Vieux-Lille Quel projet pour l'Avenue du Peuple Belge ? - Territoires en transitions
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Illustration page de couverture haut : GAËTAN DESWARTE, KANAE OTANI Illustration page de couverture bas : VINCENT CHARDON, MATHILDE RUE, BLANDINE RESSEGUIER, CAMILLE CONDEZ-GODZIEMBA DAMBSKA Photos : AXE CULTURE 3
Qui sommes nous ? Créée en 2005, l’objet de l’association Axe Culture est d’alimenter le débat public. Depuis, l’association a mené des travaux – études, concours d’idées, réunions publiques – qui ont été diffusés gratuitement, sur son site internet et auprès d’élus. Ces travaux traitent des politiques culturelles, de l’amanégement du territoire, de son développement économique, de son image ou encore de sa gouvernance. Notre association est libre. Elle ne reçoit aucune subvention et vit uniquement du travail de ses membres, passionnés de leur région Nord – Pas de Calais, de ses villes et de ses campagnes. Guidé par la liberté et la passion, Axe Culture a pu mettre sur la table des sujets importants avec un regard critique. Déjà publié en 2015 : Manifeste citoyen pour la région Nord – Pas de Calais Picardie. 4
Vieux-Lille : Un projet pour l’Avenue du Peuple Belge Novembre 2017 ISBN 978-2-9554032-1-1 Dépôt légal novembre 2017 Une publication de l’association Axe Culture www.axeculture.com / axeculture@axeculture.com www.twitter.com/axeculture / www.facebook.com/axeculture/ Edition : Axe Culture Responsables de la publication : Thierry Gouttefangeas et Thomas Werquin 5
JEANNE MAILLOTTE, PERDUE ET ASPHYXIEE EN PLEIN CŒUR DE L’AVENUE DU PEUPLE BELGE, SEMBLE NOUS APPELER « AU SECOURS » ! Source : Axe Culture 6
Plan de l’ouvrage REMERCIEMENTS ................................................................................. 9 PREFACE ................................................................................................ 11 INTRODUCTION .................................................................................. 19 1. UN TERRITOIRE DEGRADE AU CŒUR DU VIEUX-LILLE DONT L’AMENAGEMENT PRESENTE DE MULTIPLES ENJEUX .................................................................................................................. 25 A. UN TERRITOIRE DEGRADE AU CŒUR DU VIEUX-LILLE ......................... 26 B. UNE AVENUE DONT L’AMENAGEMENT PRESENTE DE MULTIPLES ENJEUX ............................................................................................................... 31 2. SYNTHESE DU CONCOURS : LES DEFIS DE LA REVALORISATION DE L’AVENUE ................................................... 33 A. (RE)CREER UNE CONTINUITE URBAINE ET PAYSAGERE ....................... 36 B. PROMOUVOIR LA PRESENCE DE L’EAU ..................................................... 44 C. REQUALIFIER ET MIEUX PARTAGER L’ESPACE PUBLIC .......................... 50 D. METTRE EN VALEUR LE PATRIMOINE ARCHITECTURAL SOUS LA FORME DE LARGES PARVIS ............................................................................. 59 E. ENVISAGER DE NOUVELLES INSTALLATIONS POUR DEVELOPPER L’ACTIVITE ......................................................................................................... 63 F. PRENDRE EN COMPTE LE PROBLEME DE LA PROSTITUTION ................ 69 3. LES PROJETS DES CANDIDATS ................................................... 73 CONCLUSION : UN PROJET QUI DOIT ETRE CONSTRUIT AVEC LES HABITANTS .................................................................................. 95 7
Remerciements Nous remercions tous ceux et celles qui ont participé à cette réflexion. Les candidats au concours d’idées pour l’avenue du Peuple Belge organisé par Axe Culture. Quel que soit le classement, leur contribution au débat est décisive. Cet ouvrage vise à militer pour la rénovation de l’Avenue du Peuple Belge, mais il veut également mettre en avant le travail de grande qualité de tous les candidats. Les illustrations présentées dans les pages suivantes ne sont malheureusement pas toujours assez lisibles en raison du format de la publication, et nous en sommes désolés. Il est cependant possible de les télécharger en haute définition sur notre site internet. Les personnes qui gravitent de près ou de loin autour d’Axe Culture et qui ont apporté leur soutien logistique ou financier, leur travail de rédaction ou de relecture. Mettre en œuvre un tel projet demande beaucoup d’énergie ! Merci en particulier à Pierre- François pour son aide. Merci enfin à Claire et Anne Sophie pour leurs encoura-gements. Stéphane Baly, membre du jury, que nous avons appelé pour préfacer cet ouvrage. Infatigable défenseur d’un développement durable du territoire et d’un juste partage de l’espace public, il croit comme nous dans la vertue du débat et dans la capacité des habitants à le faire progresser. Jean-François Accard, qui nous a accueilli au centre social du Vieux- Lille pour la restitution des travaux des candidats. La soirée mémorable qui a eu lieu est aussi le fruit de sa disponibilité. 9
