Fascicule des résumés - Université Clermont ...

La page est créée Christophe Lacroix
 
CONTINUER À LIRE
Fascicule des résumés - Université Clermont ...
F
 asci
    cul
      e
desr
   ésumés
Fascicule des résumés - Université Clermont ...
Paths Mapping :
Travelling, Representing, Mobilizing
Paths Mapping :
                                                                         Travelling, Representing, Mobilizing

                                                        Slot 1 – Mobilités individuelles :
                                                           itinéraires, cartes et carnets

Morcrette Quentin
1 - Université Lyon 2 - UMR 5600 (EVS) - Institut de Recherches Géographiques (France)

Cartes : écrire l'espace de la première personne
Épistémologie, cartographie, Itinéraire

Les médiums et les moyens servant à accompagner et à faciliter les mobilités dans le domaine de
l'orientation ont pris des formes variées durant les trois derniers siècles. Après l'usage de listes textuelles,
                                                                              e
les représentations cartographiques se sont répandues à partir du XVIII siècle (Delano-Smith, 2006). Les
                                                                                                     e
cartes routières se sont développées, pour les besoins des vélocipédistes, à la toute fin du XIX siècle, avant
d'être utilisées pour les mobilités automobiles. Ces cartes avaient pour but premier de représenter avec
précision l'ensemble du réseau routier. Aujourd'hui, l'usage des cartes numériques pour des besoins de
mobilité semble faire la part belle à l'itinéraire (Grataloup, 2011; Thielmann, 2007) plus qu'au réseau.
La consultation d'itinéraires pour se déplacer d'un lieu à un autre devient ainsi, d'une part, de plus en plus
fréquente chez les individus et, d'autre part, ce type de représentation est de plus en plus mis en avant par
les fournisseurs de services cartographiques. Dans le même temps, tandis que l'option de recherche
d'itinéraire est proposée par tous les grands opérateurs de cartographie numérique, la carte routière (sous
forme papier) semble indubitablement devoir rester dans la boîte à gant jusqu'à la prochaine perte de
réseau.
En revenant sur l'histoire de la cartographie d'itinéraire commerciale, l'enjeu de cette communication est de
proposer une vision de la cartographie d'itinéraire comme une cartographie centrée sur l'individu. Les cartes
d'itinéraire, représentations qui s'opposent à la conception classique de cartes comme théâtre (ce lieu d'où
l'on voit le monde comme une image neutre, à plat) gagnent à être analysées selon le rapport centre /
périphérie inhérent à cette représentation. On peut dire que la carte de géographie classique rend compte de
la disposition relative des traits géographiques du territoire concerné. À l'inverse, cette communication
soutient l'idée que la carte d'itinéraire relègue ces spécificités dans la marge pour mettre l'individu au centre.
Cette communication s'intéressera donc aux cartes d'itinéraire utilisées pour se guider, durant des phases de
mobilités, ou bien durant des phases préparatoires à la mobilité. À partir d'un corpus de cartes françaises et
                                                e                   e
américaines, créées entre le début de XX et le début du XXI siècle, pour des déplacements en majorité
motorisés, nous analyserons comment la représentation cartographique participe à la création d'un espace
perçu sur un mode hodologique et centrée sur l'individu. L'enjeu est donc à la fois de replacer les cartes
numériques actuelles dans une histoire plus vaste de la cartographie d'itinéraire et de questionner les
informations géographiques qu'elles contiennent.
                                                                                                 e
Les exemples qui seront retenus sont de trois types : cartes d'itinéraire du début du XX siècle, liées au
premier développement de l'automobile, dans le contexte d'une signalisation routière relativement absente.
                                                                               e
Cartes d'itinéraire liées à la publicité dans le seconde moitié du XX siècle. Enfin, cartes d'itinéraire
numériques, créées à la demande et dont l'usage est, par définition, multiple, aujourd'hui.
L'enjeu d'une approche diachronique est de permettre de replacer la cartographie de l'itinéraire dans une
histoire générale de la cartographie, comme une catégorie à part entière. L'étude se doublera d'une attention
portée à la sémiologie cartographique, et au médium, dans l'optique d'une analyse de la « marge »
cartographique. Entendue au sens de ce qui est en dehors de la carte. Au final, cette communication entend
faire écho à l'étude de la cartographie narrative en soutenant que la cartographie commerciale d'itinéraire
peu s'interpréter comme une forme de personnalisation de la représentation cartographique. Dans la mesure
où ce genre de production est de plus en plus fréquemment utilisé et que l'on considère la carte comme un
opérateur cognitif, cela mène à formuler l'hypothèse question de la fabrique d'une perception plus
fragmentée du territoire.

                                                        3
Paths Mapping :
                                                                         Travelling, Representing, Mobilizing

Bahoken Françoise
1 - UR Systèmes Productifs, Logistique, Organisation des Transports, et Travail (France), 2 - Géographie-
cités (France)

Propositions pour une formalisation (carto)graphique des mobilités individuelles. L'exemple d'un
récit biographique
Parcours, déplacement, cheminement, individu, espace, temps, représentation, carte

