Géopolitique en bref Économie et Stratégie - Banque Nationale
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Géopolitique en bref Économie et Stratégie 29 juin 2020 Des fissures apparaissent dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale Par Angelo Katsoras Introduction Même avant la pandémie, des parties de la chaîne d’approvisionnement alimentaire subissaient des tensions pour diverses raisons – la pénurie d’eau dans un nombre croissant de régions, le changement climatique affectant la production alimentaire dans certains pays, la grippe porcine qui a tué des centaines de millions de porcs l’an dernier et, plus récemment, les pires infestations de sauterelles depuis plusieurs décennies qui ont détruit des récoltes en Afrique orientale et en Asie. La COVID-19 a beaucoup aggravé cette tension. Les éclosions du virus dans des abattoirs, l’arrêt partiel de l’économie et la fermeture des frontières ont encore ajouté du sable dans les rouages de la chaîne d’approvisionnement mondiale. L’importance de la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale Des champs à la table de la cuisine, la chaîne d’approvisionnement alimentaire planétaire représente pas moins de 10% du PIB mondial et emploie plus de 1.5 milliard de personnes. Elle a largement réussi à soutenir le rythme de la demande mondiale au fil des ans. Alors que la population de la Terre a doublé depuis 1970 à 7.7 milliards de personnes, l’approvisionnement en nourriture a été multiplié par plus de trois, pendant la même période. Certains font bien sûr valoir avec raison que cette nourriture n’est pas répartie également et que certains pays connaissent des niveaux élevés d’obésité alors que d’autres ont du mal à combattre l’insuffisance alimentaire. Les prix, pour leur part, ont suivi une longue tendance à la baisse. The Economist estimait récemment qu’un boisseau de maïs et une coupe de bœuf coûtent aujourd’hui moins cher qu’il y a 50 ans, en termes réels. La capacité logistique du secteur alimentaire à répondre à la demande mondiale a été un des facteurs clés de ce succès : les exportations d’aliments ont augmenté de 600% au cours des 30 dernières années.1 Mais cette interconnexion a laissé la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale vulnérable à toute perturbation. Source : « Countries Starting to Hoard Food, Threatening Global Trade », The Telegraph, 25 mars 2020 1 « The global food supply chain is passing a severe test », The Economist, 9 mai 2020
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Cette vulnérabilité a été exacerbée au fil des ans par la domination croissante des marchés par un petit nombre de grandes sociétés. Par exemple, quatre sociétés — JBS du Brésil, Tyson et Cargill des États-Unis et Smithfield Foods d’appartenance chinoise — dominent le secteur mondial de la production de viande. Aux États-Unis, quatre sociétés contrôlent le marché de la volaille,2 alors qu’au Canada, trois usines de transformation de la viande seulement – deux appartenant à JBS et une à Cargill – traitent 85% de toute la viande de bœuf.3 Pourquoi le secteur de la viande est-il si vulnérable à la propagation de la COVID-19? Alors qu’un accroissement de la concentration a permis aux sociétés de baisser les prix des aliments et de réaliser d’immenses économies d’échelle avec des usines moins nombreuses et plus grandes, les événements récents ont prouvé qu’une éclosion de COVID-19 dans quelques établissements suffit à perturber gravement la production nationale. Ces installations sont particulièrement vulnérables à la propagation de la COVID-19 parce que les travailleurs tendent à être postés côte à côte, le long de bandes transporteuses. Le fait que beaucoup de travailleurs immigrés employés dans ces établissements partagent aussi des logements surpeuplés est un autre facteur handicapant. Source : The Global and Mail, avril 2020 Même avant la pandémie de la COVID-19, cependant, les travailleurs du secteur de la viande et de la volaille présentaient depuis longtemps le plus haut taux de maladie de toute profession. En 2016, le U.S. Government Accountability Office estimait que le secteur de la viande et de la volaille avait un taux de maladies de près de 160 cas par 10,000 travailleurs à temps plein en 2013 comparativement à environ 40 cas dans le secteur manufacturier global. 2 « The world’s food system has so far weathered the challenge of covid-19 », The Economist, 9 mai 2020 3 « Everything's on the table », National Post, 16 mai 2020 2