Préface Stéphane Baly En préambule du concours d'idées pour l'Avenue du Peuple Belge, Axe culture posait comme ambition de susciter un débat sur l'espace public. Objectif tenu. Mais retenons d'abord ceci : la nature de l'exercice. Avant même le temps du débat, Axe Culture propose une méthode. Et l'association réalise à son modeste niveau ce que les collectivités osent trop peu expérimenter. La démarche a généré des rencontres originales au sein du quartier comme au sein des équipes. La forme du concours appelle à un urbanisme participatif. A elle seule, cette méthode inclusive questionne nos pratiques existantes. Les relations entre pouvoirs politiques, techniques et expertises d'usage sont interrogées. La forme du concours appelle à un urbanisme résolument participatif, à une dé-professionnalisation et une démocratisation de l’urbanisme. Reprenons… Un think tank citoyen dédié à l'espace urbain organise un concours d'idées. Tel qu'il est formulé, cet exercice prend toutes les apparences d’un véritable projet d'aménagement avec ses contraintes et ses attendus. Mais le concours démarre par une étape de diagnostic qui associe une observation de terrain partagée à une enquête préalable via un questionnaire en ligne. La connexion avec celles et ceux qui font vivre le secteur géographique retenu est permanente jusqu'à la présentation finale publique de tous les projets par les équipes – devant une salle bondée. Seul le jury s'est réuni à huis-clos mais la logique ne voudrait-elle pas qu'à terme ces échanges soient aussi rendus publics ? Et si l'on s'inspirait – en vrai – de la démarche... Et si l'avis de celles et ceux qui pratiquent une rue, une place, un quartier était pris en compte dès qu'émerge l'option d'aménager ? Ne serait-ce que pour vérifier sa pertinence ? Et si la rencontre avec les habitants était un 11
critère obligé de l'appel à projets ? Et si les citoyens prenaient connaissance de tous les projets soumis plutôt que d'être au mieux consultés une fois l'équipe choisie ? Et si des habitants participaient au choix de l'équipe ? Au regard de ce type d'approche, les formats tant de l'enquête publique que de la concertation préalable menés en aval des décisions apparaissent bien dérisoire. Associer pleinement les premiers concernés n'empêche pas de poser un cadre politique, bien au contraire (dans le cas de l'avenue du peuple belge, redonner sa place au piéton, assumer la frugalité de l'enveloppe…). Mais c'est accepter qu'un projet d'aménagement évolue au gré de l'intelligence collective. La démocratie participative trouve dans l’urbanisme son territoire d’expression naturel ; les conseils de quartier pourraient constituer de véritables laboratoires. Pour que l'institution sorte de sa frilosité, nous avons encore besoin d'initiatives comme celle d'Axe Culture. Ainsi peut-être un concours d'idées citoyen se prolongera-t-il un jour en une véritable réalisation urbaine. Une dimension intéressante du cadre posé - et bien plus encore des réponses apportées – a été d'inscrire clairement l'aménagement dans un objectif de frugalité en s'affranchissant d'une vision nostalgique de l'espace public. La requalification de l'avenue du peuple belge est pensée sans se référer à un passé supposé idéal. Les enjeux de l'espace public du 21e siècle ne sont plus ceux du 20e et d’un assainissement du quartier qui avait conduit au comblement du canal. La place du piéton, la question des usages sont ainsi au cœur de la réflexion et des propositions des équipes. La démocratie participative trouve dans l’urbanisme son territoire d’expression naturel. C’est à l’échelle locale – celle de la ville, voire du quartier – que les citoyens entendent apporter leur pierre à l’édifice. 12
Du canal de la Basse-Deûle à l’Avenue du Peuple Belge Hospice Général Source : Site internet Bibliothèque Municipale de Lille Source : Axe Culture 13
Du canal de la Basse-Deûle à l’Avenue du Peuple Belge Hospice Général Source : Site internet Bibliothèque Municipale de Lille Source : Axe Culture 14
Du canal de la Basse-Deûle à l’Avenue du Peuple Belge Halle aux Sucres Source : Site internet Bibliothèque Municipale de Lille Source : Axe Culture 15
Du canal de la Basse-Deûle à l’Avenue du Peuple Belge Palais de Justice Source : Site internet Bibliothèque Municipale de Lille Source : Axe Culture 16
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ENTREE DE L’AVENUE DU PEUPLE BELGE A PARTIR DE LA PLACE LOUISE DE BETTIGNIES CREDIT : GOOGLE 18
Introduction Il y a quelques années, la mairie de Lille envisageait la remise en eau de l’Avenue du Peuple Belge, là-même où aboutissait jusqu’aux années 1930 le canal de la Basse-Deûle. Le coût du projet conjugué aux difficultés financières que connaissent les pouvoirs publics ont amené à un report de la mise en œuvre du projet à une échéance inconnue. Plus récemment, la rénovation de la place Louise de Béttignies a été validée. Nous nous en félicitons car cette place, à la voirie défoncée et encombrée de voitures, était indigne à tous les niveaux de la beauté des vieilles maisons qui l’entourent. De même, les travaux en cours, entamés en cet été 2017, prévoient une réfection des pavés de nombreuses rues du Vieux-Lille, la rue de Gand notamment. Autant d’initiatives vont, bien sûr, dans le bon sens, mais on peut regretter que celles-ci ne soient en rien articulées avec un aménagement à venir de l’Avenue du Peuple Belge. Ce sont ces deux éléments qui nous ont amenés à lancer notre concours d’idées. D’abord, la remise en eau de l’Avenue du Peuple Belge nous semble aujourd’hui non réaliste et il apparaît nécessaire, au vu de son état « déprimant », d’envisager un scénario alternatif pour ce territoire localisé au cœur du vieux-Lille. Ensuite, la rénovation de la Place Louise de Bettignies ne peut avoir un sens et un véritable impact que si elle se poursuit vers l’avenue. Il n’est pas cohérent de rénover un espace public si ceux directement adjacents demeurent fortement dégradés. Avec la conviction que la rénovation de l’Avenue du Peuple Belge, artère stratégique et symbolique, est indispensable pour l’attractivité, aussi bien touristique que résidentielle, de Lille, Axe Culture a lancé un concours d’idées auprès de jeunes professionnels, pour montrer que de nombreuses solutions d’aménagement existent qui, notamment, mettent en valeur le patrimoine et proposent un juste partage de l’espace public. Au total, trente architectes, paysagistes ou urbanistes, répartis au sein de treize équipes ont travaillé sur les multiples possibilités d’aménagement de 19