La représentation graphique des voyages ou, plus généralement, des déplacements individuels dans un
espace géographique est une pratique ancienne. Les hommes se sont de tous temps déplacés, les
documents graphiques qui illustrent jusqu'au XIXe siècle leurs itinéraires de voyage correspondent d'ailleurs
aux plus anciennes cartes. Celles-ci sont réalisées à partir d'informations qualitatives, majoritairement issues
de récits de voyage (Bahoken, 2009). La tradition de cartographier des parcours semble trouver son origine
dans la retranscription des voyages royaux, formant un genre littéraire spécifique. C'est ainsi que le récit du
voyage en France du jeune roi Charles IX (entre 1564 et 1566) a fait l'objet d'analyses succulentes (Boutier
et al., 1984). A la suite des guerres de religion, C. de Médicis alors régente entreprend de faire connaître à
son jeune fils son royaume en organisant un véritable tour de France royal qui va mettre en exergue, sans
pourtant les représenter, les épisodes de mobilité qui ont toujours accompagné l'exercice du pouvoir (Boutier
et al., 1984 : 348-349). La thèse de D. Versavel (2000) apporte une première analyse illustrée de quelques
cartes de voyages présidentiels réalisés durant l'entre-deux guerres ; N. Mariot (2006) proposera ensuite
une analyse cartographique des itinéraires présidentiels français depuis Paris, des localités visitées au cours
des mandats dans une perspective socio-historique.
L'intérêt pour la représentation graphique des itinéraires et lieux des récits n'est pas réservé aux
personnalités politiques. Les explorateurs, des scientifiques tels que W. Darwin ou le docteur Barth en
Afrique (1848-1855) voient leurs itinéraires représentés sur des cartes. Sur le plan méthodologique, la
restitution graphique de ces itinéraires quels qu'ils soient correspond à deux principales modalités. D'une
part, la figuration du cheminement en lui-même, c'est-à-dire la matérialisation du parcours par la figuration
des voies empruntées entre les localités, c'est la « carte d'itinéraire » (CFC, 1990). D'autre part, la
symbolisation approximative (ou une reconstitution) du cheminement effectué : c'est la carte de
déplacements. La carte d'itinéraire correspond donc à la retranscription précise des voies sur une carte
(topographique), du cheminement effectué dans la réalité. Ce type de carte représente donc un mouvement
individuel observé dans un espace-temps donné. Q. Morcrette (2016) en a récemment présenté une
typologie.
La carte de déplacements est fondamentalement différente de la précédente, en ce sens qu'elle résulte
d'une retranscription graphique généralement imprécise de la circulation entre plusieurs lieux, pas
nécessairement d'un cheminement. C'est pourquoi elle ne décrit pas nécessairement un mouvement
(Bahoken, 2016). Elle présente en revanche une visée davantage analytique que descriptive, différents
aspects du déplacement pouvant être représentés en complément d'autres informations (par exemple, la
durée de présence en un lieu), ce qui n'est généralement pas le cas des cartes d'itinéraires, la visée apparaît
en première instance limitée à la représentation d'un cheminement. Les cartes d'itinéraires et de
déplacements sont donc fondamentalement différentes, la seconde étant obligatoirement rétrospective et
analytique, tandis que la première, descriptive, pouvant également être prospective.
Aussi allons-nous restreindre notre propos à la carte de déplacements. La cartographie d'un déplacement
dans un espace conduit à la représentation graphique d'un (ou de plusieurs) trajet(s formant une trajectoire),
chacun intervenant dans la vie d'un individu à un moment donné de sa journée ou de l'année ; à un (ou
plusieurs) événement(s) quotidien(s), annuel(s) ou biographique(s). La navette, le changement de résidence
ou la migration sont autant de types d'événements qu'il est possible de représenter graphiquement, autant
de trajectoires qui, si elles sont certes différentes sur le plan conceptuel, thématique ou sémantique,
possèdent un dénominateur commun : la similarité du processus de retranscription graphique. C'est
pourquoi nous faisons l'hypothèse qu'il est possible de formaliser la représentation graphique de ces
déplacements individuels.
L'objectif de cette communication est de proposer une formalisation graphique des mobilités individuelles
observées à différentes échelles spatiales et ou temporelles. Elle est menée dans le cadre d'une approche
compréhensive des différents concepts mobilisés dans l'analyse des déplacements. Pour ce faire, nous
allons mobiliser un récit biographique constitué à partir d'un entretien semi-directif, fictif mais plausible. La
narration qui en découle est appréhendée comme un outil pratique de documentation sur les événements de
l'enquêté. Nous présentons d'abord la narration, avant un relevé d'informations portant sur le vécu familial,

                                                       4
Paths Mapping :
                                                                           Travelling, Representing, Mobilizing

professionnel et résidentiel de l'individu. Nous repositionnons ensuite ces informations dans le cadre
théorique de l'analyse spatiale en géographie, en lien avec les aspects sémiologiques (Bertin, 1967). La
reconstruction des différentes mobilités ainsi que leur formalisation sous la forme de trajectoires, formées par
l'enchaînement et la combinaison de différentes positions occupées par l'individu au cours du temps subit
enfin une épreuve graphique formelle (Bahoken, 2016) sous différentes formes (diagrammes et cartes) et
une confrontation avec des résultats antérieurs (André-Poyaud, Bahoken, 2010 ; Bahoken, Gauvin, 2006).
L'analyse ouvre la voie vers une typologie des méthodes de représentation de déplacements individuels.

Mille Martine et Fernandez Mathieu
1 - École Pratique des Hautes Études ED 472 HTD (France) ; École Doctorale 472 : Histoire, textes et
documents (EPHE) (France)
2 - Post-doctorant en urbanisme du Labex Futurs Urbains (Université Paris-Est Marne-la-Vallée), docteur en
Histoire des techniques du Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM), Paris (France)

Carnets de voyage, journaux, itinéraires, cartes diachroniques : Alexandre Brongniart (1770-1847) et
la circulation des savoirs scientifiques et techniques.
                                                                            e
Parcours savant, Circulation des savoirs, SIG, Cartes, Carnet de voyage, XIX siècle, France

