reçus d’après OPAC25 de l’autre. l’Unccas. Parallèlement, la loi d’adaptation de la société au vieillissement cherche D’après l’Unccas26, 79% des CCAS doivent à revaloriser l’image des logements- procéder à des travaux de confort ou de foyers. Depuis de nombreuses années, modernisation de leurs structures. Le les logements-foyers cherchent en effet à parc de logements-foyers est vieillissant faire disparaître le terme de « foyer » pour et le rythme de construction ne suffit pas mieux faire ressortir celui de « logement ». à inverser la tendance. Un phénomène Une façon de montrer qu’il s’agit d’un d’autant plus inquiétant que l’augmen- domicile comme les autres. Une première tation de l’âge moyen d’entrée dans les pierre avait été posée avec la transition de logements-foyers dépasse 80 ans et crée l’expression « foyer-logement » vers celle des besoins de travaux au plan de la sécu- de « logement-foyer ». La dernière main a rité-incendie et de l’accessibilité. Or, les été mise par la loi du 28 décembre 2015 Le besoin d’une nouvelle offre d’habitat pour seniors 17
2. qui introduit la nouvelle terminologie de contenu de ces prestations. Il a finalement « résidences autonomie ». été rejeté pour laisser le champ libre aux structures. C’est également au rapport Cette tentative de modernisation s’exprime Cuvillier qu’on doit la notion la notion de aussi sur le terrain des prestations prestations minimales délivrées par les servies aux locataires. Celles-ci varient logements foyers (accès à un service de sensiblement d’un logement-foyer à l’autre restauration, de sécurité, d’entretien du et peuvent se révéler assez limitées. Les linge, d’animation-prévention, etc.). Cette résidences seniors comptent généralement proposition a elle-aussi été retenue dans entre 80 et 100 logements et disposent de la la loi. Un décret d’application devrait taille critique nécessaire pour embaucher prochainement venir préciser la liste de ces du personnel d’animation et proposer prestations. l’accès à des équipements sportifs et culturels. Les résidences seniors sont-elles l’avenir des ex-logements-foyers ? Ce n’est pas le cas de tous les logements- foyers, dont la capacité moyenne tourne Cette volonté de modernisation s’ap- autour de 55 places. Un groupe de travail a parente plutôt à un ripolinage et tout le été mis en place en 2013 pour plancher sur monde semble s’accorder, aujourd’hui, sur l’avenir des établissements d’hébergement l’idée d’une complémentarité de l’offre de pour personnes âgées (Ehpa) et les autres résidences seniors et de logements foyers, formes d’habitat avec services. Le rapport plutôt que d’une véritable concurrence. Cuvillier28, du nom de la sous-directrice de C’est en tout cas le constat dressé par les l’autonomie des personnes handicapées intervenants lors des cinquièmes Assises et des personnes âgées Nathalie Cuvillier, nationales des logements-foyers et rési- a effectué la synthèse de ces réflexions dences seniors en mai 2015 à Paris. « Il et a mis sur la table un certain nombre de n’y a pas d’opposition à avoir. Aujourd’hui, propositions, notamment la valorisation [ces deux formes d’hébergement] sont de la mission de prévention de la perte complémentaires, peut-être avec des d’autonomie dévolue aux logements- niveaux de gamme différents, mais dans foyers, l’organisation et la coordination un champ comme dans l’autre. », commen- des interventions extérieures au sein de tait ainsi la déléguée générale du Synerpa l’établissement et l’inscription du logement- Florence Arnaiz-Maumé, qui a créé en foyer dans la coordination gérontologique 2015 un syndicat affilié Synerpa Rési- locale. L’article 11 de la loi d’adaptation dences services seniors. Résultat, une de la société au vieillissement confie porosité commence à s’installer entre loge- ainsi aux logements-foyers une mission ments-foyers et résidences seniors qui, s’ils nouvelle de prévention de la perte proposent des niveaux de gamme diffé- d’autonomie en contrepartie du versement rents, font tous les deux face à l’élévation d’un forfait autonomie. Ce forfait pourra de l’âge moyen d’entrée et de l’âge moyen être mutualisé entre plusieurs structures des résidents. Les Jardins d’Arcadie ont et financer des postes d’animateur ou