l’Avenue du Peuple Belge. De Lille, de Paris ou de Bruxelles, ils nous ont apporté de nouvelles idées, des concepts novateurs et surtout la conviction qu’une nouvelle ambition est possible pour ce cœur du Vieux- Lille. Nous les remercions infiniment pour leur investissement et la qualité de leur travail. Nous les remercions pour leur implication et la mobilisation de leur compétence au service de ce territoire que nous aimons tous. Alors que l’intégralité des travaux des candidats est en ligne sur le site internet d’Axe Culture, ce document, en proposant une synthèse du concours d’idées auxquels tous ont participé, se veut une invitation à la réflexion et au débat, ouverts à tous. Le projet abandonné de remise en eau de l’Avenue du Peuple Belge devant l’ancien Hospice Général Sources : Voix du Nord 20
Dépassons la nostalgie d’un passé disparu Le Vieux-Lille a été sauvé de justesse. Il aurait pu subir le même sort que le quartier Saint-Sauveur, presque intégralement détruit puis réaménagé à partir des années 1930. L’Association « Renaissance du Lille Ancien » a, la première, contribué à cette sauvegarde, et chacun peut lui en être reconnaissant : attachée à la remise en eau d’une partie de l’Avenue du Peuple Belge, elle n’a pas voulu participer à notre réflexion, et nous le regrettons vivement car nous aurions pu amicalement confronter, aussi différents soient-ils, nos points de vue et - pourquoi pas ?- dessiner ensemble un projet commun. Sauvegarder ne consiste certes pas, à nos yeux, à recréer artificiellement un passé fantasmé. Chacun peut regretter le comblement des canaux du Vieux-Lille, canaux qui font encore le charme de Bruges, de Gand ou d’Amsterdam, mais l’Histoire n’est elle pas passée ? Nous pourrions aussi regretter la destruction de l’ancien Palais de Justice de Lille, et plus anciennement, celles du Palais Rihour ou de l’ancien Théâtre. Nous pouvons également enrager des destructions provoquées par la Première Guerre mondiale pendant laquelle des milliers d’édifices ont été détruits à travers toute la ville. Nous partageons la même peine et la même nostalgie ! Mais, il faut aussi parfois savoir faire le deuil de ce qui a disparu, non pour l’oublier mais pour aller de l’avant. Il y a tant à faire pour ce qui existe encore : de vieilles maisons délabrées, des espaces publics dégradés, de grands édifices à l’abandon, etc. Commençons par préserver ce qui n’a pas encore été détruit. Améliorons la qualité des espaces publics et entretenons, par un ambitieux travail pédagogique, la mémoire de ces lieux chargés d’Histoire. 21
L’avenue du Peuple Belge : un axe Vestiges des composé d’éléments remparts hétéroclites, au cœur du Vieux-Lille Avenue du Peuple Belge Ancien Hospice Général Institut d’Administration des Entreprises Parc de Jeux pour enfants Rue du Pont Neuf Halle aux Sucres Parking Sous- Lycée terrain Conservatoire de Musique Rue de Gand Palais de Justice Hospice Comtesse Place Cathédrale Louise de Bettignies Place du Lion d’Or 22
L’Avenue du Peuple Belge : une artère stratégique Porte d’entrée et de sortie du Vieux-Lille Source : Axe Culture Source : Axe Culture 23
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1. Un territoire dégradé au cœur du Vieux-Lille dont l’aménagement présente de multiples enjeux 25
a. Un territoire dégradé au cœur du Vieux-Lille Longue d’environ un kilomètre, l’Avenue du Peuple Belge, prolongée par l’Avenue Winston Churchill en direction de La Madeleine, ne présente pas, à l’échelle de l’agglomération, le même intérêt stratégique que celui du Grand Boulevard reliant Lille à Roubaix et Tourcoing, mais constitue à l’échelle de la ville de Lille une porte d’entrée et de sortie relativement importante. En effet, elle est directement liée au boulevard Robert Schuman qui fait quelque peu office de « périphérique Nord » en provenance ou en direction de l’Autoroute A1. A l’échelle du Vieux-Lille, elle constitue, en parallèle des rues Royale et Saint-André, le principal axe du Vieux-Lille qui, depuis les années 1980, se veut une des vitrines de la ville de Lille à l’image des aménagements dont ont pu profiter les rues Esquermoise, de la Grande-Chaussée ou de la Monnaie avec pour étendards les bâtiments rénovés de l’Hospice Comtesse et de la Cathédrale Notre-Dame de la Treille. L’état de quasi- abandon de cette avenue n’en est que plus criant : considérée comme une simple voie de passage, elle longe pourtant des bâtiments remarquables comme l’Hospice Général (aujourd’hui siège de l’IAE), la Halle aux sucres (siège de différents services publics : poste, commissariat, crèche, etc), le Palais de Justice (dont l’architecture décriée n’en est pas moins devenue un témoignage des années 1960-70), et les arrières de l’Hospice Comtesse, sans parler de quelques vieilles demeures privées parfois récemment rénovées. Autant de bijoux dont l’éclat reste malheureusement bien pâle du fait de cet écrin tellement négligé. Il suffit en effet de s’éloigner quelque peu en direction de la rue de Gand pour assister à un spectacle consternant : de la Place du Lion d’Or jusqu’à l’entrée de l’Avenue du Peuple Belge en passant par la Place Louise de Bettignies, s’offre à nos yeux la vue d’un espace public dégradé, doté d’un mobilier urbain désuet et dont la voirie donne, dans des rues pourtant plutôt étroites, la priorité à la circulation et au stationnement automobile. Les photos présentées dans cet ouvrage suffisent à contempler le spectacle affligeant de ce véritable capharnaüm urbain. Le patrimoine immobilier, d’ailleurs en grande partie rénové, qui borde ces 26