L'intérêt pour la littérature de l'intime comme corpus de sources et sa cartographie, grâce au soutien des
systèmes d'information géographique (SIG) mobilisés pour le traitement des informations issues du
dépouillement des sources, comme autant de témoignages des circulations des savoirs et des pratiques
scientifiques et techniques, ne se dément pas. Le cas des carnets - de voyage, de prospection minière ou
céramique - d'Alexandre Brongniart (1770-1847), savant minéralogiste également administrateur de la
                                                    e
Manufacture de porcelaine de Sèvres au XIX siècle, sera ici présenté en lien avec des démonstrations
cartographiques de leur influence sur le parcours scientifique du personnage, par exemple avec l'apport
majeur que constitue la Carte géognostique des environs de Paris cosignée avec Georges Cuvier en 1810,
qui pose les fondements spatiaux de la géologie en France et qu'un SIG permet de reprojeter de nos jours.
Depuis les années 1980, la question des pratiques connaît un large succès dans les sciences sociales, et
plus particulièrement dans les études historiques, philosophiques et sociologiques des sciences.
De fait, la littérature de voyage, forte de l'originalité française du lien historique entre histoire et géographie,
peut trouver à s'insérer dans ce renouvellement, et fait l'objet de travaux comme ceux de Marie-Noëlle
Bourguet (Sciences, Espaces et voyages, 1993), ceux des Humeurs vagabondes, de la circulation des
hommes et de l'utilité des voyages, de Daniel Roche (2003), du Grand Tour revisité de Gilles Bertrand
(2008), ou des Itinéraires, Guides de voyage et tourisme alpins (1780-1920) dévoilés par Ariane Devanthery
(2016), en passant par les Autogenèses ou autre Brouillon de soi de l'historien de la littérature Philippe
Lejeune (2003).
La littérature itinérante, également source et objet des Savoirs-mondes, réseaux de sociabilités savantes en
cours de construction mis en évidence par Pilar Gonzalez Bernaldo et Liliane Hilaire Pérez (2015), peut être
ainsi saisie par les correspondances et carnets de Brongniart comme autant de traces de la pratique du
                                          e
savant en voyage au tournant du XVIII siècle pour comprendre une influence sur le parcours scientifique de
                      e
ce savant au XIX siècle. Alexandre Brongniart (1770-1847) ne fut pas seulement l'administrateur de la
Manufacture de porcelaine de Sèvres, d'un régime à l'autre, de 1800 à son décès. Ce fut également un
savant dont les recherches et travaux ont essaimé aussi bien l'histoire naturelle (la zoologie, l'entomologie),
la minéralogie, la géologie. L'Angleterre, l'Italie, les Alpes, les Pyrénées, le Vexin ou le Limousin, le
bassin parisien : autant de virées, balades, tournées ou voyages qui jalonnent le parcours du personnage où
les cartes, les routes et les passages sont convoqués. Ces pratiques de littérature pour soi ou pour baliser
ces sorties minéralogiques, entomologiques ou botaniques peuvent être considérées comme des éléments-
clés pour analyser le savant en ses diverses composantes, en mettant l'accent sur les dispositifs concrets de
son activité de travail intellectuel qui consiste à « faire » de la science au quotidien. Elles s'articulent avec la
vocation de longue durée des résultats scientifiques (recherches, essais, expertise...) ou comme les
prémices d'une science à produire et à publier (Traité de minéralogie, Traité des arts céramiques). Les
carnets de notes nous le laissent entrevoir : minutieux, méthodique et attentif, toujours notant tout ce qu'il
juge susceptible de l'instruire, d'industries en phénomènes naturels. Le jeune savant - observateur-acteur de
la vie érudite et savante - croisant des personnalités remarquables sur recommandations, découvrant les
collections d'insectes et autres cabinets de curiosité et de minéralogie, visitant les sites et merveilles inscrits
dans les paysages à découvrir, se forme en même temps qu'il voyage. Les systèmes d'information

                                                         5
Paths Mapping :
                                                                          Travelling, Representing, Mobilizing

géographique (SIG) permettent d'abord de traiter les informations issues des carnets. Méthodologiquement,
le SIG accroît la capacité de réaliser de la cartographie diachronique (en permettant le jeu sur les échelles
temporelles et spatiales). Les cartes extraites et mises en forme peuvent ensuite être reliées à d'autres,
retrouvées également par le catalogue de la vente de la bibliothèque Brongniart en 1858. Elles permettent
au final d'envisager Alexandre Brongniart dans la réalité spatiale des relations et circulations scientifiques et
techniques en Europe en prenant appui sur les données cartographiques de sites ou de villes. Ainsi, la
cartographie nous permet de rendre compte de la circulation des savoirs mais également de déterminer les
critères d'une typologie des voyages, entre similitude de la condition matérielle et intellectuelle, critères
subjectifs basés sur le ressenti des lieux visités et critères objectifs des buts, apports et acquis, puisque le
retour parmi les siens est au moins aussi important que le départ à l'aventure.

Flauraud Vincent
1 - Université Clermont-Auvergne, Centre d'Histoire Espaces et Cultures (France)

Aborder un itinéraire de découverte du volcan cantalien en 1821 : autour des carnets d'Etienne-Jean
Delécluze
                                                        e
Itinéraire, voyage, représentations, Massif central, XIX siècle

En 1821, Étienne-Jean Delécluze (1781-1863), peintre et critique d'art, élève de David, entreprend un
voyage en Auvergne. Dans le Puy-de-Dôme, en Haute-Loire, dans le Cantal, à chacune de ses étapes il
réalise une ou plusieurs aquarelles, agrémentées de notes constituant autant de longues légendes
détaillées. Le recueil, relié, dans lequel il les dispose, sans doute réalisé avec l'intention originelle de faire
lithographier les planches, en vue d'une publication, est resté inédit. Il a été acquis récemment aux enchères
par le musée d'art Roger-Quilliot de Clermont-Ferrand et pris pour sujet d'étude par une équipe
pluridisciplinaire de l'université Clermont-Auvergne. Etudier l'itinéraire suivi, c'est travailler sur l'implicite,
alors même que c'est le parcours qui fait le voyage : Delécluze ne le verbalise qu'assez peu en tant que tel,
et c'est essentiellement à partir des traces que constituent les étapes représentées et commentées qu'il faut
opérer et souvent extrapoler. Isoler expérimentalement la partie cantalienne du voyage permet de
s'interroger sur le rapport que peut développer le chercheur avec une telle source. Au-delà des modalités
méthodiques et méthodologiques de reconstitution de l'itinéraire, croisant les indices du document, ceux des
archives écrites et cartographiques, et le recueil de pratiques et d'une « mémoire de terrain », la contrainte
d'échafaudage d'hypothèses alternatives, la sélection des critères permettant de dessiner chaque scenario,
sont autant d'entrées dans l'atelier du chercheur où la dimension épistémologique est présente. Vers quoi
tend l'effort de dépassement du caractère intermittent de l'information, jusqu'à formaliser graphiquement
l'itinéraire ? Et comment articuler cette prétention à une forme de rationalité totalisante dans la façon de
considérer le voyage (donc, d'une certaine façon, de se le représenter), avec le rapport plus indiciaire,
sensible et subjectif du voyageur ? Que signifient, tenant compte de leur dimension historicisée-
contextualisée, ses évocations aussi multiples qu'a priori aléatoires de la route, la façon dont il module les
mentions de directions, de toponymes... ? Qu'éclaire l'écart entre la reconstitution de l'itinéraire et son « récit
à trous » ?

