Guide pour la prise en charge du diabétique âgé - 1ère édition Hors-série 1 - Société ...

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Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition

        Guide
        pour la prise en charge
        du diabétique âgé
        1ère édition

                                                                            Hors-série         1
57892

                                                                                   Vol. 2 „ 2008
Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition

   Les médecins de l’intergroupe francophone Diabéto-Gériatrie

    Pr Bernard Bauduceau                            coordonateur ALFEDIAM
    Pr Gilles Berrut
    Pr Jean-Frédéric Blicklé
    Pr Patrice Brocker
    Pr Thierry Constans
    Pr Isabelle Bourdel-Marchasson                  coordonateur SFGG
    Pr Jean Doucet                                  secrétaire et rédacteur
    Dr Anne Fagot-Campagna
    Dr Edgar Kaloustian
    Dr Véronique Lassman-Vague
    Pr Pierre Lecomte
    Dr Dominique Simon
    Pr Daniel Tessier
    Dr Christiane Verny
    Dr Ulrich Vischer

    Avec la collaboration de : Dr L. Bonnevie, Dr X. Chanudet, Dr Y. Haïkel,
    Pr T. Hannedouche, Dr M. Hassan, Dr C. Helmer, Dr T. Krummel, Pr P. Massin,
    Dr A. Miliauskaite, Dr Z. Pataky, Dr D. Selimovic, Dr M. Soell, Dr H. Taillia.

                                       Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Introduction               S69

Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition

                             Introduction

                             L
                                   es personnes diabétiques âgées représentent une fraction
                                   importante et croissante des personnes âgées et des dia-
                                   bétiques. On considère désormais comme « âgées », les
                             personnes de plus de 65 ans polypathologiques ou de plus de
                             75 ans. Les diabétiques âgés associent les problèmes spécifi-
                             ques au vieillissement et au diabète. Le diabète est par ailleurs
                             un facteur de vieillissement accéléré.
                             Depuis 2004, le groupe francophone « Diabéto-Gériatrie » se
                             réunit sous l’égide de l’Association Française pour l’Étude du
                             Diabète et des Maladies Métaboliques (ALFEDIAM) et de la
                             Société Française de Gériatrie et Gérontologie (SFGG). Il a pro-
                             cédé à l’analyse des études publiées sur le diabète du sujet âgé
                             depuis 1990, voire antérieurement. N’ont été considérées que
                             les études dans lesquelles des groupes ou des sous-groupes
                             de diabétiques de plus de 65 ans ont été individualisés. Leur
                             analyse a donné lieu à la publication de deux numéros spéciaux
                             de Diabetes & Metabolism, en décembre 2005 [1] et en avril
                             2007 [2].
                             Ce guide pratique, rédigé en toute indépendance sous la seule
                             responsabilité des membres du groupe, résume les grandes
                             lignes de cette analyse. Il s’adresse à tous les professionnels qui
                             participent à la prise en charge des diabétiques âgés. Il a pour
                             but d’améliorer la prise en charge des diabétiques âgés, qui doit

 Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S70   Introduction

                     associer notamment médecin traitant, diabétologue, gériatre,
                     soignants, et aidants dans une même démarche.
                     Sont abordés successivement les aspects épidémiologiques et
                     les concepts gériatriques, les objectifs glycémiques, les com-
                     plications métaboliques et dégénératives, ainsi que les aspects
                     éducationnels et thérapeutiques.

                     Références
                     [1] Diabetes in the elderly. Diabetes Metab 2005;31(Special issue 2):5S7-
                     5S111
                     [2] Diabetes in the elderly. Part 2. Diabetes Metab 2007;33(Special issue):
                     S1-S86

                                      Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S71

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Impact épidémiologique
du diabète sur la population
âgée en France

                                      E
                                             n France, en 2005, la   allongement de leur espé-
                                             prévalence du dia-      rance de vie des personnes
                                             bète traité par anti-   atteintes, mais également
                                      diabétiques oraux ou insu-     du fait d’une augmentation
                                      line augmentait avec l’âge     de l’incidence du diabète
                                      jusqu’à un maximum de          liée à la fois à l’augmen-
                                      17,7 % chez les hommes         tation de l’obésité et sur-
                                      et 11,5 % chez les femmes      tout au vieillissement de
                                      âgés de 70 à 79 ans. Plus      la population. De 1988 à
                                      de la moitié des diabéti-      1998, le taux d’incidence
                                      ques, soit plus d’un mil-      du diabète, c’est-à-dire de
                                      lion, étaient âgés de plus     personnes nouvellement
                                      de 65 ans. La prévalence       traitées pour un diabète
                                      du diabète devrait encore      au-delà de 65 ans, était
                                      augmenter, en raison d’un      évalué à 3,8 pour 1000
                                      meilleur dépistage du dia-     personnes-années (5,9
                                      bète et des améliorations      pour les hommes et 2,4
                                      de la prise en charge des      pour les femmes) dans le
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Tous droits réservés.                 diabétiques entraînant un      sud-ouest de la France.

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S72

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      Pour illustrer le problème     Le diabète demeure un               les plus âgés. Le diabète,
      de la prise en charge insuf-   facteur de risque de                principalement par ses
      fisante du diabète, un taux    réduction de la qualité de          complications macrovas-
      d’hémoglobine glyquée          vie. Il a un retentissement         culaires, est responsable
      (HbA1c) supérieur ou égal      social avec une augmen-             après 65 ans d’une dimi-
      à 8 % était retrouvé chez      tation des hospitalisations         nution de l’espérance de
      plus d’un diabétique sur       et des admissions en ins-           vie de 3 à 6 ans.
      quatre âgé de plus de 65       titutions d’hébergement             Par conséquent, alors que
      ans en 2001, alors que seu-    gériatrique. Dans les cen-          le poids du diabète s’ac-
      lement un tiers d’entre eux    tres de soins de longue             centue dans la population
      avait bénéficié des trois      durée, où la prévalence             âgée, une surveillance
      dosages annuels recom-         du diabète est particu-             épidémiologique de l’état
      mandés de l’HbA1c.             lièrement élevée (8 % à             de santé, de la qualité des
      Quant au dépistage des         25 %), les soins spéci-             soins et des besoins des
      complications microvas-        fiques au diabète sont              personnes âgées et dia-
      culaires du diabète, il        souvent décrits comme               bétiques apparaît de plus
      était très insuffisant chez    mal adaptés.                        en plus nécessaire afin de
      les personnes âgées en         L’excès de mortalité lié            guider les efforts de santé
      2001.                          au diabète est réel et              publique, en particulier
      L’impact médical, humain       décrit dans d’autres pays,          au sein des institutions
      et socio-économique du         même dans les groupes               gériatriques.
      diabète est lourd chez
      les personnes âgées. Le
      risque cardiovasculaire        Ce qu’il faut retenir en pratique
      des personnes âgées dia-
                                      - En France, la prévalence du diabète augmente avec
      bétiques est élevé, ce qui
                                      l’âge jusqu’à un pic de 18 % chez les hommes et 12 %
      augmente d’autant le ris-
                                      chez les femmes entre 70 et 79 ans.
      que de complications du
                                      - Globalement, la prise en charge des diabétiques
      diabète, mais également
                                      âgés de plus de 65 ans est encore insuffisante ou
      d’altération des fonctions
                                      inadaptée.
      cognitives, de dépen-
                                      - L’impact médical, humain et socio-économique du
      dance et de diminution de
                                      diabète chez la personne âgée est important.
      la mobilité.

