ACTU FNE SAVOIE - FNE AURA
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actu FNE
Savoie
chambéry, arbres menacés P. 4
LA RETENUE COLLINAIRE DE LA FéCLAZ P. 8
motoneiges électriques P. 18
n° 78 >
déc-jan-fév 2022/23
Toute l’actualité de la protection de la nature en Savoie
édito Au sommaire
Crise énergétique et climatique, 3 le scot maurienne : résumé et état des lieux
quelle issue ?
4 chambéry, arbres menacés
La préoccupation écologique fait aujourd’hui consensus. Le
terme de « biosphère » apparaît dans les années 1960 et 6 un guide pour réduire la pollution lumineuse
le fait de raisonner d’un point de vue global transforme les
manières de se représenter l’environnement. En utilisant des 8 la retenue collinaire de la féclaz
notions de politiques publiques, les lanceurs d’alerte des an-
nées 1970 ont réussi à amplifier leur mobilisation pour faire formation illustration naturaliste
en sorte que la défense de l’environnement appartienne à la
11
catégorie de ces grandes causes mondialisées. Désormais,
tous les projets pouvant avoir un impact sur l’environnement 12 notes de lecture
sont soumis à des procédures d’évaluation de leur impact
environnemental. 15 retour sur un stage d’éco-citoyenneté
La formule « L’environnement, ça commence à bien faire » les sols sont la clé de notre survie !
lâchée par Sarkozy a fait école : dans une période de forte 16
tension énergétique et de relance économique, un décret
autorise les préfets de département et de région à « déroger 18 MOTONEIGES électriques : pas écolos du tout !
aux normes arrêtées par l’administration de l’État pour
un motif d’intérêt général ». L’objectif est de déroger à ces 20 le rôle de l’hydroélectricité
normes « afin de tenir compte dans certaines conditions,
des circonstances locales », dans divers domaines tels que
22 carrières de gypse en maurienne
l’environnement, l’agriculture et la forêt, l’aménagement
du territoire, la construction et l’urbanisme. En effet, sous
couvert d’intérêt général et de procédure accélérée, certains 24 réacteurs en chaîne, bugey enchainé
projets pourront être exonérés de procédure d’autorisation,
et donc parfois même d’étude d’impact. échanges avec julien fraye, photographe
26
L’Autorité environnementale ne cache pas ses préoccupa-
tions dans un avis : « L’un des principaux effets de la loi 28 coupe des budgets pour l’environnement
d’accélération et de simplification de l’action publique est
de réduire significativement le champ de la participation du 30 cop 27, en dessous de la moyenne
public, sans apporter de garantie nouvelle sur la façon dont
les avis du public seront pris en compte suite aux consulta- éducation à l’environnement en images
tions électroniques. » Le ton est donné.
33
Sans nourrir la polémique de ce qui relève d’une réelle 34 accueil de 3 stagiaires / 1 service civique
mutation de stratégie ou d’un verdissement de façade, il
est évident que certaines entreprises jouent de ces deux vie associative
démarches : échapper aux normes et verdir leur image.
36
Certaines Organisations non gouvernementales (ONG)
nouent des partenariats avec des entreprises au nom du
développement durable. Ces partenariats renforcent la
diffusion dans l’univers marchand de normes écologistes
qui donnent un tour inédit aux campagnes de sensibilisation
actuelle (énergies renouvelables, consommation durable ou
équitable, etc.).
Il nous appartient donc d’être très vigilants dans nos orien- Document édité par France Nature
tations futures et ne pas cautionner par notre silence les Environnement Savoie
Responsable publication
consultations publiques. > Thierry DELAHAYE
Conception Graphique
> Agnès BIAU
Marc PEYRONNARD, Crédit photo couverture
président de FNE Savoie > © Dan Cutler on Unplash
Dépôt légal : décembre 2022
ISSN 2826-6641
France Nature Environnement est la fédération française des
associations de protection de la nature et de l’environnement. C’est la France Nature Environnement Savoie
26 passage Sébastien Charléty 73000 CHAMBéRY
porte-parole d’un mouvement de 3 500 associations, regroupées au sein Tél. 04 79 85 20 03 > savoie@fne-aura.org > www.fne-aura.org/savoie
de 74 organisations adhérentes, présentes sur tout le territoire français, en
métropole et outre-mer.
montagne
Le SCOT Maurienne : résumé et état
des lieux
Le Schéma de cohérence territoriale (SCOT) Ces extensions des domaines skiables se
a été prévu par la loi du 13/12/2000 dite loi doublent de la création de 22 800 lits touristiques
« Solidarité et renouvellement urbain » (SRU). alors qu’il existe déjà 166 400 lits touristiques
Le SCOT permet une réflexion et une dont 89 500 sont considérés comme des lits
planification intercommunale à l’échelle d’un froids !
large bassin de vie. Dans les réflexions conduites dans la préparation
du SCOT de 2014 à 2019, FNE a fait valoir,
La vallée de la Maurienne, longue de 120 km, à plusieurs reprises, un avis défavorable aux
constitue un territoire bien identifié dans le UTN envisagées. FNE Savoie a déposé un avis
département de la Savoie. défavorable sur ce projet de SCOT le 30/09/2019
Dès 2014, des études ont été lancées par le avec FNE Aura.
Syndicat du pays de Maurienne (SPM) et ont Les commissaires enquêteurs ont émis un
produit : avis défavorable pour l’UTN « Croix du Sud »
• Un Projet d’aménagement et de développement Valmeinier-Orelle-Valfréjus et des réserves pour
durables (PADD) en 2017, l’UTN liaison Albiez-Karellis et Val-Cenis.
