Guide pour la prise en charge du diabétique âgé - 1ère édition Hors-série 1 - Société ...
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Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition Guide pour la prise en charge du diabétique âgé 1ère édition Hors-série 1 57892 Vol. 2 2008
Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition Les médecins de l’intergroupe francophone Diabéto-Gériatrie Pr Bernard Bauduceau coordonateur ALFEDIAM Pr Gilles Berrut Pr Jean-Frédéric Blicklé Pr Patrice Brocker Pr Thierry Constans Pr Isabelle Bourdel-Marchasson coordonateur SFGG Pr Jean Doucet secrétaire et rédacteur Dr Anne Fagot-Campagna Dr Edgar Kaloustian Dr Véronique Lassman-Vague Pr Pierre Lecomte Dr Dominique Simon Pr Daniel Tessier Dr Christiane Verny Dr Ulrich Vischer Avec la collaboration de : Dr L. Bonnevie, Dr X. Chanudet, Dr Y. Haïkel, Pr T. Hannedouche, Dr M. Hassan, Dr C. Helmer, Dr T. Krummel, Pr P. Massin, Dr A. Miliauskaite, Dr Z. Pataky, Dr D. Selimovic, Dr M. Soell, Dr H. Taillia. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Introduction S69 Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition Introduction L es personnes diabétiques âgées représentent une fraction importante et croissante des personnes âgées et des dia- bétiques. On considère désormais comme « âgées », les personnes de plus de 65 ans polypathologiques ou de plus de 75 ans. Les diabétiques âgés associent les problèmes spécifi- ques au vieillissement et au diabète. Le diabète est par ailleurs un facteur de vieillissement accéléré. Depuis 2004, le groupe francophone « Diabéto-Gériatrie » se réunit sous l’égide de l’Association Française pour l’Étude du Diabète et des Maladies Métaboliques (ALFEDIAM) et de la Société Française de Gériatrie et Gérontologie (SFGG). Il a pro- cédé à l’analyse des études publiées sur le diabète du sujet âgé depuis 1990, voire antérieurement. N’ont été considérées que les études dans lesquelles des groupes ou des sous-groupes de diabétiques de plus de 65 ans ont été individualisés. Leur analyse a donné lieu à la publication de deux numéros spéciaux de Diabetes & Metabolism, en décembre 2005 [1] et en avril 2007 [2]. Ce guide pratique, rédigé en toute indépendance sous la seule responsabilité des membres du groupe, résume les grandes lignes de cette analyse. Il s’adresse à tous les professionnels qui participent à la prise en charge des diabétiques âgés. Il a pour but d’améliorer la prise en charge des diabétiques âgés, qui doit Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S70 Introduction associer notamment médecin traitant, diabétologue, gériatre, soignants, et aidants dans une même démarche. Sont abordés successivement les aspects épidémiologiques et les concepts gériatriques, les objectifs glycémiques, les com- plications métaboliques et dégénératives, ainsi que les aspects éducationnels et thérapeutiques. Références [1] Diabetes in the elderly. Diabetes Metab 2005;31(Special issue 2):5S7- 5S111 [2] Diabetes in the elderly. Part 2. Diabetes Metab 2007;33(Special issue): S1-S86 Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S71 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Impact épidémiologique du diabète sur la population âgée en France E n France, en 2005, la allongement de leur espé- prévalence du dia- rance de vie des personnes bète traité par anti- atteintes, mais également diabétiques oraux ou insu- du fait d’une augmentation line augmentait avec l’âge de l’incidence du diabète jusqu’à un maximum de liée à la fois à l’augmen- 17,7 % chez les hommes tation de l’obésité et sur- et 11,5 % chez les femmes tout au vieillissement de âgés de 70 à 79 ans. Plus la population. De 1988 à de la moitié des diabéti- 1998, le taux d’incidence ques, soit plus d’un mil- du diabète, c’est-à-dire de lion, étaient âgés de plus personnes nouvellement de 65 ans. La prévalence traitées pour un diabète du diabète devrait encore au-delà de 65 ans, était augmenter, en raison d’un évalué à 3,8 pour 1000 meilleur dépistage du dia- personnes-années (5,9 bète et des améliorations pour les hommes et 2,4 de la prise en charge des pour les femmes) dans le © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. diabétiques entraînant un sud-ouest de la France. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S72 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Pour illustrer le problème Le diabète demeure un les plus âgés. Le diabète, de la prise en charge insuf- facteur de risque de principalement par ses fisante du diabète, un taux réduction de la qualité de complications macrovas- d’hémoglobine glyquée vie. Il a un retentissement culaires, est responsable (HbA1c) supérieur ou égal social avec une augmen- après 65 ans d’une dimi- à 8 % était retrouvé chez tation des hospitalisations nution de l’espérance de plus d’un diabétique sur et des admissions en ins- vie de 3 à 6 ans. quatre âgé de plus de 65 titutions d’hébergement Par conséquent, alors que ans en 2001, alors que seu- gériatrique. Dans les cen- le poids du diabète s’ac- lement un tiers d’entre eux tres de soins de longue centue dans la population avait bénéficié des trois durée, où la prévalence âgée, une surveillance dosages annuels recom- du diabète est particu- épidémiologique de l’état mandés de l’HbA1c. lièrement élevée (8 % à de santé, de la qualité des Quant au dépistage des 25 %), les soins spéci- soins et des besoins des complications microvas- fiques au diabète sont personnes âgées et dia- culaires du diabète, il souvent décrits comme bétiques apparaît de plus était très insuffisant chez mal adaptés. en plus