TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia

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TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
in ém a garanti sans 3D
                                                               C

5 place Camille Jullian 33000 Bordeaux • www.cinemas-utopia.org • 05 56 52 00 03 • bordeaux@cinemas-utopia.org

  TEMPÊTE
  DE SABLE

  Écrit et réalisé par Elite ZEXER      Première scène simple et réjouissante :      au cœur des hommes. Ou plutôt dans
  Israël 2016 1h28 VOSTF                un père, Suliman, confie le volant à sa      la tête des femmes, omniprésentes,
  (en langue arabe)                     fille Layla. On est sur une petite route     comme autant de minuscules grains de
  avec Lamis Ammar, Ruba Blal,          poussiéreuse, perdue et interminable         sable perdus et ballotés dans des mé-
  Hitham Omari, Khadija Aladel…         qui trace tout droit vers leur village dé-   canismes sociaux qui les dépassent. Ce
                                        pareillé. Le désert du Néguev, on l'aper-    n'est pas parce que l'histoire prend sa
  Grand prix du jury, Festival          cevra peu, aux antipodes de celui des        source au fin fond d'Israël, à la frontière
  de Sundance 2016 (pour son            cartes postales. La seule tempête qui        de la Jordanie, qu'elle ne fera pas réson-
  premier film, la jeune réalisatrice   va secouer cette petite communau-            ner en nous quelque chose d'étrange-
  a placé haut la barre…)               té bédouine sera celle qui se déroulera      ment familier.

 No 177 du 18 janvier au 21 février 2017 / Entrée: 6,50€ / La 1re séance: 4€ / Abonnement: 48€ les 10 places
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
MÉLI MÉLO UTOPIA             25/11/16     16:47   P

TEMPÊTE DE SABLE

                                                                                              Cie Arkétal • L’homme qui plantait des arbres
                                                                                              Théâtre et marionnettes dès 7 ans
                                                                                              Mardi 31 janvier à 20h
                                                                                              Le Clan des Songes • Bout à bout
                                                                                              Théâtre d’objets dès 3 ans
                                                                                              Mercredi 1er février à 15h
                                                                                              Pierre Tual • Fastoche
                                                                                              Marionnettes dès 12 ans
                                                                                              Mercredi 1er février à 20h30