Géopolitique en bref Économie et Stratégie L’éclosion du virus n’a fait qu’amplifier cette réalité un peu plus. À la mi-juin, 25,523 travailleurs du secteur du conditionnement de la viande aux États-Unis étaient atteints de la COVID-19 selon les tests et 89 étaient décédés.4 Le syndicat United Food and Commercial Workers International Union estime que 30% à 50% de travailleurs du secteur à l’échelle nationale étaient encore absents au début de juin soit parce qu’ils étaient en quarantaine soit parce qu’ils craignaient de reprendre le travail. Un rapport publié au début de mai par CoBank, qui est basée dans l’Amérique rurale estimait que la production de porc et de bœuf est en baisse d’environ 35% comparativement à la même époque l’an dernier.5 Pour tenter de freiner la propagation du virus et de convaincre les employés de reprendre le travail, les sociétés transformant la viande ont été forcées de modifier radicalement leurs pratiques. Cela comprenait une réduction du nombre de travailleurs par quart de travail pour permettre la distanciation sociale, l’installation de séparateurs en plastique entre les postes de travail, la fourniture d’équipements de protection individuelle, l’augmentation des salaires et la mise en place de contrôles de la température des employés. En outre, cent sociétés qui gèrent plus de $2,300 milliards d’actifs ont récemment exigé que les sociétés de conditionnement de la viande traitent mieux leurs employés sous peine d’un retrait de leurs investissements. 6 Alors que ces changements opérationnels nécessaires conduiront probablement à une réduction des taux d’infection, ils ont déjà augmenté les coûts d’exploitation. Des pénuries de main-d’œuvre dans le secteur des fruits et légumes Contrairement à la production de céréales, qui est largement mécanisée dans le monde développé, la récolte des fruits et légumes est très difficile à automatiser et, par conséquent, continue d’exiger beaucoup de main-d’œuvre. Dans de nombreux pays, cela a laissé le secteur particulièrement vulnérable aux restrictions des déplacements transfrontaliers qui ont réduit le nombre de travailleurs migrants disponibles. Par exemple : La fermeture des consulats américains au Mexique pourrait signifier qu’un bon nombre des 250,000 visas pour des travailleurs agricoles ne seront pas délivrés cette année. En Italie, la fermeture des frontières aurait bloqué l’arrivée de 200,000 travailleurs agricoles migrants.7 Au Canada, le secteur agricole emploie environ 60,000 travailleurs étrangers temporaires chaque année. La Fédération canadienne de l’agriculture a estimé au début de juin que 16,000 postes restent vacants.8 Rien qu’en Ontario, à la mi-juin, le test de dépistage de la COVID-19 de plus de 600 travailleurs agricoles étrangers avait été positif.9 Pour éviter les éclosions futures, les fermes consacreront davantage d’argent pour mettre à la disposition de ces travailleurs un hébergement moins bondé. Le secteur agricole à forte densité de main-d’œuvre de l’Inde illustre la difficulté de beaucoup de pays en développement à maintenir le confinement Alors même que la pandémie n’était pas maîtrisée, l’Inde a levé le confinement à la fin de mai. Une des grandes raisons de cette décision était que son secteur agricole à forte densité de main-d’œuvre avait désespérément besoin de travailleurs pour assurer la sécurité alimentaire. « Le blé est récolté à la main, pas par des moissonneuses-batteuses; des sacs de pommes de terre en jute sont chargés sur des camions après être passés de mains en mains le long d’une longue chaîne humaine plutôt qu’à l’aide de chariots élévateurs; les œufs arrivent dans les magasins sur le porte-bagages de bicyclettes, pas