UN CENTRE D'ENTRETIEN DES ROUTES NATIONALES À BURSINS (VD) CONSTRUIT SELON LES PRINCIPES DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
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UN C ENTRE D’E NTRETIEN DES R OUTES NATIONALES À BURSINS (VD) CONSTRUIT SELON LES PRINCIPES DU DÉVELOPPEMENT DURABLE Y. Roulet1; J.V. Pitteloud2; Ivo Frei3. 1) Ingénieur en environnement, Etat de Vaud, Service des bâtiments, Monument et Archéologie, Riponne 10, 1014 Lausanne 2) Chef de projet, Etat de Vaud, Service des bâtiments, Monument et Archéologie, Riponne 10, 1014 Lausanne 3) Architecte epfl fas sia, Atelier niv0, rue du Simplon 4, 1001 Lausanne INTRODUCTION Entre 1999 et 2000, l’Etat de Vaud organise, sur l’ancien site, un concours d’architecture à deux degrés pour la réalisation d’un nouveau centre d’entretien des routes nationales (CeRN) à Bursins. Pour la première fois en Suisse r omande un maîtr e de l’ouvr age et un jur y posent clair ement le développement dur able comme cr itèr e d’appr éciation dans le jugement du concour s, « l’architecture rend compte de la question du développement durable quand elle est un processus de construction et non pas une construction » a ainsi répondu l’un des concurrents. Le projet lauréat, de l’architecte Ivo Frei du bureau lausannois niv0, a présenté une solution architecturale intéressante du point de vue de l’implantation et de l’organisation des espaces tout en offrant l’occasion de débattre sur l’ensemble des questions relatives au développement durable lors de la construction. Orienté par les trois axes principaux du développement durable que sont l’économie, l’écologie et la société, le maître de l’ouvrage, représenté par le Service des Bâtiments, Monuments et Archéologie (SBMA) de l’Etat de Vaud, a dû définir clairement sa position et sa responsabilité lors de la programmation et se poser, en étroite collaboration avec les mandataires et les entreprises, toutes les questions, parfois même si elles semblent incongrues, sur l’ensemble du processus de développement du projet jusqu’à son élimination future en examinant attentivement toutes les phases de construction et d’exploitation. La conduite d’un tel projet pour aboutir à une démarche exemplaire dans le domaine du bâtiment en matière de développement durable a fait appel en premier lieu au bon sens et le recours à des outils spécifiques a permis de confirmer et préciser des choix intuitifs. La première des deux étapes de cette construction est terminée et fait l’objet d’une évaluation pour l’obtention du label ©MINERGIE ECO. LA DÉMARCHE En inscrivant le développement durable dans ses objectifs prioritaires dès 1999, le SBMA de l’Etat de Vaud a mis en place une démarche par phase de projet basé sur le schéma cidessous (voire publication Jalons N°1 page 10 et 11, http://www.dinf.vd.ch/sbma/). Potentiel d’influence selon les phases de déroulement d’un projet
Il apparaît que les décisions pouvant influencer le projet doivent être prises le plus en amont possible, il est donc souhaitable de définir le plus clairement possible les besoins actuels et futurs de la réalisation projetée. A ce stade le rôle du maître de l’ouvrage est primordial pour la réussite du projet. Plusieurs cibles ont ainsi été identifiées dès le début de la réflexion pour le projet de Bursins et ont débouché sur une programmation faisant largement état du développement durable. CIBLES MESURES SOCIETE Rendre un service utile, ni plus ni moins Surfaces utiles adaptée aux besoins Conserver une capacité d'adaptation Organisation spatiale flexible, évolutive, efficace Bénéficier d'un bien être intérieur Concept bioclimatique S'insérer en milieu rural et autoroutier Implantation discrète, en retrait de l'autoroute ECONOMIE Atteindre un faible coût de construction Forme compacte, structure simple, préfabrication partielle Conserver un faible coût d'exploitation Matériaux éprouvés, MINERGIE Bénéficier de peu de frais de maintenance Installations techniques simples et efficaces Valoriser les ressources endogènes Matériaux de provenance locale et recyclés ECOLOGIE Ménager les ressources naturelles Matériaux à faible énergie grise Prioriser les énergies renouvelables Chauffage combiné bois/solaire Limiter les charges toxiques et polluants Matériaux naturels, tri des déchets à la source, ecodevis Aménagements extérieurs naturels Toiture végétalisée, sol perméable Tableau résumé des exigences développement durable du projet LE PROJ ET L’équipe du bureau niv0 à Lausanne a présenté un projet répondant aux exigences de base du maître de l’ouvrage avec une sensibilité particulière et un intérêt technique s’appuyant sur les trois axes du développement durable : social, économique et environnemental. L ES ENJ EUX SOCIO CULTURELS Le plan proposé est novateur dans son organisation. Il se détache de l’habituelle séparation fonctionnelle des bureaux et garages pour tout regrouper sous un seul toit. L’éclatement du garage « standard » a notamment permis de réduire fortement les circulations couvertes. La disposition en coupe des locaux offre ainsi un contact visuel entre le personnel administratif et les employés techniques. Proposition d’implantation Plans du projet lauréat De par son orientation et son implantation sur le site, le bâtiment est bien intégré dans la région viticole de la Côte et en exploite les richesses de vues, d’équipements tout en bénéficiant des apports solaires directs.