                                             Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S73

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Patient diabétique âgé :
concepts de fragilité
et d’évaluation gérontologique

                                      L
                                            es concepts de modes       Le traitement du diabète
                                            différents de vieillis-    en lui-même peut aussi
                                            sement et de fragilité     altérer la qualité de vie.
                                      émergent en réponse au           La définition de la fragi-
                                      besoin de construire des         lité n’est pas univoque en
                                      stratégies de prévention         raison de critères nom-
                                      et de traitement chez les        breux et le plus souvent
                                      personnes âgées et très          liés entre eux. Parmi les
                                      âgées. La fragilité repré-       critères cliniques, l’âge
                                      sente les états intermé-         exerce un effet continu
                                      diaires entre vieillissement     sur la fragilité après 65
                                      réussi, avec autonomie           ans, mais la borne de
                                      fonctionnelle complète, et       80 ans est communé-
                                      dépendance irréversible          ment utilisée pour défi-
                                      ou vieillissement patholo-       nir la fragilité (tableau I).
                                      gique. Le diabétique âgé         Cette fragilité n’est pas
                                      et surtout très âgé est « fra-   seulement médicale
                                      gile » à plusieurs titres. Le    mais aussi sociale, et elle
                                      diabète diminue les chan-        comporte des critères
                                      ces de vieillissement réussi,    familiaux et socio-écono-
                                      augmente notamment les           miques. Certains critères
                                      limitations fonctionnelles       biologiques sont encore
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Tous droits réservés.                 et altère la qualité de vie.     sujets à controverse.

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S74

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

       Tableau I : Critères cliniques et sociaux de fragilité

       Catégorie                            Critère

       Âge                                  Effet continu après 65 ans

       Sexe                                 Masculin

       Pathologies                          Accident vasculaire cérébral
                                            Pathologies chroniques invalidantes
                                            Cancer
                                            Diabète
                                            Polypathologie et polypharmacie

       Dépendance fonctionnelle             Besoin d’aide pour la préparation des repas,
                                            les courses et le ménage
                                            Atteinte de la mobilité
                                            Marche lente
                                            Déficits sensoriels

       Syndromes gériatriques               Confusion mentale
                                            Malnutrition
                                            Chutes
                                            Incontinence
                                            Escarres
                                            Susceptibilité aux effets secondaires médicamenteux
                                            Déficits sensoriels

       Etat mental                          Dépression
                                            Maladie d’Alzheimer et autres démences au stade léger à
                                            modéré

       Soins                                Contention
                                            Alitement

       Général                              Mauvaise santé subjective

       Social                               Problèmes socio-économiques
                                            Difficultés familiales

      Les atteintes fonctionnelles    cérébrale et cardiaque, l’ar-        ment liées aux pathologies
      sont liées aux complica-        tériopathie oblitérante des          fréquemment associées,
      tions spécifiques du dia-       membres inférieurs et les            comme l’obésité avec ses
      bète, en particulier le défi-   atteintes podologiques               conséquences articulaires,
      cit visuel, les neuropathies,   (amputations). Ces atteintes         la dépression et surtout
      les pathologies vasculaires     fonctionnelles sont égale-           l’hypertension artérielle.

                                               Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Patient diabétique âgé : concepts de fragilité et d’évaluation gérontologique             S75

De mauvaises conditions               ques peut amplifier le pro-          d’autonomie et l’amélio-
sociales, plus fréquentes             blème. Les relations entre           ration de la qualité de vie,
chez les diabétiques, ont             autonomie et niveau de               mais elle semble sans effet
également une influence               contrôle glycémique font             sur la mortalité (tableau II).
délétère sur l’autonomie.             l’objet d’études aux résul-          L’évaluation gérontologi-
Il semble que le diabète              tats contradictoires.                que standardisée permet
ait un retentissement                 Il est désormais recom-              d’identifier les besoins
propre, indépendant de                mandé de dépister les cri-           d’aide des patients qui
ses complications et des              tères cliniques de fragilité         posent un problème de
pathologies associées. Le             chez les personnes âgées             dépendance dans la ges-
diabète pourrait favoriser            diabétiques (tableau I). Une         tion de leur maladie et de
le passage à un niveau                intervention gériatrique fon-        leur traitement. Ceci per-
plus élevé de dépendance,             dée sur la base de l’évalua-         met de mettre en place des
mais aussi freiner le retour          tion gérontologique chez             interventions sur la nutrition
à une dépendance plus                 des personnes fragiles a             et sur l’activité physique,
légère. La sédentarité fré-           montré son efficacité dans           ainsi que de soutien des
quente chez les diabéti-              la prévention de la perte            aidants.

