Géopolitique en bref Économie et Stratégie - Banque Nationale

 
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Des fissures apparaissent dans la chaîne d’approvisionnement
alimentaire mondiale
Par Angelo Katsoras

Introduction
Même avant la pandémie, des parties de la chaîne d’approvisionnement alimentaire subissaient des tensions pour diverses raisons –
la pénurie d’eau dans un nombre croissant de régions, le changement climatique affectant la production alimentaire dans certains
pays, la grippe porcine qui a tué des centaines de millions de porcs l’an dernier et, plus récemment, les pires infestations de sauterelles
depuis plusieurs décennies qui ont détruit des récoltes en Afrique orientale et en Asie.
La COVID-19 a beaucoup aggravé cette tension. Les éclosions du virus dans des abattoirs, l’arrêt partiel de l’économie et la fermeture
des frontières ont encore ajouté du sable dans les rouages de la chaîne d’approvisionnement mondiale.

L’importance de la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale
Des champs à la table de la cuisine, la chaîne d’approvisionnement alimentaire planétaire représente pas moins de 10% du PIB mondial
et emploie plus de 1.5 milliard de personnes. Elle a largement réussi à soutenir le rythme de la demande mondiale au fil des ans. Alors
que la population de la Terre a doublé depuis 1970 à 7.7 milliards de personnes, l’approvisionnement en nourriture a été multiplié par
plus de trois, pendant la même période. Certains font bien sûr valoir avec raison que cette nourriture n’est pas répartie également et
que certains pays connaissent des niveaux élevés d’obésité alors que d’autres ont du mal à combattre l’insuffisance alimentaire.
Les prix, pour leur part, ont suivi une longue tendance à la baisse. The Economist estimait récemment qu’un boisseau de maïs et une coupe
de bœuf coûtent aujourd’hui moins cher qu’il y a 50 ans, en termes réels. La capacité logistique du secteur alimentaire à répondre à la
demande mondiale a été un des facteurs clés de ce succès : les exportations d’aliments ont augmenté de 600% au cours des 30 dernières
années.1 Mais cette interconnexion a laissé la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale vulnérable à toute perturbation.

                               Source : « Countries Starting to Hoard Food, Threatening Global Trade », The Telegraph, 25 mars 2020

1
    « The global food supply chain is passing a severe test », The Economist, 9 mai 2020
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Cette vulnérabilité a été exacerbée au fil des ans par la domination croissante des marchés par un petit nombre de grandes sociétés.
Par exemple, quatre sociétés — JBS du Brésil, Tyson et Cargill des États-Unis et Smithfield Foods d’appartenance chinoise — dominent le
secteur mondial de la production de viande. Aux États-Unis, quatre sociétés contrôlent le marché de la volaille,2 alors qu’au Canada, trois
usines de transformation de la viande seulement – deux appartenant à JBS et une à Cargill – traitent 85% de toute la viande de bœuf.3

Pourquoi le secteur de la viande est-il si vulnérable à la propagation de la COVID-19?
Alors qu’un accroissement de la concentration a permis aux sociétés de baisser les prix des aliments et de réaliser d’immenses économies
d’échelle avec des usines moins nombreuses et plus grandes, les événements récents ont prouvé qu’une éclosion de COVID-19 dans quelques
établissements suffit à perturber gravement la production nationale.
Ces installations sont particulièrement vulnérables à la propagation de la COVID-19 parce que les travailleurs tendent à être postés
côte à côte, le long de bandes transporteuses. Le fait que beaucoup de travailleurs immigrés employés dans ces établissements
partagent aussi des logements surpeuplés est un autre facteur handicapant.

                                                             Source : The Global and Mail, avril 2020

Même avant la pandémie de la COVID-19, cependant, les travailleurs du secteur de la viande et de la volaille présentaient depuis
longtemps le plus haut taux de maladie de toute profession. En 2016, le U.S. Government Accountability Office estimait que le secteur
de la viande et de la volaille avait un taux de maladies de près de 160 cas par 10,000 travailleurs à temps plein en 2013
comparativement à environ 40 cas dans le secteur manufacturier global.