                                                        6
Paths Mapping :
                                                                        Travelling, Representing, Mobilizing

                                          Slot 2 – Cartographies sensibles et
                                   leur application à des groupes marginalisés

Olmedo Elise
1 - UMR 8504 Géographie-cités (France)

Marche, performance et cartographie sensible. Pratiques post-représentationelles entre art et
géographie / Walking, performance and sensible cartography. Post-representational practices
between art and geography
Cartographie sensible, notation, traces, terrain, post, représentationel

La cartographie est aujourd'hui largement mobilisée hors du champ géographique. Des artistes notamment
l'utilisent comme un médium artistique pour donner à voir, sentir et ressentir les lieux, mettant souvent en
avant leur dimension sensible dans une visée tant artistique, cognitive que sociale ou politique. De nouveaux
modes de fabrication de la carte apparaissent. Ils redéfinissent les contours de la cartographie, son objet,
ses échelles, ses méthodes, faisant primer la figuration de l'expérience de l'espace, à travers des parcours
cartographiés par exemple. Ces cartes rejouent ainsi les modalités de l'itinéraire comme élément structurant
de la représentation cartographique. Ces nouvelles figures cartographiques sont appelées « cartes
subjectives », « cartes narratives » ou « cartes sensibles ». Nous privilégierons néanmoins cette dernière
expression car elle englobe une acception large de cette catégorie. Ces transformations s'accompagnent
d'un ensemble de nouveaux usages. Tour à tour mobilisées dans une perspective « alternative » à des fins
militantes par exemple (c'est actuellement le cas dans la « Zone à défendre » de Notre-Dame-des-Landes
près de Nantes), « pédagogique » en travaillant sur une conception quotidienne de la géographie et
« participative » pour des projets d'aménagement cherchant à garantir la concertation avec les habitants.
Ces usages se font également de plus en plus nombreux dans le secteur touristique en faisant de la
cartographie sensible un outil du marketing territorial (voir par exemple le projet Smart city à la Cité
universitaire de Paris). Certains usages créatifs peuvent donc en proposer des applications concrètes,
d'autres peuvent aussi se révéler normalisants quand ils réutilisent ou détournent à d'autres fins certains
emblèmes de la cartographie sensible. Certains projets mettent par exemple en avant une cartographie
adaptative, « connectant » les personnes au service d'une ville plus « intelligente », s'adressant ainsi à
certains groupes sociaux plus qu'à d'autres, reconduisant des inégalités ou aggravant de cette façon les
fractures sociales existantes dans un territoire.
Pour la session « Cartographie des parcours. Voyager, représenter, mobiliser » du congrès international
EUGEO en 2017, nous proposons de questionner ces évolutions de la cartographie d'un point de vue
épistémologique. Loin de montrer une image monolithique de la cartographie sensible, il nous apparaît
aujourd'hui important de montrer la diversité de ces nouvelles cartographies et de travailler à dessiner, d'un
point de vue critique, ce que ce que cette cartographie apporte véritablement de « nouveau ».
À travers la présentation d'une enquête sur la cartographie sensible conduite en France entre 2011 et 2015
au cours d'un doctorat, nous proposons de nous pencher sur les conséquences de ces nouvelles pratiques,
mettant notamment en crise la notion d'image géographique. Il apparaît en effet de plus en plus évident que
la carte se situe de moins en moins du côté de l'image du territoire comme le montrent les récentes
recherches sur la cartographie post-représentationelle. La vocation de la carte à « représenter » des
territoires est remise en question. La cartographie trouve de nouvelles fonctions, notamment celles de mettre
en relation l'image et l'expérience d'un lieu. Cette cartographie se situe « au-delà des représentations ». Tout
son paradoxe est là, elle figure « un agir », pour reprendre l'expression de l'éducateur et cartographe
Fernand Deligny (1913-1996).
En définitive, cette proposition sur la part post-représentationelle de la cartographie contemporaine fait écho
aux Axes 2 et 3 de la session « Cartographie des parcours ». En plus d'une réflexion critique sur les
« Usages sociaux de la cartographie des parcours » (Axe 3), nous proposons, à travers une communication
orale, de mettre en perspective les apports du couple « représentation-expérience » à la cartographie,
contribuant ainsi à l'Axe 2 « Représenter et ressentir les parcours ».

                                                       7
Paths Mapping :
                                                                         Travelling, Representing, Mobilizing

À cela s'ajoute la possibilité de coupler une intervention orale à une expérimentation autour du lieu de la
conférence afin de montrer quelques aspects pratiques de la cartographie sensible. Pour des raisons
organisationnelles, il n'est pas possible à ce stade de déterminer plus concrètement la nature de cette
expérimentation à élaborer en discussion avec les organisatrices. Nous serons prochainement en mesure de
préciser son contenu et la manière dont elle pourrait avoir lieu.

Memoli Maurizio
1 - Università di Cagliari (Italy)

Mental urban representations: maps, video and narratives of emotional geography (Représentations
mentales de la ville: cartes, vidéo et narrations de la géographie de l'émotion)
Mental maps/images/video/narratives/representation/Salvador de Bahia/Cagliari/Marseille.

