Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Anthropology of food Comptes-rendus de lecture 2020 Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires Isabelle Techoueyres Electronic version URL: http://journals.openedition.org/aof/10496 ISSN: 1609-9168 Publisher: Isabelle Téchoueyres, Matthieu Duboys de Labarre Electronic reference Isabelle Techoueyres, « Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires », Anthropology of food [Online], book reviews 2020, Online since 28 May 2020, connection on 28 May 2020. URL : http://journals.openedition.org/aof/10496 This text was automatically generated on 28 May 2020. Anthropologie of food est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires 1 Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires Isabelle Techoueyres Frédéric PRÉCIGOUT, 2019, Logiques des peurs alimentaires, Perspectives ethnosociologiques. Paris : L’Harmattan, Coll. Questions alimentaires et gastronomiques. 352p. 1 Le sujet des peurs alimentaires est inépuisable; sans cesse réitéré, de manière renouvelée, il est abordé dans la littérature scientifique selon diverses perspectives, telles l’anthropologie (Douglas 1966), la nutrition (Apfelbaum 1998), l’histoire (Ferrières 2002), la sociologie (Raude 2006) ou la psychologie (Denoux 2014). L’ouvrage présenté ici vient apporter sa pierre toute particulière, selon une approche ethnosociologique, ainsi que son auteur le revendique. Celui-ci se fonde en grande partie sur son travail de thèse de sociologie1. 2 Frédéric Précigout, chercheur dans l’âme, a suivi un parcours atypique. Doté d’un œil scrutateur, armé d’une curiosité acérée et critique, il a fait sienne l’approche anthropologique. Il examine ainsi depuis une vingtaine d’années les mangeurs aux prises avec leur alimentation, dans la complexité de leurs relations sociales, de leurs rapports aux institutions et à leur imaginaire. S’il ne publie pas très souvent, lorsqu’il le fait, il présente une réflexion à la fois dense, documentée et attractive. Cet ouvrage témoigne de la mise à profit et de la richesse tirée du temps long du mûrissement. 3 Logiques des peurs alimentaires est donc le fruit d’une vingtaine d’années de recueils de discours, d’observations, de réflexions, qui ont débuté au moment de la « crise de la vache folle ». Ce temps long constitue un des intérêts de cet ouvrage puisque, tout à la fois, il rend compte des mécanismes invariants qui sous-tendent les inquiétudes alimentaires, et les situe dans leur contexte historique et social, ce qui permet de saisir les logiques sous-jacentes, même en-dehors de toute actualité brûlante. Les peurs demeurent à travers le temps, les logiques varient dans leurs formes et contenus. Anthropology of food , Comptes-rendus de lecture 2020
Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires 2 4 Les peurs alimentaires sont bien particulières, car les aliments sont littéralement incorporés. Cet ouvrage décortique les peurs (au sens large) et angoisses alimentaires vécues par les individus à la lumière de quelques scandales, resitués dans les relations individu/société, à partir de l’expérience concrète des acteurs, chacun selon sa position : producteurs, experts, médecins, mangeurs « anonymes ». Par une mise en tension de critères d’âge, génération, genre et situation sociale, il montre comment la perception du risque est une dynamique où interagissent les contextes sociaux, les trajectoires individuelles et familiales. L’auteur procède selon une méthodologie inductive, typique de l’anthropologie, partant de la logique et la subjectivité des personnes interrogées. Il explique qu’il s’agit pour lui de rendre compte d’un ensemble de situations non représentatives mais plutôt exemplaires. Le chercheur construit ainsi son objet d’étude à partir de la réalité concrète recueillie par lui-même, en s’appuyant notamment sur les récits de vie (cf. Bertaux 2016). L'auteur décrit la transformation des peurs, l'évolution des représentations concernant les relations entre l'alimentation et la santé, la maladie et les usages de la nourriture au service d'une idéologie de beauté et de santé. Il s’attache à multiplier les points de vue, à déconstruire les discours, afin de mettre à jour des rationalités et aider à la compréhension des attitudes. 