Entre le père et sa fille, à laquelle il ap-   femme, personnage qui n'a pas fini de          Cie Point d’Ariès • Les Bottes Jaunes
prend à conduire, transparaissent une          nous étonner, peut-être le plus sub-           Comptine marionnettique dès 4 ans
complicité, une affection et une admira-       til, le plus profond. De prime abord elle      Du 1er au 5 février
tion indéfectibles. On devine que sous         apparaît plus rêche, moins progressiste        Night Shop Théâtre • Silence
les traits de cette étudiante sérieuse se      que le père. Toujours en train de rappe-
profile la promesse d'un avenir lumineux       ler à l'ordre, de surveiller la mise de ses    Marionnettes portées dès 10 ans
où les femmes auraient voix au chapitre,       filles… qui comprendront plus tard la jus-     Jeudi 2 février à 20h
le choix de leur devenir, de leur carrière.    tesse et la portée de ses propos d'une         Opéra Pagaï • Natanaël
Layla semble animée par une rage vitale,       lucidité douloureuse. Quand leurs vies et      Théâtre d’objets dès 6 ans
rentrée, maîtrisée, une volonté inaliénable    les rapports avec leur paternel vont bas-
                                                                                              Du 2 au 7 février
qui lui permettront d'aller plus loin que      culer le jour où ce dernier ramène une
ses ancêtres ne le pouvaient. On y croit !     seconde femme au village. Le jour des          Elvis Alatac • Il y a quelque chose de pourri,
On a envie d'y croire ! Bien sûr, lorsqu'on    noces, c'est Jalila qui réceptionne digne-     variation hamletique
arrive près des demeures rapiécées, par-       ment la jeune mariée au visage lourde-         Théâtre de bouts de ficelle dès 10 ans
fois miteuses, le père reprend le volant.      ment poudré de blanc, engoncée dans            Vendredi 3 février à 20h30
Le doute fait une première brève incur-        une robe naïvement immaculée. L'intruse
sion… Là les regards épient, les langues       aura le statut de seconde épouse               Gare Centrale • Ressacs
critiquent, les traditions reprennent le       tant que Jalila assurera celui de pre-         Théâtre d’objets dès 13 ans
dessus. Il y a des choses qui ne se font       mière. Amères sont les félicitations que       Samedi 4 février à 20h30
pas, que l'on n'évoque pas, même si la         les vaincus adressent aux vainqueurs.
modernité semble en marche.                                                                   Théâtre Mu • Boîte à outils Poum Poum
                                               Suliman met la dose pour accueillir sa         Théâtre d’objets dès 18 mois
La seconde fille de la famille c'est           nouvelle et beaucoup plus jeune com-           Samedi 4 et dimanche 5 février à 16h30
Tasnim, la cadette d'une douzaine d'an-        pagne. La différence de traitement entre
nées. Envers elle, le même lâcher prise        les deux maisonnées devient chaque jour        Teatro Gioco Vita • Le ciel des ours
semble régner. Privilège de l'âge ? De         plus criante. Mais si la cage de l'une est     Théâtre d’ombres dès 3 ans
sa petite taille qui fait qu'on l'oublie ?     plus dorée que celle de l'autre, elle n'en     Mercredi 8 février à 15h
De ses allures de garçon manqué ? Elle         reste pas moins liberticide. Rien n'est
semble pouvoir traîner ses guêtres et          aussi simple et aucune de ces femmes,          Le Liquidambar • La maison aux arbres étourdis
ses oreilles un peu partout en se faisant      aux caractères ciselés par le vent et l'ari-   Conte marionnettique dès 7 ans
oublier des adultes. C'est donc par elle       dité de terres ingrates depuis des généra-     Mercredi 8 février à 18h30
que les informations arrivent parfois, de      tions, ne l'ignore. Les victimes désignées
manière déconcertante. Trop spontanée          sont parfois plus résistantes que leurs
et sans malice, la langue bien pendue,         bourreaux et les bourreaux plus lâches         Ateliers, expositions, animations…
elle ne sait pas encore qu'il vaut parfois     et soumis qu'il n'y paraît. Tous et toutes     Envoi du programme
mieux se taire. Témoin malicieux et inno-      complices d'un système archaïque, aux          sur simple demande.
cent qui fera naître bien des remous dans      multiples facettes et aux rouages vicieux,     Infos : Centre Simone Signoret
la maisonnée.                                  contre lequel aucun pion du jeu ne peut        Canéjan 05 56 89 38 93
Et puis il y a la mère, Jalila, maîtresse      gagner la partie seul.                         www.signoret-canejan.fr
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LA COMMUNAUTÉ
Thomas VINTERBERG                            pénétrer dans le cercle restreint des jour-    vite fait. Comme toujours il opte pour
Danemark 2016 1h51 VOSTF                     nalistes de premier plan jusqu'à occuper       la tranquillité d'une vie sans encombre.
avec Trine Dyrholm, Ulrich Thomsen,          la place très convoitée de présentatrice       Tout semble aller si bien… Peut-être
Helene Reingaard Neumann, Martha             du journal télévisé de la chaîne natio-        trop bien ? Car Anna lui glisse à l'oreille
Sofie Walsltrom Hansen, Lars Ranthe,         nale danoise. Côté vie privée ? Un ma-         qu'un peu de piment dans leur routine
Anne Gry Henningsen, Fares Fares,            riage endogame avec un architecte qui          trop bien huilée ne serait pas pour lui
Magnus Millang, Julie Agnete Vang…           consacre tranquillement sa dernière dé-        déplaire. Pourquoi ne saisiraient-ils pas
Scénario de Thomas Vinterberg                cennie de carrière à l'enseignement. Un        au vol la folie douce de certaines idées
et Tobias Lindholm (un des auteurs           professeur dont le charme un brin arro-        de ces roaring seventies ? Pourquoi ne
du fameux Borgen)                            gant nous donnerait envie de retourner         s'enhardiraient-ils pas à monter une pe-
                                             vite fait sur les bancs universitaires, mais   tite communauté ? Une sorte de colo-
La Communauté démarre sur un ton bon         qui bien sûr n'a d'yeux que pour Anna          cation entre gens qui se choisiraient
enfant, enjoué, faussement naïf, mais in-    que l'on se prend à envier : Éric (Ulrich      mutuellement, unanimement. Eric est
sensiblement un glissement s'opère, et       Thomsen, déjà présent dans Festen)             évidemment réticent mais il ne sait pas
le film prend la dimension d'un tableau à    n'est pas loin d'être un mari modèle.          résister à celle qu'il aime. Freja, qui est
la fois tragique et jubilatoire des mœurs                                                   à l'âge des expériences, suit le mou-
des Seventies, de leurs idéaux, de leurs     Les chats ne faisant pas des chiens,           vement, réjouie par ce vent de liberté,
rêves aussi généreux qu'illusoires. Nous     à quatorze ans leur fille unique Freja         cette joyeuse pagaille qui lui ouvre de
sommes bien dans la lignée du déca-          est une adolescente tout à fait pondé-         nouvelles perspectives.
pant Festen (le film le plus connu de        rée, respectueuse, plutôt du style à ré-       Vont s'en suivre des entretiens impro-
Thomas Vinterberg).                          fléchir avant d'agir, à discuter avant de      bables et cocasses pour sélectionner les
L'enfer est pavé de bonnes intentions        se rebeller. Bref notre couple de qua-         futurs élus qu'une Anna devenue pétil-
me susurrait mon aïeule… Si Anna s'en        dragénaires semble condamné à cou-             lante, pleine d'une énergie contagieuse,
était souvenue à temps, elle n'aurait        ler des jours idylliques jusqu'à plus soif.    entraîne dans la valse. La communau-
sans doute pas entraîné sa gentille fa-      Reconnaissons qu'il y a pire punition.         té s'étoffe donc au gré des rencontres,
mille dans ce qui va devenir une spirale     C'est un héritage qui va tout chambou-         des désirs et des besoins des unes et
infernale. Mais, pas plus qu'on ne peut      ler. Eric se retrouve soudain à la tête        des autres, sans véritable projet struc-
refaire l'histoire, on ne peut changer la    d'une imposante propriété familiale :          turant. Sans le savoir Anna vient d'in-
nature des gens. Anna (Trine Dyrholm,        450 m2 habitables entourés d'un sym-           troduire le grain de sable dans la belle
magnifique – mais tous les acteurs son       pathique parc arboré. L'émotion qu'il          mécanique d'une vie familiale jusqu'ici
formidables) aborde la vie avec l'opti-      ressent à visiter la maison bourgeoise         harmonieuse, même si elle manquait de
misme et le charme sereins de celles         de son enfance ne l'empêche nullement          surprise. Car l'extrême tolérance que
auxquelles tout a souri dès leurs pre-       d'avoir l'intention de la vendre sans tar-     prêche son épouse va autoriser Eric à se
miers pas. Naturellement belle mais          der : trop grande, trop chère à entrete-       permettre ce dont il n'aurait jamais eu
également cultivée et brillante, elle a su   nir. Entre le cœur et la raison le choix est   l'idée auparavant…
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
DU BLUFF TECHNOLOGIQUE À L’ESBROUFE ARTISTIQUE
   Contre les projets d’art contemporain de la commande Garonne, et en
particulier la mise au puits de l’œuvre de Jacques Ellul par Suzanne Treister
Décidément, les aménageurs n’en          ami Bernard Charbonneau de pour-           ment la société, et alors comment se
peuvent plus d’attentions envers les     fendre le bluff technologique, démon-      fait-il qu’elle décore les révolution-
aménagés. Après la commande ar-          trant sans relâche combien ces tech-       naires, les couvre d’or et de lauriers,
tistique Tramway (3 millions d’euros     nologies posent plus de problèmes          ou bien l’attaque se ferait-elle dans le
pour les deux premières tranches)        qu’elles n’en résolvent, et comment,       vide, ne serait-elle qu’une apparence,
qui nous a déjà valu une douzaine        à chaque nouveau problème causé            un faux-semblant ? Et la société paie-
d’« œuvres » aussi ridicules que pré-    par la Technique s’ensuit une autre        ra d’autant plus pour que l’on évite
tentieuses, Bordeaux Métropole nous      réponse technique, accélérant ain-         ce qui la mettrait vraiment en danger.
annonce sa nouvelle commande             si la fuite en avant vers l’abîme. Ce      Mais cela ne trouble pas nos artistes :
Garonne (12 artistes, 8 millions d’eu-   ne sont donc ni des extraterrestres        ils ont tout, la bonne conscience révo-
ros) censée agrémenter nos rives dès     ni la mégatechnologie qui pourraient       lutionnaire et la réussite sociale. »
l’an prochain.                           permettre de « sauver Bordeaux des         « Cet art formaliste et théoricien joue
                                         eaux » mais l’arrêt du bétonnage et de     un double rôle, contradictoire : il fait
Le gros lot, c’est une « artiste » an- l’urbanisation cancéreuse, le respect        profession d’être une révolte contre
glaise, Suzanne Treister, qui l’emporte des zones humides, la désindustria-         notre culture hypermécanisée, hy-
avec son triptyque à 1,5 million d’eu- lisation, un changement radical dans         perenrégimentée, mais il justifie en
ros.                                     la production et la consommation,          même temps les produits du système
Elle envisage d’installer dans le grand d’autres manières de vivre…                 de puissance. Il acclimate l’homme à
équatorial de l’observatoire de Floirac À celle qui prétend « admirer les           vivre dans ces villes, dans ce milieu,
une bibliothèque d’ouvrages de idées » du Pessacais, qu’elle semble                 il le convainc que ce monde d’absur-
science-fiction, ainsi qu’aux bassins à avoir bien peu lu, nous offrons avec        dités, de violence, d’anonymat est le
flot une « rutilante » soucoupe volante plaisir quelques citations tirées de        seul monde possible. Il lui fait consi-
« Vril », de 15 mètres de diamètre, L’Empire du non-sens, écrit en 1980,            dérer comme normal, qui plus est,
prétendument construite à partir des qui auraient pu lui être adressées per-        sommet du plus haut de l’art, la dé-
tôles rouillées d’une épave coulée en sonnellement.                                 sintégration de l’homme, la vie dans
1944 par les nazis.                      « Mais lorsque l’on passe à l’explicita-   les grands blocs (ceux que justement
Le troisième projet se veut un hom- tion de l’auteur, on arrive à un niveau         prépare la mégatechnologie). Il lui fait
mage à Jacques Ellul, le contempteur consternant. Nous avons un “mes-               considérer comme absurde toute pro-
du système technicien. Hommage un sage” d’une faiblesse, d’une absence              testation contre cet environnement. Il
peu particulier puisqu’il s’agit de pla- d’intérêt radicales… Nous avons deux       lui fait accepter comme l’être même
cer ses ouvrages au cœur d’un mau- grandes orientations. D’un côté une              ce qui est sa négation. »
solée verdâtre (la touche artistique accumulation hermétique de termes
sans doute) – réplique du Belvédère tirés des sciences humaines (imita-             And so on… « Acclimater l’homme
du Petit Trianon de Versailles – dé- tion Lacan ou Derrida). De l’autre un          à sa désintégration » : ce n’est pas
nommé « Le Puits ». S’agirait-il de prêchi-prêcha de gauche simplement              un hasard si ces « œuvres » doivent
noyer les livres, comme d’autres les dérisoire, d’une banalité conster-             être implantées dans les nouvelles
brûlaient ? Non, bien sûr, de les sau- nante… Nous sommes affligés par              zones d’aménagement « concerté »
ver grâce à la Technique. Écoutons un bavardage intarissable, pompeux               édifiées à la gloire de la Technique :
l’artiste : « J’envisage d’installer au et plein d’autosatisfaction de tous ces     Euratlantique et les Bassins à flot.
centre de ce pavillon un puits des- artistes se pavanant de la profondeur           Entre la grosse godasse de la Cité du
cendant dans les eaux de la Garonne, de leurs œuvres. »                             vin à Bacalan et la cuvette à chiotte
ces eaux qui, sans l’aide de la tech- « [L’art contemporain] est dans ses           de la salle de spectacles de Floirac,
nologie, pourraient remonter et jail- moyens incomparablement plus coû-             elles en seront les nouveaux totems,
lir comme une fontaine dans le pa- teux que ne le furent les cathédrales.           des marqueurs sociaux pour classes
villon et détruire les livres de la Or, cet art qui exprime directement le          en mutation, des fonds de selfies pour
bibliothèque, créant et représentant système technicien (dans un de ses             touristes. Si les Bordelais laissent
une tension physique des idées… » traits majeurs : la transgression) se             faire.
Ceux qui ont connu Jacques Ellul en- veut, et c’est la première contradiction
                                                                                    Des habitants de la zac Euratlantique
tendent l’éclat de rire et imaginent la que nous allons rencontrer, contesta-       Le texte complet est disponible sur le site
repartie qui auraient suivi la lecture taire, protestataire, révolutionnaire. »     des Amis de Bartleby à cette adresse :
de cette phrase. Des années 30 à sa « Ce qui quand même devrait donner              lesamisdebartleby.wordpress.com/2015/11/12/
mort en 1994, il n’a cessé avec son à méditer : ou bien on attaque vrai-            du-bluff-technologique-a-lesbroufe-artistique/
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PRIMAIRE
                                                                     Hélène ANGEL France 2016 1h45
                                                                     avec Sara Forestier, Vincent Elbaz,
                                                                     Olivia Côte, Guilaine Londez, Patrick D'Assumçao…
                                                                     Scénario de Yann Coridian et Hélène Angel, avec
                                                                     le concours d'Olivier Gorce et Agnès de Sacy

