ART & DIPLOMATIE - Belgium.be
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DES ŒUVRES D’ART ARTISTES : Sven Augustijnen Ruben Bellinkx COMME DES SUJETS Guy Bleus Marcel Ceuppens DE CONVERSATION Mon Colonel & Spit Carl De Keyzer Ronny Delrue DANS LA COLLECTION Wim Delvoye Thierry Falisse D’ART AU SPF AFFAIRES Emmanuel Kervyn Lieven Lefere & Charles Verraest Emilio Lopez-Menchero ÉTRANGÈRES Vincent Meessen Johan Muyle Otobong Nkanga Hans Op de Beeck Max Pinckers Marie-Françoise Plissart Bernard Queeckers Ana Torfs Luc Tuymans Maarten Vanden Eynde Catharina Van Eetvelde Yves Velter COMMISSAIRE D’EXPOSITION : Ilse Dauwe 2
INTRO Le lien entre art et diplomatie n’est pas à priori évident. Le milieu diplomatique est un monde de consensus et de compromis, de règles protocolaires et de cadres législatifs, d’arrondissements d’angles et de démarches discrètes. L’art et les artistes, en revanche, ont davantage une image rebelle et dissi- dente ou sont, à tout le moins, considérés comme critiques et interrogateurs ; faisant fi des étiquettes, ils n’ont pas peur d’abolir les sacro-saintes frontières entre les genres. Cette exposition explore les deux mondes, loin des clichés que nous nous en faisons. Car, après tout, Rubens n’était-il pas aussi connu pour ses talents diplomatiques ? Sur la base de 6 perspectives, d’œuvres d’art de 25 artistes de la collection d’art du SPF Affaires étran- gères, et de quelques objets didactiques, comme un costume d’ambassadeur, des maquettes des ambas- sades belges, des documents d’archive, différents aspects de la diplomatie et des ambassades belges sont mis en lumière. À travers ces perspectives, ‘buil- ding up the dialogue’, ‘at your service’, ‘conversation pieces’, ‘it’s a risky business’, ‘fading memory’ et ‘food for thought’ le visiteur de l’exposition se fait une idée du patrimoine immobilier, des fonctions de ser- vice au citoyen belge, de la diplomatie culturelle, de la vie dans une ambassade et de la diplomatie culinaire.
A. BUILDING UP THE DIALOGUE Otobong Nkanga Alterscape I, II, III 2005 C-print sur papier photo Pro Endura 3 x H 50 x L 57 cm Dans ses œuvres, Otobong Nkanga (°1974) se penche souvent sur l’histoire collective et les croyances partagées par les peuples. Il en va de même pour son triptyque ‘Alterscape I, II, III’. Ces trois photos ont été créées à partir d’une performance en maquette, elle- même inspirée d’une performance réalisée par l’artiste en 2006 à Fuerteventura, sur les îles Canaries, lors de la première Biennale d’art, d’architecture et de paysage. L’œuvre symbolise l’homme en tant que créateur et destructeur, celui qui prend le contrôle de l’environnement : l’humain pollue le monde, déracine les vestiges du passé, remodèle le paysage. La mise en scène, avec la blancheur contrastante de l’arrière-plan, fait ressortir la silhouette noire de l’homme agissant. L’insignifiance de l’être humain est figurée par le crâne dans la maquette, à l’image des natures mortes du XVIIe siècle. Quant au volcan actif, il symbolise la potentialité d’une soudaine explosion et le sentiment que l’homme est démuni face aux forces de la nature. Le paysage renferme d’autres matériaux, comme des arbres artificiels, du sable coloré, des photos découpées, de l’argile et du verre. La représentation de l’œuvre en diptyque ou triptyque a quelque chose de sacré, comme si l’artiste souhaitait rendre hommage aux choses perdues dans la douleur. ‘Alterscape I, II, III’ a été acquis par le SPF en 2012, intégrant ainsi la première collection publique de Belgique. L’œuvre a été installée dans l’ambassade de Madrid, après la rénovation de celle-ci, comme élément du plan artistique construit autour des thématiques du voyage, du tourisme et de la migration. La collection du SPF comprend aussi d’autres photos, exposées notamment dans la résidence du consul général à São Paulo, au Brésil, et dans la résidence de l’ambassadeur belge d’Abuja, au Nigeria. 4
LE RÉSEAU DE POSTES Le réseau de postes se compose de 114 postes et de 232 bâtiments. Ce patrimoine immobilier se dé- cline en logements – principalement les résidences des chefs de poste, soit 118 bâtiments, ainsi que quelques immeubles pour les collaborateurs – et en lieux de travail, avec 81 ambassades, 16 consu- lats généraux, 8 représentations permanentes, 5 consulats, 2 bureaux politiques et 2 bureaux pour Willemen Groep la coopération au développement. Près de la moitié La nouvelle ambassade belge des immeubles appartient à l’État belge et un peu Boulevard du 30 Juin, à Kinshasa plus de la moitié fait l’objet d’une location. 2015 Photo 5
Carl De Keyzer L’ancienne ambassade belge, Cinquantenaire, à Kinshasa 2017 Photo H 47 x L 130 cm KINSHASA En 2018, l’ambassade belge déménagea de l’em- de Belgique, l’ambassade des Pays-Bas y a égale- blématique Cinquantenaire pour s’installer sur le ment pris ses quartiers. Dans ce nouveau bâtiment, boulevard du 30 Juin, du nom du jour de l’indépen- la collection artistique occupe une place particulière : dance et l’une des principales artères de la capitale elle fait partie intégrante du discours qui appelle à congolaise. Cet évènement marquant du départ du faire face, de manière innovante, au passé colonial Cinquantenaire, place du 27 Octobre – où l’ambas- en promouvant l’ouverture et le dialogue à travers sade était installée depuis 1961 – a été immortalisé une sélection de 40 œuvres d’art de 20 artistes par le photographe de l’agence Magnum Carl De belges et congolais. Keyzer (°1958). Cet auteur de deux volumineux ouvrages photographiques sur le Congo, intitulés « Congo (Belge) » et « Congo Belge en Images » sor- tis en 2009, a réalisé pour les Affaires étrangères un reportage photographique sur l’ancienne ambassade, saisie dans son environnement. Le nouvel immeuble, conçu par A2M et construit par Willemen, est le premier bâtiment passif en Afrique subsaharienne. Il se dresse sur quatre étages et, outre l’ambassade 6