Le fonctionnement et le confort du bâtiment sont optimisés pour l’usage actuel en autorisant une évolution future notamment par la flexibilité dans la répartition de certaines surfaces pouvant accueillir de nouvelles affectations si nécessaire. L ES CONTRAINTES ÉCONOMIQUES L’architecture sobre du bâtiment, sa volumétrie simple et sa rationalité constructive assurent une bonne économie du projet. Les coûts de construction sont équivalents à d’autres centres d’entretien récents à l’image de celui de Sierre en Valais. En incluant les frais d’exploitation et de conservation de l’ouvrage à ceux de la construction proprement dite sur une durée de vie moyenne du bâtiment de 30 ans, le coût global est notablement réduit. La construction durable ne coûte pas plus cher. Par des méthodes de construction plus simples, plus efficaces, il est possible de couvrir les frais supplémentaires pouvant provenir de l’emploi de matériaux écologiques et de procédés de construction moins polluants (pour exemple, l’économie sur les pieux de fondation a permis de financer une large utilisation du bois dans la construction). E NERGIE ET ENVIRONNEMENT Fondations et remblais Bien que les données géotechniques du site ne semblaient pas s’y prêter, pour porter le bâtiment, les architectes ont choisi une solution originale basée sur l’expérience et l’imagination qui consiste à un prétassement du sol pour les fondations se faisant grâce à la terre qui servira, à terme, de remblai. Variantes de fondations et de remblais Le bâtiment n’étant pas ancré en profondeur, le sol est épargné et les déchets d’un autre chantier ont pu être valorisés. Nécessitant une analyse plus poussée, ce choix, favorable au développement durable, a eu pour conséquence d’adopter une trame structurelle à portée réduite, d’employer des matériaux de construction plus léger tel que le bois et de prendre en compte des faibles mouvements qui peuvent affecter l’ouvrage. En finalité, cette solution s’est avérée plus économique que le recours à une structure reposant sur des pieux forés. L’éner gie gr ise Lorsque la consommation d’énergie du bâtiment est équivalente ou inférieure aux valeurs du standard © MINERGIE, le calcul de l’énergie grise démontre des impacts plus importants, économiques et environnementaux, lors de la phase de construction que lors de l’exploitation et l’entretien.
Comparatif d’analyse réalisé selon la méthode SNARC (SIA D0200) Il en résulte des choix constructifs et de matériaux ciblés sur les plus gros consommateurs que sont les toitures, dalles, portes et fenêtres. Les matér iaux de constr uction La grande qualité conceptuelle du projet, unanimement relevée par le jury lors du concours, se matérialise en phase de réalisation par le choix des matériaux visant à intégrer tant les préoccupations écologiques énergétiques, économiques que l’expression architecturale et la rationalité fonctionnelle. Bois pour la charpente, les Bois et métal pour les fenêtres poutres et les sommiers et les cadres Vue nord mezz Béton recyclé pour les Verre et métal isolé pour les structures cachées portes de garage Capteurs solaires thermiques Toiture végétalisée et étanchéité pour les façades en EPDM Ceci démontre que le développement durable dans la construction apporte une créativité accrue lorsqu’il est considéré comme élément du projet. La tr aitement des sur faces extér ieur es et la gestion de l’eau Les surfaces extérieures imperméables seront réduites au minimum et un bassin de rétention permet de retarder le retour de l’eau dans le circuit des rivières et du lac avoisinant. Distribution des surfaces extérieures Après une analyse comparative de deux solutions pour la gestion de l’eau, « récupération des eaux pluviales » et « utilisation des eaux du réseau lacustre », décision a été prise de constituer un double réseau et de pomper l’eau du lac : l’eau non potable et bon marché sera utilisée pour l’exploitation du centre (nettoyage et lavage des véhicules, arrosage, wc, etc) et l’eau potable du réseau, précieuse et coûteuse, servira uniquement aux besoins des utilisateurs (lavabos, douches, cuisines). Le chauffage, une combinaison boissolair e. Optimisé pour consommer le minimum d’énergie, les pertes de l’enveloppe selon la norme SIA 380/1 ont été limitées à 111 MJ/m2 et la consommation selon les critères ©MINERGIE est évaluée à 82 MJ/m2, soit 25% de moins que les exigences pour obtenir le label du même nom. Une ventilation contrôlée à double flux avec un rendement de récupération de l’échangeur de 86% combiné avec un puit canadien participera à garantir un confort optimal dans les locaux.