5 L’ouvrage se compose de trois parties, séparées par deux courts « intermèdes » permettant des précisions méthodologiques. La première (trois chapitres) dresse un panorama des enjeux sociaux et politiques qui organisent la construction sociale des peurs alimentaires. S’appuyant sur de nombreux auteurs, il met à profit certains aspects de leurs travaux pour éclairer son sujet. Il commence par rappeler le traitement des peurs, risques et incertitudes alimentaires par les sciences sociales en reprenant notamment les analyses d’Ulrich Beck (2009) relatives au progrès dans une démocratie et la conception du danger, selon lesquelles la gestion du risque est avant tout politique. Il fait un détour historique avec Madeleine Ferrières (2002) qui montre comment le rôle de l’État grandit par l’édification de réglementations censées protéger les mangeurs dans la délégation croissante de la production alimentaire et que, loin de disparaître, les peurs alimentaires s’actualisent à chaque époque selon des modalités singulières. Il rappelle que la sélection des risques s’organise selon des critères culturels, propres au temps, ainsi que l’avait démontré Mary Douglas (1966). Il met en évidence le retournement des représentations dans notre monde post-industriel : tandis que la principale crainte a longtemps été celle du manque, en Europe depuis quelques décennies les inquiétudes portent essentiellement sur la qualité de l’alimentation. Cette crainte s’accompagne d’un retournement du regard que porte la société sur « la nature », considérée aujourd’hui comme synonyme de sain et désirable tandis que modernité et progrès, censés traduire la prise de contrôle par les humains, sont porteurs d’incertitudes et de menaces. Se référant aux réflexions de Marc Abelès (2006) sur le rapport à l’insécurité dans un contexte de globalisation, Frédéric Précigout reprend à son compte l’observation que le traitement des dangers, maladies de société et crises, par le politique dans nos sociétés se traduit par un nouveau mode de relation : la survivance l’emporte sur la convivance. Ainsi la rationalisation politique contemporaine de la gestion des risques a abouti au « principe de précaution ». L’accroissement de la régulation des menaces, outils de la construction sociale de la confiance, va de pair avec la délégation alimentaire – produisant en retour de la défiance. Les politiques de gestion du risque sont l’objet de disputes, ainsi que l’ont montré Callon et al. (2001) : la gestion des incertitudes dans les démocraties, qui ne peuvent répondre de façon satisfaisante aux problématiques, débouche sur des Anthropology of food , Comptes-rendus de lecture 2020
Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires 3 polémiques. La sécurité sanitaire des aliments mobilise un ensemble hétérogène d’acteurs publics qui mettent leur expertise au service de l’intérêt général. L’auteur examine ainsi les positions et intérêts des différents protagonistes : la légitimité des experts, des savants, des politiques, des acteurs économiques ; des acteurs sociaux (lanceurs d’alertes, collectifs …). Puis il montre comment les politiques d’information et de communication, censées éduquer, pour inciter à adopter un comportement responsable, transforment le contrôle social (presque l’autocontrôle de Norbert Elias (1973)) et interfèrent avec les processus de gestion (exemple du PNNS 2 et la pléthore d’informations qui créent de la confusion). Le risque alimentaire, relevant en partie du domaine de la santé, est tout particulièrement le lieu où confluent les luttes de pouvoir entre la santé publique et l’économie. Frédéric Précigout décrit les processus qui amènent à la « dictature de la santé », soulignant la responsabilisation et l’intériorisation par les individus qui doivent gérer les risques, les rendant consommateurs de santé, tandis que la médicalisation de la santé s’accompagne de moralisation. L’auteur décrit les modes de régulation par les institutions et par les pratiques singulières des personnes, l’immixtion des pouvoirs publics dans la relation privée de l’individu à son destin physique au moyen d’injonctions et de normes - ce qui résonne particulièrement en cette période de pandémie. Il emmène le lecteur à la rencontre de plusieurs médecins et experts qui témoignent, de leur place, de l’effet éminemment anxiogène des campagnes d’information-santé, révélant au passage comment se co-construisent les normes de qualité et de sécurité. Au fil de ses entretiens, avec des personnes de différentes générations, il décortique ensuite le phénomène d’urbanisation des modes de vie, la déconnexion avec la production alimentaire et la place des informations nutritionnelles. Apparaît en relief la représentation partagée d’un passé imaginé valorisé, qui engendre la patrimonialisation des productions, l’aspect rassurant de valeurs telles que le local ou le bio, montrant ainsi l’imbrication des thématiques. 