 Tableau II : L’évaluation gérontologique

 Thème                Échelle et évaluation                     Actions possibles
                                                                si perturbation

 État mental
  Cognition           MMSE (mini mental state evaluation)       Consultation mémoire
  Dépression          GDS-15 (geriatric depression scale)       Traitement dépression
  Confusion           CAM (confusion assessment method)         Recherche étiologique

 Risque de            Examen clinique                           Recherche étiologique
 chute                Get up and go test                        Rééducation, activité physique
                      Appui unipodal

 Etat fonctionnel     ADL (activités de la vie quotidienne      Aide à la personne
                      ou besoins de base)                       Aides techniques
                      IADL (activités instrumentales dont       Aide ménagère, auxiliaire de vie sociale
                      activités ménagères, gestion budget       Si incapacité de gestion financière, aide
                      et médicaments, utilisation des           par un proche ou demande de protection
                      transports et du téléphone)               juridique
                      Déficits sensoriels                       Aides techniques, intervention médico-
                                                                chirurgical, adaptation environnement

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S76

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

       Tableau II : L’évaluation gérontologique (suite)

       Nutrition         IMC (Indice de Masse Corporelle)       Conseil diététique au patient et/ou aux
                         MNA (Mini Nutritional Assessment)      aidants, adaptation des repas
                         Évolution du poids                     Aide ménagère, auxiliaire de vie sociale
                         Test de déglutition                    pour courses et repas
                                                                Portage de repas
       Polypathologie    Examen clinique                        Dépistage cancers
                                                                Hiérarchisation des pathologies
       Risque            Échelle de Braden                      Positionnement
       d’escarre                                                Matériel
                                                                Nutrition et hygiène
                                                                Lever précoce de l’immobilisation
       Douleur           Échelle visuelle analogique            Recherche étiologique
                         Échelles d’hétéro-évaluation           Antalgique à posologie adaptée
                                                                Mesures physiques
                                                                Surveillance adaptée
       Médicaments       Comptage                               Révision du traitement
                         Recherche effets indésirables :        Aide à la prise de médicaments
                         interactions                           Soins infirmiers pour injections
                         Relation bénéfice / risque             (cf. IADL)
       Fonction rénale   Clairance de la créatinine             Adaptations posologiques
                                                                Arrêt de certains traitements
                                                                Recherche étiologique
       Biologie          NFS, Albumine, Protéine Réactive C     Enquête étiologique
       Social            Entourage                              Aide à l’obtention d’aide financière
                         Ressources financières et sociales     publique ou privée (aide sociale, APA,
                         Besoins et capacités des aidants       caisse de retraite, mutuelles ou
                                                                assurances privées)
                                                                Mise en place, suivi du plan d’aide

      Ce qu’il faut retenir en pratique
       - Le diabétique âgé est, pour de nombreuses raisons, en situation de fragilité,
       état intermédiaire entre le vieillissement réussi et la dépendance irréversible ou
       vieillissement pathologique.
       - La fragilité est appréciée par des critères cliniques et sociaux.
       - Une intervention gériatrique avec réalisation d’une évaluation gérontologique chez les
       diabétiques fragiles permet de prévenir la perte d’autonomie et d’améliorer la qualité
       de vie.

                                                 Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S77

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Objectifs glycémiques
au long cours

                                      L
                                             a prise en charge de     initiale, la perte d’autono-
                                             tout diabétique âgé      mie (conséquences des
                                             nécessite de fixer des   maladies chroniques) et
                                      objectifs thérapeutiques,       l’état nutritionnel sont de
                                      notamment glycémiques,          meilleurs marqueurs pro-
                                      adaptés au malade.              nostiques que l’âge. Les
                                      L’étude UKPDS a mon-            objectifs de la prévention
                                      tré chez le diabétique          se définissent en fonction
                                      encore jeune que l’abais-       de l’état actuel du patient,
                                      sement glycémique réduit        de son pronostic et des
                                      le risque de complications      inconvénients prévisibles
                                      microangiopathiques et          du traitement pour le
                                      macroangiopathiques. Il         patient. En conséquence,
                                      n’y a pas à l’heure actuelle    l’objectif thérapeutique
                                      d’étude équivalente chez        au long cours dépend
                                      des personnes de plus           avant tout de l’autonomie
                                      de 65 ans. En revanche,         fonctionnelle du patient
                                      chez les personnes âgées,       âgé : gestion du traite-
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Tous droits réservés.                 la gravité de la situation      ment, suivi du régime,

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S78

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      surveillance de la mala-      le patient fragile ou pré-          récentes (2004), provenant
      die, possibilités de l’en-    sentant un vieillissement           d’un comité des experts
      tourage quand le patient      pathologique. Le tableau I          européens de l’European
      est défaillant. L’objectif    ci-dessous reproduit les            Union Geriatric Medicine
      dépend aussi du choix de      recommandations les plus            Society*.
      vie de la personne, résul-
      tant de la comparaison         Tableau I
      entre les contraintes du
      traitement et le maintien      Patient âgé diabétique            Patient âgé diabétique
      de la qualité de vie.          en « bonne santé »                « fragile »
      Les recommandations            Glycémie à jeun                   Glycémie à jeun
      parues ces 10 dernières        entre 0,90 et 1,26 g/l            entre 1,26 et 1,60 g/l
                                     HbA1c entre 6,5 et 7,5 %          HbA1c entre 7,5 et 8,5 %
      années dans différents
      pays résultent d’avis
      d’experts s’appuyant sur
      leur expérience clinique.     Ce qu’il faut retenir en pratique
      Elles distinguent toujours
                                     - La prise en charge des diabétiques âgés nécessite
      les deux situations : d’une
                                     de fixer des objectifs adaptés à chaque malade.
      part le patient monopa-
                                     - Les objectifs glycémiques diffèrent selon que
      thologique en état de
                                     le diabétique âgé est « en bonne santé apparente »
      « bonne santé », au moins
                                     ou « fragile ».
      apparente, et d’autre part

                                                                        * Clinical guidelines for type 2
                                                                        diabetes mellitus. European
                                                                        diabetes working party for
                                                                        older people 2001-2004.
                                                                        Section E : treatment strategies.
                                                                        I Management of blood glucose
                                                                        in older patients with type 2 dia-
                                                                        betes mellitus. pp.54-62.

