Conférence EDF : l'innovation dans l'hydraulique - Compte-rendu
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SOMMAIRE Introduction_______________________________________________________________ 3 I. Le CIH du Bourget-du-Lac : enjeux de R&D __________________________________ 3 1. Sûreté des aménagements _____________________________________________ 3 2. Performance ________________________________________________________ 3 3. Environnement ______________________________________________________ 4 II. Quelques exemples d’innovation __________________________________________ 4 1. Génie civil __________________________________________________________ 4 2. Innovations dans d’autres domaines ______________________________________ 6 Pour aller plus loin _________________________________________________________ 8 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 2 sur 8
INTRODUCTION Cette conférence a été organisée par le Centre d’Ingénierie Hydraulique d’EDF (CIH), dans le cadre du programme événementiel fêtant les 25 ans de la présence du CIH à Savoie Technolac. L’ouverture de la conférence a été faite par Daniel Fritsch, directeur adjoint du CIH. Après une présentation générale des activités de recherche et développement du CIH et des enjeux majeurs auxquels est confrontée aujourd'hui la filière hydraulique par Alain Petitjean, responsable R&D, plusieurs intervenants se sont succédés pour présenter des exemples de projets innovants menés par le CIH. I. LE CIH DU BOURGET-DU-LAC : ENJEUX DE R&D La R&D du Centre d’Ingenierie Hydraulique du Bourget-du-Lac est centrée autour de trois problématiques majeures : la sûreté des aménagements, la performance et l’aspect environnemental. 1. Sûreté des aménagements Les barrages sont des sources de risques potentiels, et leur sûreté est un enjeu majeur. Les ouvrages d’EDF ne sont pas très vieux – environ 60 ans de moyenne d’âge – mais nécessitent néanmoins des travaux réguliers d’entretien et de maintenance. 1995 représente une date clé pour la sécurité des ouvrages hydrauliques : lors d’une sortie éducative, six élèves de primaire ainsi que leur accompagnatrice ont été emportés par le courant généré par une montée des eaux en aval du barrage du Drac. Ce drame a largement contribué à l’intégration des interactions des ouvrages avec les populations dans la prise en compte des risques, au-delà de la seule tenue des ouvrages. Parmi les thématiques liées à la sécurité des équipements qui font l’objet de programmes de recherche au CIH : les techniques d’identification de l’état du parc d’ouvrages et de matériels, les études de danger – qui permettent de déterminer les risques auxquels sont exposées les populations, tels qu’une rupture de barrage ou une défaillance dans le fonctionnement des vannes –, la surveillance de l’érosion des digues, la gestion des séismes, la simulation de crues, l’utilisation des robots pour les inspections subaquatiques et de drones pour la surveillance de sites difficilement accessibles… 2. Performance Il s’agit de produire de l’électricité au moment où elle est nécessaire. Comme dans toute activité industrielle, la maîtrise des coûts est essentielle. La performance des ouvrages est liée à la performance des machines, mais également à la capacité d’anticiper la production et de prévoir les besoins de consommation. L’hydraulique étant l’une des énergies les plus flexibles, elle est d’autant plus intéressante aujourd'hui, où il est nécessaire d’intégrer au réseau électrique la production issue de sources d’énergies renouvelables intermittentes. 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 3 sur 8
3. Environnement Cet aspect s’est fortement développé ces vingt-cinq dernières années, et est désormais très présent. Le changement climatique et ses impacts ont soulevé un certain nombre de problématiques pour la filière hydraulique, concernant les émissions de gaz à effet de serre des réservoirs par exemple. Sur ce sujet, un gros effort de modélisation des écoulements a été fait, donnant lieu à plusieurs publications scientifiques à l’échelle internationale. Une directive européenne sur l’eau a fixé en 2000 des objectifs visant à atteindre un bon état écologique de l’eau en 2015. Il est devenu impératif pour EDF de concilier les attentes vis-à- vis de la production avec les attentes concernant l’environnement. Parmi les thématiques liées à l’environnement qui font l’objet de recherches au CIH, on peut citer la