• Un Document d’orientations et d’objectifs en Et pourtant… Le SCOT Maurienne, comportant
2018 (DOO). les dix UTN et prévoyant la création de 22 800
Le projet de SCOT a été approuvé le 25/02/2020 lits touristiques, a été approuvé le 25/02/2020 par
par le SPM. le SPM.
Le SCOT affirme en orientation prioritaire : Compte tenu du maintien des projets
« Préserver les espaces et les paysages naturels destructeurs pour les milieux naturels, FNE
mauriennais et la biodiversité qui les habite ». Le Aura et FNE Savoie ont déposé un recours
« capital nature » est reconnu comme la première contre le SCOT le 05/08/2020 devant le Tribunal
richesse de la vallée. administratif (TA) de Grenoble.
Malheureusement, comme le note la Mission Ce recours n’est pas suspensif et des travaux
régionale d’autorité environnementale (MRAE), prévus dans les UTN ayant été engagés
des mesures de dérogation prévues par le SCOT principalement à Aussois, FNE Aura et Savoie
« sont exorbitantes et traduisent l’absence totale ont demandé et obtenu un référé suspension
d’attention du SCOT à la grande qualité des portant sur les UTN Albiez-Karellis, Valloire,
paysages remarquables qui constituent pourtant « Croix du Sud », Aussois et Val-Cenis.
l’un des facteurs majeurs d’attractivité du pays de Parallèlement FNE Aura et FNE Savoie ont
Maurienne ». déposé des recours pour des équipements
C’est particulièrement le cas des dix opérations prévus et liés aux UTN à Aussois, à Montricher-
d’équipement touristique dites Unités touristiques Albanne ainsi que pour le Plan local d’urbanisme
nouvelles (UTN) qui prévoient (pour sept d’entre (PLU) d’Aussois.
elles) une extension considérable (150 ha de
pistes nouvelles) des domaines skiables dans Le jugement du TA de Grenoble est attendu sur
des sites naturels jusqu’alors non équipés pour le ces différents recours.
ski : extension des domaines skiables à Saint-
François Longchamp, Albiez-Karellis, Valloire, André Collas
Valmeinier-Orelle-Valfréjus, La Norma, Aussois, Secrétaire FNE Savoie
Val-Cenis.
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 3
biodiversité
chambéry, arbres menacés
© Christine BERNARD
Nous avons déjà relevé la nature le plus gros des cèdres, qui penche sur l’avenue
symbolique et l’intérêt écologique des de Lyon, présenterait des signes de faiblesse
arbres urbains, en particulier ceux situés qui, pourraient entrainer une déstabilisation du
dans les parcs historiques des villes, mur d’enceinte, voire - pour les plus pessimistes
- une chute. Cette situation est très probablement
ou constituant un alignement. Ceux-
dûe à une ancienne coupe de charpentière qui
là, comme les autres en ville, doivent
a provoqué un déséquilibre de la couronne. La
bénéficier d’une attention particulière, décision d’abattage a été soumise à l’avis de
notamment au niveau de leur collet pour la Commission départementale de la nature,
laisser aux racines la place qui leur est des paysages et des sites (CDNPS) qui a
due et permettre l’infiltration de l’eau de globalement donné un avis favorable (sauf
pluie à leurs abords. abstention FNE). Abattu par étape, l’arbre ne
devrait pas être dessouché. D’après la note
Entrée de la préfecture explicative de la préfecture, il serait préconisé
Aujourd’hui, nous sommes préoccupés par un examen attentif des deux cèdres restants à
le devenir des arbres (trois cèdres et deux proximité et d’un des deux micocouliers pour voir
micocouliers), qui agrémentent l’entrée du jardin si l’abattage est nécessaire à moyen terme ou
de la préfecture et du Conseil départemental s’ils peuvent perdurer sans déstabiliser le mur
(place Caffe), dans l’enceinte du château des d’enceinte. Avant toute décision, « la réalisation
Ducs de Savoie concernée par le site classé d’une visite de contrôle dans les 3 à 5 ans des
« Jardins et esplanade du château ». arbres restants » est préconisée.
D’après expertise de l’Office national des forêts, n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 4
© Christine BERNARD
Avenue de la Boisse
Suite à notre dossier sur les arbres en ville (Actu
n° 74, juin 2021) nous restons vigilants sur la
maintenance des arbres d’alignement existants
notamment à l’entrée nord de Chambéry,
© Christine BERNARD
en cours de restructuration. Il s’agit pour
l’agglomération d’intégrer un nouveau quartier
et de rendre la circulation plus fluide, ce faisant
de choisir une variante de moindre impact pour
les platanes de l’avenue de la Boisse, tout en
étant confronté à leur maltraitance et à leur état
sanitaire. DERNIÈRES NOUVELLES
Ainsi, parallèlement au collectif « Nature en Aux dernières nouvelles, et après nos démarches
ville » (NEV), nous avons récemment interrogé le auprès des services du Conseil départemental
maire de Chambéry pour savoir si la concertation (avec le collectif NEV), tout devrait être fait pour
engagée en avril dernier par la ville avait porté que le cèdre centenaire soit conservé dans un
ses fruits pour abandonner définitivement le environnement préservé aussi pour ses racines.
projet initial qui prévoyait l’abattage de quarante-
cinq arbres, dont trente-neuf avenue de la Une mini conférence proposée ce 17 novembre
Boisse. 2022 par la Galerie Eurêka sur le thème de la
« Nature en ville » montre que nous sommes
Affaires à suivre... enfin devenus « tendance » !
