Un an après Black Lives Matter, où en est la mode en matière de diversité ? - Peclers Paris

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Un an après Black Lives Matter, où en est la mode en matière de diversité ? - Peclers Paris
Date : 13/04/2021
                                                                                             Heure : 17:15:34
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Pays : France
Dynamisme : 9
                                                                                                                              Page 1/6

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          Un an après Black Lives Matter, où en est la mode en matière de
          diversité ?

          Olivier Rousteing, final du défilé Balmain femme autonme-hiver 2020-2021.

          Dominique Charriau/Getty Images
          Depuis la prise de conscience déclenchée en 2020 par le mouvement Black Lives Matter, où en est la mode
          sur ses engagements en matière de diversité ? Premier état des lieux à Paris, New York, Milan et Londres.

          «Nous sommes déterminés à contrer l'idée fausse selon laquelle être italien, c'est être blanc». Seule personne
          noire de la Chambre de la mode italienne (CNMI), Stella Jean a décidé de frapper fort. En juillet 2020, dans la
          foulée des manifestations Black Lives Matter , elle crée - avec le soutien du CNMI - le comité "We are Made
          in Italy" (WAMI), afin dit-elle, «de bannir toute forme de discrimination contre la communauté noire dans la
          mode». Le 24 février dernier, le collectif est entré dans l'histoire de la mode italienne, en ouvrant la fashion
          week de Milan. Une première victoire durement gagnée après avoir résisté aux «pressions et menaces»
          de personnalités du milieu. «La vérité, c'est qu'il a fallu énormément de sacrifices humains douloureux.
          Nous devons aussi être reconnaissants de l'impulsion envoyée par les États-Unis», commente la créatrice.
          Exemplaire, cette initiative en dit long sur l'état de la diversité au sein d'une industrie aussi puissante que
          la mode.

          Black Fashion Matters
          «L'année 2020 a été marquée par l'assassinat de George Floyd (un afro-américain tué par un policier blanc,
          le 25 mai 2020 à Minneapolis, NDLR ). Pour les communautés noires, ce drame est un moment charnière
          du XXIe siècle. Il y a eu des émeutes à travers tous les États-Unis et le mouvement Black Lives Matter est
          devenu international, il a traversé les cultures et les sociétés», rappelle Dinah Sultan, styliste et analyste de
          tendances chez Peclers. Révélatrice des inégalités au sein de la population américaine et ailleurs dans le
          monde, l'onde de choc a gagné le milieu de la mode et un certain nombre de marques - et de célébrités -
          se sont ralliées à la cause en dénonçant les violences policières, et en annonçant des engagements pour
          une meilleure représentation des minorités au sein de leurs équipes. Depuis cette prise de conscience, une
          question s'impose : où en est la mode sur ses engagements en matière de diversité ?

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Un an après Black Lives Matter, où en est la mode en matière de diversité ? - Peclers Paris
Date : 13/04/2021
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         La créatrice italienne d'origine camerounaise, Claudia Gisèle Ntsama, au défilé We are Made in Italy automne-
         hiver 2021-2022.

         Imaxtree
         Des podiums plus métissés
         Au regard des défilés, la représentativité et l'inclusivité progressent. Avec 41,3% de mannequins racisés, les
         fashion weeks printemps-été 2021 de New York, Londres, Milan et Paris, confirment la tendance de l'été
         2020, considérée comme la saison la plus métissée, selon le site Fashion Spot . Avec un nombre de modèles
         divisé par trois à cause du Covid-19, la progression semble d'autant plus encourageante. Paris (38,9%) fait
         certes mieux que Milan (35,6%), mais elle reste à la traîne de Londres (52%) et New York (57,1%). La grosse
         pomme marque cependant un recul de 7 points (50, 7% ) pour la saison automne-hiver 2021. Si l'on observe
         davantage de diversité sur les podiums et dans la publicité, quand est-il vraiment au sein des entreprises de
         la fashion sphere ?

         En mars 2021, près d'un an après les déclarations d'intention des marques, un article du New York Times -
         titré «La mode a promis plus de diversité, voilà ce que nous avons découvert» - dresse un portrait beaucoup
         moins flatteur de la réalité. Pourcentage de personnes noires au conseil d'administration, dans les équipes de
         direction, parmi les employés, dans la publicité et sur les défilés, engagements mesurables…Pour cet audit,
         le journal a envoyé un questionnaire identique à 64 marques majeures du prêt-à-porter féminin aux États-
         Unis et en Europe, ainsi qu'à 15 sites de vente en ligne et à quelques médias influents du secteur. À l'arrivée,
         seule une poignée de marques américaines a essayé de compléter le questionnaire et 16 l'ont rempli à moitié.
         En Italie comme en France, la loi interdisant d'établir des statistiques ethniques, aucune des entreprises
         contactées n'a pu fournir les informations nécessaires, tout en expliquant vouloir faire plus pour l'inclusion.