gestion des sédiments, la question de la migration des poissons, et plus largement des questions liées à la biodiversité, en milieu aquatique mais également en milieu terrestre, ou encore l’évolution des ressources en eau et la question du multi-usage. Dans tous ces domaines, EDF noue des partenariats techniques et scientifiques avec des partenaires divers, internationaux, nationaux et régionaux. En Rhône-Alpes, le CIH travaille notamment en collaboration avec l’INP de Grenoble, Alstom ou encore l’Université de Savoie. Il mène également plusieurs projets dans le cadre du pôle de compétitivité Tenerrdis. II. QUELQUES EXEMPLES D’INNOVATION La conférence s’est poursuivie avec la présentation, par différents intervenants, de quelques exemples de projets innovants menés par le CIH dans le domaine du génie civil, mais également dans d’autres secteurs, notamment l’électromécanique, avec le contrôle- commande, ou encore l’environnement. 1. Génie civil Le BCR Le béton compacté au rouleau (BCR) est l’une des innovations majeures pour les barrages de ces dernières décennies. Plus de 600 barrages dans le monde ont été construits en BCR, et environ 70 sont actuellement en projet ou en construction. Cette technologie a recours aux engins et techniques de terrassement pour la mise en œuvre de béton en grande quantité. Elle permet d’améliorer les cadences, le serrage du béton, et de réduire les coûts. La première réalisation en BCR date de 1974 : au Pakistan, cette technologie a été utilisée pour la reconstitution de rocher en aval de l’évacuateur de crue. Le premier barrage faisant appel à la technologie du BCR a été construit au Japon en 1980 : il est cependant construit pour moitié en béton conventionnel vibré (BCV). Le premier barrage intégralement construit en BCR est celui de Willow Creek aux Etats-Unis, construit en 1982. Le BCR n’est pas un matériau homogène : il est constitué de plusieurs couches d’une trentaine de centimètres d’épaisseur chacune. Le traitement des inter-couches peut être réalisé de manières différentes, ce qui génère des qualités différentes. Le BCR offre donc un 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 4 sur 8
panel large de solutions, une grande latitude sur la conception, et permet donc une bonne adaptation du barrage aussi bien à sa fondation qu’aux matériaux disponibles. EDF a participé au BCR, notamment par sa contribution au projet français BaCaRa dans les années 1990, qui a abouti à la publication de recommandations sur le sujet. Ecrit par des représentants de l’ensemble de la profession, ce document présente l’expertise française en termes de BCR. A l’heure actuelle, le BCR est utilisé sur d’autres types d’ouvrages : il a été utilisé pour les fondations de la centrale nucléaire de Civaux par exemple. La fibre optique (par Jean-Jacques Fry, ingénieur) La technologie de la fibre optique fonctionne comme une sorte de thermomètre, et permet donc de suivre les fuites d’un ouvrage. En effet, l’eau est un régulateur thermique : quand elle passe dans une fuite, elle modifie donc la température du barrage. Cette technologie a été mise au point pour tracer les fuites liées au vieillissement et à la dégradation des ouvrages. Installée au pied des digues, la fibre optique permet, à chaque mètre, d’analyser le signal rétrodiffusé de la lumière pour en déduire la température. Outre son utilisation pour la gestion des risques de fuite sur les ouvrages hydrauliques, la fibre optique peut être utilisée pour suivre l’évolution de la contrainte dans les centrales nucléaires. Ainsi de la fibre optique a-t-elle été installée à Flamanville sur la centrale en construction, afin de suivre le comportement de l’ouvrage. L’idée de la fibre optique pour faire de la mesure de température ou de la mesure de contrainte et de déformation remonte à une vingtaine d’années, mais le déploiement industriel démarre tout juste. Une troisième application pourrait encore voir le jour : la mesure acoustique. Le PK Weir Lorsque beaucoup d’eau entre dans une retenue, il est nécessaire de pouvoir l’évacuer. Les barrages comportent donc un évacuateur d’eau, qu’il faut dimensionner. On distingue deux grandes familles d’évacuateurs : - Les évacuateurs à vannes, qui laissent passer un important débit d’eau. Mais leur coût est élevé et leur fiabilisation est problématique : il faut être certain qu’au moment de la crue, les vannes s’ouvriront bien. Des mesures sont prises dans ce sens, comme la