2
    « The world’s food system has so far weathered the challenge of covid-19 », The Economist, 9 mai 2020
3
    « Everything's on the table », National Post, 16 mai 2020

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L’éclosion du virus n’a fait qu’amplifier cette réalité un peu plus. À la mi-juin, 25,523 travailleurs du secteur du conditionnement de la
viande aux États-Unis étaient atteints de la COVID-19 selon les tests et 89 étaient décédés.4 Le syndicat United Food and Commercial
Workers International Union estime que 30% à 50% de travailleurs du secteur à l’échelle nationale étaient encore absents au début de
juin soit parce qu’ils étaient en quarantaine soit parce qu’ils craignaient de reprendre le travail. Un rapport publié au début de mai par
CoBank, qui est basée dans l’Amérique rurale estimait que la production de porc et de bœuf est en baisse d’environ 35%
comparativement à la même époque l’an dernier.5
Pour tenter de freiner la propagation du virus et de convaincre les employés de reprendre le travail, les sociétés transformant la viande
ont été forcées de modifier radicalement leurs pratiques. Cela comprenait une réduction du nombre de travailleurs par quart de travail
pour permettre la distanciation sociale, l’installation de séparateurs en plastique entre les postes de travail, la fourniture d’équipements
de protection individuelle, l’augmentation des salaires et la mise en place de contrôles de la température des employés. En outre, cent
sociétés qui gèrent plus de $2,300 milliards d’actifs ont récemment exigé que les sociétés de conditionnement de la viande traitent
mieux leurs employés sous peine d’un retrait de leurs investissements. 6 Alors que ces changements opérationnels nécessaires
conduiront probablement à une réduction des taux d’infection, ils ont déjà augmenté les coûts d’exploitation.

Des pénuries de main-d’œuvre dans le secteur des fruits et légumes
Contrairement à la production de céréales, qui est largement mécanisée dans le monde développé, la récolte des fruits et légumes
est très difficile à automatiser et, par conséquent, continue d’exiger beaucoup de main-d’œuvre. Dans de nombreux pays, cela a
laissé le secteur particulièrement vulnérable aux restrictions des déplacements transfrontaliers qui ont réduit le nombre de travailleurs
migrants disponibles. Par exemple :
   La fermeture des consulats américains au Mexique pourrait signifier qu’un bon nombre des 250,000 visas pour des travailleurs agricoles ne
    seront pas délivrés cette année.
   En Italie, la fermeture des frontières aurait bloqué l’arrivée de 200,000 travailleurs agricoles migrants.7
   Au Canada, le secteur agricole emploie environ 60,000 travailleurs étrangers temporaires chaque année. La Fédération canadienne
    de l’agriculture a estimé au début de juin que 16,000 postes restent vacants.8 Rien qu’en Ontario, à la mi-juin, le test de dépistage
    de la COVID-19 de plus de 600 travailleurs agricoles étrangers avait été positif.9
Pour éviter les éclosions futures, les fermes consacreront davantage d’argent pour mettre à la disposition de ces travailleurs un
hébergement moins bondé.

Le secteur agricole à forte densité de main-d’œuvre de l’Inde illustre la difficulté de
beaucoup de pays en développement à maintenir le confinement
Alors même que la pandémie n’était pas maîtrisée, l’Inde a levé le confinement à la fin de mai. Une des grandes raisons de cette décision
était que son secteur agricole à forte densité de main-d’œuvre avait désespérément besoin de travailleurs pour assurer la sécurité
alimentaire. « Le blé est récolté à la main, pas par des moissonneuses-batteuses; des sacs de pommes de terre en jute sont chargés sur des
camions après être passés de mains en mains le long d’une longue chaîne humaine plutôt qu’à l’aide de chariots élévateurs; les œufs arrivent
dans les magasins sur le porte-bagages de bicyclettes, pas par camions frigorifiques. Plus de la moitié de l’Inde participe d’une manière ou
d’une autre à la culture, la livraison et la vente de produits alimentaires. »10
Pour ajouter aux malheurs de l’agriculture indienne, la pire invasion de sauterelles depuis des décennies a déjà détruit des dizaines de
milliers d’hectares de cultures. La FAO estime que, laissé incontrôlé, un nuage de 1 kilomètre de long de sauterelles peut consommer
autant de nourriture que 35,000 personnes en un jour. Un épandage massif de pesticides a lieu pour essayer de maîtriser la situation.11