NEW DELHI L’ambassade belge à New Delhi, en Inde, est un part, inciteraient le public à réfléchir aux tendances complexe qui héberge à la fois la résidence de de la société contemporaine. Ces questions ont l’ambassadeur belge, les quartiers du personnel et trouvé réponse en 2017 grâce à une sélection de l’ambassade elle-même. Cet ensemble a été conçu 34 œuvres de 18 artistes indiens et belges, avec par l’artiste/architecte indien Satish Gujral (°1925), une priorité aux jeunes créateurs. Les thématiques lauréat du concours d’architecture lancé en 1980 par abordées par ces œuvres sont le « dividende démo- le SPF Affaires étrangères. Il s’inspira des coupoles graphique », le genre, la religion et la spiritualité, le de l’architecture moghole, telles qu’elles ornent no- canon de l’histoire de l’art, la science, l’environne- tamment les mosquées et mausolées en Inde du ment et le climat. Nord. Les Moghols – peuple originaire de la région qui couvre aujourd’hui l’Iran et l’Afghanistan – ont exercé, trois siècles durant, une influence majeure sur l’Inde septentrionale. Fidèle à son époque, Gujral avait créé une œuvre architecturale très évocatrice. La question était donc de savoir comment intégrer des créations qui, d’une part, épouseraient harmo- nieusement l’immeuble tout en lui conférant une plus-value et une actualité renouvelée et qui, d’autre RABAT L’ambassade actuelle se trouve en centre-ville. Le vitesse supérieure à Rabat : plus que passive, la nou- bâtiment est en piètre état et, avec la fermeture velle ambassade sera « zéro énergie ». L’immeuble prochaine des consulats généraux à Casablanca et sera livré le 12 janvier 2020. Ce sera aussi l’occasion à Tanger, il sera impossible d’y accueillir l’ensemble d’y intégrer plusieurs œuvres d’artistes belges et du personnel. C’est pourquoi la construction d’une marocains, en s’inspirant du concept architectural et nouvelle ambassade a été lancée en 2018, sur un de la grande communauté marocaine en Belgique, terrain du quartier Rabat-Souissi. Le plan du bâti- qui compte aussi de nombreux artistes. ment, avec son jardin intérieur, son jeu d’air, d’eau et de lumière, et sa focalisation sur l’espace interne, s’inspire de l’architecture marocaine et arabo-an- dalouse traditionnelle. L’étage dynamique, où se trouvent les bureaux, offre une interprétation plus libre de cette architecture ; sa structure ajourée, per- forée de fenêtres, baigne l’ensemble de lumière. Le bureau d’architectes A2M, qui s’est également chargé de l’ambassade belge à Kinshasa, passe la 7
B. AT YOUR SERVICE Bernard Queeckers Le centre de conférences du palais d’Egmont abrite une « salle Aligner de réunion bleue », où se trouve exposée « Aligner » de Bernard 1986 Queeckers (°1950). Cette œuvre – l’une des rares de la collection C-print à avoir été acquise aux enchères – a été achetée spécifiquement 7 x H 60 x L 39.3 cm pour cette pièce. Le centre de conférences, ouvert en 1971, pro- Ana Torfs pose 8 salles de réunions, dont 4 au palais d’Egmont et 4 dans Ecran I & II le bâtiment Egmont II. Tant le palais d’Egmont que le centre de 2002 conférences ont été utilisés par le SPF Affaires étrangères pour ac- Tirage argentique sur gélatine cueillir des chefs d’État et autres dirigeants internationaux. Depuis (ILFORD baryte mat) 2007, les espaces peuvent aussi être loués par des tiers pour 2 x H 60 x L 46 cm l’organisation d’évènements.Chaque année, ces lieux servent de décor à plus de 500 évènements, dont quelque 400 évènements du SPF, environ 70 locations par des tiers et près de 90 mises à disposition en faveur de l’Institut Egmont et d’organismes tiers à charge du SPF Affaires étrangères. 8
Les séries photographiques d’Ana Torfs (°1963), aussi de diplomates en formation, d’artistes et de qui composent une partie de son œuvre diversifiée, scientifiques. Si la majorité de ces visiteurs sont sont dominées par la tension entre texte et image, Belges, on y trouve régulièrement des chercheurs de même que par tous les processus de visualisa- d’autres pays d’Europe, voire d’autres continents. La tion, d’interprétation et de traduction qui y sont liés. salle de lecture est librement accessible au public L’artiste se saisit de fragments d’histoire politique pendant les heures de bureau et chacun peut y me- et culturelle qu’elle présente sous un jour nouveau, ner ses recherches en consultant les catalogues sur surprenant et actuel. Les deux photos « Ecran I & II » place. Les archives sont subdivisées en « archives sont exposées depuis 2015 dans la salle de lecture diplomatiques » et « archives africaines ». des archives des Affaires étrangères. Chaque mois, la salle est fréquentée par 150 lecteurs en moyenne, soit plus de 1 800 visiteurs par an. Il s’agit pour la plupart d’étudiants et de chercheurs universitaires en histoire et sciences politiques (notamment), mais 9
La pratique artistique de Johan Muyle (°1956) doit Sur les quelque 120 postes diplomatiques à l’étran- sa cohérence à l’utilisation d’images et d’objets ger, 64 devises différentes sont utilisées, notam- ready made, tels que le billet de banque. En retra- ment dans la facturation des produits consulaires, vaillant un objet existant, l’artiste crée un nouvel les fonds de roulement des postes et les paiements univers empreint de poésie, qui combine l’ironie d’un directs depuis Bruxelles. Bien que de nombreux James Ensor et l’irrationnel d’un René Magritte, le postes utilisent une autre monnaie, la plupart d’entre tout rehaussé d’une pointe de sarcasme à la Marcel eux paient l’administration centrale en euros pour Broodthaers. Le SPF Affaires étrangères possède faciliter le processus. plusieurs créations de cet artiste, dont 3 œuvres d’art à New Delhi et une série de 7 billets de banque à la direction d’encadrement Budget et Contrôle de gestion, établie dans le bâtiment Egmont II à Bruxelles.Ce service, chargé du contrôle budgétaire et financier (1,7 milliard d’euros par an), est en contact avec l’étranger, raison pour laquelle il est régulière- Johan Muyle ment confronté à des monnaies internationales. 100 FB texte Flamand 2009 Techniques mixtes H 22.5 x L 33 cm 10