Nous gardons un œil aussi sur les arbres de la
cour de récréation du collège Louise de Savoie,
avec son cèdre centenaire et en bonne santé qui
ne saurait être sacrifié pour un agrandissement Christine Bernard
mal placé des locaux du Collège. Administratrice de FNE Savoie
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 5
biodiversité
Un guide pour réduire la pollution
lumineuse
© Gabriele Motter on Unsplash
80 % des européens n’ont plus accès à la voie lactée.
Le guide « ÉCLAIREURS DE NUIT » à l’Arrêté de 2018 visant à réduire les nuisances
destination des collectivités, entreprises, d’un éclairage artificiel nocturne excessif, y
syndicats de copropriétés et particuliers compris pour les entreprises privées et les
est disponible dès ce début décembre particuliers. Car chacun, à son niveau, participe à
la pollution lumineuse.
2022 sur notre site internet. Son but ?
Éclairer chacun de ces acteurs sur ce
Il a été rappelé aux entreprises avec le plan
que la loi demande et sur les bonnes sobriété de l’État, que les enseignes et vitrines
pratiques à mettre en place pour aller plus devaient être éteintes à 1h du matin au plus tard
loin. Car chaque éclaireur peut agir à son (et ce depuis 2013 en fait…). Il faut aussi que les
échelle. Encore faut-il le savoir ! entreprises sachent comment mieux éclairer :
• En réorientant par exemple leurs projecteurs à
Plusieurs guides sur la thématique de la pollution l’horizontale, pour ne pas diffuser de la lumière
lumineuse existent déjà. L’idée de ce nouveau vers le ciel et participer au halo lumineux.
guide est de proposer des mises en situation
• En choisissant des températures de couleurs
que nos associations ont accompagnées ou
inférieures à 3000 K (pour aller vers des blancs
observées. Si nous proposons un catalogue de
chauds) pour impacter le moins possible les êtres
situations, c’est parce que la sobriété énergétique
vivants (flore, faune, dont les humains).
et lumineuse se gère au cas par cas. Il faut
trouver la solution la plus adaptée à chaque • Et en éteignant les cheminements piétons et les
contexte. parkings après la cessation des activités.
La volonté de ce guide est aussi de pouvoir
apporter des éléments de compréhension de
n° 78
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France Nature Environnement > SAVOIE 6
Chez vous, que vous soyez en immeuble ou qu’heureusement, les leds ambrées (ou « flame »
en maison, l’éclairage extérieur doit aussi ou « vintage led ») commencent à se développer.
répondre à certaines exigences pour ne pas S’il y avait besoin de vous convaincre de ne
contribuer à cette pollution. Vous ne devez pas pas acheter les lanternes solaires « à planter »,
avoir d’éclairage qui laisse échapper des rayons sachez que l’activité des animaux nocturnes
vers le ciel selon la loi. Pourtant, vous pouvez est ralentie les soirs de pleine lune, à très faible
encore acheter des lampadaires boules dans luminosité donc. Il vaut mieux allumer une lampe
les magasins. Alors même que l’arrêté de 2018 torche (les smartphones en ont tous une) ou
demande leur remplacement d’ici 2025 par des un éclairage commandé, et l’éteindre dès que
installations qui éclairent vers le sol. Vous ne vous êtes rentrés chez vous. N’éclairer que
devez pas non plus installer d’ampoules pour lorsque l’on en a besoin est le premier pas vers
l’extérieur avec une température de couleur froide la sobriété lumineuse. Et si vous voyez plusieurs
(supérieure à 3000 K). Pourtant, les luminaires petites lumières vertes s’allumer dans votre
pour jardin sont rangés par température de pelouse cet été, c’est que la biodiversité sera
couleurs, en 3000 K, en 4000 K, et même en de retour dans votre jardin et que vous aurez
5000 K. Pour éclairer en limitant au maximum effectué les bons choix.
les impacts sur le vivant (et pour être conforme
à la loi), vous devrez acheter un luminaire parmi Agnès Biau
ces choix (s’il n’y a pas autre chose) et remplacer Chargée de mission FNE Savoie
l’ampoule par du 1800 K (Led ambrée). Parce
Téléchargez le guide ici
https://www.fne-aura.org/la-nuit-je-vis/les-outils/ n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 7
montagne
la retenue collinaire de La Féclaz
Cet automne d’une douceur incroyable essentiellement dédiée au ski de fond. L’ambition
succède à un été torride. Pour Météo- reste d’accueillir des compétitions internationales.
France, les écarts de températures avec les
normales saisonnières sont encore plus Terrassement et élargissement des pistes, stade
sidérants que ceux de cet été… Mais cela de biathlon, piste bitumée pour le ski roues
n’est pas une surprise puisque la tendance et désormais l’inévitable retenue collinaire et
au réchauffement global est particulièrement sa forêt de canons à neige alimentée par des
marquée sur le continent européen, et kilomètres de canalisations.
en particulier dans les Alpes, depuis des
nombreuses années. Malgré une enquête publique très défavorable
à ce projet, toutes les ficelles administratives
Au 15 novembre 2022, la préfecture de Savoie et des arguments plus que critiquables ont été
communique encore sur la sécheresse. Certains utilisés par la municipalité pour passer outre,
secteurs géographiques sont toujours en « alerte sans oublier l’hypocrite chantage à l’emploi. Une
renforcée » et d’autres sont redescendus au action en justice a été lancée par Les Amis de la
niveau de « simple alerte ». Compte tenu Terre en Savoie mais, contrairement au projet de
des faibles pluies automnales les spécialistes La Clusaz, le juge des référés n’a pas décidé de
prévoient déjà un printemps et un été 2023 s’en remettre au jugement sur le fond. Jugement
particulièrement difficiles. qui n’est d’ailleurs toujours pas intervenu alors
que les travaux sont quasi achevés…
Cela met en évidence de façon incontournable
la raréfaction de ce bien commun qu’est l’eau Ainsi, 25 000 m3 d’eau sont pompés dans le
et la kyrielle de problèmes qui en découle : karst à 200 m de profondeur pour remplir une
disponibilité de l’eau potable, cultures agricoles et retenue alimentant une trentaine de canons
élevages associés, surmortalité des plus fragiles, à neige censés « sécuriser » artificiellement
etc. Comme partout en France, le partage de l’enneigement des 4 km de piste ski roues. Le
cette ressource vitale suscite de vives tensions. tout pour une enveloppe de 4 millions d’euros
Et les choix des autorités en la matière sont qui viennent s’additionner aux millions déjà
éminemment politiques. dépensés pour les aménagements précédents.