multiplication des sources d’énergie permettant d’ouvrir la vanne. - Les seuils libres : on laisse monter l’eau dans le barrage, qui déverse l’eau en surplus. Cette méthode ne coûte pas très cher, et ne nécessite personne pour actionner un mécanisme. Mais le débit d’eau est faible, et un grand linéaire est nécessaire pour évacuer une grande quantité d’eau. Le PK Weir (ou « piano keys weir », barrage en touches de piano) a été développé par le Français François Lempérière, EDF ayant financé une grande part du projet. La première mise en œuvre remonte à 2006. Le PK Weir est un déversoir à seuil libre, fonctionnant donc de manière autonome. Mais il compense la faible efficacité de ce type d’évacuation par un allongement de la crête, à laquelle est donnée une forme labyrinthique. L’innovation réside dans le fait que l’équipement est en partie plein, ce qui permet de limiter la hauteur, donc d’utiliser moins 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 5 sur 8
d’acier, et d’avoir une embase faible, ce qui permet de l’ajouter à des barrages existants dont la largeur est assez réduite. Cette technologie permet d’obtenir une lame d’eau plus fine : en effet, si elle augmente, cela pose un problème pour la stabilité de l’ouvrage. Huit PK Weir ont été construits depuis 2006 – deux autres étant en construction à ce jour – dont le barrage de Malarce en Ardèche. 2. Innovations dans d’autres domaines Le démonstrateur vitesse variable du Cheylas Ce projet a été lauréat d’un appel à projets européen pour la modernisation des STEP (station de transfert d’énergie par pompage) en 2011. EDF s’était associé, pour y répondre, à Alstom ainsi qu’à d’autres partenaires européens. L’objectif était de convertir la station du Cheylas en Isère, STEP à vitesse de pompage fixe, en station à vitesse variable. Le pompage à vitesse variable, en effet, permet d’obtenir un meilleur rendement en turbine, et de régler la puissance active en pompe, ce qui offre une plus grande flexibilité de stockage de l’énergie. Cela permet donc d’intégrer plus facilement les énergies renouvelables intermittentes telles que le solaire et l’éolien, dont la part dans le mix énergétique est destinée à croître avec la diminution de la part du nucléaire. La conduite en tandem (par Frédéric Michaud, département Fonctionnement Contrôle- Commande) On distingue les usines de lac, qui disposent d’un stock important d’eau permettant de démarrer la production au moment où on en a besoin, et les usines au fil de l’eau, qui ont une très petite retenue et doivent turbiner l’eau au fur et à mesure de son arrivée, ce qui contraint fortement la production. Il est fréquent que les usines soient placées en série, une usine au fil de l’eau étant située en aval d’une usine de lac. Alors qu’il est possible de réguler la production de l’usine de lac, l’usine au fil de l’eau, elle, ne produit pas nécessairement de l’électricité au moment où on en a besoin, à la puissance souhaitée, ce qui met donc en danger le plan de production de l’ensemble. La conduite coordonnée en tandem permet de moduler la production de l’usine amont – l’usine de lac – en fonction de la performance de l’usine en aval. Un calculateur est installée dans chaque usine, et un superviseur supervise les deux calculateurs, élabore une consigne de puissance pour chaque usine afin d’obtenir la puissance souhaitée et récupère en temps réel des informations concernant l’état de chaque usine. Cette technologie, actuellement en cours de déploiement sur deux sites pilotes en France, permet de moduler la production électrique en fonction du besoin. Le management environnemental : le projet Nam Theun 2 (par Aude Maura, ingénieur hydraulique spécialisée dans l’environnement) Le projet Nam Theun 2 au Laos fait aujourd'hui référence dans le monde en matière de management environnemental et sociétal. Le projet, initié en 2005, consistait à créer sur une rivière un réservoir de la taille du lac Léman, ce qui impliquait notamment de déplacer des familles qui vivaient sur la rivière, et 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 6 sur 8