4
   « As Meat Plants Stayed Open to Feed Americans, Exports to China Surged », New York Times, 16 juin 2020
5
   « CoBank: Meat supplies slow, price increases expected in May, June », Meat & Poultry, 6 mai 2020
6
   « Meat Companies Get Pressure from Investors to Improve Working Conditions », Bloomberg, 21 mai 2020
7
   « Global food glut sows seeds of doubt for farmers », The Telegraph, 1er mai 2020
8
   « The Sprout: Need for more local labourers on farms, CFA says », Ipolitics, 4 juin 2020
9
   « Essential but expendable: How Canada failed migrant farm workers », The Globe and Mail, 16 juin 2020
10
    « India’s Food Supply Chain Frays as People Stay Home », Wall Street Journal, 8 avril 2020
11
   « A plague amid a pandemic: East Africa, West Asia combat surging locust outbreak », NBC news, 22 juin 2020

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                        Source : « Rolling emergency of locust swarms decimating Africa, Asia and Middle East », The Guardian, 8 juin 2020

L’émergence de disparités dans la chaîne d’approvisionnement est un autre défi
La chute abrupte de la demande des restaurants, hôtels et cantines scolaires à cause de la COVID-19 a souligné la nécessité pour les
agriculteurs de reconfigure leurs chaînes d’approvisionnement des épiceries et de livraison à domicile. Mais cette transition est très
difficile parce que les produits alimentaires commerciaux et de grande consommation sont préparés, conditionnés et consommés très
différemment. Par exemple :
      Les restaurants tendent à commander des coupes de viande plus coûteuses que celles que recherchent les acheteurs des
       supermarchés.
      Les gens s’alimentent différemment chez eux, constituant des réserves de pain et de pâtes alimentaires et consommant moins de
       légumes que lorsqu’ils mangent à l’extérieur.
      Contrairement aux restaurants, les consommateurs n’achètent pas les pommes de terre ou la farine par sacs de 50 kg.
      Certains grands producteurs d’œufs ne fournissent que les restaurants et les cafeterias, en livrant parfois des fûts de 50 galons
       d’œufs liquides.12

12
     « Where’s the beef? Pandemic exposes cracks in US food system », Christian Science Monitor, 18 mai 2020

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Le National Pork Producers Council a estimé que les goulots d’étranglement dans les usines de transformation de la viande créent un
retard de traitement de 170,000 porcs par jour aux États-Unis.13
À cause de ces perturbations, beaucoup d’agriculteurs américains ont été forcés d’euthanasier et d’enterrer leurs cochons et beaucoup de
maraîchers ont dû laisser pourrir leurs légumes dans les champs au moment où les États-Unis enregistrent une explosion du recours aux
banques alimentaires.
À plus long terme, il faudra mettre au point des chaînes d’approvisionnement plus polyvalentes (et coûteuses) pour aider les
agriculteurs à passer facilement des clients de gros aux clients de détail et inversement.
Enfin, le graphique ci-dessous illustre les complexités de la chaîne d’approvisionnement en viande de bœuf du Canada. Un problème
à une des étapes de la production peut enrayer tout le processus, particulièrement si la production est concentrée dans un nombre
relativement petit d’établissements.

                                                   Source : « Everything's on the table », National Post, 16 mai 2020

13
     « The meat industry is trying to get back to normal. But workers are still getting sick — and shortages may get worse », Washington Post, 8 juin 2020

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Nous dirigeons-nous vers une multiplication des restrictions à l’exportation
de produits alimentaires?
Les perturbations de l’offre mentionnées ci-dessus ont déclenché des craintes d’une pénurie d’aliments et ont conduit de nombreux
pays à imposer un contrôle des exportations de produits alimentaires ou à constituer des stocks de nourriture. Des exemples en sont
présentés sur la carte ci-dessous.