Sans oublier les dépenses énergétiques
L’été dans le massif des Bauges, les camions de fonctionnement et l’entretien régulier de
citernes ravitaillant les villages sont une réalité l’installation.
depuis plusieurs années. Les alpages grillés
tendance paillasson ont fait perdre un bon mois Partout en Savoie, l’industrie du ski, largement
de pâture aux alpagistes. Les torrents sont à subventionnée avec l’argent public, se positionne
secs. Il est interdit d’arroser les potagers avec clairement dans le déni climatique et fait
« l’eau de ville »… Et les personnes isolées et/ l’impasse sur la profonde crise environnementale
ou fragiles font l’objet d’une vigilance spéciale et sociale que nous affrontons. Le dernier
pendant ces périodes à forts risques. Plan montagne de Laurent Wauquiez vise à
porter le taux de couvertures des pistes en
Pourtant à La Féclaz, à 1 300 m d’altitude, la neige artificielle à hauteur de 50 % dans une
municipalité et le Syndicat mixte des stations des
Bauges (SMSB) poursuivent obstinément, depuis
une dizaine d’années, des aménagements
destructeurs pour une saison hivernale
n° 78
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France Nature Environnement > SAVOIE 8
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 9
perspective de fuite en avant et de compétition
acharnée avec les autres pays alpins…
brèves
Sur 100 millions d’euros 30 sont destinés à la
neige artificielle. Et les prix de l’immobilier voisins
de ces aménagements s’envolent.
L’enneigement
Mais l’eau devient un bien commun critique.
artificiel prend
Les glaciers fondent, de nombreux bassins
versants sont à sec, les débits des torrents l’eau
s’amenuisent les nappes phréatiques s’épuisent,
les écosystèmes naturels sont bouleversés… Et À La Clusaz une cinquième retenue d’altitude,
en toile de fond, une trajectoire climatique qui celle du bois de la Colombière, a pris l’eau ! Un
nous amène vers un réchauffement global de plus jugement en référé du tribunal administratif de
2,5 °C à la fin du siècle. Grenoble, a ordonné la suspension du projet dont
les travaux étaient imminents. Nous attendons
Alors qu’une véritable réflexion sur l’avenir des maintenant le jugement sur le fond. Les
montagnes devrait démocratiquement prendre associations, dont FNE, qui ont mené une action
place, ces projets climaticides imposés ne contre ce projet, relayée sur le terrain par une
font que maintenir un système économique ZAD (Zone à défendre) ont obtenu une première
anachronique. victoire contre le recours à l’enneigement
artificiel. À l’heure où des élus continuent la fuite
Pourtant, de nombreuses réflexions, initiatives en avant en équipant de plus en plus de pistes
et propositions existent pour élaborer en enneigeurs, reliés à des retenues d’altitude,
ensemble les contours de l’inévitable transition ce coup de frein devrait être de nature à faire
environnementale à laquelle nous devons prendre conscience de l’impérieuse nécessité
collectivement faire face. de tenir compte des effets du changement
Élus et décisionnaires sauront-ils les prendre en climatique et des atteintes à la biodiversité.
compte pour le bien-être futur de tous ?
Daniel Appell
Adhérent FNE Savoie, accompagnateur en
moyenne montagne
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 10éducation & sensibilisation
CHANGEMENT CLIMATIQUE
dossier >
Formation illustration naturaliste
Animatrice et illustratrice au sein de FNE Savoie, j’ai suivi cet automne 2022 une
formation avec une illustratrice professionnelle au Centre permanent d’initiatives
pour l’environnement (CPIE) Brenne Berry.
Ce fut une semaine intense, qui m’a permis de découvrir et d’acquérir de nouvelles techniques d’illustration,
notamment à l’acrylique et au « rOtring » (feutres fins à l’encre). Des exercices m’ont également permis de
perfectionner la précision de mes dessins naturalistes. L’objectif de cette formation était de découvrir tous
ces aspects de l’illustration scientifique en se focalisant sur une espèce et de créer une affiche. J’ai choisi le
blaireau, car FNE Savoie a de nombreux projets autour de cette espèce. Voici les résultats :
Croquis d’étude et de recherche avec le blaireau Travail sur le squelette du blaireau pour bien com-
(crayon de papier). prendre son anatomie (rOtring).
Suite de l’étude sur l’anato-
mie avec un blaireau entier !
(acrylique).
Étude du comportement des blaireaux (aquarelle).
Anne-Cécile Dubois n° 78
Éducatrice à l’environnement FNE Savoie > déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 11éducation & sensibilisation
notes de lecture
Pour une majorité de nos concitoyens la
réalité du dérèglement climatique et la
responsabilité de l’activité humaine ne
semblent plus faire de doute. Cependant cette
prise de conscience est prompte à s’estomper
devant d’autres sujets d’actualité, quitte à
ressurgir devant une nouvelle crise mise en
avant par les médias.