6 L’intermède qui articule cette partie à la suivante souligne que les histoires de vie se situent à l’intersection des déterminismes sociaux et des créativités singulières. La deuxième partie (deux chapitres) présente une ethnographie des représentations et des conduites. Au moyen de portraits sélectionnés de mangeurs, l’auteur examine l’impact des trajectoires socio-culturelles sur les peurs alimentaires. En reconstituant la façon dont les gens mangent, au moyen de témoignages précis et consistants, il montre comment les peurs s’insèrent dans un contexte et révèle les réponses que les individus mettent en place. Il procède en comparant les représentations, pratiques, normes et valeurs entre diverses générations, adoptant une posture transversale et en plaçant les rapports de genre au cœur de cette analyse. Il insiste sur la division sexuée des rôles, notant que nourrir sa famille, prendre soin de soi et des autres demeurent des attributs féminins. 7 Ayant démontré que la perte de maîtrise est génératrice d’angoisse, l’auteur dresse ensuite un inventaire des stratégies mises en place pour se protéger de l’anxiété, pointant, entre autres, l’inadéquation des pratiques aux discours et, au-delà, le paradoxe des normes alimentaires censées protéger les mangeurs mais qui sont aussi perçues comme une ingérence, voire une moralisation, c’est-à-dire non dénuées de risques. 8 Ainsi Frédéric Précigout organise son propos à partir des problématiques développées au fil de ses entretiens, entraînant le lecteur au cœur de divers parcours de vie, Anthropology of food , Comptes-rendus de lecture 2020
Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires 4 partageant des extraits de son journal de terrain. On y aborde ainsi la peur du manque et celle de la maladie, selon des personnes âgées ayant connu la guerre, la crainte d’empoisonnement face à l’abondance et aux « maladies du siècle ». À travers les portraits de jeunes célibataires, de couples avec et sans enfants, il expose l’impact des trajectoires socio-culturelles sur le ressenti des peurs. Il questionne la relation du genre avec le rapport au corps. Ce corps, envisagé comme objet culturel et d’autocontrôle, soumis aux normes de santé, beauté, gastronomiques, religieuses, morales, apparaît comme la projection de valeurs sociales contemporaines. Le déclaratif, bien que traduisant la réflexivité alimentaire, ne rend pas compte des pratiques réelles face à un discours normatif alimentaire qui s’exprime en termes de réussite ou d’échec, d’obstacles, de rigueur et de pratique. Grâce aux exemples vivants présentés, on voit à l’œuvre les conflits de normes, les représentations fondées selon un axe bien/mal, avec leur cortège de déviance et de culpabilisations. Ainsi les formes de peurs alimentaires sont structurées selon les trajectoires socio-culturelles, la classe d’âge, la génération, l’habitat, le genre, le parcours de vie, l’enjeu du rapport au risque étant de rester en bonne santé. 9 Le second intermède établit un nouveau point méthodologique et l’auteur en profite pour réaffirmer ses perspectives théoriques. Ainsi, si le discours sur la maladie va bien au-delà du biologique (Fassin & Jaffré 1990), il est aussi le révélateur de conflits sociaux (Fainzang 1989). Frédéric Précigout entreprend donc l’examen des systèmes de mise en accusation, au moyen de l’analyse de la rationalité des discours recueillis, en tenant compte des basculements d’opinion de la part des locuteurs en fonction des situations d’énonciation. Les trois chapitres qui constituent la troisième partie s’attèlent à dégager les logiques des peurs. Est d’abord décrit le mécanisme de la mise en accusation et de la responsabilité, qui permet de donner aux personnes l’impression d’une maîtrise, d’un contrôle. S’appuyant sur Claudine Herzlich (1996), il tente, à travers les étiologies sociales de la maladie et de la santé, de dégager une typologie des peurs : essentiellement la peur du trop et la peur du poison agro-alimentaire. Ainsi le mal peut venir de soi ou bien de l’extérieur, la société étant un personnage qui intervient dans la vie des individus. La conception de la santé propre à notre société actuelle, envisagée comme un capital (assertion étayée par des références recensées dans la presse), renvoie à la responsabilité individuelle. Ensuite, Frédéric Précigout utilise la crise de la vache folle en tant que figure paradigmatique des peurs alimentaires liées à l’industrialisation, de crise de la confiance, pour dessiner une recomposition des logiques de peurs en articulant politiques de santé publique, données microsociales et macrosociales. Là encore, il fonde son propos sur ses entretiens de première main avec des éleveurs et des vétérinaires et examine les stratégies des mangeurs et les discours des professionnels en période de crise. Il relève les oppositions et confusions dans les représentations des uns et des autres de la « nature », de la « tradition », de la « qualité », de la « sécurité alimentaire ». Il analyse, face aux notions de transgression (au nom du profit) et de trahison, les mises en accusation (des éleveurs, des medias, des industriels, des pouvoirs publics) qui conduisent aux sanctions. Nommer les responsables permet ainsi de rationnaliser l’angoisse. 10 Enfin, au terme de ce travail, l’auteur dégage deux thématiques primordiales : la quantité et l’hygiène des aliments, la peur du manque et celle de l’empoisonnement. Toutes générations confondues, émerge aujourd’hui une vision commune décadentiste : « avant on mangeait mieux ». Les qualificatifs de local, paysan, biologique sont perçus Anthropology of food , Comptes-rendus de lecture 2020
Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires 5 comme des valeurs permettant d’endiguer les maladies du siècle et les problèmes sanitaires, et de canaliser les préoccupations éthiques (rémunération équitable). Il considère les fondements sociaux de la confiance et de la défiance selon l’opposition sociale des groupes dominants vs. les classes moyennes, la perception du risque étant structurée en fonction de critères socio-culturels. Le discours sur les peurs alimentaires apparaît comme une métaphore du lien social et politique, chargé de tensions sociales. Enfin, il dégage, en les reprenant à son compte, les formes d’accusations évoquées par Sylvie Fainzang (1989) : l’auto-accusation et celle du proche, l’accusation de l’Autre éloigné, de l’industrie, de la société. Par le choix des aliments et des lieux d’achats, on voit que l’alimentation est un acte politique, signifiant la participation de l’individu à la Cité. L’auteur termine en pondérant la modernité réflexive telle que décrite par Beck (2001) qui réintroduit le fait moral et la responsabilité individuelle ou collective, faisant passer de la culpabilité au ressentiment (dirigé vers la société ou autrui), qui constitue une nouvelle « prise » - une manière de reprendre le contrôle. 11 S’adressant à un large public, le livre de Frédéric Précigout offre ici une réflexion approfondie sur les rouages sous-jacents de la société contemporaine, nourrie par différents auteurs habilement mis en relation et sur lesquels s’appuie l’argumentation. Le lecteur se voit ainsi entraîné dans les méandres de la production de la connaissance, à partir de matériaux théoriques qu’accompagne, et c’est ce qui fait la force de l’ouvrage, la richesse des données de première main. Par le recueil et la mise en lumière de la complexité des mangeurs, par l’attitude réflexive de l’auteur, on est témoin des multiples bricolages, représentations, précautions. Malgré quelques redondances dans le traitement du contenu, l’écriture est agréable, pimentée d’une pointe d’humour. BIBLIOGRAPHY ABELES M. 2006. Politique de la survie. Paris : Flammarion. APFELBAUM M. (dir.) 1998. Risques et peurs alimentaires. Paris : Odile Jacob. 288 p. BECK U. 2001, La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, trad. de l’allemand par L. Bernardi, Paris : Aubier. BECK U. 2009. World at risk. Cambridge : Polity. BERTAUX D. 2016. Le récit de vie. Paris : Armand Colin 128 : sociologie. CALLON M., LASCOUMES P., BARTHE Y. 2001. Agir dans un monde incertain. Essai sur la démocratie technique. Paris : Aubier. DOUGLAS M. 1966. Purity and Danger: An Analysis of Concepts of Pollution and Taboo. London : Routledge. ELIAS N. 1973. La Civilisation des mœurs. Paris : Calmann-Lévy. FAINZANG S. 1989. Pour une anthropologie de la maladie en France. Un regard africaniste. Paris : Ed. Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Anthropology of food , Comptes-rendus de lecture 2020
Compte-rendu de Frédéric Précigout, Logiques des Peurs alimentaires 6 FASSIN D. & JAFFRE Y. 1990. Sociétés, développement et santé. Paris: Les Éditions Ellipses, Collection Médecine tropicale. FERRIÈRES M. 2002. Histoire des peurs alimentaires. Du Moyen-Âge à l’aube du XX e siècle, Paris : Éd. du Seuil, coll. L’univers historique. RAUDE J. 2006. Une analyse sociologique des peurs alimentaires : le cas de la crise de la « vache folle », thèse de doctorat en sociologie, dir. C. Fischler, Paris : EHESS. NOTES 1. Thèse sous la direction de Jean-Pierre Corbeau, soutenue en 2011 et intitulée Les formes de peurs émergeant dans l'alimentation des sociétés occidentales contemporaines. Analyse, déconstruction et reconstruction de discours et pratiques des acteurs de la filière du manger. 2. PNNS : Plan national nutrition santé ; « La mise en place d’une politique nutritionnelle est apparue, au cours des quinze dernières années, comme une priorité de santé publique », https:// www.mangerbouger.fr/PNNS/Le-PNNS/Qu-est-ce-que-le-PNNS . AUTHOR ISABELLE TECHOUEYRES Anthropologue, UMR 5313 PASSAGES, Université Bordeaux Montaigne ; i.techoueyres@orange.fr Anthropology of food , Comptes-rendus de lecture 2020
Vous pouvez aussi lire