Guy Bleus Mail art message to a new millennium 1990 Techniques mixtes H 26 x L 32 cm Guy Bleus (°1950) est un artiste notamment asso- et les postes diplomatiques est toujours scellé – au cié au mail art. Il s’agit d’une forme d’art « unilatéral », même titre, par exemple, que le transport des effets qu’il concrétise dans des livres d’artiste, des œuvres personnels des diplomates qui partent en mission. audio et vidéo, des assemblages, des timbres artis- Cette œuvre est temporairement empruntée à l’es- tiques, de l’art recyclé, des sceaux et des dispositifs pace de la délégation belge au Conseil européen, de scellement. Cette œuvre, créée en 1990, est situé place Schuman à Bruxelles. intitulée ‘mail art message to a new millennium’. Nombreux sont les artistes belges qui travaillent avec des enveloppes, des lettres, etc. Parmi eux, citons Marcel Broodthaers, Mario De Brabandere ou encore Pierre Heyvaert. Cette œuvre, qui représente un drapeau belge et un sceau, évoque le fonction- nement de la valise diplomatique, sachant que le transport entre l’administration centrale à Bruxelles 11
H 47 x L 90 cm Papier, encre Plan (échelle 1-45 000 – plan n° T 524 Sul.) ca. 1951 Haut-Lomami, Kamina, agglomération provisoire Congo belge, province du Katanga, district du Ayant fouillé les archives du SPF Affaires étrangères, et d’une résidence royale. L’œuvre d’Augustijnen est Sven Augustijnen (°1970) en tira un document pour un exemple de projet de recherche qui exploite les son exposition solo « Le Réduit », qui s’est tenue archives du SPF. Avec ses documents d’archives du 8 septembre au 19 novembre 2016 à La Loge à uniques, l’exposition « 175 ans de diplomatie belge » Bruxelles et pour l’exposition ‘How to live together’ (bibliothèque du palais d’Egmont, été 2005) offrait au Kunsthalle de Vienne (Autriche), du 25 mai au un autre exemple d’une telle démarche. 15 octobre 2017. Augustijnen montrait le fruit de ses recherches sur la ville de Kamina, située en République démocratique du Congo. En consultant notamment les archives du Centre de documenta- tion historique de la Défense, il découvrit un projet belge jusque-là inconnu : celui du développement d’une base militaire et d’une ville gouvernementale qui devaient servir de refuge en cas de menace ex- térieure. Au palais d’Egmont, le plan originel exposé en vitrine est la seule et unique preuve de cette volonté de bâtir, à Kamina, un site composé de loge- ments, d’une administration, de services généraux 12
C. CONVERSATION PIECES Yves Velter (°1967) est fasciné par les thématiques psychologiques et contemplatives qui occupent la « zone grise » de notre perception. À sa façon unique, tant conceptuelle que figurative, il s’empare de sujets qui, souvent, nous échappent de peu. Yves Velter La déclamation Cette œuvre se trouve normalement dans la salle 2016 de la délégation belge au Conseil européen, place Acrylique, encre chinoise, pigment, crayon, panneau dur Schuman à Bruxelles. Elle représente un homme H 80 x L 60 cm anonyme qui tient un plaidoyer. Dans l’univers de la diplomatie, la force de la parole est d’une impor- tance cruciale. L’art de l’éloquence peut revêtir de nombreuses formes : prendre la parole, déclamer, prononcer un speech, prendre position (dans une institution internationale, par exemple), expliquer un point de vue, construire un plaidoyer solide et dûment argumenté, faire des analyses critiques, renseigner sur une situation complexe… Ce dis- cours-ci est encore renforcé par sa disposition scé- nographique dans l’espace. Il permet aussi – au sens propre comme au figuré – de braquer les projecteurs sur la collection artistique des Affaires étrangères, si méconnue en raison de sa diffusion mondiale. Une autre peinture de Velter, intitulée ‘Dans van de twijfel’, est exposée dans le bureau du directeur du service d’encadrement Affaires bilatérales. 13
L’œuvre de Lieven Lefere (°1978) est caractérisée centaines de visiteurs étrangers ont été accueillis par une atmosphère déréalisante. Si elle a tous les dans ce bureau et, très souvent, l’œuvre a fourni un traits de la photographie documentaire, on se croirait excellent point de départ à des conversations fort néanmoins dans un décor post-apocalyptique. Ses animées. En juin 2018, la Belgique a été élue pour photographies peuvent être qualifiées de « simu- un mandat de deux ans (2019-2020) au Conseil de lacres » : des réalités et des lieux simulés. Lefere sécurité. C’est la sixième fois que la Belgique se cherche à détricoter différentes couches de réel, voit confier cette responsabilité. En accord avec le tout en questionnant le médium de la photographie slogan de la campagne, « bâtir le consensus, agir qui, d’après lui, trompe l’esprit en montrant une pour la paix », la Belgique œuvre pour une meilleure certaine réalité sous un certain angle. Il a appliqué protection de ses citoyens (en particulier les enfants) cette même stratégie dans une œuvre précédente, dans les zones de conflit, pour la prévention et la ‘General Assembly’, réalisée en collaboration avec résolution paisible des conflits, pour le respect des Charles Verraest. L’œuvre a été acquise en 2013 droits de l’homme et du droit humanitaire, et pour par le bureau du directeur adjoint aux Affaires mul- la consolidation d’une paix durable. tilatérales et à la Mondialisation, qui est aussi direc- teur de l’ONU dans le bâtiment principal Egmont I à Bruxelles. Le but était d’accrocher les regards des nombreux visiteurs attendus dans le cadre de la cam- pagne pour l’obtention d’un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. De 2014 à 2018, des Lieven Lefere & Charles Verraest General Assembly 2007 Tirage au jet d’encre Hahnemühle Fine Rag (308g) H 146 x L 175 x P 11 cm 14