                                                                     Elle a une pêche d'enfer Florence, et le charisme décapant et
                                                                     sauvage de Sara Forestier ! Une vitalité, une présence, une
                                                                     imagination débordantes, à faire craquer des hordes de ga-
                                                                     mins indisciplinés. Florence est institutrice, enfin, maîtresse,
                                                                     heu… pardon, je veux dire Professeur des écoles puisque
                                                                     l’institution adore les nouvelles appellations, les nouveaux
                                                                     sigles, les nouveaux programmes… Pour Florence, qu’im-
                                                                     porte le titre, puisqu’elle a plus que la motivation : la pas-
                                                                     sion. Enseigner est pour elle un engagement, un émerveille-
                                                                     ment, un défi permanent qu’elle n’a de cesse de réinventer,
                                                                     de nourrir, puisant son énergie et ses idées dans la relation
                                                                     avec ces bambins qu’elle accompagne et pour lesquels elle
                                                                     est prête à tout donner : son temps, son talent, son empa-

JAMAIS
                                                                     thie… jusqu'à faire passer parfois au second plan sa relation
                                                                     avec son propre fiston…
                                                                     Florence va s'intéresser tout particulièrement à Sacha (qui
                                                                     n’est pas dans sa classe, ce qui complique les choses) : un
                                                                     enfant agité, secret, un gamin pas franchement teigneux mais
                                                                     à fleur de peau dont l’équipe enseignante réalise vite qu’il est