                             Source : « Agriculture markets eye normality as countries ease export restrictions », S&P Global, 3 juin 2020

La grande crainte c’est qu’une poussée des restrictions du commerce international de produits alimentaires fasse monter les prix
davantage. En 2007-2008, 33 pays ont mis en place des restrictions à l’exportation de produits alimentaires. La Banque mondiale a
estimé que ces mesures étaient responsables de l’essentiel de l’augmentation moyenne de 116% du prix du riz à l’époque.14

Les perturbations stimulent l’inflation des produits alimentaires aux États-Unis malgré le
ralentissement économique mondial
Alors que les prix chutent dans de larges pans de l’économie américaine, il y a une exception notoire : les produits alimentaires. Le
département du Travail des États-Unis a déclaré que les prix payés par les consommateurs américains pour les produits d’épicerie ont
bondi de 2.6% en avril, soit leur plus forte hausse depuis février 1974.15 En mai, les prix ont grimpé de 1% de plus. La même tendance a
été observée au Canada. Alors qu’en avril le taux d’inflation général est devenu négatif pour la première fois depuis 2009 (-0.2%), les
prix des aliments évoluaient dans le sens contraire, augmentant de 3.4%.

14
     « The world’s food system has so far weathered the challenge of covid-19 », The Economist, 19 mai 2020
15
     « US grocery costs jump the most in 46 years, led by rising prices for meat and eggs », CNBC, 12 mai 2020

                                                                                                                                             6
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          Flambée des prix des produits d’épicerie aux États-Unis
          Variation mensuelle en pourcentage, corrigée des effets saisonniers

             3.00%

                                                                                                                                Avril 2020
             2.50%                                                                                                                2.6%

             2.00%

             1.50%

             1.00%

             0.50%

             0.00%

            -0.50%

            -1.00%
                  2010          2011       2012       2013        2014       2015          2016      2017      2018      2019         2020
           FBN Économie et Stratégie (données de Federal Reserve Economic Data)

          Les prix moyens de la viande en ville montent avec la pandémie
          Bœuf, prix de la viande hachée 100% bœuf, par livre – Porc, côtelettes, prix par livre

          4.8 $

          4.6

          4.4
                                                                                                                             Bœuf
          4.2

          4.0

          3.8

          3.6                                                                                                                  Porc
          3.4

          3.2

          3.0

          2.8

          2.6

          2.4

          2.2

          2.0
            2010       2011        2012        2013        2014       2015          2016      2017          2018      2019          2020
           FBN Économie et Stratégie (données du U.S. Bureau of Labor Statistics)

                                                                                                                                             7
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Le protectionnisme alimentaire fait monter le prix du riz
Malgré les projections d’une offre mondiale de riz quasi record en 2020, les prix dans certaines régions ont augmenté à leurs niveaux
les plus élevés en sept ans à la mi-avril après l’imposition par plusieurs pays de restrictions à l’exportation en réponse aux craintes pour
la sécurité alimentaire. De février à la mi-avril, les prix du riz ont bondi de 10% aux États-Unis, de 32% en Thaïlande et de 25% au Vietnam.

                     Source : « Global trading prices for rice rose to highest level in 7 years due to export restrictions », USDA, 27 mai 2020

La Chine est frappée par des augmentations des prix des aliments encore plus fortes
Le prix des aliments en Chine a augmenté de 14.8% en avril par rapport à 12 mois plus tôt. Ce chiffre est nettement inférieur à
l’augmentation de 21.8% enregistrée en février, mais est encore loin au-dessus de la hausse minuscule de 0.4% des prix hors produits
alimentaires en avril.16 Alors que la Chine aussi a subi des perturbations liées au virus dans sa chaîne d’approvisionnement alimentaire,
la montée en flèche des prix des aliments était nettement attribuable au prix de la viande de porc. De fait, au cours des seuls deux
derniers mois, les prix du porc ont bondi de 81.7% (mai) et de 96.9% (avril) par rapport aux mêmes périodes l’an dernier.17 Cela s’explique
par le fait que la grippe porcine a éliminé plus de la moitié des 440 millions de porcs de la Chine en 2019.18

16
   « China stocks up food and oil supplies as coronavirus spurs fears about shortages », CNBC, 1er mai 2020
17
   « China producer prices fall as pandemic hits global demand », Financial Times, 10 juin 2020
18
   « Special Report: Before coronavirus, China bungled swine epidemic with secrecy », Reuters, 5 mars 2020