Marie-Françoise Plissart Parlementaires debout 2004 Photo H 70 x L 70 cm Dans son ouvrage Kinshasa, récits de la ville invi- elle reste d’une remarquable actualité comme figu- sible, l’anthropologue Filip De Boeck met en lumière ration de la République démocratique du Congo. un phénomène qui est également illustré par la pho- L’œuvre « Parlementaires debout » a été acquise en to « Parlementaires debout » de Marie-Françoise 2018 pour l’AfrikaDesk de la direction générale des Plissart (°1954). Sous les arbres qui bordent les Affaires bilatérales, établie dans le bâtiment Egmont grands axes et boulevards de Kinshasa, on trouve I à Bruxelles. toutes sortes d’activités. Aucune de ces activités n’est exercée dans un immeuble : il ne s’agit pas du « bâtiment », mais du « concept ». Il suffit ainsi d’une corde tendue entre deux arbres pour y suspendre les journaux du jour et créer une tribune pour les « parlementaires ». Les gens se rassemblent sous les arbres pour commenter l’actualité et construire leur « agora », leur « parlement ». Bien que l’arène politique et diplomatique des organisations interna- tionales mondiales soit assez différente du contexte des parlementaires congolais autoproclamés, ces tribunes suscitent indéniablement des réflexions in- téressantes. Même si cette image remonte à 2004, 15
L’œuvre de Luc Tuymans (°1958) est souvent de cet artiste. En dehors de l’exposition, ce tableau empreinte d’ambiguïté. Les apparences s’avèrent orne le bureau du président du Comité de direction, trompeuses. Derrière un petit groupe de flâneurs chef de l’administration des Affaires étrangères, ou une maison à priori tranquille se cachent parfois dans le bâtiment principal Egmont I à Bruxelles. Pour plusieurs strates de sens. Cela pourrait aussi être le ce qui est des autres œuvres, « Giscard » se trouve cas de ‘The conversation’, où deux figures semblent dans la résidence du représentant permanent de avoir une conversation agréable et amicale. Tant les Belgique auprès de l’Union européenne à Bruxelles, multiples couches de lecture que les interprétations, ‘Worshipper’ dans la résidence de l’ambassadeur à les perceptions, les sens cachés et le sujet lui-même Amman, ‘Peaches’ et ‘Technicolor’ dans l’ambas- sont pertinents dans le contexte de la diplomatie. sade de Kiev, ‘Ballroomdancing’ et ‘Suspended’ Tous ces éléments peuvent, en effet, jouer un rôle dans la résidence du consul général à New York et dans l’analyse d’une situation donnée, dans le re- ‘Zelfportret’ dans la résidence de l’ambassadeur de cueil d’informations sensibles, le partage discret Belgique à Nairobi. d’éléments nouveaux et potentiellement cruciaux, la perception d’éventuels points de bascule dans cer- taines régions, la saisie d’opportunités, la recherche d’alliés, l’identification d’alliances et l’exploration Luc Tuymans de pistes ou d’ouvertures dans le cadre de problé- The Conversation matiques mondiales complexes… Le SPF Affaires 1995 étrangères possède quelques œuvres graphiques Sérigraphie sur papier Hahnemühle 200 grammes H 50 x L 63 cm 16
Ruben Bellinkx Stasis (still from HD film) 2013 Tirage numérique sur papier de qualité archive, monté sur aluminium H 66.5 x L 86 cm Ruben Bellinkx (°1975) invente un monde surréel, Egmont I à Bruxelles, et une salle de conférence de capable d’émerveiller le spectateur. Cet effet, il le la délégation belge auprès de l’OTAN. La Belgique renforce en créant une composition (setting) qui a participé à la création des principales organisa- laisse une image poétique toute en retenue, oscillant tions internationales comme l’ONU, l’OTAN, l’UE, quelque part entre reconnaissance et déréalisation. l’OSCE, le Conseil européen, etc. À l’intersection Il parvient, pour ainsi dire, à métamorphoser des du conflit et de la collaboration, la Belgique joue scènes quotidiennes familières en autant de situa- résolument la carte du multilatéralisme. À part des tions inédites. La réalité, à priori si certaine, soudain partenariats habituels, la Belgique noue, avec une at- vacille. Cette photographie représente un groupe titude ouverte, constructive et positive, les alliances de personnes positionnées autour d’une table de les plus larges possible avec des pays qui partagent réunion, tenant le bord de la table entre les dents. la même vision et les mêmes valeurs. Cette œuvre Cette œuvre – qui, en néerlandais, évoque la formule se concentre sur les hommes en costume sombre. ‘zich vastbijten in’ (s’accrocher, persévérer) – figure la Les interlocutrices y brillent par leur absence. La di- finalisation d’une tâche complexe, le fait d’assumer plomatie, qui s’est longtemps reposée sur des codes collectivement une certaine mission. Il se trouve que et des règles strictes, fut longtemps le bastion des cette image, ainsi que l’une de ses variantes, ornent hommes. Aujourd’hui, au fur et à mesure que ces respectivement le bureau du directeur général des codes et ces règles volent en éclats, la diplomatie Affaires multilatérales, dans le bâtiment principal belge cherche l’égalité des genres. 17
La photo ‘A Sudden Gust of Wind (after Jeff Wall Par le biais de cette photo, intitulée ‘Truck & Sign’, and Hokusai)’ de Max Pinckers (°1988) est extrait et de son panneau ‘Damaged’, Vincent Meessen d’une série intitulée ‘Two Kinds of Memory and (°1971) renvoie au pionnier américain de la photogra- Memory Itself’, qui date de 2015 et a été réalisée au phie de rue, Walker Evans. Evans a réalisé une photo Japon. Avant son départ vers le Pays du soleil levant, d’ouvriers qui, à New York, déplaçaient une enseigne Pinckers avait beaucoup appris sur celui-ci : haute- lumineuse pour le film (raté) ’Not damaged’. Par ses ment technologique, très centré sur lui-même, diffi- reconstitutions (reinactments), au travers desquelles cilement accessible aux étrangers, pays des bonsaïs, il re-crée et re-contextualise des situations en utili- sumos, kimonos, sushis, jeux vidéo… À son arrivée, sant une variété de médias artistiques, Meessen il constata toutefois que ces éléments n’étaient pas souligne l’importance du contexte et de la (mau- prédominants dans la culture japonaise. L’expérience vaise) interprétation de l’image. La contextualisation de ce conflit l’incita à tenter de construire lui-même est d’une importance tout aussi cruciale pour le SPF de tels stéréotypes culturels : il se mit à prendre Affaires étrangères. Les ambassades font office des photos de situations mises en scène, souvent d’antennes mondiales pour les multiples contextes inspirées d’images existantes et réalisées par des géographiques, politiques et économiques. Le étrangers, telle que la photo ‘A Sudden Gust of Wind contexte de l’intégration de l’œuvre de Meessen (after Hokusai)’ de Jeff Wall (1993). Ce mode de dans la collection des Affaires étrangères est éga- travail est en cohérence avec le principe fondamen- lement digne d’intérêt. Elle fut acquise en 2008, à tal de Pinckers, qui refuse de croire en l’objectivité l’initiative du ministre des Affaires étrangères de ou la neutralité de la photographie documentaire. l’époque, Karel De Gucht. Cette année-là, notre C’est ainsi qu’il cherche des stratégies visuelles pays entra dans les annales en formant un gouver- favorables à une approche subjective et qu’il fait, nement après 9 mois de négociations. Karel De notamment, un usage explicite de scènes et d’éclai- Gucht estimait que cette situation avait gravement rages de théâtre. Cette photo orne le service Presse endommagé la réputation de la Belgique à l’étranger. et communication, établi dans le bâtiment principal L’image de Meessen fait référence à cette période Egmont I à Bruxelles. Deux photos de sa série ‘The et la perpétue symboliquement dans le jardin du Fourth Wall’, réalisée en Inde en 2012, sont expo- palais d’Egmont, qui a depuis été rebaptisé le « jardin sées à Mumbai. Son interprétation de « La Jeune des sculptures des ministres ». Le prédécesseur fille à la perle » se trouve à l’ambassade de La Haye, du ministre De Gucht, le ministre Louis Michel, et à quelques encablures du Gemeentemuseum qui l’actuel ministre Didier Reynders y ont chacun ajouté abrite la version de Vermeer. La photo qui représente une œuvre d’un artiste belge, respectivement une des feuilles tourbillonnantes n’est pas la seule de ce sculpture de Pierre Culot et une de René Julien. genre dans la collection du SPF : citons ‘Leningrad – Les Journaux‘ de Christian Carez, photo d’un journal soulevé par le vent, qu’on peut admirer au consulat général à Saint-Pétersbourg, et une photo « sans titre » de Kelly Schacht, représentant des papiers flottant dans l’air, qui est exposée dans l’espace de la délégation belge auprès du Conseil européen, place Schuman à Bruxelles. Le consulat général à Montréal, enfin, abrite une photo d’une vitrine à Bruxelles, en édition limitée, de la main de Jeff Wall. 18
Max Pinckers A Sudden Gust of Wind (after Jeff Wall and Hokusai) Série Two Kinds of Memory and Memory Itself 2015 Tirage pigmentaire sur papier de qualité archive FibaPrint® ‘White Matte’ 280g/m2 Édition 2/5 (+ 2 A.P.) H 80 x L 98 cm Vincent Meessen Truck & Sign 2008 Photographie NB sur papier baryté H 82 x L 102 cm 19
Indéniablement figuratif, l’art pictural de Thierry En 2015, à l’occasion de « Mons, capitale euro- Falisse (°1973) n’est pas dépourvu d’un certain ré- péenne de la culture », le site du Grand Large a alisme, conféré par ses sujets – souvent inspirés accueilli une exposition intitulée « Le Grand Large de la vie quotidienne – et par la qualité hautement - Territoire de la Pensée ». Dans ce cadre, 24 artistes photographique de ses œuvres. L’artiste entretient ont été invités à créer des œuvres originales sur une relation ambivalente avec la toile, oscillant entre le thème du territoire et, plus spécifiquement, sur la prise de risque et le désir de contrôle. Ses théma- l’idée du départ vers des terres inconnues. L’artiste tiques obsessionnelles sont la mémoire et le souve- hispano-belge Emilio Lopez-Menchero (°1960) nir. Quant à ses origines – coréennes –, elles sont a créé son drapeau à partir d’une empreinte digi- pour lui un puissant levier de découverte. En partant tale numérique. Cette démarche s’inscrit dans sa de photos de lieux repérés dans des portraits de fa- pratique artistique pluridisciplinaire, au moyen de mille, il perpétue le récit – mythique – de la rencontre laquelle il interroge les diverses facettes de l’identité, de ses parents dans les années 1950, en pleine dont sa propre identité d’artiste au sein de la société. guerre de Corée. Cette peinture, qui représente un Attentif aux icônes de son époque et aux normes clavier d’ordinateur, est exposée dans les locaux du de la société, Lopez-Menchero estime que tout est service IT, dans le second bâtiment principal Egmont une question d’architecture, même la construction II à Bruxelles. Au fil du temps, la communication a de l’image de soi. L’empreinte digitale est le sym- considérablement évolué. Nous sommes loin des bole par excellence de l’identité unique de chaque télex manuscrits, fax et lettres cryptées qui servaient être humain. Depuis 2014, les passeports belges de moyens de communication entre les postes di- « biométriques » intègrent l’empreinte digitale de plomatiques et l’administration centrale à Bruxelles. leur titulaire. Après l’exposition, cette œuvre sera Aujourd’hui, ils ont été remplacés par l’ordinateur, les installée dans la salle de législation rénovée, acces- téléconférences, WhatsApp, Internet et les réseaux sible au public, de la direction générale consulaire. sociaux. Travailler dans un contexte international implique aussi de parler plusieurs langues : les trois langues nationales officielles, l’anglais comme lingua franca, et les langues locales. Ces évolutions exigent de développer les compétences personnelles et d’acquérir une véritable expertise dans le domaine de la traduction (services internes et externes), de la cybersécurité, etc. 20
Thierry Falisse Keyboard #5 2015 Huile sur toile H 150 x L 150 cm Emilio López-Menchero Le Grand Large 2015 Drapeau H 140 x L 190 cm 21