nécessaire afin de les personnes âgées en L’excès de mortalité lié guider les efforts de santé 2001. au diabète est réel et publique, en particulier L’impact médical, humain décrit dans d’autres pays, au sein des institutions et socio-économique du même dans les groupes gériatriques. diabète est lourd chez les personnes âgées. Le risque cardiovasculaire Ce qu’il faut retenir en pratique des personnes âgées dia- - En France, la prévalence du diabète augmente avec bétiques est élevé, ce qui l’âge jusqu’à un pic de 18 % chez les hommes et 12 % augmente d’autant le ris- chez les femmes entre 70 et 79 ans. que de complications du - Globalement, la prise en charge des diabétiques diabète, mais également âgés de plus de 65 ans est encore insuffisante ou d’altération des fonctions inadaptée. cognitives, de dépen- - L’impact médical, humain et socio-économique du dance et de diminution de diabète chez la personne âgée est important. la mobilité. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S73 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Patient diabétique âgé : concepts de fragilité et d’évaluation gérontologique L es concepts de modes Le traitement du diabète différents de vieillis- en lui-même peut aussi sement et de fragilité altérer la qualité de vie. émergent en réponse au La définition de la fragi- besoin de construire des lité n’est pas univoque en stratégies de prévention raison de critères nom- et de traitement chez les breux et le plus souvent personnes âgées et très liés entre eux. Parmi les âgées. La fragilité repré- critères cliniques, l’âge sente les états intermé- exerce un effet continu diaires entre vieillissement sur la fragilité après 65 réussi, avec autonomie ans, mais la borne de fonctionnelle complète, et 80 ans est communé- dépendance irréversible ment utilisée pour défi- ou vieillissement patholo- nir la fragilité (tableau I). gique. Le diabétique âgé Cette fragilité n’est pas et surtout très âgé est « fra- seulement médicale gile » à plusieurs titres. Le mais aussi sociale, et elle diabète diminue les chan- comporte des critères ces de vieillissement réussi, familiaux et socio-écono- augmente notamment les miques. Certains critères limitations fonctionnelles biologiques sont encore © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. et altère la qualité de vie. sujets à controverse. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S74 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Tableau I : Critères cliniques et sociaux de fragilité Catégorie Critère Âge Effet continu après 65 ans Sexe Masculin Pathologies Accident vasculaire cérébral Pathologies chroniques invalidantes Cancer Diabète Polypathologie et polypharmacie Dépendance fonctionnelle Besoin d’aide pour la préparation des repas, les courses et le ménage Atteinte de la mobilité Marche lente Déficits sensoriels Syndromes gériatriques Confusion mentale Malnutrition Chutes Incontinence Escarres Susceptibilité aux effets secondaires médicamenteux Déficits sensoriels Etat mental Dépression Maladie d’Alzheimer et autres démences au stade léger à modéré Soins Contention Alitement Général Mauvaise santé subjective Social Problèmes socio-économiques Difficultés familiales Les atteintes fonctionnelles cérébrale et cardiaque, l’ar- ment liées aux pathologies sont liées aux complica- tériopathie oblitérante des fréquemment associées, tions spécifiques du dia- membres inférieurs et les comme l’obésité avec ses bète, en particulier le défi- atteintes podologiques conséquences articulaires, cit visuel, les neuropathies, (amputations). Ces atteintes la dépression et surtout les pathologies vasculaires fonctionnelles sont égale- l’hypertension artérielle. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Patient diabétique âgé : concepts de fragilité et d’évaluation gérontologique S75 De mauvaises conditions ques peut amplifier le pro- d’autonomie et l’amélio- sociales, plus fréquentes blème. Les relations entre ration de la qualité de vie, chez les diabétiques, ont autonomie et niveau de mais elle semble sans effet également une influence contrôle glycémique font sur la mortalité (tableau II). délétère sur l’autonomie. l’objet d’études aux résul- L’évaluation gérontologi- Il semble que le diabète tats contradictoires. que standardisée permet ait un retentissement Il est désormais recom- d’identifier les besoins propre, indépendant de mandé de dépister les cri- d’aide des patients qui ses complications et des tères cliniques de fragilité posent un problème de pathologies associées. Le chez les personnes âgées dépendance dans la ges- diabète pourrait favoriser diabétiques (tableau I). Une tion de leur maladie et de le passage à un niveau intervention gériatrique fon- leur traitement. Ceci per- plus élevé de dépendance, dée sur la base de l’évalua- met de mettre en place des mais aussi freiner le retour tion gérontologique chez interventions sur la nutrition à une dépendance plus des personnes fragiles a et sur l’activité physique, légère. La sédentarité fré- montré son efficacité dans ainsi que de soutien des quente chez les diabéti- la prévention de la perte aidants. Tableau II : L’évaluation gérontologique Thème Échelle et évaluation Actions possibles si perturbation État mental Cognition MMSE (mini mental state evaluation) Consultation mémoire Dépression GDS-15 (geriatric depression scale) Traitement dépression Confusion CAM (confusion assessment method) Recherche étiologique Risque de Examen clinique Recherche étiologique chute Get up and go test Rééducation, activité physique Appui unipodal Etat fonctionnel ADL (activités de la vie quotidienne Aide à la personne ou besoins de base) Aides techniques IADL (activités instrumentales dont Aide ménagère, auxiliaire de vie sociale activités ménagères, gestion budget Si incapacité de gestion financière, aide et médicaments, utilisation des par un proche ou demande de protection transports et du téléphone) juridique Déficits sensoriels Aides techniques, intervention médico- chirurgical, adaptation environnement Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S76 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Tableau II : L’évaluation gérontologique (suite) Nutrition IMC (Indice de Masse Corporelle) Conseil diététique au patient et/ou aux MNA (Mini Nutritional Assessment) aidants, adaptation des repas Évolution du poids Aide ménagère, auxiliaire de vie sociale Test de déglutition pour courses et repas Portage de repas Polypathologie Examen clinique Dépistage cancers Hiérarchisation des pathologies Risque Échelle de Braden Positionnement d’escarre Matériel Nutrition et hygiène Lever précoce de l’immobilisation Douleur Échelle visuelle analogique Recherche étiologique Échelles d’hétéro-évaluation Antalgique à posologie adaptée Mesures physiques Surveillance adaptée Médicaments Comptage Révision du traitement Recherche effets indésirables : Aide à la prise de médicaments interactions Soins infirmiers pour injections Relation bénéfice / risque (cf. IADL) Fonction rénale Clairance de la créatinine Adaptations posologiques Arrêt de certains traitements Recherche étiologique Biologie NFS, Albumine, Protéine Réactive C Enquête étiologique Social Entourage Aide à l’obtention d’aide financière Ressources financières et sociales publique ou privée (aide sociale, APA, Besoins et capacités des aidants caisse de retraite, mutuelles ou assurances privées) Mise en place, suivi du plan d’aide Ce qu’il faut retenir en pratique - Le diabétique âgé est, pour de nombreuses raisons, en situation de fragilité, état intermédiaire entre le vieillissement réussi et la dépendance irréversible ou vieillissement pathologique. - La fragilité est appréciée par des critères cliniques et sociaux. - Une intervention gériatrique avec réalisation d’une évaluation gérontologique chez les diabétiques fragiles permet de prévenir la perte d’autonomie et d’améliorer la qualité de vie. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S77 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Objectifs glycémiques au long cours L a prise en charge de initiale, la perte d’autono- tout diabétique âgé mie (conséquences des nécessite de fixer des maladies chroniques) et objectifs thérapeutiques, l’état nutritionnel sont de notamment glycémiques, meilleurs marqueurs pro- adaptés au malade. nostiques que l’âge. Les L’étude UKPDS a mon- objectifs de la prévention tré chez le diabétique se définissent en fonction encore jeune que l’abais- de l’état actuel du patient, sement glycémique réduit de son pronostic et des le risque de complications inconvénients prévisibles microangiopathiques et du traitement pour le macroangiopathiques. Il patient. En conséquence, n’y a pas à l’heure actuelle l’objectif thérapeutique d’étude équivalente chez au long cours dépend des personnes de plus avant tout de l’autonomie de 65 ans. En revanche, fonctionnelle du patient chez les personnes âgées, âgé : gestion du traite- © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. la gravité de la situation ment, suivi du régime, Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S78 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé surveillance de la mala- le patient fragile ou pré- récentes (2004), provenant die, possibilités de l’en- sentant un vieillissement d’un comité des experts tourage quand le patient pathologique. Le tableau I européens de l’European est défaillant. L’objectif ci-dessous reproduit les Union Geriatric Medicine dépend aussi du choix de recommandations les plus Society*. vie de la personne, résul- tant de la comparaison Tableau I entre les contraintes du traitement et le maintien Patient âgé diabétique Patient âgé diabétique de la qualité de vie. en « bonne santé » « fragile » Les recommandations Glycémie à jeun Glycémie à jeun parues ces 10 dernières entre 0,90 et 1,26 g/l entre 1,26 et 1,60 g/l HbA1c entre 6,5 et 7,5 % HbA1c entre 7,5 et 8,5 % années dans différents pays résultent d’avis d’experts s’appuyant sur leur expérience clinique. Ce qu’il faut retenir en pratique Elles distinguent toujours - La prise en charge des diabétiques âgés nécessite les deux situations : d’une de fixer des objectifs adaptés à chaque malade. part le patient monopa- - Les objectifs glycémiques diffèrent selon que thologique en état de le diabétique âgé est « en bonne santé apparente » « bonne santé », au moins ou « fragile ». apparente, et d’autre part * Clinical guidelines for type 2 diabetes mellitus. European diabetes working party for older people 2001-2004. Section E : treatment strategies. I Management of blood glucose in older patients with type 2 dia- betes mellitus. pp.54-62. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S79 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Hypoglycémies L ’hypoglycémie est peu spécifiques, notam- définie par une gly- ment des vertiges, une cémie inférieure à désorientation, une chute 0,60 g/litre. Dans les pays ou un changement rapide où la prise en charge est de comportement. Les correcte, la morbidité et la hypoglycémies asympto- mortalité des hypoglycé- matiques sont fréquentes, mies survenant chez les ce qui souligne l’impor- diabétiques âgés sont com- tance des contrôles systé- parables à celles observées matiques de glycémie capil- chez les diabétiques plus laire. L’éducation du patient jeunes. Chez le diabétique et de son entourage sur les âgé, il faut plus particuliè- signes et les circonstances rement prendre garde aux de survenue des hypo- hypoglycémies prolongées, glycémies revêt donc une souvent nocturnes, en rai- importance capitale. son de leurs conséquences Les hypoglycémies sévères plus graves. (nécessitant le resucrage Les hypoglycémies modé- par une tierce personne) rées sont très fréquentes. sont relativement rares Les symptômes d’hypo- (entre 0,4 et 3 % patients- glycémie diffèrent de ceux années selon les traite- observés chez les per- ments) mais peuvent avoir sonnes plus jeunes et leur des conséquences graves nombre diminue avec l’âge. chez la personne âgée : Les symptômes les plus fré- syndrome confusionnel quents sont représentés par avec parfois séquelles © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. des signes neurologiques cognitives permanentes, Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S80 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé augmentation du risque cumule souvent tous ces insulino-secréteurs peuvent d’infarctus myocardique, facteurs de risque d’hypo- être prolongées et nécessi- de troubles du rythme ven- glycémie sévère. tent l’administration intra- triculaire, d’accident vascu- Les risques d’hypoglycé- veineuse de glucose. laire cérébral (surtout chez mie, notamment d’hypo- L’éducation du patient et/ou les personnes à haut risque glycémies sévères, sont de son entourage, ainsi que cardio-vasculaire), de bles- plus importants chez les l’adaptation dans le temps sures ou de fractures. Les patients traités par insuline des objectifs glycémiques diabétiques avec troubles (seule ou en association) et du traitement en fonction cognitifs modérés ou sévè- que les patients traités par de l’évolution du patient et res sont souvent incapables antidiabétiques oraux, a for- de l’apparition éventuelle de reconnaître les symptô- tiori si les traitements sont de co-morbidités sont les mes d’hypoglycémie et de intensifiés et les objectifs meilleurs moyens de pré- se resucrer eux-mêmes. glycémiques stricts. En venir les hypoglycémies Les plus importants facteurs revanche, il est admis que chez les personnes âgées de risque d’hypoglycémie les hypoglycémies sous diabétiques. sont les situations générant une diminution de l’alimen- Ce qu’il faut retenir en pratique tation, le changement de lieu de soins ou les suites - Les hypoglycémies (glycémie inférieure à 0,60 g/l) d’hospitalisation. Mais cer- sont plus fréquentes chez les diabétiques âgés en taines co-morbidités sont raison de la coexistence fréquente de plusieurs facteurs aussi des facteurs de risque favorisants. d’hypoglycémie : l’insuffi- - Les hypoglycémies modérées peuvent passer inaper- sance rénale surtout, mais çues, a fortiori en cas de troubles cognitifs préexistants, aussi les troubles cognitifs car elles sont plus souvent pauci-symptomatiques, et psychiatriques graves voire asymptomatiques, et de survenue nocturne et (qui entraînent des erreurs elles peuvent conduire à de sévères complications. de prise médicamenteuse - Les risques d’hypoglycémie sont plus importants chez ou alimentaire), les asso- les insulino-traités mais les hypoglycémies peuvent être ciations médicamenteuses plus prolongées sous sulfamides hypoglycémiants qui potentialisent l’activité (sulfonylurées). des sulfamides antidiabéti- - L’éducation du malade et de son entourage, ainsi ques et la polymédication. que les contrôles des glycémies capillaires et de l’état C’est pourquoi le grand âge nutritionnel, sont fondamentaux pour la prévention. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S81 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Hyperosmolarité L ’hyperosmolarité dia- + glycémie (mmol/l) + urée bétique est le mode (mmol/l). habituel de décom- La séméiologie clinique pensation d’un diabète de de l’hyperosmolarité dia- type 2 chez une personne bétique peut se résumer, âgée. Elle peut aussi sur- d’une part à des troubles venir chez un patient anté- de la conscience et/ou rieurement indemne de des signes neurologiques diabète. C’est une urgence en rapport avec la déshy- médicale imposant l’hospi- dratation globale intense, talisation. La définition de d’autre part à des signes l’hyperosmolarité diabéti- liés à la cause de l’hype- que n’est pas consensuelle rosmolarité diabétique, (osmolarité > 320 mOsm/l habituellement une infec- ou 350 mOsm/l selon les tion. La polypathologie, auteurs), de même que la un syndrome démentiel, valeur de la glycémie parti- la dénutrition et la perte cipant à l’hyperosmolarité : d’autonomie sont fré- supérieure à 3 g/l, voire quemment associées. 