rues et ces places, mériterait pourtant un tout autre écrin. Heureusement, ce secteur commence à faire enfin l’objet d’une salutaire rénovation. L’Avenue du Peuple Belge, située en plein cœur du Vieux-Lille et qui en constitue la principale voie d’accès à partir des boulevards extérieurs, est une longue artère qui a été dessinée au moment du comblement du canal (au milieu des années 1930) qui s’étendait à son emplacement et qui correspondait aux quais du port de la Basse-Deûle. Ses origines ont fait d’elle un espace hétéroclite et relativement chaotique : bordé de bâtiments anciens ou plus récents, tels que l’Hospice Général, datant du ème 18 siècle et qui accueille aujourd’hui les locaux de l’IAE, la Halle aux ème sucres, élevée au 19 siècle et qui abrite différents services publics (poste, commissariat, crèche, mairie de quartier), le Palais de Justice, témoin anachronique au cœur de ce quartier historique de l’architecture controversée des années 1960, et les arrières de l’Hospice Comtesse dont ème les premières fondations remontent au 13 siècle, il est, en son centre, constitué successivement de pelouses râpées recouvrant un parking souterrain, d’un lieu de stationnement automobile disgrâcieux, d’un espace récréatif, doté de jeux pour enfants et d’un terrain de basket, que personne n’oserait cependant désigner sous le nom de jardin public, et enfin d’une vague étendue herbeuse aux fonctions indéterminées et fermée par quelques arbres et buissons. Le stationnement automobile y est omniprésent et la circulation établie de part et d’autre du vaste espace central ci-dessus décrit y est souvent intense. Enjambée par la Rue du Pont Neuf, dont le nom rappelle l’existence du canal originel et à laquelle elle est relié par une voie centrale pentue qui rompt sa continuité, l’Avenue du Peuple Belge doit aussi sa réputation à la prostitution qui s’y exerce traditionnellement le long de ses étroits trottoirs, ce qui n’est guère propice aux promenades familiales. Voilà donc un espace qui, pourtant doté d’atouts non négligeables, semble complètement délaissé et donne, aussi bien à ses résidents qu’à ses visiteurs, une image peu reluisante de la ville de Lille. L’actuelle équipe municipale, consciente de ce triste constat, avait envisagé un ambitieux projet de remise en eau d’une partie de l’Avenue du Peuple Belge voulant ainsi renouer avec un passé au cours duquel Lille était, comme encore aujourd’hui les villes flamandes de Bruges et de Gand, sillonnée par de multiples canaux. Aux réticences observées sur le bien-fondé de ce projet sont venus s’ajouter les obstacles liés au coût d’une telle entreprise. Aujourd’hui, cet aménagement a été mis de côté. 27
La question est de savoir s’il pourra un jour être de nouveau réactivé ou si la municipalité envisagera un autre projet. Quoi qu’il en soit, il apparaît aujourd’hui impensable de garder cette avenue en l’état. PARKING EN SURFACE ET PANNEAU PUBLICITAIRE AU MILIEU DE L’AVENUE Source : Axe Culture Il nous semble donc crucial de poser la question de la rénovation de cet espace à nos yeux stratégique et riche de multiples atouts. C’est dans ce contexte, caractérisé à la fois par un état déplorable de l’Avenue et par un projet municipal de remise en eau séduisant mais non réaliste, que l’association Axe Culture a décidé de lancer un concours d’idées auprès de jeunes architectes, paysagistes et urbanistes afin de faire émerger des idées d’aménagement originales et novatrices pour cet axe stratégique de Lille et, même au-delà, de sa métropole. Avec pour seule volonté d’inviter responsables politiques, habitants et usagers à la réflexion et au débat. 28
Source : Axe Culture 29
Source : Axe Culture 30
b. Une Avenue dont l’aménagement présente de multiples enjeux Le bref parcours de l’Avenue du Peuple Belge, présenté précédemment, peut nous permettre d’identifier quelques grands enjeux et de définir les principaux défis à relever. 1. Inscrire le projet de rénovation de l’Avenue du Peuple Belge au cœur d’un programme d’aménagement global du Vieux-Lille qui se révèle et doit rester une des « vitrines » les plus attractives de la ville de Lille et de sa métropole. 2. Promouvoir un espace public de qualité en établissant un meilleur partage de la voirie entre ses différents usagers (piétons, cyclistes, automobilistes) et en valorisant de façon harmonieuse éléments végétaux et mobilier urbain, ce qui permettra l’installation de nouvelles activités commerciales et récréatives (boutiques, bars, restaurants, galeries d’art, etc). 3. Mettre en valeur un patrimoine architectural riche et diversifié : l’Hospice Comtesse, l’Hospice Général, la Halle aux sucres, le Palais de Justice, et nombre d’anciennes demeures privées pour beaucoup d’entre elles déjà rénovées. 4. Envisager, en ce cœur de la ville de Lille, la création d’un véritable lieu de mémoire consacré à l’histoire de Lille et de ses canaux, destiné aussi bien aux visiteurs qu’aux habitants mêmes de la métropole lilloise. 5. Faire face au problème de la prostitution présent en ce cœur du Vieux-Lille, et à celui de la criminalité qui lui est lié, sans se contenter de déplacer le problème dans un autre secteur. 6. Inventer de nouveaux processus de production de l’espace public en articulant plus harmonieusement le rôle des collectivités locales avec celui d’acteurs privés, dans un contexte de restriction des dépenses publiques. 31