par camions frigorifiques. Plus de la moitié de l’Inde participe d’une manière ou d’une autre à la culture, la livraison et la vente de produits alimentaires. »10 Pour ajouter aux malheurs de l’agriculture indienne, la pire invasion de sauterelles depuis des décennies a déjà détruit des dizaines de milliers d’hectares de cultures. La FAO estime que, laissé incontrôlé, un nuage de 1 kilomètre de long de sauterelles peut consommer autant de nourriture que 35,000 personnes en un jour. Un épandage massif de pesticides a lieu pour essayer de maîtriser la situation.11 4 « As Meat Plants Stayed Open to Feed Americans, Exports to China Surged », New York Times, 16 juin 2020 5 « CoBank: Meat supplies slow, price increases expected in May, June », Meat & Poultry, 6 mai 2020 6 « Meat Companies Get Pressure from Investors to Improve Working Conditions », Bloomberg, 21 mai 2020 7 « Global food glut sows seeds of doubt for farmers », The Telegraph, 1er mai 2020 8 « The Sprout: Need for more local labourers on farms, CFA says », Ipolitics, 4 juin 2020 9 « Essential but expendable: How Canada failed migrant farm workers », The Globe and Mail, 16 juin 2020 10 « India’s Food Supply Chain Frays as People Stay Home », Wall Street Journal, 8 avril 2020 11 « A plague amid a pandemic: East Africa, West Asia combat surging locust outbreak », NBC news, 22 juin 2020 3
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Source : « Rolling emergency of locust swarms decimating Africa, Asia and Middle East », The Guardian, 8 juin 2020 L’émergence de disparités dans la chaîne d’approvisionnement est un autre défi La chute abrupte de la demande des restaurants, hôtels et cantines scolaires à cause de la COVID-19 a souligné la nécessité pour les agriculteurs de reconfigure leurs chaînes d’approvisionnement des épiceries et de livraison à domicile. Mais cette transition est très difficile parce que les produits alimentaires commerciaux et de grande consommation sont préparés, conditionnés et consommés très différemment. Par exemple : Les restaurants tendent à commander des coupes de viande plus coûteuses que celles que recherchent les acheteurs des supermarchés. Les gens s’alimentent différemment chez eux, constituant des réserves de pain et de pâtes alimentaires et consommant moins de légumes que lorsqu’ils mangent à l’extérieur. Contrairement aux restaurants, les consommateurs n’achètent pas les pommes de terre ou la farine par sacs de 50 kg. Certains grands producteurs d’œufs ne fournissent que les restaurants et les cafeterias, en livrant parfois des fûts de 50 galons d’œufs liquides.12 12 « Where’s the beef? Pandemic exposes cracks in US food system », Christian Science Monitor, 18 mai 2020 4
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Le National Pork Producers Council a estimé que les goulots d’étranglement dans les usines de transformation de la viande créent un retard de traitement de 170,000 porcs par jour aux États-Unis.13 À cause de ces perturbations, beaucoup d’agriculteurs américains ont été forcés d’euthanasier et d’enterrer leurs cochons et beaucoup de maraîchers ont dû laisser pourrir leurs légumes dans les champs au moment où les États-Unis enregistrent une explosion du recours aux banques alimentaires. À plus long terme, il faudra mettre au point des chaînes d’approvisionnement plus polyvalentes (et coûteuses) pour aider les agriculteurs à passer facilement des clients de gros aux clients de détail et inversement. Enfin, le graphique ci-dessous illustre les complexités de la chaîne d’approvisionnement en viande de bœuf du Canada. Un problème à une des étapes de la production peut enrayer tout le processus, particulièrement si la production est concentrée dans un nombre relativement petit d’établissements. Source : « Everything's on the table », National Post, 16 mai 2020 13 « The meat industry is trying to get back to normal. But workers are still getting sick — and shortages may get worse », Washington Post, 8 juin 2020 5