6 g/l. La natrémie est éle- Le traitement spécifique vée. Il n’y a pas d’acidose de l’hyperosmolarité dia- ni de cétonémie (corps bétique fait l’objet de nom- cétoniques plasmatiques breux protocoles dont les < 5 mmol/l). L’osmolarité principes sont voisins mais peut être calculée par la for- dont les modalités prati- mule suivante : osmolarité ques de mise en œuvre © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. plasmatique = 2 (Na + K) diffèrent notablement : Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S82 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé réhydratation importante est habituellement plus cutanées ou autres…) et adaptée à la tolérance aisée que la prise en charge sont un facteur déclen- cardiaque par des solutés globale du patient a fortiori chant habituel, a fortiori hypotoniques (en l’absence en cas de troubles cognitifs, en période de canicule. de collapsus cardio-vascu- de dénutrition, d’infection, Toutes ces situations doi- laire), insulinothérapie (2 de perte d’autonomie et vent conduire à renforcer à 3 U/h au cours des 12 d’escarres. la surveillance des glycé- premières heures, d’abord Une prévention efficace mies capillaires. IV, puis sous-cutanée en consiste à repérer les L’hyperosmolarité diabéti- fonction des glycémies, sujets à risque. Il s’agit que reste une affection au sans chercher à normali- essentiellement des pronostic sévère compte ser la glycémie tant que patients déments, poly- tenu des malades chez la volémie n’est pas nor- pathologiques, dépen- lesquels elle survient : la male), apport de potas- dants pour l’alimentation, mortalité intra-hospitalière sium (selon la kaliémie ini- présentant des troubles est de 35 % et la morta- tiale et la fonction rénale). digestifs (diarrhée ou lité à 1 an est de 69 % ; Le déficit hydrique peut fécalome) et recevant les facteurs prédictifs de être calculé par la formule des diurétiques ou des mortalité sont la dépen- suivante : Déficit en eau = corticoïdes. Les infections dance fonctionnelle et les 0,6 × poids mesuré × (pulmonaires, urinaires, escarres. [1 – (Na mesurée/140)]. La réhydratation doit être surveillée attentivement car elle est nécessairement importante au début, mais Ce qu’il faut retenir en pratique elle ne doit pas entraîner - L’hyperosmolarité est une complication métabolique de décompensation car- aiguë redoutable chez les diabétiques âgés de type 2. diaque ni d’œdème céré- - Les malades à risque sont tout particulièrement les bral. L’apport de sodium est personnes démentes, polypathologiques, dépendants obligatoire après la correc- et avec des troubles digestifs. tion de l’hypernatrémie, car - La sémiologie clinique associe notamment troubles le pool sodé total est dimi- neurologiques et déshydratation globale sans cétose. nué malgré l’hypernatrémie - Le traitement associe réhydratation intraveineuse initiale. La correction des importante, insulinothérapie et prise en charge du désordres métaboliques facteur favorisant. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S83 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Hypertension artérielle L ’hypertension arté- gistrements ambulatoires rielle (HTA) est un fac- (MAPA) peuvent être utiles teur majeur de risque car l’effet « blouse blan- cardiovasculaire chez le che » est fréquent ; à l’in- diabétique âgé et participe verse, certaines HTA dites à l’aggravation de la réti- « masquées » ne sont pas nopathie et de la néphro- détectées par les mesures pathie. Pourtant une pres- au cabinet médical. sion artérielle supérieure ou Le bilan étiologique d’une égale à 140/90 mmHg est HTA chez le diabétique retrouvée chez 56 % des âgé se limite en général personnes âgées de 65 à l’évaluation du débit à 74 ans et près de 71 % de filtration glomérulaire, de celles de plus de 85 éventuellement complé- ans dans l’étude ENTRED, tée par la recherche d’une avec une utilisation insuffi- sténose de l’artère rénale sante des traitements anti- (écho-doppler). hypertenseurs. Bien qu’il n’y ait pas d’es- Chez la personne âgée, sai d’intervention théra- l’HTA revêt souvent la peutique spécifique dans forme d’une HTA systo- cette population, l’analyse lique isolée. Les recom- des sous-groupes de dia- mandations de mesure de bétiques âgés inclus dans la pression artérielle n’ont les grands essais réalisés rien de spécifique chez contre placebo avec des le diabétique âgé. Les diurétiques thiazidiques © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. automesures et les enre- (Th), des bloqueurs des Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S84 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé canaux calciques (CB) le diabétique âgé lors- de la monothérapie initiale ou des inhibiteurs de que la pression artérielle dépend : 1) des caracté- l’enzyme de conversion excède 140/80 mmHg, ristiques de l’HTA : systo- de l’angiotensine (IEC), voire 130/80 mmHg. La lique (CB) ou systolo-dias- permet de conclure que valeur cible pour la pres- tolique ; 2) de la rapidité le bénéfice du traitement sion artérielle (PA) dias- de l’effet recherché (CB) ; antihypertenseur en ter- tolique est en général 3) des pathologies asso- mes de réduction des fixée à 80 mmHg, sans ciées, en particulier événements cardiovas- descendre au-dessous maladie coronarienne culaires majeurs (mortalité de 75 mmHg. En prenant (bêta-bloquants (BB) ou cardiovasculaire, infarctus comme référence la MAPA, IEC à fortes doses), insuffi- du myocarde et accidents une PA systolique (PAS) sance cardiaque (Th, IEC), vasculaires cérébraux) et de 140 mmHg correspon- antécédents d’AVC (IEC), de l’insuffisance cardiaque drait à une PAS moyenne atteinte rénale (IEC, anta- est identique, voire supé- diurne de 135 mmHg et gonistes des récepteurs de rieur chez les diabétiques nocturne de 120 mmHg. l’angiotensine 2 (ARA-2) ) ; âgés à celui observé dans Les objectifs thérapeuti- 4) du profil de tolérance du les groupes de patients ques sont identiques aux médicament et notamment plus jeunes ou indemnes seuils d’intervention. Chez du risque d’hypotension de diabète. Le traitement des patients âgés fragiles orthostatique. anti-hypertenseur ne sem- ou polypathologiques, Quelques points spécifi- ble toutefois pas réduire des valeurs de 150/90 ques doivent être souli- la mortalité totale chez mmHg peuvent repré- gnés : pour les diurétiques les patients de plus de senter un objectif accep- thiazidiques et