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2. Synthèse du concours : les défis de la revalorisation de l’Avenue 33
Un concours d’idées qui a tenu ses promesses Le concours d’idées a été lancé en 2015, avec la conviction que les jeunes architectes, urbanistes et paysagistes sollicités pourraient apporter des solutions d’aménagement innovantes. Notre démarche a tenu ses promesse puisque treize équipes rassemblant une trentaine de personnes ont fait des propositions riches et variées. Les travaux réalisés ont tous présenté le même souci de : - requalifier un espace public jugé fort dégradé - rationaliser la voirie - promouvoir la présence de la « nature » - valoriser le patrimoine architectural - « apaiser » un territoire considéré jusqu’alors comme un simple lieu de passage pour le transformer en un espace qui invite à la flânerie et à la contemplation La tâche semble immense et même utopique : à regarder l’état de l’avenue et à entendre certains discours archaïques ou arc-boutés, nous apparaissons comme de « doux rêveurs ». Pourtant, il suffit de visiter les centres anciens de Lyon, Bordeaux, Montpellier ou Strasbourg et bien entendu certains secteurs du Vieux Lille pour se rassurer : tout ceci est possible ! Encore faut-il faire preuve d’un peu d’imagination et d’ambition. Les illustrations présentées dans les pages qui suivent nous invitent au rêve. Un rêve réalisable et dont tous les acteurs de la ville profiteraient, habitants , commerçants, touristes, amoureux de l’architecture ou simples promeneurs. Les projets que nous présentons dans les pages qui suivent visent à faire de l’Avenue du Peuple Belge une artère « apaisée » où se mêleraient de multiples fonctions et activités, où la voiture serait plus discrète, où l’espace public serait plus agréable et aménagé pour tous les modes de déplacement, où le patrimoine architecural serait mis en valeur. 34
La rénovation de l’Avenue du Peuple Belge doit répondre à plusieurs grands principes complémentaires : a. Recréer une continuité urbaine et paysagère b. Valoriser la présence de l’eau, pour renouer, sans excès de nostalgie, avec la mémoire des lieux c. Requalifier et mieux partager l’espace public d. Mettre en valeur le patrimoine architectural sous la forme de larges parvis e. Envisager de nouvelles constructions pour créer de nouvelles activités et pour trouver des modes de financement novateurs f. Prendre en compte le problème de la prostitution * Tous les dossiers des candidats sont disponibles sur le site internet d’Axe Culture. 35
a. (re)Créer une continuité urbaine et paysagère L’Avenue du Peuple Belge est aujourd’hui une succession d’espaces hétéroclites qui ne constituent ni une continuité paysagère, ni une continuité de cheminement. Zone d’accès à un parking souterrain, trottoirs étroits, larges voies pavées ou bitumées destinées à la circulation automobile, zones de strationnement latérales et même centrale, rampe d’accès à un pont rappelant la présence de l’ancien canal, voirie en grande partie dégradée, pelouses aux herbes folles ou rapées (etc.) : rien n’invite personne à s’attarder ou à se promener le long de l’avenue du Peuple Belge. La création d’une continuité urbaine et paysagère faciliterait une continuité de cheminement plus lisible à chacun des usagers de l’avenue, qu’ils soient piétons, cyclistes ou automobilistes : cela doit constituer un objectif central. Idées phares Ø Création d’une continuité de cheminement. Ø Création d’une trame verte voire d’un grand parc ouvert d’un bout à l’autre de l’avenue. Ø Harmonisation de l’espace public par le choix le plus approprié possible des espèces végétales, du mobilier urbain et des matériaux utilisés pour la voirie 36
Aujourd’hui, une avenue partagée en séquences hétéroclites Face à l’Hospice Général, une vaste étendue bordée d’arbres et de voitures Source : Axe Culture Source : Axe Culture 37
Aujourd’hui, une avenue partagée en séquences hétéroclites Face à la Halle aux Sucres, un espace récréatif « minimaliste » Source : Axe Culture Source : Axe Culture 38
Aujourd’hui, une avenue partagée en séquences hétéroclites Au-delà du Pont Neuf, le « règne sans partage » de l’automobile Source : Axe Culture Source : Axe Culture 39
Aujourd’hui, une avenue partagée en séquences hétéroclites Devant le Palais de Justice, une étendue bordée d’arbres et de voitures Source : Axe Culture Source : Axe Culture 40
Aujourd’hui, une avenue partagée en séquences hétéroclites Vers la place Louise de Bettignies, un espace « très vague »… Source : Axe Culture Source : Axe Culture 41
DEMAIN, UNE COULEE VERTE D’UN BOUT A L’AUTRE DE L’AVENUE AVEC UNE VERITABLE CONNEXION AU JARDIN DE L’HOSPICE COMTESSE. ILLUSTRATION : EQUIPE HAUBOURDIN Continuité de cheminement Jardin de l’Hospice Comtesse 42
DEMAIN, LA CONTINUITE PAYSAGERE : PRESQU’UNE EVIDENCE ILLUSTRATION : EQUIPE CHARLESTON 43