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Nous dirigeons-nous vers une multiplication des restrictions à l’exportation de produits alimentaires? Les perturbations de l’offre mentionnées ci-dessus ont déclenché des craintes d’une pénurie d’aliments et ont conduit de nombreux pays à imposer un contrôle des exportations de produits alimentaires ou à constituer des stocks de nourriture. Des exemples en sont présentés sur la carte ci-dessous. Source : « Agriculture markets eye normality as countries ease export restrictions », S&P Global, 3 juin 2020 La grande crainte c’est qu’une poussée des restrictions du commerce international de produits alimentaires fasse monter les prix davantage. En 2007-2008, 33 pays ont mis en place des restrictions à l’exportation de produits alimentaires. La Banque mondiale a estimé que ces mesures étaient responsables de l’essentiel de l’augmentation moyenne de 116% du prix du riz à l’époque.14 Les perturbations stimulent l’inflation des produits alimentaires aux États-Unis malgré le ralentissement économique mondial Alors que les prix chutent dans de larges pans de l’économie américaine, il y a une exception notoire : les produits alimentaires. Le département du Travail des États-Unis a déclaré que les prix payés par les consommateurs américains pour les produits d’épicerie ont bondi de 2.6% en avril, soit leur plus forte hausse depuis février 1974.15 En mai, les prix ont grimpé de 1% de plus. La même tendance a été observée au Canada. Alors qu’en avril le taux d’inflation général est devenu négatif pour la première fois depuis 2009 (-0.2%), les prix des aliments évoluaient dans le sens contraire, augmentant de 3.4%. 14 « The world’s food system has so far weathered the challenge of covid-19 », The Economist, 19 mai 2020 15 « US grocery costs jump the most in 46 years, led by rising prices for meat and eggs », CNBC, 12 mai 2020 6
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Flambée des prix des produits d’épicerie aux États-Unis Variation mensuelle en pourcentage, corrigée des effets saisonniers 3.00% Avril 2020 2.50% 2.6% 2.00% 1.50% 1.00% 0.50% 0.00% -0.50% -1.00% 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 FBN Économie et Stratégie (données de Federal Reserve Economic Data) Les prix moyens de la viande en ville montent avec la pandémie Bœuf, prix de la viande hachée 100% bœuf, par livre – Porc, côtelettes, prix par livre 4.8 $ 4.6 4.4 Bœuf 4.2 4.0 3.8 3.6 Porc 3.4 3.2 3.0 2.8 2.6 2.4 2.2 2.0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 FBN Économie et Stratégie (données du U.S. Bureau of Labor Statistics) 7
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Le protectionnisme alimentaire fait monter le prix du riz Malgré les projections d’une offre mondiale de riz quasi record en 2020, les prix dans certaines régions ont augmenté à leurs niveaux les plus élevés en sept ans à la mi-avril après l’imposition par plusieurs pays de restrictions à l’exportation en réponse aux craintes pour la sécurité alimentaire. De février à la mi-avril, les prix du riz ont bondi de 10% aux États-Unis, de 32% en Thaïlande et de 25% au Vietnam. Source : « Global trading prices for rice rose to highest level in 7 years due to export restrictions », USDA, 27 mai 2020 La Chine est frappée par des augmentations des prix des aliments encore plus fortes Le prix des aliments en Chine a augmenté de 14.8% en avril par rapport à 12 mois plus tôt. Ce chiffre est nettement inférieur à l’augmentation de 21.8% enregistrée en février, mais est encore loin au-dessus de la hausse minuscule de 0.4% des prix hors produits alimentaires en avril.16 Alors que la Chine aussi a subi des perturbations liées au virus dans sa chaîne d’approvisionnement alimentaire, la montée en flèche des prix des aliments était nettement attribuable au prix de la viande de porc. De fait, au cours des seuls deux derniers mois, les prix du porc ont bondi de 81.7% (mai) et de 96.9% (avril) par rapport aux mêmes périodes l’an dernier.17 Cela s’explique par le fait que la grippe porcine a éliminé plus de la moitié des 440 millions de porcs de la Chine en 2019.18 16 « China stocks up food and oil supplies as coronavirus spurs fears about shortages », CNBC, 1er mai 2020 17 « China producer prices fall as pandemic hits global demand », Financial Times, 10 juin 2020 18 « Special Report: Before coronavirus, China bungled swine epidemic with secrecy », Reuters, 5 mars 2020 8