                                            Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S79

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Hypoglycémies

                                      L
                                             ’hypoglycémie est        peu spécifiques, notam-
                                             définie par une gly-     ment des vertiges, une
                                             cémie inférieure à       désorientation, une chute
                                      0,60 g/litre. Dans les pays     ou un changement rapide
                                      où la prise en charge est       de comportement. Les
                                      correcte, la morbidité et la    hypoglycémies asympto-
                                      mortalité des hypoglycé-        matiques sont fréquentes,
                                      mies survenant chez les         ce qui souligne l’impor-
                                      diabétiques âgés sont com-      tance des contrôles systé-
                                      parables à celles observées     matiques de glycémie capil-
                                      chez les diabétiques plus       laire. L’éducation du patient
                                      jeunes. Chez le diabétique      et de son entourage sur les
                                      âgé, il faut plus particuliè-   signes et les circonstances
                                      rement prendre garde aux        de survenue des hypo-
                                      hypoglycémies prolongées,       glycémies revêt donc une
                                      souvent nocturnes, en rai-      importance capitale.
                                      son de leurs conséquences       Les hypoglycémies sévères
                                      plus graves.                    (nécessitant le resucrage
                                      Les hypoglycémies modé-         par une tierce personne)
                                      rées sont très fréquentes.      sont relativement rares
                                      Les symptômes d’hypo-           (entre 0,4 et 3 % patients-
                                      glycémie diffèrent de ceux      années selon les traite-
                                      observés chez les per-          ments) mais peuvent avoir
                                      sonnes plus jeunes et leur      des conséquences graves
                                      nombre diminue avec l’âge.      chez la personne âgée :
                                      Les symptômes les plus fré-     syndrome confusionnel
                                      quents sont représentés par     avec parfois séquelles
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Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S80

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      augmentation du risque          cumule souvent tous ces             insulino-secréteurs peuvent
      d’infarctus myocardique,        facteurs de risque d’hypo-          être prolongées et nécessi-
      de troubles du rythme ven-      glycémie sévère.                    tent l’administration intra-
      triculaire, d’accident vascu-   Les risques d’hypoglycé-            veineuse de glucose.
      laire cérébral (surtout chez    mie, notamment d’hypo-              L’éducation du patient et/ou
      les personnes à haut risque     glycémies sévères, sont             de son entourage, ainsi que
      cardio-vasculaire), de bles-    plus importants chez les            l’adaptation dans le temps
      sures ou de fractures. Les      patients traités par insuline       des objectifs glycémiques
      diabétiques avec troubles       (seule ou en association)           et du traitement en fonction
      cognitifs modérés ou sévè-      que les patients traités par        de l’évolution du patient et
      res sont souvent incapables     antidiabétiques oraux, a for-       de l’apparition éventuelle
      de reconnaître les symptô-      tiori si les traitements sont       de co-morbidités sont les
      mes d’hypoglycémie et de        intensifiés et les objectifs        meilleurs moyens de pré-
      se resucrer eux-mêmes.          glycémiques stricts. En             venir les hypoglycémies
      Les plus importants facteurs    revanche, il est admis que          chez les personnes âgées
      de risque d’hypoglycémie        les hypoglycémies sous              diabétiques.
      sont les situations générant
      une diminution de l’alimen-
                                      Ce qu’il faut retenir en pratique
      tation, le changement de
      lieu de soins ou les suites       - Les hypoglycémies (glycémie inférieure à 0,60 g/l)
      d’hospitalisation. Mais cer-      sont plus fréquentes chez les diabétiques âgés en
      taines co-morbidités sont         raison de la coexistence fréquente de plusieurs facteurs
      aussi des facteurs de risque      favorisants.
      d’hypoglycémie : l’insuffi-       - Les hypoglycémies modérées peuvent passer inaper-
      sance rénale surtout, mais        çues, a fortiori en cas de troubles cognitifs préexistants,
      aussi les troubles cognitifs      car elles sont plus souvent pauci-symptomatiques,
      et psychiatriques graves          voire asymptomatiques, et de survenue nocturne et
      (qui entraînent des erreurs       elles peuvent conduire à de sévères complications.
      de prise médicamenteuse           - Les risques d’hypoglycémie sont plus importants chez
      ou alimentaire), les asso-        les insulino-traités mais les hypoglycémies peuvent être
      ciations médicamenteuses          plus prolongées sous sulfamides hypoglycémiants
      qui potentialisent l’activité     (sulfonylurées).
      des sulfamides antidiabéti-       - L’éducation du malade et de son entourage, ainsi
      ques et la polymédication.        que les contrôles des glycémies capillaires et de l’état
      C’est pourquoi le grand âge       nutritionnel, sont fondamentaux pour la prévention.

                                              Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S81

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Hyperosmolarité

                                      L
                                             ’hyperosmolarité dia-     + glycémie (mmol/l) + urée
                                             bétique est le mode       (mmol/l).
                                             habituel de décom-        La séméiologie clinique
                                      pensation d’un diabète de        de l’hyperosmolarité dia-
                                      type 2 chez une personne         bétique peut se résumer,
                                      âgée. Elle peut aussi sur-       d’une part à des troubles
                                      venir chez un patient anté-      de la conscience et/ou
                                      rieurement indemne de            des signes neurologiques
                                      diabète. C’est une urgence       en rapport avec la déshy-
                                      médicale imposant l’hospi-       dratation globale intense,
                                      talisation. La définition de     d’autre part à des signes
                                      l’hyperosmolarité diabéti-       liés à la cause de l’hype-
                                      que n’est pas consensuelle       rosmolarité diabétique,
                                      (osmolarité > 320 mOsm/l         habituellement une infec-
                                      ou 350 mOsm/l selon les          tion. La polypathologie,
                                      auteurs), de même que la         un syndrome démentiel,
                                      valeur de la glycémie parti-     la dénutrition et la perte
                                      cipant à l’hyperosmolarité :     d’autonomie sont fré-
                                      supérieure à 3 g/l, voire        quemment associées.
                                      6 g/l. La natrémie est éle-      Le traitement spécifique
                                      vée. Il n’y a pas d’acidose      de l’hyperosmolarité dia-
                                      ni de cétonémie (corps           bétique fait l’objet de nom-
                                      cétoniques plasmatiques          breux protocoles dont les
                                      < 5 mmol/l). L’osmolarité        principes sont voisins mais
                                      peut être calculée par la for-   dont les modalités prati-
                                      mule suivante : osmolarité       ques de mise en œuvre
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Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S82