apparentés, 80 ans et pourrait même table. Lorsque la PAS surveiller la clinique (hydra- s’accompagner d’une excède 180 mmHg, il est tation) et contrôler réguliè- légère surmortalité, mal- recommandé de recher- rement la fonction rénale gré un impact favorable cher d’abord un abaisse- et la kaliémie. Il convient sur le risque d’accident ment de 20 à 30 mmHg et d’éviter les bêta-bloquants vasculaire cérébral. d’ajuster secondairement qui ne sont pas cardio- Actuellement la plupart le traitement en fonction sélectifs en association à des sociétés savantes de la tolérance. l’insuline ; les bloqueurs préconisent l’instau- Plus que sur des diffé- des canaux calciques ration d’un traitement rences d’efficacité des sont une classe hétéro- antihypertenseur chez diverses classes, le choix gène avec des indications Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Hypertension artérielle S85 et des profils d’effets indé- peutiques font appel à adapté. Il faut néanmoins sirables (notamment sur des classes synergiques prendre garde aux asso- la conduction cardiaque) en tenant compte du ciations médicamenteu- différents selon qu’il s’agit contexte médical et de ses à potentiel hypo- des dihydropyridines ou la tolérance. Un diuréti- tenseur. La recherche des non-dihydropyridines ; que thiazidique devrait régulière d’une hypoten- pour les IEC ou ARA-2 (ces toujours faire partie d’une sion orthostatique, d’une derniers étant moins étu- triple association. altération de la fonction diés chez les sujets âgés), La crainte de l’hypotension rénale (créatininémie) et surveiller la fonction rénale orthostatique, notamment d’une dyskaliémie lors et la kaliémie. chez les diabétiques âgés de la surveillance d’un Les bêta-bloquants et les ayant une neuropathie traitement anti-hyperten- anti-hypertenseurs cen- autonome, ne doit pas seur est indispensable, traux ne sont pas indi- représenter un frein à la de même qu’à la suite qués en monothérapie. prescription d’un traite- de toute augmentation Les associations théra- ment anti-hypertenseur posologique. Ce qu’il faut retenir en pratique - l’HTA est un facteur majeur de risque cardiovasculaire et d’aggravation de la microangiopathie insuffisamment pris en charge. - Le bénéfice du traitement antihypertenseur sur les évènements cardiovasculaires majeurs et sur l’insuffisance cardiaque est important. - Un traitement antihypertenseur doit être instauré dès que la PA excède 140/80 mmHg, voire 130/80 mmHg, avec un objectif tensionnel adapté au contexte (fragilité, polypathologie). - Le choix de la monothérapie initiale dépend notamment des pathologies associées et du risque d’hypotension orthostatique. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S86 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Dyslipidémies L a prise en charge de plateau et s’associe à des dyslipidémies une lente diminution du du diabétique âgé HDL-cholestérol (HDLc). s’envisage dans un véri- Ces variations liées au table contexte de haut vieillissement paraissent risque cardiovasculaire. surtout en rapport avec Pourtant le LDL-choles- les modifications pon- térol (LDLc) est insuffi- dérales, la diminution de samment dosé chez près l’activité physique, les de 40 % des patients et co-morbidités et l’état reste supérieur ou égal à global de santé. La cor- 1,3 g/l chez une personne rélation positive entre sur quatre. Les traite- cholestérolémie totale ments hypolipémiants et mortalité cardiovas- sont insuffisamment utili- culaire décroît avec le sés chez les diabétiques vieillissement, de même âgés (environ 45 % des que l’impact du taux de personnes âgées de 65 à LDLc sur l’incidence des 74 ans et 16 % de celles infarctus du myocarde de plus de 85 ans). ou des accidents vascu- Le taux de LDLc évolue laires cérébraux (AVC). avec le vieillissement : D’autre part, la mortalité il augmente progressi- augmente chez les per- vement jusqu’à 50 ans sonnes très âgées ayant chez l’homme, 60 ans les taux les plus bas de chez la femme, puis cholestérol total, mais © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. diminue après une phase principalement par cancer Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
Dyslipidémies S87 et par infection. En revan- diminue significativement (en prévention primaire che, chez les hommes et le risque d’infarctus myo- avec microangiopathie les femmes à partir de cardique et de mortalité rétinienne ou rénale, HTA 70 ans, un HDLc inférieur coronarienne, sans action ou tabagisme), avec un à 0,35 g/l reste un facteur sur les AVC ou la morta- taux de LDLc inférieur ou de risque de mortalité lité totale. D’autre part, égal à 1,6 g/l, l’atorvas- cardiovasculaire et d’ac- chez les diabétiques de tatine réduit le risque de cidents coronariens, et un 65 à 80 ans, la simvasta- premier événement car- HDLc élevé est associé à tine réduit le risque global dio-vasculaire. une diminution du risque d’événements cardiovas- Les fibrates pourraient d’AVC ischémique. La culaires majeurs (infarc- avoir un intérêt chez les recherche d’une hypo- tus myocardiques non diabétiques dont le profil thyroïdie est nécessaire mortels, mortalité corona- lipidique s’apparente au avant la mise en route rienne, accidents vascu- syndrome métabolique d’un traitement. laires cérébraux mortels (hypertriglycéridémie et Trois études récentes ou non, geste de revascu- diminution du HDLc), seulement, ayant inclus larisation), en prévention mais aucune étude de des diabétiques âgés, primaire ou secondaire, morbimortalité n’a inclus ont précisé le bénéfice quel que soit le taux de de patients de plus de potentiel d’un