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                       Inflation des produits alimentaires en Chine
                       Pourcentage de variation sur douze mois de l’inflation de produits alimentaires (dernières données : avril 2020)

                        24
                             Var. a/a (%)                                                           +21.9% d’une année
                        22                                                                          à l’autre en février
                        20
                        18
                        16
                        14
                        12
                        10
                         8
                         6
                         4
                         2
                         0
                        -2
                        -4
                        -6
                              2010      2011       2012       2013         2014   2015   2016   2017      2018     2019      2020   2021
                        FBN Économie et Stratégie (données de Refinitiv)

La pénurie de porcs a forcé la Chine à importer un volume record de 400,000 tonnes de porc en avril, soit une augmentation de près de 170%
par rapport au volume de l’année précédente.19 La Chine à elle seule absorbe la moitié de la consommation mondiale de porc.20

                                       Source : « China's pork imports in April jump 170% to record high », Reuters, 24 mai 2020

19
     « April Red Meat Exports Weather Production Challenges, Economic Headwinds », U.S. Meat Export Federation, mai 2020
20
     « China loves its pork, but prices are rising and that could be a problem », Washington Post, 9 septembre 2019

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Géopolitique en bref Économie et Stratégie - Banque Nationale
Géopolitique en bref
Économie et Stratégie

L’automatisation du secteur agricole va s’accélérer
La combinaison des craintes de la propagation de la COVID-19 et l’augmentation des coûts opérationnels ont entraîné un bond de la demande
de robots pour cultiver et livrer des produits alimentaires. Voici quelques exemples du genre de robots dont la demande pourrait bondir :
FarmWise des États-Unis construit un robot doté d’intelligence artificielle qui lui permet d’identifier des mauvaises herbes à enlever, ce
qui aide les agriculteurs à devenir plus efficaces.21

                                  Source : « Five robots that hope to save the US food supply chain », Financial Times, 18 mai 2020

Fabric, une société israélienne, construit des centres de préparation des commandes automatisés. Avant la pandémie, les livraisons
des commandes passées en ligne représentaient moins de 5% du marché américain des produits d’épicerie de $682 milliards. Elles
devraient grimper à plus de 10% d’ici la fin de 2020.

                                  Source : « Five robots that hope to save the US food supply chain », Financial Times, 18 mai 2020

21
     « Five robots that hope to save the US food supply chain », Financial Times, 18 mai 2020

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Géopolitique en bref
Économie et Stratégie

Les usines de conditionnement de la viande prochaines cibles de l’automatisation?
L’avenir des usines nord-américaines de conditionnement de la viande se trouve peut-être dans un établissement appartenant à
Danish Crown, la plus grande société de production de viande d’Europe. L’établissement situé au Danemark a recours à une
automatisation poussée, dont des robots pour retirer les organes internes et les tendons et pour fendre la colonne vertébrale. Cela a
aidé à maintenir le taux d’infection de la COVID-19 à un niveau négligeable. Danish Crown a commencé à remplacer la main-d’œuvre
par des machines il y a déjà de nombreuses années en raison des coûts élevés de main-d’œuvre au Danemark et en Europe en général.
Ses contreparties nord-américaines devront probablement suivre son exemple alors que les coûts de la préparation de la viande
augmentent aux États-Unis et au Canada.22
Le potentiel d’automatisation dans la préparation de la viande est démontré par un robot mis au point par Scott Technology, une
société de Nouvelle-Zélande. JBS, la plus grande société de transformation de viande au monde, détient une participation de contrôle
dans la société et utilise le robot pour dépecer des carcasses d’agneaux. Un des deux robots illustrés dans la photo ci-dessous génère
un modèle 3D de la carcasse. L’autre découpe la viande en fonction du modèle informatisé produit.23

                                                  Votre boucher robotisé de demain

                                          Source : « Rise of the robot butchers », Business Insider Australia, août 2018

Enfin, même avant la pandémie, Tyson, un autre grand producteur de viande, prévoyait déjà d’automatiser ses usines de préparation
de la viande. En 2019, Tyson a ouvert un établissement de pointe en Arkansas pour aider la société à automatiser sa production de
produits alimentaires. La société a déjà investi plus de $215 millions dans la robotique au cours des cinq dernières années.24