Seule une minorité a vraiment basculé. La
majorité attend, espère encore que des solutions
techniques seront trouvées ; ce qui lui évitera de
remettre en cause toutes ses certitudes et son
mode de vie.
Il est donc urgent de poursuivre la bataille
culturelle et d’essayer inlassablement de
convaincre afin de passer à l’action et que se
produise ce « sursaut » que le Haut conseil
pour le climat appelle de ses vœux. Il faut pour
reprendre l’expression utilisée dans un récent
article du journal Le Monde : « Embarquer la
société » !
Deux petits livres parus en 2022 peuvent y aider :
« Il faut une révolution politique, poétique et
philosophique », entretien d’Aurélien Barrau
avec Carole Guilbaud et « Tout Comprendre
(ou presque) sur le climat », un essai rédigé par
des scientifiques du CNRS en lien avec Thomas
Wagner alias Bonpote et la graphiste Claire Marc.
Au premier abord, le propos d’Aurélien Barrau mutilés » observe-t-il avant d’ajouter que « reste
a de quoi déconcerter : « Il ne s’agit plus de le choix d’être poète ».
commenter ou de comprendre le réel : il s’agit de
produire du réel. Ce qui tue aujourd’hui et avant Cessons donc de parler de « catastrophes
tout, c’est notre manque d’imagination. L’art, la naturelles » en feignant d’ignorer que c’est
littérature, la poésie sont des armes de précision. l’Homme qui les provoque, n’utilisons plus le
Il va falloir les dégainer ». terme « développement durable » alors que
Appelle-t-il chacun d’entre nous à se faire nous savons qu’une croissance sans limite est
peintre, écrivain ou poète ou suffit-il de goûter les intenable scientifiquement, rejetons le terme
arts pour sauver la planète ? Est-ce là la forme « environnement » comme si le monde vivant qui
d’engagement la plus prometteuse ? Ce serait nous entoure était un simple décor de théâtre.
sans aucun doute se tromper que de prendre Les événements que nous traversons ne sont
cette affirmation au pied de la lettre. La première pas la manifestation d’une crise climatique
tâche à laquelle nous invite Aurélien Barrau, c’est
de nommer les choses. « Nous nous sommes
fait voler les mots. Ils sont dénaturés, dévoyés, n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 12mais les signes d’un « effondrement de la vie ». d’un pouvoir législatif » qui « informées par
Comme le souligne Aurélien Barrau, si le terme des experts compétents » soient à même de
« croissance » mène à la disparition du vivant et « prendre des décisions justes et courageuses ».
à l’aliénation, mieux vaut parler de « croissance
tumorale ». Les termes édulcorés que nous Cet entretien d’Aurélien Barrau, aussi décalé
utilisons sans même y songer trahissent notre qu’il puisse paraître dans un temps où l’urgence
lâcheté ou notre impuissance à penser et à de la situation nous pousse à agir sans prendre
percevoir l’impensable. Le verbe grec d’où vient de recul, est très précieux et nous fournit des
le mot poète signifie fabriquer, produire, agir. outils pour remporter la plus importante des
Par conséquent, le premier devoir du poète en batailles, la bataille culturelle qui montrera que
chacun de nous est de retrouver le sens des non seulement un autre monde est possible mais
mots pour redonner un sens à notre vie et nos qu’il est désirable. Il nous reste, pour reprendre
actions. Les mots sont des armes pacifiques les mots de Corneille à « espérer en notre
mais redoutables. courage ».
Le deuxième défi qu’Aurélien Barrau nous Le second livre a été conçu pour répondre aux
exhorte à relever c’est de résister à « notre idées reçues sur les causes du réchauffement
enlisement dans l’inertie ». Le pessimisme climatique et lutter contre la désinformation
est un luxe que nous ne pouvons pas nous climato-sceptique, circulant notamment sur
permettre. Notre objectif n’est pas de sauver le les réseaux sociaux. En effet, même si plus
climat, de maintenir la hausse des températures personne ne nie désormais le changement
en dessous de deux degrés pour, au final, ne climatique en raison des événements
rien changer, mais il est de revoir de fond en catastrophiques et récurrents de ces dernières
comble nos modes de vie, nos systèmes de années avec, d’ailleurs, une accélération du
valeurs et notre façon d’habiter le monde en phénomène, certains s’acharnent encore
prenant notre juste place dans la chaîne des à minimiser la responsabilité des activités
vivants. C’est en ce sens que l’imagination de humaines et la gravité de la situation.
l’artiste qu’il soit écrivain, peintre ou musicien,
nous est d’un grand secours pour imaginer un Sous la forme de vingt questions concrètes, telles
autre monde possible loin de notre « système que :
de prédation généralisée ». Nous ne sommes
pas « des Sisyphe condamnés à rouler sans Q. 1 : « Y a-t-il un consensus scientifique sur le
fin la pierre du consumérisme ». Une autre réchauffement climatique ? »
croissance est à bâtir, une « croissance vraie » Q. 2 : « Quelle est la différence entre météo et
qui repose sur « l’amour, la créativité, l’entraide, climat ? »
la connaissance, les explorations artistiques et Q. 5 : « Quel est l’impact du changement
scientifiques ». climatique sur les glaciers ? »
Q. 10 : « Aura-t-on plus d’épisodes de
Alors quels avenirs sont possibles ? Aurélien sécheresse en France avec le réchauffement
Barrau s’interroge : la continuation du scénario climatique ? »
en cours , qu’il juge le plus probable même Q. 19 : « L’Homme sera-t-il en capacité de
s’il fait peser sur l’humanité une menace s’adapter au changement climatique ? »
existentielle ? Une réforme substantielle, un Q. 20 : « La France est-elle préparée au
espoir qu’il estime, dans l’état actuel des choses, changement climatique ? »
dépourvu de fondement ? Une révolution – tant
il peut paraître souhaitable de ne pas sauver le Les auteurs s’appuient sur des éléments dûment
monde tel qu’il est – mais dont les risques sont étayés par les connaissances scientifiques
considérables ? Avant d’ajouter que la voie la pour faire comprendre de façon simple, claire
plus prometteuse est celle des « assemblées
citoyennes à condition qu’elles soient dotées
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 13et précise des notions complexes, et cela sans
pour autant verser dans un langage technique
qui échapperait au commun des mortels. Bien
au contraire, adoptant le format d’une bande
dessinée, grâce aux illustrations particulièrement
réussies de Claire Marc et l’humour de Bonpote,
les explications sont à la portée de tous quel que
soit l’âge.