CONTENTE
                                                                     livré à lui-même, délaissé par une mère débordée qui com-
                                                                     pense en lui glissant quelques billets pour que le môme se
                                                                     débrouille seul. Incapable de ne pas agir, Florence se met en
                                                                     tête de l’aider… quitte à perturber les habitudes de l’équipe
                                                                     pédagogique, quitte à outrepasser son rôle, quitte à se mettre
                                                                     elle-même en danger. Cerise sur le gâteau, c’est pile poil le
                                                                     moment où le mammouth, euh pardon, l’Education Nationale,
Emilie DELEUZE France 2016 1h29                                      choisit pour l’inspecter dans sa classe de CM2, heu pardon,
avec Léna Magnien, Patricka Mazuy,                                   de deuxième année du cycle 3.
Philippe Duquesne, Catherine Hiegel, Alex Lutz…
Scénario de Marie Desplechin, Emilie Deleuze                         Primaire est un film généreux, bouillonnant comme une cour
et Laurent Guyot, d'après le roman Le Journal                        d’école, lumineux comme le regard d’un enfant quand il com-
d'Aurore de Marie Desplechin                                         prend que des lettres alignées font des mots et que ces mots
                                                                     ont un sens. Ni tract ni complainte, c’est simplement un for-
Celle qui n'est jamais contente, c'est Aurore, une petite nana       midable hommage à un métier formidable qui a tant à offrir et
pas forcément super brillante (elle redouble sa cinquième), pas      qui est paradoxalement toujours malmené par les gouverne-
particulièrement canon et populaire sans du tout être moche          ments successifs.
et souffre-douleur, une jeune fille de treize ans qui a justement
l'impression qu'elle est invisible, qu'elle est négligée par ses
parents (alors que sa petite sœur, bonne élève, est selon elle
la chouchoute), méprisée par ses professeurs… Et c'est par-
ti pour une nouvelle rentrée dont elle sait déjà « qu'elle sera
pourrie ». Une vraie petite teigne à la langue bien pendue, qui
sait dire à son tout nouveau prof de français – qu'il faut bien
un peu bizuter – que la Princesse de Clèves, ça ne tient pas
debout. Qui n'a pas forcément l'intention de sortir de nouveau
cette année avec le gentil grand dadais de l'année passée qui
pourtant la relance (« déjà c'était fatigant de t'aimer tous les
jours » lui dit-elle cruellement). Elle peut d'autant plus se per-
mettre de faire la fine bouche qu'elle va être abordée par des
lycéens d'au moins quinze ans qui lui proposent de devenir la
chanteuse de leur groupe de rock naissant…

Jamais contente est le savoureux portrait d'une jeune fille des
classes moyennes, loin des clichés et des explications toutes
faites. Une jeune fille qui vit à une porte de Paris avec des pa-
rents qui sont tout sauf horribles, compréhensifs et ouverts
tout au contraire, même s'il leur arrive forcément d'être exas-
pérés par la tornade de contradictions qu'ils ont engendrée.
Le charme contagieux de ce film épatant tient autant à sa jus-
tesse de ton, à sa galerie de personnages tous parfaitement
croqués (excellent Alex Lutz dans le rôle du prof de français
réveilleur de cancres) qu'à la gouaille incroyable de sa jeune
actrice Léna Magnien, une vraie révélation. En secouant bien
ce cocktail, Emilie Deleuze réussit un des films les plus jubila-
toires jamais réalisés sur l'adolescence.
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
EN HIVER
    À LA MANUFACTURE

 15 & 16 FÉVRIER

ET TOUJOURS LES EXPOSITIONS DANS LA VERRIÈRE
  ET LA BONNE CUISINE D’ESTELLE EN GOGUETTE
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
LE DIVAN DE STALINE

Écrit et réalisé par Fanny ARDANT           large, mais Lidia lui tient tête. Dans le      fiant dans cette relation à trois dont on
                                            bureau où il dort trône un divan en tout       ne sait jamais vraiment comment elle
France/Portugal 2016 1h32                   point identique à celui du bureau de           va évoluer et Depardieu est formidable,
avec Gérard Depardieu,                      Freud à Londres. Alors germe dans son          tantôt le regard froid, intense et cynique,
Emmanuelle Seigner, Paul Hamy,              esprit tordu l'idée d'un jeu, Staline ins-     tantôt touchant et humain, un bourreau
François Chattot, Luna Picoli-Truffaut…     talle sa maitresse en retrait :                dans l'âme capable de s'émouvoir à la
D'après le roman de                         - « Toi sur le fauteuil et moi sur le divan.   vue d'une fleur… sorte de monstre gran-
Jean-Daniel Baltassat                       Moi je me souviens de mes rêves et toi         diose à qui Emmanuelle Seigner donne
                                            tu fais le charlatan. »                        une troublante réplique.
Soit un énorme palais décadent orné         - Pourquoi tu veux jouer à ça ?
d'inquiétantes gargouilles, perdu au fond   - Ça te fait peur d'entendre mes               Dans le roman, l'histoire se passe trois
de bois profonds en Géorgie, le genre       rêves ?… »                                     ans avant la mort de Staline dans un pa-
d'antre fait sur mesure pour un ogre so-                                                   lais du grand duc Mikhaïlovitch. Fanny
litaire et pas gentil du tout comme on      Dans le château de Barbe bleue se joue         Ardant n'a pas voulu dater son film pas
en croise dans les contes qui font peur     alors une curieuse et fascinante relation      plus qu'elle n'a cherché à se rappro-
aux enfants et frissonner même ceux qui     où on mesure les effets du pouvoir abso-       cher du personnage réel de Staline…
les racontent. Staline s'est isolé pour     lu sur celui qui l'exerce comme sur ceux       et le château est au Portugal ! Il s'agis-
quelques jours avec son étrange et belle    qui le subissent ou sur celle qui l'af-        sait plutôt de faire une forme de fable :
maitresse Lidia Semionova. Elle lui lit     fronte… Staline raconte ses rêves, ses         vous ne trouverez pas ici le Staline des
Pouchkine, il écoute la Callas chantant     obsessions tandis que Lidia réplique. Un       livres d'histoire et des documentaires
l'aria de Lady Macbeth qui « convoque       jeune peintre, Danilov, invité par Lidia,      et, comme dans un conte, les grilles du
les pouvoirs du mal pour l'ambition de      attend d'être reçu par Staline pour lui        château s'ouvrent symboliquement au
son mari : Callas a dans sa voix la folie   présenter son projet d'un monument             début et se ferment à la fin. La musique
des rêves et la terreur des visions »…      qu'il a conçu à sa gloire. Les généraux        de Chostakovitch ajoute aux crépuscu-
Il fume la pipe dans son fauteuil, il a     de Staline l'interrogent, eux-mêmes im-        laires images un mystère, une ampleur
l'air cruel d'un gros matou perfide qui     prégnés d'un sentiment de peur qui re-         qui fait de ce film audacieux un objet
semble s'amuser de la crainte qu'il ins-    descend jusqu'au plus petit serviteur en       hors du temps, hors des modes, mais
pire. Ses généraux n'en mènent pas          cascade. Il y a quelque chose de terri-        fichtrement attachant.
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
Lundi
Lundi 2020 Janvier,
           Janvier, après
                     après la
                            la
projection   de 20h15,  moment
projection de 20h15, moment
d’échanges
d’échanges entre
               entre vous,
                     vous, spectateurs,
                           spectateurs,
et une  ou  plusieurs  membres
et une ou plusieurs membres
de
de l’équipe
    l’équipe d’Utopia.
              d’Utopia.