traite- LDLc. La simvastatine 75 ans. ment par statine chez les entraîne également une Les recommandations sujets âgés hypercho- diminution du risque de françaises ne sont pas lestérolémiques jusqu’à premier AVC, que les spécifiques du sujet âgé. 75 à 82 ans (selon les sujets soient diabétiques Elles ne tiennent donc études). D’une part, chez ou non. En revanche, pas compte de la moin- les sujets âgés de 70 à elle n’a pas d’impact dre valeur pronostique du 82 ans, non déments, en sur le risque de récidive LDLc chez le sujet âgé. prévention secondaire, d’AVC mais, à la suite Elles soulignent l’intérêt ou en prévention pri- d’un AVC, elle diminue de conseils diététiques maire avec au moins un le risque de tout autre associés à toute pres- autre facteur de risque accident vasculaire, en cription d’hypolipémiant. cardiovasculaire (taba- particulier coronarien. Pour les diabétiques en gisme, HTA, diabète), Enfin, jusqu’à 75 ans, prévention secondaire, et un LDLc à 1,5 g/l en chez les diabétiques à ainsi que les diabétiques moyenne, la pravastatine haut risque vasculaire avec clairance de la créa- Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S88 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé tinine estimée inférieure à inférieur à 1,3 g/l ; s’il n’y cas d’insuffisance rénale 60 ml/min ou protéinurie a aucun autre facteur de ou d’hypothyroïdie. supérieure à 300 mg/24h, risque, le LDLc doit être Après 80 ans, notamment ou encore avec au moins inférieur à 1,6 g/l. en prévention primaire, 2 autres facteurs de ris- Le choix de la statine l’indication d’un traite- que cardiovasculaire, le doit tenir compte de la ment par statine doit être traitement par statine doit fonction rénale et du ris- évaluée au cas par cas, amener le LDLc en des- que d’interaction médi- en tenant compte du sous de 1 g/l. Si le dia- camenteuse. L’âge et le niveau de risque vascu- bète évolue depuis moins diabète sont des facteurs laire, de l’état nutrition- de 5 ans et si, en plus de de risque de rhabdomyo- nel et de l’importance l’âge, il existe un autre lyse sous statine, ce qui des co-morbidités, et en facteur de risque vas- impose de doser les CPK renforçant les mesures de culaire, le LDLc doit être avant le traitement, en surveillance. Ce qu’il faut retenir en pratique - La prise en charge des dyslipidémies du diabétique âgé s’envisage dans un contexte de haut risque cardiovasculaire pourtant insuffisamment évalué. - Avec le vieillissement, le lien entre le HDLc bas et la mortalité cardiovasculaire demeure, alors que la valeur pronostique du LDLc diminue. - Trois études récentes ont précisé le bénéfice d’un traitement par statine chez les sujets âgés hypercholestérolémiques jusqu’à 75 à 82 ans, en prévention primaire ou secondaire. - Les recommandations françaises sur la prise en charge de l’hypercholestérolmémie concernent aussi les diabétiques âgés, mais jusqu’à 80 ans seulement en prévention primaire. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S89 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Complications ophtalmologiques L e diabète est la logique des sujets âgés qui quatrième cause de influe sur le dépistage et la diminution de l’acuité prise en charge. Les trou- visuelle chez le sujet âgé bles visuels des sujets âgés après la dégénérescence sont facteurs de morbi- maculaire de la rétine liée mortalité, de surmultipli- à l’âge, la cataracte et le cation de la fragilité et de glaucome. En 2001, la dépression. C’est pourquoi prévalence de la rétino- la collaboration étroite entre pathie et la fréquence de ophtalmologiste, diabétolo- traitement par laser étaient gue et médecin traitant est estimées respectivement à indispensable. 8 % et 3,5 % d’après les La rétinopathie diabétique médecins, alors que 18 % du sujet âgé se caracté- des patients déclaraient rise par une moindre évo- avoir eu une photocoagu- lutivité. La complication lation. Les complications rétinienne spécifique en ophtalmologiques spécifi- est plus souvent l’œdème ques s’inscrivent dans une maculaire qu’une rétinopa- © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. polypathologie ophtalmo- thie proliférante. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S90 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Un examen ophtalmolo- mologiste en raison du ventions thérapeutiques gique complet est recom- risque de majoration des brutales et dangereuses. mandé, car les techni- signes par les collyres Certaines situations ont ques de dépistage par mydriatiques. quelques spécificités photographie rétinienne L’angiographie rétinienne chez le diabétique âgé. La sont plus souvent prises n’est pas un examen de photocoagulation laser est en défaut chez les diabé- dépistage et elle doit res- plus souvent entravée par tiques âgés. Les obstacles ter exceptionnelle. Les une cataracte et la fatigue sont, d’une part le nombre sujets âgés notamment des sujets. La chirurgie de croissant de diabétiques sous bêta-bloquant font la cataracte chez les dia- âgés face à la moindre dis- partie des sujets à risque bétiques âgés peut être ponibilité des ophtalmolo- d’accident. source de décompensation gistes, d’autre part la perte Le contrôle du diabète, de la rétinopathie (œdème d’autonomie du patient et le contrôle de la pression maculaire) ou d’infection ; il l’absence d’aidant car le artérielle (danger des est souhaitable qu’elle soit patient doit être accompa- poussées hypertensives) effectuée dans de bonnes gné. Pourtant le dépistage et, avec moins de preuves, conditions métaboliques annuel reste d’autant plus le contrôle lipidique restent et de