Emmanuel Kervyn X-men 2012 Papier H 85 x L 105 cm Marcel Ceuppens Haïti ! 2010 Tirage au jet d’encre H 70 x L 100 cm 22
L’assistance aux Belges en danger ne concerne pas Emmanuel Kervyn (°1959) fait la reliure. À part ça, seulement les matières consulaires : une telle aide il explore les différents facettes de son métier et sur- est également fournie par le centre de crise des tout les événements inattendus, une déchirure, une Affaires étrangères en cas de catastrophes natu- tache de colle, un mouvement du papier. Le papier, relles et de conflits urgents. Pensons notamment au comme le volume, comme l’image font partie de sa tremblement de terre qui dévasta Haïti dans la nuit pratique de recherche artistique. L’œuvre se trouve à du 12 au 13 janvier 2010. Le pays le plus pauvre de la section consulaire. Le « X » reçoit une signification l’hémisphère ouest fut frappé par un séisme qui fit symbolique d’un indice d’identité et d’anonymat. des dizaines de milliers de victimes. À l’image de la Kervyn utilise des journaux et des listes de noms des réponse rapide de la communauté internationale, registres téléphoniques. Ce dernier est étroitement le gouvernement belge activa B-Fast. Sur place, lié au domaine de la division consulaire : les registres les secouristes parvinrent à effectuer plus de 120 de la population consulaire, la fonction de « maison interventions chirurgicales, soigner près de 3 000, communale » des postes diplomatiques, l’assistance sauver de personnes des décombres et mener à consulaire aux Belges à l’étranger. bien de nombreux accouchements. Quant au centre de crise à Bruxelles, il demeura actif pour répondre aux appels de citoyens inquiets. L’année 2010 fut marquée par des séismes, des inondations et des éruptions volcaniques, mais aussi par la création de l’équipe FACT, acronyme de Foreign Affairs Crisis Team, qui devait permettre d’intervenir encore plus rapidement et efficacement à l’avenir. Dans les cou- loirs du centre de crise furent exposées les œuvres « Haïti ! » et « Eyjafjallajökull ! » de Marcel Ceuppens (°1960), comme symboles des nombreuses inter- ventions effectuées cette année-là, ainsi qu’avant et après cette date. Le protagoniste de Ceuppens est un « Elckerlyck », une figure humaine qui contemple la zone sinistrée en adoptant une attitude réfléchie et qui, bien que se trouvant à distance, interagit avec elle de manière concernée. 23
Avec « Atlas#8 », Wim Delvoye (°1965) crée une d’attente du cabinet du ministre des Affaires étran- carte du monde imaginaire aux continents, pays et gères vers une exposition temporaire au Conseil de lieux irréels. C’est une façon ludique de questionner l’Europe lors de la Présidence belge de 2010 vers la vision occidentale du monde ; le spectateur perd l’ambassade belge à La Haye. Après l’exposition, elle ses repères et se trouve brièvement désorienté. retournera à sa place actuelle, à la délégation belge Cette œuvre s’inscrit à merveille dans la collection auprès de l’Otan. d’anciennes cartes du monde et de gravures de villes et de régions des Affaires étrangères, ainsi que dans sa collection de cartes et d’interprétations contem- poraines du monde. La collection a ainsi été enrichie des visions du monde de Mona Hatoum, Michel François, Luc Deleu, etc. À proximité de la carte de Wim Delvoye Delvoye, le palais d’Egmont abrite une horloge dans Atlas#8 l’antichambre, qui représente la figure mythologique 2003 d’Atlas, portant la sphère terrestre sur ses épaules. Tirage Cibachrome sur aluminium L’œuvre elle-même a également voyagé : de la salle H 100 x L 125 cm 24
Catharina Van Eetvelde Cruise 2003 Film d’animation, couleur, son, 8’ Texte : Abigail Lang First-water-and memory-where land once was. Avec de la cartographie, Van Eetvelde crée un espace ces mots simples de Abigail Lang le film ‘Cruise’ mental. Il n’y a pas de localisation dans son travail, de Catharina Van Eetvelde (°1967) entame une l’équateur fonctionne comme une corde à laquelle croisière qui montre une vue poétique sur le monde. les territoires en dispersion sont ancrés. Le monde 1300 dessins deviennent vivants dans une vidéo de retourne vers une sorte de source gisant de la mer. 8 minutes dans lequel ils apparaissent des cartes, Sur les extensions de la mer, des fragments des où s’ouvrent des parties de pays et se dispersent continents sont mixés avec d’autres par les cou- des territoires. La ligne est légère et précise, elle rants. La carte du monde n’a plus de centre, elle montre une rigueur scientifique qui peut être lue redéfinit le monde comme une superficie ouverte, comme informative et ensuite comme une narration une plate-forme mondiale faite par des courants. complexe. L’histoire humaine est éclipsée par la Van Eetvelde invite le public à une croisière sans convention des faits durs, la topographie, la démo- destination planifiée, c’est un voyage qui a secoué graphie, l’économie etc. L’œuvre apparait comme toutes les grilles de coordonnées. une relecture du monde par des codes de la car- tographie. Plutôt qu’une cartographie historique, il faudra percevoir ‘Cruise’ par les sens. Par les codes 25
Félix Augustin Milius Réception solennelle du consul général de Belgique M. Daluin, par l’Empereur du Maroc à Rabat, le 2 décembre 1865 1865 Huile sur toile H 140 x L 170 cm Costume ambassadeur Dupret Prêt Familie Dupret 26