PATERSON
Écrit et réalisé par Jim JARMUSCH
USA 2016 1h58 VOSTF
                                               un splendide film en mode mineur, par-
                                               faitement anti-dramatique puisqu’il ne
avec Adam Driver, Golshifteh Farahani,         s’y passe (presque) rien d’extraordinaire
Barry Shabaka Henley, Kara Hayward,            mais qui, par l’épure proche d’un haïku,
Trevor Parham, Masatoshi Nagase…               parvient à toucher à l’essentiel.
                                               Paterson, c’est le nom de famille du per-
La bande son a beau être d’une so-             sonnage principal qui se lève tous les
briété surprenante pour un film de Jim         matins à 6h15 pour avaler son bol de cé-
Jarmusch, Paterson est un film infiniment      réales et rejoindre à pied le dépôt de bus
musical, peut-être un des plus musi-           duquel il part faire sa tournée. Curiosité
caux du cinéaste New-Yorkais. Une par-         des choses, Paterson c’est aussi le nom
tition délicate et drôle composée sur le fil   de la ville du New Jersey où Paterson
d’une semaine ordinaire dans la vie pai-       fait sa tournée pour transporter les habi-
sible d’un chauffeur de bus, amoureux          tants qu’il écoute souvent bavarder d’une
en couple et poète à ses heures. Sept          oreille indiscrète. Paterson enfin, c’est le
jours découpés avec une précision mé-          titre d’un recueil de poèmes que Paterson
tronomique dans la routine d’une ville         (le chauffeur) affectionne particulière-
moyenne du New Jersey, au cours des-           ment, écrit par William Carlos Williams
quels Jim Jarmusch nous initie à la su-        (1883-1963) sur Paterson (la ville) dans
blimation du quotidien par la richesse         laquelle il habitait naguère lui aussi.
des relations coutumières, par l’attention
aux détails cachés sous les habitudes,         Dans la foulée de ce grand poète de l'or-
par la poésie comme art de vivre et sai-       dinaire qu'était William Carlos Williams,
sie dans tout ce qui nous entoure. Ces         Jim Jarmusch s'en tient à une vision pro-
septs jours sont les sept mesures d’un         saïque du monde et des affects, prouvant
grand cinéaste idéaliste qui recrée un         ainsi que le cinéma n’a nul besoin d’em-
monde lavé de sa noirceur par la bien-         phase pour être exaltant. Tant que les
veillance et l’énergie créatrice de tout un    sentiments sont purs, ils suffisent à être
chacun. Avec Paterson, Jarmusch réussit        bouleversants.

  EN VENTE À LA CAISSE DU CINÉ, UN EXCELLENT PETIT BOUQUIN
  SUR JARMUSH, JIM JARMUSH, UNE AUTRE ALLURE, de Philippe
  AZOURY (éditions Capricci). En collaboration avec La Machine à Lire.
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
Avant-Première Mercredi 25 Janvier à 21h dans le cadre du Festival Bordeaux
 Rock (www.bordeauxrock.com). Pour cette soirée, achetez vos places à l'avance, dès le
    Samedi 14 Janvier. Le film est ensuite programmé à partir du Mercredi 1er Février.

   GI M M E DA N GER

Film documentaire écrit                     sauvage de Gimme danger… Et pourtant           Mais c’est moins de cette épopée que
et réalisé par Jim JARMUSH                  le cinéaste y aborde finalement le même        de leurs aventures et mésaventures des
USA 2016 1h48 VOSTF                         sujet : le processus créatif. Celui, réglé,    débuts dont il est question. De leurs ex-
avec les membres de The Stooges :           ritualisé, millimétré du chauffeur de bus      périmentations où nous suivons le guide
Iggy Pop, Ron Asheton, Scott Asheton,       poète Paterson, humble créateur d'une          Iggy, l’iguane à la voix rauque qui nous
Dave Alexander, James A. Williamson,        œuvre d'une fantaisie et d'une délica-         parle de son enfance. De ce fameux
Steve Mackay, Mike Watt, le manager         tesse infinies. Et celui, plus violent, plus   parc à roulottes où il vivait avec ses pa-
Danny Fields…                               agressif, plus transgressif, des Stooges,      rents. De sa façon de bouger, essayant,
                                            l'un des meilleurs groupes de rock de          explique-t-il « d’imiter les chimpanzés
« Depuis les débuts du rock'n roll, peu     l'histoire selon Jim Jarmush.                  ou les babouins ».
de groupes peuvent se comparer aux          Ce n'est pas vraiment un documentaire          C'est aussi un retour sur le contexte
Stooges avec leur mélange incompa-          que nous propose Jarmush, mais plutôt          politique, social et culturel de l'époque
rable de pulsations viscérales, de psy-     une sorte de déclaration d'amour filmée        qui nous est proposé. Avec, comme en
chédélisme déjanté, de rythmes à la fois    aux Stooges. Un essai, comme le quali-         contrepoint, une mise en scène très clas-
blues et country portant des paroles né-    fie le réalisateur lui-même, composé en        sique, où de superbes images et pho-
vrotiques minimalistes. Sans oublier Iggy   toute subjectivité, pour essayer de nous       tos d'archive, dont pas mal d'inédites,
Pop, le leader du groupe, fauve grognant    convaincre que les Stooges ont été et          viennent entrecouper les entretiens avec
et grondant mais soucieux de son appa-      resteront, définitivement, parmi les tout      Iggy Pop et les autres membres succes-
rence qui réincarne aussi bien Nijinski,    meilleurs.                                     sifs encore vivants du groupe.
Bruce Lee et Harpo Marx qu'Arthur           Nous sommes en pleine révolution               « Donne-moi du danger petite étrangère.
Rimbaud. Pionniers dans l'histoire du       contre-culturelle, dans l’Amérique de la       Et je sens ton soulagement. Donne-moi
rock, les Stooges ont marqué des géné-      fin des années 60. Et le rock animal et        du danger petite étrangère. Et je sens
rations entières d'artistes » Jim Jarmush   survolté des Stooges fait des ravages.         ta maladie. Il n'y a rien dans mes rêves.
                                            Ils poseront les fondations de ce qu’on        Juste quelques souvenirs horribles. »
Rien de plus opposé a priori que la dou-    appellera plus tard le punk et le rock al-     (Paroles de Gimme danger, chanson des
ceur minimaliste de Paterson et l'énergie   ternatif.                                      Stooges)
TEMPÊTE DE SABLE - Cinéma Utopia
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          Horror                Comme vider la mer                #JAHM               On traversera le pont
 Jakop Ahlbom Company            avec une cuiller           Théâtre du Rivage           une fois rendus
      Théâtre muet                Jannick Jaulin                 Théâtre                   à la rivière
       24 & 25 jan                    Conte                    9 & 10 mars            Amicale de Production
                                      9 fév                                                  Théâtre
       Bienheureux                                              Les grands                  5 > 8 avril
   sont ceux qui revent           À bien y réfléchir,        Fanny de Chaillé
   debout sans marcher        et puisque vous soulevez           Théâtre                France profonde
      sur leurs vies                la question…               16 & 17 mars            La Grosse Situation
    Les choses de rien            26000 Couverts                                       Théâtre investigation
      Cirque / Danse                  Théâtre                 À corps perdus            lun 10 > ven 14 avril
       31 jan & 1er fév              11 & 12 fév                 Bivouac
                                                                  Cirque                       La vie
         SEPTeM                        Ravie                   21 & 22 mars             (titre provisoire)
Cie Chriki’z / Amine Boussa          Les Lubies                                          François Morel
          Hip hop                     Théâtre                    Chorus                     Concert
          3 & 4 fév                                      bi-p / Mickaël Phelippeau           11 avril
                                                                   Chorale
     Minute Papillon                   14 fév                                                Figaro !
                                                                   26 mars
     Paul les Oiseaux                                                                     Comp.Marius
                                    Natanaël…
           Danse                                             A mon seul désir            Théâtre plein air
                                   Opéra Pagaï                                          jeu 11 > dim 14 mai
                                                              Gaëlle Bourges
                                  Théâtre d’objets
                                                                  Danse
           7 fév
                                                                 30 mars
                                     7 & 8 mars