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      réhydratation importante        est habituellement plus             cutanées ou autres…)
      et adaptée à la tolérance       aisée que la prise en charge        sont un facteur déclen-
      cardiaque par des solutés       globale du patient a fortiori       chant habituel, a fortiori
      hypotoniques (en l’absence      en cas de troubles cognitifs,       en période de canicule.
      de collapsus cardio-vascu-      de dénutrition, d’infection,        Toutes ces situations doi-
      laire), insulinothérapie (2     de perte d’autonomie et             vent conduire à renforcer
      à 3 U/h au cours des 12         d’escarres.                         la surveillance des glycé-
      premières heures, d’abord       Une prévention efficace             mies capillaires.
      IV, puis sous-cutanée en        consiste à repérer les              L’hyperosmolarité diabéti-
      fonction des glycémies,         sujets à risque. Il s’agit          que reste une affection au
      sans chercher à normali-        essentiellement des                 pronostic sévère compte
      ser la glycémie tant que        patients déments, poly-             tenu des malades chez
      la volémie n’est pas nor-       pathologiques, dépen-               lesquels elle survient : la
      male), apport de potas-         dants pour l’alimentation,          mortalité intra-hospitalière
      sium (selon la kaliémie ini-    présentant des troubles             est de 35 % et la morta-
      tiale et la fonction rénale).   digestifs (diarrhée ou              lité à 1 an est de 69 % ;
      Le déficit hydrique peut        fécalome) et recevant               les facteurs prédictifs de
      être calculé par la formule     des diurétiques ou des              mortalité sont la dépen-
      suivante : Déficit en eau =     corticoïdes. Les infections         dance fonctionnelle et les
      0,6 × poids mesuré ×            (pulmonaires, urinaires,            escarres.
      [1 – (Na mesurée/140)].
      La réhydratation doit être
      surveillée attentivement
      car elle est nécessairement
      importante au début, mais       Ce qu’il faut retenir en pratique
      elle ne doit pas entraîner        - L’hyperosmolarité est une complication métabolique
      de décompensation car-            aiguë redoutable chez les diabétiques âgés de type 2.
      diaque ni d’œdème céré-           - Les malades à risque sont tout particulièrement les
      bral. L’apport de sodium est      personnes démentes, polypathologiques, dépendants
      obligatoire après la correc-      et avec des troubles digestifs.
      tion de l’hypernatrémie, car      - La sémiologie clinique associe notamment troubles
      le pool sodé total est dimi-      neurologiques et déshydratation globale sans cétose.
      nué malgré l’hypernatrémie        - Le traitement associe réhydratation intraveineuse
      initiale. La correction des       importante, insulinothérapie et prise en charge du
      désordres métaboliques            facteur favorisant.

                                              Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S83

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Hypertension artérielle

                                      L
                                            ’hypertension arté-        gistrements ambulatoires
                                            rielle (HTA) est un fac-   (MAPA) peuvent être utiles
                                            teur majeur de risque      car l’effet « blouse blan-
                                      cardiovasculaire chez le         che » est fréquent ; à l’in-
                                      diabétique âgé et participe      verse, certaines HTA dites
                                      à l’aggravation de la réti-      « masquées » ne sont pas
                                      nopathie et de la néphro-        détectées par les mesures
                                      pathie. Pourtant une pres-       au cabinet médical.
                                      sion artérielle supérieure ou    Le bilan étiologique d’une
                                      égale à 140/90 mmHg est          HTA chez le diabétique
                                      retrouvée chez 56 % des          âgé se limite en général
                                      personnes âgées de 65            à l’évaluation du débit
                                      à 74 ans et près de 71 %         de filtration glomérulaire,
                                      de celles de plus de 85          éventuellement complé-
                                      ans dans l’étude ENTRED,         tée par la recherche d’une
                                      avec une utilisation insuffi-    sténose de l’artère rénale
                                      sante des traitements anti-      (écho-doppler).
                                      hypertenseurs.                   Bien qu’il n’y ait pas d’es-
                                      Chez la personne âgée,           sai d’intervention théra-
                                      l’HTA revêt souvent la           peutique spécifique dans
                                      forme d’une HTA systo-           cette population, l’analyse
                                      lique isolée. Les recom-         des sous-groupes de dia-
                                      mandations de mesure de          bétiques âgés inclus dans
                                      la pression artérielle n’ont     les grands essais réalisés
                                      rien de spécifique chez          contre placebo avec des
                                      le diabétique âgé. Les           diurétiques thiazidiques
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Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S84

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      canaux calciques (CB)         le diabétique âgé lors-             de la monothérapie initiale
      ou des inhibiteurs de         que la pression artérielle          dépend : 1) des caracté-
      l’enzyme de conversion        excède 140/80 mmHg,                 ristiques de l’HTA : systo-
      de l’angiotensine (IEC),      voire 130/80 mmHg. La               lique (CB) ou systolo-dias-
      permet de conclure que        valeur cible pour la pres-          tolique ; 2) de la rapidité
      le bénéfice du traitement     sion artérielle (PA) dias-          de l’effet recherché (CB) ;
      antihypertenseur en ter-      tolique est en général              3) des pathologies asso-
      mes de réduction des          fixée à 80 mmHg, sans               ciées, en particulier
      événements cardiovas-         descendre au-dessous                maladie coronarienne
      culaires majeurs (mortalité   de 75 mmHg. En prenant              (bêta-bloquants (BB) ou
      cardiovasculaire, infarctus   comme référence la MAPA,            IEC à fortes doses), insuffi-
      du myocarde et accidents      une PA systolique (PAS)             sance cardiaque (Th, IEC),
      vasculaires cérébraux) et     de 140 mmHg correspon-              antécédents d’AVC (IEC),
      de l’insuffisance cardiaque   drait à une PAS moyenne             atteinte rénale (IEC, anta-
      est identique, voire supé-    diurne de 135 mmHg et               gonistes des récepteurs de
      rieur chez les diabétiques    nocturne de 120 mmHg.               l’angiotensine 2 (ARA-2) ) ;
      âgés à celui observé dans     Les objectifs thérapeuti-           4) du profil de tolérance du
      les groupes de patients       ques sont identiques aux            médicament et notamment
      plus jeunes ou indemnes       seuils d’intervention. Chez         du risque d’hypotension
      de diabète. Le traitement     des patients âgés fragiles          orthostatique.
      anti-hypertenseur ne sem-     ou polypathologiques,               Quelques points spécifi-
      ble toutefois pas réduire     des valeurs de 150/90               ques doivent être souli-
      la mortalité totale chez      mmHg peuvent repré-                 gnés : pour les diurétiques
      les patients de plus de       senter un objectif accep-           thiazidiques et apparentés,
      80 ans et pourrait même       table. Lorsque la PAS               surveiller la clinique (hydra-
      s’accompagner d’une           excède 180 mmHg, il est             tation) et contrôler réguliè-
      légère surmortalité, mal-     recommandé de recher-               rement la fonction rénale
      gré un impact favorable       cher d’abord un abaisse-            et la kaliémie. Il convient
      sur le risque d’accident      ment de 20 à 30 mmHg et             d’éviter les bêta-bloquants
      vasculaire cérébral.          d’ajuster secondairement            qui ne sont pas cardio-
      Actuellement la plupart       le traitement en fonction           sélectifs en association à
      des sociétés savantes         de la tolérance.                    l’insuline ; les bloqueurs
      préconisent l’instau-         Plus que sur des diffé-             des canaux calciques
      ration d’un traitement        rences d’efficacité des             sont une classe hétéro-
      antihypertenseur chez         diverses classes, le choix          gène avec des indications