22
   « Covid-19 Makes the Case for More Meatpacking Robots », Wired, 25 mai 2020
23
   « The world's biggest meat producer is planning to test out robot butchers », Business Insider, 26 octobre 2016
24
   « New Facility to Boost Tyson Foods’ Automation and Robotics Efforts », Tyson Foods, 9 août 2019

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Géopolitique en bref
Économie et Stratégie

Conclusion
En résumé, la COVID-19 s’est abattue sur l’agriculture dans un concours d’événements négatifs – éclosion massive du virus dans les
établissements de transformation de la viande, restriction des déplacements limitant la disponibilité de travailleurs migrants, disparités
de la chaîne d’approvisionnement, augmentation du protectionnisme – qui a mis sous tension la chaîne d’approvisionnement
alimentaire du monde.
Les coûts plus élevés générés par ces entraves resteront intégrés dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire longtemps après la
fin de la pandémie, parce que les augmentations de salaires, les normes de sécurité plus strictes, l’investissement initial dans la
robotisation et les quarts de travail en décalé resteront, pour la plupart, en place. Les coûts d’exploitation augmenteront aussi parce
que les sociétés seront forcées d’investir dans des chaînes d’approvisionnement additionnelles afin de renforcer la résilience du
système en cas d’événement de type cygne noir à l’avenir. Cependant, il est important de noter que, à plus long terme, les gains
d’efficacité potentiels réalisés grâce à l’automatisation pourraient faire baisser les coûts.
En outre, un peu comme cela s’est produit pour les fournitures médicales, si des pénuries persistantes d’approvisionnements alimentaires
émergent, les pays donneront la priorité à leur marché intérieur avant d’exporter et augmenteront les efforts pour devenir plus
autosuffisants. À cet égard, le président français Emmanuel Macron a récemment déclaré que : « déléguer notre alimentation […] au fond
est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle ».25 Aux États-Unis, les sénateurs démocrates Elizabeth Warren et Cory Booker pressent
les grandes industries de la viande d’expliquer pourquoi ils exportent des quantités records de viande en Chine alors que les États-Unis
connaissent eux-mêmes une pénurie de viande. Le département de l’Agriculture a déclaré que le pays a exporté 112,327 tonnes de porc
en Chine en avril, soit une augmentation de 257% par rapport à l’année précédente.26
Enfin, devant tous ces défis il ne faut pas oublier que le secteur agricole devra suivre le rythme de la demande mondiale à long terme
de nourriture. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l‘agriculture (FAO) estime que la population mondiale augmentera
de 7.7 milliards à un peu plus de 10 milliards d’ici 2050. La FAO projette aussi que tout ce monde mangera en moyenne 12% de plus
qu’en 2000, dont deux fois plus de viande et de volaille.27

25
     “France issues call to 'buy French' as coronavirus erodes single market,” France24, March 28, 2020
26
     “U.S. senators question meatpackers over exports to China during pandemic,” Reuters, June 24, 2020
27
     “What it will take to avoid a global food shortage,” Bloomberg, June 8, 2020

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Géopolitique en bref
Économie et Stratégie

Économie et Stratégie
Bureau Montréal                                                                                                         Bureau Toronto
514 879-2529                                                                                                            416 869-8598
Stéfane Marion                          Matthieu Arseneau                                                               Warren Lovely
Économiste et stratège en chef Chef économiste adjoint                                                                  Stratège principal Taux d’intérêt,
stefane.marion@bnc.ca                   matthieu.arseneau@bnc.ca                                                        Économie et Stratégie
                                                                                                                        warren.lovely@bnc.ca
Paul-André Pinsonnault                  Marc Pinsonneault
Économiste principal                    Économiste principal
paulandre.pinsonnault@bnc.ca            marc.pinsonneault@bnc.ca
                                                                                                                        Taylor Schleich
Kyle Dahms                              Jocelyn Paquet                             Angelo Katsoras                      Associé Stratégie Taux d’intérêt,
Économiste                              Économiste                                 Analyste géopolitique                Économie et Stratégie
kyle.dahms@bnc.ca                       jocelyn.paquet@bnc.ca                      angelo.katsoras@bnc.ca               taylor.schleich@bnc.ca

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