                                     carrecolonnes.fr
                              05 57 93 18 93 05 56 95 49 00
BORN TO BE BLUE
                                                                                             rée de résurrection musicale. On suit le
                                                                                             couple en pleine errance et pauvreté,
                                                                                             essayant de remonter la pente, l’un vou-
                                                                                             lant retrouver sa gloire passée sans l’hé-
                                                                                             roïne, l’autre tentant douloureusement
                                                                                             de percer au cinéma.
Ecrit et réalisé par Robert BUDREAU           de trouver un comédien capable de              Ethan Hawke incarne avec justesse l’im-
Canada 2015 1h37 VOSTF Noir & Blanc           transmettre à l’écran ne serait-ce qu'une      maturité et l’inconstance du person-
avec Ethan Hawk, Carmen Ejogo,                parcelle de la force hypnotique du vi-         nage, en quête perpétuelle de recon-
Calum Keith Rennie, Kevin Hanchard,           sage si particulier, traits saillants et re-   naissance et incapable à renoncer aux
Tony Nappo…                                   gard fragile, du vrai Chet Baker. Et le pari   sirènes dangereuses de la drogue. La
                                              est tenu, il y a quelque chose de bou-         drogue (le speedball, mélange de co-
Pour évoquer la mélancolie sulfureuse         leversant dans l’interprétation d’Ethan        caïne et d’héroïne), vecteur puissant de
et l’aura si particulière du grand trom-      Hawke : sans vouloir à tout prix mimer         plaisir mortifère mais aussi moyen in-
pettiste, rien ne pourra sans doute éga-      Chet Baker, il parvient à retranscrire         contournable d’accéder à la musique.
ler le magnifique documentaire que lui        avec justesse le talent fou et la souf-        Sans illusion bien sûr sur ces liaisons
consacra Bruce Weber, Let’s get lost,         france intime du musicien.                     dangereuses, le film rappelle en filigrane
sorti sur les écrans quelques mois seu-       Le choix judicieux de n’aborder qu’une         que la défonce a fait partie intégrante de
lement après le suicide à Amsterdam           période limitée de la vie de Chet Baker,       la vie de bien des génies du jazz, de Billy
de Chet Baker, puisque c'est bien de          entre 1966 et 1973, période qui corres-        Holiday à Charlie Parker en passant par
lui qu'il s'agit : Weber, photographe de      pond à sa longue traversée du désert,          Miles Davis, ici montré comme l’éternel
formation et de profession, avait réussi      donne au récit une force toute particu-        et génial rival de Baker.
à rendre compte de toute la complexi-         lière et permet de condenser ainsi la sin-     Tamisé de la même lumière bleutée – la
té de ce personnage fascinant et tota-        gularité du musicien autant que les mul-       classe pour un film en noir et blanc ! –
lement singulier, et dressait un portrait     tiples contradictions de l’homme.              que celle qui devait baigner les clubs de
sous forme d’hommage qui ne passait           Le scénario explore de manière subtile         jazz de la Côte Est, Born to be blue as-
toutefois pas sous silence les multiples      le passé de Baker (sa première femme,          sume avec élégance les promesses de
zones d’ombre du personnage.                  sa rivalité avec Miles Davis, la drogue…)      son titre : un film sobre et touchant, ber-
                                              puis s’attache assez rapidement à l’his-       cé par la mélancolie d’un blues associé
Born to be blue est une fiction et la pre-    toire d’amour avec sa seconde com-             pour toujours à l’interprète de My funny
mière – voire principale – difficulté était   pagne, et sa tentative assez désespé-          Valentine.
Lundi 23 JANVIER à 20h30
SOIRÉE D’OUVERTURE À UTOPIA
en partenariat avec le Cosim Aquitaine et l’Institut Cervantes
   Projection suivie d’une rencontre avec le réalisateur
  Dom Pedro, Alioune Sy, président du Cosim Aquitaine, et
  Dragoss Ouedraogo, anthropologue et cinéaste (Achetez
    vos places à l’avance, à partir du Samedi 14 Janvier).

TANGO NEGRO
LES RACINES AFRICAINES DU TANGO

Film documentaire de Dom PEDRO                 Carlos Caceres est l’une des fortes per-
Angola 2013 1h33 VOSTF                         sonnalités latino-américaines de son
                                               temps. Pianiste, tromboniste et peintre,
Le saviez-vous ? Au début le tango est         il milite pour un tango « traditionnel » et
une musique gaie. Il va devenir sombre         authentique, assumant enfin ses origines
avec l’arrivée du bandonéon. Le saviez-        africaines. Ses recherches sur les origines
vous ? Au milieu du xixe siècle encore,        du tango, entamées depuis son pays na-
près d’un tiers de la population argentine     tal, l’ont convaincu que cette musique aux
est noire !                                    accents et aux racines incontestablement
                                               africains est pratiquement la « world mu-
On oublie souvent que le tango est une         sic « avant la lettre. Et il s’est donné pour
musique d’Afro-descendants. Il est in-         mission de réintroduire les rythmes afri-
dissociable de la négritude et même si la      cains dans les harmonies jazzo-napolita-
société du Rio de la Plata s’est blanchie      no-yiddish du tango tel qu’on le connaît,
quasi totalement au fur et à mesure de         de Gardel à Piazzola.
son histoire, le tango est un syncrétisme
inexorablement lié à d’autres formes           Tango Negro est donc une véritable en-
d’origine noire comme le ragtime, la ha-       quête sur les origines du tango, mais aus-
banera, le fox trot et le jazz en général.     si sur la manière dont l’Argentine a impo-
En Argentine, parler des origines africaines   sé une version officielle et étouffé toute
du tango est tabou. Natif de Buenos Aires      contestation à propos des racines noires
et arrivé à Paris en plein Mai 68, Juan        de cette musique. (d’après la Bellevilloise)
SEMAINE DES AFRIQUES, du 23 au 29 Janvier
   La Semaine des Afriques porte une vision renouvelée des mondes africains et donne à voir
toute la diversité de l’Afrique contemporaine et ses diasporas, à Bordeaux et en Nouvelle-Aquitaine.
     Toute la programmation : institutdesafriques.org • Les autres rendez-vous à Utopia :
                                                                                        Jeudi 26 JANVIER à 16h
                                                                                        (Tarif unique : 4€)
                                                                                        Projection suivie d'un débat
                                                                                        avec la réalisatrice Amina Weira

                                                                                        LA COLÈRE
                                                                                        DANS LE VENT
                                                                                        Film documentaire d'Amina WEIRA
                                                                                        Niger 2016 54 mn VOSTF

                                                                                        En se laissant guider par son père qui a
                                                                                        passé sa vie à travailler à la mine d'ura-
                                                                                        nium d'Arlit au Niger, la réalisatrice
                                                                                        Amina Weira dresse un bilan accablant
                                                                                        de cette exploitation conduite par la so-
                                                                                        ciété française Areva.