         Dans la mode, la réalité, c'est que la réflexion sur la diversité est quasiment au point mort
         «Aux États-Unis, les choses peuvent avancer plus vite qu'en Europe, car ils ont la possibilité de fixer des
         quotas d'embauche par origine ethnique. Il n'y a aucun tabou là-dessus et c'est même considéré comme une
         démarche progressiste. C'est impensable en France et c'est de toute façon interdit par la loi», commente
         Dinah Sultan. Une différence qui s'explique aussi par l'histoire, selon l'analyste spécialiste des questions de
         diversité. «Le passé colonial de l'Europe pèse sur les rapports que la France entretient avec la communauté
         noire. Il y a une envie de réparation et d'évolution mais c'est politiquement incorrect d'en parler, la question
         est tue. Et dans la mode, la réflexion sur la diversité est quasiment au point mort», déplore-t-elle.

         Aux États-Unis, 16% de personnes de couleur aux postes de direction
         Mais comme le constate une étude sur l'inclusion et la diversité réalisée en 2019 par McKinsey pour
         la chambre syndicale des créateurs mode américains (CFDA), les États-Unis - malgré leurs politiques de

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         discrimination positive - ont aussi du chemin à parcourir. Selon l'enquête menée dans l'industrie du vêtement
         et de la beauté, seuls 16% de postes de direction et 15% des sièges au conseil d'administration sont occupés
         par des personnes de couleur, alors qu'elles représentent 32% des postes de débutants.

         Le duo créatif néerlandais, lauréat du grand prix du dernier festival de Hyères, prend la tête de la direction
         artistique de Nina Ricci.

         Leon Mark pour Nina Ricci
         Balbutiante et cependant incontournable, notamment pour les multinationales, la question trouve un début
         de réponse avec la création ces deux dernières années de «direction inclusivité et diversité» chez LVMH,
         Chanel, Burberry ou encore Prada, Gucci et Dolce & Gabbana. Pour Dinah Sultan, ces comités se doivent
         d'abord d'être «exemplaires en terme de diversité.» Une première étape indispensable «pour mettre en place
         des process et des réflexes au sein des groupes, mais aussi pour "éduquer" les équipes afin de garantir un
         futur plus équitable.

         Un peu plus de diversité dans le calendrier parisien
         Un futur plus équitable qui passe aussi au niveau de la création. Aujourd'hui encore, Olivier Rousteing (chez
         Balmain depuis 2009) et l'Américain Virgil Abloh , directeur artistique de Louis Vuitton homme depuis 2018,
         sont les seuls créateurs noirs de grandes maisons françaises à défiler à Paris. Dans le même temps, d'autres
         talents français et étrangers, sont venus rejoindre le calendrier de la fashion week de Paris : le francilien
         Mossi Traoré , le Nigérian Kenneth Ize - finaliste prix LVMH en 2019 - le duo néerlandais Rushemy Botter et
         Lisi Herrebrugh chez Nina Ricci, l'anglo-jamaïcaine Wales Bonner , le sud-africain Thebe Magugu lauréat
         du prix LVMH en 2019 , ou encore le camerounais, Imane Ayissi qui défile en haute couture. Sorti du cycle
         infernal des shows, Lamine Badian Kouyaté et sa marque Xuly Bët ont fait leur retour sur les podiums en
         2020, après plusieurs années d'absence.

         Défilé Thebe Magugu Prêt-à-porter automne-hiver 2021-2022 Paris

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         diaporama        de       19        photos:    https://madame.lefigaro.fr/style/mode-diversite-defiles-createurs-
         enquete-110321-195685
         Peu nombreux à percer dans un monde encore très fermé, ces créateurs d'horizons variés reflètent une autre
         réalité. Celle des parcours professionnels et du coût des études. Entré au calendrier de la haute couture en
         janvier 2020, Imane Ayissi en sait quelque chose. Formé aux bases de la couture dans son pays natal, le
         Cameroun, il est reparti de zéro en arrivant à Paris. Installé en France depuis 30 ans, il se considère comme
         un autodidacte. «On ne peut pas faire de la couture "façon-façon" comme on dit chez nous. Il faut suivre
         les règles de l'art. Moi, j'ai fait beaucoup d'erreurs, car je n'ai pas appris, je n'avais pas de réseaux, pas de
         formation. J'ai sacrifié ma vie pour ce métier», explique le quinquagénaire.

         Il y a peu de diversité dans les parcours d'excellence
         Pour Jean-Marc Chauve, professeur à l'Institut Français de la mode et ancien directeur artistique à
         l'International Fashion Academy à Paris, c'est le système éducatif français qui est en cause. «Il y a peu de
         diversité dans les parcours d'excellence car les grandes écoles privées de mode sont très coûteuses. Or,
         la mode est devenu un milieu de plus en plus exigeant et concurrentiel. Et dans le luxe c'est encore pire.
         À un certain niveau de management, il faut avoir des compétences en business et en mode et donc sortir

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         de grandes écoles avec un bac +5». Consultant en recrutement pour des grandes marques, il ne peut que
         constater le peu de CV de candidats issus de la diversité. «Ils sont rares notamment sur des postes de
         management en marketing ou en relation clients», constate-t-il. Jugé trop élitiste, le secteur reflète encore
         assez peu la société qui l'entoure.