It is not always easy to draw a mental representation of one's own city, that is, a map (a video, a storytelling,
etc.) including its most representative elements. There are many obstacles. The question, with its intimate-
like features, is somehow fascinating, and invites to interpret the city through one's own eyes. A
representation (a map, a video, a story) of all known and loved places within an urban space, hand-sketched
and by heart, allows eternalizing subjective impressions resulting from both the perception and the
awareness acquired. Any mental representation is a journey taken within a metropolitan universe and
observed themes and uses which differ depending on one's own look. According to these principles, the
exercise of ?drawing? a ?mental image of the space? reveals the possibility to make three main themes
substantial: representation, perception and interpretation. The geographical representation basically makes
reference to ?a structural order and an already given logic? (Garroni, 2005: 150). It is a tidy logic, in my
opinion, as for its space knowledge and its personal daily usage, but also in its political and collective
images. The perception of a metropolitan reality offers, nearly in a classical way, spatial emotional sensual
readings linked to a subjective visual, tactile, sound, olfactory and just mental sensitiveness (Lynch, 1964).
An emotional geography materializes such sensory reflections into a ?basic?, although apparently poor,
representations and the interpretation. The geography of cities as a personal narrative cartography is
inevitably partial but offer a methodology aimed at making sense of individual and emotional representations
of the geographical space. Such representations of geographical spaces in general, and of urban settings in
particular, build a multidimensional transfiguration of urban identity: the urban experience represented by
emotional and imaginative ties leads to a reinvention of the material form, the images and the meanings of
the city space. The aim of this paper is to discuss representations of urban spaces arising from mental maps,
narratives and video-images, understood as cognitive tools unveiling citizens' strategies related to the
emotions and affects that link people and places (Bochet, Racine, 2002).

Arfaoui Rafik
1 - UMR Territoires (France)

L'utilisation des cartes mentales par les demandeurs d'asile, ou comment repenser la méthodologie
de recherche dans les Refugee Studies
Carte mentale, demandeurs d'asile, migrations, méthodologie

La réforme de l'asile en France du 29 juillet 2015 vise à homogénéiser l'accueil des demandeurs d'asile entre
les régions au moment où le processus de l'accueil de cette catégorie de migrants, qui relève à la fois du
champ de l'action politique et celui de l'action sociale, est caractérisé par une hétérogénéité qui découle de
l'action d'acteurs hétéroclites (Santamaria, 2008)[1]. Cette réforme, visant à « désengorger »[2] les camps de
migrants présents notamment à Calais et Paris, intervient dans un contexte politique de suspicion des « faux
réfugiés », c'est-à-dire ceux qui ne relèvent pas du statut de la convention de Genève de 1951. Cette
suspicion engendre des violences psychiques et parfois physiques (Mekdjian, 2016)[3]. Les questions
posées par les instances en charge de l'étude des dossiers des demandeurs d'asile en France, comme c'est
le cas d'ailleurs dans d'autres États, se basent sur les discours narratifs des migrants. Les entretiens semi-
directifs constituent une dimension souvent utilisée dans la recherche en sciences humaines et sociales.
« Or, certains aspects formels peuvent rappeler les audiences administratives aux sujets interviewés,
notamment le face-à-face discursif, le jeu des questions/réponses, l'injonction à « se raconter » » (Mekdjian,

                                                       8
Paths Mapping :
                                                                         Travelling, Representing, Mobilizing

2016, p. 152). A partir de ce constat, quelle méthodologie de recherche adopter pour demander aux
demandeurs d'asile d'évoquer des dynamiques de leur projet migratoire ? L'apport de la géographie par
l'utilisation des cartes mentales constitue un élément central pour répondre à cette problématique autour de
laquelle s'articulent des enjeux sociaux, spatiaux, politiques, économiques et des enjeux d'accès aux
espaces publics (Arfaoui, 2017)[4]. Cette communication s'appuie sur les résultats empiriques de notre
terrain d'étude entamé en master 2 et que nous poursuivons, aujourd'hui, dans le cadre de notre thèse de
doctorat sur le pilotage national versus coproduction territoriale de l'accueil des demandeurs d'asile dans les
territoires non-métropolitains réalisée sous la direction de Jean-Charles EDOUARD et Mauricette
FOURNIER.
Dans un premier temps, cette communication s'attachera à analyser les processus d'accueil des
demandeurs d'asile en France et le contexte politique de suspicion de faux réfugiés en se basant sur les
entretiens semi-directifs réalisés avec différents acteurs institutionnels et associatifs. Ensuite, il s'agira de
présenter nos premiers résultats de recherche en soulignant l'apport des cartes mentales dans la
compréhension des dynamiques d'une migration contrainte et ses implications, à l'échelle locale, dans les
territoires non-métropolitains. Des cartes, figures et images illustreront notre présentation.

[1] SANTAMARIA Magalie. (2008), Politique nationale de l'asile et enjeux locaux : Étude comparative de
l'accueil des demandeurs d'asile dans les Bouches-du-Rhône, l'Isère et le Rhône (1999 ? 2005), Thèse de
science politique, Aix-Marseille : IEP Aix en Provence, 468 p.
[2] Il s'agit des termes souvent utilisés par les acteurs politiques pour désigner les opérations de
relocalisation des migrants des métropoles et de Calais vers d'autres départements et notamment dans des
territoires non-métropolitains.
[3] MEKDJIAN Sarah. (2016), Les Récits migratoires sont-ils encore possibles dans le domaine des Refugee
Studies? Analyse critique et expérimentation de cartographies créatives. ACME: An International E-Journal
for Critical Geographies vol.1 (15), 150-186.
[4] ARFAOUI Rafik. (2017), Recherches sur la migration des demandeurs d'asile : Des limites méthodologiques
liées aux aspects psycho-sociaux à l'apport de la géographie par l'utilisation des cartes mentales. Acte du
colloque « Trajectoires migratoires et santé autour de la naissance : regards croisés sur les pratiques et la
recherche », Bruxelles, https://perinatmigrant.sciencesconf.org/data/pages/texte_Rafik_ARFAOUI.pdf