  BEATS OF THE ANTONOV
                                                                                        La Colère dans le vent bruisse de la rage
                                                                                        de toute une jeunesse : comment ne pas
                                                                                        voir dans les conditions de travail de ses
 Lundi 23 JANVIER à 18h,                     intégrante de la vie sociale quotidienne   parents et les séquelles sur leur santé
                                             dans ces régions mais aujourd’hui, elle
 conférence :                                joue un nouveau rôle dans une société
                                                                                        la poursuite de l'esclavagisme d'antan?
 Vivre ensemble (Entrée libre)               remise en cause dans ses fondements        Car on meurt de travailler et même de
                                                                                        vivre à Arlit. Le vent du désert y charrie
 Mar Fall, sociologue spécialiste de         par les conséquences de la guerre. Les
                                                                                        les poussières de la mine à ciel ouvert, la
                                             populations s’en servent comme un ou-
 l’Afrique subsaharienne, et Pierre          til de résistance dans la région du Sud    contamination radioactive est générale.
 Vermeren, historien du Maghreb,             Soudan confrontée aux conflits meur-       Dans le contexte de pauvreté qui règne,
                                                                                        les ferrailles contaminées continuent
 croiseront leurs analyses autour de         triers depuis 2003.
                                                                                        d'être utilisées pour fondre des mar-
                                             Le réalisateur Hajooj Kuka nous im-
 la mémoire de la colonisation et de         merge dans le monde des fermiers sou-      mites ou réaliser des malles. Il faut dé-
 la manière dont elle informe nos            danais et des rebelles du Soudan du        truire pour reconstruire des maisons
 débats publics actuels (immigration,        Sud qui célèbrent leur héritage et pro-    bâties en briques radioactives. Les ani-
                                             tègent leurs terres face à une campagne    maux disparaissent d'étranges mala-
 laïcité, identité nationale). A l’heure     de bombardement par le gouvernement        dies, l'eau est avariée...
 des discours xénophobes et des              de Khartoum.
 crispations identitaires, leurs éclai-
 rages seront les bienvenus.

 Mardi 24 JANVIER à 16h
 (Tarif unique : 4€),
 projection suivie d'un débat avec
 Alioune Sy, président du Cosim
 Aquitaine, et Dragoss Ouedraogo,
 anthropologue et cinéaste.

 BEATS OF THE
 ANTONOV
 Film documentaire de Hajooj KUKA
 Soudan 2014 1h05 VOSTF

 Beats of Antonov raconte l’histoire des
 populations du Nil bleu et des Monts
 Nuba confrontées à la guerre civile au
 Soudan. La musique a toujours fait partie                                                                     LA COLÈRE DANS LE VENT
Eraserhead
Écrit et réalisé par David LYNCH
USA 1976 1h29 VOSTF Noir & Blanc
avec Jack Nance, Charlotte Stewart,
                                                sine de palier… » C'est ce qu'on appelle
                                                de l'humour pince-sans-rire.
                                                Eraserhead, film fantastique ? Plutôt film
Allen Joseph, Jeanne Bates…                     fantasmatique, rempli de visions surréa-
                                                listes, de scènes macabres et malsaines,
Eraserhead, c'est le premier film, ahuris-      avec en prime quelques gags imprévi-
sant, sidérant, de David Lynch. Il paraît       sibles et désespérément drôles. Cette
que le réalisateur de Twin Peaks, de Blue       « Tête à effacer » (traduction littérale du
velvet, de Lost Highway, de Mulholland          titre) organise un déferlement de sensa-
Drive… a une tendresse toute particulière       tions souvent contradictoires qui vous
pour cette première œuvre. On veut bien         rivent à votre fauteuil, hypnotisé, happé
le croire. Eraserhead ne ressemble à rien       par les images sur l'écran, puis étourdi,
de connu. Un sommet de l'étrange, du            déconcerté, estomaqué.
bizarre, qui nous laisse dans un état in-       Techniquement irréprochable, ce qui est
certain, mais bien convaincu en tout cas        d'autant plus remarquable qu'il fut réa-
d'avoir vu un truc qu'on n'est pas prêt         lisé dans des conditions tout à fait arti-
d'oublier !                                     sanales, Eraserhead possède assez de
                                                dynamite visuelle pour alimenter nombre
Indescriptible, tel est le film. Tenter de le   de polémiques et de discussions achar-
résumer serait une pure perte de temps          nées à l'issue des projections. Car inu-
et ne donnerait aucune idée de la ma-           tile de vous dire que ça n'a jamais plus
tière, du climat, de la force qui se dé-        à tout le monde et que ça va continuer
gage des images. Lynch l'a pourtant fait,       comme ça !
voilà ce que ça donne : « Henri Spencer
épouse une femme qu'il a peut-être mise         PS : pour le retour d'Eraserhead sur les
enceinte. Après la naissance de l'enfant,       écrans après plusieurs années d'invisibi-
elle le quitte et retourne chez ses parents.    lité, David Lynch a entièrement revu et ré-
Puis il a une aventure avec sa belle voi-       enregistré la bande sonore.
DAVID LYNCH, THE ART LIFE
Film documentaire de
Jon NGUYEN, Rick BARNES
et Olivia NEERGAARD-HOLM
USA 2015 1h30 VOSTF

Quand le documentariste Jon Nguyen lui
propose l'idée d'un film sur sa personne,
David Lynch fait savoir qu'il n'est pas in-
téressé. L'homme est notoirement peu
porté sur la confidence, et encore moins
enclin à expliciter ses films. Interroger un
artiste sur sa vie, tisser des liens entre
des anecdotes vécues et des péripé-
ties retranscrites dans un médium, cher-
cher systématiquement des correspon-
dances qui déduiraient l’œuvre de la
biographie dans l'espoir d'en épuiser le
sens, tout cela relève à ses yeux d'une
obsession vaine, d'une maladie de l'âme
commune aux copistes modernes et aux
clercs obscurs mettant leur foi mesquine
dans l'espoir toujours déçu que dessé-
cher des fleurs entre les pages d'un her-
bier et épingler des papillons en captu-
rera à jamais la beauté.