                                            Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Hypertension artérielle   S85

et des profils d’effets indé-         peutiques font appel à        adapté. Il faut néanmoins
sirables (notamment sur               des classes synergiques       prendre garde aux asso-
la conduction cardiaque)              en tenant compte du           ciations médicamenteu-
différents selon qu’il s’agit         contexte médical et de        ses à potentiel hypo-
des dihydropyridines ou               la tolérance. Un diuréti-     tenseur. La recherche
des non-dihydropyridines ;            que thiazidique devrait       régulière d’une hypoten-
pour les IEC ou ARA-2 (ces            toujours faire partie d’une   sion orthostatique, d’une
derniers étant moins étu-             triple association.           altération de la fonction
diés chez les sujets âgés),           La crainte de l’hypotension   rénale (créatininémie) et
surveiller la fonction rénale         orthostatique, notamment      d’une dyskaliémie lors
et la kaliémie.                       chez les diabétiques âgés     de la surveillance d’un
Les bêta-bloquants et les             ayant une neuropathie         traitement anti-hyperten-
anti-hypertenseurs cen-               autonome, ne doit pas         seur est indispensable,
traux ne sont pas indi-               représenter un frein à la     de même qu’à la suite
qués en monothérapie.                 prescription d’un traite-     de toute augmentation
Les associations théra-               ment anti-hypertenseur        posologique.

Ce qu’il faut retenir en pratique
  - l’HTA est un facteur majeur de risque cardiovasculaire et d’aggravation de la
  microangiopathie insuffisamment pris en charge.
  - Le bénéfice du traitement antihypertenseur sur les évènements cardiovasculaires
  majeurs et sur l’insuffisance cardiaque est important.
  - Un traitement antihypertenseur doit être instauré dès que la PA excède
  140/80 mmHg, voire 130/80 mmHg, avec un objectif tensionnel adapté au contexte
  (fragilité, polypathologie).
  - Le choix de la monothérapie initiale dépend notamment des pathologies associées
  et du risque d’hypotension orthostatique.

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S86

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      Dyslipidémies

                                     L
                                           a prise en charge            de plateau et s’associe à
                                           des dyslipidémies            une lente diminution du
                                           du diabétique âgé            HDL-cholestérol (HDLc).
                                     s’envisage dans un véri-           Ces variations liées au
                                     table contexte de haut             vieillissement paraissent
                                     risque cardiovasculaire.           surtout en rapport avec
                                     Pourtant le LDL-choles-            les modifications pon-
                                     térol (LDLc) est insuffi-          dérales, la diminution de
                                     samment dosé chez près             l’activité physique, les
                                     de 40 % des patients et            co-morbidités et l’état
                                     reste supérieur ou égal à          global de santé. La cor-
                                     1,3 g/l chez une personne          rélation positive entre
                                     sur quatre. Les traite-            cholestérolémie totale
                                     ments hypolipémiants               et mortalité cardiovas-
                                     sont insuffisamment utili-         culaire décroît avec le
                                     sés chez les diabétiques           vieillissement, de même
                                     âgés (environ 45 % des             que l’impact du taux de
                                     personnes âgées de 65 à            LDLc sur l’incidence des
                                     74 ans et 16 % de celles           infarctus du myocarde
                                     de plus de 85 ans).                ou des accidents vascu-
                                     Le taux de LDLc évolue             laires cérébraux (AVC).
                                     avec le vieillissement :           D’autre part, la mortalité
                                     il augmente progressi-             augmente chez les per-
                                     vement jusqu’à 50 ans              sonnes très âgées ayant
                                     chez l’homme, 60 ans               les taux les plus bas de
                                     chez la femme, puis                cholestérol total, mais
      © 2008 – Elsevier Masson SAS
      Tous droits réservés.          diminue après une phase            principalement par cancer

                                            Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Dyslipidémies     S87

et par infection. En revan-           diminue significativement      (en prévention primaire
che, chez les hommes et               le risque d’infarctus myo-     avec microangiopathie
les femmes à partir de                cardique et de mortalité       rétinienne ou rénale, HTA
70 ans, un HDLc inférieur             coronarienne, sans action      ou tabagisme), avec un
à 0,35 g/l reste un facteur           sur les AVC ou la morta-       taux de LDLc inférieur ou
de risque de mortalité                lité totale. D’autre part,     égal à 1,6 g/l, l’atorvas-
cardiovasculaire et d’ac-             chez les diabétiques de        tatine réduit le risque de
cidents coronariens, et un            65 à 80 ans, la simvasta-      premier événement car-
HDLc élevé est associé à              tine réduit le risque global   dio-vasculaire.
une diminution du risque              d’événements cardiovas-        Les fibrates pourraient
d’AVC ischémique. La                  culaires majeurs (infarc-      avoir un intérêt chez les
recherche d’une hypo-                 tus myocardiques non           diabétiques dont le profil
thyroïdie est nécessaire              mortels, mortalité corona-     lipidique s’apparente au
avant la mise en route                rienne, accidents vascu-       syndrome métabolique
d’un traitement.                      laires cérébraux mortels       (hypertriglycéridémie et
Trois études récentes                 ou non, geste de revascu-      diminution du HDLc),
seulement, ayant inclus               larisation), en prévention     mais aucune étude de
des diabétiques âgés,                 primaire ou secondaire,        morbimortalité n’a inclus
ont précisé le bénéfice               quel que soit le taux de       de patients de plus de
potentiel d’un traite-                LDLc. La simvastatine          75 ans.
ment par statine chez les             entraîne également une         Les recommandations
sujets âgés hypercho-                 diminution du risque de        françaises ne sont pas
lestérolémiques jusqu’à               premier AVC, que les           spécifiques du sujet âgé.
75 à 82 ans (selon les                sujets soient diabétiques      Elles ne tiennent donc
études). D’une part, chez             ou non. En revanche,           pas compte de la moin-
les sujets âgés de 70 à               elle n’a pas d’impact          dre valeur pronostique du
82 ans, non déments, en               sur le risque de récidive      LDLc chez le sujet âgé.
prévention secondaire,                d’AVC mais, à la suite         Elles soulignent l’intérêt
ou en prévention pri-                 d’un AVC, elle diminue         de conseils diététiques
maire avec au moins un                le risque de tout autre        associés à toute pres-
autre facteur de risque               accident vasculaire, en        cription d’hypolipémiant.
cardiovasculaire (taba-               particulier coronarien.        Pour les diabétiques en
gisme, HTA, diabète),                 Enfin, jusqu’à 75 ans,         prévention secondaire,
et un LDLc à 1,5 g/l en               chez les diabétiques à         ainsi que les diabétiques
moyenne, la pravastatine              haut risque vasculaire         avec clairance de la créa-