         Aller chercher des talents atypiques
         Conscient de cette réalité, l'Institut Français de la mode a lancé en 2019, un programme pour promouvoir la
         diversité et l'égalité des chances , en partenariat avec la Fondation Culture & Diversité. Créée en 2006, cette
         fondation favorise l'accès aux grandes écoles de la culture pour les jeunes talents issus de milieux modestes.
         En Île-de-France, on peut aussi citer les formations gratuites proposées par Casa 93. Créée par Nadine
         Gonzalez et Caroline Tissier - deux anciennes professionnelles du secteur - l'école est destinée à « aller
         chercher des talents atypiques, des personnes qui ont peu de moyens, pas de diplômes », nous expliquait
         Caroline Tissier que nous avons rencontrée en 2020.

         En vidéo, Imane Ayissi couture printemps-été 2021
         Vidéo: https://madame.lefigaro.fr/style/mode-diversite-defiles-createurs-enquete-110321-195685

         Imane Ayissi haute couture printemps-été 2021
         En Angleterre, une multiculturalité assumée
         «En Europe, il y a une exception, c'est la Central Saint Martins School de Londres qui propose des bourses
         pour valoriser les jeunes talents. Là-bas, la multiculturalité est une valeur forte clairement assumée», constate
         Dinah Sultan. Il n'est donc pas étonnant de voir émerger davantage de diversité parmi les talents qui défilent
         à Londres, plutôt qu'à Paris et Milan. De son côté, le Conseil de la mode britannique a créé en juillet en
         2020, un comité dédié à la diversité et à l'inclusion. Autre signe des temps, la nomination d' Edward Enninful
         au poste de directeur éditorial de toutes les éditions européennes du Vogue . Entré au groupe Condé Nast
         il y a près de 28 ans, le britannique né au Ghana, avait été nommé rédacteur en chef du magazine en 2017.

         En Italie, "l'illusion d'une mode métissée"
         «En Italie, les minorités ethniques qui composent le multiculturalisme, paraissent extrêmement attrayantes
         lorsqu'elles se présentent sous la forme d'inspiration exotiques et colorées. Ce même enthousiasme diminue
         considérablement lorsque le regard se tourne vers les Noirs, en particulier lorsque nous avons l'audace de
         prendre la parole», analyse Stella Jean . Avec le collectif We are Made in Italy, elle veut en finir avec
         l'hypocrisie qui consiste à utiliser «l'image des corps noirs à des fins commerciales». Un système utilisé par les
         marques pour créer «l'illusion d'une mode métissée», qui selon elle «ne correspond pas du tout à la présence
         réelle de la minorité noire dans la main d'œuvre de ses entreprises».

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         La créatrice italo-haïtienne Stella Jean, le 7 juillet 2020 à Rome, lors d'une manifestation anti-raciste Black
         Lives Matter.

         Marilla Sicilia/Getty Images
         Au-delà des collections présentées par We are Made in Italy, il s'agit pour la créatrice d'inciter les acteurs de la
         mode italienne à adopter de nouvelles stratégies, à tous les niveaux de la chaîne de valeur, afin de retrouver
         «le rayonnement des années 1980-1990» et de devenir «les leader d'une nouvelle vague culturelle», avec
         à la clé de «nouveaux clients». Un avis que partage la française Haweya Mohamed. Chef d'entreprise dans
         le secteur des nouvelles technologies, elle a choisi d'adapter le succès de sa plateforme Afrobytes , aux
         domaines de la mode et de la beauté, en lançant The Colors .

         "Nous sommes dans un momentum"
         «En France, la diversité est considérée comme un sujet imposé et comme un problème par ceux qui ne
         la pratiquent pas. Moi, je la vois comme une opportunité», explique-t-elle. Spécialisée dans le commerce
         et le montage de projets entre l'Europe et l'Afrique, elle suit aussi de très près le marché américain. «Aux
         États-Unis, la part des personnes non blanches, c'est à dire noires, hispaniques, asiatiques et métisses,
         représente 40% de la population (1). C'est le segment de consommateurs qui augmente le plus. C'est une
         réalité impossible à nier.» Lancé en 2019, The Colors vise à accompagner les jeunes créateurs en Europe
         et en Afrique dans le développement de leurs marques. «Nous sommes dans un momentum. Nous devons
         introduire un nouveau narratif sur la diversité et ne plus être dans le larmoyant. Tout est une question de
         posture et de dynamique», estime Haweya Mohamed. Et la businesswoman d'enfoncer le clou, en citant une
         étude Nielsen sur le marché de la beauté selon laquelle, « une marque qui n'a pas de stratégie multiculturelle,
         risque fort de ne plus exister dans les dix prochaines années. »

         Frappée de plein fouet par la crise sanitaire, l'industrie du vêtement se trouve à un tournant. «Les marques
         ne peuvent plus se permettre de fermer les yeux ou de faire du washing (2) . Tout comme la question de
         l'environnement, la diversité doit faire partie des valeurs fondatrices du redémarrage», prédit Dinah Sultan.

         (1) Source : Statista.com
         (2) Procédé marketing qui consiste à se donner une fausse image vertueuse sur un sujet (diversité,
         environnement, égalité femme-homme...).

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