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Inflation des produits alimentaires en Chine Pourcentage de variation sur douze mois de l’inflation de produits alimentaires (dernières données : avril 2020) 24 Var. a/a (%) +21.9% d’une année 22 à l’autre en février 20 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 -2 -4 -6 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 FBN Économie et Stratégie (données de Refinitiv) La pénurie de porcs a forcé la Chine à importer un volume record de 400,000 tonnes de porc en avril, soit une augmentation de près de 170% par rapport au volume de l’année précédente.19 La Chine à elle seule absorbe la moitié de la consommation mondiale de porc.20 Source : « China's pork imports in April jump 170% to record high », Reuters, 24 mai 2020 19 « April Red Meat Exports Weather Production Challenges, Economic Headwinds », U.S. Meat Export Federation, mai 2020 20 « China loves its pork, but prices are rising and that could be a problem », Washington Post, 9 septembre 2019 9
Géopolitique en bref Économie et Stratégie L’automatisation du secteur agricole va s’accélérer La combinaison des craintes de la propagation de la COVID-19 et l’augmentation des coûts opérationnels ont entraîné un bond de la demande de robots pour cultiver et livrer des produits alimentaires. Voici quelques exemples du genre de robots dont la demande pourrait bondir : FarmWise des États-Unis construit un robot doté d’intelligence artificielle qui lui permet d’identifier des mauvaises herbes à enlever, ce qui aide les agriculteurs à devenir plus efficaces.21 Source : « Five robots that hope to save the US food supply chain », Financial Times, 18 mai 2020 Fabric, une société israélienne, construit des centres de préparation des commandes automatisés. Avant la pandémie, les livraisons des commandes passées en ligne représentaient moins de 5% du marché américain des produits d’épicerie de $682 milliards. Elles devraient grimper à plus de 10% d’ici la fin de 2020. Source : « Five robots that hope to save the US food supply chain », Financial Times, 18 mai 2020 21 « Five robots that hope to save the US food supply chain », Financial Times, 18 mai 2020 10
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Les usines de conditionnement de la viande prochaines cibles de l’automatisation? L’avenir des usines nord-américaines de conditionnement de la viande se trouve peut-être dans un établissement appartenant à Danish Crown, la plus grande société de production de viande d’Europe. L’établissement situé au Danemark a recours à une automatisation poussée, dont des robots pour retirer les organes internes et les tendons et pour fendre la colonne vertébrale. Cela a aidé à maintenir le taux d’infection de la COVID-19 à un niveau négligeable. Danish Crown a commencé à remplacer la main-d’œuvre par des machines il y a déjà de nombreuses années en raison des coûts élevés de main-d’œuvre au Danemark et en Europe en général. Ses contreparties nord-américaines devront probablement suivre son exemple alors que les coûts de la préparation de la viande augmentent aux États-Unis et au Canada.22 Le potentiel d’automatisation dans la préparation de la viande est démontré par un robot mis au point par Scott Technology, une société de Nouvelle-Zélande. JBS, la plus grande société de transformation de viande au monde, détient une participation de contrôle dans la société et utilise le robot pour dépecer des carcasses d’agneaux. Un des deux robots illustrés dans la photo ci-dessous génère un modèle 3D de la carcasse. L’autre découpe la viande en fonction du modèle informatisé produit.23 Votre boucher robotisé de demain Source : « Rise of the robot butchers », Business Insider Australia, août 2018 Enfin, même avant la pandémie, Tyson, un autre grand producteur de viande, prévoyait déjà d’automatiser ses usines de préparation de la viande. En 2019, Tyson a ouvert un établissement de pointe en Arkansas pour aider la société à automatiser sa production de produits alimentaires. La société a déjà investi plus de $215 millions dans la robotique au cours des cinq dernières années.24 22 « Covid-19 Makes the Case for More Meatpacking Robots », Wired, 25 mai 2020 23 « The world's biggest meat producer is planning to test out robot butchers », Business Insider, 26 octobre 2016 24 « New Facility to Boost Tyson Foods’ Automation and Robotics Efforts », Tyson Foods, 9 août 2019 11