b. Promouvoir la présence de l’eau L’eau est, comme son nom le rappelle, au cœur de l‘histoire de Lille avec des canaux autrefois omniprésents, aujourd’hui comblés, et notamment en l’emplacement de l’Avenue du Peuple Belge où, jusqu’aux années 1930, coulait les eaux de la Basse-Deûle. Au-delà de ce canal, l’eau, dont est portant née la ville de Lille, est rare, et on ne peut que s’en étonner et s’en attrister : quelques modestes fontaines égayent certes les places du Général de Gaulle, de la République ou de la Gare, et le bassin du Quai du Wault rappelle l’emplacement du port de la Haute Deûle mais, au regard des aménagements réalisés à Bordeaux ou à Troyes pour ne citer que ces deux exemples, quel manque d’ambition ! L’Avenue du Peuple Belge, au regard de son histoire, serait le lieu idoine pour combler ce triste manque : elle pourrait ainsi voir de nouveau l’eau jaillir, mais bien autrement que sous la forme d’un morne canal : fontaines, bassins, noues, jets d’eau, il y a tant à imaginer pour rappeler, panneaux pédagogiques à l’appui, qu’en ces lieux, en effet, venaient accoster de nombreuses péniches. Autant de possibilités qui inviteraient à l’enchantement, au jeu, à la détente, à la contemplation. Idées phares Ø Création d’un bassin d’eau sous l’actuel Pont neuf, en détruisant la rampe routière existante. Ø Sur le reste de l’avenue plusieurs fontaines et noues permettent d’enchanter l’espace et de participer à la gestion des eaux pluviales. Ø Sur l’avenue, des structures parapluies au-dessus de bancs publics ou de jeux permettent de se protéger de la pluie. 44
HIER : LE PONT NEUF ENJAMBANT LE CANAL DE LA BASSE-DEULE Source : Site internet Bibliothèque Municipale de Lille Source : Site internet Bibliothèque Municipale de Lille 45
AJOURD’HUI : LE PONT NEUF ET SA RAMPE D’ACCES Source : Axe Culture 46
DEMAIN : L’EAU, UN RAPPEL HISTORIQUE MAIS AUSSI UN ELEMENT STRUCTURANT DU PROJET PAYSAGER ILLUSTRATION : EQUIPE SARAJEVO LA CREATION D’UN PLAN D’EAU PERMET DE REDONNER AU PONT NEUF SA FONCTION PREMIERE ILLUSTRATION : EQUIPE HAUBOURDIN 47
EXEMPLES D’AMENAGEMENTS VALORISANT L’EAU DANS D’AUTRES VILLES FRANÇAISES TROYES, DANS LE CENTRE-VILLE SOURCE : HTTP://TROYES-EN-CHAMPAGNE.BLOGSPOT.FR/ NIORT, JEUX D'EAU DES JARDINS DE LA BRECHE SOURCE : HTTP://WWW.NIORTMARAISPOITEVIN.COM/ 48
BORDEAUX, LES QUAIS DE LA GARONNE SOURCE : BORDEAUX-TOURISME.COM NICE, LA PROMENADE DU PAILLON SOURCE : HTTP://PENAPAYSAGES.COM/ 49
c. Requalifier et mieux partager l’espace public Créer un espace public de qualité Le Vieux Lille est un territoire d’exception qui, par l’ambiance originale qui y règne, l’animation de ses commerces et de ses terrasses, le reflet gris- bleu de ses pavés, le riche ornement des façades de ses anciennes maisons suscite la fierté de ses habitants et la curiosité des visiteurs. Nul bâtiment d’exception, comme celui d’une cathédrale gothique ou celui d’un palais de la Renaissance, mais un entrelacs de vieilles rues au tracé sinueux, les vestiges d’anciens remparts, et des maisons à l’architecture variée témoins des influences multiples auxquelles la ville, à l’histoire tourmentée, fut soumise (flamande, espagnole, française)… Autant de traces d’une ville à la fois commerçante et industrielle, place forte, siège de différents pouvoirs civils, religieux, universitaires… Une ville composite qui a connu les crises et les renouveaux, les destructions et les reconstructions… Au sein de la métropole lilloise, le Vieux-Lille constitue un atout touristique majeur. Bien entendu, la métropole lilloise compte d’autres sites remarquables comme le Musée des Beaux-Arts, le Parc Barbieux à Roubaix et les châteaux de l’industrie textile, pour ne citer que ceux-là… Mais le Vieux Lille constitue le lieu le plus ancien, le plus riche, le plus animé... Pour atteindre l’excellence, les centres anciens ne peuvent se contenter d’un patrimoine architectural remarquable. Il est également nécessaire de le mettre en scène en l’intégrant au sein d’un espace public de qualité qui saura le valoriser. Rien ne sert d’arborer de jolis bijoux s’ils sont sertis dans un écrin dégradé ! C’est malheureusement le cas de nombreux bâtiments du Vieux- Lille, tels que ceux qui bordent les affreuses Places du Lion d’Or ou Louise de Bettignies. Et c’est aussi le cas de notre Avenue du Peuple Belge dont nous avons précédemment rappelé le consternant état. N’est-il pourtant pas bordé par l’Hospice Comtesse, la Halle aux sucres, l’Hospice Général, et le controversé Palais de Justice ? 50
Redonnons de la grâce à l’Avenue du Peuple Belge et nous redonnerons leur éclat à des édifices dont la « beauté » est méconnue car aucunement mise en valeur ! Idées phares Ø L’espace public est transformé pour laisser une place privilégiée à la « nature » et aux espaces récréatifs. Le promeneur doit pouvoir déambuler paisiblement d’un bout à l’autre de l’Avenue. Ø Un soin particulièrement attentif doit être porté au choix des matériaux constituant la voirie, du mobilier urbain et de l’éclairage public, et ce, de façon harmonieuse et cohérent tout au long de l’Avenue LA VOIRIE SE TRANSFORME EN ESPACES DE VIE OU LA « NATURE » TROUVE UNE PLACE PRIVILEGIEE ILLUSTRATION : EQUIPE PONTAUT COMBAULT 51
UNE REAPPROPRIATION DE L’AVENUE PAR LES HABITANTS ILLUSTRATION : EQUIPE PONTAULT COMBAULT 52
REEMPLOI DE L’ANCIEN LIT DU CANAL ET DES QUAIS POUR CREER DU RELIEF ET DES ESPACES DE PROMENADE ILLUSTRATION : EQUIPECHARLESTON 53