ouvert à Versailles (78) une résidence mixte, encore des ateliers équilibre. Le premier comprenant une partie de logement-foyer groupe associatif Arpavie, issu de la fusion et une partie de résidence seniors. Le des trois associations Arefo-Arpad et public est globalement le même, à une Arepa, prévoit déjà de créer des « équipes différence près : la redevance dans la partie mobiles de prévention » pour optimiser les logement foyer est de l’ordre de 850 euros moyens alloués. Un amendement avait été contre 1 700 euros pour la partie libre. Le déposé en deuxième lecture à l’Assemblée CCAS de Caen, lui, a fait le chemin inverse tendant à définir précisément par décret le en rebaptisant tous ses logements-foyers 18
en résidences seniors. Une initiative qui sements et services sociaux et médico-so- n’est pas faite pour favoriser la lisibilité de ciaux, comme les logements-foyers, des l’offre mais qui illustre bien le mouvement résidences locatives avec services à carac- de modernisation qui est en marche. Nul tère social et des formes particulières d’ha- doute qu’à l’avenir, il sera de plus en plus bitat regroupé avec services, à l’instar des difficile de distinguer une résidence-auto- résidences seniors. nomie d’une résidence seniors. Les résidences seniors se distinguent Cette situation est parfois source d’inquié- notamment : tude chez les professionnels, ceux-ci crai- gnant une requalification de la résidence Des béguinages 29 , des foyers-soleil ou en établissement médico-social non auto- de l’habitat intergénérationnel, qui sont risé. Selon une instruction NDGAS/SD 2/ des résidences sociales aux projet et SD 5D n°2007-195 du 14 mai 2007 relative mode de fonctionnement particuliers ; aux résidences services, la différence entre une résidence fournissant des services et un établissement médico-social réside Des villages-seniors. Les résidences seniors sont composées de logements principalement dans l’existence ou non plus petits que les villages, avec une d’un projet individuel et collectif adapté majorité de deux-pièces. Alors que la aux besoins des personnes. L’établisse- taille des résidences seniors varie en ment médico-social doit ainsi répondre moyenne entre 80 et 100 logements, et s’adapter aux besoins de la personne celle des villages-seniors est plutôt de qui demande à bénéficier de telle ou l’ordre de 50 logements. De plus, les telle prise en charge, et celui-ci devient villages s’adressent à de jeunes seniors responsable de sa mise en œuvre. Tel n’est totalement autonomes qui cherchent pas l’esprit des résidences services. à se regrouper et sont très majoritai- rement propriétaires de leur logement, La jurisprudence du Conseil d’Etat notam- tandis que les résidences seniors ment (CE 29 décembre 1995, société « nouvelle génération » accueillent en civile « Résidences et Services » contre le très grande majorité des résidents-lo- président du conseil général du Nord, n° cataires ; 145008) et (CE 16 octobre 1998, SARL « Société rhodanienne d’intendance et de services » contre le président du conseil Des autres types de résidences avec services, comme les rési- général du Rhône, n° 171017) a permis de dences hôtelières ou les résidences dégager des critères de qualification et les étudiantes, ce qui n’empêche pas conditions dans lesquelles certaines rési- certains professionnels de l’immobi- dences avec services sont susceptibles lier géré de se lancer sur le marché des d’être requalifiées en établissements d’hé- seniors. Ainsi le groupe Réside Etudes, bergement pour personnes âgées relevant propriétaire des marques Les Estudines du régime d’autorisation prévu dans le et Residhome, a-t-il racheté le concept Code de l’action sociale et des familles. La Girandière en 2007. Les faiblesses des autres De plus en plus d’opérateurs se lancent modèles d’habitat alternatif dans la voie de l’habitat alternatif. L’as- sociation Ages sans frontières, qui gère Lorsqu’on parle d’habitat « alternatif » ou quatre Ehpad dans le Tarn, a initié en 2009, « intermédiaire », difficile d’y voir clair. Cette son projet de Maison partagée. Au cœur formule désigne tout à la fois des établis- Le besoin d’une nouvelle offre d’habitat pour seniors 19
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