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Conclusion En résumé, la COVID-19 s’est abattue sur l’agriculture dans un concours d’événements négatifs – éclosion massive du virus dans les établissements de transformation de la viande, restriction des déplacements limitant la disponibilité de travailleurs migrants, disparités de la chaîne d’approvisionnement, augmentation du protectionnisme – qui a mis sous tension la chaîne d’approvisionnement alimentaire du monde. Les coûts plus élevés générés par ces entraves resteront intégrés dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire longtemps après la fin de la pandémie, parce que les augmentations de salaires, les normes de sécurité plus strictes, l’investissement initial dans la robotisation et les quarts de travail en décalé resteront, pour la plupart, en place. Les coûts d’exploitation augmenteront aussi parce que les sociétés seront forcées d’investir dans des chaînes d’approvisionnement additionnelles afin de renforcer la résilience du système en cas d’événement de type cygne noir à l’avenir. Cependant, il est important de noter que, à plus long terme, les gains d’efficacité potentiels réalisés grâce à l’automatisation pourraient faire baisser les coûts. En outre, un peu comme cela s’est produit pour les fournitures médicales, si des pénuries persistantes d’approvisionnements alimentaires émergent, les pays donneront la priorité à leur marché intérieur avant d’exporter et augmenteront les efforts pour devenir plus autosuffisants. À cet égard, le président français Emmanuel Macron a récemment déclaré que : « déléguer notre alimentation […] au fond est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle ».25 Aux États-Unis, les sénateurs démocrates Elizabeth Warren et Cory Booker pressent les grandes industries de la viande d’expliquer pourquoi ils exportent des quantités records de viande en Chine alors que les États-Unis connaissent eux-mêmes une pénurie de viande. Le département de l’Agriculture a déclaré que le pays a exporté 112,327 tonnes de porc en Chine en avril, soit une augmentation de 257% par rapport à l’année précédente.26 Enfin, devant tous ces défis il ne faut pas oublier que le secteur agricole devra suivre le rythme de la demande mondiale à long terme de nourriture. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l‘agriculture (FAO) estime que la population mondiale augmentera de 7.7 milliards à un peu plus de 10 milliards d’ici 2050. La FAO projette aussi que tout ce monde mangera en moyenne 12% de plus qu’en 2000, dont deux fois plus de viande et de volaille.27 25 “France issues call to 'buy French' as coronavirus erodes single market,” France24, March 28, 2020 26 “U.S. senators question meatpackers over exports to China during pandemic,” Reuters, June 24, 2020 27 “What it will take to avoid a global food shortage,” Bloomberg, June 8, 2020 12
Géopolitique en bref Économie et Stratégie Économie et Stratégie Bureau Montréal Bureau Toronto 514 879-2529 416 869-8598 Stéfane Marion Matthieu Arseneau Warren Lovely Économiste et stratège en chef Chef économiste adjoint Stratège principal Taux d’intérêt, stefane.marion@bnc.ca matthieu.arseneau@bnc.ca Économie et Stratégie warren.lovely@bnc.ca Paul-André Pinsonnault Marc Pinsonneault Économiste principal Économiste principal paulandre.pinsonnault@bnc.ca marc.pinsonneault@bnc.ca Taylor Schleich Kyle Dahms Jocelyn Paquet Angelo Katsoras Associé Stratégie Taux d’intérêt, Économiste Économiste Analyste géopolitique Économie et Stratégie kyle.dahms@bnc.ca