Pour couvrir le solde des besoins en chauffage, conformément aux directives énergétiques de l’Etat de Vaud, le choix s’est porté sur une combinaison optimale composée d’un chauffage solaire thermique et d’une chaudière à bois, énergies renouvelables et endogènes. Bruleur L’orientation et l’implantation du bâtiment (longue barre de bureaux orientés au sud) permettent de bénéficier d’une exposition favorisant les gains solaires passifs et l’éclairage naturel. Prévus sur les 2 étapes de construction du centre, quelque 590 m2 d’absorbeurs solaires en acier inoxydable sélectifs recouvrent une importante partie de la façade sudest ; par ce biais l’énergie solaire active et passive couvrira 40% des besoins thermiques. Les autres façades, moins ensoleillées, sont plaquées de tôles simples du même aspect afin de garder une uniformité architecturale. Les activités du centre produisent par ailleurs une quantité suffisante de bois combustible provenant de l’entretien des abords de l’autoroute. C’est donc naturellement que durant les périodes où l’ensoleillement est insuffisant, une chaudière à bois d’une puissance de 188 kW permettra de couvrir le solde des besoins de chauffage. De ce fait, moyennant une implication des utilisateurs, le CeRN peut atteindre l’autonomie énergétique. Un stock d’eau de 25'000 litres permet une utilisation optimale de la puissance de la chaudière et le stockage d’une partie de la production des capteurs solaires. Deux chauffeeau immergés dans ce stock permettent de couvrir la majeure partie des besoins en eau chaude sanitaire du centre. IL SUFFIT DE VOULOIR L’application des principes du développement durable à la construction nécessite de concilier des points de vue et aller audelà des solutions conventionnelles. Les utilisateurs ne se sentent pas toujours concernés par les préoccupations du maître de l’ouvrage et les résistances au changement sont des réactions humainement compréhensibles. Il s’agit donc de convaincre, orienter les comportements afin d’obtenir des consensus. Les spécialistes doivent faire preuve de créativité, d’imagination et de compétences pour tester des solutions novatrices et l’échange de connaissances spécifiques exige de dépasser des soucis de concurrence et de secret professionnels. C’est finalement par une approche ouverte et pragmatique que se forge les convictions sur les solutions adoptées. Différents outils de simulation ont permis de confirmer certains choix et de parvenir à maîtriser en parallèle les coûts, les performances énergétiques et les impacts écologiques. „Répondre aux exigences d’une construction durable requiert une nouvelle manière de bâtir et suppose une adaptation des méthodes d’approche lors de la planification des projets„ Eric Perrette, Architecte cantonal CHRONOLOGIE 1999 Lancement du concours ouvert à deux degrés 2000 Jugement du 2e degré 20012004 Développement du projet 2004 1ère étape de construction 2005 Chantier de déconstructiondémolition 20052006 2e étape de construction 2006 Fin des travaux
FINANCEMENT Coût total de l’ouvrage (CFC 1 à 9): 34 millions, financé par la Confédération et le Canton. INTERVENANTS Maître de l’ouvrage Etat de Vaud, DINF/SBMA et SR Chef de projet M. JacquesVictor Pitteloud, SBMA Architectes atelier nivo, Ivo Frei, architecte epfl fas sia, Lausanne Collaborateurs Julien Woessner, Ariane Joyet, Rodolphe Tacchini Ingénieurs KellerBurnier, ingénieursconseils en CVS Mab SA, ingénieursconseils en électricité Chabloz et Partenaires SA, ingénieursconseils en génie civil BIBLIOGRAPHIE «Centre d’exploitation des routes nationales de Bursins» rapport du jury, Etat de Vaud, juin 2000 «Recherche de méthode de projet intégrant les principes du développement durable. Rapport introductif», atelier nivo, Lausanne, septembre 2002 «0. Outils polyvalents. Test du logiciel Vitruvius en phase de projet», atelier nivo, Lausanne, septembre 2002 «1. Energie grise. Evaluation et comparaison de l’énergie grise de la construction selon la méthode SNARC», atelier nivo, Lausanne, septembre 2002 «Le solaire thermique. Principes, caractéristiques, économie et aspects politiques de l’installation proposée», document réalisé par le bureau d’études KellerBurnier, Lavigny, atelier nivo, Lausanne, janvier 2003 «Récupération des eaux pluviales. Evaluation d’un système de récupération des eaux pluviales et comparaison avec l’utilisation d’eau du lac», document réalisé par le bureau d’études KellerBurnier, Lavigny, atelier nivo, Lausanne, mai 2003 Publications Jalons 1,2,3, Etat de Vaud, Département des Infrastructures, Service des Bâtiments, Monuments et Archéologie, rédaction Revue TRACÉS, Katia Freda ; photos : Fred Hatt, Ivo Frei
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