Rosa Elisabetta
1 - Université Catholique de Louvain (Belgium)

Entrer, sortir, traverser. Parcours et récits d'une ethnographie visuelle aux marges de la ville
Ethnographie visuelle, marges urbaines, Roms migrants, parcours, Marseille

Le film documentaire Entrer, sortir, traverser (Marseille, 2016, 36') est issu d'une recherche ethnographique
que j'ai conduite auprès d'une famille de Roms roumains vivant en squat dans le quartier de la Belle de Mai
à Marseille. Il s'inscrit dans une plus large recherche qui vise à (re)questionner les inscriptions de la
marginalité urbaine en observant les pratiques socio-spatiales que ces migrants en condition précaire
déploient dans la ville. Le « système de déplacement » (Bourgeot 1986), caractérisé par la mobilité
géographique, renvoie à la spatialisation de dispositifs techniques, juridiques, symboliques à travers lesquels
se médiatisent les rapports humains avec leur environnement naturel et social. Si les modalités de
déplacements et d'usages des espaces mises en place par les Roms dans la ville dépassent largement les
lieux habités (le squat dans notre cas), permettent-elles pour autant de « franchir » les marges urbaines, en
révélant leur caractère poreux, temporaire, éphémère ? Permettent-elles, ainsi, à ces migrants d'accéder à la
ville, malgré leur condition de précarité ? De là vient le questionnement méthodologique qui est à la base de
la construction du film : comment saisir et représenter ces aspects « insaisissables » du vivre en marges ?
Le choix d'une approche audio-visuelle permet d'intégrer la perspective d'un terrain et d'une ethnographie en
mouvement, dans lesquels la caméra et la prise de son rendent compte des mobilités et des ancrages des
personnes rencontrés et des espace-temps qu'ils investissent avec leurs pratiques quotidiennes.
Ainsi, mon approche s'inscrit au croisement du pragmatisme relationnel et des théories plus-que-
représentatives (Thrift 2008). Ces deux courants théoriques mettent notamment l'accent sur la connaissance
progressive faite à travers le corps et l'expérience, ainsi que sur le caractère intrinsèquement relationnel de
la connaissance qui vient des relations que nous avons avec les autres. L'outil-caméra permet de saisir ce
que l'on observe, ce que l'on écoute, mais aussi les affects et les émotions, les récits qui passent par la

                                                       9
Paths Mapping :
                                                                         Travelling, Representing, Mobilizing

parole mais aussi par les regards et les gestes. Les participants se racontent ainsi de manière multiple. Ce
film est la narration d'un voyage qui se déploie sur plusieurs niveaux : celui que le chercheur fait dans et à
travers le terrain ; le voyage que font les Roms entre Marseille, Lyon et la Roumanie ; leur voyage, à la fois
réel et imaginé, entre l'ici et le maintenant, l'ancrage et la mobilité du passé, les désirs futurs. L'espace-
temps du présent et de l'intérieur de leurs lieux de vie devient ainsi un dispositif pour raconter un voyage plus
global de ces Roms qui se joue entre d'une part, des parcours assez visibles dans la ville ?récupérer les
déchets, faire la manche, se déplacer d'un squat à l'autre, d'une ville à l'autre : ces pratiques qui fondent la
stigmatisation et le rejet dont ils sont victimes ; et d'autre part, des parcours intimes moins visibles mais
beaucoup plus prégnants pour eux, qui nous racontent d'autres manières de vivre la ville et de mettre en défi
cette condition de marginalité.

                                                       10
Paths Mapping :
                                                                          Travelling, Representing, Mobilizing

                                       Slot 3 – Itinéraires et pratiques urbaines

Clerc Pascal
1 - Université Lyon 1 ESPE (France)

La ville en tous sens
Ville, sens, pratique spatiale, carte sensible

La géographie peut être appréhendée comme une construction scientifique qui met le monde à distance
pour tenter de le comprendre. D'un autre point de vue, elle peut aussi être un savoir plus intime de la terre,
éprouvé à travers des expériences sensorielles. Le projet de cette communication est de tenter de lier ces
deux approches, de nourrir la connaissance scientifique par la pratique personnelle et sensorielle. Je
présenterais différents types de parcours effectués dans des espaces urbains, des parcours proposés à des
étudiants ou de simples curieux, ou encore des parcours que j'effectue selon un protocole précis. Dans tous
les cas, il s'agit d'appréhender l'espace urbain par les sens, de vivre des expériences spatiales, avant de les
construire scientifiquement.
Première situation : prendre conscience des limites, des passages, des sutures de l'espace urbain ; le faire
par la pratique avant d'analyser l'histoire de ce qui joint ou sépare des fragments de ville.
Différentes expériences sont possibles : d'abord, commencer par un parcours imposé ou non entre deux
fragments de ville, puis en faire une restitution par une production cartographique, des photographies ou des
textes poétiques. Identifier ainsi ce qui se passe lorsque l'on passe d'un lieu à un autre, les passages faciles
ou les résistances des espaces.
Deuxième situation : avec un groupe d'étudiants ou d'expérimentateurs curieux, partir de ce que l'on identifie
comme étant le centre de la ville et marcher le plus directement possible jusqu'à ses limites. Cette
expérience passe par des pauses, trois ou quatre selon le type de ville. Ces pauses sont l'occasion de faire
le point et dans ce cas aussi écrire des textes poétiques. L'idée est d'expérimenter la centralité et la
périphéricité urbaine, d'évaluer ce qui change lorsque l'on fait ce type de trajet, l'évaluer d'abord par les sens
avant éventuellement de le formaliser. Cette expérience peut donner lieu à une restitution orale ou écrite : les
paroles ou les textes sont rassemblés par type d'espaces ; ils donnent une couleur, une texture, aux
différentes zones concentriques qui constituent en général la ville européenne. Troisième situation : c'est une
variante de la précédente et ce sera pour moi l'occasion de présenter un projet en cours. Sur une carte au
1/25 000ème, j'ai tiré seize droites partant de ce que j'ai défini comme étant le centre d'une ville. Le projet est
de suivre le plus fidèlement possible ces seize droites et de marcher jusqu'aux limites de l'espace urbanisé.
Donc appréhender la centralité, la périphéricité et ce qui conduit de l'une à l'autre, mesurer ce qui change
quand on s'éloigne du centre. Le faire par le bas, en éprouvant les espaces, par des pratiques, sans passer
dans un premier temps par un construit scientifique qui dirait des densités décroissantes, des seuils, des
revenus par habitant ou des fonctions urbaines différenciées. Le faire en tâchant de recueillir des
« impressions », en mobilisant les sens : la vue d'abord, l'ouïe ensuite, sans doute aussi l'odorat, peut-être
un peu le toucher et le goût, et au-delà des sens m'imprégner des ambiances urbaines ; mettre cela en mots,
faire des photos, localiser les lieux sur des cartes conventionnelles pour tenter ensuite d'en construire
d'autres.