Pour balayer les idées reçues sur le
réchauffement climatique et réfuter avec
assurance les arguments fallacieux des climato-
sceptiques, rien de tel que ce petit livre très
agréable à lire !
Marie-Laure & Emmanuel Bonnerot
Adhérents FNE Savoie
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 14éducation & sensibilisation
Retour sur un stage d’Éco-citoyenneté
© Trey Rops on Unsplash
En cas de contravention concernant des l’ont amené à ce stage.
atteintes à l’environnement, le parquet Le matin, Anne-Cécile, notre éducatrice à
d’Albertville a prévu un stage écocitoyen, l’environnement, a capté l’attention de ces cinq
d’une journée, remplaçant le versement stagiaires en parlant des richesses naturelles
d’une amende. Ce stage est payant auprès de connues en Savoie. Un montage audio a
l’organisme qui organise le stage. FNE Savoie permis à un agent d’une réserve naturelle, à
a été retenu par le parquet d’Albertville pour un agent du Parc national de la Vanoise et à
piloter de tel stage. un forestier de l’Office national des forêts, de
présenter leur métier. J’ai, à mon tour, évoqué
En 2021, deux journées de stage avaient été les conséquences d’un défrichement et sa
réalisées par FNE Savoie pour neuf participants. réglementation.
Le mercredi 14/09/2022 une troisième journée de L’après-midi, une reconnaissance des oiseaux
stage a eu lieu à Frontenex : en forêt à l’œil et au chant, a permis de constater
• Le matin en salle dans des locaux mis que les cinq participants étaient attentifs à la
gracieusement à notre disposition par la préservation des oiseaux. Une reconnaissance
commune. des traces d’animaux sur empreintes a
• L’après-midi en forêt sur la commune de Cléry. également été effectuée. Enfin, une recherche de
Cinq personnes ont participé à ce stage pour petits animaux dans le sol forestier a permis de
avoir : voir une grenouille… malgré la sécheresse.
• Dégradé un habitat occupé par des nids La conclusion apportée par ces cinq stagiaires
d’hirondelles. à l’issue de cette journée est qu’il est utile
• Défriché sans autorisation. « d’apprendre des choses » sur la nature afin
• Détruit des espèces végétales protégées en d’éviter des dégradations.
déposant des déblais.
Chaque participant a présenté les raisons qui André Collas
n° 78
Secrétaire FNE Savoie > déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 15agriculture
les sols sont la clé de notre survie !
L’artificialisation des sols est une
menace pour la biodiversité, le
changement climatique et notre
autosuffisance alimentaire. Depuis
2018, 23 600 ha en moyenne
continuent de disparaître chaque
année, soit l’équivalent de
180 ha par jour et la surface d’un
département tous les 7 ans.
Face à l’urbanisation, la loi « Climat
et Résilience » a pour objectif
d’atteindre le zéro artificialisation
nette (ZAN) en 2050. Mais en 2022
ce dispositif mis en place depuis
2010 est peu suivi d’effets et de
nombreuses pressions politiques
visent à « détricoter » cette loi.
Poussée par le besoin de produire
une énergie dite renouvelable,
l’artificialisation des sols liée à
la construction des centrales
© Indra girl on Unsplash
photovoltaïques a peu de poids.
Même s’ils sont d’un grand intérêt
pour conserver des fonctions
naturelles variés et vitales
(biodiversité, séquestration du
carbone) les terrains sans grande
valeur agronomique ou économique,
Cette fine couche de la croûte terrestre assure
sont trop souvent sacrifiés. Même si des surfaces
une foule de services essentiels, certains
déjà artificialisées sont largement disponibles
comme la production de nourriture sont bien
pour implanter des capteurs solaires, au nom de
visibles, mais d’autres comme le pouvoir de
la transition énergétique, il est trop facile de faire
séquestrer une partie du CO2 de l’atmosphère
accepter une modification du PLU, et construire
et donc de compenser les émissions de CO2,
une centrale photovoltaïque.
responsables du réchauffement climatique,
sont trop souvent oubliés.
Ainsi, un projet qualifié d’exemplaire a réuni des
habitants de Ventabren (Bouches-du-Rhône)
Ainsi, non seulement le sol peut nous aider
qui ont convaincu la municipalité de les soutenir
à nous adapter aux impacts inévitables du
pour développer une centrale solaire au sol, sur
changement climatique mais il contribue aussi à
une surface de 5,5 ha. Pour implanter ce projet,
en atténuer l’intensité. Allez découvrir sur le site
600 oliviers ont étés arrachés et transplantés sur
Internet de l’Institut national de recherche pour
de meilleures parcelles pouvant être irriguées,
l’agriculture, l’alimentation et l’environnement
« afin d’allier production d’énergie renouvelable
(INRAE) le projet « 4 pour 1000 » : https://www.
inrae.fr/actualites/stocker-4-1-000-carbone-sols-
potentiel-france n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 16locale et reprise, en agriculture bio, d’une culture En Savoie, nous allons devoir répondre bientôt
d’oliviers qui était tombée en déshérence. » à un projet de parc photovoltaïque situé sur la
https://energie-partagee.org/parc-photovoltaique- commune de La Balme : 5,5 ha dans une zone
ventabren-600-oliviers-transplantes-remis-en- humide, saccagée par les dépôts de matériaux
culture/ inertes de la Compagnie nationale du Rhône
(CNR). Ce site pourrait être recolonisé par une
L’érosion préoccupante de la biodiversité, l’effet forêt alluviale.