contrôle tensionnel. valable qu’il peut permettre fondamentaux en adaptant En revanche, les antiagré- de diagnostiquer d’autres les objectifs aux situations gants plaquettaires n’ont atteintes visuelles, fré- de chaque diabétique âgé pas d’effet aggravant sur quentes chez le sujet âgé. et en évitant par une stra- la rétinopathie diabétique Cependant, il est possible tégie pas à pas les inter- y compris proliférante. dans certaines situations d’élargir la fréquence de Ce qu’il faut retenir en pratique l’examen ophtalmologi- que selon l’état général du - La rétinopathie diabétique est fréquente et très patient, le caractère récent souvent associée à d’autres pathologies oculaires, du diabète, la normalité de majorant ainsi la perte d’autonomie. l’examen ophtalmologique - Sa complication la plus fréquente est l’œdème antérieur et le contexte de maculaire. bon contrôle métabolique - Un examen ophtalmologique annuel est souhaitable. et tensionnel. L’existence - L’ophtalmologiste doit être informé de l’existence de de troubles cognitifs doit troubles cognitifs et de la totalité des médicaments être signalée à l’ophtal- pris : la présence de l’aidant est indispensable. Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S91 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé Néphropathie L ’atteinte rénale est téinurie, avec la créatini- fréquente chez le dia- némie, est nécessaire tous bétique âgé et résulte les ans, mais les résultats de l’action conjointe de doivent être interprétés l’hyperglycémie, de l’HTA et en fonction de patholo- du vieillissement. Elle s’ac- gies souvent associées compagne d’une augmen- comme l’HTA. tation de la morbi-mortalité Plus fréquemment que cardiovasculaire et peut chez le diabétique plus conduire à l’insuffisance jeune, l’altération de la rénale terminale. En prati- fonction rénale peut cor- que, l’estimation du débit de respondre à d’autres filtration glomérulaire utilise causes qu’une glomérulo- la formule MDRD ou celle pathie diabétique (notam- de Cockcroft et Gault chez ment une néphroangio- le sujet âgé, la première sclérose, une uropathie semblant plus intéressante obstructive ou une néph- car sans lien avec les varia- ropathie interstitielle). Une tions pondérales. Près du ponction-biopsie rénale quart des diabétiques âgés peut en théorie être pro- de plus de 65 ans et du tiers posée en cas : 1) de pro- des diabétiques de 75 ans téinurie ou d’insuffisance ou plus ont une clairance rénale chez un diabétique de la créatinine inférieure à de type 2 indemne de 60 ml/min/m2. rétinopathie diabétique ; Le dosage de la microal- 2) de syndrome néphro- © 2008 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. buminurie puis de la pro- tique ou d’insuffisance Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
S92 Guide pour la prise en charge du diabétique âgé rénale de début brutal ou duits de contraste iodés est L’insuffisance rénale chro- de progression rapide ; primordiale. nique nécessite la pres- 3) de présence de symp- À partir d’une clairance cription d’apports vita- tômes d’appel vers une de la créatinine inférieure mino-calciques. Il n’y a étiologie non diabétique à 60 ml/mn/m2, l’insuffi- pas de recommandations de l’atteinte rénale. sance rénale nécessite une spécifiques concernant la La prévention primaire de adaptation du traitement prise en charge de l’ané- la néphropathie diabéti- antidiabétique en raison mie par l’érythropoïétine que repose sur le contrôle des risques majorés d’hy- chez le diabétique âgé strict de la glycémie et de poglycémie avec les sul- mais il faut veiller à une la pression artérielle. famides hypoglycémiants correction progressive et À partir du stade de (variables selon le mode ne pas dépasser la valeur microalbuminurie, outre d’élimination du produit cible d’hémoglobine de la limitation des apports et l’activité de certains 11-12 g/dl. Il convient sodés à 6-8 g de NaCl par métabolites), et du risque également de rechercher jour, le ralentissement de sa d’acidose lactique sous systématiquement une progression repose essen- metformine. Le répaglinide autre cause d’anémie, tiellement sur le blocage peut être utilisé même à fréquente sur ce terrain. du système rénine-angio- des stades avancés d’insuf- La prise en charge du tensine par les IEC ou les fisance rénale (à posologie diabétique âgé en insuf- ARA-2 avec surveillance réduite), mais son utilisa- fisance rénale terminale notamment de la créatini- tion n’est pas validée après se limite à la question de némie et de la kaliémie. 75 ans. Les thiazolidinedio- la modalité d’épuration Au stade d’insuffisance nes (glitazones) peuvent en extra-rénale puisque la rénale débutante, une théorie être utilisées, mais la transplantation n’est plus limitation des apports pro- fréquence d’une rétention une option. L’âge en lui- tidiques peut être propo- sodée et/ou d’une insuffi- même n’est pas un obsta- sée avec prudence après sance cardiaque chez ces cle à la dialyse. L’initiation enquête alimentaire pour patients en limite l’usage. de la dialyse est habituel- ne pas majorer une dénu- L’insuline doit par consé- lement envisagée dès trition. La prévention de la quent être utilisée chez le que la clairance de la néphrotoxicité des médi- diabétique âgé insuffisant créatinine est inférieure à caments (notamment les rénal par manque d’autres 15 ml/mn/1,73 m2. Dans anti-inflammatoires non moyens médicamenteux certains cas (démence stéroïdiens – AINS) et pro- utilisables. évoluée, co-morbidité Médecine des maladies Métaboliques - Mars 2008 - Hors-série 1
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