Thierry Axelle
1 - Ouvroir de cartographie potentielle (France), 2 - Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Paris-
Malaquais (France)

Les architectes font parler les cartes : retour sur une expérience pédagogique
Architectes, marche, cartographie, art

Cette proposition revient sur le travail que j'ai encadré en février 2017 pendant un workshop (« intensif »)
d'une semaine avec quinze étudiants de l’École Nationale Supérieure d'Architecture de Paris-Malaquais dont
l'objectif était d'ouvrir les étudiants à de nouveaux questionnements et pratiques : la marche comme

                                                        11
Paths Mapping :
                                                                           Travelling, Representing, Mobilizing

méthode de travail et outil d'investigation des lieux, géographie et lecture du paysage, appréhension du
territoire, représentation et cartographie... L'intensif ? La ville, notre horizon? a été présenté aux étudiants de
la manière suivante : Un voyage à quelques minutes de chez vous.
Imaginez un panorama sur la ville, la métropole parisienne à vos pieds, le coteau de Saint-Cloud dans votre
dos... Carnet à la main et bien chaussés, vous sillonnez le même territoire plusieurs jours d'affilée, épuisant
les innombrables caractéristiques rencontrées jusqu'au moindre petit détail urbain. Un intensif qui repose sur
l'expérience de la marche, l'enquête, pour embrasser de façon large l'actualité de la ville, affûter son regard,
se familiariser au paysage, s'interroger sur la fabrique contemporaine des territoires franciliens...?
L'immersion immédiate dans le territoire a constitué le socle de l'intensif : d'abord durant une journée entière,
puis lors d'immersions plus courtes, couplées à des exercices. À l'instar de la « Tentative d'épuisement d'un
lieu » de G. Pérec sur la place Saint-Sulpice, les étudiants ont expérimenté l'épuisement d'un même
territoire, générant ainsi une découverte graduelle des lieux arpentés. Chaque jour les protocoles ont variés
suscitant des regards différents au delà de l'unité de lieu. L'intensif a été structuré autour de trois temps
pédagogiques. Des expériences sensorielles : trois marches (temps d'expérimentation), associées à une
découverte de panoramas sur la ville (temps d'assemblage et synthèse). Des interventions et conférences
en salle (temps d'ouverture et de découverte), complémentaires aux marches, afin d'introduire un certain
nombre de thèmes et problématiques, mais aussi d'enclencher des questionnements sur les différents sujets
abordés. Des moments d'échanges et des séances de production en vue d'une restitution du territoire
parcouru (temps d'effort et de production).
Le territoire choisi s'étendait de Nanterre à Meudon et présentait une richesse de situations, une topographie
très marquée et plusieurs panoramas : Mont Valérien, Grande Arche de la Défense, parc de Saint-Cloud,
terrasses de Meudon... Les tracés des itinéraires étaient issus de mes propres expériences de marcheuse et
ont été préalablement sélectionnés comme terrain d'expérimentation pour l'exercice. D'abord en groupe puis
individuellement, les étudiants ont notamment été amenés à explorer le territoire, à parcourir des tissus
urbains contrastés, à préciser la terminologie architecturale, urbaine et paysagère, à se repérer sur une carte
et dans l'espace, à décrypter des cartes de différente nature (historique, géologique, hydraulique...). Sur la
base de ces arpentages, les étudiants ont alors identifié les limites et frontières dans le territoire, caractérisé
le paysage, identifié les qualités et dysfonctionnements de l'espace urbain, raconté les façons d'habiter,
présenté les lieux traversés sur la base du vécu et de la perception sensorielle de la marche, inventorié ce
que l’œil a capturé. Enfin, il a été demandé aux étudiants de produire par groupe une carte « sensible »
restituant le paysage d'un tronçon du territoire. Il s'agissait d'exploiter les exercices précédents et la diversité
des sujets abordés pour reconstituer un «panorama», une mise en récit commune du territoire traversé. Les
étudiants ont été encouragés à expérimenter différents modes de représentation et à opérer un « saut
d'échelle ». Ils ont pris de la distance vis à vis des cartes analytiques qu'ils produisent habituellement (cartes
vectorielles, à l'échelle, utilisant parfois des données SIG) pour une approche plus libre : corrélation entre
topographie et vues proches et lointaines sur le grand paysage ; réinterprétation de la structure spatiale de la
ville de Sèvres en faisant une transposition médiévale fantasmée des relations entre le centre et ses
abords ; représentation du quartier de la Défense comme un ensemble d'organes irrigué par un réseau
vasculaire... Les fragments du territoire, racontés différemment selon les équipes, leur ont permis de faire
état de la multiplicité de ce qui compose la ville et combien sa complexité peut-être riche et support de pistes
lors de la conception architecturale. La communication détaillera le processus pédagogique en s'appuyant
sur le corpus de cartes produit, à mi-chemin entre production artistique, récit sensoriel, représentation
paysagère, dessin de relevé. Et elle interrogera la façon dont les architectes et urbanistes qui fabriquent le
territoire peuvent exploiter l'outil cartographique et son potentiel : comment exploiter des données tout en
s'en affranchissant pour faire parler autrement les cartes ?