Promouvoir un partage plus équitable de l’avenue La mise en œuvre d’un espace public de qualité dépend aussi étroitement de la capacité à partager celui-ci de façon plus équitable entre ses différents usagers. e Après une seconde partie du 20 siècle qui a vu la voiture occuper une très e large partie de l’espace public, les villes du 21 siècle, ont pour beaucoup rendu l’espace au piéton. Ce choix n’a pas seulement été dicté par des aspirations écologiques, mais aussi par des soucis d’ordre économique et fonctionnel : « apaiser » l’espace et mettre en valeur le patrimoine architectural pour faire de ces villes des territoires attractifs pour les habitants et les touristes. Ainsi, ce plus juste partage de l’espace public n’est pas seulement une question d’équité entre véhicules motorisés, vélos et piétons, c’est aussi une question d’attractivité et donc de développement économique et urbain. « Attirez les habitants et vous attirerez les promoteurs ! Attirez les touristes et les habitants, et les commerçants développeront leur activité! ». Au-delà du seul souci d’attractivité lié à la promotion d’une meilleure qualité de vie se pose un problème d’ordre pratique : on ne peut faire une promotion (nécessaire) du vélo si les routes sont dangereuses. On ne peut inviter l’habitant à flâner en ville et à découvrir le patrimoine si les trottoirs sont étroits, abîmés et occupés par les voitures. Une ville attractive est une ville dans laquelle, pour les habitants comme pour les touristes, l’espace public doit être accessible. Il ne s’agit pas pour autant de bannir complètement l’usage de l’automobile, parfois seul moyen de locomotion pour les résidents des lointaines zones périurbaines mal desservies par les transports en commun qui, à défaut de pouvoir accéder au centre-ville, risquent de préférer la fréquentation des zones commerciales périphériques. Et on peut comprendre l’inquiétude de bien des commerçants qui estiment, pour la prospérité de leurs activités, indispensable la présence à proximité de zones de stationnement. C’est une question très complexe qui dépasse par son ampleur les seuls enjeux de l’aménagement de l’Avenue du Peuple Belge, mais sa rénovation oblige à trouver le meilleur dosage possible 54
entre les revendications légitimes de chacun. Il ne faut pas non plus oublier que le Vieux-Lille est une zone relativement dense d’habitat, et qu’il faut permettre à ses résidents d’accéder aussi en voiture à proximité de chez eux… L’attractivité n’est pas seulement liée à l’accessibilité mais aussi au plaisir que l’on prendra à contempler la ville, son architecture et ses vitrines, sur des trottoirs élargis, soignés et fleuris. La construction de vastes parkings-relais en bordure du Vieux-Lille, sous la forme de silos que l’on peut rendre le moins disgrâcieux possible, pourrait être une solution adaptée, à condition qu’on l’assortisse de la création de navettes gratuites menant jusqu’à la place Louise de Bettignies (un ticket de stationnement d’au moins 1h valant un trajet aller-retour par navette). Le calibre des bus urbains, empruntant actuellement l’axe qui mène du boulevard Carnot jusqu’en direction de La Madeleine en passant notamment par l’Avenue du Peuple Belge, défonce, par leur poids, les chaussées du Vieux-Lille et ne devraient plus, dès maintenant, emprunter ce circuit, pour laisser la place aux navettes du Vieux-Lille d’ailleurs déjà existantes… Idées phares Ø Les deux voies de circulation automobile sont ramenées du même côté de l’avenue, libérant un côté de l’avenue pour les déplacement doux, éventuellement un tram, et pour des terrasses. Ø Le parking qui fait face au Palais de Justice est supprimé et les zones de stationnement latéral sont restreintes Ø La construction de parkings-relais en bordure du Vieux-Lille pourrait être envisagée 55
AUJOURD’HUI : UN « ENFER » POUR LES CYCLISTES 56
DEMAIN : UNE AVENUE OU IL EST POSSIBLE DE CIRCULER EN VELO ET A PIED ILLUSTRATION : EQUIPE AUCKLAND LA « NATURE » EN VILLE, POUR MIEUX PARTAGER L’ESPACE PUBLIC ILLUSTRATION : EQUIPE AMSTERDAM 57
LA VOIRIE OPTIMISEE : UN SEUL COTE DEVOLUE A LA CIRCULATION AUTOMOBILE POUR LAISSER DE L’ESPACE, DE L’AUTRE COTE, A LA PROMENADE ET AUX TERRASSES ILLUSTRATION : EQUIPE PARIS 58
d. Mettre en valeur le patrimoine architectural sous la forme de larges parvis Dans un musée, nul ne songerait à mettre une plante devant un tableau, ou à accrocher ce tableau dans un couloir étroit. Avenue du Peuple Belge pourtant, la magnifique façade de l’ancien Hospice Général est à l’ombre d’une rangée de peupliers, ne permettant pas au visiteur d’admirer l’ensemble de ses lignes harmonieuses. Peu étonnant que ce prestigieux édifice soit méconnu des Lillois : il est presque invisible ! Même constat pour la Halle aux sucres et le Palais de Justice… Seule la chapelle de l’Hospice Comtesse, derrière laquelle s’élève les flèches de la cathédrale de la Treille, s’offre « librement » au regard, mêlant son blanc éclat aux façades rouges qui l’entourent, et c’est là l’un des plus charmants points de vue du Vieux-Lille, ou plutôt pourrait être un des plus charmants point de vue du Vieux-Lille. Car devant ces édifices remarquables, s’offre le spectacle consternant d’un espace dégradé : trottoirs abîmés, circulation et stationnement automobile omniprésents, mobilier urbain hétéroclite et disgrâcieux. Notre patrimoine architectural mérite d’être mis en scène, présenté au visiteur tel une oeuvre d’art. Pour cela, créons de larges parvis, dégagés, face aux plus beaux édifices de l’avenue. Créons les conditions pour que les promeneurs, habitants ou touristes, puissent contempler l’harmonieuse façade de l’Hospice Général, découvrir les larges baies de la Halle aux sucres et s’étonner des lignes élancées et quelque peu incongrues du Palais de Justice ! Idée-phare Ø L’Hospice Comtesse, le Palais de Justice, l’Hospice Général et la Halle aux Sucres sont mis en valeur par la création de vastes parvis. 59