« d’îlot de chaleur » des grandes surfaces
photovoltaïques n’est pas pris en compte par Grâce aux deux projets évoqués ci-dessus,
ces projets, et leur impact est certain : https:// à nous de réfléchir à la meilleure orientation
fre.legatechnics.com/photovoltaic-heat-island- énergétique. https://www.mrae.developpement-
effect-larger-solar-power-plants-increase-local- durable.gouv.fr/avis-rendus-sur-projets-de-la-
temperatures-42534217. mrae-auvergne-rhone-a892.html
L’association Grési21 installe des panneaux Marc Peyronnard
photovoltaïques sur les toits de particuliers ou de Président FNE Savoie
bâtiments publics, afin de produire de l’électricité.
Sans véritablement changer l’effet îlot de chaleur,
l’avantage de ces installations est de préserver
les sols.
brèves
Retour sur le
printemps des rivières
Ce printemps 2022, FNE Savoie proposait la première
édition du « Printemps des rivières ». Cet évènement,
financé par l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée
Corse, invite chacun à (re)découvrir les rivières
près de chez soi. Plusieurs dizaines de personnes
ont participé aux différents rendez-vous proposés :
ramassage de déchets autour de l’Albanne, affûts de
castors, sortie à la rencontre du Guiers Vif ou encore
ciné-débat. À cette occasion, un livret présentant le
Guiers Vif a également été rédigé. Vous pouvez le
consulter ici : https://www.fne-aura.org/actualites/
savoie/les-secrets-du-guiers-vif/
Vous souhaitez participer à l’organisation du
« Printemps des rivières » 2023 ?
Vous aimeriez proposer une sortie sur une rivière que
vous connaissez bien ?
Contactez-nous par mail à cette adresse :
laetitia.leger@fne-aura.org
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 17montagne
CHANGEMENT CLIMATIQUE
dossier >
motoneiges électriques : pas écolos
du tout !
© Jean Kerrien
Dernièrement sont apparues dans nos des motoneiges thermiques mais en complément
montagnes des « MoonBikes », nouvelles comme à Courchevel, à Tignes et à La Plagne
motoneiges électriques, fabriquées en Haute- ou en création de nouveaux parcs de location et
Savoie, présentées dans la presse comme terrain d’évolution comme à Bessans. Le concep-
une activité respectueuse de l’environnement. teur a déclaré : « Nous sommes en train de créer
Aussi le concepteur de ce « MoonBike » a un nouveau marché, principalement destiné aux
déclaré espérer des modifications législatives professionnels du tourisme mais aussi aux parti-
permettant une extension des domaines d’uti- culiers en recherche de nouveaux loisirs ». Cette
lisation de ses motoneiges. Nous risquons société a déclaré espérer commercialiser 15 000
donc d’en rencontrer de plus en plus. de ses « MoonBikes » dans le monde entier d’ici
D’autant que dans un article de presse, ce 2025 !
concepteur a par ailleurs expliqué qu’il pensait Dans un article de presse, l’exploitant d’un parc
que ses « MoonBikes » seraient utilisées en de location a réclamé « une réglementation
remplacement des motoneiges thermiques plus souple, un statut particulier par rapport aux
classiques. Mais ce n’est pas ce qui se passe ! motoneiges classiques » ; FNE Savoie s’inquiète
Nous constatons que la plupart de ses « Moon- fortement de la prolifération à venir de ces
bikes » sont achetées, non pas pour remplacer « MoonBikes ».
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 18Dans un autre article, le « Moonbike » est pré- la diminution des nuisances qu’entraînerait cette
senté, photo à l’appui, comme « un gros joujou motorisation. Pour le bruit, peut-être, pour TOUT
qui s’embarque à l’arrière de sa voiture », sur le reste, non !
un porte scooter, à condition bien sûr que vous L’hiver 2022-2023 et sans doute les suivants,
possédiez un gros 4x4 supportant les 70 Kg de nous sommes tous appelés à faire des écono-
l’engin. Cette affirmation est susceptible d’inci- mies d’énergie. C’est une raison de plus pour
ter des particuliers à acheter un « MoonBike » réclamer un arrêt de cette activité motoneige
pour l’utiliser ensuite à partir de tout endroit de de loisirs en montagne, gaspilleuse d’énergie :
montagne accessible en voiture et pour divaguer essentiellement du carburant actuellement, mais
partout ensuite. bientôt de plus en plus d’électricité.
À Courchevel, l’hiver dernier, un loueur propo- Les stations de ski se targuent souvent d’être
sait de vivre une expérience unique en louant alimentées en électricité « verte ». Nous
des « MoonBikes » électriques pour « explorer n’admettons pas qu’en Savoie, de plus en plus
la nature sans la compromettre. Rider dans un de créations de micro-centrales portent atteinte
silence total, dévaler les pistes, s’aventurer dans à la qualité environnementale de nos rivières,
les sous-bois. Ou tout simplement se déplacer en surtout si une partie de l’électricité verte produite
ville. Moonbikes transforme l’hiver en un terrain est utilisée pour ces loisirs de motoneiges non
de jeu infini. » respectueux de l’environnement.