Troin Florence et Guinard Pauline
1 - Cités, Territoires, Environnement et Sociétés (France)
2 - École normale supérieure (France), UMR LAVUE-Mosaïques (France)

Cartographier les parcours de personnages de roman pour saisir la dimension sensible,
performative et identitaire des mobilités : Mélo de Frédéric Ciriez
Cartographie, mobilité, roman, sensible, méthode

En cartographiant et en analysant d'un point de vue spatial les parcours des trois personnages centraux du
triptyque que constitue Mélo, le deuxième roman de Frédéric Ciriez (auteur français contemporain) paru en

                                                        12
Paths Mapping :
                                                                            Travelling, Representing, Mobilizing

2013, nous ambitionnons de nous interroger sur le sens de ces mobilités, notamment dans ce qu'elles nous
révèlent des rapports sensibles des personnages à l'espace. Nous montrerons ainsi que les mobilités de ces
trois personnages sont constitutives non seulement de leur relation à l'espace, en l'occurrence urbain et plus
précisément parisien, mais aussi de leur identité (sociale, culturelle, géographique, etc.). De par leurs
déplacements, tant individuels que collectifs, dans la ville, les personnages de Mélo se construisent donc
eux-mêmes en même temps qu'ils contribuent, de manière performative, à créer l'espace urbain, voire
métropolitain, qu'ils parcourent. Ces mobilités narratives nous invitent, dès lors, à repenser, au-delà et par
delà le roman, la place que les déplacements, compris comme des engagements physiques et sensibles des
corps dans l'espace, prennent dans nos propres pratiques de la ville. En nous concentrant plus
particulièrement sur le personnage de « Parfait de Paris », le chauffeur de camion-bennes congolais, sapeur
à ses heures, nous étudierons plus spécifiquement trois systèmes de mobilités, corrélés à trois régimes de
visibilité, le tout renvoyant à trois modes d'habiter différents. Ceux-ci s'entrelacent et permettent d'élaborer la
thèse du « désir d'ubiquité » de « PP », entre l'ici (Paris) et l'ailleurs (l'Afrique, « Brazza », etc.), d'une part ;
entre un monde de labeur (le jour, dans les rues du Xe arrondissement) et celui de l'apparence (la nuit, à
Montrouge) d'autre part. Par l'emploi d'un nombre considérable de toponymes, l'auteur nous permet de
retracer précisément les itinéraires de « PP », mêlant à ces parcours bruits, odeurs et conditions
météorologiques particulières.
Ces aspects plus sensibles accentuent la notion de « défilement », nous parlent également de
représentations (de racisme ordinaire en particulier), et permettent une analyse urbaine contrastée des
quartiers de Paris, le jour et la nuit. Les « espaces intermédiaires », la proche banlieue, sont aussi
convoqués, lesquels endossent le rôle de « territoires d'intersection » entre les trois personnages principaux
du roman. Enfin, nous confronterons nos analyses avec les intentions et les lectures de l'auteur lui-même,
Frédéric Ciriez, qui a accepté de nous accorder un entretien. En envisageant la réception de l'auteur quant
aux lectures géographiques que nous proposons de son œuvre, nous espérons nourrir le dialogue entre
géographes et auteurs afin que la littérature ne soit pas seulement un objet de recherche mais bien un
support d'échanges nous permettant de mieux comprendre la dimension spatiale de notre rapport au monde,
y compris dans sa dimension sensible. Cela est d'autant plus nécessaire que les géographes qui
s'intéressent à cette question sont souvent démunis, notamment en terme de méthodes, quand il s'agit
d'appréhender cette dimension sensible voire émotionnelle de nos relations à l'espace.

Marcillon David
1 - UMR TERRITOIRES (France)

Between trajectography and geo-narrative, migration and architectural cartographic experiences //
Entre trajectographie et géo-récit, migration et expériences cartographiques architecturales
actuelles
Géographie, récit, trajectographie, opérations cartographiques

Dans le champ de l'architecture contemporaine, les pratiques et opérations cartographiques réalisées par
certains architectes mobilisent de manière spécifique et différenciée la dynamique du parcours, et plus
précisément la représentation de trajectoires de vie(s) en lien avec les phénomènes tragiques et massifs
aujourd'hui sur les réalités et effets des migrations des crises environnementales, guerrières et/ou
économiques. L'architecture est ici prise comme discipline agissant dans la production et la représentation
d'espaces habités, mobilisant les outils de représentation spatiale comme la carte aussi bien pour l'analyse
(toujours spatiale) que pour la conception. Cette discipline développe des compétences dans la capacité à
représenter des phénomènes ou dispositifs spatiaux à différentes échelles (du territoire au détail constructif),
à fabriquer des images, dont les cartes, pour figurer des mondes, pour les mettre en question en faisant
resurgir par la mise en visualisation des situations critiques (la dimension analytique), pour les mettre en
projet en faisant resurgir des dimensions plus sensibles facteurs de dynamiques configuratrices et de
nouveaux agencements spatiaux.
Ainsi, la communication va s'appuyer sur trois expériences cartographiques des trajets migrants, comme
corpus issus des milieux de l'architecture connectés à la recherche ou à l'art, et liées à des supports de
diffusion publique (exposition / livre) où la production cartographique est consubstantielle à la spécificité de
leur démarche :
- « EXIT » des architectes Diller Scofido + Renfro et Laura Kurgan pour l'exposition Terre Natale dirigée par
Raymond Depardon et Paul Virilio (nov. 2008, mars 2009 à la Fondation Quartier à Paris, puis en résonance

                                                         13
Vous pouvez aussi lire