Aujourd’hui, des monuments remarquables aux façades occultées e → l’Hospice Général, bâtiment datant du 18 siècle Source : Axe Culture → la Halle aux Sucres, vaste entrepôt datant du XIXème siècle Source : Axe Culture 60
Demain, des monuments visibles et mis en valeur L’HOSPICE GENERAL, MIS EN SCENE, « COMME SUR UN PLATEAU » AVEC LA RATIONALISATION DE LA VOIRIE POSITIONNEE COTE SUD ILLUSTRATION : EQUIPE PARIS ILLUSTRATION : EQUIPE SARAJEVO 61
LA HALLE AUX SUCRES REMANIEE ET MISE EN VALEUR AVEC LA CREATION D’UN LARGE ESPACE RECREATIF DEVANT SA FAÇADE ILLUSTRATION : EQUIPE SARAJEVO 62
e. Envisager de nouvelles installations pour développer l’activité Dans le Vieux Lille, les commerçants paient leur loyer une fortune du fait de la pression foncière s’y exerçant, ce qui met en péril leur équilibre financier et pousse même parfois certains d’entre eux à la faillite, malgré une clientèle bien présente. Dans le même temps, les collectivités locales manquent de ressources pour financer leurs travaux. La rénovation de l’Avenue du Peuple Belge serait l’occasion de valoriser une partie du foncier disponible pour y construire de nouveaux commerces. La vente du foncier disponible- si elle est réglementairement possible- permettrait à la collectivité de dégager des ressources pour mettre en valeur l’espace public, et la construction d’autres locaux permettrait de faire émerger une offre commerciale supplémentaire favorisant la baisse du montant des loyers. Cette hypothèse qu’on peut juger iconoclaste se heurterait sûrement à de vives oppositions, mais a le mérite de poser le débat sur la répartition des tâches de production de l’espace entre pouvoirs publics et acteurs privés, dans un contexte, faut-il le rappeler, de fortes restrictions budgétaires… Notons que la construction de nouveaux bâtiments ne signifie pas nécessairement une perte de la superficie de l’espace public : c’est le cas de l’aménagement de la Praça de Lisboa à Porto qui a vu la possibilité de reconstituer un véritable espace public sous la forme de terrasses au niveau des toitures des surfaces commerciales établies. Idée phare Ø Réaliser de nouvelles constructions pour des commerces, terrasses et lieux d’exposition (etc) permettant de valoriser financièrement le foncier disponible, mais aussi d’animer le secteur. Ces constructions doivent rester modestes pour ne pas entraverla réalisation de la « coulée verte et bleue »envisagée le long de l’Avenue. 63
HIER, LES HALLES SAINT MARTIN SITUEES AU BOUT DU CANAL DE LA BASSE DEULE A L’ANGLE DE L’ACTUELLE PLACE LOUISE DE BETTIGNIES (ANCIENNE PLACE SAINT MARTIN) Source : Bibliothèque Municipale de Lille AUJOURD’HUI, UN ESPACE SANS FONCTION Source : Axe Culture 64
DEMAIN, DES CONSTRUCTIONS LE LONG DE L’AVENUE POUR ACCUEILLIR DE NOUVELLES ACTIVITES COMMERCIALES OU CULTURELLES ILLUSTRATION : EQUIPE LHASSA ILLUSTRATION : EQUIPE LHASSA 65
ILLUSTRATION : EQUIPE PARIS ILLUSTRATION : EQUIPE SARAJEVO 66
DEMAIN, DES TERRASSES AU MILIEU DE L’AVENUE AVEC DE PETITES CONSTRUCTIONS INTEGREES DANS UN PAYSAGE DE QUALITE. ILLUSTRATION : EQUIPE OULAN BATOR 67
Un exemple d’espace public aménagé au- dessus d’une surface bâtie : à Porto, Praça de Lisboa PHOTOS : AXE CULTURE 68
f. Prendre en compte le problème de la prostitution La sulfureuse réputation de l’Avenue du Peuple Belge ne tient pas tant à son caractère dégradé qu’à l’exercice d’une activité générant une fréquentation qu’on peut juger peu recommandable : la prostitution. C’est un fait : en permanence, de nuit comme de jour, des femmes s’y prostituent, elles sont parfois très jeunes, presque toujours exploitées, souvent en détresse. On peut être scandalisé par le « commerce du sexe », « immoral » et « dégradant ». Mais on doit aussi et surtout être attristé par l’exploitation, l’oppression, la violence et la misère qui se cachent souvent derrière la prostitution et qui nécessitent une réponse adaptée. Pourquoi la prostitution en ces lieux ? Porte d’entrée dans le Vieux-Lille à partir du boulevard périphérique nord, l’avenue est assez facilement accessible, tout en restant à la marge, et son caractère dégradé peut apparaître propice: un espace considéré comme délaissé est, en effet, d’autant plus enclin à accueillir des activités interlopes. Le fonctionnement de l’avenue avec une voirie circulaire est également propice à la prostitution, puisqu’elle permet aux « clients » de faire plusieurs passages. La rénovation de l’avenue aurait sûrement pour conséquence le déplacement de la prostitution dans un autre secteur : on pourrait s’en réjouir et croire le problème résolu puisqu’éloigné de lieux devenus plus favorables aux sorties familiales, mais ce serait une posture hypocrite. La prostitution fait l’objet d’un débat récurrent : un jour pour son interdiction, un autre pour son contrôle, un autre pour la réouverture des « maisons de tolérance ». Sans vouloir prendre position ici sur un sujet plus complexe que certains laissent le supposer, et au risque de défendre un avis « politiquement incorrect », nous ne saurions aborder la question de l’aménagement de l’Avenue du Peuple Belge sans prendre en compte le problème de la prostitution Poser la question de la prostitution le long de l’Avenue du Peuple Belge, ce n’est pas vouloir faussement la supprimer en la déplaçant sur d’autres 69
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