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S88

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      tinine estimée inférieure à   inférieur à 1,3 g/l ; s’il n’y       cas d’insuffisance rénale
      60 ml/min ou protéinurie      a aucun autre facteur de             ou d’hypothyroïdie.
      supérieure à 300 mg/24h,      risque, le LDLc doit être            Après 80 ans, notamment
      ou encore avec au moins       inférieur à 1,6 g/l.                 en prévention primaire,
      2 autres facteurs de ris-     Le choix de la statine               l’indication d’un traite-
      que cardiovasculaire, le      doit tenir compte de la              ment par statine doit être
      traitement par statine doit   fonction rénale et du ris-           évaluée au cas par cas,
      amener le LDLc en des-        que d’interaction médi-              en tenant compte du
      sous de 1 g/l. Si le dia-     camenteuse. L’âge et le              niveau de risque vascu-
      bète évolue depuis moins      diabète sont des facteurs            laire, de l’état nutrition-
      de 5 ans et si, en plus de    de risque de rhabdomyo-              nel et de l’importance
      l’âge, il existe un autre     lyse sous statine, ce qui            des co-morbidités, et en
      facteur de risque vas-        impose de doser les CPK              renforçant les mesures de
      culaire, le LDLc doit être    avant le traitement, en              surveillance.

      Ce qu’il faut retenir en pratique
       - La prise en charge des dyslipidémies du diabétique âgé s’envisage dans un contexte
       de haut risque cardiovasculaire pourtant insuffisamment évalué.
       - Avec le vieillissement, le lien entre le HDLc bas et la mortalité cardiovasculaire
       demeure, alors que la valeur pronostique du LDLc diminue.
       - Trois études récentes ont précisé le bénéfice d’un traitement par statine chez les
       sujets âgés hypercholestérolémiques jusqu’à 75 à 82 ans, en prévention primaire
       ou secondaire.
       - Les recommandations françaises sur la prise en charge de l’hypercholestérolmémie
       concernent aussi les diabétiques âgés, mais jusqu’à 80 ans seulement en prévention
       primaire.

                                             Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S89

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Complications
ophtalmologiques

                                      L
                                            e diabète est la         logique des sujets âgés qui
                                            quatrième cause de       influe sur le dépistage et la
                                            diminution de l’acuité   prise en charge. Les trou-
                                      visuelle chez le sujet âgé     bles visuels des sujets âgés
                                      après la dégénérescence        sont facteurs de morbi-
                                      maculaire de la rétine liée    mortalité, de surmultipli-
                                      à l’âge, la cataracte et le    cation de la fragilité et de
                                      glaucome. En 2001, la          dépression. C’est pourquoi
                                      prévalence de la rétino-       la collaboration étroite entre
                                      pathie et la fréquence de      ophtalmologiste, diabétolo-
                                      traitement par laser étaient   gue et médecin traitant est
                                      estimées respectivement à      indispensable.
                                      8 % et 3,5 % d’après les       La rétinopathie diabétique
                                      médecins, alors que 18 %       du sujet âgé se caracté-
                                      des patients déclaraient       rise par une moindre évo-
                                      avoir eu une photocoagu-       lutivité. La complication
                                      lation. Les complications      rétinienne spécifique en
                                      ophtalmologiques spécifi-      est plus souvent l’œdème
                                      ques s’inscrivent dans une     maculaire qu’une rétinopa-
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Tous droits réservés.                 polypathologie ophtalmo-       thie proliférante.

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S90

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      Un examen ophtalmolo-           mologiste en raison du              ventions thérapeutiques
      gique complet est recom-        risque de majoration des            brutales et dangereuses.
      mandé, car les techni-          signes par les collyres             Certaines situations ont
      ques de dépistage par           mydriatiques.                       quelques spécificités
      photographie rétinienne         L’angiographie rétinienne           chez le diabétique âgé. La
      sont plus souvent prises        n’est pas un examen de              photocoagulation laser est
      en défaut chez les diabé-       dépistage et elle doit res-         plus souvent entravée par
      tiques âgés. Les obstacles      ter exceptionnelle. Les             une cataracte et la fatigue
      sont, d’une part le nombre      sujets âgés notamment               des sujets. La chirurgie de
      croissant de diabétiques        sous bêta-bloquant font             la cataracte chez les dia-
      âgés face à la moindre dis-     partie des sujets à risque          bétiques âgés peut être
      ponibilité des ophtalmolo-      d’accident.                         source de décompensation
      gistes, d’autre part la perte   Le contrôle du diabète,             de la rétinopathie (œdème
      d’autonomie du patient et       le contrôle de la pression          maculaire) ou d’infection ; il
      l’absence d’aidant car le       artérielle (danger des              est souhaitable qu’elle soit
      patient doit être accompa-      poussées hypertensives)             effectuée dans de bonnes
      gné. Pourtant le dépistage      et, avec moins de preuves,          conditions métaboliques
      annuel reste d’autant plus      le contrôle lipidique restent       et de contrôle tensionnel.
      valable qu’il peut permettre    fondamentaux en adaptant            En revanche, les antiagré-
      de diagnostiquer d’autres       les objectifs aux situations        gants plaquettaires n’ont
      atteintes visuelles, fré-       de chaque diabétique âgé            pas d’effet aggravant sur
      quentes chez le sujet âgé.      et en évitant par une stra-         la rétinopathie diabétique
      Cependant, il est possible      tégie pas à pas les inter-          y compris proliférante.
      dans certaines situations
      d’élargir la fréquence de       Ce qu’il faut retenir en pratique
      l’examen ophtalmologi-
      que selon l’état général du       - La rétinopathie diabétique est fréquente et très
      patient, le caractère récent      souvent associée à d’autres pathologies oculaires,
      du diabète, la normalité de       majorant ainsi la perte d’autonomie.
      l’examen ophtalmologique          - Sa complication la plus fréquente est l’œdème
      antérieur et le contexte de       maculaire.
      bon contrôle métabolique          - Un examen ophtalmologique annuel est souhaitable.
      et tensionnel. L’existence        - L’ophtalmologiste doit être informé de l’existence de
      de troubles cognitifs doit        troubles cognitifs et de la totalité des médicaments
      être signalée à l’ophtal-         pris : la présence de l’aidant est indispensable.