À La Plagne, FNE Savoie s’est porté partie Que ces engins motorisés de loisirs soient ther-
civile lors d’un prochain procès pour utilisation miques ou électriques, FNE Savoie réaffirme son
de « MoonBikes » durant l’hiver 2021-2022 en opposition à leur utilisation de loisirs en quelque
dehors d’un terrain agréé. endroit que ce soit.
Beaucoup de loueurs de motoneiges en sta-
tion annoncent d’ici 2 à 3 ans le passage à la Jean Kerrien
motorisation électrique de leurs motoneiges Administrateur FNE Savoie
thermiques classiques. Ces loueurs insistent sur
© Jean Kerrien
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 19eau & milieux aquatiques
CHANGEMENT CLIMATIQUE
dossier >
Le rôle de l’hydroélectricité dans
l’état alarmant de nos cours d’eau
© Levi on Unsplash
La Savoie joue un rôle important dans la et de gestion des eaux (SDAGE 2022-2027) fait
production d’hydroélectricité. Historiquement, craindre un écart important par rapport à l’objec-
Électricité de France (EDF) est bénéficiaire de tif de bon état de nos cours d’eau pour 2027 :
nombreuses concessions lui permettant une « L’hydroélectricité est avec d’autres activités à
importante production. l’origine des trois plus importantes pressions qui
s’exercent sur l’hydromorphologie et la continuité
De plus, cent vingts microcentrales de tous types des eaux, responsables des difficultés à satisfaire
sont installées en Savoie. les objectifs de de la Directive Cadre sur l’Eau,
Résolu à promouvoir l’augmentation d’électricité décidée par l’Europe en 2020 ».
renouvelable, l’État a publié une Programmation Pourtant, l’évaluation environnementale straté-
pluriannuelle de l’Energie (PPE) pour la période gique de la PPE 2019-2028 de l’énergie préco-
2019-2028. Des objectifs annuels progressi- nise dans la rubrique « Éviter » : « Il faut limiter la
vement croissants de production par catégorie construction de nouveaux obstacles à la conti-
d’électricité renouvelable ont été fixés. En nuité écologique en privilégiant l’optimisation de
Savoie, de nombreuses microcentrales hydroé- centrales actuelles et l’exploitation de barrages
lectriques ont vu le jour ces dernières années. En existants ».
cette fin d’année 2022, en Tarentaise, deux pro- Dans la rubrique « Réduire » : « Il faut maintenir
jets, à La Léchère (Le Colomban) et aux Belle- un débit minimal au droit des barrages garan-
ville (Peclet), font l’objet d’une enquête publique. tissant en permanence la vie, la circulation et la
Indéniablement, l’installation d’une microcentrale reproduction des espèces présentes ».
sur un cours d’eau a des conséquences néga- Lors des enquêtes publiques sur les microcen-
tives sur son bon état écologique. L’état des lieux
préalable au Schéma directeur d’aménagement
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 20trales, nous avons l’impression que ces critères rompent leur contrat de soutien aux énergies
« Éviter et Réduire » ne sont pas assez pris en renouvelables signés avec l’État. Ce contrat les
compte. Si bien que dans la très grande majo- obligeait à rembourser le surplus obtenu sur le
rité des enquêtes, le commissaire enquêteur marché de gros au-dessus du prix garanti. Elles
donne un avis favorable. Il reprend à son compte vendent ainsi directement leur énergie sur le mar-
l’argument économique présenté par le promo- ché en encaissant la totalité du prix. Un bonus de
teur du projet et insiste souvent sur la nécessité 6 à 7 milliards d’euros pour 2022 et 2023 !
de respecter les objectifs de l’État d’augmenter La petite hydroélectricité au fil de l’eau impacte
la production d’hydroélectricité ; les impératifs fortement les milieux aquatiques, n’a pas d’intérêt
économiques primant sur les atteintes environ- pour la souplesse de production et n’est pas
nementales relevées. Pour exemple, voici la compétitive face aux autres sources électrogènes
conclusion du commissaire enquêteur lors d’une renouvelables.
enquête publique récente : « En conclusion, le
commissaire enquêteur estime que le projet de FNE AURA a demandé que : « l’aide et les
microcentrale sur le torrent du Gorret rentre tota- appels d’offre « petite hydraulique » soient
lement dans le cadre de la politique énergétique suspendus sine die et que les fonds mobilisables
de la France et concourt à l’augmentation de la soient redirigés vers les véritables priorités de la
part des énergies renouvelables recherchée. Son transition écologique ».
impact sur l’environnement est relativement faible
tant sur la faune, la flore, la faune piscicole, le Jean Kerrien
paysage et l’eau par rapport aux avantages qui Administrateur FNE Savoie
en découlent (production d’électricité) ».
Et pourtant, comme l’objectif intermédiaire de
la PPE 2019-2028 de puissance installée à
atteindre en 2023 pour l’hydroélectricité a déjà
été atteint dès la fin 2019, cet argument ne tient
pas.
Certaines sociétés créant puis exploitant des
microcentrales sont surtout là pour faire du
« business », profitant de la demande d’aug-
mentation de production d’énergie renouvelable.
Elles touchent même le jackpot avec la flambée
actuelle des prix de vente en gros de l’électricité.
Lorsque le prix de marché est inférieur au tarif
garanti par l’État (100 € le MWh pour beaucoup
de microcentrales), l’État leur paie la différence.
À l’inverse, quand le prix de marché est supérieur
au prix garanti, le producteur rembourse à l’État
la différence. Depuis un an, certaines sociétés
n° 78
> déc-jan-fév 2022/23
France Nature Environnement > SAVOIE 21Vous pouvez aussi lire