jocelyn.paquet@bnc.ca angelo.katsoras@bnc.ca taylor.schleich@bnc.ca Général Le présent rapport a été élaboré par Financière Banque Nationale inc. (FBN), (courtier en valeurs mobilières canadien, membre de l’OCRCVM), filiale en propriété exclusive indirecte de la Banque Nationale du Canada. La Banque Nationale du Canada est une société ouverte inscrite à la Bourse de Toronto. Les renseignements contenus aux présentes ont été obtenus de sources que nous croyons fiables, mais ils ne sont pas garantis, peuvent être incomplets et modifiés sans préavis. Les renseignements sont à jour à la date indiquée dans le présent document. Ni le ou les auteurs ni FBN n’assument quelque obligation que ce soit de mettre ces renseignements à jour ou de communiquer tout fait nouveau concernant les sujets ou les titres évoqués. Les opinions exprimées sont fondées sur l’analyse et l’interprétation du ou des auteurs de ces renseignements, et elles ne doivent pas être interprétées comme une sollicitation ou une offre visant l’achat ou la vente des titres mentionnés dans les présentes, et rien dans le présent rapport ne constitue une déclaration selon laquelle toute stratégie ou recommandation de placement contenue aux présentes convient à la situation individuelle d’un destinataire. Dans tous les cas, les investisseurs doivent mener leurs propres vérifications et analyses de ces renseignements avant de prendre ou d’omettre de prendre toute mesure que ce soit en lien avec les titres ou les marchés qui sont analysés dans le présent rapport. Il importe de ne pas fonder de décisions de placement sur ce seul rapport, qui ne remplace pas un contrôle préalable ou les travaux d’analyse exigés de votre part pour motiver une décision de placement. Le présent rapport ne peut être distribué que dans les cas permis par la loi applicable. Le présent rapport ne s’adresse pas à vous si FBN ou toute société affiliée distribuant le présent rapport fait l’objet d’interdiction ou de restriction de le mettre à votre disposition par quelque loi ou règlement que ce soit dans quelque territoire que ce soit. Avant de lire le présent rapport, vous devriez vous assurer que FBN a l’autorisation de vous le fournir en vertu des lois et règlements en vigueur. Marchés financiers Banque Nationale du Canada est une marque de commerce utilisée par Financière Banque Nationale et National Bank of Canada Financial Inc. Résidents du Canada FBN ou ses sociétés affiliées peuvent appliquer toute stratégie de négociation décrite dans les présentes pour leur propre compte ou sur une base discrétionnaire pour le compte de certains clients; elles peuvent, à mesure que les conditions du marché changent, modifier leur stratégie de placement, notamment en procédant à un désinvestissement intégral. Les positions de négociation de FBN et de ses sociétés affiliées peuvent également être contraires aux opinions exprimées dans le présent rapport. FBN ou ses sociétés affiliées peuvent intervenir comme conseillers financiers, placeurs pour compte ou preneurs fermes pour certains émetteurs mentionnés dans les présentes et recevoir une rémunération pour ces services. De plus, FBN et ses sociétés affiliées, leurs dirigeants, administrateurs, représentants ou adjoints peuvent détenir une position sur les titres mentionnés dans les présentes et effectuer des achats ou des ventes de ces titres à l’occasion, sur les marchés publics ou autrement. FBN, ses sociétés affiliées peuvent agir à titre de teneurs de marché relativement aux titres mentionnés dans le présent rapport. Le présent rapport ne peut pas être considéré comme indépendant des intérêts exclusifs de FBN et de ses sociétés affiliées. Le présent rapport n’est pas considéré comme un produit de recherche en vertu des lois et règlements canadiens. Par conséquent, ce document n’est pas régi par les règles applicables à la publication et à la distribution de rapports de recherche, notamment les restrictions ou renseignements à fournir pertinents qui doivent être inclus dans les rapports de recherche.
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