                                              Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S91

                                        Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

Néphropathie

                                      L
                                              ’atteinte rénale est      téinurie, avec la créatini-
                                              fréquente chez le dia-    némie, est nécessaire tous
                                              bétique âgé et résulte    les ans, mais les résultats
                                      de l’action conjointe de          doivent être interprétés
                                      l’hyperglycémie, de l’HTA et      en fonction de patholo-
                                      du vieillissement. Elle s’ac-     gies souvent associées
                                      compagne d’une augmen-            comme l’HTA.
                                      tation de la morbi-mortalité      Plus fréquemment que
                                      cardiovasculaire et peut          chez le diabétique plus
                                      conduire à l’insuffisance         jeune, l’altération de la
                                      rénale terminale. En prati-       fonction rénale peut cor-
                                      que, l’estimation du débit de     respondre à d’autres
                                      filtration glomérulaire utilise   causes qu’une glomérulo-
                                      la formule MDRD ou celle          pathie diabétique (notam-
                                      de Cockcroft et Gault chez        ment une néphroangio-
                                      le sujet âgé, la première         sclérose, une uropathie
                                      semblant plus intéressante        obstructive ou une néph-
                                      car sans lien avec les varia-     ropathie interstitielle). Une
                                      tions pondérales. Près du         ponction-biopsie rénale
                                      quart des diabétiques âgés        peut en théorie être pro-
                                      de plus de 65 ans et du tiers     posée en cas : 1) de pro-
                                      des diabétiques de 75 ans         téinurie ou d’insuffisance
                                      ou plus ont une clairance         rénale chez un diabétique
                                      de la créatinine inférieure à     de type 2 indemne de
                                      60 ml/min/m2.                     rétinopathie diabétique ;
                                      Le dosage de la microal-          2) de syndrome néphro-
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Tous droits réservés.                 buminurie puis de la pro-         tique ou d’insuffisance

Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S92

      Guide pour la prise en charge du diabétique âgé

      rénale de début brutal ou       duits de contraste iodés est         L’insuffisance rénale chro-
      de progression rapide ;         primordiale.                         nique nécessite la pres-
      3) de présence de symp-         À partir d’une clairance             cription d’apports vita-
      tômes d’appel vers une          de la créatinine inférieure          mino-calciques. Il n’y a
      étiologie non diabétique        à 60 ml/mn/m2, l’insuffi-            pas de recommandations
      de l’atteinte rénale.           sance rénale nécessite une           spécifiques concernant la
      La prévention primaire de       adaptation du traitement             prise en charge de l’ané-
      la néphropathie diabéti-        antidiabétique en raison             mie par l’érythropoïétine
      que repose sur le contrôle      des risques majorés d’hy-            chez le diabétique âgé
      strict de la glycémie et de     poglycémie avec les sul-             mais il faut veiller à une
      la pression artérielle.         famides hypoglycémiants              correction progressive et
      À partir du stade de            (variables selon le mode             ne pas dépasser la valeur
      microalbuminurie, outre         d’élimination du produit             cible d’hémoglobine de
      la limitation des apports       et l’activité de certains            11-12 g/dl. Il convient
      sodés à 6-8 g de NaCl par       métabolites), et du risque           également de rechercher
      jour, le ralentissement de sa   d’acidose lactique sous              systématiquement une
      progression repose essen-       metformine. Le répaglinide           autre cause d’anémie,
      tiellement sur le blocage       peut être utilisé même à             fréquente sur ce terrain.
      du système rénine-angio-        des stades avancés d’insuf-          La prise en charge du
      tensine par les IEC ou les      fisance rénale (à posologie          diabétique âgé en insuf-
      ARA-2 avec surveillance         réduite), mais son utilisa-          fisance rénale terminale
      notamment de la créatini-       tion n’est pas validée après         se limite à la question de
      némie et de la kaliémie.        75 ans. Les thiazolidinedio-         la modalité d’épuration
      Au stade d’insuffisance         nes (glitazones) peuvent en          extra-rénale puisque la
      rénale débutante, une           théorie être utilisées, mais la      transplantation n’est plus
      limitation des apports pro-     fréquence d’une rétention            une option. L’âge en lui-
      tidiques peut être propo-       sodée et/ou d’une insuffi-           même n’est pas un obsta-
      sée avec prudence après         sance cardiaque chez ces             cle à la dialyse. L’initiation
      enquête alimentaire pour        patients en limite l’usage.          de la dialyse est habituel-
      ne pas majorer une dénu-        L’insuline doit par consé-           lement envisagée dès
      trition. La prévention de la    quent être utilisée chez le          que la clairance de la
      néphrotoxicité des médi-        diabétique âgé insuffisant           créatinine est inférieure à
      caments (notamment les          rénal par manque d’autres            15 ml/mn/1,73 m2. Dans
      anti-inflammatoires non         moyens médicamenteux                 certains cas (démence
      stéroïdiens – AINS) et pro-     utilisables.                         évoluée, co-morbidité

                                               Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
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