D. A RISKY BUSINESS La diplomatie n’a jamais été un métier sans risque. La diplomatie se caractérise par une série de symboles et Lorsque les relations bilatérales se gâtent, les ambassa- de règles protocolaires, comme la remise des lettres de deurs peuvent vite devenir la cible des manifestants. C’est créance au chef d’État local et le costume d’ambassadeur. ainsi que l’ambassadeur de Belgique à Rabat, Marcel À l’exposition « 175 ans de diplomatie belge », le public Dupret, fut tué lors d’un attentat perpétré par les cadets de pouvait admirer un tableau représentant l’ambassadeur l’armée marocaine contre le roi Hassan II, au Palais d’été Daluin au moment où, en tant que premier ambassadeur de Skhirat, le 10 juillet 1971. L’ambassadeur Dupret avait de Belgique au Maroc, il remet ses lettres de créance au eu une carrière mouvementée. Né en 1919, ce juriste de sultan. En 2005, le tableau fut restauré lors d’un passage formation faisait partie de la Résistance lors de la Seconde en Belgique. Il a depuis retrouvé sa place au mur de la Guerre mondiale et s’engagea dans les commandos au résidence de l’ambassadeur belge à Rabat. Le « costume lendemain de la Libération. Il débuta sa carrière diploma- d’ambassadeur » exposé en vitrine à cette exposition ‘Art tique en 1946 et enchaîna les postes dans des régions & Diplomacy’ appartenait à feu l’ambassadeur Dupret. sensibles, voire dangereuses, comme Nairobi – qui connut Il ne le portait toutefois pas au moment de l’attentat à la révolte des Mau-Mau – ou encore Brazzaville, vers Skhirat, mais quelques mois plus tôt, lors de la remise laquelle de nombreux Belges déménagèrent pour fuir de ses lettres de créance au roi Hassan II, cérémonie les problèmes en RDC. Il fut consul général à Jérusalem qui l’accrédita formellement comme ambassadeur de et ambassadeur à Bagdad, avant d’être nommé ambas- Belgique au Maroc. Ces costumes étaient jadis revêtus sadeur à Rabat en 1970. Le 10 juillet 1971, il mourut des lors d’occasions spécifiques, telles que la remise des suites d’une blessure par balle, laissant une veuve et lettres de créance, la célébration de la Fête nationale, la sept enfants. Le parcours personnel et professionnel de présentation des vœux de Nouvel An du corps diploma- Marcel Dupret offre un exemple de carrière diplomatique tique au chef d’État, etc. Aujourd’hui, ils ne sont plus que et des situations (dangereuses) qu’un ambassadeur est rarement portés. susceptible de rencontrer. L’ambassadeur belge Claude Ruelle fut blessé lors de l’attentat au Caire du 6 octobre 1981, qui coûta la vie au président Sadate. D’autres diplo- mates ont vécu de graves conflits, échappant parfois de justesse à la mort. Un bon exemple nous est offert par le récent reportage de la VRT sur le génocide rwandais, qui comprend notamment le témoignage de Johan Swinnen, ex-ambassadeur de Belgique à Kigali. D’autres encore ont raconté à quel point il était ardu d’être affecté à un poste aux conditions difficiles, comme Arnout Pauwels, ancien ambassadeur de Belgique en Afghanistan, dans un reportage de la VRT signé Annemie Struyf. La RTBF, enfin, a sorti un reportage pertinent sur Hendrik Van De Velde, ex-ambassadeur de Belgique en Jordanie, qui se préparait pour une mission en Irak. 27
E. FADING MEMORY ‘Fading Memory’ de Ronny Delrue (°1957) porte sur la relativité et l’éphémère, sur l’importance que revêtent certaines personnes à un moment donné, avant que s’évanouisse cette importance, disparaisse leur nom, leur visage. Il s’agit là d’une thématique fré- quemment rencontrée dans l’œuvre de Delrue. Dans le contexte des Affaires étrangères, on peut faire le lien avec le caractère transitoire des postes diploma- tiques et des fonctions à l’administration centrale. Dans le contexte de l’exposition, on notera que l’œuvre fait l’effet d’une installation contemporaine dans le décor classique de l’antichambre, entourée comme elle l’est des portraits majestueux de Léopold Ier, pre- mier roi des Belges, et de Louise-Marie, sa seconde épouse. Après l’exposition, l’œuvre déménagera vers la section protocolaire du palais d’Egmont. Là encore, elle aura l’impact d’une installation artistique contem- poraine, flanquée des portraits d’anciens ministres des Affaires étrangères et d’un buste d’un ancien chef de l’administration. Cet effet déréalisant incitera les visiteurs à s’interroger sur l’identité de ces hommes si solennellement représentés et que la fuite du temps a transformés en autant de nobles inconnus. Ronny Delrue Fading Memory 2014 Édition, tirage à 7 exemplaires Plâtre H 53 x L 38 x P 16 cm 28
F. FOOD FOR THOUGHT L’un des instruments de la diplomatie est la diplo- une idée peut sembler bonne, mais pour savoir si matie culinaire. Celle-ci est abordée de diverses elle l’est vraiment, il convient de la mettre en œuvre manières dans la galerie des miroirs et le salon des et d’en observer le résultat. dames : un évènement culinaire, une table dressée de manière officielle, une vidéo d’un banquet festif Nombre d’artistes ont travaillé sur des sujets culi- dans le désert et une série de vases en céramique. naires, sur le rassemblement de personnes autour de mets ou boissons partagés, sur le cadre d’une telle La diplomatie culinaire repose sur plusieurs piliers : rencontre ou sur le contenu de l’assiette et le mode le cadre, le menu, les invités et les sujets de discus- de consommation. Le spectateur découvrira ici une sion. La gastronomie belge jouit d’une excellente sélection de passages de la vidéo ‘Celebration’, ré- réputation à l’international. Au vernissage de l’ex- alisée par Hans Op de Beeck (°1969) : un banquet position, Samuel Albert, lauréat de Top Chef 2019 copieux est installé dans un décor surréaliste, celui et cuisinier de l’ambassade belge à Tokyo, a réalisé du désert de l’Arizona, aux États-Unis d’Amérique. une pomme inspirée de Magritte pour les convives. Cette vidéo, prêtée par l’artiste, a été projetée pen- Lors de l’exposition, cet évènement est projeté en dant deux ans dans le restaurant du bâtiment princi- guise de happening sur un écran télévisé. pal à Bruxelles. Les ambassades aussi empruntent des œuvres d’art. Le duo d’artistes Mon Colonel Au fil du temps, plusieurs labels belges de qualité & Spit (Eric Bassleer, °1974 et Thomas Stiernon, ont été présentés aux convives. Pensons à la porce- °1977) et l’artiste Maarten Vanden Eynde (°1977) laine de Baudour, aux couverts en argent de Wolfers ont réussi, chacun à leur manière, à faire découvrir et aux verres en cristal de Val-Saint-Lambert. Depuis au grand public la céramique, forme d’art