Pourtant, à force de patience et d'un
peu d'entregent, Nguyen parvient à for-
cer l'entrée du sanctuaire où le reclus se
terre, quelque part dans les collines de
Los Angeles. Enregistrer une suite d'in-
terviews faites de questions-réponses,
interroger son entourage, il n'en est plus
question. Et le nom même du projet
change. David Lynch, The Art life, inspiré
du recueil de cours publié par le peintre
Robert Henri qui produisit sur le jeune
Lynch l'effet d'une révélation, n'aborde
pas sa carrière cinématographique, mais
tout ce qui l'a précédée. Portrait de l'ar-
tiste en jeune homme, il se consacre à
sa découverte de l'Art tout autant qu'à
l'invention d'un artiste par lui-même.
De Missoula dans le Montana, en pas-
sant par les petites villes de provinces
où il grandit, jusqu'aux rues sombres de
Philadelphie où il vivra une douloureuse
mais salutaire catharsis, Lynch nous em-
barque dans les méandres de ses sou-
venirs ; de sa mère, qui sentit très tôt
chez lui une prédisposition et qui lui in-
terdit l'usage des livres à colorier pour
décorseter sa créativité ; de sa rencontre
déterminante à quatorze ans avec le
peintre Bushnell Keeler, qui lui ouvrit les
portes de son atelier ; du mélange ambi-         chaque plan, quand d'autres souvenirs          ces confessions, est contenu en germe
güe de soutien et de défiance dont ses           émergent, comme l'apparition de cette          tout l’univers du futur cinéaste.
proches firent preuve face à ses choix ;         femme nue, hagarde et muette, s'affa-          Accolant à la voix désincarnée de Lynch
tout cela dessine le parcours passion-           lant devant lui sur le trottoir alors qu'il    de longs plans fixes sur l'artiste au tra-
nant d'un gamin épris de liberté, qui dé-        n'a que dix ans et qu'il reste là, tétanisé    vail dans son atelier, décomposant ses
testait l'école mais qui très tôt fit de l'art   et fasciné ; impossible de ne pas penser       peintures en gros plans, scrutant les ri-
son phare et ne dévia jamais du cap qu'il        à Blue Velvet, à cette irruption brutale et    dules d'un visage apparemment serein
s'était tracé.                                   inattendue de quelque chose de dépla-          mais dont le regard trahit l'intranquillité,
                                                 cé dans les petites bourgades sans his-        nimbé par le score subrepticement in-
Mais sous la surface, en creux, et               toires de l'Americana, une lézarde défi-       quiétant composé par Lynch lui-même,
presque à l'insu de son sujet, se des-           gurant le calme visage du quotidien dont       Jon Nguyen réussit le tour de force de
sine un autre portrait, et il appartiendra       la violence implicite risque de vous em-       réaliser le film lynchien par excellence,
à chacun de déterminer s'il est plus ou          porter au delà des apparences, au delà         celui qui montre sans démontrer et porte
moins légitime. Celui que Lynch ne vou-          des certitudes, et faire vaciller la raison.   avec lui une part irréfragable de mystère.
lait pas faire, mais qui pourtant habite         Dans les quelques minutes que durent           Fascinant.
Mettez votre PUB
dans la gazette
 05 56 52 00 15
Dimanche 29 JANVIER à 20h45

                                                   LA PANTHÈRE NOIRE
(The Black panther)                          ment, une des caractéristiques du ciné-         Royaume-Uni dans les années soixante-
                                             ma britannique est son attachement au           dix. Produit en pleine crise du ciné-
Ian MERRICK                                  réel, puisant avec constance à la source        ma britannique avec une économie de
GB 1977 1h38 VOSTF couleur                   documentaire. La vague de polars pois-          moyens qui lui confère une sècheresse
avec Donald Sumpter, Debbie                  seux inaugurée en 1971 par Get Carter           et une précision implacables, le film
Farrington, Marjorie Yates, Sylvia           de Mike Hodges et Villain de Michael            dresse le portrait d’un monstre ordinaire,
O’Donnell, Andrew Burt, Alison Key…          Tuchner confirme d’une certaine fa-             criminel méthodique mais au final inapte
Interdit aux moins de 16 ans                 çon cette tendance par le biais de su-          dans l’action, précipitant brutalement
                                             jets proches de l’actualité traités avec        chacune de ses « missions ». Porté par
Donald Neilson, vétéran des comman-          un réalisme blafard, la grisaille des quar-     le jeu glaçant de Donald Sumpter, l’itiné-
dos au service de Sa Majesté rompu au        tiers déshérités des villes industrielles       raire de ce psychopathe instaure d’au-
combat et aux techniques de survie à         du Nord en constituant le plus souvent          tant plus le malaise que l’incompétence
l’époque des guerres post-coloniales, de     le décor. Paradoxalement, ce sont deux          de la police semble l’autoriser à frapper
retour à la vie civile dans une Angleterre   réalisateurs américains qui en livrent la       en tout lieu et à tout instant.
en pleine récession, est un père de fa-      vision la plus sombre, dénuée de tout           Objet avant même sa sortie en salle
mille qui mène une double vie. Tyran do-     sensationnalisme, terrifiante dans leur         d’une controverse médiatique dénon-
mestique appelé à s’absenter réguliè-        description de la psychose de l’homme           çant l’exploitation crapuleuse d’un
rement sur des chantiers pour subvenir       du commun : Sidney Lumet avec The               drame encore vif dans les mémoires (ce
au quotidien du foyer, il se livre en réa-   Offence et son inspecteur de police au          que contredit la sobriété efficace du scé-
lité à des braquages meurtriers de bu-       bord de la folie, et Richard Fleischer          nario de Michael Armstrong), le film fut
reaux de poste lors de raids nocturnes,      dont L’Étrangleur de Rillington Place re-       rapidement interdit de distribution et ne
le désignant comme l’ennemi public no1       late les méfaits du tristement célèbre          put bénéficier que d’une diffusion confi-
sous le nom de « panthère noire » en ré-     tueur en série John Christie.                   dentielle en VHS.
férence à son accoutrement. Déterminé        The Black Panther ne déroge pas à la            Délivré d’un purgatoire de quarante an-
à faire un ultime gros coup, il kidnappe     règle et s’inscrit magistralement dans ce       nées, il est urgent de (re)découvrir The
une adolescente héritière d’une fortune      noir sillon. À l’instar de Fleischer, le pre-   Black Panther en tant que chef-d’œuvre
et exige une rançon…                         mier long métrage réalisé par Ian Merrick       désormais incontournable du film noir
Depuis le courant « néo-réaliste » fon-      s’inspire d’un fait divers qui a ébranlé le     britannique.
dé par John Grierson dès la fin des an-
nées vingt en passant par l’émergence
du Free Cinema en 1956 jusqu’à nos           Prochaine Lune Noire Jeudi 23 Février : OPERA (1987) de Dario Argento, inédit en
jours et les films de Ken Loach notam-       salle en France, avec une copie restaurée intégrale dans son format Scope d'origine !
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