risquait d’avoir un impact environnemental très fort dans une zone où la biodiversité était importante et comprenait des espèces protégées. Au total, 6% du budget total du chantier ont été dédiés aux aspects environnementaux. 9000 travailleurs ont contribué à la construction de la retenue. Il a donc fallu travailler sur les pratiques de chantier, pour réduire l’impact de cette présence sur l’environnement. Dans cette perspective, un plan de management environnemental du chantier a été mis en place, comprenant un système de management de l’environnement et des mesures opérationnelles. Parmi ces mesures, ont peut citer la limitation des pollutions, la gestion des produits dangereux, la construction de camps d’ouvriers ayant un impact environnemental le plus faible possible, la limitation de l’érosion du terrain, la revégétalisation pour limiter l’impact de la déforestation et de la construction de routes… Cette démarche a permis une évolution des pratiques, et montré le savoir-faire d’EDF en la matière, la communication importante autour du projet ayant contribué à l’image de l’entreprise. Le retour d’expérience pourra être utilisé pour les projets futurs, à l’international comme en France. Le bras « renaturé » du Rhin Le chantier de renaturation du Rhin est en cours depuis novembre 2013 et devrait s’achever en février prochain. Il s’agit, sur une échelle spatiale importante, de recréer une mosaïque d’habitats naturels. Cette mesure environnementale a été proposée dans le cadre du renouvellement de la concession du barrage de Kembs, en Alsace. Parmi les autres mesures, on peut citer l’augmentation du régime réservé (le débit d’eau restitué à la rivière), la création de passes à poissons et la maîtrise de l’érosion. La création du Grand Canal d’Alsace utilisé pour la navigation et la production d’hydroélectricité, a engendré la création de l’île de Kembs, où jusque 2008 étaient exploitées des parcelles agricoles s’étendant sur une centaine d’hectares. Une fois abandonnées, ces parcelles ont été colonisées par des espèces invasives, résultant en une très faible biodiversité, très éloignée de l’état de référence. Le milieu naturel n’avait plus le potentiel écologique pour retrouver ses conditions initiales avant perturbation. Le projet de génie écologique mis en œuvre par EDF doit permettre notamment de réhumidifier la forêt rhénane en recréant un cours d’eau sur plusieurs kilomètres, et de favoriser le retour du saumon par la création d’un bras de connexion psicicole permettant le franchissement du barrage. L’utilisation de techniques innovantes a permis de limiter l’impact des engins de chantier dans la réserve naturelle : l’outil Geotravaux couplé à des tablettes numériques pour alerter les chauffeurs lorsqu’ils rencontrent une zone sensible ou une espèce protégée, ou encore l’utilisation du LIDAR pour effectuer des levées topographiques avant et après le chantier et contrôler le volume de déblais et remblais déplacés. 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 7 sur 8
POUR ALLER PLUS LOIN Sur le Centre d’Ingénierie Hydraulique d’EDF La page internet du CIH sur le site d’EDF http://energie.edf.com/hydraulique/hydraulique/ingenierie-hydraulique/cih-48223.html La page internet du CIH sur le site de Savoie Technolac http://www.savoie-technolac.com/entreprise/968/72-annuaire-des-acteurs.htm « Le Centre d’Ingénierie Hydraulique d’EDF fête ses 25 ans d’existence », L’Energie en questions, 3 février 2014, Url : https://www.lenergieenquestions.fr/le-centre-dingenierie- hydraulique-dedf-fete-ses-25-annees-dexistence/ Sur les installations hydrauliques en région Rhône-Alpes L’Unité de Production Alpes (UPA) d’EDF : présentation et organisation de l’unité, vie des sites, actualité technique et publications http://energie.edf.com/hydraulique/hydraulique/carte-des-centrales-et-barrages/unite-de- production-alpes/presentation-47755.html Les grands barrages en Rhône-Alpes, dossier thématique de l’Institut des Risques majeurs de Grenoble, décembre 2009, Url : http://www.irma- grenoble.com/05documentation/04dossiers_numero.php?id_DT=9 « L’hydroélectricité : principe et état des lieux en Rhône-Alpes », DREAL Rhône-Alpes, 10 octobre 2012, Url : http://www.rhone-alpes.developpement-durable.gouv.fr/l-hydroelectricite- principe-et-a2752.html Le barrage EDF de Malarce, dossier de presse diffusé par EDF, 2013, PDF disponible sur le site de la commune de Malarce-sur-la-Thines, Url : http://www.malarce-sur-la- thines.com/upload/barragedemalarce.pdf Photo en première page : Arch dam on the Manavgat River in Turkey (upper dam), photograph on 07.04.2004 by Philipp John – CC BY-SA 3.0 http://de.wikipedia.org/wiki/Hoover-Talsperre 18 novembre 2014 L’innovation dans l’hydraulique Page 8 sur 8
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