plutôt ré- toujours, une attention particulière est accordée au servée aux arts appliqués et à une certaine classe cadre, à la présentation, à l’accueil et au placement sociale. Les uns le font en utilisant du graffiti et des des invités. En témoigne la table dressée dans le belgicismes dans leur vase « la vie est belge », l’autre salon des dames, couverte de précieuses pièces en réutilisant un vase Ikea dans un discours sur l’ar- d’argenterie, de porcelaine et de cristal. chéologie et la science qu’elle crée, où le présent se dessine comme le passé de demain. L’objectif d’un dîner ou d’une rencontre est de réunir un certain nombre de convives. C’est l’occasion de rassembler des personnes d’obédiences et d’ho- rizons divers pour discuter de sujets particuliers, vérifier le sens des réalités de chacun, etc. Les sujets de discussion importent tout autant. L’expression anglaise ‘the proof of the pudding is in the eating’ s’applique également aux contacts diplomatiques. Elle s’utilise souvent pour les idées : 29
Mon Colonel & Spit La vie est belge 2016 Céramique H 69 cm Maarten Vanden Eynde Vase Ikea 2017 Céramique H 30 x L 50 x P 30 cm 30
Hans Op de Beeck Celebration 2008 Video de 4’28”, Couleur, son Vidéo Full HD Transférée sur Blu-ray Courtesy de l’artiste 31
COLOPHON Cette exposition d’été ‘Art & Diplomacy’ se tient du 21 juillet au 30 août 2019 au palais d’Egmont à Bruxelles. C’est la hui- tième édition : après des créations en dentelle (Isabelle de Borchgrave), des créations des étudiants de la mode (Fashion@ EgmontPalace), des œuvres d’art sur les thèmes de migration (Text-île), de servitude (@yourservice), de street art (Belgian Crew), une œuvre florale (Daniël Ost) et des œuvres des artistes africains (AfricaMuseum@EgmontPalace), la collection d’art du SPF Affaires étrangères est pour la première fois mise en lumière. Les expositions sont le fruit d’un événement d’un jour à l’occasion de la Fête Nationale belge, le 21 juillet 2012. Cet événement est une initiative du ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders. Depuis 2013, les expositions sont organisées à la volonté du ministre et développées par le kunstcomité d’art des Affaires étrangères. Remerciements : Nous tenons à remercier l’ensemble des artistes, galeries et entreprises, le comité d’art externe et interne, le groupe de travail de l’exposition, les différentes directions, l’ambassade belge à Madrid, la délégation belge de l’Otan et la Représentation permanente auprès de l’Union européenne, pour le soutien sur le plan de la logistique et du contenu. Scénographie et éclairage : Vidisquare, Licht, Lieven Lefere, Galerie Jan Mot, SPF Affaires étrangères. Textes : Les artistes, le groupe de travail interne et tous les interlocuteurs. Traduction : Agence de traduction et service de traduction Affaires étrangères. Crédits photos Photographie : Ruben Bellinkx, Carl De Keyzer, Wim Delvoye, Thierry Falisse, Galerie Greta Meert (Catharina Van Eetvelde), Philippe Herbert (Ronny Delrue), Johan Muyle, Otobong Nkanga, Hans Op de Beeck, Max Pinckers, Marie-Françoise Plissart, Jean-Pol Schrauwen (Sven Augustijnen, Guy Bleus, Marcel Ceuppens, Mon Colonel & Spit, Emmanuel Kervyn, kostuum ambassadeur Dupret, Emilio López-Menchero, Vincent Meessen, Bernard Queeckers, Maarten Vanden Eynde), Ana Torfs, Vlad Vanderkelen (Luc Tuymans), Yves Velter et Willemen Groep (Kinshasa). Image de la page de couverture : Max Pinckers, A Sudden Gust of Wind (after Jeff Wall and Hokusai), 2015, Coll. SPF Affaires étrangères, tous les droits sont réservés. Conception graphique : Iris Van Robays Impression : Imprimerie SPF Affaires étrangères Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au développement Rue des Petits Carmes 15 1000 Bruxelles Tél. : +32 501 81 11 www.diplomatie.belgium.be Édité par Bruno van der Pluijm Président a.i. du Comité de direction Il est interdit de réutiliser les supports photographiques. Cette publication est fournie à titre informatif et ne crée aucune contrainte juridique dans le chef de l’éditeur. Juillet 2019
100 artistes contemporains dans la collection d’art du SPF Affaires étrangères : Francis Alÿs - Nobuyoshi Araki - Carla Arocha - Abel Auer Virginie Bailly - Sammy Baloji - Charlotte Beaudry - Charif Benhelima - Marcel Berlanger - Lieve Blancquaert - Guy Bleus Delphine Boël - Sébastien Bonin - Mon Colonel & Spit - Berlinde De Bruyckere - Celine Butaye - Patrick van Caeckenbergh - Sarah Carlier - Fia Cielen - David Claerbout - Sara Conti - Delphine Deguislage - Carl De Keyzer - Edith Dekyndt - Colin Delfosse Ronny Delrue - Wim Delvoye - Alfred dUrsel - Fred Eerdekens Hadassah Emmerich - Thierry Falisse - Michel François - Lara Gasparotto - Kaif Ghaznavi - Tina Gillen - Shilpa Gupta - Mona Hatoum - Kati Heck - Ann Veronica Janssens - Viviane Joakim Reina Saina Kallat - Nikita Kadan - Eddy Kamuanga Ilunga - Anish Kapoor - Marin Kasimir - Jean Katambayi Mukendi - Anne-Mie Van Kerckhoven - An-Sofie Kesteleyn - Aglaia Konrad - Sophie Kuijken - Marie-Jo Lafontaine - Sophie Langhor - Corinne Lecot Elisabeth Lecourt - Namsa Leuba - Emilio Lopez Menchero - Mark Luyten - Sarah Van Marcke - Cécile Massart - Michaël Matthys Marcelo Moscheta - Aimé Mpane - Johan Muyle - Maryam Najd Otobong Nkanga - Aimé Ntakaiyica - Sophie Nys - Hans Op de Beeck - Goedele Peeters - Max Pinckers - Marina Pinsky - Tinka Pittoors - Benoit Platéus - Marie-Françoise Plissart - Bernard Queeckers - Kelly Schacht - Georges Senga - Stefan Serneels Helmut Stallaerts - Bart Stolle - Elly Strik - Walter Swennen Johan Tahon - Pascale Marthine Tayou - Ana Torfs - Luc Tuymans Sarah Vanagt - Koen van den Broeck - Maarten Vanden Eynde Carole Vanderlinden - Catharina Van Eetvelde - Rinus Van De Velde - Yves Velter - Angel Vergara - Pieter Vermeersch - Katrien Vermeire - Ane Vester - Leen Voet - Jef Wall - Sophie Whettnall Plus d’info : https://diplomatie.belgium.be/fr/artategmontpalace
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